Catégorie : Monde

  • Israël aurait représenté 69 % des importations d’armes de l’Azerbaïdjan en 2020.

    Le rapport annuel de l’institut SIPRI fait la lumière sur les statistiques d’exportation des plus grands pays exportateurs d’armes au monde. Les États-Unis ont augmenté leur part au détriment de la Russie et de la Chine. L’Allemagne et la France ont également pris de plus grandes parts du gâteau.

    Les exportations d’armes d’Israël ont représenté 3,0 % de l’ensemble des ventes d’armes dans le monde au cours des années 2016-2020 et ont augmenté de 59 % par rapport à celles des années 2011-2015. Israël a représenté 69 % des importations d’armes de l’Azerbaïdjan. Les entreprises israéliennes envisagent actuellement de vendre des armes à des pays du Moyen-Orient qui leur étaient jusqu’à présent fermés, selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI) de Suède, dont le rapport annuel a été publié cette semaine.

    Les États-Unis ont élargi leur part des ventes d’armes mondiales, passant de 32 % en 2011-2015 à 37 % en 2016-2020, et restent le premier exportateur d’armes. Les États-Unis ont fourni des armes à 96 pays, soit plus que tout autre fournisseur, au cours des années 2016-2020.



    Près de la moitié (47 %) des transferts d’armes américains étaient destinés au Moyen-Orient. L’Arabie saoudite représentait à elle seule 24 % des exportations d’armes américaines. La croissance de 15 % des exportations d’armes américaines entre les années 2011-15 et 2016-2020 a encore creusé l’écart entre les États-Unis et le deuxième plus grand fabricant d’armes, la Russie.

    Les troisième et quatrième plus grands exportateurs d’armes ont également connu une croissance significative entre les années 2011-2015 et 2016-2020. La France a étendu ses exportations d’armes majeures de 44 % et était responsable de 8,2 % des exportations mondiales d’armes au cours des années 2016-2020. L’Inde, l’Égypte et le Qatar ont reçu ensemble 59 % des exportations d’armes françaises.

    L’Allemagne a augmenté ses exportations d’armes majeures entre 2011-2015 et 2016-2020, représentant 5,5 % du total mondial. Les principaux marchés des exportations d’armes allemandes étaient la Corée du Sud, l’Algérie et l’Égypte.

    La Russie et la Chine ont vu leurs exportations d’armes diminuer. Les exportations d’armes de la Russie, qui représentaient 20 % de toutes les grandes exportations d’armes en 2016-2020, ont chuté de 22 % (pour atteindre un niveau similaire à celui de 2006-10). La part du lion de cette baisse, environ 90 %, provient d’une chute de 53 % de ses exportations d’armes vers l’Inde.

    Les exportations de la Chine, cinquième exportateur mondial d’armes pour la période 2016-2020, ont diminué de 7,8 % entre 2011-15 et 2016-20. Les exportations d’armes chinoises représentaient 5,2 % de l’ensemble des exportations d’armes dans les années 2016-20. Le Pakistan, le Bangladesh et l’Algérie étaient les plus gros importateurs d’armes chinoises.

    Le site Defense News a rapporté que malgré la croissance des exportations d’armes, le SIPRI a déclaré qu’il y avait eu un certain ralentissement au cours des années couvertes par le rapport. Selon Pieter Wezeman, chercheur principal pour l’institut suédois, il est possible que la pandémie de COVID-19 ait eu une influence sur la politique d’exportation d’armes, et que de nombreux pays réévaluent leurs acquisitions militaires en raison des difficultés liées à la pandémie.

    Israel Defense, 21 mars 2021

    Tags : Israël, Azerbaïdjan, SIPRI, Corée du Sud, Algérie,Égypte, Russie, armes, armement,

  • La Russie reste le deuxième plus grand exportateur d’armes au monde : rapport

    Malgré cinq années de baisse des ventes à l’étranger, la Russie reste le deuxième plus grand exportateur d’armes au monde après les États-Unis, selon les dernières données sur les transferts internationaux d’armes compilées par l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI), un institut de recherche indépendant qui suit les dépenses militaires mondiales. Comme l’écrit Caspian News, selon le rapport publié lundi, les cinq principaux exportateurs d’armes – les États-Unis, la Russie, la France, l’Allemagne et la Chine – ont représenté ensemble 76 % du volume total des exportations mondiales d’armes au cours des cinq dernières années.

    Le rapport explique en détail les hauts et les bas du volume des transferts internationaux d’armes majeures au cours de ces années. Bien que les exportations d’armes de la Russie, qui représentaient 20 % de toutes les exportations d’armes majeures en 2016-2020, aient chuté de 22 %, les transferts internationaux d’armes majeures sont restés au même niveau par rapport à la période 2011-2015, principalement en raison de l’augmentation des transferts de trois des cinq principaux exportateurs d’armes, à savoir les États-Unis, la France et l’Allemagne.

    La recherche explique que la majeure partie, environ 90%, de la baisse des exportations d’armes de la Russie est attribuable à une chute de 53% de ses exportations d’armes vers l’Inde, l’un des plus grands et plus anciens acheteurs d’équipements de défense russes.

    « La Russie a considérablement augmenté ses transferts d’armes vers la Chine, l’Algérie et l’Égypte entre 2011-15 et 2016-20, mais cela n’a pas compensé la forte baisse de ses exportations d’armes vers l’Inde », a déclaré Alexandra Quinoa, chercheuse au sein du programme sur les armes et les dépenses militaires du SIPRI.

    Avec une coopération militaire remontant à l’ère soviétique, l’Union soviétique était le principal fournisseur de l’Inde pendant la guerre froide, et aujourd’hui, la plupart de son armement est de fabrication russe, ou soviétique. Selon les estimations, les fournitures de défense russes à l’Inde ont représenté plus de 65 milliards de dollars depuis 1960. Environ 70 % des équipements de l’armée de l’air indienne et 80 % de sa flotte navale sont de fabrication russe.

    Parallèlement, Moscou a réussi à renforcer ses liens avec l’Afrique et à devenir le plus grand fournisseur d’armes du continent. La Russie représente 30 % des importations totales d’armes des pays d’Afrique subsaharienne sur la période 2016-2020, selon le rapport du SIPRI.

    En 2017, Washington a adopté la loi CAATSA (Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act), qui prévoit des sanctions pour tout pays engagé dans ce que le département du Trésor américain appelle une « transaction importante » avec les secteurs russes de la défense et du renseignement.

    « Bien que la Russie ait récemment signé de nouveaux grands contrats d’armement avec plusieurs États et que ses exportations vont probablement augmenter à nouveau progressivement dans les années à venir, elle est confrontée à une forte concurrence des États-Unis dans la plupart des régions », a ajouté M. Quinoa.

    Selon le groupe de réflexion suédois, les États-Unis restent le plus grand exportateur d’armes au monde. Entre 2016 et 2020, les États-Unis ont représenté 37 % du commerce des principales armes conventionnelles, affichant une augmentation de 5 % par rapport à la période quinquennale précédente.

    Alors que les principaux clients des États-Unis étaient l’Arabie saoudite, l’Australie et les Émirats arabes unis au cours de cette période, les principaux clients de la Russie comprenaient l’Inde, la Chine et l’Algérie.

    La puissance militaire de la Russie a été classée 2 sur 140 pays selon le classement de Global Firepower pour 2021, ce qui en fait la deuxième puissance militaire du monde et la plus forte dans la région de la Caspienne.

