Étiquette : Bernard Kouchner

  • Christine Ockrent a rompu le silence à propos de l’affaire Olivier Duhamel

    Charles Van Dievort

    Ce scandale d’agression sexuelle la touche de près, l’auteure du livre qui l’a déclenchée n’est autre que sa belle-fille Camille Kouchner.

    Le 7 janvier dernier, la sortie du livre La Familia Grande de Camille Kouchner a fait l’effet d’une bombe. L’auteure y mentionne que son beau-père, le politologue Olivier Duhamel, a sexuellement agressé son frère jumeau alors âgé de 14 ans. Ce scandale touche de près Christine Ockrent puisque Camille Kouchner, fille de Bernard Kouchner et d’Evelyne Pisiers, n’est autre que sa belle-fille.

    L’ex-reine du 20 heures d’Antenne 2, qui n’avait jusqu’ici pas réagi à l’affaire, s’est exprimée à ce propos ce jeudi 18 mars. Dans les pages de S, le magazine de Sophie Davant, elle apporte son soutien à ses beaux-enfant. Elle souligne le courage et le talent qu’a Camille Kouchner d’exprimer ce qu’avec son frère elle a longtemps caché. “Nous sommes fiers d’eux et nous les aimons”, confie-t-elle dans le cadre d’un long entretien consacré à sa carrière. Ses propos rejoignent ceux formulé précédemment par Bernard Kouchner qui paralait aussi de courage.

    Pourtant, dans son livre, Camille Kouchner n’a épargné ni son père ni Christine Ockrent. Le premier a été trop absent, la seconde tout sauf accueillante quand elle a intégré la famille. “Notre maison d’enfance, l’appartement que notre mère a quitté, est réorganisée. Notre belle-mère y prend ses quartiers. Rien n’est expliqué, tout doit être compris. Pour nous, fini de rigoler. Les copains ne viennent plus, on préfère ne plus les y inviter”, écrit-elle à propos de l’ambiance familiale dans les années 80.

    DH Les Sports, 18 mars 2021

    Tags : Christine Ockrent, Olivier Duhamel, Camille Kouchner, Bernard Kouchner, Evelyne Pisiers, pédophilie, pédocriminalité,

  • Le paradoxe du politiquement correct : voici comment la pédophilie est tolérée

    Roberto Vivaldelli
    15 MARS 2021


    L’émission de télévision néerlandaise pour enfants, accusée d’être « pro-pédophile », dans laquelle on voit des adultes se déshabiller dans un studio devant un public d’enfants, ces derniers leur posant ensuite des questions sur le corps humain, a suscité l’émoi et l’indignation. Comme le rapporte IlGiornale.it, le programme s’appelle Simply Naked et a été produit et annoncé par le diffuseur public Nos. Le public d’enfants qui assiste à un tel strip-tease, selon les prévisions du programme, est composé de garçons âgés de 10 à 12 ans et, selon les producteurs du programme, il s’agirait de montrer aux enfants comment est fait le corps humain.

    Les Pays-Bas, pays du parti pédophile

    Il n’est pas tout à fait surprenant que cela se passe aux Pays-Bas. Après tout, les institutions néerlandaises semblent être trop garantes et tolérantes vis-à-vis de la pédophilie et de ceux qui la promeuvent. En 2013, une décision choquante d’une cour d’appel a estimé que les activités d’une fondation qui encourageait la pédophilie depuis plus de trente ans ne pouvaient être interdites. En 2019, la Fondation Strijd tegen Misbruik a également demandé l’interdiction du « manuel du pédophile », un livre de plus de mille pages qui explique en détail comment les pédophiles peuvent attirer, soigner et abuser des enfants et comment le faire sans que personne ne le découvre. Le ministre de la justice de l’époque, Ferdinand Grapperhaus, a répondu que les avocats de son ministère avaient conclu qu’une interdiction était « impossible » car le livre choc « ne contient pas de matériel criminel ».

