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  • Algérie: Impacts crises mondiales sur la relance économique

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    Les impacts de la crise sanitaire et économique mondiale sur le plan de relance de l’économie algérienne

    Les gouvernants se trouvent confrontés à trois dilemmes. Le premier scénario est continuer le confinement quitte à étouffer la machine économique avec les risques neuro psychologiques et surtout le risque d’exploitations sociales pour ceux qui n‘ont pas de revenus et de protection sociale. Le second scénario est le dé-confinement total avec le risque d’un désastre sanitaire, qu’aucun Etat et système sanitaire ne pourraient supporter avec le risque d’une déstabilisation politique. La solution médiane est un dé-confinement progressif maitrisée conciliant l’aspect sanitaire et économique, exercice il faut le reconnaitre difficile.

    Les chocs de 2020/2021 avec des vagues successives du coronavirus et les différents impacts au réchauffement climatique auront des effets durables sur l’économie du monde entre 2021/2030, dessinant un nouveau pouvoir économique mondial. L’Algérie fortement connectée à l’économie mondiale via la rente des hydrocarbures, qui lui procure directement et indirectement 98% de ses recettes en devises ne fait pas exception, d’où l’importance de stratégies d’adaptation réalistes

    1.-Nous assistons à une crise mondiale inégalée depuis 1928/1929, Quant à l’impact sur le taux d’emploi, les rapports de l’OCDE mettent en relief que pour la baisse d’un point de taux de croissance, en moyenne annuelle, le taux de chômage s’accroît d’environ de 350.000 personnes, les femmes étant les plus vulnérables, donnant si on applique ce ratio pour l’Algérie qui a eu une croissance négative de 6% environ 2.100.000 pertes d’emplois , concernant tous les secteurs, devant voir comment les aides, si elles se sont concrétisées, aux entreprises , et les services ont permis de diminuer ce montant . La Banque mondiale estime ainsi qu’entre 70 et 100 millions de personnes ont basculé dans l’extrême pauvreté, effaçant ainsi les progrès réalisés les trois dernières années dans la lutte contre la pauvreté avec une population vivant avec moins de 1,90 dollar par jour. Les estimations de l’OIT indiquent une hausse significative du chômage et du sous-emploi dans le sillage du virus où sur les 7 milliards d’habitants pour les pays en voie de développement, Amérique latine, Asie, Afrique, entre 50/80% de l’emploi est dans la sphère informelle sans protection sociale étant avec le confinement une véritable bombe sociale .

    Sur la base de différents scénarios relatifs à l’impact du COVID-19 sur la croissance du PIB mondial (les estimations préliminaires de l’OIT montrent une augmentation du chômage mondial variant de 5,3 millions (scénario «optimiste») à 24,7 millions (scénario «pessimiste») à partir d’un niveau de référence de 188 millions en 2019. Le scénario «moyen» laisse présager une hausse de 13 millions (7,4 millions dans les pays à revenu élevé).. La Banque soulignant que la contraction du PIB mondial par habitant a été d’une ampleur inédite depuis 1945-1946. Le grippage des chaînes d’approvisionnement mondiales dû à la pandémie forcera les gouvernements à tout repenser et la politique économique qui sera sans doute ajustée si ce n’est complètement remaniée pour encourager un rapatriement de productions critiques. Cela concernera notamment les équipements sanitaires et de produits pharmaceutiques, avec des mesures protectionnismes et le resserrement des conditions financières( voir notre interview des impacts de l’épidémie du coronavirus, de profondes mutations géostratégiques, économiques et comportementales En anglais American Herald Tribune USA Pr Abderrahmane MEBTOUL « The World’s Deep Geostretegic Change After the Coronavirus 2020/2030/2040 07 mai 2020 ).

    Quant bien même, la reprise avec un taux de croissance de 4,2 /5% en 2021, il se matérialisait, dans de nombreux pays, par de profondes récessions qui devraient peser sur la capacité de croissance pour les années à venir Sans compter que la crise dans des économies largement informelles sera plus difficile à combattre, faute de moyens budgétaires suffisants et à cause d’une faible capacité administrative pour distribuer l’aide comme les indemnités de chômage. Ces perspectives sont d’autant plus alarmantes que la crise risque de laisser des séquelles durables et de donner lieu à des difficultés planétaires majeures. Cette situation a un impact à la fois sur l’endettement des Etats où pour le FMI , les mesures budgétaires annoncées sont désormais estimées à près de 11000 milliards de dollars dans le monde, et la moitié de ce montant correspondant à des dépenses supplémentaires et à des recettes perdues , la moitié restante des 5 400 milliards de dollars correspondant à un apport de liquidités, sous forme de prêts, d’injections de capital et de garanties, notamment par l’intermédiaire des banques publiques et des entreprises publiques, ces mesures permettant de préserver les flux de trésorerie des entreprises et de limiter les faillites, mais pourraient alourdir la dette et creuser les déficits publics à l’avenir si elles devaient se solder par des pertes..

    Comme le note plusieurs analystes dans le Finantial Times , le Monde.fr et les Echos.fr de juin 2020, reste que quelle que soit la façon dont les Etats s’attaqueront à cette montagne de dettes − effacement partiel, intervention des banques centrales, cocktail de croissance et d’inflation −, celle-ci risque de peser longtemps sur les politiques publiques et le paysage politique. D’une manière générale, la décroissance via l’importance du chômage est une véritable menace pour la sécurité mondiale impliquant des actions urgentes de mise en place de nouveaux mécanismes de régulation économique et sociale, avec le ciblage des catégories socioprofessionnelles, ainsi que le soutien aux entreprises qui s’adapteront aux nouvelles mutations donc concurrentielles avec la nouvelle trajectoire fondée sur la transition numérique et énergétique. Mais non les entreprises structurellement déficitaires qui seront appelées forcément à disparaitre dont les aides s’assimileraient à des subventions. Car une Nation ne peut distribuer plus que celle qu’elle produit quitte à accélérer la dérive économique et sociale.

    2.-Qu’en est-il pour l’Algérie qui est fortement dépendante du cours des hydrocarbures qui lui procurent directement et indirectement avec les dérivées 98% de ses recettes en devises, le cours étant fonction à la fois du cout interne, de la croissance de l’économie mondiale et de l’évolution du modèle de consommation énergétique mondial qui est appelé à évoluer entre 2021/2030. Dans ce cadre , il est important dans le cadre d’une vision stratégique de relance économique, d’analyser l’impact de la baisse du taux de croissance en Algérie par exemple, sur le taux de chômage qui s’ajoute aux taux officiel en distinguant les emplois dans les segments productifs et les emplois rente improductifs tenant compte de la forte pression démographique, plus de 44 millions d’habitants en 2021 et plus de 50 millions horizon 2030 qui nécessitera un taux de croissance entre 8/9% pendant plusieurs années afin d ‘atténuer les tensions sociales.. Cette situation de l’économie mondiale a un impact sur l’économie algérienne, du fait de la faiblesse tant de la demande mondiale d’hydrocarbures, de la concurrence internationale et de la baisse en volume physique sur le plan macro-économique et macro- social dont je recense sept impacts.

    Premièrement, sur le niveau des réserves de change qui étaient de 194 milliards de dollars fin 2013.

    Deuxièmement, sur le niveau de la balance des paiements, document de référence au lieu de la balance commerciale , incluant les sorties de devises des services avec un accroissement du déficit budgétaire que l’on comble artificiellement par une dépréciation du dinar en référence au dollar et à l’euro ( gonflé en dinars pour la fiscalité pétrolière et les importations de biens, pour ce dernier supporté en final par le consommateur.

    Troisièmement, sur la valeur du dinar corrélée à 70% aux réserves de change via les hydrocarbures, voilant l’importance réelle du déficit budgétaire . Avec des réserves de change de 10/20 milliards de dollars le cours officiel du dinar algérien dépasserait 200 dinars un euro, en cas d’une non dynamisation des sections hors rente, la valeur d ‘une monnaie reposant avant tout sur la production et la productivité.

    Quatrièmement, nous aurons un impact sur le rythme de la dépense publique qui détermine fondamentalement le taux de croissance avec les effets indirects à 80% important 70% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées dont le taux d’intégration ne dépasse pas 15%. Environ 83% de la superficie économique est constituée de petits services/commerce, et le secteur industriel pesant moins de 6% du PIB) Cinquièmement, sur le niveau d’inflation qui est actuellement compressé par les subventions, la cohésion sociale étant assurée par les transferts sociaux, mais intenable dans le temps sans le retour à la croissance.

