Algérie-France : Prémices de retour aux bons comptes… – Emmanuel Macron, Tebboune, Mémoire, Sahel, Mali,
Après plusieurs semaines de crise aiguë, le bilatéral algéro-français semble désormais évoluer sur une voie de règlement pour une «relation de confiance», a déclaré hier à Alger Jean-Yves Le Drian, à l’issue de l’audience que lui a accordée le président de la République, Abdelmadjid Tebboune. La visite du chef de la diplomatie française – un geste fort – augure d’un retour aux bons comptes et d’une reprise de la coopération au plus haut niveau des deux gouvernements.
La visite effectuée hier en Algérie par le ministre français des Affaires étrangères ne ressemble certainement pas à ses devancières sur le registre des relations entre les deux pays. Cette nouvelle présence à Alger de Jean Yves Le Drian intervient dans une conjoncture marquée par un refroidissement glacial de ces relations qui dure depuis plus de deux mois, après les propos que s’est autorisé à tenir Emmanuel Macron à l’égard de l’Algérie et de son histoire.
Partant, la visite d’hier est inscrite dans le cadre du déploiement de Paris en faveur d’un apaisement et d’un retour à la normale avec Alger, après la crise provoquée par le dérapage incontrôlé du président français, fin septembre dernier, à travers des déclarations qui n’ont pas tardé à être relayées par le quotidien Le Monde, sonnant l’entame d’une rupture entre les deux pays.
Le chef de la diplomatie française a d’ailleurs explicitement exposé les motifs de sa nouvelle mission algéroise en indiquant d’emblée que son déplacement en Algérie avait «pour doble objectif de renouer une relation de confiance entre nos deux pays, marquée par le respect de la souveraineté de chacun, mais aussi de regarder vers l’avenir pour travailler à la relance et à l’approfondissement de notre partenariat qui est indispensable».
Le ministre français des Affaires étrangères s’exprimait devant la presse, au sortir de l’audience qui lui a été accordée par le président de la République Abdelmadjid Tebboune. Il a donc réitéré le discours qu’il s’emploie à tenir à l’égard de l’Algérie depuis que son Président l’a mis devant le fait accompli, l’obligeant à redoubler de marketing diplomatique pour faire baisser la colère d’Alger. Faut-il rappeler, à ce propos, que Le Drian n’avait pas tardé à monter au créneau dans la semaine même qui avait suivi les propos de Macron, dans l’objectif de calmer la colère des Algériens, offusqués par l’attitude du locataire de l’Elysée. Le même responsable est revenu plusieurs fois à la charge dans l’espoir d’un dégel qui n’a pas eu lieu.
Mais sa visite d’hier laisse assez clairement se dégager les prémices d’un apaisement en cours qu’il est venu chercher en insistant, une nouvelle fois, sur les relations entre les deux pays. «La France et l’Algérie ont des liens profonds animés par la densité des relations humaines entre Algériens et Français, et ancrés dans une Histoire complexe», dira-il à ce sujet, avant de formuler «le souhait de travailler à lever les blocages et les malentendus qui peuvent exister entre les deux pays», précisant qu’au cours des échanges, les deux parties ont convenu de reprendre certains axes de la coopération bilatérale.
«Cela se traduira par la reprise d’un dialogue opérationnel entre partenaires sur les questions humaines et migratoires, et aussi par la reprise d’un dialogue opérationnel sur la lutte contre le terrorisme et par nos efforts communs pour assurer la sécurité de nos deux pays», a-t-il dit, exprimant aussi son «souhait que le dialogue que nous relançons aujourd’hui puisse conduire à une reprise des échanges politiques entre nos deux gouvernements en 2022».
On voit donc bien que le chef de la diplomatie française n’hésite pas à se mettre d’ores et déjà à l’heure de la normalisation accomplie. Partant, il ne manque pas, non plus, d’inscrire les relations entre l’Algérie et la France dans une nouvelle étape de coopération et de partenariat, bilatéral, mais aussi sur la scène régionale, notamment à travers le dossier libyen ou celui du Sahel.
«L’Algérie est un partenaire essentiel»
«Je veux redire, ici, que l’Algérie est un partenaire essentiel pour la France sur le plan bilatéral, mais également sur le plan régional. Nous entendons continuer à coordonner nos initiatives diplomatiques pour favoriser le processus d’une transition politique en Libye à la suite de la Conférence de Paris à laquelle le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ramtane Lamamra, avait représenté le Président Tebboune», ajoutera le même responsable français.
«Nous avons également fait le point sur la situation au Mali où l’Algérie joue un rôle important», a-t-il indiqué, soulignant que «l’engagement de l’Algérie dans la mise en œuvre de l’Accord de paix et de réconciliation est un élément essentiel du processus de paix au Mali».
«Je tiens à saluer cet engagement et je forme le vœu que notre dialogue se poursuive sur ce sujet», a-t-il affirmé.
Dans le même sillage, il a indiqué que la France et l’Algérie font face ensemble à «des défis majeurs dans un environnement régional et international incertain», soulignant que les deux pays «doivent être en mesure de proposer des réponses opérationnelles aux défis que représente le terrorisme dans la région sahélienne, mais aussi l’émigration clandestine ainsi qu’aux enjeux de développement économique».
«Sur tous ces sujets et parce que nos intérêts sont communs, notre concertation est primordiale et c’était le sens de ma présence aujourd’hui à Alger», a ajouté M. Le Drian qui s’est dit «heureux de revenir en Algérie» où «j’ai eu l’honneur et le plaisir de m’entretenir longuement avec le Président Tebboune et avec mon homologue M. Lamamra».
Mais sans doute bien plus que les retrouvailles entre les deux chefs de la diplomatie algérienne et française, qui n’ont d’ailleurs pas cessé de se rencontrer durant les deux mois de crise entre les deux pays (sommet de l’ONU puis à la conférence sur la Libye), c’est l’audience accordée par Abdelmadjid Tebboune à Jean Yves Le Drian qui laisse entendre une avancée dans la normalisation algéro-française.
Faut-il rappeler, à ce propos, que le président de la République avait clairement affiché son refus de faire le premier pas dans le cadre de ce processus revendiqué aussi publiquement par Emmanuel Macron.
Par Feriel Nourine
Reporters, 09/12/2021
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