Étiquette : DGST

  • Liste des services de renseignements au Maroc

    Liste des services de renseignements au Maroc

    Topics : Maroc, DST, DGED, 5e Bureau, DGST, RG, services secrets,

    Le guide des services

    Plusieurs agences et services s’occupent du renseignement au Maroc. Le tour du propriétaire.

    La toile de la DGST
    C’est sans doute le service qui a le plus fait parler de lui pendant les 30 dernières années. Son ancêtre, le CAB 1, était spécialisé dans la traque des opposants à Hassan II. Aujourd’hui, la DGST s’occupe prioritairement de lutter contre la prolifération de groupuscules terroristes dans les grandes villes. Placée sous la tutelle administrative du ministère de l’Intérieur, elle a pour mission d’“anticiper et suivre toutes les activités potentiellement subversives”. Son quartier général se trouve à Témara et ses brigades territoriales sont implantées un peu partout à travers le royaume, y compris au sein même de certaines administrations. Dans les coins reculés où la DGST ne dispose pas de relais, elle peut compter sur les services de renseignement de la Gendarmerie royale pour faire remonter l’information.

    Le brut de la DAG
    La Direction des affaires générales est l’un des départements les plus puissants du ministère de l’Intérieur. Sa mission ? Collecter et filtrer les renseignements provenant des différents agents de l’administration territoriale (gouverneurs, caïds, moqaddems, etc.). La DAG dispose d’ailleurs d’antennes dans pratiquement toutes les préfectures et wilayas du pays. C’est donc une source importante de renseignement de proximité, qu’elle partage ensuite avec les différents services concernés.

    L’œil des RG
    C’est l’outil de renseignement de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN). Ses méthodes d’investigation et de collecte de l’information restent assez basiques. Au sein de la police, elle est en effet concurrencée par de puissantes directions comme la Police judiciaire (PJ) ou la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ). Ces dernières ne font pas dans le renseignement, mais leurs enquêtes sont souvent rapides et efficaces.

    La veille du 2ème bureau
    Sous cette appellation anodine se cache une direction militaire ultra-sensible, chargée du “renseignement sur l’ennemi et de l’étude des menaces”. Elle doit donc rassembler un maximum d’informations sur les troupes des pays voisins comme l’Algérie et l’Espagne, leurs contrats d’armements et les mouvements de leurs unités, surtout sur les zones frontalières.

    Le contrôle du 5ème bureau
    Spécialisé dans le renseignement militaire, ce service assure le contrôle des troupes armées marocaines. Influences politiques et idéologiques, corruption, tentatives d’infiltration…tout y passe.

    Les oreilles de la DGED
    Le champ d’intervention de la DGED est très large : espionnage à l’étranger, suivi des activités des MRE, coopération avec les services étrangers sur des dossiers d’intérêt commun, Sahara, lutte contre le trafic de drogue, etc. Les principaux services de la DGED sont le service action, la direction de contre-espionnage qui collabore avec la DST et la direction des transmissions. Depuis quelques années, la direction coiffée par Mohamed Yassine Mansouri s’est également dotée d’une brigade financière.

    Zoom. Quand la DGED fait parler d’elle

    En septembre 2008, un mini-scandale éclate aux Pays-Bas. Un jeune policier d’origine marocaine est soupçonné de travailler pour le compte des services secrets marocains. Immédiatement licencié, il a été condamné (il y a tout juste quelques semaines) à quelques heures de travaux d’intérêt général. Le jeune Maroco-néerlandais s’en sort avec un minimum de dégâts, mais le mal est fait. Pourquoi ce jeune a-t-il été recruté par la DGED ? Cette dernière continuerait-elle à surveiller les activités des MRE ? Des questions, qu’on croyait révolues sous le nouveau règne, refont surface. “En fait, explique ce journaliste à Bruxelles, le contrôle des activités de la communauté à l’étranger ne s’est jamais interrompu, mais les finalités ont changé. Avant, on traquait les opposants et les exilés, aujourd’hui, les agents de la DGED s’intéressent davantage aux extrémistes religieux, aux trafiquants de drogue ou aux grosses fortunes à l’international”.

