Pour l’Association tunisienne des femmes démocrates, «Rifka est victime d’un Etat qui n’applique pas la loi»
Deux jours avant son assassinat, cette femme avait déposé une plainte à la justice contre son mari pour violences physiques
TUNIS: L’assassinat d’une Tunisienne par son mari, un policier, dans la région rurale du Kef (nord-ouest) a provoqué une forte indignation en Tunisie où des ONG ont averti lundi du risque d’augmentation des violences conjugales en cette période de confinement.
Dimanche, peu avant la rupture de jeûne du ramadan, un policier a tiré cinq balles de son arme de travail sur sa femme, Rifka Cherni, après une dispute conjugale, a indiqué lundi le porte-parole du tribunal du Kef, Mohamed Faouzi Daoudi.
Deux jours avant son assassinat, cette femme avait déposé une plainte à la justice contre son mari pour violences physiques, mais elle avait renoncé à des poursuites lors de la confrontation avec ce dernier, a-t-il ajouté.
Selon une ONG tunisienne, Moussawet (égalité, en arabe), Rifka aurait retiré sa plainte sous la pression de sa famille.
Le policier a été arrêté et la justice a ouvert une enquête, selon M. Daoudi.
Le ministère de la Femme a dit espérer «que cet incident soit un déclencheur pour l’application de la loi» de 2017 contre les violences faites aux femmes, qui prévoit en théorie un soutien juridique et matériel aux victimes.
Ce meurtre a provoqué l’indignation de nombreux internautes tunisiens, et sur les réseaux sociaux nombre d’entre eux partageaient des photos de Rifka, qui ne dépasse pas la trentaine.
Des ONG tunisiennes ont condamné un «crime odieux».
Dans un communiqué publié lundi, l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), a appelé au lancement d’une campagne de lutte contre les violences faites aux femmes, sous le slogan “la violence les tue, comme la pandémie”.
Moussawet a mis en garde contre le risque d’une augmentation des violences, alors que la Tunisie est confinée depuis dimanche pour une semaine, qui englobe les jours de fête marquant la fin de ramdaan.
Les signalements de femmes victimes de violence avaient été multipliés par plus de cinq pendant le premier confinement de mars à juin 2020, selon le ministère de la Femme.
Pour l’ATFD, «Rifka est victime d’un Etat qui n’applique pas la loi».
En 2017, le Parlement avait adopté une loi ambitieuse qui élargit considérablement le champ des violences sanctionnées et confirme le statut de la Tunisie comme pionnière en matière de droits des femmes dans la région.
Mais ce texte est peu appliqué et obtenir justice reste un parcours du combattant à l’issue imprévisible, en raison du manque volonté politique et de moyens.
Arab News, 11 mai 2021
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