Le livre entre nos mains traite et analyse les différentes résolutions, décisions et textes relatifs au Sahara occidental, adoptés par les Nations unies depuis 1965, qualifiées par l’auteur de combine et manigance, en raison des attitudes de l’instance onusienne qui privilégie la politique à la légitimité internationale lorsqu’il est question de traiter de la dernière colonie en Afrique. L’ONU, à en croire l’auteur, serait une organisation perdante qui préfère traiter selon les intérêts et non conformément aux lois.
L’écrivain fait remarquer au début que le Sahara occidental fait partie des 15 pays dans le monde qui continuent de souffrir des affres du colonialisme, tandis que des pays du Conseil de sécurité, à leur tête la France, empêchent l’exécution des résolutions, faisant fi ainsi du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination, conformément à la Résolution A/15 14 (Xv).
Pour démontrer l’échec cuisant auquel sont confrontées les Nations unies pour résoudre la question du Sahara occidental, l’auteur fait référence à la similitude des textes et contenus des décisions et résolutions émises par les Nations unies. La première erreur ayant été commise par l’instance onusienne c’est de se plier à la volonté de l’Espagne qui avait longtemps tergiversé sur la question. Il a souligné que la décision 2072, datant du 16 décembre 1965, n’a pas pu être appliquée, en raison de l’absence d’un mécanisme des Nations unies pouvant imposer aux puissances coloniales le respect des décisions émanant de l’organisation.
Occupation projetée
Pour comprendre la tendance colonialiste du Maroc, il est important de revenir un peu en arrière. Au moment où l’Algérie défendait, dès son indépendance, le droit du peuple sahraoui à exercer son droit à l’autodétermination, le Maroc planifiait déjà, et ce, dès la deuxième moitié des années 1950, à envahir le Sahara occidental. Le royaume chérifien avait promis à l’ancienne puissance coloniale, l’Espagne, d’appliquer le principe de l’autodétermination, avant de se rétracter en faveur d’un pouvoir autonome. Le Makhzen a ainsi réclamé fermement le départ de l’occupant espagnol des territoires, dans l’espoir d’exploiter le vide laissé par le retrait anticipé des forces espagnoles. L’idée était d’envoyer des millions de colons marocains au Sahara occidental et de les faire passer pour des citoyens sahraouis qui se trouvaient en exil et revenus pour participer au référendum, sachant que les Nations unies ont adopté, en 1965, la résolution 2229 portant organisation d’un référendum dans le territoire, inspiré littéralement des propositions formulées antérieurement par Madrid. Des années se sont écoulées et les Nations unies, fidèles à elles-mêmes, c o n t i n u a i e n t d’adopter décision sur décision avec le même contenu ou formulation, n’apportant rien de nouveau, sauf quelques chiffres et dates. Les manifestations que connaissaient de temps à autre les territoires occupées ne suffisaient pas, pour autant, à persuader l’instance onusienne à prendre au sérieux la question sahraouie et à contraindre enfin l’occupant espagnol à organiser le référendum d’autodétermination dans ce territoire.
Imposture et manipulation
Sans doute, la chose la plus importante qu’il faudrait souligner dans ce contexte c’est cet échange troublant d’accusations entre les deux royaumes, l’Espagne et le Maroc, lors de la session de l’Assemblée générale tenue en 1972. Le représentant de l’Espagne avait fait allusion aux convoitises marocaines au Sahara occidental. Les discussions se sont achevées sans que la situation ne soit tranchée. Cependant, lors de cette session, l’ONU est arrivée à faire passer la Résolution 2989 qui a réitéré le droit inaliénable du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination, conformément à la résolution 1513.
Parmi les erreurs commises par les Nations unies au sujet de la question sahraouie, l’adoption d’une décision proposée par le Makhzen, qui aura imposé aux Nations unies de suspendre le processus de référendum, le temps de revoir ses cartes. Les choses ne se sont pas arrêtées là, puisque le Maroc semble avoir une emprise sur les Nations unies et une influence sur leurs décisions, dont la résolution se rapportant au report du référendum. Une décision qui a fait perdre aux Nations unies une partie de leur crédibilité.
L’auteur indique que la France a toujours soutenu le Maroc dans une tentative évidente d’affaiblir l’Algérie. Rabat a tenté d’ailleurs de l’entraîner dans une guerre qui embraserait la région, mais notre pays a continué à soutenir l’autodétermination du peuple sahraoui.