    Carrière. Renseignement, toute !

    La carrière de Mohamed Yassine Mansouri démarre au milieu des années 1980 quand il intègre le ministère de l’Intérieur, en tant que stagiaire au sein du cabinet de Driss Basri. Les témoins de cette époque parlent d’un “garçon discipliné et travailleur, limite effacé”. Il apprend doucement son métier et montre des aptitudes exceptionnelles pour le renseignement et l’analyse de données. Intronisé en juillet 1999, Mohammed VI ne tarde d’ailleurs pas à faire appel aux services de son ancien camarade de classe. En septembre de la même année, de violentes émeutes éclatent à Laâyoune. Deux hommes sont chargés par le monarque de préparer un rapport sur la situation : le général Hamidou Laânigri et Mohamed Yassine Mansouri. “Leur rapport a pointé du doigt la brutalité de la répression ordonnée par Basri, remercié par Mohammed VI”, raconte cet officier à la retraite. Dans la foulée, Hamidou Laânigri est nommé à la tête de la DST et Mohammed Yassine Mansouri devient directeur général de l’agence officielle MAP. Il en améliore, en douceur et sans faire de vagues, les processus de collecte et de traitement de l’information, réactive les bureaux internationaux et étoffe son réseau relationnel personnel.
    En mars 2003, Mansouri revient au ministère de l’Intérieur, mais cette fois en tant que wali directeur de la DAGI, la Direction des affaires générales intérieures. Une structure centrale chargée du contrôle du travail des walis et des gouverneurs, en plus de coordonner et filtrer l’information provenant des différents circuits de l’administration territoriale (moqaddems, caïds, gouverneurs, etc.). Sur le terrain, Mansouri supervise les élections communales de 2003, reçoit les patrons de partis politiques (même les plus extrémistes comme Annahj Addimocrati) et s’ouvre sur plusieurs sensibilités sahraouies. A l’international, il travaille, aux côtés de ses homologues espagnols, français et africains, sur des dossiers épineux comme l’émigration clandestine, le trafic de drogue ou le terrorisme.

    En février 2005, Mansouri devient le premier patron civil de la DGED, où il continue à travailler sur les mêmes sujets, mais avec des méthodes différentes.

    TEL QUEL ONLINE

    #Maroc

  • DST au Maroc. Le service de tous les secrets

    DST au Maroc. Le service de tous les secrets

    Maroc, DST, services secrets, lutte antiterroriste, DGST, DGSN, DGED, Abdellatif El Hammouchi,

    Qui n’a jamais entendu parler de la DST ? Qui n’a jamais frémi rien à l’évocation de ce sigle qui renvoie à tant de peurs, de traumatismes, de mystères ? La Direction de la Surveillance du Territoire garde au chaud tous vos secrets. TelQuel a percé le sien.

    Casablanca, le 24 février. Un soir comme les autres. La ville dort, la corniche prolonge les plaisirs de la nuit au service des derniers noctambules. Comme cette poignée d’hommes regroupés autour de leur “chef”, un quadra bon teint, costume sombre et cravate rayée, attablés dans un célèbre cabaret sur la corniche casablancaise. Rien ne les distingue des clients habituels de l’endroit, sauf que les “boys” se sont visiblement donné rendez-vous pour fêter un heureux événement. Un mariage, une naissance, une augmentation de salaire ? Rien de tout cela. “Ils allaient mettre le Maroc à feu et à sang, mais nous les avons arrêtés au bon moment. Il faut que tout le monde le sache”, clame le leader de la bande entre deux gorgées de Whisky.

    La phrase n’échappe pas à la curiosité de quelques clients, médusés. Les plus lucides retiennent l’explication chuchotée par l’un des serveurs du cabaret : “Ne faites pas attention, lui est un commissaire principal de la DST. Il célèbre le démantèlement d’un réseau terroriste”. Le réseau en question est celui de Abdelkader Belliraj, dont le démantèlement venait d’être confirmé, trois jours plus tôt, par le ministère de l’Intérieur lors d’une conférence de presse à Rabat.

