Étiquette : armée

  • Ukraine : remaniement imminent de la hiérarchie militaire

    Etiquettes : Ukraine, remaniement, hiérarchie militaire, armée, Valerii Zaluzhnyi, Russie,

    Le président ukrainien Volodymyr Zelenskyy a déclaré qu’il envisageait de limoger le plus haut responsable militaire du pays dans le cadre d’une réorganisation plus large du leadership, une possibilité qui a choqué la nation en guerre pour mettre fin à l’invasion de la Russie et inquiété aussi les alliés occidentaux de l’Ukraine.

    Zelenskyy a confirmé dans une interview avec la chaîne de télévision italienne RAI TV diffusée tard dimanche qu’il envisageait de limoger le général Valerii Zaluzhnyi, le commandant en chef populaire des forces armées ukrainiennes. Il a déclaré qu’il envisageait cette mesure pour s’assurer que le pays soit dirigé par des personnes « convaincues de la victoire » contre la Russie.

    « Une réinitialisation, un nouveau départ est nécessaire », a déclaré Zelenskyy. L’examen « ne concerne pas une seule personne mais la direction du leadership du pays ».

    « Je réfléchis à ce remplacement, mais on ne peut pas dire que nous avons remplacé une seule personne ici », a déclaré Zelenskyy. « Quand nous en parlons, je veux dire un remplacement d’une série de dirigeants d’État, pas seulement dans un seul secteur comme le militaire. Si nous voulons gagner, nous devons tous pousser dans la même direction, convaincus de la victoire. Nous ne pouvons pas être découragés, laisser tomber nos armes. Nous devons avoir la bonne énergie positive. »

    Les commentaires de Zelenskyy constituent sa première reconnaissance de la possible destitution de Zaluzhnyi, une perspective qui a déjà provoqué une agitation en Ukraine et réjoui le Kremlin à l’approche du deuxième anniversaire de la guerre.

    Zaluzhnyi est largement respecté parmi les membres des forces armées ukrainiennes et est considéré comme un héros national. On lui attribue d’avoir retardé l’invasion à grande échelle de la Russie au début de la guerre et d’avoir repoussé habilement les troupes de Moscou.

    Le maire de Kyiv, Vitalii Klitschko, a critiqué la possibilité du limogeage de Zaluzhnyi, affirmant que c’était grâce au leadership du général que « beaucoup d’Ukrainiens font vraiment confiance aux forces armées ».

    « Aujourd’hui est un moment où la politique pourrait l’emporter sur la raison et les intérêts du pays », a déclaré Klitschko sur les réseaux sociaux. Le maire de la capitale ukrainienne a été un critique vocal de Zelenskyy. La présidence a, à son tour, accusé le bureau de Klitschko d’inefficacité.

    On ne sait pas qui pourrait remplacer Zaluzhnyi et si son successeur bénéficierait du même niveau de respect de la part des troupes ukrainiennes et des dirigeants étrangers de la défense. Son limogeage pourrait risquer de faire baisser le moral à un moment critique de la guerre.

    Selon des informations des médias ukrainiens et occidentaux, Zelenskyy aurait demandé à Zaluzhnyi de démissionner la semaine dernière, mais le général aurait refusé. Zaluzhnyi n’a pas commenté publiquement ces informations.

    Les tensions entre lui et le président ont augmenté depuis une contre-offensive ukrainienne très attendue, lancée en juin avec l’aide d’une variété d’armes occidentales, qui n’a pas produit de gains territoriaux majeurs dans les zones occupées par la Russie, décevant les alliés.

    L’Ukraine fait maintenant face à des pénuries de munitions et de personnel alors que la Russie est à l’offensive, lançant des attaques incessantes. Quatre personnes ont été tuées et au moins une a été blessée dans une frappe lundi après-midi sur la ville de Kherson, dans le sud de l’Ukraine, a déclaré le chef de l’administration militaire locale.

    La nécessité d’une large mobilisation pour renforcer le nombre de troupes ukrainiennes aurait été l’un des points de désaccord entre Zelenskyy et Zaluzhnyi.

    Zelenskyy a déclaré à la fin de l’année dernière qu’il avait refusé la demande de l’armée de mobiliser jusqu’à 500 000 personnes, exigeant plus de détails sur l’organisation et le financement de la mobilisation.

    Une rupture entre Zaluzhnyi et Zelenskyy s’est manifestée publiquement à l’automne lorsque le général a admis dans une interview avec The Economist que les combats avec la Russie étaient dans l’impasse. Le président a fortement nié que ce soit le cas.

    Pour sa part, Zaluzhnyi a publié deux essais exposant sa vision de la manière dont l’Ukraine peut remporter la guerre. Dans ses écrits, il a souligné l’importance pour l’Ukraine d’obtenir la supériorité aérienne, d’améliorer son efficacité face à l’artillerie ennemie, de constituer des réserves et d’accroître les capacités de guerre électronique.

    L’Ukraine a désespérément besoin d’une assistance militaire occidentale supplémentaire alors que les forces russes pressent dans de nombreuses directions du front de 1 500 kilomètres (900 milles), mais un paquet d’aide est bloqué au Congrès américain. Le limogeage de Zaluzhnyi pourrait semer l’incertitude parmi les alliés occidentaux.

    La Russie s’est réjouie de cette perspective, le porte-parole du Kremlin, Dmitry Peskov, affirmant que les discussions sur le licenciement de Zaluzhnyi exposaient des dissensions au sein du leadership ukrainien.

    Le journal Ukrainska Pravda a rapporté lundi que Zelenskyy envisageait également de relever de ses fonctions le chef d’état-major, Serhii Shaptala.

    Zaluzhnyi a félicité Shaptala pour son anniversaire lundi et a posté une photo d’eux ensemble sur Facebook.

    « Ce sera encore très difficile pour nous, mais nous n’aurons certainement jamais honte », a écrit Zaluzhnyi.

    AP

    #Ukraine #Armée #Remaniement #Russie #Zelensky

  • Burkina Faso : l’armée neutralise des terroristes en fuite, une importante quantité d’explosifs saisie (actualisée)

    Topics : Burkina Faso, armée, terroristes, djihadistes, Sahel, Mali,

    L’armée burkinabè a fait feu sur des terroristes en fuite vers la frontière malienne, décimant les assaillants et leur importante logistique.

    Des terroristes, face à la pression des FDS et des VDP, ont décidé de se replier des frontières du Burkina.

    C’est le cas d’un groupe sur plusieurs motos et de pickups dans la région du Sahel (zone de Kenou), en partance en territoire malien.

    Fort heureusement, les vecteurs aériens de l’armée burkinabè a repéré les fuyards avant de les décimer dans des frappes précises, avec leurs matériels.

    Notons aussi que l’opération a permis de saisir une grande quantité d’explosifs.

    Selon nos sources, de grandes opérations se poursuivent dans plusieurs localités du Burkina.

    Les égarés qui ont rejoint les groupes armés terroristes, ont le choix de déposer immédiatement les armes ou de périr.

    Agence d’information du Burkina

    #BurkinaFaso #Mali #Terrorisme #Djihadistes

  • Soudan: Les évacuations de diplomates devraient commencer -armée-

    Topics : Soudan, diplomates, armée, évacuations, Khartoum, Abdel Fattah Al Bourhane,

    L’armée soudanaise a déclaré qu’elle coordonnait les efforts pour évacuer les citoyens et diplomates américains, britanniques, chinois et français du Soudan par avion militaire, alors que les combats sanglants qui ont englouti la nation africaine entamaient leur deuxième semaine.

    L’armée a déclaré que son chef, le général Abdel Fattah Burhan, avait parlé aux dirigeants de plusieurs pays qui ont demandé l’évacuation en toute sécurité de leurs citoyens et diplomates du Soudan.

    Cette perspective a contrarié les responsables car la plupart des grands aéroports sont devenus des champs de bataille et les déplacements hors de la capitale, Khartoum, se sont révélés extrêmement dangereux.

    Le général Burhan « a accepté de fournir l’assistance nécessaire pour sécuriser ces évacuations pour divers pays », a déclaré l’armée.

    Des questions ont tourbillonné sur la manière dont les sauvetages massifs de citoyens étrangers se dérouleraient, le principal aéroport international du Soudan étant fermé et des millions de personnes s’abritant à l’intérieur.

    Alors que les combats entre l’armée soudanaise dirigée par le général Burhan et un puissant groupe paramilitaire rival font rage à Khartoum et dans les environs, y compris dans les zones résidentielles, les pays étrangers ont du mal à rapatrier leurs citoyens, dont certains manquent de nourriture et de fournitures de base.

    Le Pentagone a déclaré plus tôt cette semaine qu’il déplaçait des troupes et du matériel supplémentaires vers une base navale dans la petite nation du golfe d’Aden à Djibouti pour préparer l’évacuation du personnel de l’ambassade américaine, mais la Maison Blanche a déclaré vendredi qu’elle n’avait aucun plan pour une évacuation coordonnée par le gouvernement d’environ 16 000 citoyens américains piégés au Soudan.

