Maroc : Pourquoi il faut libérer Soulaimane Raissouni

Selon sa famille, les dernières nouvelles sur la santé du journaliste marocain Soulaimane Raissouni sont alarmantes. Cela fait 44 jours qu’il est en grève de la faim. Il serait paralysé d’une jambe et pendant la dernière séance de son procès, le 18 mai, il était tellement faible qu’il ne pouvait pas répondre aux questions du juge. Une possible issue tragique est dans tous les esprits. Mais Soulaimane, en détention préventive depuis presque un an, refuse d’écouter les innombrables appels à s’alimenter. Il ne le fera, dit-il, que s’il est libéré.

Pendant ce temps, ces sites web qui parlent pour les autorités (et Dieu sait quels services de sécurité) continuent de prétendre que libérer Soulaimane, c’est attenter aux droits de sa victime alléguée. Rien n’est plus faux ! Adam Mohammed a droit à tout notre respect – d’autant plus qu’il ne s’oppose pas, lui-même, à la liberté provisoire de son agresseur allégué. Il a aussi le droit, évidemment et tout autant que son adversaire, d’obtenir justice. Personne, en tout cas aucun défenseur des Droits Humains qui se respecte, ne réclame qu’Adam retire sa plainte, ou que le procès soit abandonné. Tous ces gens dont j’ai l’honneur de faire partie (et j’assume mes responsabilités, en tant que porte-parole d’une des plus grandes ONG des Droits Humains dans le monde) ne réclament qu’une seule chose : que Soulaimane bénéficie de son droit à un procès équitable.

Ce droit consiste aujourd’hui à lui accorder la liberté provisoire. En l’en privant, les autorités violent une norme fondamentale du droit international : personne ne peut être détenu sans que la justice fournisse une justification précise, argumentée, et sujette à révision périodique par une cour indépendante, sur la base de laquelle il devrait être privé de sa liberté avant la fin de son procès. Or, une telle justification n’a jamais été fournie pour Soulaimane. Ni par le juge d’instruction qui a ordonné sa détention il y a un an, ni par le juge qui a rejeté ses demandes de liberté depuis (au total, 5 fois !) Ce faisant, la présomption d’innocence à laquelle Soulaimane a droit (autant qu’Adam a le droit d’être écouté) a été violée. Ce procès n’est pas équitable, et les autorités marocaines en portent l’entière responsabilité.
Ps : Grève de la faim mise à part, tout ce qui précède est également valable pour Omar Radi.

Source : Ahmed Benchemsi, 21 mai 2021

Etiquettes : Maroc, Omar Radi, Soulaiman Raïssouni, presse, journalistes, répression,

Be the first to comment

Leave a Reply

Your email address will not be published.


*