    Victoire, donc, pour les services de renseignement marocains, intérieurs et extérieurs. Et victoire, d’abord, pour “le service”, le plus important en hommes comme en moyens, la DST (officiellement DGST, Direction générale de la surveillance du territoire).

    Une date a scellé le petit 1-0 remporté par la DST aux dépens des autres services concurrents, DGED (renseignements extérieurs, le pendant de la DST en dehors des frontières marocaines) en tête : celle du 4 mars. Ce jour-là, à Rabat, la salle de conférences du ministère de l’Intérieur grouille de monde. DST, DGED, DST, DGSN, DAG (renseignements liés au circuit du ministère de l’Intérieur, loin de la Sûreté nationale), FAR, Gendarmerie Royale, Forces auxiliaires : tout le gratin sécuritaire du royaume est venu assister à une cérémonie inédite dans les annales du renseignement marocain. Le roi rend hommage, dans le texte, “à la vigilance et à la fermeté des services de sécurité dans la défense de la stabilité du pays”. Lu par le conseiller royal Mohamed Moâtassim, le message de félicitations cite nommément les services sécuritaires du royaume, DST en tête, à l’exception notable de la DAG ou de la DGED. “C’est sans doute la première fois que le roi évoque la DST aussi clairement dans l’un de ses discours. La DGED, pourtant représentée lors de cette cérémonie, a été désignée par la formule laconique d’organe veillant à la sécurité externe du pays”, remarque un fonctionnaire du ministère de l’Intérieur, présent durant l’événement. Dans le microcosme sécuritaire, la nuance ne passe pas inaperçue. Elle suscite même nombre d’interprétations.

    “Personne n’est dupe, le message royal s’adressait surtout à la DST, qui a joué un rôle de première importance dans le démantèlement du réseau Belliraj. Ce message n’a d’ailleurs fait que rattraper une omission lors de la conférence de presse organisée par le ministère de l’Intérieur, dans laquelle le rôle de la DST avait été totalement occulté”, commente un gradé de la Sûreté nationale. “En citant la DST, le roi ne voulait pas seulement saluer son travail. Il tenait à lui donner une caution publique, officielle, qui lui a souvent fait défaut dans le passé”.

    Ces bruits de couloir attestent au moins de l’intention royale de restaurer définitivement l’image de son premier service de sécurité. Et de lui accorder un léger avantage sur ses nombreux concurrents. Actualité oblige.

    Un œil sur tout ce qui bouge

    Alors, la DST est-elle devenue, par les grâces d’un message royal, une administration comme les autres ? Non, pas vraiment. Son siège central à Témara, niché dans une zone verte à quelques kilomètres de Rabat, est probablement l’un des endroits les mieux gardés de tout le royaume. Nul ne peut s’en approcher. Ses “délégations” régionales, désignées sous le générique de brigades, implantées dans les principaux centres urbains du pays, sont parfaitement anonymes, sans enseigne officielle, sans aucun signe distinctif. Ses agents, quand ils ne célèbrent pas une victoire à la Pyrrhus, sont aussi discrets que nombreux, craints, à la limite intouchables, évités ou courtisés selon les circonstances.

    Que ce soit dans les universités, les établissements publics, les hôtels, les restaurants, les cafés, voire même les hammams et les salles de sport, la DST a la réputation d’être partout et de garder un œil sur tout. Via ses agents bien sûr, mais aussi par le biais de ses innombrables informateurs recrutés aussi bien parmi les petites gens, que dans les classes hautes et moyennes. “Quand on dit informateur, les gens pensent aussitôt au petit indic, au cordonnier, au concierge ou au dealer du coin. Ce qui est un peu vrai. Mais il y a également des professeurs universitaires, des artistes connus ou des hommes d’affaires, et même des figures politiques, parmi nos indics”, se remémore un ancien agent de la DST. “En plus des opposants et personnalités politiques, nous recevions chaque jour des milliers de rapports sur de parfaits anonymes. Et il suffisait parfois d’une blague déplacée sur le roi pour déclencher les opérations…”.

