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Aboubakr Jamaï a mis au sommet des raisons pour lesquelles le régime marocain manifeste son courroux contre la France, l’affaire du Sahara et la résolution du parlement européen condamnant la situation des droits de l’homme au Maroc.
« Sur le Sahara, je tiens à rappeler que, malgré le fait que l’administration Biden ne soit pas revenu sur la décision de l’administration Trump de reconnaître la souveraieneté du Maroc sur le Sahara, et que depuis que Biden est président, l’administration agit comme si cette reconnaissance n’existait pas. D’ailleurs, une partie du texte de l’allocution de Blinken au Maroc en mars 2022, Blinken a dit : « Nous continuons de considérer le plan d’autonomie du Maroc comme sérieux, crédible et réaliste et une approche potentielle pour réponde aux aspirations du peuple du Sahara Occidental » et il a appuyait le fait que les EEUU était derrière le travail de l’envoyé personnel du SG des Nations Unies. C’est pratiquement mot pour mot ce qu’a dit la ministre française des affaires étrangères Catherine Colonna lors de sa visite au Maroc en décembre et c’est ce qu’a dit Pedro Sanchez devant l’Assemblée Générale de l’ONU », a affirmé le fondateur du défunt Journal Hebdomadaire. « C’est injuste de la part du régime marocain d’en vouloir à la France sur l’affaire du Sahara puisque la France est tout à fait allignée sur les Etats-Unis et l’Espagne », a-t-il ajouté dans une émission sur Radio France.
Selon Jamaï, « la diplomatie marocaine est entrée dans une phase que j’appellerai une « phase d’hystérisation » parce que le problème avec la France n’est pas unique. Avant, il a eu l’Allemagne, l’Espagne. Je rappelle ce qui s’est passé à Ceuta en mai 2021 lorsque le Maroc a pratiquement lâché sa jeunesse, ses enfants mêmes, pour immigrer clandestinement à Ceuta ».
Pour lui, dans les relations franco-marocaines, il n’y a « pas que de l’affect ». « C’est aussi un peuple qui a évolué, a-t-il indiqué. « Le français est beaucoup moins prégnant, on parle beaucoup moins le français, les marocains se tournent beaucoup plus vers l’anglais, certaines pratiques de collusion entre les élites françaises et marocaines ne pessent plus auprès du peuple. Ce mécontentement-là a été instrumentalisé par la régime marocain sur des sujets qui, à mon avis, ne me paraissent pas, justifier la colère que nous avons vu qui sont le dossier du Sahara et la résolution du Parlement Européen ».
Au sujet des problèmes migratoires, M. Jamaï a reproché aux autorités marocaines l’incident de Ceuta. « On doit critiquer le Maroc pour ce qu’il a fait sur Ceuta, qui est un incident très problématique, a-t-il dit, mais le front du problème c’est que le Maroc est, auourjd’hui, considéré comme une première frontière vis-à-vis de l’Europe. C’est un rôle qui est dur, compliqué, vu les tensions migratoires qui existent. C’est normal qu’il requiere un peu plus d’aide de la part de l’UE, mais la réaction du régime n’était pas la bonne en incitant sa population et ses gens à passer à Ceuta ».
« Sur l’affaire du Sahara, je pense qu’il faut la lier à la résolution du Parlement Européen puisque c’est l’une des attaques majeures contre la France. On prétend que le parti Renaissance était derrière cette résolution. Les deux sont liés. Pourquoi? Je fais partie de ceux qui sont en faveur du plan d’autonomie, dont je ne suis pas du tout en faveur de l’indépendance. Mais le plan d’autonomie ne peut être accepté que si le Maroc est une démocracie. Ceux qui se disent les « amis du Maroc » doivent inciter le régime marocain à se démocratiser. Dans ce cadre-là, la résolution du Parlement Européen est, en fait, bienvenu et qu’elle est même tardive puisque les américains ont critiqué la performance des droits de l’homme du Maroc bien avant le Parlement Européen parce que, dans l’intérêt de la marocanité du Sahara, il faudrait que le Maroc puisse présenter une face démocratique et respectueuse des droits de l’homme au reste du concert des nations pour que l’idée du plan d’autonomie soit acceptée et acceptable ».
Rappelant que l’UE a été assez stricte sur le plan des droits de l’homme au moment d’intégrer les pays de l’Europe de l’Est, Jamaï rappelé que le Maroc s’est engagé, dans le protocole lié au statut avancé, à respecter les droits de l’homme. « Donc, le PE est tout à fait justifié pour condamner les atteintes aux droits de l’homme. D’ailleurs, cela fait 25 ans que le PE ne l’a pas fait. D’autre part, le PE a aussi critiqué l’Algérie après le début du Hirak. Laisser entendre que le PE est devenu antimarocain, cela pose un problème ».
« Le régime marocain se prévaut du soutien de l’UE, finalement, vis-à-vis, de son opinion publique interne, pour prétendre que ceux qui demandent la démocratie et se battent pour la liberté d’expression, n’ont pas beaucoup de soutiens. Ceux qui sont aujourd’hui en prison au Maroc pour leurs opinions souffrent du silence des élites politiques européennes, françaises en particulier », a-t-il souligné.
Concernant l’argument avancé par la presse marocaine prétendant que le Maroc menace les intérêts de la France en Afrique, l’expert marocain a reconnu que « la France a des problèmes en Afrique, mais c’est pas à cause de la concurrence marocaine. C’est plus les russes sur le plan politique et les chinois sur le plan économique ».
Pour conclure, M. Jamaï a rappelé qu’il « y a des critiques à faire par rapport à la nature des relations franco-marocaines. C’est un problème qu’une partie du capitale français aime bien être au Maroc parce qu’il y a une collusion avec les élites de l’économie rentière marocaine. J’en veux pour preuve l’implication de Total dans une affaire qui a mené à un rapport qui condamne un oligopole sur les prix, le TGV qui est un non-sens économique pour un pays comme le Maroc et une mauvaise utilisation des ressources du Maroc qui a bien d’autres priorités que d’avoir un train à grande vitesse entre deux villes moyenes qui sont proches… »
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