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  • Lamamra qualifie les propos de Macron sur l’Algérie de “grave erreur”

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    Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ramtane Lamamra, a qualifié jeudi les propos du président français Emmanuel Macron sur l’Algérie de “grave erreur”, affirmant que l’Algérie rejette toute ingérence dans ses affaires internes.
    “Nous avons répondu (aux propos de Macron NDLR ) comme nous devrions répondre très fortement et très fermement”, a déclaré le chef de la diplomatie algérienne à l’agence de presse turque “Anadolu” en marge de la troisième réunion Afrique-Italie.
    Il s’agit, d’une question qui concerne le peuple algérien, seul qualifié à s’élever contre ces propos hostiles et “défendre collectivement notre indépendance et notre souveraineté face à ce que nous considérons comme une grave erreur de la part des autorités française”, précise le ministre.” Nous faisons comprendre à tous les partenaires et en particulier la France que l’Algérie ne peut pas compromettre sa dignité pour la coopération et l’Algérie ne peut accepter aucune interférence dans ses affaires internes”, souligne M. Lamamra, reconnaissant que l’Histoire de l’Algérie avec la France est ” complexe et difficile”.
    Le ministre estime , par ailleurs, que “quelle que soit la crise que traverse les relations algéro-françaises, elle n’aura pas d’impact sur les relations de l’Algérie avec des pays frères comme la Turquie”.
    Algérie54, 07/10/2021
  • Jusqu’où peut aller l’escalade diplomatique entre la Paris et Alger?

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    Alors que l’Algérie s’apprête à célébrer le soixantième anniversaire de son indépendance, les tensions avec la France sont à leur paroxysme. Samedi, Alger a rappelé son ambassadeur en France pour « consultation » et fermé son espace aérien aux avions militaires français. Décisions suite à la publication d’un article dans le Monde relatant les propos d’Emmanuel Macron particulièrement critiques à l’égard du gouvernement algérien.

    Avant cela, l’Algérie avait déjà convoqué l’ambassadeur de France à Alger après que la France a décidé de réduire le nombre de visas accordés aux ressortissants algériens. L’escalade diplomatique peut-elle se poursuivre entre les deux nations ? 20 minutes font le point.

    DE QUOI L’ALGÉRIE REPROCHE-T-ELLE À LA FRANCE ?

    Tout d’abord, il y avait cette histoire de visa. Accusant la Tunisie, le Maroc et l’Algérie de ne pas accueillir leurs ressortissants à leur retour de France, le gouvernement français a décidé il y a une semaine de durcir l’octroi de visas pour les personnes venant de ces trois pays du Maghreb. La question du grand nombre d’Algériens traversant la frontière n’est pas quelque chose qui enchante le pouvoir algérien « car elle reflète l’échec du projet économique et social du gouvernement », explique Hasni Abidi, directeur du centre d’études. de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (CERMAM) en Suisse. «Mais Alger accuse la France de gérer seule la question migratoire, sans consulter les autorités algériennes.»

    Le ton est vraiment monté d’un cran côté algérien samedi après la publication d’un article dans Le Monde relayant les propos d’Emmanuel Macron. Lors de sa rencontre avec la troisième génération d’enfants de harkis, le président de la République aurait affirmé que l’Algérie, après son indépendance en 1962, s’était construite sur « une rente mémorielle », entretenue par « le système politique. militaire « . Le chef de l’Etat aurait évoqué « une histoire officielle », selon lui, « complètement réécrite », qui « n’est pas fondée sur des vérités » mais sur « un discours qui repose sur une haine de la France ». Enfin, il aurait remis en cause l’existence d’une nation algérienne avant la colonisation française.

    LES SANCTIONS PRISES PAR L’ALGÉRIE SONT-ELLES INQUIÉTANTES POUR LA FRANCE À CE STADE ?

    Dans l’affaire des visas, le gouvernement algérien a convoqué François Gouyette, l’ambassadeur de France à Alger, pour lui notifier « une protestation formelle ». Une décision qui n’a pas semblé affoler Paris. « Cela veut dire que les choses bougent, que le dialogue s’ouvre et qu’on va enfin pouvoir ouvrir cette émission de laissez-passer consulaires », a même lancé, optimiste, Marlène Schiappa, interrogée sur BFMTV.

    Concernant les décisions d’Alger de samedi, c’est une autre histoire. « Le rappel d’un ambassadeur n’est pas une rupture des relations diplomatiques, mais une manière de signifier un désaccord », tempère Hasni Abidi. Le politologue estime en revanche que la fermeture de son espace aérien aux militaires français est « une décision aux conséquences plus graves » pour la France. « Cela entrave la stratégie française au Sahel et constitue un handicap pour la politique étrangère de la France. « 

    DANS QUEL CONTEXTE SE DÉROULENT LES RÉACTIONS ALGÉRIENNES ?

    Pour comprendre la réaction du gouvernement algérien, il faut aussi la situer dans le contexte géopolitique actuel. « L’Algérie a récemment subi de nombreuses provocations, analyse un politologue spécialiste du Maghreb, préférant garder l’anonymat. Il y a eu celles lancées par l’ambassadeur du Maroc aux Nations unies pour réclamer l’autonomie de la Kabylie.

    A cela s’ajoute la déclaration du ministre israélien des Affaires étrangères, qui a précisé qu’à la demande du Maroc, Israël interviendrait militairement en Algérie. Enfin, la situation intérieure algérienne est aujourd’hui très difficile après la crise sanitaire et les incendies de masse dans le nord du pays, dont certains ont été qualifiés de criminogènes. Les derniers mots d’Emmanuel Macron sont la goutte d’eau qui a fait sortir l’Algérie de son silence.

    C’est aussi la fierté du gouvernement qui est touchée dans cette affaire. « Le président Abdelmadjid Tebboune a fait preuve d’une certaine proximité avec Emmanuel Macron. Il a parlé avec enthousiasme de lui, notamment pour dire qu’il était le seul président à être allé aussi loin dans le mémorial entre les deux pays, souligne Hasni Abidi. Il y a donc une déception de la part de la présidence. Cependant, le gouvernement algérien est très sensible à son image. Pour l’expert, ne pas réagir aux propos du président français aurait été perçu comme un acte de faiblesse par son opinion publique.

    POURQUOI LE MAROC ET LA TUNISIE SONT-ILS RESTÉS PLUS EN RETRAIT DANS L’AFFAIRE DES VISAS ?

    Le Maroc a qualifié la décision de la France d’ »injustifiée ». La Tunisie, en pleine crise politique, n’a pas réagi officiellement. Les relations de la France avec les deux autres pays du Maghreb ne sont pas toujours au beau fixe mais elles n’ont globalement rien à voir avec les difficultés diplomatiques – plus ou moins importantes selon les moments – avec l’Algérie. A Alger, la question des relations avec la France reste un enjeu de politique intérieure.

    « La réaction algérienne est plus musclée que celle des pays voisins car le pays considère qu’il n’a aucune responsabilité. L’Algérie dispose également de plusieurs leviers de pression. Le pays n’est donc pas dans l’attente ou la modération des pays voisins », argumente Hasni Abidi.

    L’ALGÉRIE A-T-ELLE LES MOYENS D’ALLER PLUS LOIN ?

