Mort d’un tortionnaire, le poids de l’Histoire

Jean-Marie Le Pen a reconnu son passé de tortionnaire en Algérie

Jean-Marie Le Pen s’est éteint, mardi 7 janvier, à l’âge de 96 ans. Ce nom, qui a marqué la politique française pendant des décennies, évoque des souvenirs et des polémiques qui dépassent largement le cadre du débat public.

Co-fondateur du Front national, devenu Rassemblement national, il a incarné, pour certains, un bastion de conservatisme. Pour d’autres, il a représenté une figure de division, de révisionnisme et de violences. Mais au-delà de la politique, son histoire personnelle se confond avec l’une des pages les plus sombres de la France contemporaine : la guerre d’Algérie.

Engagé en 1956 dans le 1er régiment étranger de parachutistes, Jean-Marie Le Pen fut chef de section lors de la bataille d’Alger, un épisode tristement célèbre pour les méthodes brutales employées par l’armée française contre les indépendantistes du FLN. La torture, érigée en outil de guerre, y fut systématisée. Et Le Pen, loin de réfuter ces pratiques, les revendiqua.

En 1962, l’historien Pierre Vidal-Naquet l’accusait avec des preuves solides d’avoir torturé des prisonniers algériens. Des témoins, tels que le syndicaliste Lakhdari Khelifa, ont décrit avec précision les supplices subis, notamment la gégène et la baignoire. Face à ces accusations, Le Pen ne niait pas. « Je n’ai rien à cacher. J’ai torturé parce qu’il fallait le faire », déclarait-il sans détour.

Pourtant, ces actes, qui révoltent aujourd’hui encore, ne furent jamais jugés. En France, le silence de la justice sur ces exactions contraste avec l’acharnement de Le Pen à minimiser les crimes nazis, pour lesquels il fut condamné. Ce paradoxe témoigne d’un malaise collectif persistant : comment affronter un passé colonial qui continue d’habiter notre présent ?

La mort de Le Pen ne referme pas ce chapitre, elle en souligne plutôt les failles. Les victimes, réduites au silence par la violence et l’impunité, n’ont jamais obtenu justice. Et cette mémoire fragmentée, marquée par des décennies de déni, reste une blessure vive pour l’Algérie et pour une partie de la société française.

Jean-Marie Le Pen emporte avec lui l’image d’un homme qui n’a jamais renié ses convictions, aussi choquantes et inacceptables soient-elles. Mais il laisse aussi un rappel douloureux : celui des responsabilités que la France doit encore affronter. Reconnaître la vérité, c’est un devoir envers les victimes, mais aussi une étape indispensable pour apaiser les mémoires et construire un avenir commun, débarrassé des ombres du passé.  

Riad 

Réflexion

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