    Alors même que les parties belligérantes ont déclaré vendredi qu’elles avaient convenu d’un cessez-le-feu pour la fête musulmane de trois jours de l’Aïd al-Fitr, des explosions et des coups de feu ont retenti samedi à Khartoum. Deux tentatives de cessez-le-feu plus tôt cette semaine se sont également rapidement effondrées.

    « Les gens doivent se rendre compte que la guerre est continue depuis le premier jour. Cela ne s’est pas arrêté un seul instant », a déclaré Atiya Abdalla Atiya, secrétaire du Syndicat des médecins soudanais, qui surveille les victimes.

    Les affrontements ont fait jusqu’à présent plus de 400 morts, selon l’Organisation mondiale de la santé.

    L’aéroport international près du centre de la capitale a subi de violents bombardements alors que le groupe paramilitaire – connu sous le nom de Forces de soutien rapide, ou RSF – a tenté de prendre le contrôle de l’enceinte.

    Dans un effort apparent pour évincer les combattants de la RSF, l’armée soudanaise a pilonné l’aéroport avec des frappes aériennes, détruisant au moins une piste et laissant des avions détruits éparpillés sur le tarmac.

    L’ampleur des dégâts sur l’aérodrome reste incertaine.

    Le général Burhan a déclaré que certains diplomates saoudiens avaient déjà été emmenés hors de Port-Soudan, le principal port maritime du pays sur la mer Rouge, et ramenés par avion dans le royaume. Il a déclaré que les diplomates jordaniens seraient bientôt évacués de la même manière.

    Samedi, l’Arabie saoudite et la Jordanie ont toutes deux annoncé qu’elles avaient commencé à organiser le rapatriement de leurs citoyens bloqués au Soudan. Les responsables n’ont pas précisé comment les plans se dérouleraient.

    La Jordanie a déclaré qu’elle « tenait compte des conditions de sécurité sur le terrain » et coordonnait ses efforts avec l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

  • Maroc: Mohammed Berrid nommé inspecteur général de l’armée

    Topics : Maroc, Mohammed VI, Mohammed Berrid, Belkhir El Farouk, FAR, armée, Sahara Occidental,

    Le Roi Mohammed VI a décerné au Lieutenant El Farouk le Grand Cordon de l’Ordre du Trône en reconnaissance de sa carrière remarquable.

    Rabat – Le Roi Mohammed VI a nommé le Lieutenant Général Mohammed Berrid comme nouvel Inspecteur Général des Forces Armées Royales Marocaines (FAR) et Commandant de la Zone Sud. Le général de corps d’armée Berrid remplacera l’inspecteur général Belkhir El Farouk au sommet de la hiérarchie militaire marocaine, seulement devancé par le monarque qui en est le commandant en chef.

    A cette occasion, le Roi Mohammed VI a décoré le Lieutenant El Farouk du Grand Cordon de l’ Ordre du Trône , en reconnaissance de sa carrière et de ses services distingués dans la défense de la nation et du trône, selon un communiqué du ministère des Palais royaux, Honneurs et Décorations.

    El Farouk était auparavant général de l’armée en charge du rôle de l’armée marocaine dans la région du Sahara occidental.

    Le monarque a rendu hommage aux Forces armées royales du pays à plusieurs reprises, reconnaissant leur contribution à la préservation de la paix et de la sécurité dans le pays.

    A l’occasion du 66e anniversaire de la création des FAR, qui a eu lieu en mai 2022, le Roi Mohammed VI a souligné la grande contribution des troupes au maintien de la paix et à la sauvegarde de l’intégrité territoriale du pays.

    « Notre profonde conviction dans l’importance des nobles missions que vous accomplissez sur le plan sécuritaire et militaire, et les expériences et réalisations que vous avez accumulées dans le domaine de la gestion des risques et des crises nous font prendre conscience de la justesse de l’approche que nous avons adopté pour le développement de nos Forces armées royales en termes de structure et d’organisation », a déclaré le monarque dans son discours.

    #Maroc #Armée #Sahara_Occidental #FAR

  • Qu’est-ce qui se cache derrière la crise du Soudan?

    Tags : Soudan, forces paramilitaires, FSR, armée, Omar Bachir,

    Par Aidan Lewis et Khalid Abdelaziz


    KHARTOUM, 17 avril (Reuters) – Des combats ont éclaté dans la capitale du Soudan, Khartoum, et sur d’autres sites à travers le pays, alors que de puissantes factions militaires rivales s’affrontent pour en prendre le contrôle, augmentant le risque d’une guerre civile à l’échelle nationale.

    QU’EST-CE QUI A DÉCLENCHÉ LA VIOLENCE ?

    La tension monte depuis des mois entre l’armée soudanaise et les forces paramilitaires de soutien rapide (RSF), qui ont renversé ensemble le gouvernement civil lors d’un coup d’État en octobre 2021.

    Ces frictions ont été exacerbées par un plan soutenu par la communauté internationale visant à lancer une nouvelle transition avec des parties civiles. Un accord final devait être signé au début du mois d’avril, à l’occasion du quatrième anniversaire du renversement de l’autocrate Omar al-Bashir, au pouvoir depuis longtemps, lors d’un soulèvement populaire.

    Le plan prévoyait que l’armée et les FSR cèdent le pouvoir, et deux points se sont révélés particulièrement controversés : le premier concernait le calendrier d’intégration des FSR dans les forces armées régulières, et le second la date à laquelle l’armée serait officiellement placée sous contrôle civil.

    Lorsque les combats ont éclaté le 15 avril, les deux parties se sont accusées mutuellement d’avoir provoqué la violence. L’armée a accusé le FSR de s’être mobilisé illégalement les jours précédents et le FSR, qui s’est installé sur des sites stratégiques de Khartoum, a déclaré que l’armée avait tenté de s’emparer des pleins pouvoirs dans le cadre d’un complot avec les loyalistes de M. Bashir.

    QUI SONT LES PRINCIPAUX ACTEURS SUR LE TERRAIN ?

    Les protagonistes de la lutte pour le pouvoir sont le général Abdel Fattah al-Burhan, chef de l’armée et dirigeant du conseil au pouvoir au Soudan depuis 2019, et son adjoint au sein du conseil, le général Mohamed Hamdan Dagalo, dirigeant du FSR, plus connu sous le nom de Hemedti.

    Au fur et à mesure de l’élaboration du plan pour une nouvelle transition, Hemedti s’est rapproché des partis civils d’une coalition, les Forces pour la liberté et le changement (FFC), qui ont partagé le pouvoir avec les militaires entre le renversement de Bashir et le coup d’État de 2021.

    Les diplomates et les analystes ont déclaré que cela faisait partie d’une stratégie de Hemedti visant à se transformer en homme d’État. Le FFC et Hemedti, qui s’est enrichi grâce à l’exploitation de mines d’or et à d’autres entreprises, ont tous deux souligné la nécessité d’écarter les loyalistes et les vétérans de M. Bashir, de tendance islamiste, qui ont repris pied après le coup d’État et qui sont profondément enracinés dans l’armée.

    De même que certaines factions rebelles pro-armée qui ont bénéficié d’un accord de paix en 2020, les loyalistes de M. Bashir se sont opposés à l’accord pour une nouvelle transition.

    QUELS SONT LES ENJEUX ?

    Le soulèvement populaire a fait naître l’espoir que le Soudan et ses 46 millions d’habitants pourraient sortir de décennies d’autocratie, de conflits internes et d’isolement économique sous le régime de M. Béchir.

    Un conflit pourrait non seulement anéantir ces espoirs, mais aussi déstabiliser une région instable bordant le Sahel, la mer Rouge et la Corne de l’Afrique.

    Il pourrait également jouer un rôle dans la compétition pour l’influence dans la région entre la Russie et les États-Unis, et entre les puissances régionales qui ont courtisé différents acteurs au Soudan.

    QUEL EST LE RÔLE DES ACTEURS INTERNATIONAUX ?

    Les puissances occidentales, dont les États-Unis, s’étaient engagées en faveur d’une transition vers des élections démocratiques après le renversement de M. Bashir. Elles ont suspendu leur soutien financier après le coup d’État, puis ont soutenu le projet d’une nouvelle transition et d’un gouvernement civil.

    L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, puissances riches en énergie, ont également cherché à influencer les événements au Soudan, voyant dans la transition du régime de M. Bashir un moyen de faire reculer l’influence des islamistes et de renforcer la stabilité dans la région.

    Les États du Golfe ont cherché à investir dans des secteurs tels que l’agriculture, où le Soudan possède un vaste potentiel, et les ports sur la côte soudanaise de la mer Rouge.