    En l’occurrence, l’Algérie n’a pas encore joué toutes ses cartes. Parmi ses principaux leviers de pression : ses exportations de gaz et de pétrole. « Une dégradation des relations entre les deux pays pourrait avoir un impact sur le renouvellement de certains accords économiques entre la France et l’Algérie. Ce serait malheureux pour Paris, car Alger pourrait décider de réduire les importations françaises et la présence d’entreprises françaises sur le sol algérien », estime Hasni Abidi. « Il ne faut pas oublier non plus la diaspora algérienne en France qui a le droit de vote et pourrait sanctionner certains partis lors des élections », ajoute anonymement le spécialiste du Maghreb.

    ALLONS-NOUS VERS UNE ESCALADE DIPLOMATIQUE ?

    A priori non, selon Hasni Abidi qui estime toujours que l’Algérie « ne peut pas se passer d’un partenaire économique aussi important que la France ». Les deux pays devraient donc opter pour une accalmie. « Pas une amélioration, ni un retour à la situation d’avant cette crise, mais vers un gel des relations », estime l’expert.
    En effet, il semble peu probable qu’Alger revienne sur sa décision sans un geste fort de Paris.

    Pourtant, « il semble difficile pour le président Macron de revenir sur ses déclarations en pleine campagne électorale », juge le directeur du CERMAM. Un mea culpa de sa part serait dénoncé par les partis de droite, mais s’il continue d’alimenter cette tension, une partie de la population française pourrait aussi se dire que depuis qu’il est au pouvoir, il a multiplié les conflits après le Turquie, Mali, Australie ou États-Unis ».

    Paris beacon, 05/10/2021

  • Une affaire franco-française

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    Commençons par une première mise au point. Les Algériennes et les Algériens connaissent la nature du pouvoir qui dirige leur pays. Ils n’ont pas attendu qu’Emmanuel Macron, frappé peut-être par un soudain accès de lucidité, s’exprime de manière non-diplomatique à son sujet. Les banderoles et les slogans du Hirak n’ont jamais cessé de le montrer. Alors, certes, il est parmi nous quelques flagorneurs et plumitifs caudataires qui disent ici ou ailleurs le contraire et prétendent que tout va bien dans le meilleur des pays mais soyons sérieux : l’affaire est entendue depuis longtemps. L’Algérie a besoin de renouveau et son régime politique doit absolument changer. «Le slogan «YatnahawGaâ» exprime une volonté de rupture avec les institutions actuelles, dans leur composante, leur performance, leurs pratiques et leurs conséquences» déclarait il y a près d’un an l’initiative de concertation autonome «Nida 22». C’est un constat qui demeure valide.

    Venons-en maintenant au caquetage macronien à propos de la nation algérienne qui, selon lui, n’aurait pas existé avant 1830. Un dérapage (voulu ?) qui a fait l’unanimité contre lui en Algérie et qui fera peut-être comprendre au président français qu’être opposé au régime ne signifie pas que l’on adhère à ce révisionnisme ambiant concernant l’histoire de notre pays. Autant le préciser tout de suite : cette chronique n’entend pas argumenter en réponse à cette provocation. Des historiens algériens, dont Hosni Kitouni, se sont exprimés là-dessus (1) et, de toutes les façons, cela ne changera rien au problème. De plus, comme le dit la désormais fameuse «loi» de Brandolini, «la quantité d’énergie nécessaire pour réfuter les idioties est largement supérieure à celle nécessaire pour les produire.» Ce «principe d’asymétrie des idioties» implique donc que l’on soit économe de ses efforts et que l’on ne cherche pas à convaincre celui qui refusera de l’être.

    De fait, osons ici une petite remarque. Comme nombre d’élites françaises, qu’elles soient politiques, universitaires ou intellectuelles, Emmanuel Macron ne peut s’empêcher d’expliquer aux Algériens ce qu’ils sont ou ce qu’ils ont été. Après plusieurs décennies de pratique du métier de journalisme, je n’ai jamais vu ça ailleurs qu’en France, pays où l’on vous explique d’un ton docte votre propre histoire, votre propre sociologie tout en balayant d’un geste, entendu ou agacé, vos remarques ou réserves. C’est ainsi. Chercher à changer cet état de fait risque d’être épuisant.

    Ce qu’il y a d’intéressant concernant cette sortie présidentielle sur la nation algérienne, c’est qu’elle reprend le discours colonialiste de la Terra nullius, locution latine qui signifie «territoire sans maître.» Comprendre que la France avait le «droit» de coloniser l’Algérie puisqu’elle était sans maître ni… nation. Mais attention, il ne faut surtout pas croire que cette pensée est majoritaire. Nombre de Français n’ont aucune sympathie pour la période coloniale et savent à quoi s’en tenir. Mais l’air du temps est ce qu’il est et les lignes bougent. Il n’échappe à personne que la conjoncture est marquée par la forte résurgence du plaidoyer pro-colonial lequel s’impose dans la campagne électorale pour la prochaine élection présidentielle.

    Hasard du calendrier, cette dernière coïncidera avec le soixantième anniversaire de la fin de la guerre d’indépendance avec son lot de commémorations : les tueries du 17 octobre 1961, les morts du métro Charonne à Paris, le 8 février 1962, les négociations d’Evian, le cessez-le-feu du 19 mars 1962 sans oublier les attentats, en Algérie comme en France, de l’Organisation armée secrète (OAS). A chaque fois, ce n’est pas d’Algérie que viendra la «surenchère mémorielle» mais bien de France où l’on est tenu – même si l’on professe un discours critique à l’égard de la colonisation et de ce que fut la guerre d’Algérie – de mettre systématiquement les indépendantistes algériens en accusation. Cinq minutes pour les enfumés du Dahra, et cinq minutes pour Pélissier. Cinq minutes pour les victimes d’Aussarès et de Papon, cinq minutes pour les «exactions» du FLN. C’est la règle qui s’impose désormais. Tendez-bien l’oreille ou lisez bien la majorité de ce qui se publiera, le message sera toujours de la même teneur. Dans le meilleur des cas, ce sera : les Algériens avaient raison de vouloir être indépendants mais, le FLN a tout de même…

    A quoi tient cette mise à distance égale ? La réponse est simple. La colonisation est encore un poids à expier. Parce que le rapport fantasmé au passé, la nostalgie pour la puissance de l’empire et, certainement, la mauvaise conscience et la culpabilité, empêchent l’expiation et donc la délivrance définitive. Ce à quoi s’ajoutent les considérations de politique intérieure qui rendent impossibles une reconnaissance définitive des torts et la présentation d’excuses au peuple algérien. Personne ne niera que les déclarations françaises à propos de l’Algérie sont toujours du pain béni pour le régime d’Alger car cela offre de belles occasions pour faire diversion et appeler à resserrer les rangs. Mais il faut revenir au point de départ. J’affirme ici que c’est en France que l’obsession du passé algérien est la plus prenante et c’est d’autant plus complexe que cela n’est pas assumé. Pourtant, n’importe quel politicien français le confirmera. S’exprimer à propos de l’Algérie, c’est d’abord prendre des risques sur le plan de la politique intérieure. C’est fâcher des électeurs. C’est prendre le risque de se mettre à dos les uns ou les autres ou même tout le monde : rapatriés, enfants de rapatriés, harkis et leurs enfants, français issus de l’immigration maghrébine, anciens appelés du contingent, ressortissants originaires des protectorats maghrébins ou des colonies d’Afrique subsaharienne, etc.