    Vestnik Kavkaza, 21 mars 2021

    Tags : Russie, armes, armement, Algérie, Egypte, SIPRI,

  • Sinziana Ravini : En France, l’inceste est courant mais il est tabou d’en parler

    Débat sur la cultureDes incidents de maltraitance et d’inceste ont secoué la France ces derniers mois, suscitant de nombreux débats et de nouvelles propositions législatives. Et ce, dans un pays qui aime à se considérer comme sexuellement libéral, mais où l’inceste est un sujet tabou. Sinziana Ravini écrit depuis Paris à propos de l’appel « MeTooInceste ».

    C’est un article d’opinion. Le but du texte est d’influencer et les opinions sont celles de l’auteur.

    Sinziana Ravini

    Cela fait trois ans que les femmes du mouvement #MeToo ont révolutionné le paysage médiatique et culturel occidental avec leurs récits de harcèlement et d’abus sexuels. La France est actuellement secouée par un nouveau soulèvement, cette fois de victimes d’inceste qui prennent la parole, sous la bannière #MeTooInceste.

    Ceci intervient un an après la sortie de « The Consent » de Vanessa Springora. Le livre, qui raconte comment elle a été entraînée dans une relation avec l’auteur d’âge moyen Gabriel Matzneff à l’âge de 14 ans, a suscité un vaste débat et un rejet radical des abus sexuels sur mineurs en public.

    Cette fois, l’étincelle du soulèvement est le livre « La familia grande » écrit par l’avocate française Camille Kouchner, qui raconte une agression sexuelle dont a été victime son frère jumeau pendant son adolescence. L’auteur n’était autre que leur beau-père, le célèbre politologue et commentateur politique à la télévision Olivier Duhamel.

    Mais contrairement à l’épisode Matzneff, où certaines voix s’élevaient encore pour soutenir l’auteur ou l’ »époque » dans laquelle il travaillait, personne ne défend aujourd’hui Olivier Duhamel, qui a été immédiatement licencié de la chaîne de télévision pour laquelle il travaillait. Le hashtag #MeTooInceste a rapidement été inventé et des milliers de personnes ont commencé à partager leurs propres histoires choquantes sur les médias sociaux.

    Curieusement, en France, il n’y a pas eu de véritable loi contre l’inceste, seulement contre les abus sexuels sur les enfants. Mais cela est en train de changer. Dès ce printemps, une nouvelle loi contre l’inceste entrera en vigueur, ce qui permettra aux victimes d’obtenir plus facilement réparation.

    Une chose est sûre, le livre de Kouchner a fait sauter le couvercle d’un énorme problème social en France. Un pays où pas moins d’une personne sur dix a été victime d’abus sexuels au sein de sa famille, ce qui est un chiffre gigantesque par rapport aux autres pays. Des chiffres qui ont été occultés jusqu’à présent. Comment se fait-il que la France ait fermé les yeux sur l’inceste et les abus sexuels sur les enfants pendant si longtemps ? Probablement parce qu’il n’était pas vraiment considéré comme un abus dans les années 1970, lorsque les intellectuels français tentaient de dissoudre la morale bourgeoise en adoptant une approche libre de toutes sortes de tabous.

    En 1977 encore, plusieurs des intellectuels les plus en vue de l’époque – Simone de Beauvoir, Jean-Paul Sartre, Roland Barthes, Gilles Deleuze, Louis Aragon, Louis Althusser, Michel Foucault, Jacques Derrida et, plus tard, la très respectée pédopsychologue Françoise Dolto – ont signé une lettre ouverte demandant l’abolition de la loi interdisant les relations sexuelles entre adultes et mineurs.

    Selon la psychiatre française Muriel Salmona, s’exprimant lors d’une récente émission de radio pour France Culture, la France traverse un moment « historique » : « La lutte contre la propagande pédophile fait s’effondrer tout le système. Aujourd’hui, les gens ont compris qu’il n’est plus acceptable de dire que l’on peut être consentant quand on est enfant. »

    L’inceste et le silence vont de pair. Il faut généralement 10, 20, parfois 30 ou 40 ans pour qu’une victime trouve le courage de parler. La honte est centrale et les émotions compliquées vont souvent de pair. Mais le problème n’est pas vraiment que les victimes françaises d’inceste n’ont jamais parlé auparavant, mais qu’elles n’ont pas été écoutées. Lorsqu’ils l’ont fait, et que cela a été remarqué, le tumulte a souvent porté sur la confession d’une personne célèbre, comme l’auteur Christine Angot, qui a publié en 1999 le roman acclamé « L’inceste », qui a été accueilli avec dérision. Par exemple, un journaliste a écrit, il y a quelques années, un commentaire cinglant selon lequel « quelqu’un devrait créer une association pour les crimes contre Christine Angot ».

    Comme l’a soutenu Freud dans son livre historique « Totem et Tabou », l’interdiction de l’inceste est le fondement même de notre civilisation. Dans ce sens, l’inceste devient non seulement un crime contre un sujet, mais contre toute l’humanité à un niveau symbolique. L’inceste est tabou, nous le savons tous, mais le paradoxe est que, jusqu’à présent, il était tabou de parler de la violation de ce tabou, en France et dans le monde.

    C’est comme si la société redécouvrait sans cesse ce sujet sensible. Selon SOS Inceste, les victimes sont à 80% des femmes et à 20% des hommes. Selon l’Organisation mondiale de la santé, 96 % des agressions incestueuses sont commises par des hommes, ce qui démontre le lien intime entre l’inceste et les structures du patriarcat.

    Que peut-on faire pour prévenir l’inceste ? Plusieurs organisations françaises existent depuis longtemps, mais leur message n’a pas été entendu jusqu’à présent. C’est certainement grâce à #Metoo que les choses ont changé, et on ne peut espérer qu’une chose : que la conversation sur l’inceste cesse une fois pour toutes d’être un tabou.

    Mais la question demeure : l’inceste lui-même prendra-t-il fin un jour ? Probablement pas. Car l’inceste est à la fois une expression de pouvoir et une perversion, une façon monstrueuse de contourner à la fois les lois et les normes, la rime et la raison. Les lois ont toujours donné naissance à des transgressions, et ce n’est pas parce que les lois sont durcies que ces transgressions disparaissent. Il suffit de regarder l’impact des dix commandements sur la société pour le comprendre.

    Mais une chose a radicalement changé depuis la révolution #metoo. Si le silence s’est d’abord imposé du côté des victimes, il s’est maintenant déplacé du côté des auteurs. Duhamel s’est tu. D’autres auteurs présumés d’inceste se taisent également. Ce n’est pas souhaitable à long terme, car s’il y a une chose dont nous avons tous besoin, c’est de comprendre ce qui se passe dans l’esprit d’un auteur d’inceste.

    Le dernier tabou – oser écouter l’histoire de l’auteur de l’inceste – demeure donc.

    Gotenborg Posten, 21 mars 2021

    Tags : France, inceste, péedophilie, pédocriminalité, #Metoo, #MetooInceste, Olivier Duhamel, Camille Kouchner,

  • Maroc : Le film « Le miracle du saint inconnu » au Festival du Film Africain

    Festival du film : les films programmés aujourd’hui

    Le coup d’envoi de la trentième édition du Festival du film africain, asiatique et latino-américain, qui se déroulera cette année entièrement en ligne en raison de la pandémie, est donné. Voici les films programmés aujourd’hui, dimanche 21 mars, avec les présentations d’Annamaria Gallone : les trois titres sont disponibles à partir de 14 heures jusqu’au 28 mars (fin du festival). Pour acheter des billets ou des abonnements, visitez le site web du festival !