    La Russie cherche à construire une base navale sur la mer Rouge, tandis que plusieurs entreprises des Émirats arabes unis ont signé des accords d’investissement : un consortium des Émirats arabes unis a conclu un accord préliminaire pour la construction et l’exploitation d’un port et une autre compagnie aérienne basée aux Émirats arabes unis s’est entendue avec un partenaire soudanais pour créer un nouveau transporteur à bas prix basé à Khartoum.

    Burhan et Hemedti ont tous deux noué des liens étroits avec l’Arabie saoudite après avoir envoyé des troupes participer à l’opération menée par l’Arabie saoudite au Yémen. Hemedti a noué des relations avec d’autres puissances étrangères, notamment les Émirats arabes unis et la Russie.

    L’Égypte, elle-même dirigée par un militaire, le président Abdel Fattah al-Sisi, qui a renversé son prédécesseur islamiste, entretient des liens étroits avec Burhan et l’armée, et a récemment encouragé une voie parallèle de négociations politiques par l’intermédiaire de partis ayant des liens plus étroits avec l’armée et l’ancien gouvernement de M. Bashir.

    QUELS SONT LES SCÉNARIOS ?

    Les parties internationales ont appelé à un cessez-le-feu et à un retour au dialogue, mais les factions belligérantes n’ont donné que peu de signes de compromis.

    L’armée a qualifié la FSR de force rebelle et a exigé sa dissolution, tandis que Hemedti a qualifié Burhan de criminel et l’a accusé d’avoir semé la destruction dans le pays.

    Bien que l’armée soudanaise dispose de ressources supérieures, notamment en matière de puissance aérienne, la FSR s’est développé pour devenir une force estimée à 100 000 hommes qui s’est déployée à Khartoum et dans les villes voisines, ainsi que dans d’autres régions, ce qui fait planer le spectre d’un conflit prolongé, en plus d’une crise économique de longue durée et des besoins humanitaires existants à grande échelle.

    La FSR peut également compter sur le soutien et les liens tribaux de la région occidentale du Darfour, où elle est issue des milices qui ont combattu aux côtés des forces gouvernementales pour écraser les rebelles lors d’une guerre brutale qui s’est intensifiée après 2003.

    #Soudan #FSR #Armée #Omar_Béchir

  • Crise au Soudan : l’Algérie appelle au dialogue

    Topics : Algérie, Soudan, armée, paramilitaires,

    L’Algérie appelle les parties soudanaises à cesser les combats et à faire prévaloir le dialogue.

    L’Algérie qui assure actuellement la présidence du Conseil de la Ligue arabe au niveau du sommet, a appelé toutes les parties soudanaises à cesser les combats et à faire prévaloir le dialogue afin de surmonter les différends aussi complexes soient-ils et d’œuvrer à privilégier l’intérêt suprême de la patrie, indique, samedi, un communiqué de la présidence de la République.

    « L’Algérie, en sa qualité d’actuel président du Conseil de la Ligue des Etats arabes au niveau du Sommet, suit avec une grande inquiétude les développements de la situation dans la République du Soudan, pays frère, suite aux affrontements graves avec des armes lourdes survenus dans la capitale, Khartoum, entre les forces de l’armée et les Forces de soutien rapide (FSR), et aux pertes humaines et matérielles qui en résultent », lit-on dans le communiqué.

    Considérant « les relations de fraternité et les liens historiques qui unissent les deux pays et peuples frères », l’Algérie appelle toutes les parties soudanaises à « cesser les combats et à faire prévaloir le dialogue pour surmonter les différends aussi complexes soient-ils », précise-t-on de même source.

    L’Algérie appelle également tous les frères à « privilégier l’intérêt suprême de la patrie, au moment où la République du Soudan a plus que jamais besoin de la conjugaison des efforts de ses enfants pour mettre fin à la crise actuelle et réaliser les aspirations légitimes du peuple soudanais frère au recouvrement de sa sécurité, sa stabilité, et à l’édification d’un Etat démocratique et moderne », conclut le communiqué.

    #Algérie #Soudan #Armée #Paramilitaires #FSR

  • Algérie : Le ‘’tout militaire’’, une stratégie de lutte contre le terrorisme à questionner

    Tags : Algérie, armée, terrorisme,

    Malgré mes soixante-dix ans que je fêterais le 24 novembre prochain si Dieu le veut comme on dit, j’ai engagé comme qui dirait un ultime combat, celui d’œuvrer du mieux que je pourrais à la naissance et la construction du « Mouvement Deux Millions de signatures en faveur du Dialogue » en perspective de la recherche d’une alternative crédible de sortie de la crise sécuritaire, de reconstruction de notre vivre-ensemble, in fine de la Refondation de l’Etat.

    J’ai été conforté encore plus dans cet engagement par la lecture de l’Ouvrage du Colonel Sékou DOUMBIA « TERRORISME AU SAHEL. Le dialogue avec les jihadistes comme paradigme de sortie durable de crise au Mali » qui vient de paraitre aux éditions de l’Harmatan. Notre élite intellectuelle, politique et militaire devrait en prendre le temps de la lecture, de la réflexion et de l’action en faveur du Dialogue.

    Le « Tout Militaire » c’est comme l’explicite le Colonel Sékou DOUMBIA dans son ouvrage : « L’option militaire ou guerrière (qui) procède du triomphe du prima répressif dans la lutte contre l’insécurité. Elle est liée à l’histoire de la construction de l’État et de la résolution des conflits. Cette approche est marquée par la figure de la résolution hobbesienne des conflits qui, renvoie à la paix par la victoire et/ou la domination d’une des parties au conflit. Elle mentionne que « la façon la plus simple et la plus radicale de passer de la guerre à la paix, c’est la victoire ». Cette solution militaire des conflits instaure une paix imposée par l’une des parties. Elle est synonyme de soumission ou d’élimination de l’adversaire ».

    En cela l’histoire a montré qu’une victoire UNIQUEMENT militaire, ne serait que temporaire, car n’aurait pas permis de traiter les problèmes de fond qui ont favorisé l’incursion Djihadiste et alimentent la crise sécuritaire que traverse le pays.

    Rappelons ainsi que les groupes armées Djihadistes ont été défaits au Mali en 2013 grâce à l’opération Serval ; la suite on la connait.

    Je reviendrais très prochainement sur les fondements de mon approche de Dialogue, qui considère que, au regard des problèmes de fond sous-jacents à la crise sécuritaire, seul le génie politique de nos communautés villageoises en matière de gestion et de résolution des conflits est à même de relever le défi du dialogue pour une paix fondatrice.

    C’est sans doute dans une perspective du « Tout Militaire » que l’initiative 50.000 VDP est lancée sous l’impulsion des nouvelles autorités de la Transition.

    Nous avons à présent par devers nous, l’expérience récente des VDP et avant elle, celle des Koglweogo et celle plus ancienne encore des Dozos; on pourrait même ajouter celle des CDR; il ne serait pas intellectuellement, politiquement et militairement honnête de ne pas les scruter profondément et d’en tirer les enseignements les plus utiles au risque de ne pas atteindre les résultats escomptés et ainsi d’alimenter et d’élargir de manière soutenue, les violences intercommunautaires et au sein des communautés villageoises ainsi que la miliciarisation de la vie politique-pensons à l’appel de certains partis politiques à leurs militants à s’enrôler comme VDP et à d’autres encore qui pensent par ce biais organiser la « guerre révolutionnaire » pour la conquête du pouvoir d’Etat.

    Comme déjà indiqué dans ma dernière tribune relative à la récurrence des coups d’Etat dans notre pays, le « Mouvement deux Millions de signatures en faveur du Dialogue », est engagé dans la préparation d’une campagne de collecte de signatures à l’échelle nationale et tout particulièrement auprès des communautés villageoises et des PDI au travers d’une Pétition qui sera lancée bientôt.

    Cette campagne dont le lancement était programmé le 30 novembre 2022, sera différée d’un trimestre pour que tous ensemble, nous fassions notre expérience des nouvelles initiatives des nouvelles autorités de la Transition afin de mieux construire le paradigme du Dialogue et nous impliquer activement dans la construction d’une initiative populaire en faveur du Dialogue pour une sortie crédible de la crise sécuritaire au Sahel en en donnant l’élan au Burkina.

    Dans cette perspective, le « Mouvement deux Millions de signatures en faveur du Dialogue », poursuit la construction de la stratégie opérationnelle de la campagne pour laquelle un BLOG pour la co-construction de cette initiative à venir sera lancé au plus tard le 31 décembre 2022.

    Alors tous ensemble nous devons et pouvons engager et construire cette voie pacifique et durable de sortie de notre pays de la crise sécuritaire et de Refondation de l’Etat.

    Source

    #Algérie #Terrorisme #

  • Entre l’Algérie et le Maroc : un face-à-face militaire ?

    Entre l’Algérie et le Maroc : un face-à-face militaire ?