    Donc, on se tait, on élude, on tergiverse, on n’ose pas réagir quand l’extrême-droite fait dans la surenchère ou bien alors on l’accompagne. Mieux, on la devance. Bref, tout cela est d’abord une affaire franco-française qui pourrait même passer inaperçue en Algérie si nous avions les moyens d’avoir nos propres débats, si nos éditeurs étaient aidés et encouragés par l’Etat à publier et faire œuvre de mémoire, si la liberté de parole était consacrée au lieu d’être entravée et si, enfin, nos historiens avaient un droit d’accès à toutes les archives nationales. Au lieu de cela, nous sommes toujours en position défensive et nous nous engageons dans des polémiques mémorielles qui, en réalité et pour l’essentiel, sont une affaire hexagonale. Ce qui se joue en France n’est rien d’autre qu’un réveil puissant de mémoires algériennes difficilement réconciliables. Cela concerne les Algériens. Mais de loin. Et il sera vain d’espérer un apaisement mémoriel entre Alger et Paris tant que la France n’aura pas trouvé un consensus majoritaire sur son passé algérien.

    (1) «Macron sous-estime la mémoire blessée des Algériens»,

    par Paris : Akram Belkaïd

    El-Watan, 4 octobre 2021.

  • Le Président français maintient ses propos

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    Emmanuel Macron s’est de nouveau exprimé, hier, sur les sujets qui ont suscité la colère d’Alger sans revenir sur ses déclarations.

    Abla Chérif – Alger (Le Soir) – Lorsque la journaliste de France Inter qui l’interviewait ce mardi lui demande s’il maintient ses propos rapportés par le journal Le Monde, le chef de l’État français ne marque pas d’hésitation avant de répondre. Les mots prononcés alors sont plus soutenus mais ne changent rien au fond de ses premières déclarations. Pas de démenti, pas de regrets, « nous sommes, dit-il, dans une crispation que nous avons déjà connue au printemps 2020. L’Algérie avait déjà rappelé son ambassadeur suite à un reportage audiovisuel du même journaliste qui avait décrit ce qui se passait.» « J’ai le plus grand respect pour le peuple algérien et j’entretiens des relations vraiment cordiales avec le Président Tebboune », ajoute Macron sans toutefois revenir sur les propos ciblant les dirigeants algériens. La journaliste à laquelle il fait face les lui rappelle pourtant et les qualifie d’extrêmement durs : « un système fatigué », « un système qui s’est bâti sur une rente mémorielle basée sur la haine » et cette question « existait-il une nation algérienne avant la colonisation française ? ».

    Le Président français ne rebondit pas et axe son intervention sur le «travail de mémoire» entrepris. Ces mots sonnent comme un reproche sans lien cette fois avec le dossier de l’immigration évoqué quelques jours plus tôt comme étant le nœud des tensions. « Nous avons enclenché un travail, le rapport demandé à Benjamin Stora, la commission que nous avons installée sur la base de ce travail, on se dit des choses qui ne sont pas agréables avec nous-mêmes, j’ai été le plus franc possible avec la question des harkis et je continuerai ce travail, dit-il.

    Quand la question m’a été posée sur l’accueil du rapport de Bemjamin Stora en Algérie j’ai été obligé de répondre, de dire la vérité, on en a parlé avec le Président Tebboune, c’est quelqu’un en qui j’ai confiance. Il a eu des mots amicaux et proportionnés mais Benjamin Stora a eu des mots extrêmement durs, beaucoup de gens l’ont insulté, il a même été menacé, on ne peut pas faire comme si ce n’était rien.»

    Il poursuit : « Mon souhait est qu’il y ait un apaisement, je pense que c’est mieux de se parler pour avancer, il y a sans doute des désaccords, nous avons trop de compatriotes dont la vie est mêlée à l’Algérie pour faire comme si de rien n’était, il y a trop de Françaises et de Français qui sont les petits-enfants de harkis, pieds-noirs, d’appelés pour ne pas embrasser cette histoire et en quelque sorte reconnaître ces mémoires et de leur permettre de cohabiter, il y aura immanquablement d’autres tensions, mais je pense que mon devoir est de faire cheminer ce travail.»
    L’intervention est close. Même prononcés en termes plus diplomatiques que ceux qui avaient caractérisé sa rencontre avec de jeunes binationaux jeudi dernier à l’Élysée, ils semblent loin de s’inscrire dans une volonté d’apaisement sincère.

    Emmanuel Macron maintient ses propos, ses critiques et prévoit, au contraire, d’autres tensions. Il devra aussi les assumer, à en croire la réaction d’Alger qui a déjà fermé son espace aérien aux avions militaires français qui participent, entre autres, à l’opération Barkhane au Mali.

    Abla Chérif

    Le Soir d’Algérie, 06/10/2021

  • El Djazaïr – De la barbarie du «système colonial»

