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  • Normalisation entre Israël et Etats arabes : Un an après, clash au Maghreb

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    Il y a une année, les Emirats et le Bahreïn décidaient d’ouvrir des canaux diplomatiques officiels avec Israël, emboitant le pas à l’Egypte et la Jordanie. Trois mois après, ils étaient suivis par le Maroc, provoquant des développements menaçants au Maghreb et un séisme dans le bilatéral déjà précaire entre Alger et Rabat…

    Par Lyes Sakhi

    Lundi, 13 septembre, les ambassadeurs aux Nations unies d’Israël, des Emirats, du Bahreïn et du Maroc ont célébré deux jours avant le premier anniversaire de la signature des accords dits d’Abraham. L’évènement a été organisé par la mission israélienne auprès de l’ONU au Musée du patrimoine juif de Manhattan. Il s’est déroulé en l’absence du représentant du Soudan signataire lui aussi d’un accord de normalisation qui attend sa ratification par son parlement, mais en présence du numéro deux de la représentation diplomatique omanaise auprès de l’ONU, Ahmed Dawood Ali Al-Zadjal. Mascate n’a pas encore de relations diplomatiques officielles avec l’Etat hébreu, mais les deux parties échangent régulièrement sur différents dossiers notamment sensibles tels que la sécurité et l’antiterrorisme.

    L’aspect remarquable lors de cette cérémonie a résidé dans la déclaration de l’ambassadrice des Etats-Unis auprès de l’Organisation internationale multilatérale.

    Linda Thomas-Greenfield a félicité les parties prenantes aux accords dits d’Abraham pour avoir transformé «l’encre sur une page en achèvements concrets entre les pays».

    Elle a salué l’ouverture réciproques d’ambassades, les nominations de diplomates et la mise en service de liaisons aériennes directes entre ces parties. Elle s’est surtout engagée à travailler au «développement» des accords existants et à soutenir l’établissement de nouvelles relations entre Israël et d’autres pays du monde arabe et musulman.

    Les mots prononcés par Mme Thomas-Greenfield ont rappelé que ce sont les Etats-Unis, sous la présidence de l’administration de l’ancien président Donald Trump, qui ont pesé de tout leur poids géostratégique pour le rapprochement entre Israël et les Etats arabes signataires des accords d’Abraham et qui ont accepté de rejoindre l’Egypte (1979) et la Jordanie (1994) dans la reconnaissance officielle de l’Etat hébreu. «Après des décennies de divisions et de conflits, nous sommes témoins de l’aube d’un nouveau Moyen-Orient», déclarait, le 15 septembre 2020, l’ex-chef de la Maison Blanche lors d’une cérémonie à Washington.

    Les propos que la diplomate américaine a tenus ont indiqué aussi que la nouvelle administration de Joe Biden continuera à soutenir ce processus. Mais comment et jusqu’où ? Au Moyen-Orient, les relations déjà secrètement anciennes entre Israël et les pétromonarchies, Arabie Saoudite comprise, ne semblent pas bouleverser des données et des lignes de partage en cours depuis des années. Ces questions sur les intentions de l’administration Biden vis-à-vis de l’héritage que lui a laissé celle de son prédécesseur, l’ex-président Trump, en ce qui concerne la normalisation israélo-arabe, ne résonne, donc, pas aussi gravement en tout cas qu’au Maghreb.

    Dans la sous-région, en effet, l’ouverture officielle de canaux diplomatiques entre le Maroc et Israël à partir du 10 décembre 2020, jour où M. Trump avait annoncé l’engagement du royaume voisin à standardiser ses échanges autrefois discrets avec l’Etat hébreu en contrepartie notamment de la reconnaissance par les Etats-Unis de sa «souveraineté» sur le Sahara occidental, a fait piétiner la légalité internationale et la feuille de route de l’ONU pour un règlement pacifique et politique d’une question de décolonisation.

    Elle a rendu plus manifeste l’option militaire longtemps mise de côté par les indépendantistes sahraouis et ébranlé un équilibre déjà précaire dans les relations entre l’Algérie et le Maroc. Elle risque de brouiller davantage les cartes à l’échelle de l’Union africaine (UA) au sein de laquelle Rabat compte parmi les fervents partisans de la candidature d’Israël en tant qu’Etat observateur.