    Car tout mène au roi, invariablement. Hier comme aujourd’hui. Notre source raconte, avec une pointe d’humour : “Un jour, nous avons fini par recevoir quelqu’un qui prétendait détenir des informations très sensibles. Il disait qu’il ne pouvait s’en ouvrir qu’au roi en personne. Pour nous, il n’en était évidemment pas question. Mais notre homme n’en démordait pas, il disait vouloir parler au roi, et rien qu’à lui, puisqu’il était à ses yeux, comme il l’a appelé, le patron. Alors on a fini par trouver un stratagème ; on a amené un portrait grandeur nature du roi, et on a dit à notre client : le roi est là, maintenant tu peux parler. Et il a parlé…”. L’anecdote, qui remonte à l’époque du défunt Hassan II, s’arrête là. Notre source n’a pas pipé mot sur la nature des “informations” en question, ni sur le sort réservé à leur auteur. Mais tous les aveux obtenus par les limiers de la DST ne reposent pas sur des méthodes “douces”, et c’est là où le bât a souvent blessé pour le premier service de sécurité du royaume.

    Bienvenue aux sous-sols du service

    “La DST n’arrête personne, elle enquête et prépare des dossiers, c’est tout”, résume cet officier à la centrale de Témara. L’affirmation est avérée, mais partielle. Elle ne dit pas tout. Théoriquement, les enlèvements et la torture n’existent pas, les arrestations sont du seul ressort de la police judiciaire (PJ ou BNPJ). Mais théoriquement seulement. Depuis sa création, le “service” a toujours disposé de sous-sols dédiés aux séances dites d’examen de situation. Traduisez “interrogatoire et plus, si affinités”. Dans les caves du CAB1, ancêtre de la DST, ou dans les “silounate” du complexe de police de l’Agdal à Rabat, qui a abrité son siège jusqu’à l’édification de la forteresse de Témara dans les années 1990, voire dans les villas et appartements mis à sa disposition, la DST a vu défiler des milliers de pensionnaires malgré eux. Toujours pour les besoins d’“enquêtes” plus ou moins approfondies.

    Certains en sont sortis indemnes, d’autres pas. “On m’a enlevé dans la rue, bandé les yeux, torturé, séquestré, sans jamais me dire que c’était la DST. Mais il n’y avait pas besoin, je savais”, confie cet ancien détenu politique, qui a connu le sous-sol du complexe de l’Agdal dans les années 70. Les années passent, les étiquettes restent. “Ce n’est pas un secret : quand quelqu’un disparaît, on pense d’abord à la DST. Surtout s’il a une quelconque activité politique” est une affirmation qui peut revenir dans la bouche de Monsieur tout le monde.

    Les enlèvements, pratique tout à fait illégale mais bien courante dans les services du monde entier, sont du ressort d’un département bien particulier, celui de “l’action”, anciennement appelé “les opérations techniques”. Ses hommes, choisis parmi les plus “physiques” du service, se servent de rapports de filatures et d’écoutes téléphoniques, avant de jeter leur dévolu sur la cible choisie. Département-clé, il est un peu l’exécutant des basses besognes, au service de la direction la plus importante du service : celle de la contre-subversion. C’est là, précisément, que réside le cœur et la raison d’être de la DST : traquer le renseignement politique, cerner les profils de ses “acteurs”, au besoin anticiper sur un quelconque danger pour la stabilité du royaume.

    Ecoutes, filatures, infiltrations

    “Quand on est missionnés pour filer quelqu’un, on peut guetter le moment où il sort de chez lui des heures durant sans bouger, en ignorant tout ce qui nous entoure”, explique cet agent actif, voué au terrain. La filature, souvent employée en complément aux écoutes téléphoniques, reste le B.A.-BA de l’espion, à l’ancienne comme à la nouvelle école. “Une filature peut être discrète, ou alors voyante. Dans ce dernier cas, elle fait partie d’une guerre psychologique menée contre la cible”. Le même recours à la guerre des nerfs peut affecter les écoutes téléphoniques, dont le but n’est pas seulement de capter les échanges verbaux, mais aussi, au besoin, de les rendre difficiles. Le procédé (bips sonores en pleine conversation téléphonique, fritures sur la ligne, etc.) vise clairement à déstabiliser le quotidien de la “cible” du service. Il est d’autant plus efficace, nous explique-t-on, “qu’il touche à des conversations intimes, personnelles, sans lien avec l’activité (supposée subversive) de la cible”.