    Le miracle du saint inconnu, Alaa Eddine Aljem, Maroc / France / Qatar, 2019, 100′.

    Le réalisateur, déjà récompensé pour une série de courts métrages, présente son premier long métrage : une comédie/thriller aux tonalités burlesques pour raconter le Maroc contemporain, victime des superstitions et du changement climatique. Quelques instants avant d’être attrapé par la police, un voleur creuse un trou pour cacher un sac d’argent. Des années plus tard, après avoir été libéré de prison, il revient pour récupérer son butin, mais découvre qu’un sanctuaire dédié à un saint inconnu a été érigé juste au-dessus de son sac et qu’un nouveau village a été construit tout autour. Il y a des séquences irrésistibles, comme celle du cabinet médical où chaque patient reçoit le même médicament, ou l’histoire du chien aux dents d’or…

    Extrait de YIE d’Anthony Nti. Ghana, Belgique (section COURT-MÉTRAGE)

    Un jeune étranger au Ghana est chargé par son gang de recruter des enfants pour un travail risqué qui aura lieu plus tard dans la nuit. Il trouve Prince et Matilda, deux enfants pleins d’entrain et bons amis, avides d’aventures et prévoit de les confier à la bande. À l’insu de leurs parents, ils montent dans la voiture de l’inconnu, qui les emmène manger dans un hôtel luxueux et les divertit. En Twi, « Da Yie » signifie « bonne nuit », et dans le cas de Matilda et Prince, leur incursion dans le monde réel se termine lorsqu’ils rentrent chez eux et leur disent bonne nuit, comme ils le feraient n’importe quel autre jour, mais cette fois en sachant ce qu’il y a vraiment dehors.

    Africa Bianca, Filippo Foscarini, Marta Violante, Italie, 2020, 23 (section EXTRA)

    Africa Bianca raconte l’invasion de l’Ethiopie en 1936 par le régime fasciste, filtrée par les dessins d’école du jeune Balilla. Aujourd’hui encore, le colonialisme italien reste dans l’ombre. Grâce à la matérialité des images et des sons d’archives, nous tentons d’explorer les quelques traces qui subsistent. Les directeurs ont déclaré : « Dans les salles de classe des années trente, le thème colonial occupait une position d’importance absolue. L’Afrique représentée par le régime fasciste aux enfants était déjà une façon d’oublier les infamies de la politique de domination et d’extermination liée à la conquête. L’innocence des dessins réalisés dans les écoles, les émissions de radio et les projections de films, bien qu’ils restent éloignés des événements terrifiants auxquels ils font allusion, traduisent l’expérience de la guerre à travers les yeux de l’enfance, aussi éloignés que l’œil en vol des avions de bombardement ».

    Africa Rivista, 21 mars 2021

    Tags : Festival du film african, Le miracle du saint inconnu, Maroc, cinéma, Qatar,

  • « Le coup d’État d’urgence » d’Arié Alimi : restrictions de libertés, surveillance, et violences policières

    Lucile Tristan

    Fin janvier, Arié Alimi, avocat pénaliste et membre de la LDH, publiait aux éditions Seuil « Le coup d’État d’urgence ». De l’analyse des nouveaux moyens de surveillance au constat d’une multiplication des techniques de répression, l’ouvrage a pour ambition de décrypter la mécanique de l’avènement de l’état d’urgence sanitaire et ses conséquences, notamment juridiques. L’auteur développe notamment deux axes, d’abord un retour historique sur l’utilisation de l’état d’urgence, puis une approche de l’utilisation récente des mesures d’exception comme moyen de réduire nos libertés.
    De 1955 à 2020 : les origines de l’état d’urgence

    L’analyse des différents usages de l’état d’urgence, et des restrictions de libertés qui s’en suivent, sert de fil conducteur à l’ouvrage de l’avocat pénaliste. Il dépeint des mesures prises historiquement contre les populations colonisées par la France, avant d’être importées en métropole.

    Le premier usage de l’état d’urgence, fondé sur la loi du 3 avril 1955, est ainsi tournée contre les indépendantistes algériens. Puis, il est mis en œuvre se nouveau en contexte colonial en Nouvelle-Calédonie en 1985, en réaction aux revendications indépendantistes kanaks, avant d’être instauré à Wallis et Futuna en 1986, et en 1987 en Polynésie française.

    Nouveau tournant en 2005 : la mort violente de Zyed et Bouna, alors qu’ils fuyaient la police, déclenche des émeutes d’ampleur dans les banlieues. Un embrasement local qui s’étend à tout le territoire après les premières déclarations de Nicolas Sarkozy niant toute responsabilité de la police, puis qui s’accentuent après le lancer d’une grenade lacrymogène à l’entrée de la mosquée de Clichy au sein de laquelle des dizaines de fidèles étaient réunis en période de ramadan. Le 8 novembre 2005, l’état d’urgence est instauré en Île-de-France pour la première fois sur le territoire métropolitain visant des jeunes qui se révoltent contre le racisme d’État.

    Les colonies françaises, puis les quartiers populaires, ont donc été le laboratoire des états d’urgence, selon l’auteur, mais également de la création de mesures répressives. C’est également ce que développe le chercheur et militant Mathieu Rigouste, pour qui « les puissances impérialistes ré-importent en permanence des répertoires de surveillance, de contrôle, de répression et de domination, conçus dans et pour la guerre coloniale, à des fins de contrôle policier des classes populaires dans les métropoles. »

    Arié Limi montre que la création des brigades anti-criminalité (BAC) en 1994, le développement de nouvelles techniques d’intervention type anti-émeute, notamment depuis 2005, les armes types flashball ou taser ont pour point commun d’avoir été testés sur les quartiers populaires avant d’être étendus à d’autres populations dans le but d’étouffer la colère sociale. Expérimentées d’abord dans les colonies, ces mesures répressives se sont donc plus tard propagées dans les quartiers populaires dont une part importante de la population est elle-même issue de l’immigration des anciennes colonies françaises.

    En 2015, un nouvel état d’urgence est instauré par décret le 14 novembre, par François Hollande, suite aux attentats du Bataclan. C’est la première fois qu’il est utilisé sur l’ensemble du territoire. Il s’accompagne dans le même temps d’une militarisation sans précédent, au point qu’autant de militaires sont déployés à l’« intérieur » qu’à l’« extérieur » du pays. Emboîtant le pas au plan Vigipirate, cet état d’urgence sera renouvelé à six reprises. Il prendra fin plus de deux ans après, et un bon nombre de ses dispositions liberticides seront définitivement intégrées au droit commun par la loi du 30 octobre 2017, dite loi « SILT ». Ainsi, le texte désormais pérennisé a par exemple permis une généralisation des contrôles de police sans motif, faisant exploser les contrôles au faciès, sous le prétexte de la lutte contre le terrorisme.

