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  • Algérie / Le bonheur n’a pas de nationalité (Edito du Quotidien d’Oran)

    par Abdou BENABBOU


    On s’accroche souvent à la manie de nous comparer à tel pays ou à tel autre sans en connaître leurs travers cachés ni le contenu de leurs caves voilées. On ne fait cas que de ce que nous laissent entrevoir les petites fenêtres pour nous inciter à bercer par les images des cartes postales que l’on distille à escient. Partout, et c’est encore plus vrai tout près de chez nous, la misère comme dit la boutade usitée barre la route.

    Pourtant, la réalité est déroutante. De plus en plus de ressortissants de pays voisins font des pieds et des mains pour venir travailler en Algérie. Il ne s’agit pas, il va de soi, d’investisseurs cossus en prospection pour fructifier des richesses avérées, mais de culs-terreux d’un genre particulier désespérés à la recherche de n’importe quel moyen pour le sauvetage de leurs vies et disposés à embrasser les aventures du risque assuré. Quitte à plonger dans les ténèbres de la clandestinité.

    Les uns ont quelques notions de maçonnerie ou de plafonnerie, d’autres n’ont que la disponibilité de leur jeunesse et de leurs bras pour n’importe laquelle des corvées. Le reste constitué de jeunes femmes et d’enfants et de bébés ont bravé le désert parce qu’on les a convaincus que les Algériens étaient des samaritains et qu’ils excellaient à semer l’argent. Point d’hommes à la couleur d’ébène sur des kilomètres à la ronde pour confirmer la vraie teneur d’une mendicité élaborée pour suggérer la pitié.

    Le bonheur n’a pas de nationalité et affirmer que tel peuple ou tel autre est heureux et baigne dans la félicité est une contre-vérité.

    On jalouse souvent les mêmes pays pour les façades de vie choisies projetées sans que l’on sache que le vernis projeté dans nos têtes est factice et qu’une fois gratté on découvre des drames innommables. Curieux et parfois mortel paradoxe que de découvrir que les démocraties marinées à toutes les sauces exigent un prix très lourd à payer et qu’elles aussi ont tendance comme le totalitarisme à écraser l’individu.

    Le problème permanent est que les individus n’ont pas des aspirations communes pour qu’elles soient retenues comme celles de toute la société. Et l’on revient toujours au même débat aérien: emploi, logement, éducation, santé, justice et liberté. D’accord ! La difficulté est de savoir comment et quoi en faire. Alors nous nous limitons aux comparaisons sans réelles consistances en insistant avec légèreté sur de trompeuses façades.

    Le Quotidien d’Oran, 2 mai 2021

    Etiquettes : Algérie, bonheur, travail,

  • les Algériens moins heureux que les Libyens, selon un récent sondage commandé par l’ONU

    Comment mesurer le bonheur d’un individu ? Aucun psychologue, psychiatre ou philosophe ne pourra répondre à cette question. Toutefois, à l’échelle d’un pays, il existe une série de critères qui peuvent indiquer si une communauté, une société, un peuple, vivent bien ou non. Cette année, un rapport attribue à l’Algérie une place peu reluisante dans le concert des nations.

    L’Algérie occupe la 109e place dans le classement du Rapport mondial du bonheur, loin derrière la Libye qui y occupe le 80e rang, en dépit de 10 ans de guerre civile, le Maroc (97e) et devant la Tunisie (122e) ainsi que la Mauritanie (134e).

    Sans surprise, la Finlande, l’Islande, la Suisse et d’autres pays d’Europe occidentale forment le gratin des gens heureux alors que l’Afghanistan, terre de malheur par excellence, ferme le tableau.

    Qu’est-ce qui justifie cette posture de l’Algérie qui est le plus vaste territoire de son continent par la superficie, le dixième dans le monde ; l’un des plus grands producteurs d’hydrocarbures, dont la position géographique en fait un trait d’union entre l’Europe et l’Afrique ?