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    par Ammar Koroghli*
    Il est constant qu’à la veille de toutes les élections présidentielles françaises, outre la récurrente thématique de l’immigration , éternelle bouc-émissaire, l’Histoire fait également irruption pour certains candidats qui espèrent engranger les voix d’une partie de l’électorat sensible à la démagogie. Ici, rappel des faits d’Histoire démontrant les méfaits de ce qu’il a été convenu d’appeler «le système colonial».
    Force donc est de revenir à un réel débat sur les réalités historiques significatives qui exigent plus que des «excuses» et appelant une juste réparation («excuses» que d’autres pays ont officiellement formulées : Canada, Australie…) ; ainsi : restitution du Trésor d’Alger ayant servi à l’industrialisation de la France et aujourd’hui évalué à plusieurs milliards d’euros, restitution des archives non accessibles aux chercheurs et encore moins au commun des mortels (notamment celles des périodes coloniale et ottomane, indemnisation de centaines de milliers de familles d’Algériens ayant subi le génocide du système colonial de tout un peuple (enfumades, napalm, tortures…) et des Algériens du Sud suite aux essais nucléaires de l’ancienne puissance coloniale…
    Ainsi, selon une légende tenace, le «coup de l’éventail» datant de 1827 a été le coup d’envoi du blocus maritime d’Alger par la marine royale française. L’aventure coloniale avait pour objectif de consolider l’influence française dans le bassin occidental de la Méditerranée. Le 5 juillet, les Français occupèrent Alger ; le même jour, le dey Hussein signa l’acte de capitulation. Premières conséquences : l’effondrement du pouvoir ottoman, le pillage des caisses de l’État, l’expulsion des janissaires d’Alger vers l’Asie Mineure et l’accaparement par la France de toutes les terres du Beylik. Le 1er décembre 1830, Louis-Philippe nomma le duc de Rovigo chef du haut-commandement en Algérie pour mettre en œuvre la colonisation dont la violence est notoire. Après avoir battu Abd-El-Kader, le général Desmichels signa avec ce dernier un traité qui reconnut l’autorité de l’émir sur l’Oranie et permit à la France de s’installer dans les villes du littoral. Officiellement, le 22 juillet, la Régence d’Alger devint «Possession française d’Afrique du Nord». Abd-El-Kader battit le général Trézel dans les marais de la Macta, près de Mascara. Il put également encercler la ville d’Oran durant une quarantaine de jours. Arrivé en renfort de métropole, le général Bugeaud infligea une défaite à celui-ci. Courant janvier 1836, le général Clauzel s’empara de Mascara et de Tlemcen. Le traité de la Tafna fut signé le 30 mai 1837 entre le général Bugeaud et l’émir Abd El Kader. Ce dernier établit sa capitale à Mascara. Le comte de Damrémont, devenu gouverneur général de l’Algérie en 1837, se mit en rapport avec le bey de Constantine pour obtenir une Convention similaire se heurtant au rejet de Ahmed Bey. Courant octobre 1837, ledit gouverneur général se mit en marche sur Constantine fort de dix mille hommes. Après sept jours de siège au cours desquels le comte de Damrémont fut tué, la ville fut conquise.
    En 1839, l’armée française ayant entrepris d’annexer un territoire situé dans la chaîne des Bibans, (chaîne de montagnes du Nord d’El DjazaÏr), l’Emir Abdel El Kader considéra qu’il s’agissait d’une rupture du traité de Tafna. Il reprit alors sa résistance ; il pénétra dans la Mitidja et y détruisit la plupart des fermes des colons français. Il constitua une armée régulière (dix mille hommes, dit-on) qui reçut leur instruction des Turcs et de déserteurs européens. Il aurait même disposé d’une fabrique d’armes à Miliana et d’une fonderie de canon à Tlemcen. Il reçut également des armes provenant de l’Europe. Nommé gouverneur général de l’Algérie française en février 1841, Bugeaud arriva à Alger avec l’idée de la conquête totale de l’Algérie. Par l’entremise des «bureaux arabes», il recruta des autochtones tout en encourageant l’établissement de colonies.
    Il a pu dire alors : «Le but n’est pas de courir après les Arabes, ce qui est fort inutile ; il est d’empêcher les Arabes de semer, de récolter, de pâturer, […] de jouir de leurs champs […]. Allez tous les ans leur brûler leurs récoltes […], ou bien exterminez-les jusqu’au dernier.» Ou encore : «Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, imitez Cavaignac aux Sbéhas !
    Fumez-les à outrance comme des renards». De fait, en mai 1841, l’armée française occupa Tagdemt (situé à Tiaret qui fut capitale des Rustumides), puis Mascara pratiquant la razzia et détruisant récoltes et silos à grains. Il semble que l’Emir Abd-El-Kader fit en vain appel au sultan ottoman. C’est ainsi que, courant mai 1843, le duc d’Aumale prit par surprise la «smala» d’Abd-El-Kader faisant trois mille prisonniers (smala : «réunion de tentes abritant les familles et les équipages d’un chef de clan arabe qui l’accompagnent lors de ses déplacements»).
    En février 1844, la France mit en place une Direction des Affaires Arabes pour contrôler les bureaux arabes locaux dans les provinces d’Alger, d’Oran et de Constantine avec le dessein de disposer de contacts avec la population autochtone. Fin mai 1844, des troupes marocaines prirent d’assaut les troupes françaises installées dans l’Oranais, mais furent repoussées par le général Lamoricière. Réfugié au Maroc, l’Emir Abd-El-Kader a pu décider le sultan Moulay Abd-El-Rahman d’envoyer une armée à la frontière algéro-marocaine provoquant ainsi des incidents qui, après d’infructueux pourparlers, décida le général Bugeaud de repousser l’armée du sultan marocain qui fut défaite (bataille d’Isly). L’armée marocaine dut se replier en direction de Taza, obligeant le sultan à interdire son territoire à Abd-El-Kader qui finit par se rendre aux spahis (à l’origine, les spahis furent un corps de cavalerie traditionnel du dey d’Alger, d’inspiration ottomane ; lors de la conquête de l’Algérie par la France, ils furent intégrés à l’Armée d’Afrique qui dépendait de l’armée de terre française). L’Emir Abd-El-Kader fut d’abord placé en résidence surveillée durant quatre ans en France (il fut libéré par Napoléon III), puis résida en Syrie jusqu’à la fin de sa vie. C’est ainsi que la Constitution française de 1848 fit de l’Algérie une partie intégrante du territoire français, notamment par l’institution de trois départements français : Alger, Oran et Constantine, les musulmans et les juifs d’Algérie étant considérés des «sujets français» avec le statut d’ «indigènes». La résistance continua d’être vive en Kabylie et dans l’oasis des Zaatcha dans l’actuelle wilaya de Biskra. Plus tard, la domination française s’étendit à la Petite Kabylie. Jusqu’en juillet 1857, le la résistance continua dans le Djurdjura avec Lalla Fatma N’Soumer.
    Révoltes constantes
    A la veille du début de la conquête française, on estimait la population algérienne à trois millions d’habitants. La violente guerre de conquête, notamment entre 1830 et 1872, explique le déclin démographique de près d’un million de personnes. On évoque également les invasions de sauterelles entre 1866 et 1868, les hivers très rigoureux à la même période (ce qui provoqua une grave disette suivie d’épidémies tel le choléra). Pour les Européens d’alors, cette donnée était bénéfique dès lors qu’elle diminuait le déséquilibre démographique entre les «indigènes» et les colons. Ce, outre que le nombre important de constructions détruites avait pour dessein de gommer l’identité d’El Djazaïr. L’objectif était de détruire matériellement et moralement le peuple algérien. Sous Napoléon III, il fut question d’un «royaume arabe» lié à la France avec celui-ci comme souverain. A la même période, on a estimé que quelques deux cent mille colons, français ou européens, possédaient environ sept cent mille hectares. D’un point de vue législatif, il y eut le sénatus-consulte du 14 juillet 1865 inspiré par le Saint-Simonien Ismaël Urbain, ayant trait au statut personnel et la naturalisation de l’«indigène musulman» et de l’«indigène israélite» (voire à la naturalisation des «étrangers qui justifient de trois années de résidence en Algérie», appelés plus tard «pieds noirs»). Force est de constater qu’en décembre 1866, furent créés des conseils municipaux élus par quatre collèges séparés : français, musulmans, juifs et étrangers européens, les Français disposant des deux tiers des sièges.
    La révolte de 1871 est considérée comme la plus importante insurrection contre le pouvoir colonial français. Ainsi, plus de deux cent cinquante tribus se soulevèrent (environ un tiers de la population de l’Algérie d’alors). Elle fut menée depuis la Kabylie (les Bibans ou Tiggura) par le cheikh El Mokrani, son frère Boumezrag et le cheikh Haddad (chef de la confrérie des Rahmanya). Après cette révolte, plus de cinq cent mille hectares furent confisqués et attribués aux «émigrés hexagonaux» suite à la défaite française de 1870 face à l’Allemagne. C’est ainsi que de 245.000, le nombre des colons aboutit à plus de 750.000 en 1914. A la même date, le nombre des Djazaïris («indigènes») passa de deux millions à cinq millions. Après la chute de Napoléon III, les tenants de la Troisième République préconisèrent une politique d’assimilation, notamment par la francisation des noms et la suppression des coutumes locales. Le 24 octobre 1870, en vertu des décrets du Gouvernement provisoire, le gouvernement militaire en Algérie céda la place à une administration civile. La nationalité française fut accordée aux Juifs d’Algérie (décret Crémieux) qui furent néanmoins soumis à l’antisémitisme des colons. En accordant aux juifs algériens le même statut que les Français d’Algérie, ce décret divisa les autochtones qui continuèrent de vivre dans une condition de misère accentuée par de nombreuses années de sécheresse et de fléaux. Les biens des insurgés Algériens de 1871 furent confisqués. Ainsi, une loi du 21 juin 1871 attribua quelque cent mille hectares de terres en Algérie aux «migrants d’Alsace-Lorraine».
    Et le 26 juillet 1873, fut promulguée la loi Warnier qui eut pour objectif de franciser les terres algériennes. Le 28 juin 1881, fut adopté le code de l’indigénat qui distingua deux catégories de citoyens : les citoyens français et les sujets français («indigènes»). Ces derniers furent soumis au code de l’indigénat qui les priva de leurs libertés et de leurs droits politiques (seul fut conservé le statut personnel, d’origine religieuse ou coutumière).
