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Introduction
Depuis l’élargissement de 1963, qui a permis l’avènement d’un Conseil de sécurité de 15 membres, plusieurs tentatives infructueuses ont été menées afin d’élargir la composition du Conseil, pour mieux refléter les réalités contemporaines du système international.
En 1993, l’Assemblée générale a adopté la résolution 48/26 du 3 décembre, par laquelle elle a mis en place un Groupe de travail à composition non limitée (OEWG) chargé d’examiner tous les aspects liés à la représentation équitable des Etats Membres au Conseil de sécurité et de l’augmentation du nombre de ses membres.
Depuis lors, la question de la réforme figure à l’ordre du jour de chaque session de l’Assemblée générale des Nations Unies. Plus d’une quinzaine de résolutions ont été adoptés et plusieurs rapports ont été produits (Rapports annuels du Groupe de travail, Rapport du Groupe de hautes personnalités en 2004, Rapport des facilitateurs désignés par la Présidente de la 61ème session de l’AG Sheika Haya, rapport de la Task Force désignée par le Président de la 62ème AG ;
En décembre 2004, le Groupe de Personnalités de Haut Niveau sur les Menaces, les Défis et le Changement du Secrétaire Général a proposé une extension du Conseil de sécurité pour répondre aux demandes de réforme. Le comité a présenté deux modèles élargissant le Conseil à 24 membres. Jusqu’à maintenant il a eu au moins cinq propositions supplémentaires qui tous préconisent une extension pour améliorer le Conseil.
Depuis 2009, la réforme du Conseil de sécurité n’est plus dans une logique de groupes ad hoc, mais plutôt dans une logique de négociations intergouvernementales. L’ouverture de négociations intergouvernementales semble répondre à une logique pragmatique qui est celle de tenter d’obtenir des résultats tangibles et dépasser le blocage actuel ;
Après sept cycles de négociations
intergouvernementales, les divergences sont encore dominantes, et les perspectives des discussions ne sont pas optimistes : la première difficulté évidente est qu’aucune des propositions écrites soumises par les Etats Membres ne bénéficie d’un appui suffisant pour constituer une base de négociations. En effet, la diversité des positions adoptées par le G4, le UFC, les cinq membres permanents P5 et les groupements régionaux (Groupe des Etats Africains, OCI, Ligue des Etats Arabes) souligne la difficulté extrême d’aboutir à un dénominateur commun.
Pourquoi la réforme du Conseil de Sécurité représente un enjeu international ?
Les débats sur la réforme du Conseil de sécurité ont démontré le degré de concurrence entre les différents Etats membres, groupes régionaux et ad hoc, notamment au sujet de l’augmentation du nombre des membres du Conseil de sécurité et la détention du droit de veto.
Cette concurrence démontre que la réforme du Conseil touche à la redistribution du pouvoir au sein de l’organisation la plus importante du système politique international. La réforme du Conseil de sécurité est perçue comme étant la question la plus épineuse du processus de réforme des Nations Unies. Plusieurs facteurs expliquent cela :
-Des facteurs liés aux changements géopolitiques de l’après guerre froide :
-Les modifications de l’équilibre géopolitique international intervenues après la fin de la guerre froide n’ont pas eu de conséquence sur la composition du Conseil de sécurité de l’ONU ;
-Le décalage entre le monde d’aujourd’hui et celui de 1945, ce qui favorise une contestation permanente de la représentativité du Conseil
-Le nombre de pays à l’ONU a quadruplé et les pays en développement, pourtant majoritaires à l’Assemblée générale, ne disposent d’aucun siège permanent au Conseil
-L’enjeu d’une réforme du Conseil de sécurité pour les pays en développement vise à acquérir sur lui une influence et un contrôle capables d’empêcher son instrumentalisation et sa politisation.
Des facteurs liés à la perception de certains Etats membres :
Avec pour responsabilité le maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Conseil de Sécurité est au centre du système onusien ;
La réforme est perçue par beaucoup de pays, notamment en développement, comme un élément fondamental dans la perspective de l’instauration d’un nouvel ordre mondial ;
L’importance des décisions du Conseil de sécurité pour la vie quotidienne de millions de personnes dans le monde fait ressortir l’urgence réelle de le réformer ;
Le Conseil de sécurité est au cœur de la vie internationale car il remplit une mission unique : assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales.
La réforme du Conseil : Un potentiel énorme de rivalités régionales :
la Chine ne veut pas voir le Japon, rival asiatique, siéger au Conseil ;
La candidature de l’Inde inquiète son voisin, le Pakistan ;
En Amérique latine, le Mexique et l’Argentine voient d’un mauvais œil la candidature du Brésil ;
En Europe, l’Italie et l’Espagne ne voient pas pourquoi l’Allemagne serait choisie pour un poste permanent ;
Malgré son apparente homogénéité dans sa référence à la position commune de l’UA, la position africaine reflète une unité de façade qui ne se traduit pas réellement en position unifiée lors du débat. Le Groupe se trouve tiraillé entre plusieurs courants.
La réforme du Conseil de sécurité est elle faisable ?
