Tags : Maroc, artistes, violences policères – Des artistes dénoncent les violences policières au Maroc
Une peinture en l’honneur du jeune Youssef Bejjaj a fait le tour des réseaux et a participé à l’ouverture d’une enquête.
Le 8 septembre 2021, Youssef Bejjaj, un jeune Marocain de 21 ans, décédait après avoir été poursuivi par des policiers à Casablanca. Classée comme un accident de circulation, l’affaire fait réagir le pays sur les réseaux sociaux au travers du hashtag #JusticePourYoussef et grâce à la demande de la mère de la victime qui a appelé à une réouverture de l’enquête.
Le journal en ligne marocain Medias 24 relate que différents témoignages, des extraits de caméra de vidéosurveillance et le rapport de l’équipe médicale viennent renforcer la demande des proches du défunt de faire la lumière sur les faits survenus le 8 septembre. Ce rapport « constate ‘des blessures plus importantes que celles dues à un accident' », dont « la présence d’ecchymoses, de blessures au cou, à la tête, au ventre, au niveau des côtes », selon les proches de Youssef Bejjaj.
« Youssef est mort de violences policières, trois policiers ont entamé une course-poursuite à moto parce qu’il ne portait pas de casque. Les policiers ont fini par le pousser de sa moto en marche avant de le frapper à plusieurs reprises, ce qui a directement causé sa mort.
Cela a eu lieu devant plusieurs caméras (Tramway, Préfecture) mais ils ne partagent pas les vidéos !! De plus, un civil a filmé la tragédie mais il a été repéré par un officier en repos, ce qui lui a valu d’être frappé et forcé à supprimer sa vidéo. »
Cet appel a été amplement relayé sur les réseaux sociaux, notamment grâce à l’œuvre partagée par le collectif d’artistes multidisciplinaires Dosei : « Le tableau qu’on a créé a pu faire le tour des réseaux sociaux et est même devenu un symbole de cette cause grâce à l’intérêt particulier qu’il a suscité auprès des internautes et des nombreux artistes (des rappeurs surtout) qui l’ont partagé », nous confient les artistes.
Sur un fond bleu, une ronde de cinq personnages insouciants (quatre officiers de police et un « homme habillé en tenue traditionnelle » décrit par « l’entourage du défunt ») encercle une silhouette mortuaire dessinée à la craie blanche sur le sol. De chaque côté, une caméra filme leur joyeuse ronde, référence directe à la célèbre Danse du peintre Henri Matisse.
« Notre art vient dire non à l’injustice »
À travers sa peinture, le collectif dénonce les violences et l’impunité policières, encourageant les internautes à partager à leur tour leur indignation : « Quoique nous restions apolitiques, nous sommes tous engagés humainement à dénoncer de telles injustices quand on les voit. »
« Aujourd’hui, notre art vient dire non à l’injustice », déclare Dosei, ajoutant apprécier la façon dont « une œuvre artistique peut pousser les gens à dénoncer un sujet qui les touche ». « Dosei n’est pas un collectif d’artistes qui s’autoproclament antisystème ou contre la police, notre mission est de représenter des amoureux d’art qui l’ont longtemps utilisé pour délivrer des messages qui leur tiennent à cœur. »
« À tous les influenceurs qui ont partagé des publications sur George Floyd durant les manifestations Black Lives Matter mais qui refusent de prendre position contre la brutalité policière au Maroc, honte sur vous et votre activisme performatif.
C’est marrant comme les gens se soucient des problématiques sociales uniquement quand ça sert leur image/marque.
Le silence, c’est de la violence. »
Le 16 novembre, plus de deux mois après le décès du jeune homme, la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) a déclaré dans un communiqué « poursuivre et approfondir cette enquête » afin d’en « révéler tous les détails ». Une victoire pour la mère et les proches de Youssef Bejjaj, ainsi que les artistes et civil·e·s engagé·e·s :
« Nous sommes très honorés d’avoir pu contribuer artistiquement à éveiller l’intérêt des autorités pour cette affaire et d’avoir créé une œuvre artistique capable de capturer et de transmettre un sentiment de soulèvement contre l’injustice », ajoute le collectif d’artistes.
Konbini Arts, 18/11/2021
#Maroc #Art #Artistes #Violences_policières