Catégorie : Maghreb

  • L’axe Rabat-Tel-Aviv, le danger sur l’Algérie

    Maroc, Algérie, Israël, Iran, Sahara Occidental, Palestine, #Maroc, #Algérie, #Israël,

    Par Nadji Azouz

    En marge de la récente visite inédite à Casablanca (12 août) du ministre des Affaires étrangères Yaïr Lapid, une source diplomatique israélienne a, sous couvert d’anonymat, indiqué à l’AFP que le Maroc et Israël « sont une partie importante d’un axe pragmatique et positif dans la région face à un axe qui va en sens inverse et qui inclut l’Iran et l’Algérie ».

    Il serait ainsi question de deux axes, dont l’un, l’irano-algérien est en fait virtuel car n’ayant aucun fondement réel, et l’autre, l’israélo-marocain qui existe bel et bien, de l’aveu même de cette source diplomatique de l’AFP. Cet axe Rabat-Tel-Aviv n’est cependant pas né avec l’établissement des relations diplomatiques entre les deux capitales en 2021, mais possède une base historique de six décennies de coopération secrète active notamment dans le domaine diplomatique, militaire et sécuritaire.

    Cette collusion est assurément un danger pour l’Algérie qui demeure la seule vraie puissance régionale hostile aux deux Etats coloniaux, l’un du Sahara Occidental et l’autre de la Palestine. L’alliance entre les deux pays vise justement à démembrer le seul Etat encore debout de la région qui s’oppose à toute normalisation avec l’entité sioniste.

    Au sujet de l’établissement des relations diplomatiques entre les deux pays, le ministre des Affaires étrangères Nacer Bourita a précisé lui-même qu’il ne s’agit pas d’une normalisation, mais d’une reprise « normale » de rapports anciens entre les deux parties. Des relations d’un genre particulier dans le monde arabo-musulman où le Maroc est le seul pays islamique reconnaissant sa part de judaïté dans sa Constitution.

    Durant la Seconde Guerre mondiale, le roi Mohammed V avait défendu sa communauté juive contre les lois antisémites du régime de Vichy, avec une abnégation qui lui a valu la vénération des Juifs marocains. Au Maroc, les Juifs sont des sujets du Roi à part entière et les Juifs marocains forment en Israël une puissante communauté. Une collectivité dont les élites politiques, militaires, scientifiques, économiques et culturelles sont très influentes, notamment dans la presse, le parlement, le gouvernement, l’armée et les services de renseignement où ils occupent souvent le haut du pavé.

    On estime aujourd’hui que quelques 700 000 Israéliens sont originaires du Maroc sur une population totale d’environ 6,2 millions. Quelques 160000 personnes sont nées au Maroc et 337 000 en Israël d’un ou de deux parents marocains, le reste constituant la troisième génération. Or ces israélo-marocains ne se sont pas contentés d’entretenir une mémoire individuelle et familiale du pays natal dans l’espace domestique privé. Ils sont également à l’origine de l’introduction dans l’espace public de symboles traditionnels du Makhzen, le drapeau notamment et la célébration de fêtes nationales marocaines.

    Il s’agit donc, aujourd’hui, de la consécration diplomatique de liens protéiformes, anciens et forts entre le Maroc et Israël. Ces deux partenaires coopéraient déjà, dans un secret relatif, depuis plus de 60 ans, notamment en matière de renseignement, de sécurité, de défense et de diplomatie. Et il est établi, dans ce cadre, que l’État hébreu a aidé le Maroc à obtenir des armes et du matériel militaire de pointe, et a contribué aussi au développement du savoir-faire technologique des FAR. On n’ignore pas non plus que ce sont les Israéliens qui ont inspiré à Hassan II l’idée de la Marche Verte sur le Sahara Occidental.

    Et on sait aussi que ce sont des égéries israéliennes qui lui ont soufflé l’idée de murs de protection militaire dans les territoires du Rio de Oro et Saguia El Hamra. C’est archi connu, ce sont donc les Israéliens qui ont aidé les Marocains à édifier le long mur de sable au Sahara occidental, inspiré de la ligne Bar-Lev, cette chaîne de fortifications militaires le long de la côte du canal de Suez après la conquête du Sinaï. Il est également établi que c’est le Mossad qui a d’autre part aidé le Palais royal à assassiner à Paris, avec la complicité active ou passive des services français, Mehdi Ben Barka, chef de l’opposition redouté par Hassan II, moins de cinq ans seulement après son accession au trône.

    L’opération Yachin

    Hassan II avait par ailleurs autorisé l’émigration massive de Juifs marocains vers Israël (environ un million). Chronologiquement, l’accession au trône d’Hassan II favorise un accord entre lui et le Premier ministre israélien David Ben-Gourion sur l’émigration des Juifs marocains alors que son père Mohammed V l’avait interdite en 1959. Dans le cadre de cet accord, Israël a rémunéré le Maroc pour chaque Juif autorisé à faire son alyah en Israël : C’est le début de « l’Opération Yachin ». Et c’est à partir du Maroc que des agents du Mossad étaient entrés en Algérie en 1960 pour mener des attentats, en les imputant au FLN, contre les juifs notamment à Constantine pour les contraindre à faire leur exode en Israël, en témoigne les archives du Mossad publiées en aout 1998 par Yediot Aharonot.

    En contrepartie, Israël a livré des armes au Maroc qui ont servi contre l’Algérie dans la guerre de sables en 1963. L’Etat hébreu a également formé ses forces de sécurité et apporté son appui pour des opérations de renseignement.
    Là aussi, c’est de notoriété publique : En 1965, Hassan II permet au Mossad de mettre sur écoute les salles de réunions et les chambres privées des dirigeants du Maghreb et du Machrek, lors d’un sommet extraordinaire arabe à Casablanca, destiné à évaluer les possibilités d’une guerre collective contre Israël.

