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  • Gouvernance environnementale au Sahara Occidental

    Gouvernance environnementale au Sahara Occidental

    Tags : Gouvernance environnementale, Sahara Occidental, Maroc, désertification, changement climatique,

    Questionné sur la gouvernance environnementale dans le territoire disputé du Sahara Occidental, le Maroc a présenté les arguments suivants :


    I- Pertinence de l’examen de la question de la gouvernance environnementale :

    L’examen de la question de la gouvernance de l’environnement est très utile à l’exercice mené dans le cadre de la déclinaison des idées mentionnées dans le paragraphe 120 du rapport du Secrétaire général et ce, pour plusieurs raisons :

    La problématique de la protection de l’environnement a été propulsée, depuis 1972 et surtout après le Sommet de Rio en 1992, en tête de l’agenda onusien, suite aux constats alarmants sur l’état de l’environnement dans le monde.

    En 2000, les Nations Unies adoptaient les objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et notamment le 7ème objectif qui consiste à assurer un environnement humain durable.

    Selon la Convention des Nations Unies de lutte contre la désertification, 250 millions de personnes sont directement affectées par la désertification, et environ 1 milliard de personnes, dans plus de cent pays, sont menacées par ce phénomène.

    Selon, l’ONU, la désertification constitue un obstacle majeur pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement, en Afrique.

    C’est en Afrique, au nord comme au sud du Sahara, que la désertification fait le plus de dégâts : Les deux tiers du continent sont constitués de zones désertiques ou arides.

    Les conséquences, actuelles et projetées, des changements climatiques sur le développement des pays africains sont :

    L’aggravation du stress hydrique et multiplication des conflits liés à l’accès à l’eau ;

    Les difficultés en matière de production agricole et d’insécurité alimentaire croissante ;

    Les problèmes énergétiques en constante augmentation, compliquant davantage les problèmes liés au développement industriel ;

    L’appauvrissement de la diversité biologique, faisant peser des menaces sur le bien-être de millions de personnes qui dépendent de la diversité biologique pour leur subsistance ;

    La multiplication des risques de conflits, l’instabilité et les menaces à la sécurité liées aux migrations massives de populations.

    II- Enjeux de la gouvernance environnementale au Maroc :

    Le Maroc est confronté à plusieurs défis environnementaux qui représentent des goulots d’étranglement par rapport aux efforts de développement humain déployés au niveau national et local :

    1- Une situation de stress hydrique :

    De part sa situation géographique, le Maroc est caractérisé par un climat fortement contrasté avec un régime pluviométrique dominé par une forte irrégularité dans l’espace et dans le temps. Les ressources naturelles en eau au Maroc sont parmi les plus faibles au monde, et le Maroc, est parmi les pays ayant le moins de ressources en eau par habitant.

    En effet, le potentiel des ressources en eau naturelles, est évalué à 22 milliards de Mètres cubes par an, soit l’équivalent de 730 Mètres cubes /habitant/an. Plus de la moitié de ces ressources sont concentrées dans les bassins du nord et le Sebou couvrant près de 7% du territoire national.

    De plus, les apports en eau sont très irréguliers dans le temps : ils peuvent varier dans un rapport de 1 à 9 suivant les années. Ils sont également variables dans l’espace : les apports par habitant peuvent varier dans un rapport de 1 à 8 entre les bassins.

    Cette situation risque de se dégrader sous l’effet des changements climatiques. En effet, dans les dernières décennies, le Maroc a souffert de ce phénomène avec une aggravation des phénomènes extrêmes et une réduction importante de la pluviométrie et par conséquent des écoulements.

    Dans ce contexte et pour accompagner le développement du pays, le Maroc s’est engagé depuis longtemps dans la voie de la maîtrise de ces ressources en eau à travers la réalisation d’importantes infrastructures hydrauliques, ce qui lui a permis d’assurer ses besoins en eau sans difficultés majeures.

    Le Maroc a réussi à bâtir un modèle efficient de gouvernance de l’eau, propre au pays et cité en exemple à l’échelle internationale. La stratégie du Maroc a permis de doter le pays d’importantes infrastructures hydrauliques constituées de 128 grands barrages totalisant une capacité de près de 17 Milliards de Mètres cubes et de plusieurs milliers de forages et de puits captant les eaux souterraines.