    Sixièmement, l’impact sur le niveau de création d’emplois, devant s’attendre à un accroissement du taux de chômage à plus de 15% en 2021 selon le FMI devant créer plus de 300.000 /400.000 emplois par an qui s ‘ajoute au taux de chômage. A cela s’ajoute, selon certaines organisations patronales qui évoquent entre 1,5 /1,7 millions de pertes d’emplois dans la sphère réelle Et sur environ 12,5 millions de la population active sur plus de 44 millions d’habitant en mars 2020 environ 40/45% de la population active, environ 5/6 millions sont sans protection sociale rendant difficile leurs prises en charge Ils sont sans revenus pour bon nombre qui ont cessé leurs activités, sans compter que bon nombres de ménages vivent dans deux trois pièces plus de 5/8 personnes avec des impacts psychologiques avec le confinement. Et l’on devra prendre en compte, à l’avenir la réforme du système des retraites dont le déficit est estimé pour 2021 à 690 milliards de dinars, qui sera le grand défi des années à venir ; le vieillissement de la population, où la moyenne d’âge des deux sexes selon le rapport de l’ONU, 2018, est à environ 78 ans de durée de vie. Septièmement, sur l’extension de la sphère informelle, ayant j’ai eu à diriger pour le 4ème Think Tank mondial l’Institut des relations internationales IFRI,-Paris, décembre 2013, c’est un dossier complexe, devant méditer l’expérience des mesures passées qui ont été un véritable échec. En période de crise et c’est une loi universelle applicable à tous les pays, cette sphère s’étendant et son intégration dépend fondamentalement du retour à la confiance et d’une nouvelle régulation d’ensemble tant de la société que de la politique socio-économique. Attention à l »mission monétaire sans contreparties productives la banque d’Algérie, qui pourrait entrainer le pays dans une spirale inflationniste incontrôlée ayant prévu d’injecter environ 2100 milliards de dollars pour l’année 2021(environ 16 milliards de dollars), l’Algérie contrairement aux pays développés souffrant de rigidités structurelles et non conjoncturelles, devant comparer le comparable comme l’économie vénézuélienne et non les USA et l’Europe qui reposent sur une économie productive, Egalement , une Nation ne pouvant distribuer plus que ce qu’elle produit, donc attention à la dérive salariale que certains experts algériens ( vision populiste) qui pénalisera les couches défavorisées, sans relancer la machine économique .

    3.- D’où l’importance de bien synchroniser les axes du plan de relance économique autour de quatre axes que j’ai largement développé par ailleurs (pour comprendre les enjeux géostratégiques du nouveau monde et élaborer des stratégies d’adaptation dans le cadre d’une planification stratégique interviews/contributions professeur Abderrahmane Mebtoul- site www.algerie1.com janvier 2019/aout 2021 – conférences à l’IMDEP octobre 2019 et à L’ecole Supérieure de Guerre mars 2019 -Ministère de la défense nationale , devant les attachés économiques des ambassades et des organisations internationales accrédités à Alger juin 2021, à Radio Algérie Internationale sur les axes du redressement national 08/07/2020 et quotidiens gouvernementaux El Massa 22 aout 2021, El Moudjahid 23 aout 2021, Horizondz 25/08/2021 – 2021/2030/2040 – Afrik Eco juin 2020, AfricaPresse Paris 05/7 mai 2021 et 10 août 2021).

    Premièrement, Tout plan fiable doit reposer sur une nouvelle gouvernance nationale et locale avec plus de décentralisation et non déconcentration, à travers des réseaux et non plus avec l’ancienne organisation hiérarchique rigide tant de l’Etat que des entreprises, , impliquant les élus locaux et la société civile ( entrepreneurs publics, privés ,banques, universités, centre de recherche, associations)

    Deuxièmement, tout plan opérationnel doit s’inscrire dans le cadre d’une vision stratégique tant des mutations internes quiinternationales, comment s’oriente les filières au niveau mondial entre 2021/ 2030 dont la transition numérique et énergétique, en étant réaliste les hydrocarbures traditionnels resteront encore pour 5 à 10 ans la principale ressource en devises du pays sous réserve de la mise en place de nouvelles filières concurrentielles.

    Troisièmement, au niveau national, élaborer de stratégies d’adaptation pour couvrir le marché intérieur , devant souligner le dynamique agricole, en étant conscient que n’existe pas d’autonomie totale l’Algérie étant un pays semi –aride, le marché malgré certaines hausse des prix étant bien approvisionné, devant dynamiser l’agriculture saharienne mais du fait de l’eau saumâtre et devant protéger les nappes sahariennes, procéder à des investissements d’épuration, excepté certaines contrées El Goléa, que je connais bien ayant étant officier d’administration à la route de l’unité africaine vers les années 1972..

    Quatrièmement , .il s’agira de concilier l’efficacité économique et la cohésion sociale par le dialogue social avec de nouveaux réseaux et mobiliser les ressources tant humaines et ajuster les ressources financières en distinguant la partie dinars et la partie devises avec un planning daté pour éviter les réévaluations permanentes ,des projets non maturés, lutter contre les surcoûts, revoir la règle des 49/51% en dressant une balance devises et une nouvelle politique économique afin d’éviter l’épuisement des réserves de change horizon 2022.

    En conclusion, l’objectif stratégique face aux tensions budgétaires est un sacrifice partagé et la nécessaire cohésion sociale. Au vu de l’immense élan de solidarité nationale pour l’unité nationale , auquel a fait preuve toute la population algérienne face tant à l’épidémie du coronavirus qu’aux incendies, l’Algérie, un pays dynamique, plein de vitalité, qui cherche sa voie, étant un acteur déterminant, selon la majorité des observateurs internationaux de la stabilité de la région méditerranéenne et africaine, peut surmonter cette conjoncture difficile.

    Etant entendu sous réserve d’un renouveau de la gouvernance, dont la moralisation de la société sans laquelle aucun développement ne peut se faire et éviter par un langage de vérité, de se mentir les uns les autres ou se cacher la réalité, ce qui nous entraînera irrésistiblement vers d’autres épreuves tragiques qu’aucun algérien patriote ne souhaite. Aussi, Il y a lieu procéder sans complaisance à un examen très lucide de la situation pour mieux réagir dans plusieurs segments de la vie économique et sociale : tels l’éducation-formation, le savoir pilier du développement, la santé, la modernisation de l’agriculture, la culture financière des acteurs économiques, l’efficacité de l’administration, la relance des entreprises, à travers une nouvelle politique industrielle, lutter contre les déséquilibres régionaux et les inégalités sociales, la formation civique et politique de la jeunesse et tant d’autres domaines

    En bref, la modestie et le dialogue productif étant l’outil de la bonne gouvernance, il y a urgence, pour des raisons de sécurité nationale d’un changement de paradigme culturel , conditions pour une économie diversifiée tenant compte, tant des rapports de forces internes que des nouvelles transformations du monde dans le domaine économique,(transition numérique et énergétique), social, culturel et sécuritaire.

    Pr Abderrahmane Mebtoul

    Algérie1, 26/08/2021

  • Le Maroc face au chaos économique

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    Le magazine allemand « International Politik » se dit convaincu que l’économie marocaine, sera impactée négativement par les derniers développements de la scène géopolitique.
    Pour le magazine allemand, le régime du Makhzen a tenté vainement de faire chantage sur l’Europe, en envoyant des milliers de migrants, après avoir échoué dans son action de violation de cessez-le feu au Sahara occidental.
    La brouille avec Berlin et Madrid, dans le sillage de la normalisation avec l’entité sioniste, n’a pas eu l’effet escompté pour détourner l’opinion publique marocaine sur les réels problèmes que traverse le royaume alaouite. 
    Cette diversion et fuite en avant d’un régime aux abois, risque de lui coûter cher, avec l’éventuelle suspension de l’aide de l’Union Européenne d’un montant de 346 millions d’euros octroyée par Bruxelles ces deux dernières années. 
    C’est dire que le chantage marocain vient de se retourner contre lui et comme dit l’adage, à force de jouer avec le feu, on se brule les doigts. Un adage qui s’applique bien à son jeu malsain de gabegie avec Alger, qui vient de rompre ses relations diplomatiques avec Rabat, et de décider de revoir ses relations économiques. 
    Cette révision touchera inéluctablement la non-reconduction du contrat d’approvisionnement du Maroc en gaz, via le Gazoduc Maghreb-Europe, qui expire le 31 octobre prochain et qui permet au royaume d’engranger 200 millions de dollars chaque année, comme droit de transit estimé à 7%, en plus de l’interdiction d’utilisation des espaces aérien et maritime algériens par les avions et navires marocains et vont certainement augmenter les dépenses marocaines.
    La stratégie de la communication et de bluff menée par ses instruments de propagande à l’égard d’Alger, a été contre-productive et a dévoilé le visage d’un régime réellement aux abois.
    Le recours de l’Algérie à remplacer le GME par le Medgaz pour honorer les engagements de l’Algérie vis à vis de ses partenaires européens, en particulier les partenaires espagnol et portugais, a surpris le Makhzen et a eu raison de ses mensonges confirmés par l’appareil médiatique de la propagande du Palais Royal, et qui note que l’hiver sera rude dans la mesure où Rabat ne peut assurer plus que 10% de ses besoins en énergie. 
    Rabat a-t-il les moyens d’affronter une nouvelle crise énergétique qui s’ajoutent aux effets dévastateurs de la dette extérieure, la faiblesse des rentrées du tourisme liée à la crise sanitaire, et à la réduction des transferts des avoirs de la diaspora marocaine. 
    La normalisation avec l’ennemi sioniste pour sauver le trône s’avère, un pas pour la disparition du royaume.
    Algérie54, 30/08/2021
  • Algérie : S’approprier le développement dans toutes ses dimensions

    Par B. Chellali

    Plus que jamais, les économistes conseillent au prochain gouvernement de mener une politique macroéconomique « prudente » et engager des « réformes structurelles » dans le secteur des exportations. Ils estiment qu’il y a deux types de politique qu’il faut conduire, dans cette conjoncture difficile, notamment de baisse des prix du pétrole. Aussi s’agit-il d’une politique macroéconomique prudente qui permet de réduire, d’une part, la demande intérieure et d’assurer, plus particulièrement, la consolidation budgétaire et, d’autre part, d’améliorer la compétitivité extérieure du pays et d’éviter que le taux de change soit réévalué.