    Les Israéliens reçoivent alors des informations déterminantes qui leur ont permis de déclencher la guerre préventive victorieuse des Six jours en 1967. Les enregistrements gracieusement fournis par Hassan II aux espions du Mossad, présents en masse à Casablanca, ne révèlent pas seulement la division qui prévalait alors dans les rangs arabes, mais aussi que les pays du Moyen-Orient étaient peu préparés à la guerre. Ces détails ont été révélés en 2016 par le général Shlomo Gazit, ex-dirigeant des renseignements militaires israéliens, dans une interview au Yedioth Ahronoth.

    Selon Ronen Bergman, journaliste d’enquête et analyste militaire israélien pour le Yedioth Ahronoth et le New York Times, le Maroc a demandé qu’Israël lui rende la monnaie de sa pièce en l’aidant à éliminer Mehdi Ben Barka. Le Mossad avait précédemment averti Hassan II d’une tentative de Ben Barka de le renverser – un plan auquel l’opposant avait étonnamment demandé au Mossad d’y prendre part.

    Le service israélien a ensuite aidé le roi à localiser Ben Barka et à l’attirer à Paris, où des agents marocains l’ont tué, au vu et au su des services français qui n’ont même pas bougé le petit doigt ! Ronen Bergman a révélé ces détails dans un livre publié en 2018 et consacré à l’histoire des assassinats ciblés par les services secrets israéliens. Il a de même rédigé un article dans le New York Times résumant les liens entretenus secrètement entre le Maroc et Israël, au lendemain de l’annonce de l’établissement de leurs relations diplomatiques.

    En 1977, Hassan II joue un rôle essentiel, en coulisses, dans les pourparlers de normalisation entre Israël et l’Égypte, Rabat accueillant alors plusieurs rencontres secrètes entre des conseillers de Menahem Begin et d’Anwar Sadat. Ces pourparlers ont débouché sur le tout premier accord de paix entre Israël et un État arabe, et a amené les dirigeants israéliens à convaincre la Maison-Blanche de consentir une aide militaire importante au Maroc, selon Ronen Bergman.

    Plus tard, en 1995, les services de renseignement marocains se sont efforcés, sans succès, d’aider le Mossad à éliminer Oussama Ben Laden, qui deviendra le cerveau des attentats du 11 septembre 2001, indique encore Bergman. Le Mossad tente alors de recruter le secrétaire particulier marocain de Ben Laden pour pouvoir le localiser, mais échoue à le faire. Certains détails de cette opération ont été publiés par le Yedioth Ahronoth en 2006.

    Cela dit, l’axe osmotique Rabat-Tel-Aviv, qui active désormais au grand jour et qui est appelé à se renforcer sur tous les plans, pourrait déboucher sur la signature d’un accord de coopération militaire et technique digne de ce nom, à l’instar de celui qui existe depuis le 23 février 1996 entre Israël et la Turquie. Il pourrait même se transformer, à terme, en traité de défense mutuelle. Ce n’est pas une simple vue de l’esprit, mais une solide hypothèse à laquelle il faudrait penser.

    Le Jeune Indépendant, 30/08/2021

  • Union du Grand Maghreb : Le rêve différé

    Maroc, Algérie, Maghreb, UMA, #Maroc, #Algérie,

    L’Union du Grand Maghreb stagne et sa réactivation est de nouveau remise aux calendes grecques, après la rupture des relations diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc.

    L’animosité historique du royaume qui s’est confirmée au fil des années à travers ses actions aussi hostiles que malveillantes à l’égard de notre pays n’a comme seul résultat que de compromettre l’avenir de cette organisation.

    L’Union s’est, d’ailleurs, transformée en une entité administrative protocolaire, menacée de disparition, après la recrudescence des tensions entre Alger et Rabat.

    Si pour certains l’espoir d’unification de millions de Maghrébins est invincible, pour d’autres, il est difficile de s’accrocher à cet idéal, alors que l’Union est dans un état léthargique prolongé. L’organisation n’a pu, en effet, depuis 1994 tenir aucun sommet économique réunissant les cinq pays.

    L’annonce de la création de l’Union du Maghreb arabe (UMA), le 17 février 1989, fut un moment historique pour les peuples de l’Algérie, la Tunisie, le Maroc, la Libye et la Mauritanie qui avaient toujours espéré unir leurs forces économiques qui se complètent.

    Tout y concourait : un relief favorisant des échanges humains, une langue commune et un fonds de croyances et de traditions communes.

    Les populations du Maghreb ont vu, par-delà les vicissitudes de cette histoire elle-même, le sentiment de leur unité spécifique s’affermir et se consolider.

    Ce rêve d’intégration sur le modèle de l’Union européenne est, désormais, dans une impasse et l’espoir de voir l’Union maghrébine se concrétiser s’amenuise au vu des différends qui perdurent entre les pays voisins les empêchant de converger vers un projet unique.

    Car, outre les tensions aiguës qui existent entre l’Algérie et le Maroc, le reste des pays du Maghreb sont confrontés à de nombreuses crises politiques, économiques et sécuritaires.

    Devant cette situation complexe, beaucoup espèrent voir à l’avenir ressurgir une nouvelle réflexion constructive de l’idée d’unité nord-africaine.

    Mais au-delà de l’obligation pour les cinq pays d’avoir un objectif commun, ce projet a besoin de paix et de la libre circulation des personnes. Des éléments qui ne sont toujours pas réunis dans la région. L’émergence d’une telle force régionale constituerait, en somme, la pierre angulaire pour relancer les initiatives de coopération et d’intégration auxquelles aspirent les populations nord-africaines depuis leur indépendance.

