Maroc, Algérie, Lakhdar Brahimi, Afghanistan,
Rupture des relations entre Alger et Rabat : Silence intrigant de Lakhdar Brahimi
Lakhdar Brahimi, ancien ministre algérien des Affaires étrangères, est un homme qui a appris les codes du langages diplomatiques sur le bout des doigts. représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour l’Afghanistan, puis l’Irak, il s’est lamentablement cassé les dents sur ces deux inextricables bourbiers causés par les Américains et eux seuls. Ces deux échecs pèsent lourdement sur son parcours étoffé et très riche, lui qui a quand même été un des artisans des fameux accords de Taef. En diplomatie, donc, il est impératif de savoir quand parler, quoi dire, et surtout apprivoiser le très parlant langage du silence. On ne l’a guère entendu, par exemple, protester contre la cabale initiée contre la Syrie alors que la stabilité de ce pays joue un rôle essentiel sur celle du Liban. Si les accords en question ont volé en éclat, le Moyen-Orient est devenu un sanctuaire pour les « bons terroristes », histoires de paraphraser François Hollande, ancien président syrien quand il voulait à tout prix se débarrasser du président Assad et se substituer ainsi au peuple syrien. Le silence de Brahimi sur ce coup était sinon coupable du moins complice. Mais, là n’est pas l propos. Il est question ici de silence, certes, mais concernant cette fois-ci la rupture des relations diplomatiques entre Alger et Rabat. Lakhdar Brahimi, en effet, aurait pu continuer de se taire, de se terrer même, et couler des jours heureux, après une vie relativement bien remplie. Il aurait pu se confiner dans ce confortable et salvateur silence n’était l’entretien qu’il vient d’accorder au journal français Le Monde. Passons sur sa sympathie par trop prononcée envers les Talibans. Passons, oui, puisque le syndrome de Stockholm peut toucher une personne, à n’importe quel âge, ou moment. Passons même sur l’occasion en or qu’il avait d’évoquer la très heureuse expérience algérienne en matière de lutte contre le terrorisme, et toutes les formes d’extrémismes. Ce qui passe moins en revanche, et alors-là pas du tout, c’est qu’il considère que l’Algérie n’aurait pas gagné son homérique guerre contre l’occupant français. Que celui-ci aurait décidé d’un coup, de son propre chef, de quitter l’Algérie, un peu comme viennent de le faire les Américains en Afghanistan. Une pareille hérésie, venue grimer l’histoire glorieuse de notre pays, le dispute fortement au silence dont il avait été question au début de ce texte. Ne pas souffler mot sur le Maroc, ne pas prendre fait et cause pour son pays, est une maladresse qu’un diplomate de son envergure n’aurait certainement pas pu commettre. Brahimi se tait pour des raisons qui lui sont propres. Son silence n’en est pas moins intrigant pour nous.
Mohamed Abdoun