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Ce 4 avril, l’Algérie se rappelle des millions de mines placées le long de sa frontière par Paris et neutralisées avec l’aide de spécialistes de l’URSS. Un chercheur russe, qui a été témoin de ces travaux pendant son enfance, évoque au micro de Sputnik les conditions dans lesquelles s’est déroulé l’enlèvement des mines.
En octobre 1962, une cinquantaine de spécialistes soviétiques ont débarqué en Algérie pour déminer la frontière du pays truffée de quelque neuf millions de mines posées par la France après la révolution algérienne. Cela s’est fait sur demande d’aide du gouvernement révolutionnaire, dirigé par Ahmed Ben Bella, a déclaré à Sputnik Andreï Tokarev, chercheur russe à l’Institut d’études africaines de l’Académie russe des sciences, qui a été témoin de ses travaux de déminage pendant son enfance.
« Nos soldats (soviétiques) se sont immédiatement attelés au déminage. Cela a duré plusieurs années, de 1962 à 1965, à ma connaissance, environ deux millions de mines ont été désamorcées. Deux millions de mines, c’est deux millions de vies humaines potentiellement sauvées », indique M.Tokarev.
Selon l’historien, qui est arrivé en Algérie pendant les années 1960 avec son père, un journaliste soviétique et ancien combattant, c’est après la déclaration d’indépendance en juillet 1963 et la signature d’un accord entre la France et le gouvernement provisoire de l’Algérie, que la question de déminage est devenue urgente.
Un déminage complexe
Le groupe de spécialistes soviétiques envoyé en Algérie était dirigé par « un très honorable officier », le général de brigade des troupes du génie Piotr Fadeïev. Le déminage s’était avéré très compliqué avec des pertes en vies humaines et des blessés.
« Il y a eu des victimes: l’expert militaire soviétique Nikolaï Piaskorski a été tué, plusieurs personnes ont été blessées, certaines ont perdu la vue, d’autres ont perdu leurs jambes… Ce travail héroïque a coûté cher! », se souvient le chercheur russe.
Néanmoins, un travail énorme a été accompli. Et ces travaux ont été réalisés par toutes les saisons. « La température à l’intérieur des chars, qui tiraient le chalut de mines, atteignait jusqu’à 70-80 degrés. Imaginez: pas d’air conditionné, aucun confort », note M.Tokarev.
« Les Algériens eux-mêmes, voyant les conditions dans lesquelles travaillaient nos soldats, hochaient la tête d’un air approbateur et disaient avec gratitude en levant le pouce: bravo, les Soviétiques! ».
Une aide multiforme
Outre le déminage, l’Union soviétique a aidé l’Algérie dans d’autres domaines. Après la rupture des relations avec la France, Moscou a offert une assistance économique et éducative, souligne M.Tokarev.
« Après le départ des colonisateurs et des spécialistes français, vous pouvez imaginer la situation difficile dans laquelle se trouvaient pratiquement tous les secteurs de l’économie et de la sphère sociale du pays […]. Je me rappelle mon père qui se rendait souvent à bord des bateaux qui venaient au port d’Alger et livraient des tracteurs, des machines, des mécanismes, des vivres en provenance de l’URSS. Je suis toujours fier que notre pays soit venu en aide à l’Algérie! », se confie M.Tokarev.
Les spécialistes soviétiques participaient à la formation des cadres nationaux. Par exemple, une école professionnelle a été construite avec l’aide de Moscou dans une ville algérienne, selon lui.
« Nos pays ont maintenu de bonnes relations. À l’heure actuelle, d’aucuns essaient de perturber ces relations de toutes les manières possibles, profèrent des menaces à l’Algérie et à d’autres dirigeants africains. Mais j’espère que cette mémoire historique entre l’Algérie et la Russie résistera à l’épreuve du temps! », a conclu l’historien.
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