    Les moyens de faire pression sur une “cible” ne se ressemblent pas. Parce que les objectifs, non plus. Mais il y a les classiques du genre, dont l’incontournable “comment faire tomber sa cible (et l’obliger à collaborer) en faisant appel à l’arme du sexe”. Une source proche du service raconte : “Il y a quelques années, la DST a réussi à piéger, en vue de le recruter, l’un des représentants du consulat d’un pays arabe (ndlr : le renseignement collecté auprès des consulats et ambassades accrédités au Maroc relève du service “contre-espionnage” de la DST). L’astuce a été de le mettre dans le lit d’une jolie femme et de le filmer dans des positions compromettantes”. La suite coule de source. Sous la menace de diffuser les images, le diplomate cède au chantage. Il “collabore” mais, pas de chance : les services secrets de son pays ne tardent pas à découvrir son double-jeu. Résultat : il est condamné dans son propre pays à quatre ans de prison ! Ce genre d’opérations “sales” reste monnaie courante, il est un peu intégré dans la rubrique pertes et dégâts collatéraux. Les risques du métier, en quelque sorte.

    À la recherche du point G

    Mais de qui dépend la DST, et à qui rend-elle compte ? Flash-back. La DGST a été créée par Dahir royal, le 12 janvier 1973 en même temps que sa cousine, la DGED. Publiés le même jour sur le Bulletin officiel et contresignés tous les deux par Ahmed Osman, le Premier ministre de l’époque, les Dahirs qui ont créé ces deux directions comportent cependant plusieurs différences. La DGED est rattachée au Conseil suprême de la Défense nationale avec pour mission de “participer” à la protection et à la sauvegarde de la sûreté de l’Etat et de ses institutions. La DGST, elle, est “chargée” de veiller sur la protection et la sauvegarde de l’Etat et de ses institutions, sous la tutelle (bien théorique) du ministère de l’Intérieur. Dès 1974, la DGST perd son “G”, pour devenir DST tout court, et passer du coup de la tutelle directe de l’Intérieur à celle de la Sûreté nationale, ou DGSN.

    Le changement de statut dénote un subtil glissement administratif, rien de plus. “Le seul lien qui existait à l’époque entre la DST et la DGSN était d’ordre budgétaire. Les salaires des agents et les frais de fonctionnement de la DST étaient en effet déduits du budget de la DGSN”, nous explique un gradé de le Sûreté nationale. “Et encore, la DST disposait et dispose toujours de plusieurs caisses noires, qui lui permettent de financer ses nombreuses activités clandestines”, poursuit la même source. En réalité, la mise de la DST sous la tutelle de la DGSN avait pour seul but de lui octroyer une couverture légale pour l’exercice d’opérations… souvent illégales.

    Ce n’est que récemment, sous le nouveau règne, que la DST a regagné son G, sans que l’opération ne soit jamais tirée au clair. S’agit-il d’un nouveau, et simple, glissement administratif ? Ou alors, comme on le prévoyait du temps de Laânigri déjà, de l’amorce d’une réorganisation générale des services spéciaux du royaume ?

