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Tunisie, Libye : un 23 octobre pour toutes les aventures

par Kharroubi Habib
Dimanche 23 octobre, la Tunisie et la Libye ont ouvert une nouvelle page de leur histoire nationale respective. En Tunisie, cela s’est fait sous la forme d’un scrutin dont l’organisation et le déroulement ont été absolument remarquables en termes de normes démocratiques. Ce qui constitue une véritable révolution au Maghreb et dans le monde arabe, où la fraude et le détournement de la volonté populaire ont toujours marqué les consultations électorales. En Libye, ce jour a eu lieu la proclamation officielle par les nouvelles autorités de la «libération» totale du pays et l’avènement d’une «ère de liberté» pour les citoyens maintenant débarrassés de leur ex-« guide de la révolution» et de son régime dictatorial. 
Entre les deux évènements, il y a le lien du «printemps arabe» dont le vent a fini par faire chuter des pouvoirs totalitaires que l’on pensait indéboulonnables. C’est l’évidence que le scrutin tunisien et la proclamation de la «libération» en Libye actent une nouvelle ère dans les deux pays. 
De quoi sera-t-elle faite en chacun d’eux ? C’est la grande question que se posent leurs citoyens, ceux du reste du monde arabe et le monde entier. Et cela parce qu’il ne fait aucun doute que ce qui en découlera aura des incidences «telluriques». Selon en effet de quoi ils vont accoucher, l’on saura si le «printemps arabe» est toujours dans la dynamique de l’émancipation et du recouvrement de la liberté et de la citoyenneté, ou si, au contraire, malgré l’euphorie enthousiaste qu’il suscite, ce printemps n’entame pas déjà sa «glaciation». Dans les deux cas, d’inquiétants indices percent qui font craindre au dévoiement des aspirations populaires qui ont été à l’origine du vent de révolte qui secoue les sociétés du monde arabe. 
L’on veut bien croire que la participation citoyenne en Tunisie au scrutin législatif, absolument remarquable, est le signe que les Tunisiens n’entendent plus se laisser déposséder de leur droit de regard sur ce que sera la Tunisie de l’après-Ben Ali. Que la «libération» de la Libye va déboucher réellement sur les promesses libertaires et démocratiques que le Conseil national de transition s’est engagé à mettre en œuvre. 
Dans les deux pays toutefois, plane la menace que le fleuve de la révolution va être détourné de son cours originel. En Tunisie, ceux qui veulent changer son cours s’avancent en usant du double langage et sans pour l’instant faire preuve de violence. En Libye, ils agissent déjà à visage découvert. Certaines annonces faites par le président du CNT lors de son allocution proclamant la «libération» du pays hypothèquent terriblement l’avenir démocratique de la révolution libyenne tel que solennellement promis. Dans ce pays, il est malheureusement à craindre que la fin de la dictature de Muammar Kadhafi est le prélude à celle que les forces extrémistes, intolérantes et rétrogrades, veulent lui substituer en se prévalant d’une victoire dont elles n’ont pourtant pas été les acteurs déterminants, mais qu’elles exploitent pour propulser leurs partisans et créatures aux commandes du nouveau pouvoir libyen.

Le Quotidien d’Oran, 25/10/2011

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