Étiquette : Abdelkrim El Khattabi

  • Maroc-Algérie: Un dealer de kif s’autoproclame avocat des Kabyles algériens

    Une blague diplomatique: Un dealer de kif s’autoproclame avocat des Kabyles algériens


    Par Omar Chaalal
    La vérité et la justice sont souveraines, car elles seules assurent la grandeur des nations. Emile Zola
    L’histoire reflète la vérité et la diplomatie le sérieux d’une nation. L’histoire classe l’avocat Omar parmi les ignorants et la diplomatie le déclasse dans la case des débiles politiques. Il plaide pour le droit à l’autodétermination de la Kabylie et oublie l’histoire de bled Siba.
    Introduction
    Je commencerai mon propos par le traité de Tanger, lequel fut signé le 10 septembre 1844. Le Makhzen y reconnaissait la présence française en Algérie et cessait tout soutien officiel à l’émir Abd el-Kader déclaré hors-la-loi au Maroc et en Algérie. Dans ce traité, l’article quatre dévoile le vrai visage du Maghzen. Hadj Abdelkader est mis hors la loi sir toute l’étendue du royaume du Maroc, aussi bien qu’en Algérie. Il sera en conséquence poursuivi par les Français sur le territoire de l’Algérie, et par les Marocains sur leur territoire jusqu’à ce qu’il en soit expulsé ou qu’il soit pris par l’une ou l’autre nation. Dans le cas où Abdelkader tomberait aux mains des troupes françaises, le gouvernement de sa Majesté, le roi des Français s’engage à le traiter avec égard et générosité. Dans le cas où il tomberait dans celles des troupes marocaines, sa Majesté le souverain du Maroc s’engage à l’interner dans l’une des villes du littoral ouest jusqu’à ce que les deux gouvernements aient adopté de concert les mesures indispensables pour qu’Abdelkader ne puisse en aucun cas reprendre les armes et troubler de nouveau la tranquillité de l’Algérie et du Maroc. Cet article fut mis à exécution par Moulay Abderrahmane, au printemps de l’année 1847.
    Je suis un Algérien d’origine berbère
    Revenant à l’avocat Omar, je lui dis «Je suis un Algérien d’origine berbère et mon nom de famille m’oblige à vous répondre.
    Pour rafraîchir votre mémoire, si tant est qu’il en existe dans votre petite cervelle, je vous invite à lire un extrait du discours du premier président de la République du Rif, Son Excellence Moulay Mohand. Son Excellence Moulay a réussi à établir une république libre sur une partie du royaume du Makhzen quand son sultan vendu acceptait le protectorat français». Il s’exprimait ainsi «Nous considérons que nous avons le droit, comme toute autre nation, de posséder notre territoire, et nous considérons que le parti colonial espagnol a usurpé et violé nos droits, sans que sa prétention à faire de notre gouvernement rifain un protectorat ne soit fondée. […] Nous voulons nous gouverner par nous-mêmes et préserver entiers nos droits indiscutables». Qui dit mieux ? Un dealer de kif s’est autoproclamé avocat des Kabyles algériens?