    Lors de la première guerre mondiale, la France mobilisa les habitants des départements français d’Algérie : Musulmans, Juifs et Européens. C’est ainsi que les tirailleurs et spahis musulmans combattirent avec les zouaves (unités françaises d’infanterie légère) européens et juifs d’Algérie. Il semble que près de 48.000 Algériens furent tués sur les champs de bataille lors de la première Guerre mondiale, ayant été de toutes les grandes batailles de l’armée française (notamment à celle de Verdun). Plus tard, en 1930, la célébration par la France du centenaire de la «prise d’Alger» fut ressentie comme une provocation par la population. Le projet de loi Blum-Viollette (Front populaire) pour l’attribution de droits politiques à certains musulmans sera rejeté à l’unanimité lors du congrès d’Alger du 14 janvier 1937. Au cours de la seconde guerre mondiale, plus de 120.000 Algériens furent recrutés par l’armée française. Avec l’occupation allemande (1940-1944), plusieurs centaines de musulmans («Nord-Africains») installés en France furent engagés pour constituer ce qui a été appelé la «Légion nord-africaine». De trois millions en 1880, la population d’El Djazaïr passa à près de dix millions en 1960 pour environ un million d’Européens.
    Il semble qu’à la veille du déclenchement de la guerre d’indépendance, «certaines villes sont à majorité musulmane comme Sétif (85 %), Constantine (72 %) ou Mostaganem (67 %)». L’essentiel de la population musulmane était pauvre, vivant sur les terres les moins fertiles. La production agricole augmenta peu entre 1871 et 1948 par rapport au nombre d’habitants, El Djazaïr devant alors importer des produits alimentaires. En 1955, le chômage était important ; un million et demi de personnes était sans emploi (la commune d’Alger aurait compté 120 bidonvilles avec 70 000 habitants en 1953). Dans ce cadre, l’Algérie était composée de trois départements, le pouvoir étant représenté par un gouverneur général nommé par Paris. Une Assemblée algérienne fut créée ; elle était composée de deux collèges de 60 représentants chacun : le premier élu par les Européens et l’élite algérienne de l’époque et le second par le «reste de la population algérienne».
    Le Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques en Algérie (MTLD) de Messali Hadj avait alors obtenu une large victoire lors des élections municipales de 1947 ; ce parti devint la cible de la répression des autorités françaises. Il y eut ensuite des fraudes massives lors de l’élection de l’Assemblée algérienne. Il est vrai qu’au début du XXe siècle, les leaders algériens réclamaient alors tantôt le droit à l’égalité, tantôt l’indépendance. C’est ainsi que plusieurs partis furent créés : l’Association des Oulémas musulmans algériens, l’Association de l’Étoile Nord-Africaine, le Parti du Peuple Algérien (PPA), les Amis du Manifeste des Libertés (AML), le Parti communiste algérien (PCA)…
    Le 8 mai 1945, prélude à la révolution
    Le 8 mai 1945, eurent lieu des manifestations d’Algériens dans plusieurs villes de l’Est du pays (notamment à Sétif, Kherrata et Guelma) ; ce, à la suite de la victoire des Alliés sur le régime nazi. A Sétif, la manifestation tourna à l’émeute. La répression par l’armée française fut des plus brutales provoquant la mort de plusieurs centaines de milliers de morts parmi les Algériens. Cette férocité sans nom eut pour conséquence davantage de radicalisation. Certains historiens ont pu estimer que ces massacres furent le début de la guerre d’Algérie en vue de l’indépendance.
    Devant l’inertie des leaders qui continuaient de tergiverser, apparut l’Organisation spéciale (OS) qui eut pour but d’appeler au combat contre le système colonial devenu insupportable. Elle eut pour chefs successifs : Mohamed Belouizdad, Hocine Aït Ahmed et Ahmed Ben Bella. Un Comité révolutionnaire d’unité et d’action (CRUA) fut créé en mars 1954 et le Front de libération nationale (FLN) en octobre 1954. En Algérie, le déclenchement de la guerre de libération nationale est caractérisé comme étant une Révolution (en France, on utilisa le terme de «guerre d’Algérie» après l’avoir désigné comme étant des évènements d’Algérie jusqu’en 1999). L’action armée intervint à l’initiative des «six historiques» : Rabah Bitat, Mostefa Ben Boulaïd, Mourad Didouche, Mohamed Boudiaf, Belkacem Krim et Larbi Ben M’hidi lors de la réunion des 22 cadres du CRUA. La Déclaration du 1er novembre 1954 fut émise depuis Tunis par radio.
    La guerre d’Algérie débuta le 1er novembre 1954 avec quelques soixante-dix attentats dans différents endroits d’Algérie. La réponse de la France ne se fit pas attendre ; des mesures policières (arrestations de militants du MTLD), militaires (augmentation des effectifs) et politiques (projet de réformes présenté le 5 janvier 1955). François Mitterrand a pu alors déclarer : «L’Algérie, c’est la France». Il déclencha la répression dans les Aurès ; ce qui n’empêcha pas à l’Armée de libération nationale (ALN) de se développer.
    De quelques cinq cent hommes, elle augmenta ses effectifs en quelques mois pour atteindre quinze mille et plus tard plus de quatre cent mille à travers toute l’Algérie. Les massacres du Constantinois des 20 et 21 août 1955, notamment à Skikda (alors Philippeville) constituèrent une étape supplémentaire de la guerre. La même année, l’affaire algérienne fut inscrite à l’ordre du jour à l’Assemblée générale de l’ONU, tandis que plusieurs chefs de l’insurrection de l’armée furent soit emprisonnés, soit tués (Mostefa Ben Boulaïd, Zighoud Youcef…). Des intellectuels français aidèrent le FLN, à l’instar du réseau Jeanson, en collectant et en transportant fonds et faux papiers.
    Le 22 octobre 1956, eut lieu le détournement de l’avion qui transportait la Délégation des principaux dirigeants du FLN : Mohamed Khider, Mohamed Boudiaf, Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella, Mostefa Lacheraf.
    Ce fut là un acte caractérisé de piraterie aérienne. De même, il y eut l’opération d’intoxication de la bleuite (1957-1958) menée par les services secrets français ; le colonel Amirouche Aït Hamouda mit alors en place des purges internes (Wilaya III) qui firent de très nombreux morts dans différentes wilayas. Plus tard, le France déclencha de grandes opérations (plan Challe 1959-1961), les maquis ayant été sans doute affaiblis par ces purges internes.
    Ce plan amoindrit davantage les maquis. Arrivé au pouvoir, Charles de Gaulle engagea une lutte contre les éléments de l’Armée de libération nationale algérienne (ALN). Il semblerait que le plan Challe ait entraîné, en quelques mois, la suppression de la moitié du potentiel militaire des wilayas. Les colonels Amirouche Aït Hamouda et Si El Haouès furent tués lors d’un accrochage avec les éléments de l’Armée française. En 1959, à sa sortie de prison, Messali Hadj fut assigné à résidence.
    En France, les Algériens organisèrent des manifestations en faveur du FLN. En 1960, le général de Gaulle annonça la tenue du référendum pour l’indépendance de l’Algérie ; certains généraux français tentèrent en vain un putsch en avril 1961. Il n’est pas anodin de rappeler qu’en février 1960, la France coloniale a procédé à un essai nucléaire de grande ampleur dans la région de Reggane (sud algérien). Avec 17 essais nucléaires opérés par la France entre les années 1960 à 1966, il semble que 42.000 Algériens aient trouvé la mort ; des milliers d’autres ont été irradiés et sujets à des pathologies dont notamment des cancers de la peau.
    Le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) fut proclamé avec à sa tête Ferhat Abbas. Le colonel Houari Boumediene était alors le chef d’état-major de l’Armée de libération nationale. En 1960, l’ONU annonça le droit à l’autodétermination du peuple algérien. Des pourparlers avec le GPRA furent organisés pour aboutir aux accords d’Évian (18 mars 1962). Ce qui ne mit pas fin aux hostilités puisqu’il y eut une période de violence accrue, notamment de la part de l’OAS. Près d’un million de Français (Pieds-noirs, Harkis et Juifs) quitta l’Algérie entre avril et juin 1962. Le référendum d’autodétermination (1er juillet 1962) confirma les accords d’Évian avec 99,72 % des suffrages exprimés.
    Le bilan de cette guerre, en termes de pertes humaines, continue de soulever des controverses des deux côtés de la Méditerranée. Si El Djazaïr se considère avec fierté comme le pays du million et demi de chahids, en France circulent d’autres chiffres qui oscillent entre 250.000 à 300.000 morts. Outre cette comptabilité macabre, bien d’autres sujets continuent de constituer un contentieux entre les deux pays. Il est vrai aussi que la guerre fratricide entre le FLN et le MNA (mouvement de Messali Hadj) fit quelques centaines de morts tant en France qu’en Algérie (notamment à Melouza), outre le nombre de harkis tués après le cessez-le-feu. Ce, sans oublier les luttes pour le pouvoir : d’un côté, le pouvoir civil avec le GPRA présidé par Ferhat Abbas appuyé par les wilayas III et IV, et de l’autre côté le pouvoir militaire (le «clan d’Oujda») et l’«armée des frontières») avec à sa tête Houari Boumediene.
    A l’indépendance, El Djazaïr est sortie exsangue des suites de la guerre, des conflits internes et du départ massif des Européens ayant servi d’encadrement durant la période coloniale. L’armée française évacua ses dernières bases en Algérie (enclaves autorisées par les accords d’Évian) : Reggane et Bechar (1967), Mers el-Kébir (1968), Bousfer (1970) et B2-Namous (1978). Ainsi, nonobstant l’indépendance, la France continua d’avoir des bases en Algérie.
    Le GPRA de Ferhat Abbas fut évincé par l’ALN au profit d’Ahmed Ben Bella qui fut ainsi le premier président de l’Algérie indépendante du système colonial français. Le FLN devint parti unique et prôna un socialisme à l’algérienne marqué par le populisme et le culte de la personnalité. Et, depuis le coup d’Etat du 19 juin 1965 à ce jour, El Djazaïr ne cesse de s’interroger sur son destin à travers l’Histoire, y compris jusqu’au Hirak dont on peut encore espérer un antidote au pouvoir politique marqué par l’échec de la gérontocratie.
    Qu’émerge enfin une nouvelle élite de jeunes, organisés et conscients des enjeux et des défis à relever par El Djazaïr, au-delà des «excuses» de l’ancienne puissance coloniale ! Les gesticulations électoralistes outre-méditérranée ne sauraient faire oublier la barbarie du «système colonial».
    *Avocat-auteur
  • Le Pen-Zemmour-Macron: Même discours raciste et même rhétorique