    Super-flics, super-primes

    L’anecdote, survenue il y a quelques mois, a pour théâtre le Tribunal de Salé. Une affaire, une de plus, liée au terrorisme. Un témoin raconte : “Le juge a décidé d’évacuer la salle pour réduire l’agitation qui régnait dans les lieux. Les policiers se sont employés à la tâche avec le zèle habituel. Au fond de la salle, deux individus sont restés impassibles, indifférents, comme s’ils étaient rivés au banc. Le juge demande leur évacuation, mais l’un des policiers en faction se précipite vers lui, et lui chuchote quelque chose à l’oreille… Et le juge sourit avec un air entendu, portant la main à son coeur comme dans un geste de soumission, et décide de poursuivre les audiences avec les deux individus du fond comme seul public”. Question : qui sont ces deux mystérieux témoins, qui ont réussi à amadouer l’autorité du sourire ? “Ils n’arrêtaient pas de prendre des notes, ils ne pouvaient être que des agents de la DST !”. Possible, possible. Mais très improbable !

    La consignation des minutes des procès, ainsi que de multiples tâches domestiques, sont souvent confiées aux agents des RG, l’équivalent de la DST propre à la Sûreté nationale. “La RG”, comme on les appelle communément, ratissent large et ramènent tout dans leur filet de pêche, les gros poissons comme les grosses pierres. Les limiers de la DST peuvent, au besoin, récupérer le fruit des investigations de “la RG”, avant de filtrer les renseignements, de les recouper, et de leur donner éventuellement une suite.

    C’est que la DST peut fonctionner en réceptacle du travail non fini émanant d’autres services de renseignements plus classiques. Mais qui sont donc ces hommes, qui sont un peu considérés comme le corps d’élite des enquêteurs ? Qui les recrute, et sur quels critères ? Combien sont-ils ?

    En l’absence de chiffres officiels sur l’étendue de ses effectifs, il reste les estimations dont les plus fiables varient dans une fourchette de 8000 à 10 000 permanents. Sans oublier les “antennes” et les collaborateurs externes, généralement rémunérés par des caisses propres au service.

    “Aujourd’hui et à grade égal, un agent de la DST perçoit un salaire supérieur de deux à cinq mille dirhams par rapport à un fonctionnaire de la DGSN”, nous confie un commissaire de police. La différence de traitement s’explique par la prise de risques, mais aussi par la formation, plus musclée, chez les policiers du “service”. “A la base, un policier reste un policier”, rappelle notre source. Traduisez : un élément de la Sûreté ou du service se présentent au même concours d’accès (à l’Académie de police). Ce n’est que quatre mois avant la fin du cursus que les futurs agents sont repérés dans la masse, et invités à intégrer une autre académie, celle de Témara, où ils poursuivent une formation plus spécialisée.

    Objectif islamistes

    C’est bien connu : la force d’un service du renseignement réside dans sa capacité d’infiltration. La DST a traversé les décennies et changé de “cibles” (hier les gauchistes, aujourd’hui les islamistes). Des agents “barbus” ont donc essaimé parmi les mouvements reliés tant à l’islam politique qu’au terrorisme. Ils fréquentent assidûment les mosquées, là où leurs devanciers écumaient les bars. Et ils infiltrent, ils infiltrent.

    Mais si certaines opérations ont été des succès, expliquant le noyautage, voire le démantèlement de plusieurs réseaux, d’autres ont été de franches déceptions. Qui prêtent parfois au sourire. Exemple de cette anecdote : “La DST a longtemps essayé de déstabiliser un des ténors d’Al Adl Wal Ihsane. Au point que celui-ci a fini, un jour, par découvrir un micro dans son domicile, implanté là par un maçon, recruté (par la DST) à cette fin”, confie ce proche de la Jamaâ de Cheikh Yassine.

    Les “efforts” consentis par le service pour contrer les mouvements islamistes lui ont valu, en retour, de se transformer parfois en cible terroriste. “Rappelez-vous que l’un des kamikazes d’avril 2007 avait cherché désespérément le siège de la brigade de la DST à Casablanca, avant de renoncer et de finir par exploser quelques dizaines de mètres plus loin, mais sans le savoir exactement !”, s’exclame encore notre source.

