Importations algériennes de céréales : La Russie cherche à supplanter la France
Après avoir refusé l’accès à une cargaison de blé en provenance d’Europe et blacklisté le fournisseur, l’Algérie ouvre-t-elle la voie de son marché à la Russie ? Le marché algérien du blé était interdit à la Russie pour raison de qualité (taux de grains punaisés trop élevé), mais le cahier des charges de l’Office des céréales OAIC (Office algérien interprofessionnel des céréales), s’est assoupli en portant le taux de 0,2 % à 0,5%, ouvrant ce gros débouché au blé d’origine russe. Même si la France est déjà bien enracinée dans le marché algérien, en raison de sa présence historique, de nouveaux entrants entendent bien contester ce quasi-monopole. Et la Russie ne cache pas ses ambitions à cet égard.
Par Réda Hadi
Ayant envoyé, il y a quelques semaines, une cargaison de 28 000 tonnes de cette céréale vers le pays, l’ex-URSS se donne désormais pour objectif d’y expédier 1million de tonnes durant la campagne 2021/2022, qui démarrera en juillet prochain. L’annonce a été faite par Eduard Zernin, responsable de l’Association russe des exportateurs de blé. Un tel volume devrait permettre à la Russie de tirer profit des opportunités économiques liées à un marché céréalier qui compte parmi les plus dynamiques du monde.
D’après les données du Département américain de l’agriculture (USDA), l’Algérie est en effet, le deuxième consommateur africain de blé, derrière l’Egypte, mais devant le Maroc, avec un volume estimé à 11 millions de tonnes en 2020/2021. Pour atteindre son objectif, la Russie bénéficiera, notamment, de l’assouplissement des exigences phytosanitaires de la part des autorités locales.
Une vieille ambition russe
L’intention des Russes de pénétrer le marché algérien n’est pas récente. Selon des sources proches de ce dossier, cela fait au moins deux ans en effet que ce pays négocie avec les autorités algériennes, échantillons de blé à l’appui, pour trouver un moyen de commercer avec Alger.
Les céréaliers européens (surtout français) qui commerçaient sur du velours et en terrain conquis, se disent inquiets et préoccupés par l’intention des autorités algériennes d’ouvrir le marché national de blé à la Russie. L’Algérie, qui a déjà importé du blé russe en 2017, envisage de s’approvisionner totalement en Russie. L’Algérie n‘a, en réalité, jamais caché ses intentions de diversifier ses approvisionnements, particulièrement pour des produits sensibles ou stratégiques.
M. Radja, expert en agronomie et consultant à la FAO, estime que «l’Algérie est dans son droit de diversifier ses sources d’approvisionnements, et ce, d’autant plus que c’est la loi de l’offre et de la demande. Pourquoi refuser un blé qui répond aux critères de qualités/prix,», s’interroge l’expert, qui explique aussi que du point de vue technique « la hausse du taux de matière punaisée, entre dans les normes internationales admises et agréées. Le changement de taux n’influe en rien sur la qualité . Le blé est jugé sur des critères tels que l’itinéraire technique, le type de sol, la méthodologie de culture. Le stress hydrique, surtout pendant la période de l’accumulation des réserves dans le grain. Or, apparemment, nos spécialistes l’ont jugé apte, faisons leur confiance » a-t-il conclu.
Quant à l’UGC (United Grain Company), elle confirme et révèle à l’agence Reuters : «Nous comptons stimuler nos exportations de céréales et ne plus nous suffire des gros clients que sont la Turquie, l’Egypte et le Bangladesh, en visant l’Algérie et l’Irak, deux marchés de blé d’importance mondiale. »
Le blé n’est pas d’ailleurs le seul produit russe auquel l’Algérie s’intéresse. Selon des sources citées par les médias russes, Moscou et Alger ont également évoqué les exportations de produits laitiers et de viande bovine russes.
L’Algérie est dépendante des importations de blé tendre avec des volumes annuels d’environ sept millions de tonnes venant, principalement, de la France (premier fournisseur), du Canada et d’Allemagne.
Ecotimes, 29 juin 2021
Etiquettes : Algérie, France, Russie, blé,
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