Etiquettes : Algérie, Emirats Arabes Unis, EAU, Palestine, Gaza, normalisation, Accords d’Abraham, Conseil de coopération du Golfe, Mohammed Dahlan, autorité palestinienne,
par Mustapha Aggoun
On pense généralement que l’ennemi vient de l’extérieur, ce qui pousse à renforcer les frontières pour empêcher les incursions ennemies.
Dans cette situation, on adopte une position ferme, proportionnée à l’attaque attendue, prêt à faire face à toute attaque, de quelque côté qu’elle vienne. Sauf qu’une attaque inattendue, imprévisible, ou ne faisant pas partie du plan de défense est celle qui vient de l’intérieur. Cela désorganise les défenses, plonge les défenseurs dans la confusion, bouleverse les plans et les fait hésiter entre avancer en laissant leurs arrières exposés à la trahison, ou reculer en laissant les frontières ouvertes. C’est ainsi que le pays tombe sous les coups des poignards perfides et des flèches de la trahison.
C’est ce qui est apparu clairement au cœur de la nation arabe : un poignard traître et empoisonné, tiré de l’intérieur de notre nation islamique et arabe, a blessé son cœur, fait saigner son corps, affaibli son dos, diminué son immunité, et semé la haine en son sein. Il a traité tous ses ennemis comme des amis, s’est allié avec eux contre ses voisins, ses frères, ses coreligionnaires, et ses compatriotes, semant la corruption à l’est et à l’ouest, devenant pire que les véritables ennemis.
Ou bien est-il lui-même l’ennemi, mais déguisé en frère fidèle, en voisin allié, et en soutien honnête des musulmans et des Arabes. Il s’agit des Émirats Arabes Unis. Ils ont surpris autant l’ennemi que l’ami, l’éloigné comme le proche, l’étranger comme le frère, par leurs crimes et leurs actes abominables. Ils nécessitent un moment de réflexion pour être crûs, tant ils sont choquants et douloureux. Si ces actes étaient venus d’un ennemi, nous ne serions pas surpris, car il est notre adversaire et nous nous attendons à tout de sa part. Mais venant d’un frère avec qui nous partageons des relations profondes, des liens solides, religieux, linguistiques, fraternels, humains et de destin, c’est là une véritable situation de désolation dans tous les sens du terme. Nous n’aurions jamais imaginé nous retrouver un jour dans une situation où nous devrions craindre et redouter, plus encore, ceux de notre propre foi et de notre propre histoire. Qu’ont donc fait les Émirats Arabes Unis à leurs frères et à leurs voisins ?
Les Émirats Arabes Unis sont un petit État arabe du Golfe. Composé de sept émirats, c’est un pays riche en pétrole comme ses voisins du Golfe. Récemment, ce petit État a émergé comme un acteur principal et central dans la crise de la région arabe et le déclenchement des conflits. À peine une crise est-elle terminée qu’une catastrophe plus grande encore la remplace, à tel point que les Émirats sont devenus la source de la plupart des calamités qui ont touché en profondeur les pays de la région.
Les Émirats ont soutenu les régimes dictatoriaux et corrompus des pays arabes, de toutes leurs forces, empêchant leur chute et combattant toute révolution contre ces régimes. Ils se sont opposés à toutes les révolutions du Printemps arabe, puis ont accueilli les symboles des anciens régimes dictatoriaux, coordonnant avec eux des contre-révolutions et même des coups d’État. Nous ne devons pas oublier que les Émirats ont été les premiers à planifier le blocus et la guerre contre le Qatar, incitant l’Arabie Saoudite, l’Égypte et Bahreïn à boycotter puis à assiéger le Qatar, réussissant ainsi à frapper l’unité du Conseil de coopération du Golfe.
Les Émirats ont également bloqué la voie à la résistance palestinienne, qui était la seule épine restante dans la gorge de l’entité sioniste. Ils ont incité contre le droit de résistance à défendre sa terre, qualifiant les mouvements de résistance en Palestine de terroristes. Les Émirats ont soutenu ce que l’on appelle le « Deal du Siècle » proposé par le président américain Donald Trump, un prétendu accord de paix entre les Palestiniens et l’entité sioniste, prévoyant le partage de la Palestine, la mort de leur cause, l’annulation du droit au retour, et la reconnaissance pleine et entière de l’État d’Israël avec Jérusalem pour capitale. En résumé, c’est un accord de vente de la Palestine.