    Là aussi, cela s’appelle les risques du métier. “Le recours à de nouveaux visages pour infiltrer les mouvements islamistes a malgré tout donné ses fruits”, se réjouit ce responsable sécuritaire. Il pense sans doute aux super-équipements, très hi-tech, dont s’est doté le service, surtout depuis l’ère Laânigri : des armes sophistiquées, un système d’écoutes téléphoniques ultramoderne livré clefs en main par un célèbre opérateur téléphonique, etc. Au point de faire dire à notre source, dans ce qui ressemble à une blague sans en être forcément une : “Avant même l’inauguration du nouveau siège de l’USFP à Hay Riad, à Rabat, la DST avait réservé un local mitoyen pour pouvoir garder à portée de vue (et d’oreille !) les socialistes”. Qui dit mieux ?

    Par Majdoulein El Atouabi et Karim Boukhari avec Lahcen Aouad

    TelQuel, 2008

    #DST #DGST #DGSN #DGED

    Lire aussi : Maroc: Révélations accablantes de l’ex-officier des services secrets marocains

    Lire aussi : Les Belges considèrent les services secrets marocains comme une menace pour leur sécurité

  • Un Français réfugié politique!

    Un Français réfugié politique!

    France, Maroc, Zakaria Moumni, Canada, asile politique, Abdellatif El Hammouchi, DGST, Pegasus, espionnage,

    L’asile politique accordé à un compatriote au Canada ? Ce n’est pas de la politique-fiction, mais bien la toute récente conclusion des aventures rocambolesques de Zakaria Moumni. Le pays de l’érable a accordé le statut de réfugié à ce dernier pour qu’il échappe au harcèlement de la police marocaine, qui le traquait jusque dans l’Hexagone.

    Le Monde (17/6) a relaté l’événement, mais « Le Canard » a révélé et relayé, depuis plus de dix ans, cette histoire mettant en scène un roi, un président, des ministres, un chef des services secrets, des juges, des tortionnaires et… un ring de boxe.

    Lettre envoyé par Zakaria Moumni au roi du Maroc pour revendiquer son droit à la fonction publique

    Ex-champion du monde de kickboxing, Moumni, alors franco-marocain, a la mauvaise idée, en 2010, de réclamer l’application d’un dahir (décret9 royal permettant aux sportifs médaillés d’or de devenir fonctionnaires des Sports. Econduit par Mounir El Majidi, le puissant secrétaire du monarque, il est arrêté peu de temps après, accusé par deux complaisants Marocains d’escroquerie à 2800 euros. Détenu quatre jours au centre secret de Témara, non loin de Rabat, il y est torturé puis passe dix-huit mois à la prison de Rommani.

    Libéré sur grâce royale, il gagne la France. Là, il dit reconnaître, à la télé, l’un de ses tortionnaires de Témara. Problème : il s’agit d’Abdellatif El Hammouchi, le chef des services secrets (DGST) marocains. La plainte de Moumni est examinée par une juge parisienne du pôle crimes contre l’humanité qui, en février 2014, adresse une convocation à Hammouchi. Brouille diplomatique entre Rabat et Paris ! Le roi Mohammed VI (dont le Premier ministre est islamiste) en prendra prétexte pour boycotter la marche en hommage aux victimes de « Charlie Hebdo ».

    Espion à l’écoute

    Dès lors, il faudra quelques concessions de François Hollande et la signature d’une ahurissante convention judiciaire pour calmer le jeu. Révélé par « Le Canard », ce texte lunaire permet, par exemple, au présumé responsable marocain d’un crime contre un Français de ne pas être inquiété s’il lui prend l’idée de se rendre dans l’Hexagone…

    Moumni, lui, ne cesse de recevoir des intimidations (appels nocturnes, envoi de photos pornos truquées) et des menaces de mort. Après une tentative d’agression au couteau, à Nancy en 2016, il s’estime trop peu protégé par les autorités françaises et décide de s’exiler au Canada. « J’ai renoncé à la nationalité française, pas à la France, mon pays de cœur », explique-t-il au Canard.

    Depuis, le célèbre Hammouchi a été rattrapé par l’affaire Pegasus : Il avait mis sur écoute nombre de personnalités marocaines et françaises. Quand on aime…

    J.-F. J.