    Toutefois, le secteur de l’eau reste confronter à des défis liés principalement à la raréfaction des ressources en eau sous l’effet des changements climatiques, à la surexploitation des ressources en eau souterraine.

    Le scénario tendanciel montre que la plupart des bassins seront déficitaires à terme à l’horizon 2030. Le déficit cumulé est estimé à près de 2.4 Milliards de Mètres cubes par an.

    2- Le problème de la désertification :

    Selon le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification (HCEFLCD), la fragilité des écosystèmes et l’aridité du climat rendraient près de 90% du territoire marocain vulnérable à la désertification ;

    L’allongement de la durée des cycles de sécheresse et les conditions de vie précaires en zone rurale, qui incite les populations y résidant à surexploiter les ressources naturelles locales, sont actuellement les principales causes de l’évolution de la désertification au Maroc ;

    Les conséquences directes de la désertification sont particulièrement lourdes : raréfaction des ressources naturelles, perte de productivité des sols, envasement des barrages, ensablement rampant, accentuation de la pauvreté ;

    Dans le cadre du Programme d’Action National de Lutte Contre la Désertification, lancé depuis 2001, le Maroc a entrepris l’aménagement de 579 000 hectares de bassins versants, le reboisement et la stabilisation des dunes sur une superficie de 36 000 hectares ;

    Ce travail de préservation du territoire marocain a aussi été caractérisé par la création de 10 parcs nationaux, 3 réserves de biosphère, 24 réserves biologiques et naturelles, la mise en place de 18 projets intégrés et la construction de 130 barrages.

    Le Maroc a adhéré à la Convention des Nations Unies sur la Désertification en 1994 et l’a ratifiée en 1996. 

    3- L’impact des changements climatiques :

    Bien qu’étant un faible émetteur de gaz à effet de serre, le Maroc est fortement impacté par les changements climatiques.

    Le Maroc ambitionne de découpler la croissance de son économie de ses émissions de gaz à effet de serre. Il est convaincu que la mise en œuvre d’une politique d’atténuation des changements climatiques par réduction des émissions de gaz à effet de serre lui permet de contribuer à son développement global, notamment grâce à l’introduction des technologies propres.

    Le Maroc œuvre en réagissant efficacement aux vulnérabilités et en anticipant une politique d’adaptation qui prépare l’ensemble de sa population et de ses acteurs économiques à faire face à ces vulnérabilités. Les vulnérabilités naturelles sont le stress hydrique, la fragilité du couvert végétal, la désertification et la sismicité.

    Avec le Plan National de lutte contre le Réchauffement Climatique, le Maroc met en place un processus permanent de pilotage des politiques nationales en la matière qui lui permet de progresser significativement et d’apporter des garanties de bonne gouvernance.

    Les impacts des changements climatiques les plus importants portent sur la réduction de la ressource en eau et l’aggravation de la désertification, sur l’agriculture, avec en particulier une réduction des récoltes céréalières et la disparition de certaines cultures, sur la disparition de la biodiversité et sur l’élévation du niveau de la mer, l’augmentation de la fréquence des sécheresses au Sud et à l’Est du pays et des orages sur l’Atlas, ainsi qu’une réduction de la durée d’enneigement de l’Atlas.

    III- Les enjeux et la pertinence de la gouvernance environnementale dans la région du Sahara marocain :

    1- Etat des lieux :


    Historiquement, le Sahara marocain a toujours constitué un relais privilégié pour le commerce caravanier dont les itinéraires ont longtemps fait de ces provinces marocaines une plaque tournante des échanges commerciaux avec le continent africain. Ainsi, Cette région a toujours constitué le point d’ancrage du Maroc en Afrique subsaharienne.

    Lorsque le Maroc a récupéré le Sahara en 1975, il a engagé un effort exceptionnel pour aider cette région à rattraper son retard économique et social, partant de la nécessité de développer des structures fonctionnelles et des programmes de mise à niveau adaptés aux spécificités de la zone

    Le Maroc a hérité d’un territoire aux besoins immenses et présentant de réelles contraintes :

    L’immensité du territoire rend difficile le désenclavement des localités éloignées, ainsi que   la généralisation des équipements de tous les centres en infrastructures de base (électricité,  routes, télécommunication, eau potable, dispensaires, écoles, etc.).