    Et c’est précisément aux Pays-Bas que le « Parti pour l’amour du prochain, la liberté et la diversité » (Partij voor Naastenliefde, Vrijheid en Diversiteit, PNVD en néerlandais), fondé à l’origine en 2006, a été refondé l’année dernière, plus connu sous le nom de « parti pédophile », qui soutient la légalisation des relations sexuelles avec des mineurs et la possession de matériel pédopornographique. En réponse à la renaissance du parti, en octobre dernier, quelques centaines de personnes, grâce à l’association Save All Kids, sont descendues dans la rue à Utrecht contre « l’acceptation et la normalisation de la pédophilie » dans le pays. Une démonstration que le problème est ressenti et qu’une dérive dangereuse existe.

    Les années 70 : le manifeste des intellectuels de gauche

    Mais il ne faut pas croire que c’est un cas isolé. Parce qu’il y a une certaine dérive de la pensée dite « progressiste » et ultra-libérale qui entend en quelque sorte dédouaner ou du moins tolérer la pédophilie. C’est le grand paradoxe du politiquement correct, promoteur de la politique identitaire pour la défense de toutes les minorités du monde, mais pas des enfants. Ce n’est pas un thème nouveau, en fait : déjà dans les années 1970, le philosophe français Jean-Paul Sartre signait, avec les noms les plus illustres de la gauche européenne, comme Simone de Beauvoir et Michel Foucault, le Manifeste pour la défense de la pédophilie publié dans Libération.

    Comme l’a rappelé Sergio Romano il y a quelque temps dans le Corriere della Sera, la pétition a été lancée en 1977 après que trois hommes aient été arrêtés pour avoir eu des relations sexuelles avec des garçons de moins de quinze ans et aient été maintenus en prison pendant plus de trois ans dans l’attente de leur procès. Mais les garçons n’avaient pas été violés et étaient apparemment consentants. C’est ainsi qu’est lancée la pétition signée par toute l’élite de la gauche et de l’intelligentsia de l’époque – Louis Aragon, Roland Barthes, Simone de Beauvoir, Michel Foucault, André Glucksman, Felix Guattari, Jack Lang, Bernard Kouchner, Jean-Paul Sartre, Philippe Sollers – pour demander de supprimer du code des lois que les intellectuels de gauche considéraient comme dépassées et en décalage avec leur temps.

    « Les pédophiles comme victimes »

    Cependant, la propagande pro-pédophilie ne devrait pas se limiter à La Haye. Il existe une tranche du monde progressiste qui promeut une attitude différente à l’égard des pédophiles, décrits non pas comme des criminels mais comme des victimes, notamment dans les pays anglo-saxons, sur les campus ultra-progressistes et dans d’autres circuits « intellectuels ». Comme le rapporte InsideOver, l’université de Würzburg, en Allemagne, a organisé une conférence Ted Talk sur le thème « Future Societys ». Parmi les orateurs présents, Mirjam Heine, une étudiante en médecine, a donné une conférence controversée intitulée « Pourquoi nos perceptions de la pédophilie doivent changer ».

    Dans son exposé, Mme Heine a cité certaines recherches scientifiques qui classent la pédophilie comme « une orientation sexuelle immuable ». Comme indiqué dans le programme de l’événement, l’étudiant a été inspiré par le travail du Dr Klaus Beier, directeur du département de sexologie de la Charité, considéré comme l’un des meilleurs hôpitaux universitaires de Berlin. Selon Heine, personne n’est responsable de son orientation et de ses sentiments sexuels, « mais chacun est responsable de ses propres actions à leur égard. »

    « Comprendre les pédophiles » : la dernière folie progressiste

    La dernière dérive du progressisme libéral est celle qui appelle sans vergogne et à grands cris à « comprendre les pédophiles ». Comprenez leur « trouble ». Comprenez-les. C’est le message du documentaire Pedophile : Understanding the Mental Disorder d’Amazon Prime Video. « Les pédophiles ont longtemps été les personnes les plus diabolisées de notre société », rapporte la description du documentaire. « De nouvelles recherches montrent que comprendre le sort des pédophiles et y remédier est une première étape pour réduire les cas d’abus sexuels sur les enfants. »

    Une pensée isolée ? Bien sûr que non. En Californie, le berceau progressiste de l’Amérique, les démocrates ont parrainé en octobre dernier un projet de loi controversé qui réduirait la peine encourue par les adultes ayant des relations sexuelles consenties avec des mineurs de moins de dix ans. Selon son promoteur, le démocrate Scott Wiener, le projet de loi a été introduit pour mettre fin à la « discrimination à l’encontre des personnes Lgbt ».

