par Abdou BENABBOU
La giclée des revendications salariales émanant en même temps de plusieurs secteurs d’activités de la vie nationale met le gouvernement dans une situation embarrassante. Son inconfort et ses préoccupations risquent de s’étaler dans la durée car à l’horizon les clignotants n’annoncent pas des jours meilleurs. On observera que les remous dus à l’exigence d’une amélioration salariale parviennent surtout de la fonction publique et ses assimilés. Le reste, niches de revendications éparses, provient d’un secteur productif privé et public, s’en tient à la réclamation des impayés de salaires et n’en est pas à la demande de leur augmentation.
Les deux approches différentes indiquent on ne peut mieux la difficulté pour les autorités gouvernementales d’atténuer la colère de la rue ne pouvant qu’appeler à la sagesse et à la pondération. Les syndicats sont dans leur rôle revendicatif et on ne peut leur reprocher de faire de la politique quand ils n’en font pas en développant leur impatience sans ménagement et sans tenir compte de la complexité de la situation économique du pays.
L’actuelle sécheresse du monde productif, que l’alliance des crises économiques et sanitaires ont imposée, rend l’équation présente difficile à résoudre. Qui se nourrirait de qui quand le cordon qui liait le monde productif et censé lui servir de compagnon de route obligatoire est coupé ? Lequel est nourricier de l’autre et tant qu’à faire, quand le pétrole sera tari de quoi le Trésor public sera alimenté ?
En chutant de façon spectaculaire, le dinar n’arrête pas de livrer des effets corrosifs sur une population qui pense à tort que le remède à son impossibilité à vivre décemment se résume à une histoire de salaires. Car personne n’est dupe. Quand on parle de meilleures conditions de travail, il s’agirait d’abord d’améliorer la fiche de paie. On ne se rend cependant pas compte de la mue profonde qui s’opère dans la société algérienne. L’enseignement se privatise de plus en plus, la santé aussi et il n’est pas écarté que la fonction publique change de veste pour se plier à une privatisation qui viendra s’installer pour se mettre à l’air du temps déjà annoncé.
Si les enseignants, les médicaux, les postiers et un pan important de la fonction publique semblent occulter les très sérieuses contraintes de l’heure, pour le gouvernement il doit être question de priorités. Sauver les entreprises de production en grande difficulté presque toutes à l’arrêt, faire face au poids des retraites et satisfaire difficilement les émoluments du plus du million de fonctionnaires, est en tout point de vue un exercice pénible dans un terrain boueux.
Le Quotidien d’Oran, 09 mai 2021
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