    L’éloignement de la région des principaux centres économiques du pays, entraîne un surcoût de transport des produits et rend difficile l’approvisionnement en matières premières, et la disponibilité d’une main d’œuvre qualifiée.

    Les conditions naturelles des provinces du sud sont très difficiles. La région se caractérise par Climat hyper-aride avec très faible pluviométrie (20-60 mm/an) et déficits hydriques considérables, des hautes températures avec des écarts thermiques importants et une forte évaporation, des vents violents fréquents et des sols squelettiques très appauvries.

    L’urbanisation accélérée au Sahara marocain a généré d’autres problèmes liés à l’aménagement du territoire et à la satisfaction des besoins vitaux des populations de la région. 68.5 % de la population des provinces Sud est concentrée dans des villes. Le taux d’urbanisation dépasse 75,73%.

    La fragilité de l’écosystème des provinces du Sud et les fortes pressions liées à l’urbanisation provoquent une inquiétante dégradation de l’environnement dans la région.

    La stratégie des autorités nationales et locales traduit cette volonté d’action à travers une approche globale et intégrée. Elle engage un processus de concertation et de coopération local porteur d’une vision d’avenir qui concilie les impératifs du développement économique et la préservation de l’environnement.
     L’Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH), lancée en 2005, destinée à combler le retard  affiché dans la réalisation des objectifs du Millénaire, participe également à cette effort national de réalisation d’un développement durable dans les provinces du sud.

    Assurer la conformité des actions de l’INDH aux politiques environnementales nationales est l’un des objectifs du plan de gestion de l’environnement (PGE).

    2- Gouvernance en matière d’environnement dans les provinces du sud : Objectifs et réalisations

    L’intérêt de la population locale est au cœur de la gestion durable des ressources des écosystèmes naturels de la région

    A/ Une Gouvernance construite sur une gestion de proximité

    Identification participative des projets

    Définition des responsabilités territoriales

    Exécution totalement déléguée des projets (appels d’offres locales, suivi-évaluation)

    B/ La misse en place de structures de gestion régionales:

    Direction des Eaux et Forêts et de la Lutte Contre la Désertification

    Agence des Bassins Hydrauliques

    Directions Régionales de l’Agriculture

    L’actuelle organisation administrative est prédisposée à la régionalisation avancée

    C/ Un programme de mise à niveau adapté

    Reconstitution des formations autochtones

    Lutte conte l’ensablement

    Création de ceintures vertes

    Conservation et valorisation de la Biodiversité

    Conservation des ressources en eau

    Valorisation agricole

    3- Quelques réalisations en matière de gouvernance environnementale dans les provinces sahariennes:

    1. Gestion des ressources en eau :

    La gestion de la ressource en eau dans les provinces du sud représente un défi colossal, du fait des contraintes naturelles et du climat aride qui caractérisent la région du Sahara marocain.

    Depuis 1975, les provinces du Sud ont bénéficié d’un programme de recherche et de mobilisation des ressources d’eaux souterraines, destiné principalement à l’alimentation des principales villes.

    Ce programme a été renforcé par une stratégie de conservation des ressources en eau, dont les objectifs se déclinent comme suit :

    Mobilisation et gestion rationnelle de l’eau.

    Amélioration du service d’approvisionnement en eau axée sur l’option du dessalement de l’eau de mer.

    Aménagements hydrauliques: 5 barrages, 2 lacs collinaires.

    Recharge artificielle de nappe.

    Installation de stations de dessalement de l’eau pour un volume de 6,4 Mm3/an (17% des réserves souterraines).

    Le recours au dessalement de l’eau de mer ou la déminéralisation des eaux saumâtres s’est également imposé pour diminuer les surexploitations des ressources souterraines.

    Les villes de Laâyoune et Boujdour ont été dotées d’unités de dessalement d’eau de mer, avec des capacités de production de 13 000m3/j à Laâyoune et 2600m3/J à Boujdour.

    Un important projet d’alimentation en eau potable a été réalisé pour la ville de Smara, à partir du champ captant de Sidi Al Khatari, avec une production
    de 3460m3/J.

