Algérie : le BOOM du PIB, est-ce la percée salutaire ?

Etiquettes : Algérie, PIB, Abdelmadjid Tebboune, 400 milliards de dollars, FMI, gaz, phosphates, minerai, Gara Djebilet,

par Amar Tou

Ce qui justifiait l’étonnement des uns et qui virent rapidement se dissiper leur désenchantement au regard du classement de l’Algérie, ces tout derniers temps, en tête devant la majorité des pays de la région arabe et africaine et devant plus de 50 % des pays du monde, respectivement pour l’indicateur de l’espérance de vie à la naissance, l’indicateur de sécurité alimentaire et pour l’indice de développement humain, se manifeste, actuellement, le même étonnement à l’égard de l’extraordinaire saut du Produit Intérieur Brut (PIB) de l’Algérie (1) qu’a annoncé, ces tout derniers jours, le Fond Monétaire International (FMI) pour l’année 2024.

Mais le plus grand étonnement, même au-delà des frontières de l’Algérie, se manifesta autour de la déclaration du président de la République Abdelmadjid Tebboune au sujet de la croissance du Produit Intérieur Brut de l’Algérie, qu’il a projeté à plus de 400 milliards de dollars à l’horizon 2026, et ce, lors de sa rencontre périodique, le 30 mars 2024, avec des organes de la presse nationale.

Fort étrange que les « critiques » ne soumirent pas à leur analyse et à leur jugement, ce saut exceptionnel que connait le PIB de l’Algérie en 2024, alors qu’il entamait, tout juste, d’échapper à une longue période de stagnation au tréfonds. Là où il s’était embourbé depuis 2015 (165,979 milliards dollars), alors qu’il avait atteint en 2014 (213,809 milliards dollars) ; ce qui s’était traduit, au détriment du citoyen, par un recul profond du PIB par habitant. Celui-ci chuta de 5493,55 dollars à 3.700,770 dollars par habitant pendant la même période, c’est- à- dire de 2015 à 2021.

Avec la même étrangeté, aucun intérêt ne fut accordé à la période de réanimation subséquente (2022-2024) : réanimation relative du marché des hydrocarbures, mais la réanimation la plus importante s’est produite dans le domaine de la production agricole, dans le bâtiment et dans les services, avec l’apparition d’importants indices précurseurs porteurs d’espoir dans les domaines de la production industrielle massive, à forte valeur ajoutée. Ce sont les cas de la sidérurgie et du ciment destinés au marché national et à l’exportation fort croissante, à destination de différentes régions du monde. Ce qui s’est répercuté, en bien et en bon espoir, sur des horizons plus vastes, dans la poursuite accélérée de la croissance de la richesse nationale. Celle-ci est exprimée sous forme d’une croissance accélérée du Produit Intérieur Brut (PIB) global et par habitant, tel que traduisent les données suivantes se rapportant aux années 2022, 2023 et 2024, comme suit (2):

(*) L’insignifiant écart entre ce chiffre (5799,6 ) et le chiffre publié (5720( s’explique par un écart négligeable du nombre utilisé des habitants de l’Algérie.

A l’opposé du peu d’intérêt ou même de sa totale négation, de la part des « critiques » économiques, tant spécialistes que non, à l’égard d’un saut en PIB, supérieur à 42 dollars en l’espace, seulement, d’une année (entre 2023 et 2024), l’intérêt fut, plutôt, exclusivement réservé chez les spécialistes et consorts, en accord unanime sur l’impossibilité de voir se réaliser l’objectif de 400 milliards dollars de PIB que le président de la République a projeté pour l’horizon 2026. Sauf qu’aucun d’eux n’a tenté, par méthodologie intégrée, de démontrer leur arbitraire jugement. Ce qui laisse perplexe l’apprenant non spécialisé et profondément désorienté entre un espoir rose et un pessimisme noircissant l’avenir.