    Tags : Maroc, Algérie, Sahara Occidental, frontières, armée,

    Entre les deux géants du Maghreb, les lourds contentieux provenant de la colonisation et de la décolonisation ont rapidement pris une tournure militaire. Aujourd’hui, dos à dos, Alger et Rabat durcissent leur politique de défense : le Maroc crée une nouvelle zone militaire, la zone « est », à sa frontière avec l’Algérie, tandis que les nouveaux accords pour l’acquisition d’équipement militaire ne cessent de renforcer les arsenaux respectifs.

    La question des frontières est l’élément décisif qui va marquer soixante ans d’opposition marqués par des accès de violence directe ou par proxy (le Front Polisario). Elle influence profondément l’élaboration des politiques de défense des deux pays. La France coloniale porte une grande responsabilité dans la genèse de ce différend. Le contentieux des frontières fut le marqueur indépassable de la querelle. Il trouve ses racines dans le découpage desdites frontières par la France, à chaque fois au bénéfice de l’Algérie (alors trois départements français (1). Par ailleurs, le partage du Maroc en zones d’influence hispano-françaises, à la suite de la conférence d’Algésiras du 7 avril 1906 et du traité de Fès du 30 mars 1912, va contraindre le pouvoir chérifien à récupérer son territoire morceau par morceau (« en kit » comme dira Hassan II un jour (2) : le nord espagnol, la zone franche de Tanger, Ifni et le cap Juby et enfin à exiger la restitution du Sahara espagnol qu’il ne récupérera qu’en 1975, dans un coup de force face à un pouvoir franquiste épuisé. Cette restitution tardive favorisa l’émergence d’un acteur local, le Front Polisario, qui refusa l’annexion marocaine et réclama la tenue d’un référendum d’autodétermination. Le Maroc refusa et chassa le mouvement indépendantiste qui prit les armes. L’Algérie, après une hésitation initiale, prit fait et cause pour le Front Polisario et les affrontements se multiplièrent. Les deux armées se heurteront d’ailleurs, en 1976, à Amgala, dans une bataille en deux temps. Mais la prudence prévalut et, pour éviter une guerre sans merci, les deux pays ne s’affrontèrent plus que par Polisario interposé.

    Une lente structuration des politiques de défense

    Au début de la période postcoloniale, les deux États se soucient peu des conditions juridiques et politiques de l’exercice de la défense nationale. Des deux côtés, l’élément principal est l’incarnation. Les deux chefs d’État assument dans leur personne la souveraineté nationale et sont les garants de sa protection. Côté marocain, la simple appellation « forces armées royales » (FAR) de l’armée démontre le caractère propriétaire, néo-patrimonial, assumé de ce corps. En Algérie, l’Armée de libération nationale (ALN) devient l’Armée nationale populaire (ANP) mais demeure sous le contrôle exclusif du président Houari Boumédiène après sa prise de pouvoir en 1965, qui assume aussi la fonction de ministre de la Défense.

    La politique de défense algérienne : grands principes et schéma directeur

    La politique de défense algérienne, depuis l’indépendance, s’appuie sur de grands principes théoriques. Sur le plan interne, le soldat est l’héritier du moujahid de l’ALN et du fellagha de la résistance intérieure. Le maintien de la conscription, qui fit l’objet de grands débats à l’orée des années 2000, est vécu par le pouvoir comme un élément symbolique majeur, et ce, même si la professionnalisation de l’armée a été largement engagée. La terrible guerre civile algérienne (1991-2002) démontra, en ses premières années, l’incapacité des conscrits à tenir l’arrière-pays et surtout à combattre à armes égales avec les jihadistes des Groupements islamiques armés (GIA) et de l’Armée islamique du salut (AIS). Aujourd’hui, le quadrillage efficace du pays (en dehors de quelques endroits reculés) est une réalité.

    Sur le plan des frontières extérieures, l’Algérie a toujours assuré une surveillance étroite de la zone contiguë avec la Libye, toujours inquiète des sautes d’humeur du bouillant colonel Mouammar Kadhafi. Avec la Tunisie, après des années de gel, une coopération réciproque s’établit avec un droit de suite dans le cadre de la lutte contre les maquis antiterroristes. Au sud, l’APN assure le contrôle des maquis et de la guérilla jihadiste repoussée sur les franges maliennes pendant la guerre civile. À l’ouest, la défense de la frontière ouest avec le Maroc est évidemment la priorité, même si l’action militaire potentielle contre le royaume chérifien est dévolue aux forces combattantes de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), épigone étatique du Front Polisario, proclamée en 1976, et dont la population est en exil à Tindouf depuis cette date.

    Les capacités de l’Algérie à projeter ses forces avaient été entravées dès l’origine par le refus initial de ses constitutionnalistes d’autoriser les interventions extérieures (ce principe fit l’objet d’une exception pendant les guerres israélo-arabes.) Cette autocensure était liée au traumatisme initial de sa propre guerre d’indépendance et voulait éviter que le pays ne s’engageât dans des « aventures » coloniales ou impérialistes. L’Algérie ne prit pas moins part à quelques opérations des Nations Unies, mais sans commune mesure avec l’activisme du Maroc dans ce domaine. La politique de défense algérienne est fortement marquée par la guerre d’indépendance. Le renvoi perpétuel aux « martyrs » (chahid) comme mémoire et exemplarité en est l’illustration. La dernière révision de la Constitution (en 2020, après l’ère Bouteflika) donne les principes suivants : « Digne héritière de l’Armée de Libération Nationale, l’Armée Nationale Populaire assume ses missions constitutionnelles avec un engagement exemplaire ainsi qu’une disponibilité héroïque au sacrifice, […]. Le peuple algérien nourrit une fierté et une reconnaissance légitimes à l’endroit de son Armée Nationale Populaire, pour la préservation du pays contre toute menace extérieure, et pour sa contribution essentielle à la protection des citoyens, des institutions et des biens, contre le fléau du terrorisme, […]. »

    L’État veille à la professionnalisation et à la modernisation de l’ANP, de sorte qu’elle dispose des capacités requises pour la sauvegarde de l’indépendance nationale, de la défense de la souveraineté nationale, de l’unité et de l’intégrité territoriale du pays, ainsi que de la protection de son espace terrestre, aérien et maritime (3).

    La mission de l’ANP est prioritairement dédiée à la défense du pays, mais cette dernière mouture constitutionnelle n’interdit plus à cette force militaire d’intervenir au-delà de la frontière.

    Même si le texte est plus explicite sur le maintien de la paix, c’est aussi la possibilité d’un droit de suite qui est ainsi libéré.

    Algérie : un regard de plus en plus sudiste

    Au début, le jeune État algérien s’est peu préoccupé des régions sahariennes. Dès 1963, avec la guerre des sables opposant l’Algérie et le Maroc, l’ouest fut la préoccupation principale. Au fil du temps, un colonel, Mouammar  Kadhafi —  de plus en plus imprévisible  —, la nécessité de détruire les convois de jihadistes remontant les armes des vieux dépôts tchadiens, et les infiltrations dans ces zones moins défendues, conduisirent les responsables militaires à investir sur la défense du sud. Trois nouvelles régions militaires furent alors créées  : Ouargla, Tamanrasset, Illizi.

    Le renforcement de la frontière sud se poursuivit car l’effectif était notoirement insuffisant : « Seule 10 % de l’armée algérienne est positionnée dans la zone saharienne (la moitié étant positionnée à la frontière avec le Maroc) (4). » Mais ce désintérêt est en cours de correction active depuis  2012  (5). Vis-à-vis des voisins, un embryon de coopération existe : un «  comité d’état-major opérationnel conjoint » (CEMOC) avec la Mauritanie, le Mali et le Niger, mais il n’a donné que peu de résultats depuis sa création en 2010. La nouvelle stratégie algérienne a été conçue pour tenter de répondre plus efficacement à la fluidité et à la rapidité des groupes jihadistes (6).

    En résumé, la politique de défense algérienne s’accroche toujours à ses fondamentaux (esprit moujahid, défense nationale du territoire contre toutes les menaces, obsession marocaine) mais elle tente également de s’adapter à un environnement fluctuant et plus conflictuel. La guerre en Libye, pour abattre Kadhafi, a traumatisé l’exécutif et la haute hiérarchie militaire. Les attaques venues des jihadistes du Sahel aussi. Sur le plan multilatéral, l’Algérie a perdu la prééminence absolue en matière de sécurité qu’elle avait à l’Union africaine. Le Maroc est revenu dans l’organisation. La RASD est affaiblie. La chute du clan Bouteflika, la mort du puissant chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah, et la reconstitution d’un nouveau pouvoir, ont entraîné un repliement sur les fondamentaux de défense traditionnels. Parmi ceux-ci, le Sahara occidental revient en première ligne.

    Le Maroc : présent sur deux fronts ?