    Inside Over, 15 mars 2021

    Tags : Pédophilie, pédocriminalité, #Metoo, #MetooInceste, inceste, Louis Aragon, Roland Barthes, Simone de Beauvoir, Michel Foucault, André Glucksman, Felix Guattari, Jack Lang, Bernard Kouchner, Jean-Paul Sartre, Philippe Sollers,

  • Olivier Duhamel et le scandaleux secret de famille de Camille Kouchner

    « Pour un enfant intelligent, rien ne doit être surprenant. La liberté implique de vivre comme les grands. » (Camille Kouchner, janvier 2021).

    Il a fallu vingt ans pour qu’éclate au grand jour un scandale qui n’en était pas un, de l’existence de Mazarine, la fille cachée de François Mitterrand. Ce n’était pas un scandale dans la mesure où les mœurs n’ont fait que prendre de l’avance sur leurs temps. Il aura fallu en revanche plus de trente et un ans pour qu’un vrai scandale soit mis à jour. Annoncée dès ce lundi 4 janvier 2021, la sortie du livre de la juriste Camille Kouchner, fille de l’ancien ministre, « La Familia grande » prévue le jeudi 7 janvier 2021 (aux éditions du Seuil) a fait l’effet d’une véritable bombe dans le milieu politico-médiatique. En cause, le politologue Olivier Duhamel.

    Disons-le très nettement : je n’appréciais pas beaucoup Olivier Duhamel. Il intervenait encore récemment sur les plateaux de télévision comme « éditorialiste » et je dois bien dire que je ne voyais pas vraiment sa valeur ajoutée, si ce n’est sa notoriété qui, peut-être (j’en doute) aurait pu apporter un peu d’audience. Par ailleurs, je trouvais que le mélange des genres n’était pas très opportun entre l’analyse politique qui demande du recul et sa double élection, de juillet 1997 à juin 2004, au Parlement Européen sur la liste socialiste d’abord de Michel Rocard en juin 1994 (il a fait partie des remplaçants de Pierre Moscovici et Bernard Kouchner nommés au gouvernement de Lionel Jospin) et sur celle de François Hollande (en position éligible) en juin 1999.

    Néanmoins, il n’est pas ici l’objet de faire du lynchage sur un homme qui mérite autant que tout justiciable à être entendu. Pour l’heure, c’est vrai qu’il a voulu rester silencieux si ce n’est ce message sur Twitter le 4 janvier 2021 : « Étant l’objet d’attaques personnelles, et désireux de préserver les institutions dans lesquelles je travaille, j’y mets fin à mes fonctions. ». En particulier, il présidait depuis le 10 mai 2016 la prestigieuse Fondation nationale des sciences politiques, succédant à des politologues très renommés : Jean-Claude Casanova, René Rémond, François Goguel, Pierre Renouvin et André Siegfried. Olivier Duhamel a aussi démissionné de la présidence du club Le Siècle, qu’il assumait depuis le 1er janvier 2020 et qui montrait qu’il était parmi les élites les mieux implantées de France.

    J’essaie surtout de comprendre car si l’un est manifestement en faute, mais je ne suis pas juge, la situation est complexe car les histoires de familles recomposées sont toujours complexes, surtout si ses membres sont des personnalités connues à fort caractère. Cependant, je ne crois pas qu’il faille résumer des accusations d’une telle gravité, à savoir de viol sur mineur et d’inceste comme de simples « attaques personnelles ». L’expression elle-même paraît être une insulte à la victime. C’est parce qu’il y a un mélange explosif de personnalités très réputées que le silence a pu durer si longtemps.