    Le Canard Enchaîné, 22 juin 2022

    #Maroc #France #Canada #ZakariaMoumni #ElHammouchi #DGST #Asilepolitique

  • La nationalité refusée à des Marocains pour espionnage

    La nationalité refusée à des Marocains pour espionnage

    La nationalité refusée à des Marocains pour espionnage – Espagne, Maroc, services secrets, DGED, DGST,

    La justice ibérique a refusé octroyer la nationalité espagnole à plusieurs citoyens marocains en raison de leurs liaisons avec les services secrets marocains. Dans son édition de vendredi dernier, El País révèle les détails de quelques cas.

    « La première affaire liée aux services secrets marocains remonte au 2 juillet 2013. Ce jour-là, la chambre administrative de l’Audience nationale a rendu une décision refusant la nationalité à un Marocain résidant à Grenade qui en avait fait la demande quatre ans auparavant. Le rapport du CNI, qui accusait ce citoyen d’entretenir « une relation très étroite » avec un membre de la Direction générale de la surveillance du terrorisme (DGST, les services secrets marocains) en poste à Tétouan, a été au cœur du jugement. Le document souligne que cet agent se rend « très fréquemment en Espagne » et que le demandeur de la nationalité lui a fourni une « couverture » pour ses activités d’espionnage », indique El País.

    « Le CNI a ajouté que, depuis son implication avec la DGST, le résident de Grenade avait subi « un changement de comportement, passant d’une personne de confiance à une personne prudente et réticente à donner des détails sur ses activités et ses contacts ». Le rapport, qui souligne également sa « relation très étroite avec le consulat du Maroc à Almeria », note qu’en 2010, ce Marocain a été invité à la Fête du Trône, « un événement utilisé par le régime pour inviter certaines personnalités éminentes vivant à l’étranger pour les services qu’elles rendent au Maroc », ajoute le quotidien espagnol.

    El País précise que « deux ans plus tard, en mars 2015, l’Audiencia Nacional a révélé les activités d’espionnage de Rabat pour confirmer l’expulsion d’Espagne d’un Marocain résidant à Barcelone. Selon l’arrêt, ce citoyen était, depuis 2000, un « collaborateur très pertinent » d’un service de renseignement étranger qu’il n’a pas précisé, pour lequel il a produit « de nombreux rapports périodiques ». Le CNI a affirmé que, « par mandat exprès » de ce service, « il a favorisé la diffusion d’idéologies religieuses extrémistes », pour lesquelles il disposait « d’un réseau de collaborateurs et d’informateurs répartis dans les quatre provinces catalanes ». Il a même affirmé avoir utilisé « ses contacts et sa capacité de mobilisation pour générer des conflits sociaux en liant immigration et religion ». Les services secrets ont conclu qu’il constituait « une menace pour la stabilité » de l’Espagne ».

    En janvier 2020, une décision de justice a détaillé le contenu d’un rapport de la CNI pour refuser la nationalité espagnole à un Marocain résidant à Las Palmas. Le document indiquait qu’il était « lié au renseignement extérieur » de ce pays par l’intermédiaire d’un parent qui, entre juin 2008 et juillet 2016, avait été le chef de la Direction générale des études et de la documentation (DGDE, le service de renseignement extérieur relevant des forces armées marocaines) au consulat du Maroc à Gran Canaria. Au cours de ces huit années, le suspect avait mené « différentes activités contre les intérêts » de l’Espagne.

    Selon la même source, « le dernier arrêt est daté du 30 septembre. Dans ce document, l’Audiencia Nacional a confirmé la décision de ne pas accorder la nationalité à un citoyen marocain qui était arrivé en Espagne en 2002 en se présentant comme un déserteur de l’armée du pays du Maghreb, ce qui lui avait alors valu le statut de réfugié. Le rapport du CNI a révélé qu’en 2013, le service de renseignement d’un pays tiers avait contacté l’Espagne pour signaler que cette personne était, en fait, un agent de la DGST. Cinq ans plus tard, un autre service de renseignement étranger a également indiqué qu’il enquêtait sur lui pour la même raison ».

    #Espagne #Maroc #Nationalité #Espionnage #DGED #DGST