    Le poids américain

    La conséquence a été la perception par l’Algérie de la normalisation israélo-marocaine comme une menace à sa sécurité. La conclusion a été la rupture par Alger de ses relations avec Rabat, le 24 août dernier, en réaction aux «actions hostiles» que le royaume «n’a jamais cessé de mener», allusion notamment à sa surveillance des lignes téléphoniques d’officiels algériens via le logiciel espion israélien Pegasus et au soutien qu’il apporte au Mouvement sécessionniste d’autonomie de la Kabylie (MAK). Elle a été d’envenimer davantage le climat de guerre froide qui oppose depuis longtemps les deux capitales maghrébines et de braquer à nouveau les regards sur les Etats-Unis. Mais que feront-ils ?

    Jusqu’à présent, l’administration Biden à Washington, qui est aujourd’hui confrontée aux priorités liées à son désengagement d’Afghanistan entre autres, ne semble pas pressée de clarifier sa position sur l’engagement de l’ancien président Trump de reconnaitre la «souveraineté» marocaine sur le Sahara occidental. Sur le dossier, le chef de la diplomatie Ramtane Lamamra a dit percevoir une différence d’appréciation entre les deux administrations et un retour de la Maison Blanche à la doxa onusienne pour une solution acceptée par les parties en conflit. Dans la réalité, on a eu droit à quelques déclarations pour le moins difficiles à déchiffrer comme celles tenues le 27 juillet 2021 à Alger par le secrétaire d’Etat adjoint américain aux affaires du Proche-Orient, Joey Hood, qui a surtout insisté sur la convergence de vues entre l’Algérie et son pays sur la Libye et le processus de sortie de crise en cours dans ce pays.

    Dans la réalité, toujours, la déclaration de l’ambassadrice US auprès l’ONU Linda Thomas-Greenfield, lundi dernier à New York, sur l’encouragement par son pays du processus de normalisation avec Israël mérite un examen plus sérieux en fonction des développements propres à la scène sous-régionale et du résultat des dynamiques déclenchées par l’aggravation du contentieux entre Alger, plus ferme que jamais dans ses positions de ne pas transiger avec ses principes sur le Sahara occidental et contre la normalisation avec l’Etat hébreu, et Rabat qui espère en tirer profit auprès de la puissance étasunienne qui restera un acteur géostratégique clé au Maghreb. Cet examen sera peut-être établi dans les prochains mois lorsque le président Biden s’exprimera à l’ONU le 21 septembre prochain et, plus sûrement, à l’arrivée en poste de la nouvelle ambassadrice des Etats-Unis à Alger, Elizabeth Moore Aubin qui attend le feu vert du sénat de son pays.

    Reporters, 15/09/2021

  • Les fruits de la normalisation entre Israël et les Emirats un an plus tard

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    Un an s’est écoulé depuis qu’Israël et les Émirats arabes unis ont normalisé leurs relations grâce à un accord négocié par les États-Unis, qui a abouti à une série d’accords allant du tourisme et de l’aviation à la technologie de pointe.

    Le 15 septembre 2020, les Émirats sont devenus le premier pays du Golfe à établir des relations formelles avec Israël, et le troisième pays arabe à le faire après l’Égypte, en 1979, et la Jordanie, en 1994.

    Bahreïn a signé le même jour et plus tard le Soudan et le Maroc ont rejoint les accords d’Abraham, négociés par Washington, pour normaliser les relations avec Israël.

    Ce sont là quelques aspects clés de l’accord historique.

    – Quels sont les avantages économiques ? –

    Emirates et Israël veulent maximiser les avantages économiques de la normalisation, en particulier Dubaï, qui souhaite étendre ses secteurs du tourisme et de la technologie.


    Les deux parties ont ouvert des ambassades dans l’autre pays et signé une pléthore d’accords commerciaux.

    Depuis l’année dernière, plusieurs sociétés israéliennes d’intelligence artificielle, de technologie financière et d’agriculture se sont installées aux Emirats.

    Les échanges entre les deux pays, dont les économies ont été frappées par la pandémie de coronavirus, ont atteint 500 millions de dollars en août, hors investissements, grâce à des accords dans le tourisme, l’aviation et les services financiers.

    De leur côté, les États-Unis, un fidèle allié d’Israël, ont approuvé la vente d’avions de chasse F-35 aux Émirats pour 23 milliards de dollars après que Dubaï a reconnu Israël.

    « Le principal avantage pour les Emirats a été économique », a déclaré à l’AFP Elham Fakhro, analyste à l’International Crisis Group.

    « Le tourisme, les échanges culturels, les accords de cybersécurité et les échanges diplomatiques ont profité aux deux États », a-t-il ajouté.

    Selon le consulat israélien à Dubaï, près de 200 000 Israéliens ont visité les Émirats depuis l’établissement des relations.