    L’histoire de la République Bled Siba
    Pour l’historien Henri Terrasse, la politique du Makhzen a toujours été commandée par l’existence d’un bled El Makhzen et d’un bled Siba. Cela nous conduit à dire que le Maroc comprend deux parties, le Bled El Makhzen et le Bled Siba. La politique coloniale française durant le protectorat a renforcé l’idée de bled Siba et bled Makhzen à partir des oppositions qui existent entre les intérêts du centre et de la marge, référence, Burke II 2013 : 39.
    Situé entre la mer Méditerranée et la rivière Ouergha, le Rif ou bled Siba est délimité à l’est par la rivière Moulouya et à l’ouest par l’océan Atlantique. Dans cet environnement rude, les villes sont rares et les villages sont organisés selon un système tribal qui sert de socle à la vie politique, sociale et économique des Berbères rifains. En dépit du relief tourmenté de la région, les Rifains possèdent une très forte identité dont témoigne leur réticence à toute domination étrangère. Ils refusent catégoriquement la soumission au pouvoir central. Le Rif a depuis longtemps, des problèmes avec l’autorité du pouvoir central du Makhzen. C’est ainsi qu’entre 1921 et 1926, une république rifaine a été proclamée par Mohamed Ben Abdelkrim El Khattabi.
    Qui est Mohammed ben Abd el-Krim al Khatabi ?
    El Khatabi est considéré comme le héros de cette région. Né dans la tribu Beni Ouriaghel en 1882, Mohammed ben Abd el-Krimal Khabati étudie la théologie et les lois coraniques à Fez. Avec le consentement du gouvernement espagnol, il devient Cadi à Melilla. En 1921, son père lui demande de revenir au pays (le Rif) et de lui succéder à la tête de la révolte contre les troupes espagnoles.
    Son statut sacré de Commandeur des croyants, les Français l’avaient prévu. Comme l’Emir Abdelkader en Algérie, Abd el-Krimal Khabati était un homme-charnière dans l’histoire du nationalisme maghrébin. Abdelkrim était un véritable homme d’État, réhaussé d’une grande dignité puisée aux sources de l’Islam. Il ne peut plus s’agir seulement d’interdire le Rif à l’Espagne, mais de remporter un djihad contre le sultan du Maroc, solide allié des Français qui protègent son statut sacré de Commandeur des croyants. Puisque vous ignorez l’histoire de votre Makhzen, je vais être plus clair avec vous monsieur l’ambassadeur, je vous renvoie aux paroles du Général Lyautey qui remet votre Makhzen à sa valeur réelle: «Abdelkrim est considéré ouvertement comme le seul et unique sultan du Maroc depuis Abdelaziz, vu que Moulay Hafid a vendu le pays à la France par le traité du Protectorat et que Moulay Youssef est seulement un fantoche entre mes mains». C’est honteux mais c’est l’amère vérité. Qui dit mieux ? Hilale s’est autoproclamé avocat des Kabyles algériens.
    Bled Siba entre 1959 et 1958