    Dès 2015, les mesures d’exception permises par l’état d’urgence ont été appliquées contre des militants écologistes en amont de la COP21 : assignations à résidence, perquisitions, interdiction de manifester, autant de mesures répressives mises en œuvre pour éviter toute contestation. En 2016, la loi El Khomri, dite « loi travail », provoquant de vives contestations, un tournant répressif est amorcé envers de plus larges franges de la population. Cette fois-ci ce sont les syndicalistes qui sont visés. Au plus bas de sa popularité, François Hollande réprime la rue, et utilise l’article 49-3. 4 444 perquisitions seront ordonnées pendant ces deux années. Arié Alimi raconte : quinze de ses clients ont été victimes des perquisitions et des assignations à résidences prises à cette période, et aucune d’entre elles n’a jamais été poursuivie pour des infractions à caractère terroriste. Tous ont été victimes de mesures extrêmement liberticides, comme par exemple l’obligation de pointer jusqu’à trois fois par jour au commissariat. Selon l’avocat, « si les états d’urgence sécuritaire et sanitaire ont été déclarés en quelques jours, les mécanismes d’essentialisation et de réduction progressive des libertés se sont inscrits dans la durée. »


    Restriction de libertés, extension des moyens de répression policiers : une légalisation progressive de pratiques jusqu’alors illégales


    Dans la continuité du tableau historique qu’il a dressé, Arié Alimi revient sur les récentes réductions des « libertés fondamentales ». Ces dernières années ont en effet été marquées par une multiplication de mesures, légalisant souvent a posteriori des pratiques déjà en vigueur dans les faits.

    Arié Alimi évoque ainsi l’exemple de la nasse, des interpellations préventives, des barrages filtrants, ou encore des interdictions tardives de manifestation, pratiques mobilisées régulièrement par les forces de répression contre le mouvement social et finalement légalisées. Les interpellations préventives en amont des manifestations ont ainsi été légalisées par la loi dite « anti-casseurs » qui a étendu les cas prévus pour les contrôles d’identité, tandis que le schéma national du maintien de l’ordre présenté par le ministère de l’Intérieur en septembre 2020 avait pour objectif de légaliser la nasse.

    Revenant sur la loi sécurité globale, qui vise notamment à interdire de facto de filmer des policiers mais aussi à étendre les moyens de surveillance dont ils disposent, et qui est actuellement débattue au Sénat après avoir été votée en première lecture par l’Assemblée nationale, Arié Alimi rappelle la façon dont le droit de filmer les policiers était d’ores et déjà largement remis en question. Ainsi, il était formellement autorisé de filmer la police lorsque Cédric Chouviat a été tué après avoir filmé les policiers qui étaient en train de l’interpeller. De même, quelques mois plus tôt, au cours du mouvement des Gilets jaunes, Jérôme Rodrigues perdait son œil, visé au LBD alors qu’il était en train de filmer des policiers.

    Pour Arié Alimi, « ces stratégies illégales sont à chaque fois légalisées à posteriori par une nouvelle loi qui restreint progressivement le périmètre des libertés fondamentales », et l’état d’urgence sanitaire a été l’occasion d’expérimenter de nouvelles extensions de l’utilisation de ces stratégies. Ainsi, une des techniques de surveillance utilisée pendant le confinement a été le déploiement de drones, « équipés d’une caméra dont la puissance permet d’identifier n’importe quel individu survolé, manipulés par la Police nationale, ou par des sous-traitants privés missionnés par les municipalités ». L’auteur explique que, malgré son interdiction par le Conseil d’État au mois de juin, non pas par principe mais par manque de cadre juridique, ces drones ont continué à être utilisés par la police. L’avocat s’appuie sur une affaire pour laquelle il a été saisi, au cours de laquelle des soignants ont diffusé des messages tels que « Derrière les hommages Macron asphyxie l’hôpital » accrochés par des ballons à l’occasion du 14 juillet. Lors de l’interpellation, les fonctionnaires de police leur ont indiqué qu’ils avaient été repérés par un drone de la préfecture de Paris. Antérieurement, les drones avaient déjà été mobilisés au cours du mouvement des Gilets jaunes pour le réprimer. Finalement, la loi sécurité globale devrait permettre d’entériner l’utilisation de ce dispositif de vidéosurveillance liberticide.


    L’état d’urgence sanitaire : violences policières et attaques contre les droits des travailleurs

    Les nombreuses stratégies répressives permises par l’état d’urgence sanitaire se sont, logiquement, couplées à un lourd bilan de victimes de violences policières que dresse Le coup d’état d’urgence. Ces violences policières ont particulièrement touché les quartiers populaires, déjà lourdement frappés par l’épidémie. Arié Alimi rappelle ainsi comment ces victimes de violences, presque toutes issues de banlieues, sont également celles qui ont vécu la surmortalité pendant la pandémie, à l’image de la Seine-Saint-Denis, l’une des plus touchées du fait des « inégalités en termes de soins et d’accès aux soins, représentativité plus importante dans les métiers les plus exposés au risque de contamination, la densité de la population, et habitat indigne rendant souvent impossible un confinement strict ». L’avocat en profite pour rappeler la violence des institutions qui garantissent l’impunité des forces de répression responsables de ces faits. « Une victime de la violence policière est ainsi souvent doublement victime : de la violence policière proprement dite, puis de la violence judiciaire qui a vocation à éteindre la parole de victime » note-t-il.

    L’état d’urgence sanitaire mis en place a permis de donner un cadre légal à cette gestion répressive. Or, comme le décrit l’ouvrage, celui-ci a également été l’occasion d’approfondir les attaques contre le Code du travail. Les ordonnances prises quelques jours après le premier confinement ont ainsi permis aux employeurs d’imposer à leurs salariés de travailler soixante heures par semaine sans accord collectif, donc unilatéralement. De plus, « la réalité [était] celle d’une obligation de travail pour les plus précaires, dès lors que le ministère du Travail a considéré, y compris sur son site internet et dans ses déclarations, que le droit de retrait ne s’appliquait pas à la situation. »

    Ces attaques contre les droits des travailleurs et les libertés ont été le corollaire d’une gestion sanitaire catastrophique de la part du gouvernement. Arié Alimi prend l’exemple des masques pour illustrer l’incohérence criminelle du gouvernement, de l’injonction à ne pas porter de masque au mois de mars, affirmant même sa dangerosité, liée au manque de stocks, à la création d’une infraction pénale contre ceux qui n’en porteraient. Une façon de compenser par la répression l’incapacité à obtenir le consentement de la population, pas dupe de l’orientation pro-patronale du gouvernement et de sa gestion sanitaire erratique.


    Un retour à l’« état de droit » ?

    Légitimement, l’ouvrage pose la question de l’« après », et insiste sur le refus de l’unité nationale qu’il interprète comme « synonyme de renoncement ». Selon l’auteur, alors que les décisions prises pendant le premier confinement ont mis à mal le droit de se réunir, et de manifester, il s’agit de prôner un retour à « l’État de droit ». Or, après la longue description historique de l’utilisation de l’état d’urgence ou encore des mécanismes permettant de légaliser, donc d’intégrer à « l’État de droit », des mesures jugées illégales jusqu’alors, on est en droit de s’interroger sur une telle perspective.

    En effet, l’ensemble des mécanismes qui ont permis l’instauration des différents états d’urgence, et la multiplication de lois liberticides et racistes sont des outils intrinsèques à la Ve République, profondément antidémocratique. Cette Ve République, née du coup d’État militaire de mai 1958, a débouché sur une Constitution conçue pour doter l’exécutif d’un ensemble de pouvoirs d’exception. De l’article 44 de la Constitution permettant d’évincer les amendements votés par le Parlement, au fameux article 49-3 utilisé pour passer la réforme des retraites (finalement retirée), en passant par la décision du Conseil Constitutionnel, qui acte le 28 mai 2020, la possibilité pour le gouvernement de faire passer des ordonnances sans les faire voter par le Parlement, c’est bien sur les règles de la Ve République que s’appuie l’offensive du gouvernement. De même, la possibilité pour l’exécutif de diriger par l’intermédiaire d’un conseil de défense, ne s’embarrassant plus de délibérations parlementaires, est un outil constitutionnel.