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    « La France officielle a besoin de décoloniser sa »propre histoire », afin de réparer, en urgence, la faillite mémorielle qui est malheureusement intergénérationnelle chez certains nombres d’acteurs de la vie politique française parfois aux niveaux les plus élevés », a indiqué mardi le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ramtane Lamamra depuis Bamako.

    Ces propos résument à eux, seuls, le désarroi dans lequel se débat la France officielle qui n’arrive plus ni à gérer son présent ni à se départir de la tare de son passé colonial. La crise des sous-marins a montré que le statut de la France, dans le camp des pays occidentaux est celui du comparse tout juste bon à applaudir la prestation du chef et à vivoter sous son ombre. Le quai d’Orsay et l’Elysée avaient bien tenté de ruer dans les brancards, agitant même la menace de se retirer de l’Otan. Il avait suffi d’un entretien Macron- Biden, pour voir Paris se soumettre à la loi du plus fort, faisant profil bas face aux USA et ses alliés de l’Otan.

    Et pour comprendre la gêne de la France devant la puissance des USA et ses alliés, il faut revenir aux propos, menaçants selon certains analystes, du secrétaire général du « pacte Atlantique », qui a mis en garde les Européens contre la tentation de créer une alliance parallèle à l’Otan.

    Jens Stoltenberg, a critiqué mardi à Washington les pays désireux de renforcer la défense européenne, soulignant que créer des structures concurrentes de l’Otan risquait d’affaiblir et de diviser l’Alliance atlantique. Au moment où l’Union européenne se réunissait en Slovénie. C’est là un sérieux rappel à l’ordre de la France qui n’avait pas hésité, après le déclenchement de la crise des sous-marins de menacer de se retirer de l’Otan et de créer une alliance européenne en mesure de le supplanter. Et ces échecs de la France sur le plan international ont poussé les personnalités politiques, aussi bien de la droite que la gauche, à remuer leur passé colonial pour trouver les ingrédients pour épicer leur pré-campagne électorale.

    Ce jeu, aux relents nauséabonds tant il est teinté de crimes contre l’humanité, a été utilisé par le président Macron qui s’est brûlé les doigts et par les prétendants à sa succession que sont les deux nostalgiques du passé colonial de la France Eric Zemmour et Marine Le Pen.

    Fidèle à la pensée de son géniteur, ancien officier tortionnaire du contingent français en Algérie, Marine Le pen qu’elle soit sous la bannière du Front national, ou du rassemblement national, excelle dans l’art de remuer dans la nostalgie de la France coloniale. Il faut reconnaitre à Eric Zemmour, l’art d’avoir su réveiller les vieux démons, chez ceux qui affirmaient que la France, creuset de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, a su dépasser les blessures de son passé colonial mais qui rêvent toujours de garder sous leur botte les peuples de leurs anciennes colonies.

    Le Pen, Macron, Zemmour, Dupont Aignan ou encore Guillaume Bigot ou encore toute la cohorte d’intellectuels encore coincés à l’heure de la France de Papa doivent tous comprendre que leur rêve de grandeur et de puissance est révolu. Ils doivent comprendre une fois pour toutes que l’Afrique n’est plus leur chasse gardée et que l’Algérie a gagné son indépendance au prix d’un lourd tribut.

    La France officielle, qu’elle soit de droite ou d’extrême droite ne doit plus se fier aux résultats des sondages. Les Français, du moins ceux des générations post indépendance d’Algérie, ont d‘autres besoins et d ‘autres aspirations. Leur agiter le passé colonial de leur pays, ne les fera pas changer d’intention de vote. Macron risque de vivre l’affront qu’avait subi Sarkozy qui avait échoué dans sa tentative de se faire réélire. Il doit trouver d’autres atouts et d’autres arguments pour gagner cette bataille au lieu de tenter de faire grossir les rangs de l’extrême droite par un discours à la limite raciste.

    Slimane B.