    Précisons d’ailleurs qu’Olivier Duhamel n’a rien à avoir avec les frères Alain Duhamel et Patrice Duhamel. Il est en revanche le fils d’un grand homme politique démocrate-chrétienne, Jacques Duhamel (1924-1977), député-maire de Dole, et ministre sous Georges Pompidou, à l’Agriculture puis à la culture. Il est le deuxième d’une fratrie de quatre fils, parmi lesquels un énarque (décédé très jeune), un ancien directeur général de la radio RTL et ancien président-directeur général du groupe « La Provence », et enfin, un inspecteur général des affaires sociales.

    Olivier Duhamel a eu 70 ans le 2 mai dernier. Il est professeur émérite des universités à l’IEP Paris. Spécialiste en droit constitutionnel, il intervenait régulièrement dans les médias, soit par tribune dans la presse écrite, soit par interview à la radio ou à la télévision, comme je l’ai indiqué plus haut. J’ai toujours trouvé ses points de vue constitutionnels peu pertinents même si dotés d’une grande créativité, car probablement il n’a pas l’esprit politique qui consiste avant tout à assurer le réalisable pour tendre au mieux vers le souhaitable.

    Que lui reproche-t-on et qui le lui reproche ? La réponse aux deux questions est particulièrement éloquente. Rien de moins que le viol de son « beau-fils » alors que ce dernier était adolescent. Et c’est sa « belle-fille » qui l’accuse. On a de nombreux ingrédients de scandale : inceste (même si ce n’est pas le père biologique), pédophilie (ou pas, selon qu’on la définit selon l’âge de la victime), viol ou abus sexuel et aussi homosexualité (le beau-père marié à une femme a préféré « initier » le beau-fils et pas sa sœur jumelle). Sans compter le silence, l’étouffement, une mère incompréhensive ou trop libertaire, dans un milieu politique souvent connu pour donner des leçons de morale !

    Cela fait plus de trente ans que Camille Kouchner rumine ce secret de famille et j’imagine qu’il lui a fallu un courage fou pour écrire puis publier son livre. D’autant plus qu’elle a acquis personnellement une petite notoriété dans le droit social et que sa démarche risque de remettre en cause toute sa vie, et pas seulement professionnelle. Donc, la première chose, c’est de dire : chapeau madame, bravo pour votre courage ! Elle ne s’en prend pas à un « membre » de l’élite, a priori « indéboulonnable », elle s’en prend à un individu particulier, aurait-il été un révolutionnaire, un rebelle, un inconnu des médias que la démarche aurait été la même. Elle a sans doute aussi une visée thérapeutique.

    Cela faisait longtemps que la rumeur circulait : on disait que la victime avait un patronyme connu et que l’auteur présumé des faits était une personnalité très connue, mais jusqu’à maintenant, aucun nom n’avait été jeté en pâture dans l’espace public. Même le livre lui-même de Camille Kouchner a été imprimé dans le plus grand secret.

    Il est donc hélas nécessaire d’évoquer la vie privée de quelques personnalités pour bien comprendre la situation. Du côté d’Olivier Duhamel, il est d’abord l’époux, entre 1974 et 1981, de Leïla Murat, une cousine de la première épouse de l’ancien ministre gaulliste récemment disparu Albin Chalandon. Il fut ensuite l’époux d’Évelyne Pisier à partir de 1984 (et jusqu’à la mort de cette dernière en 2017). Eux deux ont adopté deux enfants chiliens, une fille en 1987 et un garçon en 1989. Neuf ans les ont séparés dans ce dernier mariage.

    Car parlons maintenant d’Évelyne Pisier (1941-2017), probablement une personne centrale dans le drame familial. Elle fut une politologue et a publié quelques romans. Elle a eu une vie assez exceptionnelle. Fille de Georges Pisier (1910-1986), un haut fonctionnaire maurrassien favorable à Pétain, elle est née à Hanoi pendant la guerre, a été interné dans un camp japonais après l’invasion japonaise de l’Indochine puis a vécu à Nouméa et enfin à Nice. Elle a un petit frère mathématicien, spécialiste de l’analyse fonctionnelle et membre de l’Académie des sciences, et une petite sœur très connue puisqu’il s’agit de l’actrice Marie-France Pisier (1944-2011).