    Avant Arié Alimi, nombreux sont les auteurs à être revenus sur cette dimension fondamentale de la Ve République. C’est aussi ce qu’exprime Mathieu Rigouste, quand il affirme que « La constitution de cette 5ème République, avec les articles 16 et 49/3, est faite pour pouvoir faire la guerre intérieure et créer l’état d’exception permanent. ». Le militant et chercheur en sciences sociales développe ainsi que la Ve République, née de la volonté d’une partie de la bourgeoisie coloniale et industrielle voulant en finir avec la IVe République afin de rester une grande puissance impérialiste, débouche sur une constitution « taillée pour pouvoir faire la guerre à l’intérieur, en permanence ». Comme nous l’expliquions dans un édito récent, ce qui détruit la démocratie, c’est donc la « démocratie » elle-même, supposément incarnée dans la constitution de la Ve République.

    Cette question de la Constitution pose une question plus large, et qui dépasse la question d’une Constitution donnée : celle de la démocratie et des droits réels dont il est possible de jouir dans le cadre du régime capitaliste. L’approche consistant à revendiquer un retour à « l’État de droit » ne questionne ni les fondements, ni les fonctions du droit, et encore moins sa place dans les rapports de production. La pensée de Marx sur la question du droit nous éclaire en ce sens : selon lui, la loi repose sur la société comme l’expression d’intérêts issus d’un mode de production donné. Les lois traduisent ainsi des formes de domination produites par un mode de production donné et les formalisent en des normes universelles pour chercher à occulter leur origine. C’est pourquoi l’État de droit, bien que reposant sur un principe de garantie d’égalité et de libertés formelles, est le garant de rapports de production basés sur l’exploitation. C’est ce qui permet à Patrick Balkany, d’être libéré à cause d’un « état dépressif marqué », alors même que huit hommes détenus sur dix présentent au moins un trouble psychiatrique mais ne bénéficieront jamais de ce traitement de faveur. De même, les tribunaux peuvent condamner à [quatre mois fermes un homme ayant volé un sandwich-https://www.revolutionpermanente.fr/D-un-sandwich-a-2-euros-a-quatre-mois-de-prison-ferme], mais fermer les yeux sur les catastrophes sanitaires engendrées par des entreprises telles que Lubrizol.

    Ainsi, sous couvert d’une égalité dans la loi, le système juridique, dont une des valeurs cardinales est la protection de la propriété privée, constitue le garant de la domination d’une classe sur une autre. Dans les périodes de prospérité, cette illusion égalitaire est l’un des outils permettant à la bourgeoisie de dominer, mais aussi d’imposer son hégémonie, c’est-à-dire fabriquer en profondeur le consensus à l’égard de son modèle de société. Mais en période de crise, les contradictions s’approfondissent, le chômage et la précarité s’étendent, et face à l’instabilité politique et aux révoltes, et la coercition et la répression prennent une importance toujours plus centrale. « Si la classe dominante a perdu le consentement, c’est-à-dire qu’elle n’est plus « dirigeante », mais uniquement « dominante », et seulement détentrice d’une pure force de coercition, cela signifie précisément que les grandes masses se sont détachées des idéologies traditionnelles, qu’elles ne croient plus à ce en quoi elles croyaient auparavant. » synthétisait ainsi Gramsci, décrivant la « crise organique » comme ce moment où les mécanismes de consentement se grippent. Depuis 2008, c’est cette instabilité à échelle mondiale que nous observons. Elle s’est notamment incarnée dans le mouvement des Gilets jaunes, réprimé très violemment.

    Or, la multiplication des attaques contre les libertés, des mécanismes répressifs et des mesures d’exception décrite dans l’ouvrage est indissociable de cette situation d’instabilité qui est loin d’être refermée à l’heure où les conséquences sociales de l’épidémie et de sa gestion capitaliste sont d’ores et déjà dramatiques. La loi sécurité globale est l’expression récente de ce phénomène. Alors que le spectre des Gilets jaunes hante l’exécutif, et que la gestion catastrophique de l’épidémie a renforcé la colère, cette nouvelle loi liberticide anticipe la contention de futures explosions sociales incontrôlées. Dans ce cadre d’une instabilité structurelle mondiale qui peut difficilement être canalisée dans le cadre du système, la répression risque de s’intensifier et l’appel à un retour à l’Etat de droit apparaît comme un voeu pieu. Demander à l’État, au travers de ses institutions judiciaires, de renoncer à la coercition alors que le consentement à son ordre social faiblit revient à espérer que la bourgeoisie laisse sa place sans combattre.

    Dans le même sens, l’espoir placé par l’auteur dans une action judiciaire comme moyen de mettre en lumière la responsabilité des politiques qui ont mené à une telle catastrophe sanitaire et sociale convainc peu. Ce d’autant plus que l’auteur lui-même rappelle à quel point le parquet est subordonné au politique, qui a « instrumentalisé depuis toujours l’action judiciaire pour réduire au silence les opposants politiques », ou encore comment « l’expérience contemporaine nous a cruellement rappelé que le Conseil d’État, du fait de son rôle, de sa composition et de sa sociologie, ne pouvait jouer le rôle de contre-pouvoir et de sanction ».

    Cela ne signifie pas que l’arène judiciaire ne puisse pas être un terrain de lutte politique, sur lequel des victoires partielles peuvent être arrachées. L’indemnisation provisoire de 30 000 euros attribuée à Jérôme Rodrigues, ou encore la condamnation de la SNCF pour atteinte au droit de grève contre les grévistes de l’Infrapole en sont des démonstrations récentes, et les luttes que mènent des avocats et juristes du bon côté de la barricade, pour tenter d’obtenir la justice pour les victimes de violences policières, attaquer des pratiques illégales et liberticides ou démasquer l’écart entre les principes affichés par le pouvoir et sa politique réelle sont très importantes. Seulement, détachées d’une lutte d’ensemble pour renverser ce système, elles risquent de se condamner à l’impuissance.

    Révolution Permanente, 20 mars 2021

    Tags : France, état d’urgence, Guerre d’Algérie, Nouvelle Calédonie, coronavirus, covid 19,

  • La France interdit l’abattage rituel halal des volailles

    Les trois mosquées titulaires de l’agrément interministériel les habilitant à délivrer les autorisations de pratique du sacrifice rituel ont exprimé, jeudi dans un communiqué, leurs inquiétudes de l’interdiction de « l’abattage halal » de poulets à partir de juillet 2021.

    Selon ce communiqué, « les responsables de la Grande Mosquée de Paris, de la Grande Mosquée de Lyon et de la Grande Mosquée d’Évry, titulaires de l’agrément interministériel les habilitant à délivrer les autorisations de pratique du sacrifice rituel, et assurant la certification halal des viandes et produits destinés à la consommation de la communauté musulmane, se sont réunis le lundi 15 mars 2021 à la Grande Mosquée de Paris pour examiner les voies et moyens de sensibilisation des pouvoirs publics sur la situation dramatique que risquent de vivre les musulmans de France suite à la parution de l’instruction technique DGAL/SDSSA/2020-722 du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation datée du 23/11/2020 ».


    En effet, cette instruction, instaurant des « Contrôles officiels relatifs à la protection animale en établissement d’abattage de volailles au moment de leur mise à mort », impose désormais des conditions d’abattage ne permettant pas de répondre aux principes dogmatiques et fondamentaux de l’abattage rituel Halal.