    La deuxième solution consiste selon les mêmes voix à mettre en place des « réformes structurelles qui permettent de diversifier le secteur des exportations et de le rendre beaucoup plus compétitif ». D’où l’impératif pour le futur gouvernement à promouvoir de nouvelles réformes économiques structurelles de grande envergure, c’est-à-dire en créant des institutions innovantes et stables fondées sur des théories standards internationales et les meilleures pratiques du moment, notamment en raison de la chute continue du prix du pétrole Dans ces conditions, il ne peut s’agir que de relance et la promotion d’un vaste plan d’action économique visant la stabilisation et un retour à la croissance.

    Dans ce cadre, la diversification des activités économiques ne peut-être que prioritaire pour le nouvel exécutif gouvernemental à travers un large éventail de réforme dans le but de lutter contre l’hyperinflation et de catalyser le nouveau modèle économique basé sur la diversification de la croissance et l’économie de la connaissance. Cependant, avec le taux de change, les salaires, la protection des actifs financiers et les hausses récurrentes des prix des produits de consommation, l’inflation est, effectivement ancrée dans l’économie nationale. Avec l’instabilité du prix de l’or noir, on peut s’attendre à un pic d’inflation si les mesures prises par le nouveau gouvernement sont « faibles » et largement inefficace face à la crise grandissante. Il faut dans cette direction que le gouvernement développe une expertise considérable. La croissance économique est de fait un désir de diversification et de modernisation mais comme il est constaté, elle a donné lieu à l’abandon des institutions budgétaires clés.

    Depuis des années, l’élaboration de la politique macroéconomique en Algérie était basée sur le trépied de la fluctuation des taux de change, des objectifs d’excédent primaire et des objectifs en matière d’inflation. Désormais, l’orientation vers de nouvelles réformes macroéconomiques est nécessaire. Le manque de stratégie et de coordination claire par le passé a conduit à une approche contradictoire de la politique économique du pays car c’est la croissance qui permet de pénétrer les bons résultats budgétaires. Les engagements économiques pour le prochain gouvernement sont considérables. Il s’agit d’abord de placer l’Algérie dans une position de leadership effectif dans la prise en charge de son destin.

    Il s’agit aussi de s’approprier un développement dans toutes ses dimensions et d’abord celle de la paix, de la sécurité et de la bonne gouvernance qui sont les conditions incontournables pour la viabilité de tout processus de développement durable et harmonieux. Il s’agit de la concentration des efforts et des ressources, accès aux marchés, infrastructures, nouvelles technologies de l’information et de la communication, développement humain et renforcement des capacités.

    Il est indéniable que l’ensemble de ces efforts dénotent dans la conjoncture difficile actuelle que traverse le pays le sérieux du volet économique du futur gouvernement surtout que dans le domaine économique, les experts qualifient l’Algérie comme un nouvel espace pour l’investissement et la croissance. Ceci est dû non seulement aux importantes ressources naturelles, mais de plus en plus aux progrès qui sont en train de se réaliser en matières de gestion économique, mais qui restent encore à peaufiner.

    Le Maghreb, 01/07/2021

    Etiquettes : Algérie, formation du gouvernement, développement, crise économique, crise sanitaire,

  • Maroc : Pièce par pièce en marge de l’économie

    Les ambitions politiques du roi du Maroc Mohammed VI affectent de plus en plus l’économie du pays. Les entreprises allemandes sont également concernées.

    En tant que consultant en affaires, Ignacio de Benito connaît le Maroc depuis plusieurs décennies. Il apprécie les gens et leur culture. Concernant la famille royale marocaine, il demande de l’empathie : « La situation tendue actuelle avec l’Allemagne et l’Espagne ne peut être comprise que dans le contexte où Mohammed VI tente de sauver sa peau en remettant les islamistes du pays à leur place et en élargissant en même temps son espace de pouvoir dans la région et vis-à-vis de l’Europe. »

    Ce qui s’est passé : Début mars, le gouvernement marocain a coupé les contacts avec l’ambassade d’Allemagne et a gelé la coopération avec les partenaires allemands du développement, la KFW et la GIZ. En mai, le Maroc a retiré son ambassadeur en Allemagne pour des consultations dans son pays. Selon le gouvernement de Rabat, il s’agit d’une protestation contre les actions de l’Allemagne dans le conflit du Sahara occidental. Il accuse le gouvernement allemand d’avoir une « attitude destructrice » dans cette affaire. Berlin a réagi avec surprise. Le gouvernement tente de résoudre la situation de manière constructive.

    Fonds et projets en attente

    Le Maroc est un partenaire important de la coopération allemande au développement depuis de nombreuses années. En 2020, selon le ministère fédéral des Affaires étrangères, environ 1,4 milliard d’euros avaient été promis par la partie allemande, entre autres pour amortir les conséquences de la crise de Corona et dans le cadre du partenariat pour la réforme. D’importants investissements dans les secteurs des infrastructures locales et de l’énergie ont été prévus. Aujourd’hui, tout est suspendu pour le moment, ce qui inquiète de plus en plus le chef de la Chambre de commerce allemande à Casablanca, Andreas Wenzel : « Les projets prévus sont importants pour nous. On ne sait pas comment les choses vont se poursuivre ».

    En Espagne, en revanche, le gouvernement est habitué aux coups de poker de Mohammed VI, « même si, cette fois, les dommages économiques sont beaucoup plus importants des deux côtés, car nous avons des relations commerciales très étroites », déclare Haizam Amirah-Fernández, du groupe de réflexion espagnol Real Instituto Elcano, à Madrid également. L’Espagne avait également ressenti la colère du gouvernement après que le chef du Front Polisario de libération du Sahara occidental ait été soigné dans un hôpital espagnol.

    Patience et tact sont nécessaires

    Amirah-Fernández craint que la situation incertaine concernant le Maroc ne perdure pendant un certain temps, du moins dans le cas de l’Espagne : « La situation est très complexe. Mohammed VI a clairement fait un mauvais calcul ». Le roi estime que la reconnaissance par Donald Trump de la propriété du Maroc sur le Sahara occidental a changé la position de l’UE, a déclaré l’analyste politique.

    Mais l’UE, et l’Espagne et l’Allemagne en particulier, ont clairement fait savoir qu’ils s’en tenaient à leur politique. Celle-ci prévoit un référendum au Sahara occidental, conformément à une résolution de l’ONU. Le Premier ministre Pedro Sánchez avait espéré que le nouveau président américain Joe Biden reviendrait sur la décision de son prédécesseur, « mais pour les États-Unis, la reconnaissance d’Israël par le Maroc est extrêmement importante dans la lutte commune contre l’Iran », déclare Amirah-Fernández. La situation est complexe car Mohammed VI soupçonne à son tour l’Algérie et l’Iran de financer le mouvement Polisario au Sahara occidental.

    Le Maroc a désormais également suspendu l’échange d’informations policières. Toutefois, le pays est également un acteur important pour l’Europe dans la lutte contre la montée de l’islamisme en Afrique. Les journalistes marocains critiquent également la corruption croissante de la famille royale. Le pouvoir de la famille royale dans le pays est malsain à leurs yeux.

    Échec du tourisme de retour des RME

    De la banque Attijariwafa à l’opérateur téléphonique Inwi en passant par la compagnie d’assurance Wafa Assurance, le monarque contrôle indirectement la quasi-totalité des services et de la production de son pays, écrit le quotidien espagnol El País. Transparency International confirme également une détérioration de la lutte contre la corruption pour 2020. L’organisation critique également la stratégie marocaine de lutte contre la pandémie, qui consistait essentiellement à isoler le pays pendant un an. Selon le Baromètre mondial de la corruption 2020, 53 % de la population marocaine estime que la corruption a augmenté au cours de l’année écoulée.

    La frustration de la population est également en augmentation. Il y a quelques semaines, environ 8 000 Marocains, principalement des jeunes, ont pris d’assaut les frontières de l’exclave espagnole de Ceuta, au nord. « Le fait que la police marocaine ne l’ait pas empêché est bien sûr aussi dû aux ennuis avec le gouvernement espagnol », explique Amirah-Fernández. « Cet été, en outre, les quelque un million de Marocains qui vivent en Espagne ne peuvent pas rejoindre leur famille, car le service de ferry avec les ports espagnols n’a pas été repris à la demande royale. » En revanche, le service de ferry vers le Maroc depuis la France et l’Italie a été autorisé par le roi.