    Les relations sont nombreuses dans cette famille puisque Marie-France Pisier a été l’épouse, entre 1973 et 1979, de l’avocat et futur ministre Georges Kiejman, puis, partir de 2009 (compagne à partir de 1984), d’un homme d’affaires important, filleul de Jean-Luc Lagardère. Bien qu’ayant déjà tourné dans plusieurs films, Marie-France Pisier étudiait encore les sciences politiques (comme sa sœur Évelyne) en mai 1968 et a aidé Daniel Cohn-Bendit à quitter la France avant d’être expulsé (et elle aurait eu une liaison avec lui). La mort de Marie-France Pisier il y a près de dix ans reste encore un mystère, elle est probablement tombée dans sa piscine après une crise cardiaque (mais certains ont parlé de suicide car elle se savait malade).

    Évelyne Pisier a eu une vie très romanesque. Militante féministe, elle s’est rendue à Cuba (où elle rencontra Bernard Kouchner) en 1964 pendant quatre ans et a eu une liaison avec Fidel Castro. En 1968, elle est rentrée en France et elle a passé sa thèse de doctorat en droit public à Assas en 1970 (son directeur de thèse était Georges Lavau). Elle fut agrégée de droit public et de sciences politiques (parmi les premières femmes ainsi) et enseignait à l’IEP Paris. Elle a été l’épouse du médecin très célèbre et futur ministre Bernard Kouchner de 1970 à 1984, enfin d’Olivier Duhamel de 1987 à sa disparition, comme écrit plus haut. Proche des milieux socialistes, elle fut nommée par Jack Lang, alors Ministre de la Culture, directrice du Livre et de la Lecture à son ministère, de 1989 à 1993. Ensuite, elle fut nommée professeur émérite à la Sorbonne.

    Les parents d’Évelyne Pisier, qui se sont mariés et ont divorcé deux fois, ont eu tous les deux une fin douloureuse : le père Georges s’est suicidé en 1986 et la mère Paula s’est suicidée en 1988, probablement effondrée par sa maladie. Ces dates sont évidemment importantes, voir plus loin.

    Terminons rapidement les présentations par le dernier morceau du puzzle, Bernard Kouchner. Militant communiste dans les années 1960 (quand il avait dans les 20 ans), il est gastro-entérologue, a cofondé Médecins sans frontières et Médecins du monde, puis s’est rapproché du parti socialiste et a initié beaucoup d’actions humanitaires (on l’appelle « sac de riz »). Onze années ministre (pas loin d’un record), et très grande popularité (sans traduction électorale).

    D’abord grâce aux socialistes puis comme ministre d’ouverture, Bernard Kouchner a été membre de nombreux gouvernements : à l’Insertion sociale du 23 mai 1988 au 28 juin 1988 (gouvernement de Michel Rocard), à l’Action humanitaire du 28 juin 1988 au 4 avril 1992 (gouvernements de Michel Rocard et Édith Cresson), à la Santé et à l’Action humanitaire du 4 avril 1992 au 30 mars 1993 (gouvernement de Pierre Bérégovoy), puis à la Santé du 4 juin 1997 au 7 juillet 1999 et du 6 février 2001 au 6 mai 2002 (gouvernement de Lionel Jospin), enfin, le bâton de maréchal, accordé par Nicolas Sarkozy, Ministre des Affaires étrangères et européennes du 18 mai 2007 au 13 novembre 2010 (gouvernements de François Fillon). Il fut aussi élu député européen sur la liste de Michel Rocard entre juin 1994 et juin 1997 (où il est devenu ministre) et il fut par ailleurs nommé Haut représentant spécial de l’ONU au Kosovo du 15 juillet 1999 au 15 janvier 2001. Précisons enfin qu’il a toujours échoué, dans les années 1980 et 1990, dans ses tentatives de se faire élire député sur son propre nom dans une circonscription.

