Paris a récemment décidé de mettre fin à l’opération de lutte contre le terrorisme et les groupes d’insurgés dans la région du Sahel en se basant sur deux stratégies pour une supposée transition dans la région.
Par : Yasar Demir*
L’annonce par la France de l’arrêt de l’opération Barkhane dans la région du Sahel en Afrique subsaharienne a suscité des discussions sur la stratégie de Paris sur le continent africain.
L’opération a été lancée le 1er août 2014 à l’initiative de Paris et a concerné la Mauritanie, le Tchad, le Burkina Faso, le Mali et le Niger.
Malgré le fort soutien militaire qu’elle a reçu de ses alliés, la France n’a pas obtenu le succès escompté et a finalement choisi de réduire sa présence militaire dans l’opération et d’exiger une présence internationale effective dans la région.
D’une certaine manière, la France souhaite mettre en place un mécanisme similaire à celui que les États-Unis ont mis en place en Afghanistan pour lutter contre le terrorisme après le 11 septembre 2001.
Bien que les détails de la décision de la France ne soient pas encore totalement clarifiés, il est certain que l’image de la France, qui retirera progressivement 5 100 soldats sans avoir réussi sa mission et ne laissera que les unités des forces spéciales, sera affectée dans le monde entier, principalement en Afrique.
La France quittera la zone et sa présence sera remplacée par les forces des pays du Sahel eux-mêmes, avec le soutien des puissances européennes, ce qui a suscité différentes réactions.
Dans plusieurs pays africains, cette décision a été accueillie avec joie, notamment par les milieux antifrançais.
De son côté, une grande partie de la population du Mali, pays à l’origine de l’opération, est restée silencieuse.
Le Tchad a également pris la situation très au calme, puisque Mahamat Deby, fils de l’ancien président mort dans des affrontements avec les séparatistes ces derniers mois, Idris Deby, ne s’est pas encore déclaré pour ou contre.
Paris a pris cette décision en se basant sur deux stratégies fondamentales : premièrement, répondre sur le terrain aux critiques acerbes que lui adressent les pays subsahariens, comme pour dire : « Voyons comment ils vont gérer leur division ethnique, religieuse et culturelle si nous ne sommes pas là. Une telle stratégie a été utilisée lors des conflits internes qui ont eu lieu au Tchad en 1984.
Deuxièmement, pour éviter de perdre sa réputation en dissimulant ses échecs. Dans ce contexte, Paris a décidé d’inclure les États européens dans l’opération Barkhane, au prétexte de prévenir la migration vers le continent et la menace terroriste, et donc de transférer la responsabilité.
Des pays tels que la Grèce, la Serbie et l’Italie se sont déjà engagés à envoyer des troupes et, dans les jours à venir, le succès de cette initiative apparaîtra plus clairement.
On peut également être curieux de savoir quel sera le résultat de la démarche de Macron, qui peut être considéré comme significatif. Cependant, il est évident que l’image de la France, qui se retire militairement avant d’avoir terminé l’opération, sera affectée dans le monde entier, notamment en Afrique.
La France, consciente des sentiments anti-français qui gagnent en force sur le continent africain, a mis en place une manœuvre visant à faire dire aux pays du Sahel que « l’on ne peut pas penser à une Afrique sans la France ».
Ainsi, les cartes seront rebattues dans la région. Pour l’instant, il est déjà question que le Mali commence à chercher le soutien de la Russie et de la Turquie pour remplacer les Français.
Il n’est pas difficile de prévoir qu’une telle initiative susciterait une réaction de la France et l’on attend avec curiosité l’approche qu’adopteront les dirigeants français.
*Yasar Demir a obtenu son doctorat de l’Université de Strasbourg en 2010 avec sa thèse de doctorat sur l’unification du Hatay avec la Turquie et la politique de la France au Levant. Il est également l’auteur de deux ouvrages sur la politique de la France au Moyen-Orient, Syrie et Hatay.
**Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement la position éditoriale d’Anadolu Agency.
Agence Anadolou, 15 juin 2021
Etiquettes : France, Sahel, Mali, Barkhane, Afghanistan,