    Le chef du Conseil présidentiel libyen, Mohamed El Manfi, a appelé, dans ce sillage, à la reprise des réunions de l’UMA. El Manfi a souligné, lors de sa rencontre avec le chef de la diplomatie mauritanienne, «l’importance d’activer l’Union du Maghreb arabe et de soutenir ses institutions», ajoutant que «la Libye fera tout ce qui est en son pouvoir pendant la période actuelle pour atteindre cet objectif, en coopération avec les frères en sa qualité d’actuel président de l’Union».

    Dans cette optique, le président tunisien a exprimé sa volonté de voir les réunions de l’UMA qui on été suspendues à différents niveaux relancées.

    Horizons, 29/08/2021

  • La crise Maroc-Algérie expliquée par Manorama Yearbook

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    Pourquoi l’Algérie a-t-elle coupé ses relations diplomatiques avec le Maroc ?

    L’Algérie a coupé ses relations diplomatiques avec le Maroc, invoquant ce qu’elle appelle des actions hostiles de la part de son voisin, avec lequel elle entretient des relations tendues depuis des décennies.

    Toutefois, les consulats dans les deux pays restent ouverts.

    Cette décision est le point culminant d’une période de tension croissante entre les pays d’Afrique du Nord, qui sont embourbés dans une querelle de plusieurs décennies et dont les frontières sont reciproquement fermées.

    Le ministère marocain des affaires étrangères a déclaré que le pays regrettait la décision totalement injustifiée de l’Algérie de rompre ses relations diplomatiques.

    Qu’est-ce qui a déclenché cette décision ?

    – Alors que la frontière entre les deux puissances nord-africaines est fermée depuis 1994, les relations diplomatiques n’ont pas été rompues depuis leur rétablissement en 1988 à la suite d’un différend antérieur.

    – Le Maroc a déclaré pendant des années qu’il souhaitait la réouverture de la frontière. L’Algérie a déclaré qu’elle devait rester fermée pour des raisons de sécurité.

    – Lorsque des feux de forêt ont ravagé le nord de l’Algérie au début du mois, tuant au moins 90 personnes, les autorités ont rapidement blâmé le mouvement indépendantiste de la région principalement berbère, et ont accusé le Maroc de le soutenir.

    – L’Algérie a déclaré que les incendies mortels étaient l’œuvre de deux groupes qu’elle a qualifiés de « terroristes », notamment le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK), qui cherche à obtenir l’indépendance de la région traditionnellement rétive de la Kabylie.

    – Le Maroc a proposé d’envoyer de l’aide pour combattre les incendies, mais l’Algérie n’a pas répondu publiquement.

    – Le mois dernier, l’Algérie a rappelé son ambassadeur après qu’un diplomate marocain à New York ait appelé au droit à l’autodétermination du peuple kabyle.

    La question du Sahara occidental

    – Les relations se sont détériorées depuis l’année dernière, lorsque la question du Sahara occidental a éclaté après de nombreuses années.

    – L’Algérie est depuis longtemps en désaccord avec le Maroc, notamment au sujet du Sahara occidental, une ancienne colonie espagnole que le Maroc considère comme faisant partie intégrante de son territoire, mais où Alger a soutenu le mouvement indépendantiste Polisario.

    – Leur rivalité a pris une nouvelle tournure l’année dernière lorsque le président américain sortant Donald Trump a reconnu la souveraineté marocaine sur le territoire – en échange de la normalisation des liens entre le Maroc et Israël.

    Le conflit du Sahara occidental expliqué

    – Le Sahara occidental est un territoire situé sur la côte nord-ouest de l’Afrique, bordé par le Maroc, la Mauritanie et l’Algérie.

    – L’Espagne s’est retirée de son ancienne colonie du Sahara espagnol en 1976. Le Maroc et la Mauritanie ont affirmé leur revendication sur le territoire, une revendication à laquelle s’oppose le Front Polisario (Front populaire pour la libération de la Saguia el-Hamra et du Rio de Oro), soutenu par l’Algérie.

    – La Mauritanie a renoncé à toute revendication sur le Sahara occidental en 1979. Le Front Polisario a officiellement proclamé un gouvernement en exil, la République arabe sahraouie démocratique (RASD).

    – Les forces marocaines et du Polisario se sont battues par intermittence jusqu’à un cessez-le-feu en 1991 et l’établissement d’une mission de maintien de la paix de l’ONU. Dans le cadre de cet effort, l’ONU a cherché à offrir un choix au peuple du Sahara occidental entre l’indépendance (favorisée par le Front Polisario) et l’intégration au Maroc.

    – Le référendum proposé sur la question de l’indépendance n’a jamais eu lieu en raison d’un manque d’accord sur l’éligibilité des électeurs.

    – Une berme de sable de 2 700 kilomètres de long, s’étendant de l’intérieur du sud du Maroc jusqu’à l’océan Atlantique à Guerguerat, a été construite pendant le conflit, dont 1 465 kilomètres divisent le territoire en parties occidentale et orientale.

    – Il existe des tensions ethniques périodiques entre la population sahraouie autochtone et les immigrants marocains.

    – Le Maroc a proposé une large autonomie pour le Sahara occidental. Mais le Front Polisario insiste pour que la population locale, qu’il estime entre 350 000 et 500 000 personnes, ait droit à un référendum.

    – La région dispose de gisements pétroliers offshore et de ressources minérales considérables.

    – L’ONU a relancé les pourparlers directs sur le territoire entre le Maroc, le Front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie en décembre 2018.

    Manorama Yearbook, 28/08/2021

  • Algérie : La volte- face indécente du Maroc

    Algérie : La volte- face indécente du Maroc

    Algérie, Maroc, #Algérie, #Maroc, Omar Hilale,

    IL SE DÉMARQUE DES DÉCLARATIONS DE SON AMBASSADEUR À L’ONU SUR LA KABYLIE La volte- face indécente du Maroc

    Faut-il prendre au sérieux la récente sortie du gouvernement marocain à propos de la rupture des relations diplomatiques décidée par l’Algérie ? Désormais, le Maroc fait peu cas voire foule au pied toutes les règles diplomatiques. À tel titre qu’il se laisse emporté aveuglement par sa politique aventureuse qui plus est menée dans le flou et la débandade totale.