Dans l’attente d’une approche méthodologiquement intégrée réfutant davantage leur mise en doute, nous nous contenterons, ici, de rappeler les éléments de projections objectives que « les metteurs » en doute de l’engagement que le président de la République a pris sur lui :

a- Dans l’industrie,

Nous citerons, pour rassurer dans une approche objective optimiste, d’importants facteurs non encore intégrés, à ce jour, dans l’évaluation du Produit Intérieur Brut (PIB), car ils ne sont pas encore tous réunis pour cette approche, toutes les conditions objectives et sincères d’intégration ; mais dont la réunion complète est imminente :(3)

– Les réserves de l’Algérie en minerai brut de phosphate sont évaluées aux environs de 2,2 (deux virgule deux) milliards de tonnes, au 3ème (troisième) rang mondial. Grâce à l’exploitation du gisement de Djebel Onk au sud de la wilaya de Tébessa à l’Est algérien, à compter de 2026, l’Algérie deviendra l’un des trois premiers pays exportateurs, au monde, du phosphate et divers fertilisants mondialement les plus demandés ; aidée, en cela, par la disponibilité en Algérie, des trois composants nécessaires à l’industrie de ces produits (NPK) les plus fertilisants que sont : l’azote ou Nitrogène (N), le phosphore (P) et le potassium ou potasse (K), contrairement aux pays concurrents qui, généralement, ne possèdent pas le potassium ou potasse et qu’ils importent, nécessairement. C’est un mégaprojet intégré (le premier en son genre) impliquant plusieurs wilayas. Deux voies parallèles de chemin de fer raccordant les zones d’extraction du minerai de phosphate et les zones de sa transformation et de son exportation, sont en achèvement. Le quai dédié à l’exportation du minerai et produits dérivés du phosphate, a vu ses travaux de réalisation lancés le 23 avril 2024 pour être prêt à l’utilisation en 2026.

– Les gisements de zinc et plomb de « Tala Hamza » et « d’Oued Amizour » situé dans la wilaya de Béjaïa, l’un des plus grands au monde », permettra d’extraire, annuellement, quelques deux millions tonnes de minerai brut de zinc pour produire quelque 470.000 tonnes de concentré de zinc et quelque 30.000 tonnes de concentré de plomb. Les prix de ces minerais connaissent, actuellement, des hausses croissantes sur les marchés mondiaux respectifs. Ils sont, en effet, respectivement, de 2.271 dollars la tonne pour le zinc et de 1.989 dollars la tonne de plomb. Les travaux de réalisation du projet ont été lancés en novembre 2023. La production marchande est projetée à compter de 2026.

– Le gisement du minerai de fer de Gara Djebilet de Tindouf entrera en phase d’exportation en 2026 avec des exportations d’une valeur de l’ordre de 10 à 14 milliards ded ollars par an en minerai brut, en dehors des quantités destinées à l’Industrie de différents produits dans les usines situées en Algérie, tel le Complexe sidérurgique de Bellara- Jijel au capital mixte algéro-qatari, le Complexe sidérurgique turc d’Arzew-Oran, le Complexe sidérurgique public d’El Hadjar-Annaba et au projet du Complexe sidérurgique de Béchar,

– Le projet du Complexe sidérurgique de Béchar rentrera en exploitation, en 2026, d’une capacité de deux millions de tonnes de fer à béton et des rails de chemin de fer. Ces derniers sont actuellement importés dans le cadre des contrats de réalisation de l’ambitieux programme ferroviaire en cours de réalisation et celui projeté à moyen terme. Les travaux de réalisation de la première unité de ce complexe industriel, viennent d’être lancés.

– Les capacités de production du Complexe sidérurgique Algéro-Qatari de Bellara-Jijel, sont en cours de dédoublement. La réception de cette extension est projetée pour 2026. Les capacités passeront, alors, de deux millions tonnes, actuellement disponibles, à quatre millions tonnes projetés,

– L’usine de ciment de Djelfa dont le chantier est en reprise par le groupe public GICA, entrera en phase de production avant 2026, avec des capacités de production annuelles de cinq millions de tonnes, portant les capacités totales nationales de production de ciment dans les deux secteurs : privé et public, à 45 millions tonnes, en premier rang, avec l’Egypte, dans le monde arabe,

– Les exportations du gaz naturel algérien avant l’horizon 2026, dans le cadre de l’engagement pris par l’Algérie en exécution des directives du président de la République qu’il a données à l’occasion de l’ouverture de la 30ème Foire de la production nationale de l’année 2022, visent à atteindre le seuil de 100 milliards de m³ par an en exportations de gaz naturel, et ce, en doublant sa production (de 2022) ; les exportations de l’année passée étaient de l’ordre de 50 milliards de m³.