    Je vous rappelle, qu’en 1958 et 1959, deux ans après l’indépendance du Maroc (1956), les Rifains continuaient à avoir des revendications, en particulier concernant la reconnaissance de leur spécificité culturelle. Ils sont en effet des Amazighs (Berbères), ils ont une culture et une langue qui leur sont propres. En 1959, la riposte du Makhzen a été très dure. Selon certains historiens comme Mohamed Ameziane, on parle de milliers de morts, de centaines de femmes violées et beaucoup d’exilés. Je vous informe qu’une partie de la famille de Mohamed Ameziane vit toujours en Algérie à la suite de ces évènements. Qui dit mieux à monsieur Omar Hilale qui s’est autoproclamé avocat des Kabyles algériens.
    Selon le chercheur marocain Hsain Ilahiane, les révoltes de 1958-1959 ont été aggravées par la fermeture de la frontière algérienne à la migration rifaine. La fermeture de nos frontières conduit au chômage et vous causent des problèmes. Je vous demande de tourner sept fois votre langue dans votre bouche avant de parler d’un pays qui vous nourrit. Qui dit mieux à monsieur Omar Hilale qui s’est autoproclamé avocat des Kabyles algériens.
    L’image actuelle de Bled El Makhzen

    Monsieur Omar Hilale, je sais que vous n’avez pas lu le rapport du journaliste français Pierre Puchot «Au Maroc, on te traite comme un insecte». Dans ce rapport, j’ai vu que votre éducation et votre système de santé sont très en retard.
    Je vous invite à lire les dires de madame Samira T, une enseignante et les constatations d’Othmane Boumaalif, médecin généraliste.
    Samira T., 30 ans, enseignante dans un collège public nous déclare «Le Maroc, c’est simple : il n’y a rien à faire, la galère est partout, même pour retirer le moindre papier administratif… On te traite comme un insecte». Elle continue «j’ai enseigné quatre ans dans un environnement difficile, à Fnideq, une ville très conservatrice d’où sont partis beaucoup d’hommes ayant rejoint l’Organisation de l’État islamique. Mors de ma mutation à Tanger, je pensais que mon quotidien allait s’améliorer. Mais non, au contraire, ça a été le vrai début de l’enfer». Dix-huit mois d’une dépression traitée aux anxiolytiques, dont la jeune femme se remet à peine. Pourtant, le quartier n’est pas spécialement pauvre. Les élèves ont presque tous des tablettes. Mais les conditions d’enseignement sont insupportables. «J’ai grandi dans un village perdu, dépourvu de tout. Mais au moins, avec l’école publique, on avait une chance de s’en sortir. Aujourd’hui, le niveau est très bas».
    «Au Maroc, c’est simple : c’est tout un système de santé qu’il faudrait créer», remarque Othmane Boumaalif. À 38 ans, ce médecin généraliste appartient à la génération des militants du mouvement dit «du 20-Février», apparu en 2011 dans le sillage des révoltes populaires en Tunisie et en Égypte. Il préside Anfass (« souffles » en arabe) démocratique, une association qui produit régulièrement des notes sur l’économie et la société. «Le problème est structurel, nous n’avons pas de première ligne, le médecin traitant qui ausculte puis oriente le patient selon sa pathologie. Au Maroc, le patient va soit chez le médecin, s’il obtient un rendez-vous avant six mois, soit au centre hospitalier universitaire [CHU], quand il existe, soit au dispensaire… C’est le chaos total, et les gens ont souvent recours à l’automédication». Que pense-t-il des établissements flambant neufs construits en partenariat avec les États du Golfe? «On bâtit une poignée d’hôpitaux-vitrines, très bien équipés. Mais personne ne peut se les payer ! À côté, le Maroc demeure un gigantesque désert médical, d’autant que beaucoup de nos praticiens émigrent en Allemagne, où leur diplôme est désormais reconnu». Qui dit mieux? Hilale s’est autoproclamé avocat des Kabyles algériens.
    Le Podcast Journal, 28/07/2021
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  • Espagne-Rif: Le centenaire de la catastrophe

    Les troupes espagnoles ont succombé à une collection hétéroclite de groupes tribaux rifains sans formation ni structure militaire de type occidental. Le nombre officiel de victimes s’élève à 12 214.

    JOSÉ MARÍA MENA

    La seconde moitié du mois de juillet 1921 est la défaite la plus catastrophique de l’histoire des armées espagnoles. Nous fêtons aujourd’hui le 100e anniversaire de la catastrophe du Rif, dans le nord du Maroc. Les troupes espagnoles ont succombé à une collection hétéroclite de groupes tribaux du Rif, sans formation ni structure militaire de type occidental. Le nombre officiel de victimes, y compris les morts et les disparus entre le 17 juillet et le 10 août, s’élève à 12 214. D’autres sources non officielles avancent le chiffre de 20 000 morts. À l’occasion du centenaire de la catastrophe, il semble juste de consacrer quelques lignes à la mémoire des victimes de cette aventure colonialiste sanglante, irresponsable et inutile.

    Lorsque les puissances coloniales européennes, lors de la conférence d’Algésiras de 1906, se sont réparti les zones d’influence en Afrique du Nord, l’Espagne s’est vue confier le protectorat de la partie la plus montagneuse et la plus pauvre du nord du Maroc. Cambó a déclaré au Congrès en 1922 que l’Espagne était au Maroc, non pas parce que nous le voulions, mais parce que nous y étions forcés. C’est ce que les grandes puissances nous ont accordé après que la perte de Cuba et des Philippines nous ait jeté le discrédit.

    Mais en plus de l’objectif discutable du prestige militaire, il y avait un autre objectif dans l’aventure marocaine : l’objectif économique. La Compañía Española de Minas del Rif S.A. y était exploitée. L’élite espagnole y avait d’importants intérêts économiques, comme le comte de Romanones, le marquis de Comillas, la famille Güell et le roi Alfonso XIII.