    Menace économique pour les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla

    « Le monarque saigne également à blanc les exclaves espagnoles de Ceuta et Melilla », critique Ana Belén Soage, de l’école de commerce EAE de Madrid. Depuis trois ans, Mohammed VI y interdit progressivement le commerce frontalier : « Les villages marocains environnants n’ont plus d’alternatives et s’appauvrissent encore plus », explique M. Soage.

    Les personnes qui s’y trouvent poussent massivement vers l’Europe depuis des années, restant le plus souvent bloquées en Espagne, « mais veulent en fait aller en France ou en Allemagne », rapporte Diana Cardona Motjer, qui travaille avec des migrants marocains à Ceuta. Le gouvernement espagnol lance maintenant une offensive pour relancer économiquement les exclaves, mais Mohammed VI frappe à nouveau. Cette fois dans sa ligne de mire : les tomates. Ceux-ci sont actuellement étiquetés comme des produits marocains et exportés massivement du Sahara Occidental vers l’Europe. Cela bouleverse le plus grand concurrent dans le commerce de la tomate : l’Espagne. Parce qu’officiellement l’UE n’a pas reconnu le Sahara Occidental comme marocain. En outre, l’Espagne se plaint régulièrement du non-respect des réglementations environnementales strictes et des conditions de travail inacceptables.

    M. De Benito, consultant en gestion, conseille aux Allemands et aux Espagnols de faire preuve de prudence, compte tenu de l’atmosphère émotionnellement tendue : « Il faut faire preuve de délicatesse ». Bruxelles le sait aussi. Et les médias espagnols spéculent déjà sur le fait que c’est la raison pour laquelle l’UE a jusqu’à présent ignoré « l’escroquerie aux tomates » des Marocains.

    DW, 01 juillet 2021

    Etiquettes : Maroc, Allemagne, Espagne, Mohammed VI, Sahara Occidental, pandémie, crise économique, migration,

  • Algérie : “Nous voulons être au pouvoir, pas sa façade” (Makri)

    Arrivé troisième derrière le FLN et les indépendants, lors des dernières législatives, et tout auréolé de ses 68 députés, le MSP vient de valider officiellement son refus d’intégrer le nouveau gouvernement qui sera dirigé par l’ex ministre des Finances Aymen Benabderhamane.

    Cette décision prise par le Conseil consultatif, lors d’une session extraordinaire, ce mardi, a été largement explicitée par le président du parti, Abderrezak Makri, lors d’une conférence de presse tenue ce mardi en fin de matinée.

    « Notre option, au début, était de participer au prochain gouvernement, mais en cas de majorité parlementaire et non pas en cas de majorité présidentielle », a déclaré Makri. « Nous avons compris que les autres partis qui ont gagné ces législatives vont finalement former une majorité présidentielle », a indiqué le président du MSP, qui au passage n’a pas manqué de souligner que les quatre partis en question, le FLN et le RND ont “soutenu un autre candidat rival à Tebboune lors des présidentielles de 2019″ , alors que El Bina et Moustakbel avait leur propre candidat.

    Pour le patron du plus grand parti islamiste, le MSP visait la majorité dans le Parlement, mais il a été victime de fraude. Il évoquera ainsi « la double fraude électorale, celle de certains partis qui ont bourré les urnes et qui se sont accaparés des bureaux de vote, et celle, systématique, de certaines forces et des résidus, au sein du système, de la ‘’issaba’’ ».

    Makri estime que le refus d’intégrer ce gouvernement est motivé par le fait que les propositions ou les offres du président Tebboune ne ” nous permettait pas d’influer sur les processus politiques et économiques ». Il dira que « le président tient à son programme, qu’une majorité présidentielle va appliquer. Nous avons proposé de créer un mécanisme concernant la question du programme du prochain gouvernement pour trouver des éléments communs entre le programme du président et celui du MSP. Mais celle ci n’a pas eu de suite ».

    Plus explicite, Makri lâchera cette phrase lapidaire, mais pleine de sens: « nous voulons être dans le pouvoir, pas dans sa façade ».

    Selon lui, la présidence a réclamé 27 noms parmi lesquels quatre ou cinq devaient être retenus pour des postes de ministres. Cependant, le chef du MSP a indiqué que son parti restera dans l’opposition, mais soutiendra le président Tebboune sur quatre axes « prioritaires », selon ses termes : le développement socio-économique, la résistance aux « forces étrangères » et « colonialistes », l’unité nationale et la « défense de l’identité nationale ».

    Cette position de refus de la part du MSP de faire partie d’un cabinet exécutif s’explique par la doctrine idéologique de cette formation de l’Internationale des Frères musulmans. Une doctrine qui alterne entre deux concepts propres à leurs démarches selon des rapports de force politique: la “moucharaka” et la “moughalaba”, entre l’entrisme ou participationnisme et l’opposition. Le chef spirituel du MSP, le défunt Mahfoudh Nahnah, fut le premier à développer cette stratégie, durant les années 90 du siècle dernier, alors que le pays vivait une situation tragique. Nahnah y amena son mouvement à participer pratiquement à toutes les élections présidentielles, législatives et locales, et à tous les gouvernements successifs depuis 1995. Le fameux entrisme a trouvé toute sa plénitude avec la nomination des touts premiers ministres islamistes BCBG, dont Bengrina l’actuel patron du mouvement El Bina, dans le gouvernement de Abdelaziz Bouteflika durant son premier mandat en 1999.

    Quand la situation politique et économique est favorable, le MSP ne crache pas sur un ou deux porte-feuilles, quitte à prendre les moins influents, les moins valorisants, comme le Tourisme ou l’Artisanat, voire l’Industrie ou la Solidarité nationale.

    Cependant, le refus de l’entrisme dure depuis déjà huit ans au moins. Avec Makri comme chef de parti, le MSP lâche d’abord la fameuse Alliance présidentielle qui soutenait l’ancien régime, alors que soufflait sur le monde arabe les premiers vents de la révolte et de la contestation, dite du “printemps arabe”. A l’époque, les émeutes de l’huile et du sucre étaient perçues comme des indices d’un imminent effondrement du système. Makri voulait justement en profiter de ce contexte avec l’usage de sa “moughalaba”, choisissant de basculer vers l’opposition, d’abord feutrée, puis directe.

    Aujourd’hui, avec une conjoncture économique et financière inextricable, des défis majeurs sur le plan social, le MSP ne veut surtout pas prendre de risque politique, ni vouloir endosser les probables échecs des futures réformes que Tebboune et son tout nouveau Premier ministre veulent lancer dans l’immédiat.

    Le Jeune Indépendant, 30 juin 2021

    Etiquettes : Algérie, MSP, gouvernement, crise économique, réformes, Abdelmadjid Tebboune,

  • Le Liban mérite mieux

    22/06/2021 – HR/VP Blog – Le Liban s’enfonce toujours plus dans une crise très grave. Il est urgent que le pays se dote d’un gouvernement qui enraye la spirale de l’effondrement et engage les réformes indispensables. Je me suis rendu au Liban le 19 et 20 Juin pour en discuter avec les leaders du pays et des personnalités de la société libanaise.

    Ces dernières semaines nous avons dû faire face à plusieurs crises ouvertes : les inquiétantes manœuvres russes aux frontières de l’Ukraine, les violents affrontements entre Israël et le Hamas ou encore le détournement scandaleux d’un avion européen en Biélorussie… Nous devons bien entendu réagir en permanence à ce type d’urgence.

    « Il est essentiel de se préoccuper des crises qui ne font pas la une de l’actualité en Europe mais qui, si on les laisse s’envenimer, risquent de se muer à leur tour en crises ouvertes. »

    Il est essentiel cependant de se préoccuper aussi des crises qui ne font pas la une de l’actualité en Europe mais qui, si on les laisse s’envenimer, risquent de se muer à leur tour en crises ouvertes. C’est le cas en particulier de la profonde crise que traverse le Liban depuis plus d’un an. Elle crée d’ores et déjà une situation dramatique pour les populations directement concernées tout en menaçant de déstabiliser la région et de toucher l’UE. Je me suis rendu dans ce pays les 19 et 20 juin pour essayer de contribuer à la désamorcer. Nous en avons ensuite discuté lundi dernier lors du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l’UE.

    Le 4 aout dernier, la catastrophe de Beyrouth

    Chacun s’en souvient : le 4 aout dernier la ville de Beyrouth avait été en bonne partie détruite par une énorme explosion qui s’était produite sur son port. Cette catastrophe intervenait déjà dans un contexte de crise économique, sociale et politique prolongée du fait de graves dysfonctionnements de l’Etat libanais. Ces difficultés anciennes ont été accrues par les conséquences de la crise syrienne : les quelques 1,5 millions de réfugiés venus depuis 2011 du pays voisin forment aujourd’hui quasiment un quart de la population du Liban (et au total 40% des habitants du pays ne sont pas citoyens libanais). En 2020 l’épidémie de COVID-19 a encore envenimé la situation.