Dans cette logique, la production de l’Algérie en gaz naturel a, effectivement, déjà atteint en 2023, quelque 136 milliards de m³. C’est-à-dire, plus de 33,34 % de plus, depuis les instructions présidentielles en l’espace d’une année, ce qui autorise l’espoir d’atteindre, sans difficulté, l’objectif fixé par le président de la République,

– Vingt-six (26) projets de recherches et d’exploitation minière ont été, dès 2021, programmés. Ils sont de portée structurante, à valeur ajoutée élevée, situés dans 25 wilayas du pays et dans des domaines sensibles : le cuivre, le manganèse, les sels, les projets polymétalliques, les matières premières minières réfractaires, la bentonite, le feldspath, le souffre, le lithium, les pierres semi-précieuses et le quartz minier, (4) de nature à servir, sûrement, les objectifs de diversification et d’intégration économiques, d’équilibre et d’indépendance. La découverte, toute récente, du lithium comme terre rare dont l’Algérie détienne 20 % des réserves mondiales, ouvre très larges les horizons à l’Industrie de voitures électriques, des composants électroniques « smarth phones », des ordinateurs et autres produits électroniques, incitant beaucoup d’intérêt d’investissements extérieurs en Algérie.

– Le Complexe ‘Koutama’ -Jijel d’huile de table (alimentaire) entrera sous peu en production, à l’été prochain (2024). Il est le plus important dans le monde arabe avec des capacités de production de 400 mille tonnes par an,

– De même que l’usine de sucre de Khémis El Khachna-Boumerdès d’une capacité de production de 2.000 tonnes par jour qui est programmée pour entrer en production au début de l’été prochain (2024),

– La remise en activité progressive de dizaines d’usines industrielles publiques qui étaient victimes de privatisations abusives ou dont les capacités de production et les activités furent profondément verticalement et horizontalement réduites et mises même, à l’arrêt,

Uniquement ce concret programme, favorisera, à coup sûr, l’augmentation de la richesse nationale. C’est-à-dire, le relèvement du Produit Intérieur Brut (PIB) global et par habitant, avec d’immédiats effets partiels mais concrets à l’horizon 2026, par la voie d’industrialisation et/ou par celle d’exportations sous forme de matières premières et/ou de produits industriels finis et/ou semis finis.

Lors du discours prononcé, à l’occasion de la Journée mondiale du Travail du 1er Mai (2024), le président de la République annonça, agréablement, des indices de grande satisfaction relatifs à l’enregistrement d’heureuses améliorations dans la structure du PIB de l’Algérie. Celui-ci, précisa le président de la République, a enregistré, pour la première fois, depuis son effondrement durant la longue période allant de 1986 à 2021, un redressement spectaculaire dans la part de l’Industrie dans le PIB, en quittant une stagnation, au plancher, qui a duré toute cette longue période au niveau de 3 à 5 %, pour une situation relativement meilleure et prometteuse de 8 à 9 %. Et ce, dans une dynamique devant retrouver, d’abord, les 16 à 18 % de 1985 pour espérer se mettre, ensuite, au niveau de la moyenne de 18 à 23 % atteinte, à l’heure actuelle, par les pays industrialisés, en général.(5)

Le programme de redressement industriel en cours en Algérie, celui ayant déjà engagé les lourds investissements industriels sus-rappelés et les Investissements Directs Etrangers (IDE) attendus de la haute incitation instaurée par la nouvelle législation en la matière (loi n°22-18 du 24 juillet 2022), l’autorisent amplement à moyen terme.

Le président de la République, à la même occasion, situe la part atteinte, déjà à l’heure actuelle, par l’Agriculture dans la structure du PIB algérien, à quelque 18 % (souhaitée à terme à 30 %) contre 9 à 12 % durant les 32 dernières années. Même si elle continue à progresser, elle devrait, à terme, sous les effets de l’inévitable industrialisation de l’agriculture, tendre vers une part bien établie dans les économies industrialisées qui sont autant développées dans l’agriculture sous toutes ses formes. Cette part reviendrait, alors, vers les 2 à 3 % du PIB industrialisé qui comprendra, dans la part de l’Industrie, une forte part de l’agro-industrie qui, auparavant, était rangée dans la part de l’Agriculture sous sa forme primaire. Une lecture comparative historique de ce phénomène dans les pays déjà très industrialisés ou ceux dont l’industrialisation est fortement engagée, confirme nettement ce processus, à de très rares exceptions près qu’explique, transitoirement, leur histoire économique comme l’illustre le cas de la Corée du Sud.