    « C’est aussi un mauvais message que l’on envoie à la communauté musulmane en cette veille de Ramadhan », s’insurgent les responsables de trois mosquées.

    Les discussions sont vaines

    Toujours selon le communiqué, les responsables des Grandes Mosquées auraient déjà fait part de leurs préoccupations auprès du ministère de l’Intérieur et du ministère de l’Agriculture, « sans pour autant parvenir à un résultat satisfaisant, permettant d’assurer le respect des principes de l’abattage rituel Halal tel qu’il était pratiqué jusqu’à présent ».

    Ils estiment, d’ailleurs, que « ces dispositions sont une grave entrave au libre exercice du culte » avant d’annoncer « la volonté de mener toutes les actions légales pour rétablir ce droit fondamental ».

    Echourouk, 20 mars 2021

    Tags : France, Halal, Islam, abatage halal, poulets,

  • La politique française oppose les chats aux chiens

    Certains animaux sont-ils plus présidentiels que d’autres ?

    Les chats et les chiens sont devenus les nouvelles armes de la guerre de l’image en France. Les choses ont commencé à se réchauffer à la fin de l’année dernière lorsque Marine Le Pen, leader du Rassemblement national (anciennement Front national), a révélé qu’elle avait passé un examen pour devenir éleveuse de chats agréée. Sa ferveur féline était déjà bien connue. Mme Le Pen considère que les chats font « partie de la famille » et a déjà accusé un doberman appartenant à son père, Jean-Marie Le Pen, d’avoir tué l’un de ses précieux molosses. Mais ce dernier rebondissement ressemble étrangement à une tentative d’adoucir l’image d’une dirigeante qui a cherché à prendre ses distances avec la politique d’extrême droite incendiaire de son père.

    Tout comme Mme Le Pen a essayé d’atténuer son style strident avant l’élection présidentielle française de l’année prochaine, des photos câlines de ses six chats sont apparues avec une régularité persistante sur son compte Instagram. Elle a même créé un compte anonyme distinct, dédié à ses races bengal et somali. « Je ne suis pas intéressée par l’argent », ronronne Mme Le Pen ; « Je veux juste que les chats soient mieux traités ». Si je prends soin de mes chats, semble-t-elle dire, je prendrais soin du pays aussi.

    Les efforts de Mme Le Pen ne sont pas passés inaperçus. Après son élection, Emmanuel Macron a adopté un bâtard, Nemo, dans un refuge. Des photos du président, plus connu pour son style de gouvernement « jupitérien », caressant son cabot noir figurent périodiquement sur le compte Instagram de la photographe officielle de la présidence, Soazig de la Moissonnière. En décembre, M. Macron a publié sur les médias sociaux une vidéo de Nemo, accompagnée d’un message exhortant les Français à adopter un animal de compagnie de secours, et à le faire de manière responsable. Elle a obtenu plus d’un demi-million de vues sur Instagram seulement.

    Sous la Cinquième République, une ménagerie d’animaux de compagnie s’est succédé au palais de l’Élysée. En plus de son chien de sauvetage, M. Macron garde deux poules (un cadeau). Nicolas Sarkozy a fait venir une poignée de canidés. Charles de Gaulle avait un Welsh Corgi, qui lui aurait été offert par la reine, ainsi qu’un chat, mais aucun ne vivait à la résidence officielle. Avant M. Macron, pas moins de six présidents français consécutifs ont eu des labradors, faisant de cette race une sorte de tradition. Celui de Georges Pompidou s’appelait d’ailleurs Jupiter. En bref, tous les présidents français modernes ont possédé un chien. Mme Le Pen a-t-elle choisi le bon animal pour le pouvoir ?

    The Economist, 20 mars 2021

    Tags : France, Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen, Emmanuel Macron, Némo, Charles de Gaulle, Georges Pompidou, animaux de compagnie, chiens, chats, politique,

  • La justice française: la réputation d’être de gauche

    Les procès Sarkozy et leurs conséquences: Le pouvoir judiciaire en France est confronté à des réformes majeures.

    Corona fait de l’ombre à tout. Pour le gouvernement d’Emmanuel Macron, cependant, ce n’est pas aussi dramatique qu’il n’y paraît pour le moment. Il est vrai qu’en France aussi, la campagne de vaccination, qui a pris de l’ampleur, est quelque peu ralentie par l’affaire Astra-Zeneca, mais cela détourne aussi l’attention du scandale politique qui couve depuis début mars à la suite d’un verdict étonnant contre l’ancien président Nicolas Sarkozy, et qui continuera vraisemblablement à jouer un rôle dans les mois à venir. Il s’agit du système judiciaire idéologiquement biaisé en général et des poursuites de la Cour fiscale nationale en particulier.

    Y a-t-il une méthode pour de telles poursuites ?

    Cette cour spéciale, fondée par le prédécesseur de Macron, François Hollande, et opportunément de gauche, s’est apparemment donné pour mission de passer au crible les candidats potentiels dans les camps de la droite et de la bourgeoisie jusqu’à ce qu’elle trouve quelque chose, puis de lancer des enquêtes avec effet de publicité, de préférence avant des élections importantes. C’est ce qui s’est passé avec l’ancien candidat prometteur à la présidence François Fillon il y a quatre ans, qui a été mis hors course par cette intrigue, et c’est ce qui se passe maintenant avec l’ancien président Nicolas Sarkozy.

    Trois ans de prison, dont deux avec sursis – telle est la sentence prononcée dans la salle d’audience bondée du 1er mars. C’est vrai, il pourrait purger l’année de prison en résidence surveillée. Mais les espoirs ou les craintes d’un come-back sont terminés. Même si Sarkozy a annoncé le soir même qu’il allait faire appel. Et le lendemain, lors d’une interview télévisée dans le cadre de la première émission, il a déclaré à plusieurs reprises qu’il n’avait pas l’intention, et n’a toujours pas l’intention, de se présenter aux élections. Cependant, il n’a jamais voulu renoncer à donner des conseils ou à s’engager dans le camp bourgeois parce qu’il était un homo politicus. Maintenant, cependant, il se battrait bec et ongles pour son honneur et pour le droit et la justice.

    Plusieurs procès pour corruption, pots-de-vin et financement illégal de campagne sont en cours depuis plus de huit ans contre M. Sarkozy, aujourd’hui âgé de 66 ans. Dans le verdict actuel – un autre est attendu prochainement – il a été reconnu coupable d’avoir soudoyé un procureur en promettant d’user de son influence en tant qu’ancien président de la cour princière de Monaco pour obtenir de cet avocat un poste de consul honoraire de Monaco. En contrepartie, le procureur devait l’informer, ainsi que son avocat, de l’état de l’enquête sur les procès de Sarkozy. Les conversations à ce sujet entre Sarkozy et son avocat Thierry Herzog, qui a également été condamné, ont été secrètement interceptées et ont servi de seule preuve. Cela viole le secret professionnel et la protection de la confiance entre l’avocat et son client, mais, ont déclaré les juges, « en raison de la gravité de l’infraction », ils ont autorisé les enregistrements à servir de preuve. Il est difficile d’imaginer que la Cour aurait agi de la même manière avec un homme politique de gauche.