    Le Courrier d’Algérie, 07/10/2021

  • Algérie : Les déclarations de Macron sont très belliqueuses

    Algérie : Les déclarations de Macron sont très belliqueuses

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    Les déclarations du Président français Emmanuel Macron sur l’Algérie sont «extrêmement belliqueuses» et relèvent d’une «méconnaissance des règles de la diplomatie et de géopolitique», a affirmé, mardi dernier à Alger, le chercheur et analyste politique Ahmed Bensaâda. Intervenant sur les ondes de la Radio nationale, cet analyste a estimé que les «propos non démentis que plusieurs sources françaises ont attribué nommément» au président Emmanuel Macron sont «extrêmement belliqueuses et gratuites». Ces déclarations «relèvent d’une «méconnaissance des règles de la diplomatie et de géopolitique», a expliqué ce chercheur qui intervenait depuis Montréal.

    Énumérant les «bourdes» du Président français à l’international, Ahmed Bensaâda a soutenu, à ce titre, que «la France n’a pas un président de carrure internationale». Néanmoins, il a estimé que «ce qu’il ( Macron) a fait n’est pas innocent». Il en veut pour preuve la dernière sortie médiatique du Président français. «Il ne s’est pas excusé, il a tourné en rond pour justifier ses déclarations», a-t-il fait remarquer. Qualifiant ces déclarations d’«insensées», ce chercheur a affirmé que les propos de Macron sur l’Algérie «épousent les idées d’organisations classées par l’Algérie comme terroristes» et «aident le Makhzen».

    Selon Ahmed Bensaâda, les propos tenus par Macron sur l’Algérie ont «plusieurs buts». Le premier objectif est d’ordre «politique» avec l’approche de la présidentielle française. «Il cherche à glaner des voix à l’extrême droite française», a-t-il expliqué.

    Lire aussi : Algérie: Il faut une mémoire sur toute la colonisation française

    Le deuxième but a trait à «la perte de vitesse de l’armée française au Mali», alors que le troisième but ne peut s’expliquer que par «une collusion avec le Maroc» dans un contexte régional de tension avec l’Algérie qui avait décidé, le 24 août dernier, de rompre ses relations diplomatiques avec ce pays voisin. «Le Maroc est protégé par la France», a-t-il rappelé. Le quatrième but, a-t-il poursuivi, a trait «au revers essuyé par la France dans l’affaire de vente de sous-marins à l’Australie». Il a évoqué, à ce propos, «le déclin de la France», soulignant que «75% des Français le pensent d’ailleurs.

    Horizons, 07/10/2021

    Lire aussi : Macron zappe les massacres du 8 mai 1945 en Algérie

    Lire aussi : Stora admet la difficulté de la réconciliation et la mémoire

  • Les propos de Macron sont « provocants »

    Les propos de Macron sont « provocants »

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    L’Algérie, touchée dans son amour-propre, a dénoncé fermement les dernières déclarations de Macron à son encontre, les considérant comme étant une atteinte inacceptable à la mémoire de plus de 5 millions de résistants tués par la France coloniale…

    La polémique suite aux propos d’Emmanuel Macron un certain mercredi 15 février 2017 à l’occasion de son déplacement en Algérie, a changé de camp. Le candidat à l’élection présidentielle, se souvienton, y qualifie en effet la colonisation de « crime contre l’humanité ». C’est un « crime, c’est un crime contre l’humanité, c’est une vraie barbarie. Et ça fait partie de ce passé que nous devons regarder en face, en présentant nos excuses à l’égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes. » Des propos qui ont immédiatement déclenché une volée de réactions de la droite et de l’extrême droite, les jugeant indignes d’un candidat à la présidence de la République.

    Aujourd’hui, comme par « hasard », à la veille de la présidentielle en France, le vent semble en sens inverse suite à de nouveaux propos du même acteur, accusant les autorités algériennes d’alimenter une « rancune » contre la France. Il a également contesté l’existence d’une nation algérienne avant l’arrivée de la colonisation française en 1830, s’interrogeant « est-ce qu’il y avait une nation algérienne avant la colonisation française ? » Macron a prétendu qu’il « y avait une colonisation avant la colonisation française » de l’Algérie, allusion faite à la présence ottomane dans le pays entre 1514 et 1830.

    Etle Président français de poursuivre ses allégations : « Moi, je suis fasciné de voir la capacité qu’a la Turquie à faire totalement oublier le rôle qu’elle a joué en Algérie et la domination qu’elle y a exercée. Et d’expliquer qu’on est les seuls colonisateurs, c’est génial. Les Algériens y croient. » L’Algérie, touchée dans son amour-propre, a dénoncé, ces « déclarations, à son encontre, les considérant comme étant une atteinte inacceptable à la mémoire de plus de 5 millions de résistants tués par la France coloniale ».

    C’est ce qui ressort d’ailleurs des positions des partis politiques, en l’occurence le Front El Moustakbal, le RND, le FLN, El Bina et Hamas par le biais de leurs chefs de groupes parlementaires, invités au forum de Beur tv, en présence du secrétaire général par intérim de l’Organisation nationale des moudjahidines, en réaction aux déclarations de Macron, qualifiées « d’offensantes », au sujet de l’époque coloniale et de la situation intérieure en Algérie.

    Les invités du forum de Beur tv ont déclaré unanimement que « les déclarations de Macron constituent une atteinte inacceptable à la mémoire de 5 millions 630 mille martyrs ayant consenti le sacrifice suprême, à travers une résistance courageuse contre la colonisation française, entre les années 1830 et 1962 ».

    Les innombrables « crimes de la France coloniale et le génocide contre le peuple algérien, qui n’est pas reconnu par la France, ne peuvent faire l’objet de manoeuvres offensantes », poursuivent-ils. Et d’ajouter que « l’Algérie rejette catégoriquement toute ingérence dans ses affaires intérieures ». Ils qualifient une fois encore les déclarations de Macron de « provocantes », indiquant qu’elles « remettent les relations algéro-françaises à la case départ et dévoilent l’ampleur de la fragilité des relations bilatérales émaillées de plusieurs dossiers empoisonnés ».

    Depuis un certain temps, les relations politiques et diplomatiques entre l’Algérie et la France traversent une étape alternant tension et froid, et marquées par une hémorragie économique des entreprises françaises qui ont quitté le pays après le refus des autorités algériennes de renouveler leurs contrats.

    Par : IDIR AMMOUR

    Le Midi Libre, 07/10/2021

  • Lamamra à Macron : La France a besoin de décoloniser son histoire

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    En visite officielle à Bamako mardi soir, le ministre des Affaires étrangères Ramtan Lamamra est revenu sur les propos d’Emmanuel Macron sur l’Algérie en les qualifiant de “faillite mémorielle” appelant la France officielle à décoloniser son histoire.

    « Nos partenaires étrangers ont besoin de décoloniser leur propre histoire », a déclaré le chef de la diplomatie algérienne. « Ils ont besoin de se libérer de certaines attitudes, de certains comportements, de certaines visions qui sont intrinsèquement liées à la logique incohérente portée par la prétendue mission civilisatrice de l’Occident, qui a été la couverture idéologique utilisée pour essayer de faire passer le crime contre l’humanité qu’a été la colonisation de l’Algérie, la colonisation du Mali et la colonisation de tant de peuples africains », a-t-il poursuivi.

    Cette « prétendue mission civilisatrice » a été la « couverture idéologique pour essayer de faire passer le crime contre l’humanité qui a été la colonisation de l’Algérie, du Mali et de tant de peuples africains », a encore rappelé Lamamra.

    Le ministre des Affaires étrangères a jugé « prioritaire » cette décolonisation qui « doit s’opérer aujourd’hui ». Les propos de Macron « trahissent » une « faillite mémorielle », a-t-il dit. « Cette faillite mémorielle est malheureusement intergénérationnelle chez un certain nombre d’acteurs de la vie politique française, parfois aux niveaux les plus élevés », a regretté le chef de la diplomatie algérienne.

