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Par Mohamed Habili
On sait par quoi s’est soldé le premier tour des législatives anticipées françaises, décidées à la surprise générale par le président Macron dans la minute suivant l’annonce des européennes du 9 juin : par l’arrivée en première position de la coalition d’extrême droite dominée par le RN, un résultat qui lui par contre n’a étonné personne tant il était conforme aux attentes.
La montée en puissance de l’extrême droite raciste en France ne datant pas d’hier, c’était bien sûr une erreur politique de prononcer la dissolution alors qu’elle venait d’enregistrer une éclatante victoire électorale. Si dimanche prochain, elle obtenait la majorité absolue, et que son chef de file était appelé à former le nouveau gouvernement, ce serait un désastre pour le président français comme pour la coalition centriste qui le porte, qui s’était présentée comme le rempart devant l’extrême droite et qui au bout du compte lui aura plutôt servi de tremplin.
Pour nous autres Algériens, une victoire du RN et de ses alliés, c’est comme si l’OAS s’emparait du pouvoir en France plusieurs décennies après avoir connu la défaite en Algérie. Le RN, ce n’est jamais que l’autre nom de l’OAS. Il dit avoir rompu avec l’antisémitisme de ses origines. Peut-être. Il n’a jamais dit en revanche qu’il avait fait son deuil de l’Algérie. Soyons convaincu que tout le mal qu’il pourrait nous faire, il nous le ferait.
Mais le pourra-t-il ? Il lui faudrait pour cela non seulement être en capacité de former un gouvernement mais être réellement en mesure de gouverner la France, de surcroît dans le cadre d’une cohabitation avec un président qui dès dimanche au soir a appelé à lui faire barrage. Le RN est l’autre nom de l’OAS, d’un point de vue algérien, mais du point de vue français, il est l’incarnation même de la crise politique, ce qui peut arriver de pire à tout système politique.
C’est une seule et même chose de dire que l’extrême droite s’empare du pouvoir en France, ou même seulement d’une partie de ce pouvoir, ou que la France plonge dans la crise politique. Celle-ci semble d’autant plus certaine que Macron ne peut recourir dans l’immédiat à une nouvelle dissolution. Cela il ne peut le faire qu’au bout d’une année, à supposer qu’il soit toujours là.
Or on serait incapable de dire ce que serait la France dans une semaine, Macron ayant pris la lourde responsabilité d’ouvrir la boîte de Pandore, et l’on voudrait néanmoins être certain de ce qu’elle serait dans une année ? Il s’en trouvera pour objecter que tout n’est pas encore perdu, qu’il reste une semaine pour se ressaisir, éviter le pire, faire le bon choix, endiguer la marée noire. Tant qu’il y a la vie, il y a l’espoir. Cela reste vrai. Sauf que ce serait bien la première fois qu’une fascisation en développement depuis des décennies s’annihile à l’instant même où elle s’apprête à prendre le pouvoir.
Pour autant, tout n’est pas sombre dans le tableau qu’offre aujourd’hui la France. Bien des signes sont visibles qui montrent que si l’extrême droite raciste accède au pouvoir, elle ne le gardera pas longtemps. D’ailleurs c’est peut-être cela le vrai calcul derrière la décision de dissoudre.
On dirait qu’en la prenant Macron hâtait l’accession au pouvoir d’un parti qui ne pensait pas pouvoir y parvenir aussi tôt, comme si le véritable but était de l’entraîner dans une souricière.
Le Jour d’Algérie, 01 juillet 2024
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