    La course dans le camp bourgeois est ouverte

    Il est également difficile d’imaginer que le président sortant, Emmanuel Macron, n’avait aucune idée de cette évolution. En tout cas, cela élimine un concurrent potentiellement indésirable. Car chez les Républicains conservateurs (LR), de nombreux barons du parti avaient placé leurs espoirs dans le fait que Sarkozy monte une nouvelle fois sur le ring et brigue la présidence. Maintenant, la course est ouverte dans le camp bourgeois. Plusieurs noms circulent.

    Il y a le chef de file des Républicains au Sénat, Bruno Retaillau, il y a les personnalités Pierre de Villiers, l’ancien chef d’état-major, que les sondages donnent à 20 %, ou le publiciste Eric Zemmour, qui est à 13 %. Il y a l’ancien chef de parti Laurent Wauquiez ou l’ancien ministre de Sarkozy Xavier Bertrand et quelques autres. En l’état actuel des sondages, ils ne parviendraient pas à se qualifier pour le second tour. La chef du parti de l’Assemblée nationale, Marine Le Pen, les devancerait et serait même dangereuse pour le président sortant, selon les sondages d’aujourd’hui. Emmanuel Macron n’est pas menacé par la gauche. Les socialistes, les Verts et les communistes atteignent ensemble un maximum de 30 %.

    Si le camp bourgeois se mettait d’accord sur un candidat, il aurait certainement une chance, même contre Macron. Sarkozy aurait pu être ce candidat. Aujourd’hui, près de 13 mois avant le premier tour de scrutin de l’élection présidentielle et trois mois avant les élections régionales nationales, les conservateurs doivent rapidement se mettre d’accord sur un candidat. Les élections régionales constituent le test final et servent de critère de sélection.

    Il est fort possible que le sénateur vendéen de 60 ans, Bruno Retaillau, s’allie au général Pierre de Villiers, voire à Xavier Bertrand. Ils étaient tous unis par leur opposition cordiale à Sarkozy. Le verdict pourrait donc même marquer un tournant pour la France : la fin des éternelles batailles de chefferies en politique. À moins, bien sûr, que la justice de gauche ne retrouve ce qu’elle cherche dans ses opérations d’écoutes et ne fasse ainsi éclater les alliances. Elle préfèrerait certainement un Macron semi-gauchiste à un Retaillau droitier, qui d’ailleurs, comme Marine Le Pen, dissoudrait rapidement le tribunal de gauche d’un trait de plume.

    Le ministre de la justice annonce une réforme

    Cependant, les reconstitutions juridiques et les enquêtes contre Sarkozy ont une fois de plus gravement ébranlé la confiance du peuple dans le troisième pouvoir et son indépendance. Ce n’était pas très fort de toute façon. Des jugements comme celui contre Sarkozy « approfondissent la méfiance », comme l’admet même le ministre de la justice dans une interview au Point, et annonce également une grande réforme de la justice. Il souhaite présenter le projet de loi à la mi-avril. Il doit y avoir des règles également pour les pouvoirs indépendants des États. Oui, dit le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, « plus une institution insiste sur son indépendance, plus elle doit respecter strictement les règles. »

    La réforme prévoit des changements complets, mais pas la suppression du Tribunal financier. C’est précisément ce qu’il faudrait faire et cela donnera encore lieu à de vives controverses.

    Die Tagespost, 20 mars 2021

    Tags : France, Justice, Nicolas Sarkozy,

  • Derrière la répression au Sénégal, la marque de l’impérialisme français

    Alors que la population sénégalaise souffre d’une intense répression politique, une enquête parue dans StreetPress revient sur la provenance de cet armement. Fruit d’entreprises françaises largement soutenues par l’Etat français, l’armement de la police sénégalaise cache mal la marque de l’impérialisme français.

    Depuis le 3 mars, des milliers de sénégalais sont sortis dans la rue contre le gouvernement pour demander la libération de Ousmane Sonko, opposant politique. Dans un pays où la population souffre gravement du chômage et de la pauvreté, la colère s’est rapidement portée contre les signes de l’impérialisme français, en grande partie responsable de leurs conditions. Aussi les manifestants s’en sont pris aux enseignes Auchan, lesquelles ont remplacé les boutiques locales, mettant à la porte les petits commerçants et licenciant massivement leurs employés. Mais face à l’intense répression qu’ils ont subi, au point qu’Amnesty International juge la situation particulièrement préoccupante, la population sénégalaise a justement dénoncé la provenance française de l’armement des forces de répression. Signe de l’implication de la France pour soutenir le régime de Macky Sall, elle est la marque d’un impérialisme français omniprésent au Sénégal, comme dans le reste de l’Afrique de l’Ouest.

    Une répression made in France

    Une enquête de StreetPress revient sur le détail de ces armes, leur provenance, et les entreprises qui les fabriquent. On y retrouve une grande partie des armes que l’Etat français a utilisé en France pour réprimer les manifestants : des grenades lacrymogènes et des lances-grenades notamment.

    Certains équipements sont encore plus perfectionnés : en France l’entreprise Alsetex vend des modèles « cougars », des lances-grenades très utilisés au moment des Gilets Jaunes et responsables de nombreuses mutilations, comme lors du 16 novembre 2019, où un gilet jaune a perdu son oeil par un tir tendu, Place d’Italie à Paris. Au Sénégal, elle permet aux forces de répression de disposer d’un Cougar 12, une arme très impressionnante qui permet de lancer 12 grenades simultanément. Ce dernier modèle avait été également été aperçu au Liban, lors de la répression d’émeutes au début de l’année 2020

    Au Sénégal comme au Liban, deux pays sous l’influence des intérêts impérialistes français, il y a une constante : la provenance des armes ainsi que le zèle de l’Etat et des entreprises françaises pour leur fournir.

    En plus de l’entreprise Arquus, qui vend donc le Cougar 12, on trouve aussi Nobel sport et SAPL , entreprises françaises qui ont vendu des balles en caoutchouc de calibre 12 à la police sénégalaise. Street Press, qui révèle cette utilisation en s’appuyant sur des images transmises par le photographe Thibaut Piel et le journaliste Tom Becques, explique avoir identifié des douilles comparables à celles tirées en forêt par des chasseurs. Ces dernières semaines, elles ont été utilisées pour viser à la tête des manifestants, et ont par exemple blessé une jeune fille de 14 ans.

    La France au Sénégal : armer un régime aux ordres de l’impérialisme français

    Pour soutenir la répression intense que subit la population sénégalaise, ces entreprises peuvent compter sur le soutien de l’Etat français. Alors que Macky Sall est un relai efficace des intérêts français dans la région, la France a pu, grâce à la politique d’endettement du président, faire profiter ses grandes entreprises, elle a donc tout intérêt à le maintenir au pouvoir.

    Au Sénégal presque toutes les activités économiques sont gérées par des entreprises françaises : on y compte plus de 250 sociétés tricolores qui génèrent 2 000 milliards de francs CFA de chiffres d’affaires , soit 3 milliards d’euros, comme l’a confirmé au début de février Philippe Lalliot, ambassadeur de France au Sénégal, sur une radio sénégalaise.

    Alors que le gouvernement sénégalais a opté pour une politique d’endettement, la France y gagne sur tous les tableaux. A titre d’exemple : le Sénégal s’endette auprès d’elle à hauteur de 230 millions d’euros pour financer un projet de train reliant l’aéroport Blaise-Diagne, à la capitale Dakar, il fait appel pour construire cette ligne à Alstom et à la SNCF.

    Avec un client comme le Sénégal de Macy Sall, la France a tout intérêt à maintenir la stabilité du régime, et avec lui, les intérêts de ses multinationales, en équipant la police locale.