    Depuis le référendum constitutionnel du 7 juillet 1962, le Maroc est une monarchie constitutionnelle. Les quatre autres constitutions ne modifieront pas ce principe. Cependant, si la souveraineté revient au peuple, le monarque est le cœur à partir duquel convergent tous les pouvoirs et notamment celui de conduire les armées. Comme nous le disions, « le Roi est la figure centrale et absolue du dispositif de défense. On peut même dire, avec Abdelwahab  Maalmi, que le Roi, pris en tant qu’organe de l’État, est le “véritable producteur de sens” » (7).

    Les coups d’État de 1971-1972, dans lesquels l’armée a été impliquée à tous les niveaux, entraînent un raidissement du pouvoir et conduisent à une purge profonde puis à une centralisation accrue avec tous les pouvoirs dans les mains royales. Si le dispositif s’est en partie décentralisé, à partir de la deuxième moitié de la guerre du Sahara, pour pouvoir répondre à la mobilité de l’adversaire, le Palais exerce cependant un contrôle étroit sur la haute hiérarchie.

    Dans la dernière constitution du 1er juillet 2010, le roi demeure l’élément central, à la fois politique et symbolique, des principes et de l’organisation de la défense. Le préambule précise qu’en tant qu’« État musulman souverain, attaché à son unité nationale et à son intégrité territoriale, le Royaume du Maroc entend préserver, dans sa plénitude et sa diversité, son identité nationale une et indivisible  ». L’article  42, qui détaille les pouvoirs et les compétences royales, stipule que le monarque est « le Garant de l’indépendance du pays et de l’intégrité territoriale du Royaume dans ses frontières authentiques ». L’article 53, quant à lui, précise que le roi est le « Chef Suprême et Chef d’État-major Général des Forces Armées Royales ». Comme le note Brahim Saydi, « la politique de défense marocaine a toujours été définie en fonction de son combat pour l’intégrité territoriale du pays et des menaces que représentent ses voisins. La principale composante de cette menace est associée à l’Algérie […]. Les relations hispano-marocaines constituent le deuxième élément de cette perception de la menace » (8)

    Les notions d’indivisibilité et d’authenticité des frontières font référence, bien évidemment, au Sahara occidental mais aussi aux présides, ces possessions espagnoles au nord que sont les villes de Ceuta et Melilla, les îlots Leïla/Perejil et les îles Chaffarines. La récupération de ces petits territoires demeure un élément central du récit nationaliste marocain — lui-même contesté par l’Espagne, qui fait valoir une antériorité historique sur ces terres africaines (9). Cette préoccupation n’est pas totalement anecdotique, et le Maroc poursuit l’Espagne sur le terrain des instruments internationaux de décolonisation. Elle utilise aussi désormais l’arme des migrants. À deux reprises, en 2021 et en mars 2022, elle a laissé 8.000 puis 1.200 migrants prendre d’assaut les barbelés des deux villes, et par la mer. Les défenses furent saturées. Mais la véritable affaire demeure celle de l’opposition avec l’Algérie et la question du Sahara occidental. Depuis le succès de la stratégie des murs à partir de 1981, le Maroc contrôle l’essentiel du territoire contesté, renvoyant la RASD aux confins de la Mauritanie et de l’Algérie. Le dispositif de défense s’est perfectionné et l’investissement financier pour le développement du territoire a été considérable, mais rien n’est réglé sur le fond. Le référendum d’autodétermination prévu par les plans Baker n’a jamais pu se tenir et les deux camps se renvoient depuis la responsabilité de l’échec (10).

    Pendant presque vingt ans, la situation du territoire est restée figée. Le référendum s’est enlisé alors que des crises politiques chez les Sahraouis limitaient leur capacité d’action. La guerre civile algérienne n’arrangea rien car le pouvoir algérien se replia sur la survie. Depuis quelques années, le réarmement algérien, rendu possible par la remontée du prix des hydrocarbures et l’élimination de la menace intérieure, a permis de relancer l’intérêt pour la cause de la RASD. La question sahraouie est devenue un enjeu de politique interne en Algérie. L’armée en a fait aussi une cause sacrée.

    Conclusion : une paix armée ?

    La période Bouteflika a été celle d’un réarmement massif de l’Algérie, devenue la deuxième armée d’Afrique (11). Des achats d’armements colossaux à la Russie ont fait progresser ses capacités militaires dans tous les domaines. En face, le Maroc — ne pouvant pas s’aligner au niveau financier — joue la carte de la qualité et s’approvisionne, surtout aux États-Unis, en matériel de très haute technologie. Les nombreuses coopérations de ce pays visent également à mettre les armées à la pointe de la technologie. Dans cet environnement militarisé, il n’y a pas d’ouverture de paix prévisible. Le nouveau gouvernement algérien s’est engouffré dans le dossier sahraoui pour renforcer, si besoin était, sa légitimité en revenant aux fondamentaux et le Maroc a lancé une offensive diplomatique tous azimuts pour bétonner sa position politique. Au milieu, des accrochages commencent à se produire, impliquant d’un côté la RASD et de l’autre les forces marocaines. La volatilité de la situation stratégique mondiale et, dans l’affaire ukrainienne, la réhabilitation de l’usage de la guerre par la Russie comme règlement des contentieux peuvent faciliter la libération de volontés jusqu’alors contenues par un environnement international juridique et politique positif. Le face-à face-va donc continuer…

    Jean-François Daguzan

    Notes

    (1) Voir, entre autres, Michel Foucher, Fronts et frontières : un tour du monde géopolitique, Paris, Fayard, 1991, p. 207-211.

    (2) Hassan II & Éric Laurant, La mémoire d’un Roi : entretiens avec Éric Laurent, Paris, Plon, 1993.

    (3) «  Algérie  : Constitution de  1996 (version consolidée du 30 décembre 2020) », Digithèque MJP (https://mjp.univ-perp.fr/constit/ dz2020.htm).

    (4) Jean-Pierre Dufau, « Rapport autorisant l’approbation de l’accord de coopération dans le domaine de la défense entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire  », Assemblée nationale, 7  novembre  2012 (https://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r0343.asp).

    (5) Voir Salim Chena, « L’Algérie : de la puissance idéologique à l’hégémonie sécuritaire », in Mansouria Mokhefi & Alain Antil, Le Maghreb et son Sud : vers des liens renouvelés, IFRI, CNRS éditions, Paris, 2012, p. 19-37 (https:// books.openedition.org/editionscnrs/22836?lang=fr).

    (6) Abdennour Benantar, « Sécurité aux frontières : portée et limites de la stratégie algérienne », L’année du Maghreb, 14, juin 2016, p. 147-163 (https://journals.openedition.org/anneemaghreb/2712?lang=ar).

    (7) Jean-François  Daguzan, Le dernier rempart  ?  : forces armées et politiques de défense au Maghreb, Publisud-FMES-FED, Paris, 1998, p. 138.

    (8) Brahim Saidy, « La politique de défense marocaine : articulation de l’interne et de l’externe  », Maghreb-Machrek, n°202, hiver  2009-2010, p. 124 (https://www.cairn.info/revue-maghreb-machrek-2009-4-page-115. htm).

    (9) Leila ou Perejil (persil) selon que l’on parle du Maroc ou d’Espagne. Pour la dimension historique et politique, voir Yves Zurlo, Ceuta et Melilla : histoire, représentations et devenir de deux enclaves espagnoles, L’Harmattan, Paris, 2005.

    (10) Du nom de l’ancien secrétaire d’État américain, James Baker III, chargé de la médiation par l’ONU. Voir Lucile  Martin, «  Le dossier du Sahara occidental », Les Cahiers de l’Orient, 2011/2, n°102, p. 43-57 (https://www. cairn.info/revue-les-cahiers-de-l-orient-2011-2-page-43.htm).

    (11) «  Le Maroc 55e   puissance militaire au rang mondial  », Challenge, 21 janvier 2022 (https://www.challenge.ma/le-maroc-55eme-puissancemilitaire-au-rang-mondial-231143/)

    Source : Diplomatie SciencesPo

    #Maroc #Algérie #Sahara_Occidental #Frontières

  • CIA: Hassan II a consacré une grande partie de son temps au plaisir

    CIA: Hassan II a consacré une grande partie de son temps au plaisir

    Tags : Maroc, Etats-Unis, Armée, Hassan II, coup d’Etat, CIA,

    ESTIMATION SPECIALE DU RENSEIGNEMENT NATIONAL
    SNIE 61-1-72

    14 septembre 1972

    PERSPECTIVES POUR LA MONARCHIE MAROCAINE

    NOTE SOMMAIRE

    Cette estimation a été demandée par le Département d’État pour évaluer les perspectives de la monarchie marocaine à la lumière de la tentative de coup d’État du 16 août. Elle n’est pas destinée à remplacer NIE 61-72, « Les perspectives du Maroc », daté du 15 juin 1972, SECRET, car l’analyse des problèmes sociaux, politiques et économiques sous-jacents dans ce document reste généralement valable.

