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On n’est pas encore à la fin de l’impunité du Maroc, mais on y arrive allègrement. Pendant longtemps « chouchou » du parlement européen, ce statut d’enfant gâté prend subrepticement fin. Il avait fallu un scandale à grande échelle pour que les masques tombent.
En fait, ce dont l’Algérie avertissait a fini par se dévoiler à la face de tous, égratignant la crédibilité de l’Europe entière.
Et comme un scandale ne vient jamais seul, le Maroc a eu pour son grade. Hormis ses faits scandaleux de corruption, Rabat est égratigné pour ses manquements sur les droits de l’homme.
Le Parlement européen, en critiquant la détérioration de la liberté de la presse au Maroc, remet en lumière le sort des journalistes critiques et des opposants, visés par des accusations « fabriquées », selon les défenseurs des droits humains.
Dans un texte adopté à une large majorité, les députés européens ont récemment demandé « instamment » aux autorités marocaines de « respecter la liberté d’expression et la liberté des médias » et de « garantir aux journalistes incarcérés un procès équitable ».
C’est la première fois qu’une résolution du Parlement européen sanctionne le Maroc. Elle fait suite à « des condamnations injustes contre ceux qui embarrassaient le pouvoir », explique à l’AFP le militant vétéran Fouad Abdelmoumni.
Plusieurs journalistes indépendants et opposants ont été poursuivis et emprisonnés ces dernières années pour des faits à caractère sexuel. La première affaire éclate en 2018 avec l’arrestation de l’ex-patron de presse Taoufik Bouachrine qui écope de 15 ans de prison pour « viol » et « traite humaine ».
En 2020, les journalistes Omar Radi et Soulaimane Raissouni sont condamnés respectivement à six et cinq ans d’emprisonnement dans deux affaires d’ »agression sexuelle », doublée d’une accusation d’ »espionnage » pour le premier. Des accusations qu’ils nient.
Fin 2022, l’ex-bâtonnier et opposant Mohamed Ziane a été incarcéré notamment pour « adultère » et « harcèlement sexuel ». Une audience de demande de remise en liberté de cet avocat de 79 ans se tiendra lundi à Rabat, selon son fils.
Depuis octobre, Mohamed Baâssou, un militant de la mouvance islamiste Al Adl wal Ihsane (Justice et Bienfaisance), en détention, est jugé dans une affaire de « traite humaine » et d’ »adultère ». Mais pour les autorités marocaines, ces affaires « n’ont rien à voir » avec la liberté d’expression.
« A supposer que ces affaires pénales soient fabriquées, ce que je ne crois pas, les victimes le sont-elles aussi ? », réagit l’avocate féministe Aïcha Guella, présidente de l’AMVD (Association pour les droits des victimes), jugeant « irresponsable » la résolution européenne.
Un argument qui n’a pas convaincu les eurodéputés qui, dans le cas d’Omar Radi, ont estimé que « de nombreux droits de la défense n’ont pas été respectés, ce qui entache d’iniquité et de partialité l’ensemble du procès ». Ils ont réclamé sa remise en liberté provisoire comme celles de Taoufik Bouachrine et Soulaimane Rassouni.
Le vote européen consacre « l’échec de la stratégie répressive consistant à fabriquer des accusations sexuelles contre les journalistes et les critiques », a estimé l’Instance marocaine de soutien aux détenus d’opinion (INASDO), devant la presse jeudi à Rabat.