Le Conseil de sécurité n’a pas été conçu, à l’origine, sur une base de représentativité. Son caractère restreint devait permettre à cet organe d’assurer la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales ;
Le Conseil de sécurité a été construit autour d’une logique de responsabilité et de capacité d’intervenir pour préserver la paix et la sécurité internationale ;
L’acceptation de l’inégalité instaurée par la charte en 1945 au sein du Conseil reposait sur la reconnaissance de la place particulière des puissances victorieuses après la 2ème guerre mondiale dans le maintien de la paix ;
Les débats aujourd’hui considèrent que l’autorité du Conseil passe par une meilleure représentativité
Toute réforme du Conseil de Sécurité est à considérer sous deux angles : d’une part, elle permettrait de satisfaire les revendications plus ou moins justifiées de certains membres des Nations Unies, ou de certains groupes d’Etats ; de l’autre, elle poserait la question de savoir si un élargissement contribuerait à l’efficacité du Conseil de Sécurité ?
Les débats sur la réforme se sont focalisés davantage sur l’élargissement du Conseil et sur le droit de veto, sans essayer d’avancer sur d’autres volets comme celui de l’amélioration des méthodes de travail, les relations avec l’Assemblée générale et les autres Organes des Nations Unies etc…
D’où le constant que la plupart des candidats à l’élargissement semblent autant préoccupés par leur statut que par l’efficacité du Conseil, le résultat pourrait bien être un conseil encore plus divisé, et donc en fin de compte encore moins efficace ;
Les prises de position de la majorité des membres permanents soulignent le risque de voir la capacité décisionnelle du Conseil de Sécurité affaiblie par l’accroissement des sièges permanents ;
Toute réforme du Conseil de sécurité ne pourra pas se détacher des préoccupations des différents protagonistes :
– Les membres permanents du Conseil de sécurité ne veulent pas perdre leurs prérogatives, notamment leur droit de veto ;
– Les perdants de la seconde guerre mondiale (Allemagne, Japon) estiment que leur contribution substantielle aux Nations Unies les autorise à jouer un rôle majeur au sein de l’ONU ;
– Les grands pays émergents qui aspirent à se voir reconnaître une place correspondant à leur place dans l’économie mondiale ;
– La question demeure posée concernant la position de l’Afrique : en cas d’octroi d’un siège permanent au Conseil de sécurité, quel pays africain pourrait-il l’occuper ?
L’Afrique et la réforme du Conseil de sécurité : Vision du Maroc
Dans le débat autour de la question de l’élargissement du Conseil de Sécurité, la position africaine renvoie à la question de savoir si les décisions du Conseil de Sécurité correspondent à une conception largement représentative du mandat de l’ONU.
Sur la base du consensus d’Ezu1wini, l’Afrique réclame deux sièges permanents avec tous les privilèges qui leur sont attribués, y compris le droit de veto, ainsi que 5 sièges non permanents (+2) ;
L’UA aura la responsabilité de désigner les représentants africains au Conseil de sécurité, selon des critères à déterminer collectivement aux niveaux de l’UA et de l’ONU ;
Issue de positions initialement nationales, la position africaine apparaît maximaliste durant le processus de négociations.
L’unité de la position ne serait, toutefois, qu’apparente car de nombreux Etats africains ne sont pas prêts à accepter que certains d’entre eux deviennent des membres permanents disposant d’un droit de veto ;
Cette intransigeance pourrait provenir de la volonté de ceux qui ne peuvent espérer devenir membres permanents d’empêcher les Etats qui seraient susceptibles de le devenir d’accéder à ce statut ;
Pour le Maroc, toute réforme du Conseil de sécurité doit obéir à un nombre de principes fondamentaux :
L’égalité souveraine des Etats : L’importance de ce principe consacré par la Charte des Nations Unies et son rôle dans l’avènement d’un Conseil de sécurité démocratique et équitable ;
La globalité de la réforme : Le Maroc considère que l’élargissement du Conseil n’est qu’un aspect du processus de réforme du Conseil, qui englobe également l’amélioration de ses méthodes de travail, la question du veto et le renforcement de son interaction avec les autres organes principaux de l’ONU, ainsi que la valorisation du rôle de ses membres non permanents.
La primauté du Consensus : Le processus de réforme du Conseil de sécurité devra reposer sur le consensus le plus large possible. Cette nécessité est justifiée, à la fois, par l’importance de la réforme envisagée, ainsi que par la responsabilité première que joue le Conseil dans la préservation de la paix et de la sécurité internationales. Le processus de réforme devrait constituer une opportunité pour la promotion de la cohésion régionale et internationale.
La préservation de l’efficacité du Conseil et sa capacité à remplir pleinement les prérogatives importantes qui lui sont dévolues pour la préservation de la paix et de la sécurité internationales.
La représentation géographique équitable:
L’élargissement du Conseil doit tenir compte des impératifs d’une répartition géographique équitable des sièges ainsi que des spécificités de chaque région géographique afin de pouvoir répondre promptement à ses besoins particuliers, tout en donnant une priorité à la représentation des régions historiquement marginalisées.
Partant de ces principes la position du Maroc se décline comme suit :
Le soutien à une représentation juste et équitable de l’Afrique par application du principe de la rotation régionale.
Les sièges devant revenir à l’Afrique au sein du Conseil élargi devrait être affectés aux sous régions sur la base de la rotation géographique et non à des pays nommément désignés ;
Le Maroc nourrit l’espoir de voir le continent africain évoluer dans la réflexion objective pour que sa représentation dans un Conseil de sécurité élargi puisse être la plus fidèle et la plus positive en termes de crédibilité et de représentativité décisionnelle.
Nasser Bourita
Secrétaire Général
MAED
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