    Cet article conclut que le roi Hassan est dans une position sérieusement affaiblie et qu’une attaque réussie contre lui pourrait avoir lieu à tout moment. Il conserve certains atouts et est un habile manipulateur politique, mais il ne consacre pas suffisamment d’efforts à gouverner. La loyauté de l’establishment militaire, sur laquelle le trône s’est traditionnellement appuyé, est mise à rude épreuve et le roi ne peut plus compter sur son rôle hérité de chef religieux et temporel pour le soutenir.

    À court terme, une tentative contre Hassan est plus susceptible d’être un coup porté par une poignée d’officiers militaires déterminés à évincer un monarque qu’ils considèrent désormais comme un obstacle au progrès du Maroc. À plus long terme, une action contre Hassan pourrait s’inscrire dans le cadre d’une détérioration plus large du corps politique, y compris peut-être une rupture de l’ordre public ou le développement d’un mouvement révolutionnaire. Depuis que Hassan s’est isolé des sources de soutien les plus importantes du pays, il y a de fortes chances que l’une ou l’autre tentative contre lui réussisse.

    L’Estimation

    1. En un peu plus d’un an, il y a eu deux tentatives pour éliminer le roi Hassan. Les détails de l’attaque du 16 août contre son avion et la planification de celle-ci ne sont toujours pas clairs, mais il existe de bonnes preuves que le ministre de la Défense et homme fort des Forces armées marocaines, le général de division Mohamed Oufkir, était impliqué dans le complot. En tout cas, il est largement admis au Maroc qu’il a dirigé l’attentat et qu’il a été tué pour cette raison. Il ne semble pas y avoir d’officiers capables de remplacer Oufkir en tant que commandant fort des Forces armées marocaines. Le roi Hassan a aboli le poste de ministre de la Défense et a pris le contrôle direct de l’establishment militaire.

    2. Il convient de noter que la tentative de renversement du roi de juillet 1971 et celle d’août 1972 ont été menées par de petits groupes d’officiers militaires. Nous avons peu de preuves tangibles sur les croyances et les objectifs ultimes de ces hommes. Le Maroc a des problèmes sociaux et économiques fondamentaux, et le mécontentement grandit dans de nombreuses parties de la population, un état de malaise qui se reflète – bien que de manière plutôt inefficace – dans les partis politiques. Cependant, à notre connaissance, il n’y a pas eu de contacts entre les comploteurs et les dirigeants politiques civils. Les comploteurs militaires étaient presque exclusivement des Berbères ruraux conservateurs – l’élément majoritaire du corps des officiers. Les preuves disponibles indiquent que les prétendus régicides visaient à éliminer le roi et à se débarrasser de l’entourage corrompu et gaspilleur qui l’entoure. Les officiers ne semblaient pas déterminés à provoquer des changements sociaux et économiques radicaux, bien qu’ils aient cherché à restreindre au moins secrètement le pouvoir de la monarchie. Relativement peu d’officiers ont été directement impliqués dans chaque tentative, et parmi d’autres qui peuvent avoir eu des connaissances préalables, aucun ne semble avoir été suffisamment loyal pour signaler les plans au palais.

    3. Les deux tentatives ont eu lieu dans un isolement presque complet du grand public. Il y avait peu d’enthousiasme exprimé pour l’un ou l’autre, et peu parmi la population semblent se soucier de savoir si Hassan survit ou non. Au cours de ses 11 années au pouvoir, Hassan a dépensé une grande partie du capital politique qu’il a hérité de son père – la légitimité religieuse et politique d’une dynastie de trois cents ans, le rôle de premier plan du trône dans la lutte pour l’indépendance, et une mesure de considération populaire pour l’efficacité du monarque en tant que dirigeant.

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    #Maroc #HassanII #Armée #Etats_Unis

  • CIA: Pour l’armée Hassan II était un obstacle au progrès du Maroc

    CIA: Pour l’armée Hassan II était un obstacle au progrès du Maroc

    Tags : Maroc, Etats-Unis, Armée, Hassan II, coup d’Etat, CIA,

    ESTIMATION SPECIALE DU RENSEIGNEMENT NATIONAL
    SNIE 61-1-72

    14 septembre 1972

    PERSPECTIVES POUR LA MONARCHIE MAROCAINE

    NOTE SOMMAIRE

    Cette estimation a été demandée par le Département d’État pour évaluer les perspectives de la monarchie marocaine à la lumière de la tentative de coup d’État du 16 août. Elle n’est pas destinée à remplacer NIE 61-72, « Les perspectives du Maroc », daté du 15 juin 1972, SECRET, car l’analyse des problèmes sociaux, politiques et économiques sous-jacents dans ce document reste généralement valable.

    Cet article conclut que le roi Hassan est dans une position sérieusement affaiblie et qu’une attaque réussie contre lui pourrait avoir lieu à tout moment. Il conserve certains atouts et est un habile manipulateur politique, mais il ne consacre pas suffisamment d’efforts à gouverner. La loyauté de l’establishment militaire, sur laquelle le trône s’est traditionnellement appuyé, est mise à rude épreuve et le roi ne peut plus compter sur son rôle hérité de chef religieux et temporel pour le soutenir.

    À court terme, une tentative contre Hassan est plus susceptible d’être un coup porté par une poignée d’officiers militaires déterminés à évincer un monarque qu’ils considèrent désormais comme un obstacle au progrès du Maroc. À plus long terme, une action contre Hassan pourrait s’inscrire dans le cadre d’une détérioration plus large du corps politique, y compris peut-être une rupture de l’ordre public ou le développement d’un mouvement révolutionnaire. Depuis que Hassan s’est isolé des sources de soutien les plus importantes du pays, il y a de fortes chances que l’une ou l’autre tentative contre lui réussisse.

    L’Estimation
    1. En un peu plus d’un an, il y a eu deux tentatives pour éliminer le roi Hassan. Les détails de l’attaque du 16 août contre son avion et la planification de celle-ci ne sont toujours pas clairs, mais il existe de bonnes preuves que le ministre de la Défense et homme fort des Forces armées marocaines, le général de division Mohamed Oufkir, était impliqué dans le complot. En tout cas, il est largement admis au Maroc qu’il a dirigé l’attentat et qu’il a été tué pour cette raison. Il ne semble pas y avoir d’officiers capables de remplacer Oufkir en tant que commandant fort des Forces armées marocaines. Le roi Hassan a aboli le poste de ministre de la Défense et a pris le contrôle direct de l’establishment militaire.

    2. Il convient de noter que la tentative de renversement du roi de juillet 1971 et celle d’août 1972 ont été menées par de petits groupes d’officiers militaires. Nous avons peu de preuves tangibles sur les croyances et les objectifs ultimes de ces hommes. Le Maroc a des problèmes sociaux et économiques fondamentaux, et le mécontentement grandit dans de nombreuses parties de la population, un état de malaise qui se reflète – bien que de manière plutôt inefficace – dans les partis politiques. Cependant, à notre connaissance, il n’y a pas eu de contacts entre les comploteurs et les dirigeants politiques civils. Les comploteurs militaires étaient presque exclusivement des Berbères ruraux conservateurs – l’élément majoritaire du corps des officiers. Les preuves disponibles indiquent que les prétendus régicides visaient à éliminer le roi et à se débarrasser de l’entourage corrompu et gaspilleur qui l’entoure. Les officiers ne semblaient pas déterminés à provoquer des changements sociaux et économiques radicaux, bien qu’ils aient cherché à restreindre au moins secrètement le pouvoir de la monarchie. Relativement peu d’officiers ont été directement impliqués dans chaque tentative, et parmi d’autres qui peuvent avoir eu des connaissances préalables, aucun ne semble avoir été suffisamment loyal pour signaler les plans au palais.

    3. Les deux tentatives ont eu lieu dans un isolement presque complet du grand public. Il y avait peu d’enthousiasme exprimé pour l’un ou l’autre, et peu parmi la population semblent se soucier de savoir si Hassan survit ou non. Au cours de ses 11 années au pouvoir, Hassan a dépensé une grande partie du capital politique qu’il a hérité de son père – la légitimité religieuse et politique d’une dynastie de trois cents ans, le rôle de premier plan du trône dans la lutte pour l’indépendance, et une mesure de considération populaire pour l’efficacité du monarque en tant que dirigeant.

    4. À la suite des deux tentatives de coup d’État, le roi Hassan a exprimé sa détermination à continuer à gouverner son pays comme avant, mais il ne sait pas qui lui est loyal et qui ne lui est pas fidèle. Les membres du corps des officiers ne peuvent être sûrs de leur propre position ou de celle de leurs frères en uniforme. Les ministres et les hauts fonctionnaires pour qui le service à Hassan a été la voie vers la richesse doivent se demander si leur fortune est désormais liée à une étoile déclinante. Les dirigeants politiques de l’opposition examineront si les événements récents ont rendu le moment venu pour eux de faire pression sur Hassan pour une part du pouvoir au gouvernement ou s’ils devraient attendre leur heure. Ces forces et d’autres – les étudiants, les organisations syndicales, les chefs religieux – joueront pour obtenir leur avantage dans les mois à venir.