    A peine le Royaume sort de l’éprouvant discours de Mohammed VI alternant entre positions incohérentes, provocations à l’égard de l’Algérie et mensonges à l’adresse de son peuple, son chef du gouvernement viendra noircir le tableau.

    Ainsi, dans un entretien accordé jeudi du journal électronique local « Hespress », l’islamiste Saad Eddine El Othmani fait son mea-culpa et opère un virage à 180 degrés. Autrement, des déclarations gouvernementales qui expriment à elles seules la débandade dans laquelle se retrouve le Royaume.

    Jugeons-nous de cette ambivalence dans le propos. En effet, pour le chef du gouvernement, la déclaration de l’ambassadeur Omar Hilale à l’ONU à propos de la Kabylie était une « réaction de protestation » et non de « position politique de l’État marocain », estime El Othmani, pour qui encore, « le discours du roi Mohammed VI est venu » seulement, « mettre les points sur les ‘’I’’ ».

    El Othmani est-il frappé à ce point de cécité pour ne pas savoir qu’il doit tenir des propos à la hauteur de la décision de rupture des relations prise par l’Algérie ? Tente-t-il par-là leurrer son peuple qui, tout comme son frère algérien, regrette la politique aveugle du Royaume qui lui a valu une fracture de ses relations avec l’Algérie ?

    On peut poser mille et une questions sur la sortie assommante d’El Othmani. Car, non seulement elle souffre d’un intenable retard de timing, mais surtout elle est nulle et non avenue sur le plan diplomatique. Et pour cause, pour ne citer que la dernière, depuis la provocation de l’ambassadeur marocain à l’ONU à propos d’un prétendu droit de la Kabylie à l’autodétermination de l’eau a coulé sous les ponts. Autrement, le Maroc n’a pas fait écho au message d’interpellation de la diplomatie à ce sujet.

    L’Algérie aurait pu, peut-être, prendre acte de la déclaration d’El Othmani en temps voulu, mais faut-il encore qu’elle soit assumé en haut lieu, c’est-à-dire, par le palais de Rabat.

    Pis encore, le chef du gouvernement islamiste regrette le fait que l’Algérie ait pris la décision, du reste juste et souveraine, de rompre ses relations avec son voisin. « Malheureusement, nous regrettons la réaction de l’Algérie dont nous nous sommes attendus à ce qu’elle fasse le choix de l’apaisement et de la réconciliation dans les relations (maroco-algériennes, ndlr) », a-t-il indiqué, comme pour rectifier le tir ?

    Des déclarations viles et indécentes de la part du chef du gouvernement marocain en cette conjoncture particulière.

    Farid Guellil

    Le Courrier d’Algérie, 28/08/2021

  • Tagesschau: Nouvelle ère glaciaire entre le Maroc et l’Algérie

    Maroc, Sahara Occidental, Algérie, #Maroc, #Algérie, #SaharaOccidental

    Rupture des relations : Nouvelle ère glaciaire entre le Maroc et l’Algérie

    L’Algérie a rompu ses relations diplomatiques avec le Maroc voisin. L’accusation contre le royaume : espionnage et financement du terrorisme. Il y a des conflits entre les pays depuis longtemps.

    Par Dunja Sadaqi

    Une nouvelle ère glaciaire a commencé entre les voisins nord-africains, l’Algérie et le Maroc. Pourtant, il y a quelques semaines, le roi du Maroc Mohammed VI avait appelé à de meilleures relations dans un discours du trône.

    « Nous renouvelons notre invitation sincère à nos frères d’Algérie à œuvrer ensemble, sans conditions, à l’établissement de relations bilatérales fondées sur la confiance, le dialogue et le bon voisinage », a-t-il déclaré.

    En effet, l’état actuel de ces relations ne nous satisfait guère car il ne sert pas les intérêts respectifs de nos deux peuples. À cet égard, je rassure nos frères d’Algérie : Ils n’auront jamais à craindre la malveillance du Maroc, qui ne représente en aucun cas un danger ou une menace pour eux.

    Rien n’en sortira pour l’instant. Le 24 août, le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a annoncé : « Il est historiquement et objectivement prouvé que depuis l’indépendance de l’Algérie, le Royaume du Maroc n’a jamais cessé de mener des actions hostiles contre notre pays. Pour cette raison, l’Algérie a décidé de rompre ses relations diplomatiques avec le Royaume du Maroc avec effet immédiat. « 

    Graves accusations contre le Maroc

    La liste des accusations contre le Maroc est longue : l’Algérie accuse le Royaume d’espionnage et de financement d’organisations terroristes en Algérie – mais aussi d’être impliqué dans les incendies de forêt meurtriers dans le nord du pays. Les incendies dévastateurs qui ont ravagé la région de Kabylie, densément boisée et peuplée, ont tué au moins 90 personnes, dont de nombreux membres des forces de sécurité. L’Algérie et le Maroc s’accusent mutuellement de soutenir les séparatistes de l’autre pays.

    La querelle entre les deux États du Maghreb est historique. Les frontières communes sont scellées depuis 1994. Le conflit sur le Sahara occidental et la compétition pour l’équilibre du pouvoir dans la région font obstacle à des relations pacifiques, déclare Abdelfattah Belamchi, professeur de politique à l’université Cadi Ayyad de Marrakech. L’Algérie soutient le Polisario, qui se bat pour son propre État. Le Maroc, quant à lui, contrôle la majeure partie du Sahara occidental et le considère comme un territoire historique.