    Depuis dix ans, l’UE a cependant beaucoup soutenu le Liban. Entre 2011 et 2020, nous avons mobilisé dans ce but plus de 2,4 milliards d’euros, dont 340 millions d’euros en réponse à l’épidémie de COVID-19 auxquels sont venus s’ajouter 170 millions d’euros suite à l’explosion du Port de Beyrouth. Suite à cette explosion, nous avons construit avec l’ONU et la Banque mondiale, un cadre de travail, le Lebanon Reform, Recovery and Reconstruction Framework (3RF), qui nous permet d’aider directement le peuple libanais.

    Le Liban a poursuivi sur la voie de l’effondrement économique et financier

    Pourtant le Liban a poursuivi sur la voie de l’effondrement économique et financier. Malgré les appels incessants de l’UE et de la communauté internationale, les négociations engagées depuis plusieurs mois maintenant pour la formation d’un gouvernement sont dans l’impasse. Le système confessionnel qui est à la base de la répartition des pouvoirs au Liban a manifestement atteint ses limites, mais il reste très difficile à remplacer.

    « On n’a enregistré aucun progrès tangible ni sur les mesures d’urgence nécessaires pour obtenir une aide du FMI, indispensable pour stopper la spirale de l’effondrement, ni sur les réformes plus structurelles afin de lutter contre la corruption. »

    Depuis dix mois, le pays est donc dirigé par un gouvernement intérimaire. Ce gouvernement se préoccupe sérieusement des difficultés du pays et a proposé des solutions. Mais il n’a pas le soutien du Parlement ni de mandat pour entreprendre des réformes. De ce fait, on n’a enregistré aucun progrès tangible ni sur les mesures d’urgence nécessaires pour obtenir une aide du Fonds Monétaire International (FMI), indispensable pour stopper la spirale de l’effondrement, ni sur les réformes plus structurelles afin de lutter contre la corruption, accroître l’indépendance de la justice, clarifier les règles de passation des marchés publics, encadrer le fonctionnement de la Banque centrale ou encore réguler des secteurs clés comme l’électricité. Suite à ses échanges avec les dirigeants du pays, le président français Emmanuel Macron avait proposé en septembre dernier un programme de réformes assorti de délais courts de mise en œuvre. Celui-ci reste d’actualité et devrait constituer la feuille de route de tout nouveau gouvernement.

    La population libanaise subit le contrecoup de cet échec

    La population libanaise subit durement le contrecoup de cette échec : 55% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Selon le FMI, le Liban devrait être la seule économie de la région à se contracter encore cette année alors qu’il estimait déjà le taux de chômage à 39% fin 2020. Au cours des derniers mois, la livre libanaise s’est dépréciée de 90% vis à vis du dollar américain. De nombreux Libanais instruits quittent le pays et la pauvreté se répand. Dans ce contexte, les tensions sociales s’accentuent. Des manifestations contre la dévaluation de la livre libanaise et la détérioration des conditions de vie éclatent régulièrement à travers le pays.

    « L’aggravation de la situation socio-économique pourrait avoir de graves répercussions sur la stabilité et la sécurité du pays. »

    L’aggravation de la situation socio-économique pourrait avoir de graves répercussions sur la stabilité et la sécurité dans un pays qui a été le théâtre d’une guerre civile prolongée entre 1975 et 1990 et reste régulièrement frappé par la violence. Le 4 février dernier, l’éminent intellectuel et critique du Hezbollah libanais, Lokman Slim, a été retrouvé mort, faisant craindre un retour à la période des assassinats politiques au Liban. Et en mars dernier, le commandant en chef des Forces Armées Libanaises avait averti que l’armée ne devait pas se laisser entraîner dans l’impasse politique. Le risque de conflits internes est pour lui une plus grande préoccupation pour la sécurité du Liban que celui d’un conflit avec Israël ou la Syrie.

    Je me suis donc rendu au Liban samedi et dimanche derniers et j’ai rencontré le Président Aoun, le Président du Parlement Berri, le Premier Ministre par intérim Diab, le Premier Ministre désigné Hariri, le Premier Ministre adjoint, Ministre de la Défense et Ministre des Affaires Étrangères par intérim Akar, le chef de la Sûreté Générale Ibrahim, le commandant en chef de l’Armée Aoun ainsi que des personnalités et des experts indépendants.

    « J’ai rappelé aux dirigeants libanais l’important soutien que nous apportons déjà au pays et je leur ai indiqué que nous étions prêts à intensifier ce soutien, si le Liban se dote d’un gouvernement qui passe un accord avec le FMI et réforme le pays. »

    Je leur ai fait part de notre inquiétude. Face à la crise actuelle, il n’y aura pas cette fois de sauvetage financier par les pays du Golfe ou la diaspora libanaise. J’ai rappelé aux dirigeants libanais l’important soutien que nous apportons déjà au pays et je leur ai indiqué que nous étions prêts à intensifier ce soutien, mais que pour cela, le Liban avait besoin d’un gouvernement qui passe un accord avec le FMI et réforme le pays.

    « Il n’y a pas d’autre moyen qu’un accord avec le FMI pour éviter l’effondrement du pays. Nous devons donc insister sur ce point, mais aussi être prêts à aider davantage le Liban une fois que cet accord aura été conclu. »

    Tous ceux avec lesquels je m’en suis entretenu m’ont dit être favorable à un tel accord ainsi qu’à une enquête judiciaire sur le fonctionnement de la Banque centrale. Aussi urgent soit-il cet accord avec le FMI reste cependant difficile à finaliser, car les réformes demandées vont nécessairement remettre en cause la répartition des pouvoirs et des avantages économiques au Liban. Il n’y a cependant pas d’autre moyen d’éviter l’effondrement du pays. Nous devons donc insister sur ce point, mais aussi être prêts à aider davantage le Liban une fois qu’un accord aura été conclu avec le FMI.

    La question des éventuelles sanctions ciblées

    J’ai également indiqué à mes interlocuteurs que si les dirigeants libanais ne prennent pas leurs responsabilités, nous devrons envisager d’autres mesures. Certains Etats membres ont proposé que nous adoptions éventuellement des sanctions ciblées. Aucun des dirigeants avec lesquels j’ai échangé ne s’est opposé à cette idée. Certains ont même déclaré qu’ils y étaient favorables, à condition bien sûr qu’elles soient imposées aux véritables « coupables ». Les personnalités de la société civile avec lesquelles je me suis entretenues m’ont toutes dit que le recours éventuel à de telles sanctions était essentiel pour pouvoir faire pression sur les dirigeants politiques.

    Nous avons fait le point sur ma visite lors du Conseil des ministres des affaires étrangères du 21 juin et nous allons poursuivre le travail sur les critères qui pourraient nous amener à déclencher d’éventuelles sanctions ciblées. La menace de sanctions ne sera toutefois pas suffisante si nous voulons éviter l’effondrement du pays et aider à un réel changement au Liban.

    « J’ai insisté pour que les élections locales, parlementaires et présidentielles prévues l’an prochain aient bien lieu aux échéances prévues. Elles offrent en effet une véritable opportunité de changement, mais il faut que le jeu soit équitable. »

    Nous devons aussi suivre de plus près les flux financiers illicites sortant du pays, et mettre en œuvre les instruments dont nous disposons pour lutter plus efficacement contre le blanchiment d’argent en provenance du Liban. Nous devons également commencer à aider les Libanais à préparer les élections locales, parlementaires et présidentielles de l’an prochain. J’ai insisté pour qu’elles aient bien lieu en 2022, aux échéances prévues. Elles offrent en effet une véritable opportunité de changement, mais il faut que le jeu soit équitable. Nous devons envisager en particulier la possibilité d’envoyer des observateurs de l’UE.

    Le véritable changement prendra du temps

    Au Liban, le véritable changement prendra du temps. Notre engagement et notre aide doivent l’encourager. Dans l’immédiat, nous devons en priorité maintenir la pression pour que les dirigeants libanais prennent leurs responsabilités. L’UE a été et reste pleinement solidaire du peuple libanais en ces temps difficiles mais pour maintenir cette pression, nous ne devrons apporter de l’aide au gouvernement qu’une fois les réformes engagées. Au cours des prochains mois, le Liban va demeurer une des principales priorités de la politique extérieure de l’Union.

    European External Action Service, 22 juin 2021

    Etiquettes : Liban, crise politique, crise économique,

  • Liban: La crise menace l’un de ses rares rassembleurs, l’armée

    BEYROUTH (AP) – Depuis la guerre civile, à travers les guerres avec Israël, les bombardements militants et les troubles intérieurs, les Libanais ont considéré leur armée comme un point d’ancrage pour la stabilité, l’une des seules institutions au-dessus des divisions du pays.

    Mais l’armée est désormais menacée par l’effondrement financier dévastateur du Liban, qui, selon la Banque mondiale, est susceptible de figurer parmi les pires que le monde ait connus au cours des 150 dernières années.

    L’effondrement économique exerce une pression sans précédent sur les capacités opérationnelles de l’armée soutenue par les États-Unis, anéantissant les salaires des soldats et détruisant le moral. La détérioration met en danger l’une des rares forces à unifier le Liban à un moment où les tensions sectaires et la criminalité sont en hausse dans un contexte de pauvreté croissante de la population.

