Révélations du New York Times sur les arrivée massives de migrants sur le territoire espagnol, démontrent que le Maroc impose un véritable chantage à l’Espagne concernant le Sahara occidental.
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"Le Maroc se met au dessus des lois internationales"
Depuis l’Espagne où il est établi, le militant sahraoui, Bella El Kanti, commente la crise diplomatique entre la péninsule ibérique au royaume du Maroc, dans un entretien, hier, à la chaîne 3 de la Radio algérienne. « Le reportage du New York Times relève très bien une pratique de la politique étrangère d’un État qui se met au dessus des lois internationales », s’indigne ce défenseur des droits de l’Homme. Bella El Kanti va plus loin. Il qualifie la politique étrangère menée par le Maroc de celle d’un « État voyou.Lâcher des milliers d’innocents, y compris des enfants en bas âge, ses propres citoyens et ceux d’autres pays pour aller envahir un territoire espagnol, il n’y a qu’un État irresponsable comme le Maroc, qui vit hors du temps, qui peut le faire », dénonce-t-il. « Les intensions du Maroc envers l’Espagne sont hostiles et belliqueuses », juge le militant sahraoui. En référence à la Marche verte envoyée par Hassan II en 1975 au Sahara, Bella El Kanti, comme de nombreux autres observateurs, qualifie l’arrivée massive de migrants en Espagne, orchestrée par le Maroc de véritable « Marche bleue » sur Ceuta.Le chantage de – la Marche bleue – sur CeutaSelon lui, ceci est la réaction du Maro face au refus de l’Espagne d’appliquer les décisions de l’ex-Président américain Donald Trump concernant le Sahara occidental. Ce qui a fini par encore plus « irriter le Maroc » selon lui, c’est l’hospitalisation, en Espagne, du président de la République arabe sahraoui démocratique (RASD), Ibrahim Ghali, pour des soins après sa contamination au Covid-19. « Le chantage n’est pas admis, surtout lorsqu’il touche à la souveraineté des États, chose que le Maroc pratique vis-àvi de l’Espagne mais aussi de son voisinage immédiat », prévient Bella El Kanti qui estime que « la crise est réelle et profonde entre l’Espagne et le Maroc qui a commis l’irréparable. » Il en veut pour preuve, les propos de Pedro Sanchez.« Il est inadmissible de s’attaquer à nos frontières », a prévenu le président du gouvernement espagnol. « Cette fois-ci, l’Union européenne s’est rangé du côté de l’Espagne », relève Bella El Kanti qui appelle l’Europe à assumer, une fois pour toutes, une « politique de bon voisinage avec les pays de la rive sud de la Méditerranée et à participer à la résolution de dernière colonie en Afrique, le Sahara occidental ».Etiquettes : Maroc, Sahara Occidental, Ceuta, Espagne, chantage à l’émigration, -
Maroc – Espagne : l’arme migratoire
L’arrivée de 8 500 migrants à Ceuta, l’enclave espagnole au Nord du Maroc, a fourni à Rabat un argument supplémentaire dans sa crise diplomatique avec Madrid.
C’est encore une fois une photo, celle d’un bébé, un bébé de 2 mois sauvé de justesse de la noyade par un garde civil espagnol, qui a ému l’opinion, et rappelé, aux portes de l’Europe, le drame incessant des migrants.
Enclave espagnole
Depuis lundi, les relations entre le Maroc et l’Espagne sont en crise ouverte. Une crise diplomatique, aux racines multiples, où des jeunes gens, des femmes, beaucoup d’enfants, ont été utilisés, manipulés par Rabat pour signifier son mécontentement et faire pression sur Madrid.L’arme migratoire avait été brandie, on s’en souvient, par la Turquie d’Erdogan, mais là ce sont pour la plupart des Marocains, encouragés par le soudain laxisme des gardes-frontière, qui tentaient d’échapper à la misère pour rejoindre l’enclave espagnole de Ceuta, pour eux la première étape vers l’eldorado européen. 8.500 personnes se sont ainsi précipitées, dans le chaos, plus de la moitié ont été refoulés.
L’épisode illustre la volatilité de la géopolitique migratoire, et aussi la nouvelle géographie des flux – le Maroc, l’Algérie et la Tunisie fournissent aujourd’hui le plus gros des candidats au départ, en sus du transit venu d’Afrique sub-saharienne. L’Espagne est devenue le premier pays européen de débarquement, avant l’Italie et la Grèce.
Entre Rabat et Madrid pèsent aussi les relents d’une longue histoire, celle d’un empire colonial espagnol réduit aujourd’hui à deux enclaves en territoire marocain, et d’un conflit jamais résolu sur le statut du Sahara occidental, revendiqué à la fois par Rabat et par le Front Polisario.
Pourquoi le Maroc est-il ainsi passé à l’offensive, alors qu’il est depuis longtemps un allié stratégique majeur pour l’Espagne et pour l’Union Européenne dans la lutte contre l’immigration clandestine ? Comment le royaume, qui mène une politique africaine active, fait-il face aux pressions migratoires venues du sud du continent ?
La crise actuelle peut-elle se résoudre uniquement au niveau bilatéral ? Quelles réactions à Bruxelles, où le chantier d’un pacte migratoire commun paraît au point mort ?
Christine Ockrent reçoit Virginie Guiraudon, directrice de recherches CNRS au Centre d’études européennes et comparées de Sciences Po Paris
Mehdi Alioua, sociologue enseignant chercheur à Sciences Po Rabat de l’Université Internationale de Rabat
Gerald Knaus, président-fondateur du think-tank spécialisé dans la défense des libertés fondamentales, « European stability initiative » (ESI)
Benoît Pellistrandi, historien, spécialiste de l’Espagne contemporaine, professeur en classes préparatoires au Lycée Condorcet à Paris, auteur de « Les relations internationales de 1800 à 1871 » (Armand Collin, 5 mai 2021)
France Culture, 22 mai 2021
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