    De nombreuses zones de conflit

    « Cette récente escalade de l’Algérie vers le Maroc nous montre la vraie raison et le problème essentiel des relations bilatérales entre le Maroc et l’Algérie : le Sahara », dit Belamchi. « Mais il y a aussi une compétition régionale entre les deux États, par exemple pour savoir qui a son mot à dire au sein de l’Union africaine. » La région sur l’Atlantique est considérée comme riche en phosphates, possède une grande richesse halieutique, un potentiel touristique, éventuellement des gisements de pétrole. Dans ce domaine, le Maroc poursuit également ses ambitieux projets énergétiques, auxquels participent également des entreprises allemandes. Le conflit du Sahara occidental est à l’origine de tensions politiques dans la région depuis des décennies – plus récemment avec l’Espagne et l’Allemagne.

    Le Maroc se stabilise

    Bien que la situation soit tendue, le Maroc a pu renforcer sa position politique au cours des dernières décennies – notamment avec la reconnaissance du Sahara occidental comme territoire marocain par les États-Unis, le royaume est devenu plus sûr de lui en matière de politique étrangère, alors que le plus grand État territorial d’Afrique, l’Algérie, fait face à un mouvement de protestation de masse depuis des années.

    Un danger pour toute la région

    Les frictions entre le Maroc et l’Algérie sont un problème récurrent. En juillet, l’Algérie a rappelé son ambassadeur de la capitale marocaine Rabat pour consultations après qu’un envoyé marocain aux Nations unies se soit prononcé en faveur de l’autodétermination de la Kabylie. Alger avait alors déclaré qu’elle allait « revoir » les relations entre les deux pays.

    Le conflit entre les deux États du Maghreb paralyse la région, estime le politologue marocain Rachid Aouerraz, de l’Institut marocain d’analyse politique : « Il déstabilise la région, car le Maroc et l’Algérie étaient jusqu’à présent les deux pays les plus stables d’Afrique du Nord. Si la région est déstabilisée par le conflit, cela aura un fort impact sur les économies des deux pays ».

    Une coopération qui a du sens

    Les deux pays connaissent des problèmes similaires : un taux de chômage élevé chez les jeunes, une crise économique ainsi que des problèmes de migration et de terrorisme.

    La réaction de la population des deux pays est mitigée. Les jeunes, notamment, comme le chômeur marocain Salah, ne sont pas très impressionnés. « Les deux peuples marocain et algérien resteront toujours frères, les tensions sont entre gouvernements et n’affectent pas nos relations », a-t-il déclaré à une agence de presse française. « Elles existent depuis très longtemps, que ce soit au niveau des frontières ou autres »

    Le ministère des Affaires étrangères du Maroc, quant à lui, a regretté la rupture des relations et rejeté les accusations. Mais ce geste était attendu – le Maroc a fermé son ambassade à Alger vendredi. Les États arabes, mais aussi l’ancienne puissance coloniale qu’est la France, qui a toujours entretenu des liens étroits avec Rabat et Alger, tentent actuellement de jouer les médiateurs. La France a appelé les deux gouvernements à engager le dialogue.

    Mais pour l’instant, c’est le silence radio.

    Tachesschau, 28/08/2021

  • L’Arabie Saoudite appelle le Maroc et l’Algérie au dialogue

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    Le ministre saoudien des Affaires étrangères appelle ses homologues algérien et marocain pour discuter de l’évolution de la situation.

    Rapport de la Saudi Gazette

    RIYADH – Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal Bin Farhan, a téléphoné séparément vendredi à ses homologues algérien Ramtane Lamamra et marocain Nasser Bourita, a rapporté l’Agence de presse saoudienne (SPA).

    Au cours de ces appels, le Prince Faisal a passé en revue les relations bilatérales et les moyens de les renforcer pour atteindre les intérêts de tous les pays.

    Les ministres ont également discuté des développements régionaux et internationaux.

    Mardi, le ministre algérien des affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a déclaré que son pays avait décidé de rompre ses liens diplomatiques avec le Maroc.

    L’Arabie saoudite a appelé l’Algérie et le Maroc à privilégier le dialogue et la diplomatie pour résoudre les problèmes entre les deux pays.

    Le ministère des Affaires étrangères du Royaume a exprimé ses regrets quant aux récents développements des relations entre le Maroc et l’Algérie.

    « Le gouvernement du Royaume exprime l’espoir d’un retour des relations entre les deux pays dans les meilleurs délais ».

    « Nous appelons les frères des deux pays à privilégier le dialogue et la diplomatie pour trouver des solutions aux questions litigieuses de manière à contribuer à l’ouverture d’une nouvelle page pour les relations, d’une manière qui profite à leurs peuples, réalise la sécurité et la stabilité pour la région », indique le communiqué.

    Saudi Gazette, 28/08/2021

  • Algérie-Maroc : Le courant n’est jamais bien passé

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    Même quand elle ne lui tournait pas totalement le dos, l’Algérie s’est toujours méfiée de son voisin, du roi de l’Ouest pour parler comme Kateb Yacine. Non sans beaucoup de raisons.

    Les historiens qui se sont penchés sur les motivations qui ont conduit l’Emir Abdelkader à cesser sa résistance en 1847 ont toujours souligné la traîtrise du sultan du Maroc. Mais d’un point de vue historique, c’est sans doute l’agression du roi Hassan II en octobre 1963, alors que l’Algérie était encore exsangue après une longue et dure Révolution qui traduit le pire de cette propension à la trahison.

    Un peu plus tard, le conflit du Sahara occidental révéla, dès 1975, la profonde antinomie entre deux pays qui ont choisi des voies diamétralement opposées. Longtemps, l’Algérie s’est toujours trouvée aux côtés des peuples qui luttaient pour reconquérir leur liberté quand le royaume soutenait les régimes inféodés aux intérêts étrangers. Ce dernier n’a pas hésité à envoyer son armée, entre autres au Zaïre, actuelle République démocratique du Congo, pour sauver un président, le sinistre Mobutu menacé par une révolte.