b- Dans l’agriculture

– La cueillette des fruits de la mise en valeur des terres du Grand Sud et particulièrement l’organisation de deux saisons agricoles (deux récoltes) par an pour la culture des céréales (le blé et le mais alternativement). Les conditions de réussite permanente sont désormais réunies par le raccordement des espaces agricoles mis en valeur, au réseau électrique pour permettre l’utilisation de l’irrigation axiale à grande échelle pour couvrir de vastes espaces,

– La réalisation du géant Complexe de production de la poudre de lait dans la wilaya d’Adrar en association avec le Qatar. L’Algérie atteindra son autosuffisance en la matière en produisant, au moins, l’équivalent du niveau actuel des importations en ce produit d’une valeur à l’importation, d’environ 600 millions de dollars, annuellement, en plus de la viande rouge dont une partie de l’ordre de 400.000 tonnes, est encore partiellement ou totalement importée, en tant que de besoin, (6)

– Inciter à développer et promouvoir l’Agro-industrie après l’apparition permanente et croissante de productions agricoles primaires. Ce qui permettra de relever leur valeur marchande en rémunérant mieux le travail agricole et en relevant le niveau du PIB en tant que productions industrielles à l’image des structures des PIB des pays industrialisés,

c- Dans la numérisation

– « Instrumenter la numérisation » afin de réduire l’économie souterraine (ou économie parallèle) qui représente, selon l’évaluation officielle, « quelque 10.000 milliards de dinars ou, exprimée en dollars, quelque 90 milliards de dollars ; sachant que le phénomène ne disparaitrait pas totalement car la numérisation ne pourrait pas venir à bout des fausses déclarations généralement pratique courante lors des déclarations à la production, lors des transactions commerciales, des chiffres d’affaires, des transactions foncières, lors des enregistrements notariaux des baux de location de locaux commerciaux ou d’habitations, à la déclaration du nombre d’employés dans le secteur privé, leurs niveaux de rémunération et autres activités sociales.

En attendant, l’atténuation du phénomène, à côté de l’espéré de la généralisation de la numérisation, il serait tout indiqué à étudier les expériences des pays européens quant à l’intégration totalement ou partiellement, de l’économie souterraine ou parallèle, dans le Produit Intérieur Brut (PIB) à l’image de l’expérience italienne à titre d’exemple. (7) A ce moment là et en plus de ce qui est attendu de la nouvelle production industrielle et de la production agricole valorisée par son industrialisation, point de doute que le Produit Intérieur Brut (PIB) de l’Algérie dépassera, à l’horizon 2026, le seuil de 400 milliards de dollars, à la condition d’exécuter le programme tracé dont une partie est sus-reprise, avec toute la rigueur requise.

*Economiste, ancien ministre

Notes

(1) Le Fond Monétaire International. 19 avril 2024
(2) – De 2015 à 2021, les rapports annuels de la Banque d’Algérie
– De 2022 à 2024, le Fond Monétaire International
– Déclaration du Président de la République et projection de la population algérienne à 2026,
(3) Amar Tou. Contribution publié dans le journal Ec Chourouk en langue arabe et dans le quotidien d’Oranen langue française sous le titre : Les minéraux industriels, pour la Thésaurisation ou l’exploitation immédiate ?
(4) Le Président de la République 1. Abdelmadjid Tebboune Conseil des ministres tenu le 3 octobre 2021- l’Agence Algérie Presse-APS publié le 3 octobre 2021 à 20 :39
(5)Discours du Président d e la République Abdelmajid Tebboune à l’occasion de la fête dy travail du premier mai 2024.
(6) El Moudjahid. Site électronique publié le le 1er mai 2024
(7) Pierre Antoine Delhommais. Le point. https//www.le point.fr… publié le 05/06/2014 oohoo
– l’économie souterraine sera désormais prise en compte dans la richesse du pays (PIB)

– Economie.gouv.fr https//www.economi…l’économie souterraine dans le PIB : avancées et limites.

Le Quotidien d’Oran, 20/05/2024

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