    L’enquête publiée périodiquement par le Réseau des solutions de développement durable des Nations Unies combine plusieurs critères pour établir son palmarès. Le sondage interroge ainsi le panel sélectionné sur la solidarité sociale dont bénéficient les individus en cas de problème, sur les libertés individuelles et sur les choix de vie, sur le degré de la corruption qui sévit dans la société ainsi que sur son état général de santé.

    Concernant ce dernier point « la santé mentale a été l’une des victimes à la fois de la pandémie et des confinements qui en ont résulté », indique le rapport. « Lorsque la pandémie a frappé, il y a eu un déclin important et immédiat de la santé mentale dans de nombreux pays du monde ».

    En Algérie, l’accès aux soins est gratuit mais la qualité du système de santé est souvent décriée par les usagers. D’ailleurs, les hauts responsables et leurs familles se soignent en règle générale à l’étranger puisque les établissements hospitaliers en Algérie ne répondent pas aux standards internationaux. Même les cliniques privées du pays dont les coûts de prise en charge ne sont pas à la portée du commun des mortels n’attirent pas les malades aisés. Ceux-ci préfèrent aller en Tunisie, en Turquie ou, pour les plus fortunés, en Europe.

    Un pays conservateur

    Pour ce qui est des libertés individuelles, l’Algérie demeure un pays très conservateur où les droits de la personne ne comptent pas s’ils contreviennent un tant soit peu aux valeurs dominantes dans la société. Que ce soit en matière de religion, de traditions ou de comportements en public, la société et parfois même l’Etat répriment les attitudes rebelles à l’ordre établi. Hormis l’ibadisme dont se réclame une infime minorité d’Algériens, l’uniformisation de la croyance spirituelle ne tolère pas non plus les autres rites de l’islam, tels que le chiisme ou certaines confréries qui ne cadrent pas avec le dogme malékite.

    La corruption comme frein au bonheur

    Sur un plan profane, les libertés politiques et d’expression sont sévèrement contrôlées. Critiquer publiquement un corps constitué, le président de la république ou certaines institutions de l’Etat est un acte qui peut mener son auteur en prison. En 2020, plusieurs activistes du Hirak ou des réseaux sociaux ont été embastillés, sous de lourdes charges pour leurs opinions politiques et parfois pour des traits d’humour postés sur Facebook.

    Le Rapport mondial du bonheur considère, par ailleurs, la propagation de la corruption dans un pays comme un frein au bonheur. Cette question remue justement en profondeur les entrailles des Algériens. Dès le début du mouvement populaire du 22 février 2019, le slogan « klitou leblad ya essarakine (vous avez dévoré le pays, espèce de voleurs) » était très mobilisateur. Quelques mois plus tard, deux chefs de gouvernement, plusieurs ministres et hauts fonctionnaires, des élus locaux ainsi que hauts gradés de l’armée ont été confondus de diverses forfaitures et malversations. Jusqu’à aujourd’hui, et en dépit d’une contestation de plus de deux ans dans tout le pays, la moralisation de la vie publique n’est pas encore clairement établie.

    L’autre malheur qui découle, en fait, de la situation précédente, c’est la bureaucratie décourageante, embolique et si monstrueuse qui règne dans l’administration. L’ogre avale d’un tenant l’enthousiasme des plus tenaces et réduit en cendres les volontés les plus déterminées. Si dans les pays sérieux, l’administration fonctionne sur la base de règlement, ici elle obéit aux humeurs, aux intérêts et, parfois, au diktat des préposés, du grand responsable, au planton en passant par le guichetier.