    « Un tel déclin pourrait être le signe avant-coureur d’une instabilité jamais vue depuis la dernière fois que les élites politiques libanaises ont vidé ou mis à la dérive les forces armées libanaises, à savoir au cours des cinq années qui ont précédé la guerre civile de 1975-1990 », a déclaré Aram Nerguizian, conseiller principal du programme sur les affaires civilo-militaires dans les États arabes au Carnegie Middle East Center.

    L’ armée elle-même a tiré la sonnette d’alarme , ce qui est inhabituel pour une force qui est peut-être unique au Moyen-Orient en ce qu’elle reste largement en dehors de la politique.

    Le chef de l’armée, le général Joseph Aoun, a averti dans un discours aux officiers en mars que les soldats « souffraient et avaient faim comme le reste du peuple ».

    Il a également critiqué ouvertement la direction politique, qui a été paralysée par des luttes intestines et n’a presque rien fait pour faire face à la crise. « Qu’est-ce que tu attends? Qu’est-ce que vous envisagez de faire? Nous avons mis en garde plus d’une fois contre les dangers de la situation », a-t-il déclaré – un commentaire surprenant puisque les officiers de l’armée ne sont pas autorisés à faire des déclarations politiques.

    Un haut responsable de l’armée a confirmé à l’Associated Press que la situation économique avait considérablement affecté le moral. « Il ne fait aucun doute qu’il existe un grand ressentiment dans les rangs de l’armée », a déclaré le responsable.

    Le responsable a noté que « de nombreuses tâches sont exigées de l’armée », notamment le maintien de la stabilité interne. « Les dirigeants sont inquiets de l’évolution de la situation sécuritaire sur le terrain et de la capacité de traiter ce problème », a déclaré l’officier, s’exprimant sous couvert d’anonymat conformément à la réglementation. Soutenir l’armée est crucial pour éviter que le Liban ne sombre dans le chaos, a-t-il ajouté.

    La France convoque jeudi une conférence virtuelle de collecte de fonds pour demander une aide d’urgence, après que le chef de l’armée Aoun s’est rendu à Paris le mois dernier pour demander de l’aide. La France a averti que l’armée libanaise « pourrait ne plus être en mesure de mettre pleinement en œuvre ses missions essentielles à la stabilité du pays ». Les États-Unis, le plus grand bailleur de fonds de l’armée, se sont engagés à augmenter leur aide en 2021.

    L’armée contrebalance en partie le Hezbollah, la faction chiite soutenue par l’Iran qui revendique une force armée puissante ainsi qu’une domination politique. Nerguizian a averti que la dégradation de l’armée permettrait au Hezbollah de se profiler encore plus – un résultat que peu de personnes en dehors du Liban, en particulier à Washington, souhaitent voir se concrétiser.

    Cela pourrait également ouvrir la porte à des pays comme la Russie, la Chine, l’Iran ou la Syrie pour coopter la force et trouver des moyens de l’influencer.

    Le général Frank McKenzie, commandant du commandement central américain, a déclaré plus tôt ce mois-ci que les États-Unis s’étaient engagés à soutenir l’armée libanaise.

    « Ils sont l’un des éléments du gouvernement libanais qui fonctionne très bien, et nous pensons qu’ils devraient continuer à être la seule expression de la puissance militaire de l’État au Liban », a-t-il déclaré.

    Après des décennies de corruption et de mauvaise gestion par l’élite politique, l’économie libanaise a commencé à se désintégrer en octobre 2019. Le secteur bancaire autrefois florissant s’est effondré et la monnaie a perdu environ 90 % de sa valeur par rapport au dollar sur le marché noir. Plus de la moitié de la nation est plongée dans la pauvreté .

    Les 80 000 militaires sont également touchés. Avant la crise, un soldat enrôlé gagnait l’équivalent d’environ 800 $ par mois, mais ce montant est maintenant tombé à moins de 100 $ par mois. Les salaires des officiers sont plus élevés mais ont également baissé en valeur, maintenant environ 400 $ par mois.

    L’armée a resserré ses dépenses. Il y a un an, il a annoncé qu’il cesserait d’offrir de la viande dans les repas donnés aux soldats en service. Il offre toujours un traitement médical gratuit, mais les membres de la force affirment que la qualité et l’efficacité se sont fortement détériorées.

    « Le moral est sous terre », a déclaré un soldat de 24 ans qui a quitté la force en mars après cinq ans de service.

    Il a déclaré qu’au moment de son départ, le salaire de 1,2 million de livres libanaises qu’il avait reçu était à peine suffisant pour la nourriture, les cigarettes et le transport. Il a parlé sous couvert d’anonymat, craignant des représailles.

    Mohammad Olayan, qui a pris sa retraite il y a deux ans après plus de 27 ans dans l’armée, a déclaré à l’Associated Press que son indemnité de fin de service avait été anéantie par l’accident. Au lieu d’une retraite décente, il doit maintenant accepter des petits boulots pour subvenir aux besoins de ses jumelles de 12 ans.

    « Quelle est la motivation pour les jeunes soldats ? » Il a demandé. « J’ai tellement sacrifié pour mon pays et regardez comment j’ai fini à cause de cette mafia », a-t-il déclaré, faisant référence aux politiciens.

    Nerguizian a déclaré que si dans l’ensemble les cas de désertion restent relativement faibles, la force a connu une augmentation des cas de manquement au devoir, des taux d’AWOL élevés et plus de travail au noir par le personnel pour augmenter les salaires.

    Les trois dernières années ont également vu certains des taux d’attrition les plus élevés, le personnel choisissant de quitter l’armée, a-t-il déclaré. « Plus inquiétant encore, la force perd des officiers et des sous-officiers de qualité – la matière grise et les capacités que la force a passé plus d’une décennie et demie à développer », a ajouté Nerguizian.

    Après le déclenchement de la guerre civile de 15 ans au Liban en 1975, l’armée s’est divisée selon des lignes sectaires. Il s’est réuni au début des années 1990 sous le commandement du général Emile Lahoud, qui en est devenu plus tard le président.

    Depuis lors, elle est devenue l’une des armées les plus professionnelles du Moyen-Orient. Les États-Unis lui ont donné plus de 2 milliards de dollars depuis 2007, dans l’espoir de construire un rempart contre le pouvoir du Hezbollah – bien que l’aide soit bien inférieure aux quelque 3 milliards de dollars par an qu’ils donnent à l’armée israélienne.

    L’armée est également l’une des rares institutions de l’État qui jouit du respect de la population libanaise, contrairement à ses politiciens, tellement embourbés dans des querelles internes qu’ils n’ont pas pu former de gouvernement depuis octobre.

    Lors des manifestations antigouvernementales qui ont balayé le pays fin 2019, des vidéos de soldats submergés par l’émotion face aux manifestants ont été largement partagées sur les réseaux sociaux.

    Elias Farhat, un général de l’armée libanaise à la retraite qui est actuellement chercheur en affaires militaires, a déclaré qu’il ne croyait pas que le scénario de l’effondrement soit désormais possible.

    « Ce n’est pas la crise d’une armée mais la crise d’un pays. Dans le passé, il y avait des problèmes de sécurité majeurs qui ont affecté l’armée et ont conduit à sa désintégration », a-t-il déclaré, faisant référence à la guerre civile.

    Associated Press, 16 juin 2021

    Etiquettes : Liban, armée, crise politique, crise économique, salaires, moral, criminalité, conflits sectaires,

  • Financial Times: L’Algérie au bord du gouffre

    L’Algérie au bord du gouffre, victime de la pandémie et de la faiblesse des prix du pétrole

    Beaucoup avaient espéré un changement après le renversement du président, mais les analystes mettent en garde contre une crise économique.

    Devant une banque à Alger, Slimane a sorti d’un sac des colliers et des bagues en or, les bijoux de sa femme, qu’il espérait utiliser comme garantie pour un prêt.

    Pendant la pandémie, l’homme d’affaires de 46 ans a dû fermer sa petite entreprise de conception et de production de matériel publicitaire et se séparer de ses quatre employés à plein temps.

    « C’était très dur. J’avais l’impression que le ciel me tombait sur la tête », a déclaré Slimane, qui ne souhaitait pas que son nom complet soit publié. « La pandémie a obligé les entreprises à réduire leur activité ou à fermer complètement, notamment dans le secteur du voyage sur lequel je comptais pour les clients. Ma femme m’a demandé de mettre en gage ses bijoux en or pour que nous puissions ouvrir une épicerie dans notre quartier. »

    La pandémie de coronavirus a durement touché les Algériens, exacerbant les malheurs d’une économie dominée par l’État, déjà meurtrie par des années de chute des prix du pétrole et de restrictions des investissements locaux et étrangers.

    Même avant la pandémie, près d’un tiers des jeunes Algériens étaient au chômage et beaucoup avaient espéré un changement après les énormes manifestations qui ont conduit à la démission du président Abdelaziz Bouteflika en 2019.

    Mais avec une économie peu diversifiée, qui dépend uniquement des exportations de pétrole et de gaz, et des réserves de devises étrangères en voie d’épuisement, l’Algérie pourrait bientôt faire face à une catastrophe économique, préviennent les analystes. Peu de gens croient que les politiciens peuvent apporter un changement significatif, un fait rendu clair par la faible participation aux élections du week-end dernier. Pour le régime soutenu par l’armée, les analystes estiment que le scrutin parlementaire, le premier depuis les manifestations, lui a permis de projeter un renouveau démocratique, tandis que toute coalition gouvernementale d’indépendants et de partis favorables au régime qui en résulterait ne devrait pas ébranler le statu quo.