    D’autres projets d’alimentation en eau potable sont mis sur pied tels que des centres de Foum el Oued et de la ville d’El Marsa et aussi d’alimenter la commune rurale de Sidi Ahmed Laaroussi dans la province de Smara et l’extension du réseau de distribution dans la ville de Smara et sa périphérie.

    50% de la population de la région Laâyoune Boujdour Sakia El Hamra bénéficiait en 2010 du service d’assainissement, 42% pour la région de Oued Ed Dahab Laouira, 28% pour la région de Guelmim Es Smara, contre 48% à l’échelle nationale.

    2. Développement durable des Oasis :

    Le Maroc, qui dispose de la plus grande superficie oasienne au monde, a lancé plusieurs programmes de développement territorial des oasis, qui intègrent l’enjeu des changements climatiques. Il s’agit :

    du développement d’une approche territoriale, visant à décliner les stratégies nationales au niveau des régions ;

    du programme de développement durable des oasis de Tafilalet ;

    du Programme de développement durable des oasis de Guelmim, de Tantan, d’Assa-Zag et de Tarfaya, impliquant 54 communes, pour la période 2010-2013.

    Le « Programme de Sauvegarde et de Développement des Oasis dans les provinces du sud du Royaume (POS) » piloté, depuis 2006, par l’Agence pour la Promotion et le Développement Economique et Social des Provinces du Sud du Royaume, vise, en priorité, la préservation, la valorisation de l’environnement naturel et la sensibilisation des acteurs locaux à la protection de l’environnement, avec une action concertée en faveur de la biodiversité et le développement du tourisme durable. La totalité des fonds alloués à ce programme s’élèvent à 18,11 Millions de dollars. Les bénéficiaires de ce projet sont les agriculteurs oasiens, les femmes, la société civile, les collectivités locales, et le secteur privé du tourisme..

    3. Lutte contre la désertification :

    Selon le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification (HCEFLCD), la fragilité des écosystèmes et l’aridité du climat au Maroc rendraient près de 90% du territoire marocain vulnérable à la désertification.

    Les conséquences directes de la désertification sont particulièrement lourdes : raréfaction des ressources naturelles, perte de productivité des sols, envasement des barrages, ensablement rampant.

    Dans les provinces du Sud du pays, l’ensablement dû à l’érosion éolienne, constitue l’une des principales manifestations de la désertification.

    Des dizaines de petites retenues et des centaines de seguia sont mises hors d’usage après seulement une courte période de fonctionnement sous l’effet de l’ensablement.

    Dans le cadre du Programme d’Action National de Lutte Contre la Désertification, lancé depuis 2001, le Maroc a entrepris l’aménagement de 579 000 hectares de bassins versants, le reboisement et la stabilisation des dunes sur une superficie de 36 000 hectares ;

    Ce travail de préservation du territoire marocain a aussi été caractérisé par la création de 10 parcs nationaux, 3 réserves de biosphère, 24 réserves biologiques et naturelles, la mise en place de 18 projets intégrés et la construction de 130 barrages.

    Le développement et valorisation du figuier de Barbarie dans les provinces sahariennes est un projet qui vise à optimiser la production de cette plante à des fins commerciales ce qui permettra d’améliorer les revenus de la population locale et repousser le phénomène de désertification.

    La promotion de la participation des populations locales garantit la pérennité des actions de développement et par-là même, à s’inscrire dans le cadre du développement durable en harmonie avec les capacités intrinsèques du milieu.

    4. Valorisation de patrimoine naturel :

    Le programme camelin vise à exploiter le cheptel de dromadaires des provinces du sud. Ce programme permettra de développer le territoire sur les plans économique, social, et culturel, par l’implication directe de la population locale. L’exploitation du dromadaire, seule espèce à pouvoir valoriser les vastes zones pastorales du sud, va créer des emplois, et maintenir ce mammifère comme facteur clé d’identification et de conscience patrimoniale des provinces du sud.

    Le développement et valorisation du figuier de Barbarie vise à optimiser la production de cette plante, très abondante dans le sud, et qui résiste fortement au climat aride de la région. La participation de plusieurs associations à ce projet a permis la valorisation de ce fruit et l’amélioration de sa commercialisation.