    La position d’Hassan : passifs et actifs

    5. La question clé de l’effet que cette deuxième tentative de coup d’État aura sur Hassan lui-même reste sans réponse. Il a montré à deux reprises une capacité admirable à échapper à une pluie de balles et à prendre en main la situation. Il a également démontré au fil des ans une grande capacité de manipulation politique, équilibrant ce parti politique, cette clique ou cette personne les uns contre les autres. Mais il a aussi consacré une grande partie de son temps à la poursuite du plaisir. Si Hassan ne peut pas acheter la loyauté de ses officiers et administrateurs ni compter sur son rôle hérité de chef religieux et temporel pour lui gagner le soutien populaire, son avenir semblerait résider dans le fait de changer sa méthode de gouvernement et de donner au moins l’apparence d’avoir le bien-être de son peuple dans l’âme. La tentative de coup d’État de 1971 ne lui a rien appris à cet égard. La tentative de 1972 peut, mais nous en doutons fortement. Sa première réponse a été de blâmer pratiquement tout le monde au Maroc pour les conditions qui ont entraîné des tentatives d’assassinat. Il ne semble pas reconnaître que sa propre performance peut être blâmée ; c’est un monarque très traditionnel dans le sens où il croit que l’autorité lui appartient de droit et n’a pas besoin d’être gagnée par une gouvernance efficace de son royaume.

    6. Traditionnellement, l’establishment militaire marocain a été un pilier fondamental du trône, fournissant non seulement le pouvoir de maintenir la sécurité intérieure, mais aussi un cadre de personnes privilégiées à partir desquelles les nominations aux postes administratifs provinciaux clés ont été faites. Il y a sans aucun doute de nombreux officiers qui restent fidèles au roi, mais il ne peut pas être sûr de qui ils sont. Il a réagi à la déloyauté de quelques-uns en donnant un discours cinglant aux officiers supérieurs des Forces royales marocaines dans lequel il a mis en cause leur intégrité et celle de l’institution dont ils font partie. De plus, cette dénonciation a été diffusée à l’ensemble de la population. Il a repris la direction de l’establishment militaire au motif qu’il ne peut faire confiance à aucun de ses subordonnés militaires ; dans ces circonstances, la loyauté des militaires a été mise à rude épreuve.

    7. Puisque la confiance d’Hassan envers Oufkir (qui avait été proche du roi Hassan et de son père) s’est avérée déplacée, Hassan doit s’inquiéter profondément de la loyauté des autres. Avec la mort d’Oufkir, il y a un vide dans l’administration qui ne peut pas être facilement comblé. Provisoirement, le Roi a nommé le général Driss Ben Omar pour l’assister dans l’administration des forces armées. Mais le général n’est pas considéré comme une personne forte ; de plus, il n’est pas en bonne santé et a l’inconvénient supplémentaire d’être un Arabe à la tête d’un corps d’officiers en grande partie berbère.

    8. À la suite des deux tentatives de coup d’État, il y a eu un désherbage considérable des niveaux supérieurs des Forces armées marocaines. Contrairement aux 15 généraux en service en juin 1971, il n’y en a plus que quatre. Cependant, en purgeant l’échelon supérieur des forces armées, Hassan court également le risque de placer à des postes importants des officiers allant du major au colonel qui pourraient être encore plus mécontents de la monarchie. Les plus jeunes de ces hommes, souvent mieux formés et éduqués que leurs aînés, semblent s’être irrités sous le commandement de généraux plus âgés, dont beaucoup ont été choyés par le roi et ont été entachés par son style de vie dissolu. La purge a toutefois supprimé pratiquement tous les officiers supérieurs qui avaient des partisans, et il faudra peut-être un certain temps avant que de nouvelles personnalités de premier plan n’apparaissent et que des cliques ne se forment autour d’elles.

    9. Nous avons actuellement très peu de preuves directes sur les attitudes des individus ou des groupes au sein du corps des officiers marocains. Le fait que deux groupes, en l’espace d’un peu plus d’un an, aient pris les risques d’une tentative d’assassinat devrait être une preuve convaincante du profond mécontentement du corps des officiers face au régime de Hassan. Nous doutons que les purges d’Hassan aient éradiqué ce mécontentement. En effet, il y a des signes que ses coups de langue et le retrait de munitions des unités militaires ont retourné les autres contre lui. Les tentatives de 1971 et 1972 ont été faites par des officiers qui cherchaient évidemment un gouvernement plus efficace, mais qui étaient conservateurs dans leurs perspectives politiques. À mesure que les jeunes officiers gagnent en ancienneté, nous pensons que l’attitude des putschistes potentiels est susceptible de changer.

    10. Il y a plus de personnes d’origine arabe parmi les jeunes officiers et donc plus de chances qu’un individu donné soit influencé par les idées politiques d’autres États arabes. La Libye a fait l’éloge des comploteurs marocains, bien qu’il n’y ait aucune preuve de contact libyen avec les comploteurs de 1971 ou 1972. Les Libyens aident les exilés civils marocains, mais ils semblent n’avoir aucune relation de travail directe avec les dissidents à l’intérieur du Maroc. De plus, le régime de Kadhafi inspire peu de respect au sein des Forces armées marocaines. Les Algériens, qui sont plus susceptibles d’avoir de l’influence au Maroc, n’ont aucun amour pour Hassan ou la monarchie, mais craignent qu’un successeur ne soit pire de leur point de vue. Par conséquent, Alger sera prudent quant au soutien des éléments anti-Hassan.

    11. Hassan possède certains atouts. La campagne, fidèle à la monarchie de manière passive, offre une toile de fond de stabilité. Le roi ne peut cependant pas compter sur le soutien rural pour dissuader les initiatives de l’opposition. Le soutien qu’il tire de ces racines est diffus et désorganisé et, dans l’esprit du roi, probablement exagéré. De plus, la population rurale est largement désarmée et ne constituerait pas une contre-force efficace en cas de nouveaux coups portés contre lui.

    12. Il existe un nombre important d’huissiers de justice, de hauts fonctionnaires et de ministres, comme le Premier ministre Karim-Lamrani et les frères Benhima (ministres des affaires étrangères et de l’intérieur), qui doivent leurs positions et souvent leur fortune à la faveur d’Hassan. Certains d’entre eux le serviront bien, soit par conviction que sa voie est correcte, soit parce qu’ils ne voient pas d’autre alternative pour eux-mêmes que de soutenir son règne. D’autres s’éloigneront probablement quelque peu dans le but d’éviter la ruine si la maison royale est renversée. Mais pratiquement toutes ces personnes consacreront une certaine quantité de temps et d’énergie à s’assurer qu’elles semblent fidèles au roi Hassan, à évaluer la loyauté des autres et à ranger des actifs à l’étranger pour l’avenir. Ceci, plus Hassan’ L’hypothèse d’un contrôle plus direct des décisions au jour le jour entraînera probablement une baisse de l’efficacité gouvernementale. Le roi lui-même a fixé un niveau d’attention médiocre à l’administration, aux questions budgétaires, etc., et ne montre aucun signe de changement.

    13. L’appareil de renseignement du gouvernement est susceptible d’absorber une grande partie de l’attention du roi. Il n’a déjà pas réussi à l’alerter de deux coups potentiellement désastreux portés au trône et il doit essayer de s’assurer qu’il ne soit pas pris par surprise une troisième fois. Son principal officier de renseignement est l’expérimenté colonel Ahmed Dlimi qui dirige le service de renseignement du palais. Dlimi a servi Hassan dans divers postes de renseignement et de sécurité au cours des 10 dernières années. Nous présumons cependant que Hassan ne dépendra pas d’un seul service mais tentera également de placer des officiers fidèles en charge du service de renseignement militaire et de l’appareil de sécurité au sein du ministère de l’Intérieur.

    14. Le Roi cherchera à maintenir son contrôle en équilibrant diverses forces militaires et de sécurité. Il aurait l’intention de réduire la taille de l’armée régulière (aujourd’hui environ 50 000) et pourrait s’appuyer davantage sur la gendarmerie et d’autres forces de sécurité intérieure. À court terme au moins, Hassan pourrait probablement compter sur ces forces, qui totalisent 12 000 hommes répartis dans tout le pays, et sur diverses unités d’élite de l’armée pour réprimer les manifestations de désordre public. La gendarmerie a reçu un traitement plus favorable que les forces armées et n’a montré aucun signe de déloyauté lors des tentatives de coup d’État de 1971 ou de 1972.