    Le courant ne passait pas entre une république qui avait fait du socialisme et de la justice sociale son socle et un régime qui tenait par la poigne son peuple qui ployait sous l’injustice sociale qui avait conduit à de nombreuses révoltes matées dans le sang.

    Accusations fausses et injustes

    Cette affaire de décolonisation avait conduit à une rupture des relations diplomatiques le 7 mars 1976, quand l’Algérie et d’autres pays ont reconnu la République arabe sahraouie démocratique (RASD). L’exclusion du Maroc des instances de l’OUA – Organisation de l’unité africaine – avait exacerbé les ressentiments vis-à-vis de l’Algérie.

    En Février 1989, la venue du roi Hassan II à Alger et la naissance de l’UMA ont provisoirement refermé la parenthèse. Depuis l’arrivée de Chadli, les signes de décrispation se sont multipliés sans dissiper la méfiance.

    Le 26 février 1983, le roi Hassan II et Chadli se retrouvent en tête-à-tête. En avril, la libre circulation est rétablie pour les résidents des deux pays et en mai, un accord sur la libre circulation progressive des personnes et des biens et l’ouverture des lignes aériennes et ferroviaires est signé.

    Ce processus de normalisation est couronné le 16 mai 1988 par la reprise des relations diplomatiques et la naissance de l’UMA.

    Le 5 juin, leurs frontières sont rouvertes et le 7 juin, Hassan II effectue sa première visite à Alger depuis 15 ans, où il participe à un sommet arabe extraordinaire.

    Début février 1989, la visite du président Bendjedid à Ifrane, la première d’un chef d’Etat algérien au Maroc depuis 1972, scelle la réconciliation. Un accord est conclu pour un projet de gazoduc devant relier l’Algérie à l’Europe, à travers le Maroc.

    En juin 1992, la promulgation par Rabat de la convention de juin 1972 met fin aux problèmes frontaliers.

    Arrière- pensées

    Tout sera remis en cause le 26 août1994, le Maroc instaure un visa d’entrée pour les Algériens après l’attaque d’un hôtel de Marrakech, où deux touristes espagnols ont été tués par des islamistes franco-maghrébins. Rabat accuse les services de sécurité algériens d’être derrière l’attentat. L’Algérie ferme sa frontière avec le Maroc.

    La décennie noire vit le Maroc souffler sur les braises et ses accusations fausses et injustes contre l’Algérie ont conduit à une fermeture des frontières. Cet épisode a montré avec éclat que la partie marocaine n’est jamais sincère et exempte d’arrière-pensées.

    De récents «actes hostiles incessants perpétrés par le Maroc contre l’Algérie», pour reprendre les mots de Ramtane Lamamra qui faisait référence au soutien apporté au MAK classé par les autorités comme «terroriste» et les accointances ouvertement assumées avec Israël, ont conduit à une riposte de l’Algérie.

    Les propos du chef de la diplomatie israélienne, un pays que le Maroc a introduit comme un pays dans une bergerie, sont un nouveau signe inquiétant.

    Ce sont des gouttes qui ont fait déborder un vase trop plein, depuis longtemps.

    H. Rachid

    Horizons, 25/08/2021

  • Maroc-Algérie : À quoi doit s’attendre Rabat

    Maroc, Algérie, #Maroc, #Algérie,

    FERMETURE DE SON AMBASSADE, INSTAURATION DU VISA, MESURES SÉCURITAIRES…
    À quoi doit s’attendre Rabat

    par Tarek Hafid

    En rompant ses relations avec le Maroc, l’Algérie est tenue de mettre en œuvre une série de mesures politiques prévues par la Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques. Alger devrait également engager des mécanismes sécuritaires ainsi que des restrictions économiques.

    Tarek Hafid – Alger (Le Soir) – La rupture de relations avec un Etat est une décision politique qui, une fois annoncée officiellement, enclenche une série de mesures. Dans le cas de l’Algérie, la nature des relations qui la lient au Maroc ne devrait pas engendrer d’importants bouleversements.

    En effet, les frontières terrestres entre les deux pays sont fermées depuis 1994, et les vols entre Alger et Casablanca sont suspendus depuis plusieurs mois à cause de la pandémie de coronavirus. Sur le plan diplomatique, l’Algérie a rappelé son ambassadeur à Rabat le 18 juillet 2021, soit quatre jours après l’opération de soutien officiel du Makhzen envers les séparatistes du MAK, qui s’est déroulée au siège de l’ONU à New York.

    Dans le domaine politique, voilà longtemps que les responsables des deux pays ne se croisent plus que lors d’événements multilatéraux. En matière de relations internationales, la référence reste la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques de 1961. L’article 45 de ce texte trace le cadre général de la rupture de relations diplomatiques entre deux États. «En cas de rupture de relations diplomatiques entre deux États, ou si une mission est rappelée définitivement ou temporairement : l’État accréditaire est tenu, même en cas de conflit armé, de respecter et de protéger les locaux de la mission, ainsi que ses biens et ses archives ; l’État accréditant peut confier la garde des locaux de la mission, avec les biens qui s’y trouvent, ainsi que les archives, à un État tiers acceptable pour l’État accréditaire ; l’État accréditant peut confier la protection de ses intérêts et de ceux de ses ressortissants à un État tiers acceptable pour l’État accréditaire.»

    En clair : l’Algérie ferme les locaux de son ambassade à Rabat, rappelle l’ensemble des diplomates à l’exception du chargé d’affaires. Ce dernier peut ouvrir une section au sein de l’ambassade d’un pays tiers accrédité à Rabat qui représentera les intérêts de l’Algérie.

