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La diplomatie algérienne est à nouveau à l’ouvrage pour faire avancer l’accord de paix signé à Alger en 2015 par les parties maliennes pour une normalisation politico-institutionnelle au Nord-Mali. Cette fois, c’est le chef de l’Etat, M. Tebboune, qui monte au créneau en recevant, dimanche 26 février, des représentants des groupes nord-maliens signataires dudit accord. Signe d’une appréhension algérienne déjà ancienne – l’accord piétine depuis huit ans -, mais qui s’est transformée depuis quelques mois en inquiétude non dissimulée obligeant à de nouvelles initiatives visant à atténuer la dégradation en cours du climat de concertation entre l’ex-rébellion et les autorités de transition au pouvoir à Bamako. Le challenge est de préserver l’unité malienne.
Par Halim Midouni
Pour quels résultats ? En réponse à cette question, les observateurs algériens et internationaux du dossier malien font le rappel de deux «paramètres nouveaux» : le premier paramètre est que le terrain malien a profondément changé depuis 2015 et sa transformation s’est accélérée depuis l’arrivée au pouvoir du chef de la transition militaire, le colonel Assimi Goïta, et le soutien stratégique russe dont il bénéficie depuis son coup de force en décembre 2021.
Avec la dégradation des relations avec la CEDEAO, qui a maintenu en même temps que l’Union africaine (UA) les sanctions économiques contre le Mali, jeudi 9 février 2023 à Addis-Abeba, avec le rapprochement avec l’autre transition militaire en cours au Burkina voisin, l’homme fort de Bamako surfe sur le vent de nationalisme qui souffle sur la capitale malienne et dans d’autres régions du pays. Jouissant d’une popularité réelle, lui et son gouvernement trainent les pieds à appliquer un accord de paix qu’ils considèrent comme une atteinte à leur souveraineté nationale.
Le deuxième paramètre est que la transition prendra fin officiellement en février 2024, date des élections prévues pour rendre les clés du pays à un pouvoir civil, conformément aux résolutions du sommet des Etats de la CEDEAO à Accra en juillet 2022.
Avant cette échéance, à supposer qu’elle sera respectée, affirment les observateurs, il est difficile d’envisager dans le contexte géopolitique actuel au Mali et au Sahel une quelconque décision des militaires maliens qui les déjugeraient, par rapport à leurs soutiens interne et externe, ou qui serait comprise comme une grave concession à l’ex-rébellion au Nord Mali qu’une opinion malienne considère comme des séparatistes qu’il s’agit de combattre par les armes.
Fait indicateur : début février, Amadou Albert Maïga, un membre du Conseil national de la transition (CNT), déclarait que l’armée malienne allait bientôt engager les opérations pour rétablir l’autorité de l’Etat central sur Kidal. «La guerre est inévitable à Kidal», avait-il dit.
C’est dans cette ambiance que le chef de l’Etat, M. Tebboune, a reçu dimanche dernier à Alger les représentants des groupes politico-militaires maliens signataires de l’accord de 2015. Il s’agit de poursuivre l’action politique et diplomatique que mène l’Algérie en tant que chef de file de la médiation internationale pour une solution politique au Nord Mali. Il s’agit surtout d’éviter l’accumulation des signaux négatifs de part et d’autre des parties maliennes en conflit.
Ces signaux d’usure se sont multipliés en particulier du côté des groupes politico-militaires nord-maliens. Samedi 10 décembre 2022, à l’occasion de la conférence sur la paix et la sécurité en Afrique qui s’est tenue à Oran, la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) avait lancé une première alerte. Elle avait adressé une correspondance au chef de la diplomatie, Ramtane Lamamra, à travers laquelle elle sollicite l’Algérie et les autres médiateurs internationaux, engagés pour l’application de l’accord d’Alger de 2015 pour la paix au Mali, à organiser une «réunion d’urgence».
Eviter l’accumulation des signaux négatifs
Vendredi 9 décembre 2022, la CMA avait publié un communiqué dénonçant la «déliquescence» de l’accord, mettant en cause «l’absence persistante de volonté politique» du pouvoir de transition militaire à Bamako à l’appliquer concrètement sur le terrain.
A la même période, avouant lui-même la difficulté d’appliquer l’accord, Ramtane Lamamra avait parlé de challenge. Il avait expressément souligné que la réintégration des 26.000 combattants maliens membres des mouvements signataires de l’Accord d’Alger, traitée en deux temps (concernant le désarmement, l’armement et la réintégration), «est un défi pour donner à chacun la possibilité de croire à une nouvelle vie au lieu de se battre entre frères». «C’est un travail à long terme semé d’embûches», avait-il dit. Il avait ajouté : «Les choses n’évoluent pas de manière régulière. Il y a des avancées et des reculs. C’est la voie que nous devons emprunter, et il n’y a pas d’autres alternatives».
Plus de trois mois après la conférence d’Oran sur la paix et la sécurité en Afrique, le constat du chef de la diplomatie, répété à plusieurs mois notamment lors de ses navettes entre Alger et Bamako en janvier dernier, est confirmé de manière préoccupante. Et il semblerait que l’audience accordée par le chef de l’Etat aux groupes politico-militaires du Nord Mali, dimanche dernier, a porté sur le conseil de ne pas prendre des initiatives, notamment sécuritaires, qui aggraveraient la mésentente avec Bamako. Le 21 février dernier, l’un des porte-parole de la Coordination des mouvements de l’Azawad avait, en effet, fait état d’une décision de monter avec les loyalistes du Groupe autodéfense touarègue Imghad et alliés (GATIA) une opération de sécurisation contre les groupes djihadistes dans la région de Kidal de Tombouctou sans l’implication de l’Etat malien. Interrogé sur une approbation ou non de l’Etat contrôlé depuis 2020 par des militaires, ce porte-parole a répondu par la négative : «non pas du tout. Nous intervenons dans les zones que nous contrôlons».
Visiblement, le conseil du chef de l’Etat a été écouté. A l’issue de l’audience qu’il lui a accordée, la CMA dans un communiqué a dit avoir évoqué ses attentes et ses priorités, et élaboré «des pistes de solutions pouvant aider à sortir de l’impasse et du statu quo actuel». Le président Tebboune a, pour sa part, réaffirmé l’engagement fort de l’Algérie auprès des Maliens «de tous bords» afin d’aboutir «à une entente sur la diligence d’un élan commun avec des garanties plus strictes». A suivre.
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