    Sur le plan personnel, Bernard Kouchner a été le compagnon d’Évelyne Pisier comme dit plus haut, puis, à partir du début des années 1980, de la très célèbre journaliste Christine Ockrent (par ailleurs ancienne directrice générale de l’Audiovisuel extérieur de la France, devenu France Médias Monde), fille du directeur de cabinet du Premier Ministre belge Paul-Henri Spaak, l’un des Pères de l’Europe. La rupture entre Bernard Kouchner et Évelyne Pisier est intervenue à la fin des années 1970, Évelyne ayant eu marre des missions humanitaires de son mari : « Je venais de passer quelques années avec un héros, Fidel Castro, et j’en avais marre des héros. ». Ils ont eu néanmoins dans les années 1970 trois enfants, un garçon, puis deux (faux) jumeaux, une fille et un garçon. Je n’indiquerai qu’un seul prénom pour respecter l’intimité de la vie privée des deux autres. La fille s’appelle Camille et est celle qui a révélé le scandale. Pour terminer les présentations, Bernard Kouchner et Christine Ockrent ont eu également un garçon dans les années 1980 (qui est journaliste).

    Après des études au lycée Henri-IV et au lycée Fénelon, Camille Kouchner (45 ans) a soutenu sa thèse de doctorat en droit privé en 2004 (le directeur de thèse était Antoine Lyon-Caen). Elle est maintenant universitaire d’abord à Amiens puis à Paris et avocate.en droit social. Olivier Duhamel, son beau-père, fut son principal « père » fonctionnel, car son vrai père, Bernard Kouchner, était trop occupé par ses fonctions ministérielles. Pour Camille Kouchner, Olivier Duhamel était le « beau-père idéal » : « Il m’encourageait pour tout. Il me portait, me rassurait, me donnait confiance. ».

    En 1988, Camille Kouchner et son frère jumeau avaient 13 ans. Cette date est cruciale puisqu’elle survient quelques semaines et deux ans après le suicide de leurs grands-parents et que c’est la date où elle a appris la liaison qu’avait Olivier Duhamel avec son frère jumeau.

    Sur France Inter le 5 janvier 2021, la journaliste Ilana Moryoussef, ancienne correspondante à Moscou, a tenté de décrire l’ambiance familiale de l’époque : « Il y a toute une société d’esprits brillants et libres, l’élite de la gauche intellectuelle, qui se pressent tous les étés autour de la piscine, dans la vaste propriété d’Olivier Duhamel, à Sanary, dans le Var. C’est la famille élargie, celle qu’on se choisit. Un milieu où tout peut se dire, à condition d’argumenter. Où les enfants sont considérés à l’égal des adultes. Où tout tourne autour de la figure solaire de la mère, Évelyne Pisier, professeure de droit respectée et icône féministe. ».

    Ce fut le frère de Camille Kouchner qui l’informa en 1988 que leur beau-père venait le voir régulièrement la nuit en cachette. Cette liaison secrète est devenue un secret de famille. Le silence est devenu une chape de plomb et surtout de culpabilité. À la question du frère : « C’est mal, tu crois ? », la réponse de la sœur adolescente fut rapide : « Ben non, il nous apprend, c’est tout. On n’est pas coincés ! ». Promesse de silence. Dans leur esprit, tout ce que faisait Olivier Duhamel était forcément pour leur bien.

    Le secret a préservé la mère, Évelyne, qui, touchée par le suicide de ses parents, a eu des penchants pour l’alcool. Ce ne fut que plus tard, adulte, que le frère abusé a parlé à sa mère, pour éviter une répétition avec les plus jeunes de la demi-fratrie. La mère a alors défendu son mari en assurant ses regrets ou en dédramatisant les faits (« Ton frère n’a jamais été forcé. », etc.).