    Cette « faillite mémorielle » pousse les relations de la « France officielle avec certains de nos pays dans des situations de crise malencontreuses », a regretté encore Lamamra qui donne sa vision de la relation franco-algérienne, et au-delà des rapports que la France doit entretenir avec ses ex-colonies africaines.

    Ramtane Lamamra a estimé que « l’assainissement » des relations avec la France passe par un « respect mutuel inconditionnel, un respect de notre souveraineté, de notre indépendance de décision », de « l’acceptation d’un partenariat sur une base de stricte égalité ».

    Le ministre des Affaires étrangères a souligné la base sur laquelle les relations franco-algériennes doivent être construites. « Nous savons que dans les relations avec le partenaire français, il y a une logique de donner et de recevoir, il n’y a pas de cadeaux, il n’y a pas d’offrandes à sens unique, ce qu’il y a, ce sont des intérêts stratégiques et économiques qui ne peuvent durer et être promus que dans le respect mutuel et l’équilibre des intérêts », a fait observert Ramtane Lamamra.

    Le chef de la diplomatie algérienne a rappelé au président français et à ceux qui veulent « entendre la voix de la raison », que l’Afrique est non seulement le berceau de l’humanité, mais elle est « également le tombeau du colonialisme et du racisme. »

    « La lutte de libération nationale du peuple algérien a contribué à l’accélération de cette histoire, et nous sommes très fiers de cette contribution à l’émancipation des peuples africains. Le destin de l’Algérie et le destin du Mali sont étroitement liés », a encore souligné Lamamra, qui a appelé la France à « décoloniser » sa « propre histoire ».

    Mardi, le président de la République française, Emmanuel Macron, a souhaité « un apaisement » sur le sujet mémoriel entre la France et l’Algérie, et dit avoir des relations « vraiment cordiales » avec le président Abdelmadjid Tebboune, faisant ainsi marche arrière par rapport à ses propos tenus le 30 septembre contre les institutions algériennes.

    « Mon souhait, c’est qu’il y ait un apaisement parce que je pense que c’est mieux de se parler, d’avancer », déclare-t-il dans un entretien ce mardi 5 octobre à la radio France Inter, appelant à « reconnaître toutes ces mémoires » et leur « permettre de cohabiter ». « Ce n’est pas un problème diplomatique, c’est d’abord un problème franco-français », a-t-il aussi estimé.

    Emmanuel Macron a également dit avoir « confiance » en son homologue algérien, Abdelmadjid Tebboune. « J’ai le plus grand respect pour le peuple algérien et j’entretiens des relations vraiment cordiales avec le président Tebboune », a-t-il déclaré, liant les tensions actuelles au travail de mémoire fait en France sur la guerre d’Algérie.

    « Quand la question m’a été posée sur l’accueil du rapport de Benjamin Stora en Algérie, j’ai été obligé de dire la vérité au président Tebboune, on en a parlé et c’est quelqu’un en qui j’ai confiance. Il a eu des mots amicaux et proportionnés. » Mais en Algérie, « beaucoup de gens ont insulté, parfois menacé, Benjamin Stora suite à ce rapport. On ne va pas faire comme si cela n’était rien », a-t-il poursuivi.

    Il estime toutefois que ce travail mémoriel, « c’est d’abord un problème franco-français. On doit continuer à faire ce travail avec beaucoup d’humilité, avec beaucoup de respect ».

    Nassim Mecheri

    Le Jeune indépendant, 07/10/2021

  • France-Algérie. Macron l’historien

    France-Algérie. Macron l’historien

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    Peut-être s’en trouverait-il pour objecter que bien loin d’avoir renoncé aux voix des Algériens de France, au deuxième tour de la présidentielle de 2022, comme cela a été dit hier péremptoirement dans cette chronique, Emmanuel Macron s’assurait d’elles au contraire, en montrant clairement qu’il était pour le hirak et du même coup contempteur du régime algérien. Ce qui aurait été une grande erreur de sa part, c’était de dire du bien des dirigeants algériens, eux tellement affaiblis par le hirak. Il y aurait une sorte de dualité en Algérie, un dipôle politique en quelque sorte, avec d’un côté le pouvoir et de l’autre le hirak, celui-ci étant pour l’heure seulement à l’arrêt, dans l’attente de circonstances favorables pour resurgir plus fort que jamais. Lui-même un révolutionnaire, Macron ne peut être que du côté de ses homologues algériens.

    Cette façon de voir pourrait à la rigueur se défendre s’il s’était contenté de se mêler de nos affaires internes sans jouer en même temps à l’historien. Or il a fait bien plus : il a nié l’existence de la nation algérienne au moment de la conquête française. Il n’est pas évident que cette remise en cause plaise aux hirakistes de France, après tout des Algériens comme les autres. La pire des insultes qu’il est possible de faire à une communauté nationale, c’est de dire qu’elle est la pure création d’une autre

    Pour Macron, en cela d’accord avec le Mak, soit dit en passant, c’est la France qui par ses crimes innombrables contre l’humanité algérienne a créé ex-nihilo la nation algérienne. Un crime contre l’humanité accoucheur d’une nation. Un nazi, s’il s’en trouve, pourrait dire la même chose aujourd’hui aux Israéliens : ce sont nos persécutions, notre solution finale qui vous a donné un pays. Nous sommes vos véritables bienfaiteurs, et vos faiseurs. Vos devriez chanter nos louanges au lieu de nous vilipender sans arrêt.

    L’histoire n’avance-t-elle par ses mauvais côtés ? Le crime est créateur. Il n’y avait pas de nation algérienne, et puis les Français sont venus, qui par le moyen de toutes sortes d’abominations sont parvenus à faire de peuplades diverses une nation. C’est cela la véritable œuvre du colonialisme français. Mais si Macron doute que l’Algérie fût une nation avant 1830, il ne doute pas qu’elle fût déjà un Etat.

    Ou alors il faudrait qu’il doute aussi du coup de l’éventail. L’Algérie était un Etat, mais pas une nation, c’est en tout cas ce qu’il semble penser. Un Algérien un peu au fait de l’histoire moderne pourrait lui dire que si son pays était une nation en 1940, en revanche il avait cessé d’être un Etat. Il y a deux France sous la forme Etat, celle depuis son origine supposée, la conversion de Clovis, jusqu’à 1940, et l’autre, depuis la fin de la collaboration avec les nazis jusqu’à aujourd’hui. La deuxième n’est pas une création française, mais britannique. Elle doit tout à Winston Churchill. Rien à Franklin Roosevelt, il faut le préciser.

    Sans Churchill, elle aurait été occupée par les Américains, tout comme l’Allemagne. On aurait vu alors clairement que la France d’aujourd’hui n’est pas la même que celle d’avant 1940. Celle-ci n’est pas morte du fait de la défaite militaire mais de la collaboration avec les nazis. Le régime de Vichy a tué la première France, celle des origines. Il revient aujourd’hui sous une autre forme, menaçant de tuer la deuxième, la France britannique d’aujourd’hui. A la différence de son premier avatar, l’extrême droite d’aujourd’hui n’a pas besoin de s’emparer du pouvoir pour arriver à ses fins. Il lui suffit de s’en approcher d’assez près pour que la classe dirigeante française se mette à se convertir à ses idées.

    Mohamed Habili

    Le Jour d’Algérie, 05/10/2021