Suite au soutien américain apporté au Maroc, par le biais du secrétaire d’Etat, Henri Kissinger, une série de consultations ont eu lieu au niveau onusien, conduisant à la résolution 337 qui n’a apporté rien de nouveau. Après la décision de Madrid de se retirer du Sahara occidental, des négociations ont été entamées entre l’Espagne, la Mauritanie et le Maroc, tandis que l’Algérie et les Nations unies ont été mises à l’écart, sur la base que la position de l’Algérie est fondée essentiellement sur le respect des décisions de la légalité internationale. L’auteur précise que la France avait préparé la voie au Maroc pour qu’il puisse envahir le Sahara occidental, soutenu par l’envoyé spécial des Nations unies qui, à l’époque, n’était autre que le Français André Lewin, une personnalité réputée pour sa partialité et son manque d’intégrité, selon les dires de l’auteur.
Avec l’adoption de la résolution 380, le 6 novembre 1975, les doutes sur le rôle ambigu du Conseil de sécurité s’étaient confirmés. De même, tous les indices suggèrent que «tous, y compris les Nations unies, freinaient toute action ou tout acte pouvant empêcher le Maroc d’envahir le Sahara occidental». Toujours concernant les erreurs commises, l’auteur évoque également le transfert du dossier sahraoui à l’Organisation de l’unité africaine (Union africaine aujourd’hui), conformément à une décision approuvée en 1976, ce qu’il considère comme étant une autre manœuvre pour gagner davantage de temps, c’est-à-dire d’autres années, dans l’espoir d’en finir avec le peuple sahraoui et ses inlassables revendications. De son côté, le Conseil de sécurité continue d’approuver des résolutions qui n’allaient rien changé au statu quo ou à la donne. Parmi ces décisions de «façade», la résolution 39/40 venant affirmer que «la question du Sahara occidental est une question de décolonisation et qu’il faudrait la régler selon le principe que le peuple sahraoui dispose de son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance».
Délaisser la cause
Aucun des membres du Conseil de sécurité n’était à vrai dire enthousiaste à régler la question sahraouie par des voies légales et démocratiques, soit à travers un référendum. Ainsi, le dossier sahraoui a été relégué dans les tiroirs de l’Assemblée générale, qui s’attelait vainement à émettre des décisions et des recommandations sans une réelle portée. Pour l’auteur, le Maroc «avait fait le serment à ses amis du Conseil de sécurité de mettre vite un terme au problème, de trancher la question en sa faveur et de clore définitivement le dossier au niveau des Nations unies, sauf que c’est l’inverse qui s’est produit. Le Maroc n’a pas pu en finir avec la question sahraouie en temps voulu», alors que la résistance sahraouie contre l’occupant bat son plein, réalisant de grandes victoires sur le terrain.
Comme à chaque fois, la résolution de l’AG 43/33 est venue pour plébisciter l’accord initial signé entre le royaume marocain et le Front de Polisario, le 30 août 1988, et affirmer que la question sahraouie est une question d’autodétermination d’un peuple sous occupation, saluant, à la même occasion, l’esprit et la teneur de la résolution africaine 104.
L’accord du cessez-le-feu et le déploiement de la Minurso, le 6 septembre 1991, est sans doute la «plus grande tromperie» ayant marqué la question sahraouie. Après «la défaite de l’armée marocaine, qui aura perdu ses plus importants bataillons et une grande partie de ses forces aériennes et blindées, le Maroc a eu recours à nouveau au Conseil de sécurité pour imposer à la partie sahraoui la fin des hostilités».
A ce moment, l’instance onusienne, à sa tête Perez De Cuellar, continuait de conspirer avec l’occupant et le roi Hassan II en personne. A ce propos, l’auteur s’est arrêté sur la partialité de l’ONU qui a pris partie de manière flagrante pour le Maroc. Pour preuve, l’auteur s’est appuyé sur un extrait d’un rapport du secrétaire général de l’ONU, tiré littéralement d’une lettre envoyée par Hassan II à l’Organisation de l’Unité africaine, le 24 septembre 1981.
L’auteur finit par conclure que le dossier du Sahara occidental au niveau des Nations unies est victime d’une manipulation flagrante. L’ONU a joué un grand rôle pour consacrer la politique du statu quo dans les territoires occupés et, de même, il est à déduire que celleci est une organisation fondée sur les intérêts et non sur la loi et / ou la légalité internationale
El Djeïch n° 695, juin 2021
Etiquettes : Sahara Occidental, Maroc, Front Polisario, ONU, MINURSO, Organisation de l’Unité africaine, Union Africaine, UA, OUA, Résolution A/15 14 (Xv), décolonisatio, autodétermination,