    15. Hassan profite également du manque d’unité et d’objectif commun parmi ceux qui s’opposent à lui. Les partis politiques civils légaux au Maroc souhaitent partager une partie du pouvoir de Hassan. Ils ont peu de points communs avec l’establishment militaire. De plus, ni les politiciens ni les militaires ne sont susceptibles de croire qu’ils peuvent contraindre Hassan à jouer le rôle d’un monarque constitutionnel. Les partis, principalement l’Istiqlal et son émanation l’Union nationale des forces populaires, n’ont cessé de perdre en efficacité au cours des 10 dernières années environ. Ils n’ont guère réussi à attirer le soutien d’une population apathique. Leurs très mauvaises performances au pouvoir à la fin des années 1950 et au début des années 1960 ont permis à Hassan de les écarter relativement facilement avant même qu’il n’assume le pouvoir direct et suspende le Parlement en 1965.

    16. La technique d’Hassan a consisté à faire allusion à certaines réformes limitées, à dispenser certaines faveurs royales et à promettre une chance au pouvoir – et les avantages qui vont avec – aux dirigeants politiques disposés à collaborer ou à coopérer avec lui. Il a généralement tenu juste assez de promesses pour attirer les chefs de parti les plus vénaux et pour diviser les conseils de parti sur l’opportunité de le suivre. Et à au moins une occasion, il a doublé les partis en faisant un geste politique pendant une période où ils comprenaient qu’il attendait leur réponse sur une offre royale.

    17. Dans les circonstances actuelles, les dirigeants politiques sont confrontés à un dilemme. Si le roi leur offre un rôle au sein du gouvernement, comme il pourrait bien le faire s’il autorise des élections en vertu de la nouvelle constitution, ils risqueraient de s’aliéner certains de leurs partisans en acceptant, puisque Hassan ne leur offrirait presque certainement pas un pouvoir politique vraiment significatif, ni même une chance d’y parvenir par le biais d’élections libres. Si, d’un autre côté, ils choisissent de s’opposer ouvertement, par exemple en employant des tactiques de réunions publiques et de manifestations, ils risquent une répression sévère et violente de la part des forces de sécurité. Dans cette situation, notre meilleure estimation est que, si certains dirigeants politiques peuvent parvenir à un accord avec le roi, la plupart essaieront de chevaucher la clôture aussi longtemps que possible et feront en fait très peu, mais feront quelques remontrances verbales contre la monarchie.

    Hassan peut-il survivre ?

    18. Hassan sera disposé à employer toutes les armes de manipulation à sa disposition – y compris le réaménagement des liens étrangers – afin de maintenir son trône. Le Maroc a actuellement des liens étroits avec la France et les États-Unis. Le premier est la principale source d’investissement étranger et la principale influence culturelle étrangère au Maroc ; ce dernier fournit chaque année quelque 45 millions de dollars d’aide, principalement sous forme d’excédents alimentaires. Hassan lui-même est un francophile, et il est fondamentalement amical avec les États-Unis, mais les liens étrangers qu’il privilégie ne sont généralement pas populaires au Maroc. Avant la dernière tentative de coup d’État, il avait accru le rôle de la France dans son appareil de sécurité intérieure ; il peut maintenant tenter d’engager plus fermement les États-Unis dans la défense de son régime, en appelant à un soutien accru en matière de renseignement et à d’autres formes d’assistance dans le domaine de la sécurité,

    19. S’il en vient à sentir que les dirigeants des partis politiques font des progrès contre lui, cependant, il voudra probablement détourner l’attention vers d’autres questions. La manœuvre classique dans de telles circonstances est de se plier au sentiment xénophobe. Il pourrait bien choisir de s’opposer aux investissements français au Maroc ou de réaffirmer les revendications marocaines sur les territoires espagnols en Afrique du Nord. En outre, la présence militaire américaine au Maroc*, principalement les installations de communication de Kénitra, pouvait lui apparaître comme une cible particulièrement attrayante. Hassan soupçonne probablement que, d’une manière ou d’une autre, l’un des dizaines d’Américains présents à la mission d’entraînement à Kenitra aurait pu donner l’avertissement de troubles imminents le 16 août. En tout état de cause, il sait que les forces politiques civiles, notamment le parti Istiqlal, s’opposent à la présence militaire américaine.

    * La présence militaire américaine au Maroc consiste en une équipe de formation pour l’armée de l’air marocaine et une école de communication à Kenitra, ainsi qu’une installation de communication navale sur deux sites près de Kenitra, qui dessert la sixième flotte. Quelque 4 000 membres du personnel et leurs ayants droit sont présents dans le pays.

    20. Les éléments de la tragédie classique sont présents au Maroc. Certains monarques – Hussein et le Shah viennent à l’esprit – ont fait face à des situations tout aussi alarmantes et ont survécu. Mais ils avaient des atouts tels qu’un corps de subordonnés loyaux, une disposition à travailler dans le domaine du gouvernement et une volonté de faire du trône un agent de changement. Hassan a perdu le soutien des groupes les plus importants du pays et les gens sont généralement indifférents à son sort. De plus, il est dilettante, convaincu de sa propre droiture et semble incapable de comprendre que sa survie et celle de sa dynastie dépendent, à tout le moins, de l’adhésion de quelques groupes influents et d’une administration plus efficace du pays.

    21. Un autre effort pour retirer Hassan pourrait intervenir très prochainement ou être retardé pendant des années. À court terme, il est plus probable que cela se produise car ceux de 1971 et 1972 ont été frappés par une poignée d’officiers militaires déterminés à renverser un monarque qu’ils considèrent maintenant comme un obstacle au progrès du Maroc. Bref, d’autres coups portés au Roi paraissent certains ; il n’est pas de nature à abdiquer et à s’exiler. Il restera et tentera de parer les coups, même s’il n’y a aucun moyen de savoir quand ni où ils viendront. Mais comme Hassan s’est coupé des sources de soutien les plus importantes du pays, il y a de fortes chances que l’une ou l’autre tentative contre lui réussisse.

    22. Même si Hassan reste au pouvoir pendant un an ou deux, il existe des sources potentielles de troubles politiques redoutables au Maroc. Le chômage et la pauvreté sont endémiques et croissants dans les villes qui, avec leur grand nombre d’habitants pauvres des bidonvilles et d’étudiants et d’intellectuels frustrés, sont un terreau fertile pour la dissidence. Le travail organisé, les organisations étudiantes ou des groupes politiques radicaux tels que le Parti communiste illégal pour la libération et le socialisme peuvent en venir à croire que les récents coups montrent la faiblesse du roi Hassan. Ils pourraient essayer d’affaiblir davantage le roi par des tactiques révolutionnaires telles que des manifestations de masse, des grèves générales et des émeutes, et peut-être même en se tournant vers le terrorisme urbain. Hassan réagirait certainement à un tel développement avec vigueur. Il est possible que certaines des forces sur lesquelles il s’appuie pour maintenir l’ordre ne soient pas disposées à prendre de sérieux risques au nom d’un roi auquel elles ne sont plus fidèles. Et si la violence devait persister pendant une période prolongée, cela pourrait ajouter un élément très troublant au contrôle de Hassan, conduisant peut-être à une rupture de l’ordre public.

    Après Hassan ?

    23. Ce à quoi ressemblerait le Maroc sans Hassan est très difficile à définir à ce stade. La composition des forces qui l’ont renversé ferait bien sûr beaucoup pour déterminer la nature du régime qui lui succède. Un coup d’État réussi par un autre groupe d’officiers berbères conservateurs pourrait produire un gouvernement pas particulièrement différent dans les perspectives politiques de l’actuel, mais vraisemblablement moins corrompu et peut-être plus efficace. D’un autre côté, l’initiative pourrait être prise par des officiers plus socialistes des rangs moyens ou inférieurs. Leur orientation pourrait être fondamentalement « le Maroc d’abord » et réformiste, ou elle pourrait être d’une caste révolutionnaire et plus militante arabe.

    24. Tout gouvernement successeur, même une régence, rencontrerait une augmentation des tendances à la division caractéristiques du pays. Malgré toute l’extravagance et l’inattention d’Hassan aux rouages ​​du gouvernement, la maison royale a fourni une certaine orientation aux éléments disparates de la société marocaine.

    25. Compte tenu des problèmes auxquels il serait confronté, presque tout gouvernement qui succéderait à Hassan chercherait à accroître sa propre popularité par une victoire bon marché et facile. La présence étrangère au Maroc serait presque certainement attaquée. Inviter les États-Unis à quitter leurs installations de communications militaires serait une décision évidente pour tout gouvernement. Un nationaliste ferait presque certainement cela – et réduirait probablement aussi la présence française. Même un régime conservateur serait tenté de prendre des mesures anti-étrangers pour attirer le soutien des éléments politiques dans les villes. Dans presque toutes les circonstances imaginables, il y aurait beaucoup moins de volonté de permettre une présence militaire américaine continue que ce dont nous avons bénéficié depuis que le Maroc est devenu indépendant.

    Source : US Department of State, 14/19/1972

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