    « La tendance économique est extrêmement négative », a déclaré Riccardo Fabiani, directeur pour l’Afrique du Nord à l’International Crisis Group, une organisation spécialisée dans la résolution des conflits. « Il y a une crise de liquidités dans les banques et les entreprises locales. Dans le secteur de la construction, le plus grand secteur après le pétrole, il y a eu un nombre record de faillites. Le pays pourrait se diriger vers un désastre économique avec un lourd coût social. »

    L’économie s’est contractée de 6 % l’an dernier, selon le FMI, qui prévoit une croissance de 2,9 % en 2021 grâce à la hausse des prix du pétrole. Il prévoit un déficit budgétaire de 18,4 % du produit intérieur brut en 2021. Pour équilibrer son budget, le prêteur a déclaré que l’Algérie avait besoin d’un prix du pétrole de 169,6 dollars le baril, soit plus du double du prix actuel de 72 dollars. Cependant, selon les analystes, il n’y a pas de clarté sur la façon dont le régime prévoit d’anticiper une catastrophe économique potentielle.

    « Les politiciens disent qu’ils veulent ouvrir l’économie et la diversifier », a déclaré Mabrouk Aib, professeur d’université et analyste des politiques publiques en Algérie. « Ils veulent beaucoup de choses. C’est ce qu’ils prétendent, mais en réalité nous ne savons pas s’ils ont une stratégie claire sur la façon dont ils vont mettre cela en œuvre. » 

    Alors même que la chute des prix du pétrole ces dernières années a mis à mal les finances du gouvernement et limité sa capacité à offrir des aides et à créer des emplois pour sa population majoritairement jeune, les décideurs militaires algériens, ou decideurs comme on les appelle, n’ont pas réussi à diversifier l’économie. Au lieu de cela, les gouvernements successifs ont brûlé les réserves de devises étrangères, qui ont sombré de 200 milliards de dollars en 2014 à 47 milliards de dollars en 2020. 

    Les militaires, qui contrôlent traditionnellement les décisions clés depuis l’indépendance de la France en 1962, ont été réticents à introduire des réformes qui permettraient de libérer le secteur privé, d’encourager les investissements et d’apporter de la transparence à un système économique construit sur un réseau d’intérêts particuliers et de clientélisme alimenté par les pétrodollars. Sous le régime de Bouteflika, un secteur privé capitaliste de connivence a pu prospérer, bénéficiant du patronage politique et des largesses du gouvernement. Nombre de ces hommes d’affaires sont aujourd’hui en prison pour corruption et certaines de leurs entreprises ont été rachetées par l’État. 

    Compte tenu de son manque de dette extérieure et de la hausse du prix du pétrole, le régime algérien peut encore gagner « un an ou deux », a noté M. Fabiani. Il pourrait recourir à des emprunts bilatéraux auprès de la Chine ou du Golfe. Abdelmadjid Tebboune, le président, a exclu l’année dernière un prêt du FMI, suggérant que cela limiterait la capacité du pays à avoir une politique étrangère indépendante. « La grande question reste de savoir ce que le nouveau gouvernement va faire », a déclaré M. Fabiani. « Auront-ils de nouvelles idées ? »

    Déjà, la hausse des prix a suscité des demandes répétées d’augmentation de salaire et des grèves par différents secteurs de la société, des enseignants aux médecins en passant par les postiers. Les pompiers ont manifesté en uniforme le mois dernier et ont été dispersés par la police à l’aide de gaz lacrymogènes.

    Se méfiant des protestations, les autorités ont sévi à l’approche de l’élection, empêchant les marches du mouvement pro-démocratie du pays qui a chassé Bouteflika en 2019 et inondant le centre d’Alger de voitures de police. Plus de 200 personnes sont en prison en lien avec les manifestations.

    Les autorités ont beau étouffer la dissidence, elles savent bien que les conditions de vie sont de plus en plus dures pour les Algériens qui souffrent sous l’effet conjugué des lockdowns, des fermetures d’entreprises et de l’inflation.

    « J’ai une famille de sept personnes à faire vivre, mais l’entreprise de construction pour laquelle je travaillais a fermé », a déclaré Samir Yefsa, un quinquagénaire au chômage. « L’État était notre seul client, mais le gouvernement n’a désormais aucun programme de construction. Je ne sais pas quoi faire. J’ai des problèmes pour nourrir ma famille. Je ne peux qu’emprunter à la famille et aux amis qui sont à la retraite et vivent de pensions, car d’autres, plus jeunes, sont dans une situation similaire à la mienne. »

    Sur un marché d’Alger, Naima, une enseignante du primaire, s’est plainte de la hausse des prix et de l’érosion de son pouvoir d’achat. « Je vous jure que je n’ai pas acheté de fruits pour mes enfants depuis deux mois », dit-elle. « Il y a certains articles maintenant qui sont juste trop chers pour ceux qui ont des revenus moyens ou petits ».

    Financial Times, 15 juin 2021

    Etiquettes : Algérie, Financial Times, pandémie, covid 19, prix du pétrole, crise économique,

  • Algérie : Les défis du futur gouvernement

    Les défis du futur gouvernement algérien face aux turbulences géostratégiques et aux tensions socio-économiques

    Par : Professeur Abderrahmane MEBTOUL

    Cette présente contribution, pour éviter toute mauvaise interprétation, en tant que professeur des universités, et expert international, est une brève synthèse concernant le volet socio-économique, les volets dialectique, géostratégique, celui de la défense/sécurité au niveau de la région méditerranéenne et africaine et la place de l’Algérie, de la conférence donnée le 08 juin 2021 de 10-12H30 à Alger, devant les représentants des pays de l’Union européenne -ambassadeurs, attachés économiques, politiques , experts de l’Union européenne chargés du Maghreb et le représentant de la Banque mondiale qui est le prolongement de la conférence donnée le 19 mars 2019 de 14-16h à l’Ecole supérieure de guerre MDN et le même jour au siège de l’ambassade de 19-20h30 devant les attachés économiques de la majorité des ambassades accrédités à Alger dont la Russie et la Chine, ayant été initiées par l’ambassade des Etats Unis d’Amérique, sur le thème l’impact de la baisse des hydrocarbures sur les équilibres macro-économiques et macro- sociaux de l’Algérie , où nos prévisions se sont malheureusement avérées justes. Mais avons-nous été écouté?

    L’Algérie aura en principe un nouveau gouvernement, après les élections législatives du 12 juin, au plus tard courant juillet 2021 et nombreux sont les défis qui l’attendent et ce, dans une conjoncture de crise mondiale qui touche tous les pays de la planète due à l’épidémie du coronavirus, avec une dette publique mondiale et un taux de chômage sans précédent, depuis la crise de 1929. Mais l’expérience historique montre que l’instauration de la démocratie ne se fait pas d’une baguette magique, les pays occidentaux ayant mis des siècles et ne pouvant plaquer sur un corps social des schémas d’autres pays devant tenir compte des anthropologies culturelles.

    1.-Une gouvernance mitigée combinée aux impacts de l’épidémie du coronavirus qui a touché toute la planète, a entraîné, une dégradation des indicateurs macro-économiques et macro-sociaux. Le taux de croissance du produit intérieur brut qui détermine le taux d’emploi, est en nette diminution, estimée en 2020 à 160 milliards de dollars et selon le FMI de 153 milliards de dollars pour 2021.

    Cela s’explique par la léthargie de l’appareil de production impacté tant par sa structure passée que par l’épidémie du coronavirus, ( selon le patronat une perte d’emplois d’environ 500.000 uniquement dans le BTPH) et le tissu économique fonctionnant à peine à 50% de ses capacités.

    Les entrées en devises entre 2000/2019 ont été supérieures à 1000 milliards de dollars pour une sorties de biens et services d’environ 935 milliards de dollars, le solde étant les réserves de change fin 2019 pour un taux de croissance dérisoire entre 2/3% alors qu’il aurait du dépasser les 9/10% : mauvaise gestion ou surfacturation. Si on applique seulement un taux de surfacturation de 15%, les sorites illégales de devises sont supérieurs à 140 milliards de dollars et ce avec la complicité d’opérateurs étrangers. Il es utile de rappeler qu’en tant que haut magistrat à la cour es comptes (premier conseiller) et directeur général des études économiques entre 1980/1983, ayant été chargé du dossier du contrôle du programme pénurie et des surestaries, j’avais proposé un tableau de la valeur au niveau du ministère des finances pour détecter ces surfacturations , tableau qui n’a jamais vu le jour car s’attaquant à de puissants intérêts rentiers.

    Comme ayant eu à diriger l’audit sur Sonatrach entre 2007/2008 , il a nous été presque impossible d’avoir une vision claire de la gestion de Sonatrach notamment coûts arrivé au port tant du baril du pétrole que du coût du gaz -MBTU- faute de comptes physico-financiers et de comptabilités analytiques éclatés par sections.