    La mise en valeur du Parc National de Dakhla : Le Parc National de Dakhla fut créé en 1992 sous l’égide d’Associations écologiques et l’INRH, dans le but de protéger 2 millions d’hectares couvrant la côte des phoques moines et l’Adrar Souttouf, immense reg intérieur parsemé de buttes gréseuses au relief souvent allongé ;

     La protection des phoques moines : La côte des phoques moines se caractérise par le paysage singulier de la falaise d’Aguerguer. Cette côte, abrite les rares phoques moines qui subsistent. Répondant aux besoins de la protection de l’environnement et la préservation du patrimoine naturel de la région, les autorités nationales et locales ont décidé d’intégrer le plan de sauvegarde du phoque moine de l’Atlantique Oriental. 

    Conservation et valorisation de la biodiversité :


    Pointe d’Awfist : SIBE littoral d’une superficie de 100 ha

    Baie de Cintra: Vaste baie marine de 22.000 ha.

    Hassi Touf : SIBE littoral, constitué par l’embouchure de Oued Kraa

    Repeuplement de la faune saharienne : Réhabilitation de la grande faune dans la station d’acclimatation de Safia à Dakhla (Aousserd) sur 900 ha, avec la participation active d’une association locale.

    5- Energies renouvelables :

    Le projet de développement intégré de l’Energie solaire vise la mise en place en 2020 d’une capacité de production électrique à partir de l’énergie solaire d’une capacité totale de 2 000 MW sur cinq sites : Ouarzazate-Ain BniMathar-Foum Al Oued-Boujdour et SebkhatTah.

    Le Royaume du Maroc a cherché à valoriser le potentiel des provinces du sud en termes d’énergie renouvelable en réalisant un parc éolien à Tarfaya de capacité de 200 à 300 mille Watts ainsi que deux parcs à Laâyoune de capacités de 100 mille Watts chacun.

    Quelques enseignements à tirer :

    Au cours des dernières trente années, la gestion centralisée des efforts de développement de la région du Sahara marocain a cédé le pas à une gouvernance territoriale de proximité avec la création de l’Agence pour la promotion et le développement Economique et Social des Provinces du sud du Royaume en 2002.

    Depuis lors, de nouveaux concepts et de nouvelles approches ont vu le jour : l’ensemble des projets et des initiatives de développement se sont inspirés d’une culture de partenariat, engageant ainsi les acteurs locaux et les différents « stakeholders » dans la définition des actions, en y intégrant la dimension de la protection de l’environnement.

    Le projet ambitieux de la régionalisation avancée dont bénéficieront en premier lieu les provinces du sud, constituera une nouvelle étape dans l’approfondissement de la gouvernance territoriale et servira de modèle aux autres régions du Royaume.

    La capitalisation des projets de développement durable mis en œuvre dans les provinces du sud ces dernières années témoigne des acquis certains enregistrés dans le domaine de planification locale ascendante, à travers des initiatives visant à asseoir les principes dune gouvernance environnementale.

    #Maroc #Sahara_Occidental #Environnement


  • La désertification détruit la Mauritanie

    Mauritanie, désertification, climat, sécheresse, changement climatique,

    Fadumo Abdulqadir*

    Alors que je marchais dans la chaleur torride à travers Taguilalett, en Mauritanie, j’ai vu des maisons sur le point d’être submergées par du sable jaune-rouge cloqué. Je réaliserais bientôt que c’est la dure réalité de la vie dans le nord-ouest de l’Afrique. L’imprévisibilité de la crise climatique est à l’origine de nombreuses destructions, allant du déracinement des familles et de la destruction des moyens de subsistance à un impact profond sur la santé et le mental.

    La désertification, c’est-à-dire le processus par lequel des terres fertiles deviennent désertiques, est un problème important dans toute l’Afrique. Actuellement, 45 pour cent de la masse terrestre de l’Afrique connaît la désertification, avec un pourcentage encore plus élevé à haut risque. La Mauritanie est fortement affectée par le changement climatique et le fardeau de la désertification.