    Les relations entre les Rifains et les Espagnols n’ont jamais été sincèrement cordiales. Ils ont alterné des périodes de méfiance et d’hostilité, parfois graves, comme en 1909, lorsque 250 soldats sont morts dans le ravin de Barranco del Lobo, ce qui a déclenché les grandes manifestations à Barcelone qui ont culminé avec la Semana Trágica (Semaine tragique).

    Les relations se sont poursuivies de cette manière jusqu’en 1920. À cette époque, le commandant général de Melilla était le général Fernández Silvestre, un homme aguerri, incontrôlable et ami du roi. Sans tenir compte des ordres de prudence et de retenue des supérieurs, il envahit le Rif avec une rapidité et un succès surprenants. Alphonse XIII lui a envoyé un célèbre télégramme qui n’a pas été retrouvé, mais dont l’authenticité a été attestée par Jaime de Capmany en ABC. Ça disait « olé tus cojones ». Une façon impopulaire, économiquement insupportable, nauséabonde, de promouvoir la poursuite de l’aventure colonialiste, avec des pieds d’argile. Silvestre a semé le territoire conquis de blockhaus, des forts précaires défendus par de petites garnisons. Il y avait plus d’une centaine de positions isolées couvrant 5 000 kilomètres carrés, avec de très sérieuses difficultés d’approvisionnement en eau, en munitions et en nourriture. Les troupes espagnoles étaient mal équipées, armées et nourries, en raison de l’indolence, de l’ineptie et de la corruption de nombreux commandants et dirigeants. Abd el Krim, chef des Kabyles rifains, a su combiner la ferveur atavique du djihad avec l’ardeur populaire de la guerre de libération. Il attaque sur toutes les lignes, qui succombent en 72 heures, encerclant Silvestre à Annual. Lorsque le général ordonna la retraite, celle-ci se transforma en une fuite désordonnée de panique, de démoralisation et d’indiscipline, les Rifains massacrant des hommes en fuite, désarmés, épuisés, affamés et assoiffés. Silvestre est mort à l’année, et son corps n’a jamais été retrouvé. 300 généraux, chefs et officiers ont été faits prisonniers et Abd el Krim a exigé quatre millions de pesetas pour eux, qui ont finalement été payés par l’industriel Horacio Echevarrieta. Alfonso XIII, dans un geste d’inhumanité qui le qualifie, se limite à dire « quelle chair de poule j’ai sur le visage ».

    L’enquête sur les responsabilités de la catastrophe est confiée au général Picasso, grand-oncle du génial peintre. On lui refuse les documents militaires et on lui interdit d’enquêter auprès des plus hautes autorités. Cependant, Picasso a produit un dossier rigoureux qui va au-delà de ces limites. En outre, un débat parlementaire a été ouvert sur la responsabilité, et l’on savait que l’opposition ne pardonnerait pas l’implication du monarque. Le coup d’État de Primo de Rivera, capitaine général de Catalogne, avec le soutien d’Alfonso XIII, suspend le débat sine die. Le Conseil suprême de la guerre et de la marine poursuit l’instruction du dossier pour déterminer les responsabilités militaires, sur la base du dossier Picasso, et ne condamne le général Berenguer, le supérieur de Silvestre, qu’à la peine légère de la révocation du service, que le roi amnistie immédiatement. Puis vint la République, le roi partit, et finalement la Cour suprême dut rejeter l’affaire pour cause de chose jugée par la justice militaire. Juridiquement, c’était peut-être inévitable, mais l’impunité éhontée de ceux qui ont causé tant de morts et de souffrances inutiles, qui méritent aujourd’hui notre respect et notre souvenir, est scandaleuse.

    José María Mena a été procureur en chef du Tribunal supérieur de justice de Catalogne.

    El Pais, 15/07/2021

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