    Dans cette histoire, au-delà des faits eux-mêmes, les deux pires choses furent : d’une part, la loi du silence et surtout le sentiment de culpabilité de Camille Kouchner qui s’en veut de ne pas avoir arrêté ces abus et même de les avoir encouragés en pensant que c’était bien ; d‘autre part, l’immense silence, encore aujourd’hui, de tous les amis de la famille qui ont fini par le savoir et qui n’ont jamais rien dit, et qui doivent être nombreux puisque la propriété varoise d’Olivier Duhamel était leur point de ralliement. Seule Marie-France Pisier, la tante, a été choquée et a demandé à sa sœur de quitter Olivier Duhamel. Elle est morte brouillée avec Évelyne qui refusait la séparation. Le livre de Camille Kouchner est ainsi dédié à sa tante.

    Probablement qu’une action judiciaire aurait peu de chance d’aboutir à une condamnation, puisque le frère abusé a eu 18 ans en 1993, c’est-à-dire il y a plus de 27 ans, et il me semble que dans les deux cas (si les actes étaient qualifiés de viol ou seulement d’abus sexuel), il y aurait prescription.

    En effet, il semblerait qu’il y ait prescription dans les deux cas de figure, viol ou abus sexuel, tous les deux « commis par un ascendant légitime naturel ou adoptif ou toute personne ayant autorité sur la victime ». Viol : aujourd’hui prescrit au bout de trente ans après la majorité (loi n°2018-703 du 3 août 2018), mais pour les victimes nées avant le 3 août 1980, c’est la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 (article 72) qui s’applique avec une prescription de seulement de vingt ans après la majorité (par la non rétroactivité des lois). Abus sexuel commis sur moins de 15 ans : aujourd’hui prescrit au bout de vingt ans après la majorité (loi n°98-468 du 17 juin 1998), mais pour les victimes nées avant le 17 juin 1977, c’est la loi n°95-116 du 4 février 1995 qui s’applique, prescription de seulement trois ans après la majorité.

    Ce scandale, comme on le voit, n’éclate pas dans une simple famille recomposée ordinaire, elle éclate dans un milieu très branché politiquement qui risque d’éclabousser de très nombreuses personnes, plutôt à gauche. D’un point de vue politique, cela n’aura probablement pas beaucoup de conséquence puisque la gauche a déjà explosé depuis 2016, mais d’un point de vue sociétale, ce sera certainement un nouveau point de référence pour en finir avec tous les crimes et délits sexuels passés sous le silence des alcôves familiales. Il y aura un avant et un après les révélations de Camille Kouchner. Et cela, il faut s’en réjouir et remercier la parole de Camille Kouchner. Au nom de toutes les victimes.

    Source : Le blog de Sylvain Rakotoarison (05 janvier 2021)

    Tags : Olivier Dyhamel, Camille Kouchner, Evelyne Pisier, Bernard Kouchner,

  • Pourquoi l’affaire Duhamel plonge-t-elle Sciences Po dans la tourmente ?

    Pourquoi l’affaire Duhamel, suite aux révélations de Camille Kouchner, dans son livre « La Familia grande » paru au Seuil, plonge-t-elle Science Po, cet établissement prestigieux, dans la tourmente ?

    Depuis les révélations du livre de Camille Kouchner, « La Familia grande », paru au Seuil, le 5 janvier 2021, Sciences Po Paris, l’une des plus prestigieuses grandes écoles françaises, est dans la tourmente. Le livre accuse d’inceste le politologue et constitutionnalise Olivier Duhamel, qui y occupait depuis plusieurs décennies une place centrale, en étant notamment président de la Fondation nationale des sciences politiques. Pourquoi et comment l’affaire Duhamel interroge-t-elle le fonctionnement et la gouvernance de cet établissement de renom ?

    Guillaume Erner reçoit Jérôme Lefilliâtre, grand reporter au quotidien Libération, il enquête sur l’affaire Duhamel.

    Vous pouvez écouter l’interview en intégralité en cliquant sur le player en haut à gauche de cette page.

    Source : France Culture, 12 jan 2021

    Tags : Olivier Duhamel, Bernard Kouchner, Camille Kouchner, Evelyne Pisier,