    Quant à l’avant-projet de loi de finances complémentaire 2021, non encore adopté par le conseil des ministres, il a prévu des importations de biens à 30,42 milliards de dollars, non inclus les services (appel à l’assistance étrangère) qui ont fluctué pour 2010/2019 entre 10/11 milliards de dollars/an. Avec une coupe de 50%, cela donnerait une sortie de devises de plus de 35 milliards de dollars accroissant les tensions budgétaires et avec 5 milliards de dollars plus de 40 milliards de dollars si l’on relance les projets gelés et si l’on exclut l’endettement extérieur. Les prévisions donnent un déficit budgétaire record au cours de 130 dinars un dollar, 25,46 milliards de dollars soit 16,0% et 13,6% du PIB.

    Quant au déficit du Trésor qui s’aggrave, il est prévu 31,85 milliards de dollars. Nous assistons à une dépréciation accélérée du dinar qui est passé d’environ à 75/78 dinars un euro entre 2000/2005 et qui en juin 2021 dépasse 133 dinars un dollar (5 dinars un dollar vers les années 1970) et 162 dinars un euro avec un écart d’environ 50% sur le marché parallèle induisant une inflation importée, malgré les restrictions des voyages.

    Les réserves de change qui tiennent à 70% la cotation du dinar, sont passées de 194 milliards de dollars fin 2013 ,à 62 fin 2020, 42 fin 2021 et qu’en sera-t-il fin 2021 avec toutes les restrictions qui ont paralysé tout l’appareil de production en 2020 ? Les banques locales dépassent 45% du total de leurs actifs bancaires avec une dette publique par rapport au PIB de 63,3%, prévue en 2021, contre 53,1% en 2020, et la dette publique nette totale représentera 60,5%, contre 50,4% en 2020,mais avec une dette extérieure faible, 3,6% et 5,2% du PIB en 2021 et 2022, contre 2,3% en 2020. Sur le plan macro- social, selon le FMI, le taux de chômage incluant la sphère informelle et les emplois rente, devrait atteindre 14,5% en 2021, et 14,9% en 2022, contre 14,2% en 2020, ce taux dépassant les 20/30% pour les catégories 20/30 ans et paradoxalement les diplômés.

    L’inflation qui sera de longue durée fonction, des réformes structurelles entre 2000/2020 ,selon données de l’ONS dépasse, cumulée, 90% et sera supérieure en cumulant l’année 2021 de 100% accroîtra la détérioration du pouvoir d’achat et les revendications sociales. Pour l’Algérie, le population active dépasse 12,5 millions sur une population totale résidente, 44,7 millions d’habitants au 1er janvier 2021 avec une sphère informelle représentant selon le FMI 33% de la superficie économique mais plus de 50% hors hydrocarbures.

    Elle contrôle une masse monétaire hors banques, selon les informations données par le président de la république, entre 6000 et 10.000 milliards de dinars 30-45% du PIB , différence montrant l’effritement du système d’information, soit au cours de 130 dinars un dollar entre 46,15 et 76,90 milliards de dollars. Quant aux caisses de retraite selon le ministère du Travail, en date du 08 avril 2021 le déficit financier de la CNR pourrait atteindre 690 milliards de dinars en 2021, le nombre de retraités dépassant les 3,3 millions, le CNR enregistrant un taux de cotisation , estimé à 2,2 travailleurs pour chaque retraité alors que pour un équilibre , le taux de cotisation devrait atteindre cinq travailleurs pour un retraité. Encore que les transferts sociaux et subventions généralisées, qui représenteront 23,7% du budget général de l’Etat et 9,4% du PIB pour l’exercice 2021 sont intenables dans le temps

    2.- Après la dernière réunion de l’OPEP¨+ début juin 2021, le quota de l’Algérie augmentera légèrement en juillet, de 14.000 barils/jours, relative à une augmentation de 441.000 barils/jour de leur production le mois juillet 2021. Cela donnera une recette additionnelle pour les six mois du second semestre 2021 au cours de 65 dollars le baril, moyenne annuelle 166.000 dollars, un montant très modeste. Mais l’on ne doit pas oublier selon les rapports de l’OPEP de mai 2021 que la production algérienne de pétrole est passée de 1,2 million de barils/j entre 2008/2010 à environ 850.000 barils/j en mai 2021 et que les exportations de gaz ( GNL et GN à travers les canalisations Transmed via Italie et Medgaz via Espagne sont passées d’environ 65 millions de mètres cubes gazeux à 41/42 milliards de mètres cubes gazeux en 2020 et où le cours sur le marché libre est passé pour la même période de 10/12 dollars le MBTU à 2,5-3,0 dollars le MBTU. Aussi , les recettes totales en devises ( pas le profit net devant retirer les coûts ) d’exportation seront un petit plus élevé que prévu dans la loi de finances complémentaire 2021, à environ 26/27 milliards de dollars.
    Et comme la majorité des exportations relèvent de Sonatrach, ce montant est fonction du cours du pétrole s’il se maintient entre 60/65 dollars et du gaz (33% des recettes de Sonatrach).

    L’on devra tenir compte de la baisse en volume tant du pétrole que du gaz d’environ 20/25% entre 2008/2020. Cette situation impose en urgence la publication des décrets d’application de la nouvelle loi des hydrocarbures qui accusent un retard intolérable, et éventuellement d’autres amendements pour tenir compte de la forte concurrence internationale avec le retour de l’Iran et de la Libye sur le marché et de la nécessaire transition énergétique.
    L’Algérie est un producteur marginal, les réserves de pétrole étant d’environ 10 milliards de barils et entre 2000/2500 milliards de mètres cubes gazeux selon les déclarations en 2020 de l’ex-Ministre de l’Energie.

    Au rythme actuel , l’Algérie ne pourrait plus honorer ses engagements internationaux du fait notamment de la forte consommation intérieure qui en 2030 dépassera les exportations actuelles ( subventions généralisées et non ciblées) . Aussi l’objectif est d’accélérer la transition énergétique devant s’orienter vers un Mix énergétique où en plus l’Algérie possède d’importantes potentialités dans l’agriculture, le tourisme, les nouvelles technologies, ayant une importante diaspora et dans les énergies renouvelables mais ne devant jamais oublier que le fondement du développement du XXIème siècle repose sur la gouvernance à travers des décentralisations ( grands pôles économiques régionaux) évitant le mythe d’entités locales administratives budgétivores et bureaucratiques et la valorisation du savoir .
    A. M.
    ( A suivre…)

    Le Maghreb, 15-06-2021

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  • Algérie/Elections législatives : Les futurs députés face à de grands défis

    C’est ce samedi que commencent les élections législatives en Algérie, un rendez-vous électoral majeur dans le processus de renouvellement des institutions du pays, entamée après l’élection présidentielle de décembre 2019.

    Une autre étape décisive, après le référendum sur la nouvelle Constitution, dans la stratégie de réformes du Président Abdelmadjid Tebboune, visant le changement exigé par le peuple, sorti massivement depuis le 22 février 2019, à travers l’élection de la nouvelle Assemblée populaire nationale (APN), qui peut faire émerger une nouvelle configuration de la scène politique et risque notamment de modifier les équilibres du pouvoir exécutif, surtout après la participation record des listes indépendantes.

    Comme le stipule la Constitution, les résultats des législatives sont déterminants de la couleur du nouveau gouvernement. Dans le cas d’une majorité parlementaire, le gouvernement sera dirigé par un chef de Gouvernement, qui sera chargé par le président de la République de former son staff et d’élaborer son programme.

    Le prochain parlement se trouvera confronté au défi de la crise économique, provoquée par l’effondrement des prix du pétrole et la crise sanitaire due à la propagation de la Covid-19. Tous les indicateurs sont dans le rouge sur le plan financier, après que les exportations des hydrocarbures, dont dépend l’économie nationale, ont connu une chute de 40 % au début de 2020.

    Une situation difficile nécessitant une réflexion rapide et des solutions urgentes pour surmonter la crise et ses conséquences qui impactent directement les citoyens, particulièrement avec les tendances inflationnistes qui pèsent sur le pouvoir d’achat des ménages.

    Des réformes économiques s’imposent en urgence, surtout que la mission de contrôle par le Parlement de l’action du Gouvernement a été renforcée, allant jusqu’au retrait de confiance.

    L’une des plus fragiles missions pour les futurs élus sera de valider à la majorité des deux tiers la décision du président de la République, d’envoyer des troupes algériens à l’étranger.

    Selon la nouvelle Constitution, «l’Algérie peut, dans le cadre des Nations Unies, de l’Union africaine et de la Ligue des Etats arabes, et dans le respect de leurs principes et objectifs, participer au maintien de la paix ».

    L’organisation des élections communales anticipées sera la prochaine étape cruciale pour conforter les bases du processus du changement en Algérie, en optant pour le renouvellement des institutions de l’Etat et la réhabilitation des instances élues.

    L’émergence d’une nouvelle génération d’élus compétents permettra d’avoir une nouvelle assise politique, qui remettra le pays sur les rails pour relever les défis économiques et sociaux.

    Le Jeune Indépendant, 11 juin 2021

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