    Autre mesure probable : l’institution d’un visa pour les ressortissants marocains. En août 1994, au lendemain de l’attentat contre un hôtel de Marrakech, le Maroc avait expulsé — souvent par la force — des milliers de touristes algériens et institué de façon unilatérale un visa. Alger a ensuite appliqué le principe de la réciprocité. Le 30 juillet 2004, Rabat décidait de supprimer cette mesure, qui sera suivie par une décision similaire de la part d’Alger le 2 avril 2005.

    Le spectre des spoliations de 1973

    Reste la situation des milliers de ressortissants des deux pays qui vivent de part et d’autre de la frontière. Lors de la conférence de presse de mardi, le ministre des Affaires étrangères avait assuré que la rupture des relations avec le Maroc «ne touchera pas les citoyens des deux pays», puisque, expliquera-t-il, «les affaires consulaires travailleront normalement». Cependant, le Makhzen a prouvé qu’il est capable de prendre des mesures coercitives contre les ressortissants algériens comme cela a été le cas en 1973, lorsque Hassan II avait signé un décret royal pour spolier les terres de 273 propriétaires algériens.

    Au total, ce sont 15 965 hectares de terres agricoles qui ont été nationalisés au profit de la Sogeta, une société publique. Ce dossier reste jusqu’à aujourd’hui en suspens, puisque le gouvernement marocain refuse de l’assainir.

    Sur le plan économique, et à l’exception de la vente de gaz à travers le gazoduc Gazoduc Maghreb Europe (GME), les relations entre les entreprises algériennes et marocaines sont très peu développées. Ces dernières années, l’Office chérifien du phosphate (OCP) a importé de grandes quantités d’ammoniaque auprès de l’entreprise algérienne Fertial. L’ammoniaque est utilisée dans la production d’engrais phosphatés.

    Par ailleurs, le Maroc continue d’importer de l’énergie électrique à partir d’Algérie. En fait, des restrictions économiques ne sont pas à écarter dans le cadre de cette rupture des relations avec le Maroc. Elles pourraient entrer en droite ligne avec l’instruction prise par Abdelmadjid Tebboune, en mai dernier, de résilier les contrats établis par la Société algérienne d’assurance (SAA), et la Compagnie algérienne d’assurance et de réassurance (CAAR) avec des entreprises marocaines spécialisées dans le développement de logiciels. Mais le véritable défi est avant tout sécuritaire.
    Le Maroc, avec l’appui de son allié stratégique Israël, pourrait en effet augmenter le niveau de son hostilité envers l’Algérie.

    Outre l’appui à des organisations terroristes, autant celles activant sur le territoire algérien que dans les pays du Sahel, Rabat pourrait également impliquer militairement Alger dans le conflit armé qui l’oppose au Front Polisario. C’est d’ailleurs pour contrer toute action malveillante que le Haut Conseil de sécurité avait annoncé, mercredi 18 août, «l’intensification des contrôles sécuritaires aux frontières ouest».

    T. H.

    Le Soir d’Algérie, 26/08/2021

  • Algérie-Maroc : La rupture arrive au pire moment

    Maroc, Algérie, Sahara Occidental, Israël, MAK, Kabylie, Pegasus,

    La rupture des relations diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc « arrive au pire moment pour Rabat », estime le journaliste et ancien diplomate marocain, Ali Lmrabet précisant que le Palais royal est aujourd’hui particulièrement affaibli.

    « La rupture des relations diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc arrive au pire moment pour Rabat. Les vents ne sont pas favorables au régime. Le palais royal et ses services secrets sont sortis affaiblis des multiples fronts qu’ils ont ouverts ces derniers mois », soutient l’auteur dans un article publié sur le site Middle East Eye.

    « Les violations systématiques des droits humains et les grossières accusations visant des journalistes indépendants ont donné une bien piètre image d’un Maroc allié et soutien de l’Occident », assure-t-il ajoutant que « les deux offensives diplomatiques contre l’Allemagne et l’Espagne ont tourné court ».

    « Le bras de fer avec Madrid après l’hospitalisation du chef du Front Polisario Brahim Ghali en Espagne et le déferlement provoqué par Rabat de citoyens marocains sur Ceuta a aussi été remporté par l’Espagne », constate-t-il affirmant que « le roi du Maroc a dû annoncer il y a quelques jours une « étape inédite » dans les relations hispano-marocaines. Il n’y a plus d’exigences ».

    Cette crise a poussé, en revanche, les Espagnols à exiger une redéfinition des relations entre les deux pays.

    Le Maroc a également essuyé un revers face à l’Allemagne après une crise liée à la position de Berlin vis-à-vis de la question sahraouie.

    « Berlin a résisté aux pressions de Rabat sur le conflit du Sahara occidental et refuse de faire pression sur sa magistrature pour que des poursuites criminelles soient engagées contre le Germano-Marocain Mohamed Hajib, bête noire des services secrets marocains », note l’auteur de l’article.

    De son côté, « l’administration Biden, en dépit de gestes amicaux envers le Maroc, ne va pas ouvrir un consulat à Dakhla, comme cela avait été promis par Donald Trump, ni reconnaître explicitement la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental », indique le journaliste.

    « Récemment, le porte-parole du département d’Etat, Ned Price, s’est permis de tirer les oreilles aux autorités marocaines sur les déficiences en matière de liberté de la presse dans le royaume, citant nommément les cas des journalistes Omar Radi et Souleiman Raissouni, dont les procès ont été émaillés de telles irrégularités que même des médias marocains s’en sont fait l’écho », explique-t-il.

    L’avenir du GME est compromis

    « Plus grave encore, Rabat s’attend à un arrêt imminent de la CJUE (Cour de justice de l’Union européenne) qui confirmerait définitivement, selon les avocats du Front Polisario, l’illégalité de l’accord de pêche entre le Maroc et l’Union européenne », poursuit Ali Lmrabet.