    Ce même constat s’étend à toute la région d’Afrique de l’Ouest : en 2009, on apprenait que la formation des forces de police et des gendarmerie africaines coûtait environ 18 millions d’euros par an à l’Hexagone.

    La formation des policiers africains par l’Etat français, s’accompagne de l’appui direct du gouvernement aux entreprises qui vendent des armes.

    Déjà bien renfloués par le gouvernement Macron pour réprimer les manifestants grâce à une commande de 2 millions d’euros à Alsetex pour 450 « super flash-balls » et 1280 LBD 40., les leaders du secteur que sont Asletex, Arquus et Nobel Sport peuvent compter sur le volontarisme de Jean Yves Le Drian, ministre des affaires étrangères depuis 2017, après avoir occupé le poste de ministre de la défense sous le quinquennat Hollande.

    Grace à lui, la France a pu devenir le 2e vendeur d’armes au monde, proposant aussi bien des blindés militaires au Cameroun, utilisés par une unité d’élite accusée d’assassinat arbitraires et de tortures, des avions de chasses Rafales vendus à l’Égypte en 2015, après que le gouvernement ait réalisé le plus grand massacre en zone urbaine des trente dernières années, ou encore des navires de combat qui participent au blocus maritime qui touche le Yémen, comme le révélait il y a quelques mois une enquête du média Disclosure.

    Cette promotion des armes françaises dans les régimes autoritaires aux quatre coins du globe, est permise par le travail d’accompagnement du gouvernement, mais parfois c’est lui qui impulse directement les projets de développement de l’industrie de l’armement.

    Ainsi le groupe Nobel sport, le même dont on retrouve ses balles calibre 12 au Sénégal, a pu par exemple bénéficier de l’appui direct du ministre pour relancer sa production de poudre destinée à des armes de guerre, tandis qu’il se concentrait auparavant seulement sur les armes de chasse.

    La défense de l’industrie militaire française comme le soutien aux régimes alliés des intérêts français : la France forme des policiers et vend des armes aux forces de répressions sénégalaises pour empêcher la population de se lever contre les intérêts de Total, de Auchan et de Alstom, responsables de la pauvreté et de l’endettement de leur pays. Face à cette situation et pour soutenir la mobilisation du peuple Sénégalais, il est urgent se battre contre l’impérialisme français, contre Arquus, Alsetex, Nobel Sport, et toutes ces entreprises de l’armement qui servent à réprimer, au Sénégal comme en France.

    Révolution Permanente, 19 mars 2021

    Tags : Sénégal, France, impérialisme,

  • Italie : Le marocain qui a sauvé une dame et sa fille vit, maintenant, dans sa voiture

    La voiture transportant la femme et sa fille s’est retrouvée dans une pente et Rashid, avec un ami, a réussi à les sauver avant qu’un incendie ne se déclare. Célébré par la presse locale, il est sans emploi et sans abri depuis trois ans. Seul quelqu’un du voisinage l’aide à survivre

    AGI « Je voudrais juste prendre une douche, manger assis à une table, dormir sur un lit et non sur le siège d’une voiture qui ne marche plus. » Rachid Saiad a 36 ans et depuis trois mois, il vit dans une Seat Ibiza garée dans la Via Fossata, dans le quartier de Borgo Vittoria à Turin. Né à Casablanca, au Maroc, il est arrivé en Italie avec sa famille lorsqu’il était enfant. Il y a étudié et aujourd’hui, il parle couramment cinq langues : l’arabe, l’italien, l’anglais, le français et l’espagnol. Il a travaillé dans le secteur du bâtiment, dans une entreprise spécialisée dans l’aménagement de stands.

    L’entreprise pour laquelle il travaillait a fait faillite.

    « J’ai payé vingt et un ans de cotisations à l’État italien – a-t-il déclaré à l’AGI – puis la société a fait faillite, ils me devaient beaucoup d’argent que je n’ai jamais vu ». L’histoire de Rachid semble être une histoire déjà entendue, avec la vie qui vous tourne le dos, laissant place à la malchance. Cette fois, cependant, il y a autre chose et nous devons faire un pas en arrière de huit ans, en juin 2013. C’est le soir lorsque Rachid, accompagné d’un ami, Hamid, roule sur le périphérique « Terzo Ponte » à Ivrea, près de Turin. Depuis la fenêtre de leur voiture, les deux hommes se rendent compte qu’une Fiat Panda a plongé dans un fossé, mettant fin à sa course contre un arbre.

    De la fumée sort du capot et la voiture risque de s’enflammer à tout moment. Les deux amis se sont arrêtés et ont atteint la voiture : à l’intérieur se trouvaient une femme de 43 ans de Cascinette et sa fille de 6 ans, toutes deux blessées. Rachid et Hamid ont essayé d’ouvrir les portes, mais l’impact avec le sol avait déformé les tôles et ils n’y sont pas parvenus. Ils ont donc décidé de briser le verre et ont finalement réussi à extraire la mère et la fille, qui ont été transportées à l’hôpital et se sont rétablies après quelques jours d’hospitalisation.

    Les journaux locaux ont relaté l’événement et les sauveteurs sont devenus des « anges ». « Nous avons simplement fait ce qu’il fallait faire », déclare Rachid en montrant une cicatrice bien visible sur son mollet droit. « C’est 124 points de suture, une blessure que je me suis faite en essayant de plier les tôles de la voiture. Après l’accident, pendant quelques années, la petite fille m’a écrit à Noël pour me souhaiter bon courage, puis nous nous sommes perdus de vue, j’espère qu’elle va bien. »

    Des petits boulots, mais la pandémie a aggravé la situation

    Entre petits boulots pour grappiller un peu d’argent et longues périodes d’inactivité, la vie de Rachid a dégringolé ces trois dernières années et la pandémie de Covid-19 n’a fait qu’empirer les choses. « J’ai toujours mon numéro de TVA, mais je ne trouve rien. J’ai dormi quelques jours sur un banc, puis un ami m’a dit que je pouvais utiliser sa voiture arrêtée au parking. La nuit, il fait froid, les couvertures ne suffisent pas. Puis il y a des gens sans cœur qui urinent contre les roues, crachent sur le pare-brise. Heureusement – dit Rachid avec des yeux brillants – beaucoup d’habitants du quartier m’aiment. Il y a ceux qui m’apportent de la nourriture, je ne veux pas mendier quoi que ce soit, mais j’en ai besoin ».

    Pour compliquer les choses, un ulcère perforant dont Rachid souffre depuis des années et qui l’a récemment réduit à la peau et aux os. « J’ai été opéré à Aoste, mais j’ai besoin de certains médicaments qui sont chers et que je ne peux pas me permettre. Luca, un garçon qui vit dans l’immeuble près du parking, s’approche. « Aujourd’hui, je vais t’acheter les médicaments, dis-moi ce dont tu as besoin », dit-il à Rachid, qui baisse la tête en énumérant les médicaments. Puis il explique : « Je veux retourner vivre dans une maison, essayer de recommencer. Mon permis de séjour a expiré, sans argent et sans résidence, il est impossible de le renouveler ». Si rien ne change, Rachid n’aura d’autre choix que de retourner au Maroc. « Sans argent, même là, ce serait compliqué. Lorsque je travaillais, j’envoyais toujours de l’argent à mes parents, qui vivent également dans des conditions précaires ».

    Agenzia Italia, 20 mars 2021

    Tags : Italie, Maroc, migration, RME, Rachid Saiad,