Les Émirats ont ensuite consolidé leur partenariat avec Mohammed Dahlan, le pire agent rejeté par l’Autorité palestinienne, théoricien des révolutions contre-révolutionnaires. Ils semblent envisager de le préparer à remplacer Mahmoud Abbas, en coordination avec Israël. Le rapprochement des Émirats avec Dahlan s’est encore renforcé par le récent mariage entre un des princes émiratis et la fille de Mohammed Dahlan.
D’un autre côté, les relations entre les Émirats et Israël ont progressé de manière significative dans le processus de normalisation, sachant qu’ils entretenaient déjà des relations avec Israël depuis un certain temps, mais de manière non officielle.
Aujourd’hui, ils augmentent et intensifient les visites entre eux et Israël, incitant même d’autres pays arabes à les suivre. De plus, les Émirats ont manipulé les habitants de Jérusalem, achetant des maisons dans les vieux quartiers de la ville pour les vendre ensuite aux colons juifs, un stratagème prémédité avec les sionistes pour faciliter le transfert de propriété des Palestiniens à l’occupant sioniste.
Au Yémen, le 29 août 2019, les Émirats ont frappé l’armée nationale yéménite, avec laquelle ils étaient alliés pour combattre les Houthis, soutenant des entités illégitimes comme le Conseil de transition du sud, qui a mené le coup d’État contre la légitimité, et finançant des milices non officielles. Le président Hadi a dénoncé la complicité des Émirats dans ce coup d’État. Des fuites récentes ont révélé l’intention des Émirats de diviser le Yémen. Ils ont ensuite trahi leur partenaire saoudien en se retirant de la coalition arabe contre les Houthis et en améliorant leurs relations avec l’Iran, retournant à la normale.
Sur le plan sécuritaire répressif, les Émirats ont construit des prisons au Yémen, où des violations des Droits de l’homme ont été révélées. Ils ont aussi aggravé les relations entre le Yémen et Oman après la guerre au Yémen, en particulier dans la province de Mahra, dans l’est du Yémen, considérée comme une extension géopolitique de Mascate (selon Oman). Dans les pays du Maghreb et d’Afrique du Nord, les Émirats ont soutenu Khalifa Haftar en Libye, renversant le Conseil national et contribuant à prolonger le conflit libyen. Ils ont également menacé la sécurité et la paix dans la Corne de l’Afrique. Les Émirats ont aussi déstabilisé la sécurité intérieure en Somalie, avant d’être expulsés du port de Berbera. Ils ont ensuite tenté d’intervenir au Soudan après sa révolution pour renverser la révolution et soutenir l’armée, la détournant de ses objectifs, mais ils ont échoué grâce à la vigilance des Soudanais.
Les Émirats ont également tenté de miner le mouvement populaire en Algérie et de faire échouer la révolution, essayant de reproduire le scénario de Sissi en Algérie. Cependant, le peuple algérien a contrecarré ces tentatives par son unité et son adhésion à ses objectifs.
En Tunisie, les Émirats ont tenté, sans succès, de persuader le président Béji Caïd Essebsi de se débarrasser du mouvement Ennahdha, ce qui a tendu les relations entre la Tunisie et les Émirats. Il y a également des rapports sur des relations secrètes entre les Émirats et le Hezbollah libanais, avec un accord entre eux pour unifier leurs positions sur le Yémen, la Syrie et le Qatar.
Quant au Soudan, les Émirats ont tenté de miner la révolution soudanaise en 2019, soutenant le Conseil militaire de transition contre le mouvement populaire, cherchant à installer un gouvernement militaire pro-Émirats à la place du régime de transition. Les Émirats ont aussi joué un rôle dans le conflit entre l’Armée et les Forces de soutien rapide, en soutenant ces dernières pour affaiblir l’armée et renforcer leur influence au Soudan. Ils ont également poussé pour que le Soudan normalise ses relations avec Israël, en échange de levées de sanctions économiques, un mouvement qui a créé des tensions internes et politiques dans le pays.
En Afrique du Nord, la politique des Émirats vise à soutenir les régimes autoritaires et les forces militaires contre les mouvements populaires et démocratiques. Ils utilisent leur influence économique pour manipuler les politiques locales, souvent en soutenant des acteurs non-étatiques ou en finançant des factions pour déstabiliser les gouvernements. Cette approche a souvent prolongé les conflits et empêché les transitions démocratiques. Leur stratégie vise à créer des régimes favorables à leurs intérêts et à contrer l’influence des mouvements islamiques et démocratiques dans la région. Les Émirats sont devenus un acteur clé dans la manipulation des dynamiques politiques au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, en utilisant leur puissance financière et leur influence pour façonner les événements à l’avantage de l’Occident et des sionistes.
Le Quotidien d’Oran, 26 juin 2024
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