    Égoïsme, avarice, méfiance, indifférence

    En matière de solidarité et de soutien, il existe certes un filet social et quelques associations caritatives qui viennent en aide aux plus fragiles. On est cependant loin des mesures qui peuvent garder un minimum de dignité à ceux qui ne peuvent plus se prendre en charge par eux-mêmes. L’explosion du nombre de mendiants et celui des malades mentaux dans les rues, le recours aux psychotropes chez les jeunes, la hausse de la petite délinquance témoigne du relâchement du tissu social. Des familles entières dorment à la belle étoile, des femmes seules, souvent âgées, n’ont plus de toits sur la tête ni de soutien, sont livrées à elles-mêmes et ne vivent que d’expédients. Les effets de la crise sanitaire vont augmenter le nombre des nécessiteux sans que l’Etat ne puisse les prendre en charge à cause de la baisse de ses revenus.

    Même l’entraide qui était une des qualités de la société algérienne est en train de disparaître au profit d’un égoïsme exacerbé. Confrontés à la cherté galopante de la vie sans que les salaires ne soient adaptés à cette évolution, l’avarice, la méfiance et l’indifférence deviennent des valeurs répandues.

    En résumé, l’Algérie n’est certes pas un enfer qui détruit la chair et les os de ses habitants, mais elle mérite amplement sa 109e place du classement du rapport sur le bonheur récemment publié.

    Mohamed Badaoui

    La Nation, 21 mars 2021

    Tags : Algérie, Libye, Maroc, bonheur, classement,

  • “Pays heureux” : l’Algérie 109e dans le monde et 13e en Afrique

    La Finlande reste le pays le plus heureux du monde, et ce, pour la 4e année consécutive dans un classement du bonheur, publié vendredi 19 mars, dominé par les pays européens où l’impact du Covid-19 a été très couteux pour les populations. En Afrique, la Libye (80e dans le monde) est en première position en dépit de la guerre et la crise politique.

    L’Algérie est à la 109e place dans le monde et à la 13e place en Afrique distancée notamment par le Niger (96e), l’un des pays les plus pauvres dans le monde, le Congo Brazzaville (83e), la Cote d’Ivoire (85e) le Cameroun (91e) le Sénégal (92e) le Ghana 93e) la Gambie (98e) le Bénin (99e) la Guinée (102e), l’Afrique du Sud (103e) et le Maroc (106e). Le Nigeria est classée à la 116e place, la Tunisie pointe à la 122e place tandis que l’Egypte se trouve à la 132e place.

    Dans les pays arabes, le Bahreïn arrive en tête (22e) devançant ses voisins du Golfe, les Emirats arabes unis (25e), l’Arabie Saoudite (26e) et le Koweït (47e).
    L’Inde est la grande puissance la moins bien classée, à une peu enviable 139e place alors que la Russie est à la 76e place devant la Chine, la 2e puissance économique dans le monde qui arrive à la 84e place.

    L’Europe domine très largement le top 10 du classement, qui inclut également le Danemark (2e), la Suisse (3e) et l’Islande (4e), la Hollande (5e) Norvège (6e), la Suède (7e), le Luxembourg (9e). Les Etats-Unis sont à la 19e place, et la France à la 21e place juste derrière la Belgique.

    Plusieurs facteurs peuvent expliquer la première place de la Finlande, comme son très haut niveau de vie, ses services publics performants, ses vastes étendues de nature ou ses efforts pour réduire les inégalités. Avec une note de 7,84 sur 10, le pays nordique devance le Danemark, la Suisse, l’Islande et les Pays-Bas, nouveaux venus dans le top 5 de la dernière édition du «World Happiness Report», une étude annuelle sponsorisée par les Nations Unies.

    Le classement “World happiness report” réalisé depuis 2012 sous l’égide de l’ONU, compare 150 pays selon plusieurs critères, comme le PIB, des indices de solidarité, de liberté individuelle, de corruption, ou encore le propre ressenti des habitants pour aboutir à une note sur dix points. Pour cette édition le rapport évalue la situation des pays de 2018 à 2020.

    Le Jeune Indépendant, 20 mars 2021

    Tags : Algérie, bonheur, World happiness report,