    Sur le plan de la coopération économique, la décision de l’Algérie de rompre ses relations avec le Maroc porte un coup dur au royaume à moins de deux mois de l’expiration du contrat relatif au gazoduc Maghreb-Europe qui relie l’Algérie à l’Espagne via le territoire marocain.

    « Lors de son point de presse, Lamamra a renvoyé la balle à la Sonatrach mais le renouvellement (du contrat) sera difficile si les ponts entre les deux Etats continuent à s’écrouler les uns après les autres », prédit le journaliste.

    D’un autre côté, « la santé du roi Mohammed VI inquiète. Lors de son discours du Trône fin juillet, qui a été prononcé avec une journée de retard, le souverain est apparu amaigri et très fatigué », fera-t-il remarquer.

    Selon Lmrabet, il ne s’agit pas là des « seules déconvenues » que connaît le régime alaouite. « La lente et inexorable détérioration de la situation sociale n’est niée par personne et les perspectives de voir le pays sortir rapidement de la crise économique s’estompent au fur et à mesure que l’on découvre les chiffres alarmants de la hausse des infections dues au Covid-19 et son corollaire, la prorogation sans fin du couvre-feu », estime-t l’ancien diplomate.

    Selon Lmrabet, ce sont les critiques émises contre l’Algérie par le ministre des Affaires étrangères israéliens, en visite à Rabat, qui ont mis le feu aux poudres. Un « impair » qui vient s’ajouter au soutien affiché par la diplomatie marocaine au MAK et à la position marocaine concernant la question sahraouie.

    « L’incroyable impair commis par le ministre israélien des Affaires étrangères et futur Premier ministre, Yaïr Lapid, qui a critiqué

    ouvertement l’Algérie depuis Rabat, où il était en visite officielle, a fait sauter la poudrière. Une bien fâcheuse sortie israélienne qui n’a plu, évidemment, à personne au Maroc, mais dont on ne sait pas si elle a été expressément provoquée par la diplomatie marocaine, dont la ligne de conduite est chapeautée par le cabinet royal, ou simplement tolérée », relève-t-il.

    « Cette provocation a incontestablement attisé un feu déjà vaillant au moment où Alger réfléchissait à une riposte après les révélations sur l’affaire Pegasus, et l’implication, selon Amnesty International et Forbidden Stories, des services secrets marocains dans l’espionnage de 6.000 numéros de téléphones portables appartenant, notamment, à de hauts responsables algériens grâce à un logiciel espion de fabrication israélienne », rappelle-t-il.

  • Réactions à la rupture entre l’Algérie et le Maroc

    Maroc, Algérie, Israël, France, Arabie Saoudite, Etats-Unis, #Maroc, #Algérie,

    Rupture des relations diplomatiques avec le Maroc : les sionistes au secours du Makhzen, la France et l’Arabie Saoudite mesurées

    Après l’annonce par l’Algérie de rompre ses relations diplomatiques avec le royaume du Maroc, les réactions internationales n’ont pas tardé à tomber. En premier lieu, il y a celles des pays connus pour être des alliés traditionnels du Maroc : Israël et la France.

    L’état hébreu n’a pas caché, naturellement, son soutien au régime de Rabat en accourant à son secours. Pour l’entité sioniste, nouvel allié du royaume chérifien, les « accusations » algériennes contre Israël dans le cadre de la grave crise diplomatique entre l’Algérie et le Maroc sont « infondées et sans intérêt », a déclaré à l’agence de presse française (AFP) une source diplomatique israélienne.

    Le porte-parole adjoint du ministère français des Affaires étrangères, lors de la conférence de presse hebdomadaire, a usé d’un langage se voulant neutre. Une réponse qui ne souhaite, semble-t-il, froisser aucune partie.

    Interrogé sur la rupture des relations entre l’Algérie et le Maroc et ses retombées sur la coopération des deux pays avec la France et l’Union européenne et si cette rupture va compliquer la donne pour la France dans la région.

    La porte-parole a répondu : « L’Algérie et le Maroc sont deux pays amis et deux partenaires essentiels de la France. La France reste naturellement attachée à l’approfondissement des liens et au dialogue entre les pays de la région, pour en consolider la stabilité et la prospérité ».

    Deux autres pays, également plus proches politiquement du Maroc que de l’Algérie, se sont exprimés sur la question.

    L’Arabie Saoudite, un autre royaume, très proche dans sa conception de la géostratégie du Maroc, mais dans un langage diplomatiquement correct qui tranche avec un pays qui se déclare, carrément, ennemi de l’Algérie.

    L’Arabie Saoudite a exprimé son regret de voir les deux pays frères rompre leurs relations diplomatiques.

    Dans un communiqué du ministère des affaires étrangère, le royaume appelle à privilégier le dialogue et la diplomatie pour régler les questions litigieuses et «ouvrir une nouvelle page».

    Les Etats-Unis, un pays qui entretient des relations stratégiques avec le royaume du Maroc, n’a pas officiellement commenté l’évènement. Pour un responsable au ministère des affaires étrangères des Etats-Unis, rapporté anonymement par le chaîne américaine Al Hurra, l’amélioration des relations entre l’Algérie et le Maroc les aidera à affronter les défis régionaux d’une manière optimale.

    Selon ce responsable, les autorités américaines ont pris note de la décision de l’Algérie. Il a en effet souligné que « le gouvernement américain est convaincu que l’amélioration les relations permettra aux deux pays de mieux traiter les problèmes régionaux et bilatéraux tels que le terrorisme, l’immigration illégale, le trafic de drogue et les relations commerciales».

    Mis à part le regret exprimé par la ligue arabe, le reste des pays arabes ne se sont pas exprimés… Visiblement, l’affaire ne les intéresse pas.

    Hamma Sadek

    La Nation, 26/08/2021