    Étant donné que 90 % de la Mauritanie se trouve dans le désert du Sahara, le pays est particulièrement vulnérable aux effets de longues périodes de sécheresse et à la diminution des précipitations. Pour les civils, ces catastrophes naturelles peuvent briser des vies. Actuellement, près de 17 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté extrême, avec un enfant sur quatre vivant dans la pauvreté absolue . De nombreux Mauritaniens dépendent des ressources naturelles pour subvenir à leurs besoins, et la désertification a gravement affecté le développement économique du pays. Le changement climatique plonge des communautés déjà vulnérables dans une pauvreté accrue.

    Comba Ibrahim de Taguilalett m’a raconté comment elle s’est échappée de son ancien village après que le sable a inondé leur maison. Elle a déménagé dans un nouveau village dans l’espoir d’échapper au sable saharien. L’enlèvement régulier du sable, qui demande de la force, affecte son corps : elle souffre de courbatures et de douleurs qui lui causent des nuits blanches.

    Elle a également des taches sombres sur la main causées par le pelletage constant de sable chaud. En regardant ses mains, j’ai été attristé de voir les cicatrices, un rappel visuel et poignant de son combat. « C’est la vie en Mauritanie », m’a-t-elle dit. Sa situation est désastreuse, comme le reste de sa communauté. L’impact de la désertification détruit ses moyens de subsistance et sa santé, et il y a peu de répit pour ses luttes.

    Parallèlement à la désertification, les habitants doivent également faire face à la crise de la pénurie d’eau. L’eau fraîche, propre et salubre est un luxe ici; selon l’ Organisation mondiale de la santé, 2 150 Mauritaniens meurent chaque année de maladies diarrhéiques, la majorité (90 %) de ces décès sont liés à l’eau contaminée . Ceux qui vivent dans des villages reculés ont encore plus de mal à accéder à l’eau potable en raison de la rareté de l’eau.

    Malgré leurs luttes, beaucoup de Mauritaniens souffrent en silence. Maria Neira, directrice du Département de l’environnement, du changement climatique et de la santé à l’OMS, a récemment déclaré : « Les impacts du changement climatique font de plus en plus partie de notre vie quotidienne, et il y a très peu de soutien dédié à la santé mentale disponible pour les personnes et les communautés confrontées à aléas liés au climat et risque à long terme ».

    Fatima Ahmed, une autre habitante à qui j’ai parlé, s’inquiète constamment du bien-être de ses enfants. Trois de ses quatre enfants sont aveugles – les enfants sont nés aveugles – elle pense que la chaleur excessive et les tempêtes de sable exacerbent encore leur santé. Elle s’inquiète pour l’avenir qu’ils pourraient avoir si la situation ne s’améliore pas. J’ai compris son inquiétude alors que j’étais assis dans sa maison en tôle ondulée d’une pièce. Alors que c’était étouffant d’être dans le désert du Sahara, être à l’intérieur de sa maison en tôle ressemblait presque à un dôme chauffant. Alors que sa situation détériore la santé de sa famille, elle reste reconnaissante d’avoir un chez-soi. Elle espère que sa maison et ses affaires ne disparaîtront pas sous le sable mouvant.

    La maison de Fatima est l’une des nombreuses maisons inhabitables de Taguilalett. La vice-maire de Taguilalett, Amina Mohamed, nous a fait visiter le village, soulignant à quel point la désertification menaçait la nourriture, le logement et la santé de la population. « La désertification a touché les habitants de Taguilalett, de nombreuses maisons sont invivables. Les gens ont décidé de quitter le village à cause d’un manque d’eau et de revenus. Ils se déplacent vers la capitale, Nouakchott, pour commencer une nouvelle vie. De nombreuses vies ont été détruites – et je regarde un autre village disparaître sous le sable », a-t-elle dit.

    Si le changement climatique est le facteur le plus important de la désertification, il est crucial de ne pas ignorer que les activités humaines en sont également partiellement responsables. La déforestation est courante en Mauritanie et, avec l’augmentation de la pauvreté, les gens se tournent vers d’autres sources de revenus . Selon Global Forest Watch, de 2001 à 2021, la Mauritanie a perdu environ 33 hectares de couverts arborés. Les habitants coupent illégalement des arbres et les brûlent dans l’espoir d’obtenir du charbon de bois. Pour eux, le charbon de bois est une source de revenus et un moyen de survivre. Beaucoup reconnaissent à peine les implications de l’abattage des arbres sur l’environnement et comment cela aggrave la désertification. Ils vont à des mesures extrêmes en raison de leur désespoir. Cette situation n’est pas non plus un cas isolé. A Nouakchott, ils sont confrontés au même problème. Ils ont combattu ce problème en installant des barrières et des gardes de sécurité pour protéger les arbres plantés.

    Comba Ibrahim de Taguilalett a déclaré qu’elle était « fatiguée de l’incertitude de sa vie », épuisée par les bouleversements constants auxquels elle et sa famille sont confrontés à cause de la désertification. Malheureusement, c’est l’histoire de beaucoup. Elle ne supporte pas la vue du sable et veut le distancer. Pour Comba, et pour beaucoup d’autres Mauritaniens, le sable semble les suivre partout où ils vont. Ils ne peuvent tout simplement pas le distancer.

    Lancée en 2007, la Grande Muraille Verte vise à restaurer les paysages dégradés et à lutter contre la désertification dans la région du Sahel en Afrique. L’initiative vise à restaurer 100 millions d’hectares de terres dégradées et à créer 10 millions d’emplois verts d’ici 2030. Actuellement, le projet n’est achevé qu’à environ 15 %. Alors que l’initiative de la Grande Muraille Verte vise à prévenir la désertification, pour des personnes comme Comba et Fatima, qui font face à la dureté du changement climatique, elles ont besoin de soutien maintenant.

    *Fadumo Abdulqadir est notateur chez Muslim Hands, Royaume-Uni.

    Newsweek, 19/07/22

    #Mauritanie #Climat #Désertification #Sécheresse #Grande_muraille_verte

  • La combinaison des connaissances indigènes et scientifiques améliore la gestion des incendies au Sahel

    par Natalie Duncan*

    Le Sahel est une ceinture aride et chaude qui ne pardonne rien et qui s’étend sur le continent africain, du Sénégal au Tchad. Il marque la zone de transition entre le désert du Sahara au nord et les savanes humides au sud. Cette zone est caractérisée par un régime pluvial unique. Une longue saison sèche est suivie d’une saison des pluies courte mais intense ; certaines régions peuvent connaître jusqu’à 80 % de leurs précipitations annuelles entre les mois d’août et de septembre. Les populations qui vivent dans cet écoclimat difficile sont particulièrement vulnérables aux effets de la variabilité et du changement climatique.

    Au Sahel, le pastoralisme, ou l’élevage de bétail et d’autres ruminants, est le moyen de subsistance dominant. Les pasteurs s’appuient sur des informations liées au climat, comme la quantité et le moment des précipitations dans une région, pour prendre des décisions qui ont un impact sur leurs troupeaux. Cependant, les pasteurs signalent que la variabilité accrue du climat compromet leur prise de décision traditionnelle. Il est peut-être possible de surmonter ce problème en combinant les connaissances indigènes avec des informations scientifiques essentielles.

    En particulier, l’apport scientifique pourrait être utile aux communautés pastorales qui utilisent le brûlage dirigé dans le cadre des pratiques traditionnelles de gestion des terres, comme les Fulani au Sénégal.

    Le brûlage dirigé est différent des incendies de forêt, qui sont incontrôlés et ont souvent des effets dévastateurs. Les feux contrôlés sont allumés au début de la saison sèche pour améliorer les pâturages en éliminant les chaumes non appétissants, encourager la repousse et réduire le risque de feux de brousse plus incontrôlables plus tard dans la saison. Les pasteurs s’appuient sur les modes de connaissance indigènes pour élaborer leurs stratégies de brûlage. Ces modes de connaissance sont centrés sur la surveillance de la végétation et la prévision des conditions météorologiques futures ; pour la plupart, les connaissances indigènes reposent sur des preuves empiriques qui peuvent être vérifiées par l’expérience vécue.

    L’utilisation pastorale du feu pour la gestion des terres – y compris le moment, la fréquence et l’intensité des feux – correspond bien à la compréhension scientifique de la préservation de l’écologie dans le biome de la savane. Au Sénégal, la stratégie consiste généralement à allumer des feux au début de la saison sèche. Les feux sont plus fréquents dans le sud pour encourager la nouvelle croissance, mais rarement dans le nord, où la perte de fourrage l’emporte sur les autres avantages. L’étendue du brûlage est fonction du résultat souhaité : le brûlage de zones spécifiques d’herbes vivaces sèches permet de créer des pâturages, tandis que le brûlage de grandes étendues de zones environnantes crée des coupe-feu qui protègent les pâturages.

    Face à l’incertitude croissante du climat, il est possible d’intégrer des données scientifiques pour améliorer la résilience de la surveillance du climat par les autochtones et la prise de décision quant à savoir si, quand et comment effectuer un brûlage contrôlé. Trois paramètres cruciaux doivent être pris en compte pour s’assurer que les régimes de brûlage dirigé répondent de manière optimale aux besoins des pasteurs : la probabilité d’inflammation, la vitesse de propagation du feu et la quantité de combustible consommé. Pour quantifier ces paramètres, il existe cinq variables qui peuvent être mesurées à l’aide d’une collecte de données scientifiques : la teneur en humidité du combustible, la charge en combustible mort, le couvert végétal, la vitesse du vent et l’humidité relative. Ces variables sont liées aux conditions climatiques actuelles et passées et sont utiles pour prédire les risques de déclenchement d’un incendie.

    En incluant ces variables dans les simulations de la propagation des incendies, il est possible de développer un modèle météorologique des incendies pour les pays du Sahel, comme le Sénégal. Cela permettrait de formaliser la prédiction du comportement du feu, qui a été historiquement sous-étudiée dans les écosystèmes de savane d’Afrique. Les pasteurs bénéficieraient d’une meilleure compréhension de quand, comment et où utiliser le feu pour préparer efficacement les pâturages pour leurs troupeaux. Cela permettrait d’éviter les feux qui se propagent de manière intense et incontrôlée, endommageant les ressources naturelles limitées. En fait, lors d’un récent atelier financé par USAID, les pasteurs sénégalais ont déclaré avoir besoin de plus d’informations sur les conditions favorables aux feux de brousse.

    Cependant, l’utilité des données scientifiques et des modèles prédictifs seuls est limitée. Les cinq variables qui pourraient être utilisées comme intrants dans les simulations de propagation des feux ne tiennent pas compte des autres perturbations propres aux modes de vie pastoraux. Par exemple, les modèles par lesquels les pasteurs font migrer leurs troupeaux vers différents pâturages peuvent grandement influencer le comportement du feu, car la présence du bétail qui broute et piétine réduit naturellement la quantité d’herbe et donc l’intensité du feu.

    Compte tenu de l’incertitude liée au développement de modèles de prévision des incendies pour les écosystèmes de savane d’Afrique, il sera nécessaire de recourir à des techniques de vérification sur le terrain. Celles-ci s’appuieront probablement sur la surveillance du climat et de l’environnement effectuée par les éleveurs eux-mêmes, soulignant la nécessité de systèmes de connaissances à la fois scientifiques et indigènes.

    La création de partenariats entre les producteurs et la communauté scientifique est un domaine d’intérêt de l’Institut international de recherche sur le climat et la société de l’université Columbia, par le biais du projet « Adapting Agriculture to Climate Today, For Tomorrow (ACToday) Columbia World ». En se concentrant récemment sur la zone sahélienne, ACToday travaille au Sénégal pour établir des liens et accroître l’utilisation des données climatiques afin d’améliorer la résilience des éleveurs et de lutter contre l’insécurité alimentaire.

    L’utilisation en parallèle des modes de connaissance scientifiques et indigènes permet de surmonter les lacunes de chacun. Cela est soutenu par la littérature, qui a montré que l’utilisation des deux a eu un effet positif sur l’adaptation des pasteurs au climat. Les modèles de prévision des incendies qui prennent en compte les deux modes de connaissance seront essentiels pour améliorer la résilience pastorale face au changement climatique, ce qui permettra de mieux garantir que les feux de brousse restent contrôlés et que les brûlages dirigés sont d’une efficacité optimale.

    *Institut de la Terre de l’Université de Columbia

    Phys.org, 22 mars 2021

    Tags : Sahel, France, Barkhane, Tchad, Burkina Faso, Mali, Niger, Mauritanie,changement climatique, sécheresse, désertification,