    – Que fera l’Arabie saoudite ? –

    L’Arabie saoudite, une puissance du Golfe, a insisté sur le fait qu’elle maintiendrait sa politique de ne pas établir de liens formels avec Israël jusqu’à ce que le conflit avec les Palestiniens soit résolu.

    Le commerce équitable est possible, si vous voulez
    Ce contenu a été publié le 31 août. 202131 août 2021 Si l’Europe ne pense pas au-delà de son propre continent, c’est l’agriculture du Sud qui en souffrira, estime la députée écologiste Christine Badertscher.

    Mais l’inquiétude mutuelle au sujet de l’Iran a progressivement rapproché Israël des pays arabes du Golfe, et Riyad a noué des relations avec Israël depuis des années.

    Suite à l’accord EAU-Israël, l’Arabie saoudite a des survols depuis Israël, mais les analystes disent que la normalisation entre les deux n’est pas en vue.

    « Riyad ne semble pas enclin à normaliser formellement les relations avec Israël sous le roi Salmane », a déclaré à l’AFP Hugh Lovatt du Conseil européen des relations étrangères.

    « Mais il est clair que les deux pays ont déjà un niveau important de dialogue politique et sécuritaire », a-t-il ajouté.

    Et selon Fakhro, si l’Arabie saoudite normalise ses relations, ce sera « à ses propres conditions… et selon des calculs internes ».

    – Et les Palestiniens ? –

    Les Palestiniens critiques de l’accord ont déclaré que toute normalisation avec Israël légitime l’occupation des territoires palestiniens.

    Selon les Emiratis, Israël a accepté de suspendre l’annexion des territoires occupés de Cisjordanie, bien que le Premier ministre de l’époque, Benjamin Netanyahu, ait précisé que le plan n’était pas exclu à long terme.

    En mai, les nouveaux alliés d’Israël se sont retrouvés dans une situation complexe, publiant des déclarations condamnant l’escalade de la violence entre Israël et les Palestiniens.

    La violence à Jérusalem, en particulier sur l’Esplanade des Mosquées, a été la pire depuis 2017 et a été alimentée par les tentatives des colons juifs d’occuper des maisons palestiniennes.

    Mais selon les analystes, les affrontements n’ont pas affecté les accords de normalisation et Fakhro a maintenu que les accords « ne concernaient jamais les Palestiniens ».

    Pour Lovatt, les accords de normalisation avec les Emirats et Bahreïn n’ont jamais été compromis.

    « Ils sont basés sur des intérêts bilatéraux importants qui n’ont vraiment rien à voir avec la question palestinienne », a-t-il déclaré.

    « Ces événements montrent plutôt à quel point ces relations sont solides », a ajouté Lovatt.

  • Pourquoi les EAU ont-ils kidnappé, maltraité et expulsé 700 travailleurs africains ?

    Pourquoi les EAU ont-ils kidnappé, maltraité et expulsé 700 travailleurs africains ?

    EAU, Emirats Arabes Unis, traite humaine, travailleurs africains,

    Aux premières heures des 24 et 25 juin 2021, des responsables de la sécurité des Émirats arabes unis ont fait une descente dans des immeubles résidentiels à Abou Dhabi et ont jeté au moins 700 travailleurs migrants africains dans une prison. Les mains et les pieds des travailleurs ont été menottés pendant les deux premières semaines de détention, et les femmes parmi eux se sont vu refuser l’accès aux serviettes hygiéniques ou aux soins médicaux.

    Ces détails sont allégués dans un rapport (pdf) publié ce mois-ci par deux organisations de défense des droits humains – ImpACT International et Euro-Mediterranean Human Rights Monitor – qui accusent les Émirats arabes unis de violations des droits humains à motivation raciale.

    Plus de 20 témoignages officiels de travailleurs pour la plupart originaires d’Ouganda, du Nigeria et du Cameroun sont contenus dans le rapport, avec une vidéo montrant ce qui semble être des scènes des nuits des raids.

    La police a fait usage d’une force excessive et a harcelé des femmes sexuellement
    L’opération a été menée par l’équipe des armes spéciales et tactiques (SWAT) des Émirats arabes unis, le département des enquêtes criminelles (CID) et la police d’Abou Dhabi, selon le rapport.

    Avant de faire irruption dans les appartements des travailleurs, les agents ont désactivé les installations de surveillance et de wi-fi, utilisant des pistolets paralysants et des tasers sur les travailleurs lors des arrestations. « Ils ont tout volé dans ma chambre. Ils m’ont battu et m’ont emmené à moitié nu, uniquement avec mes vêtements de nuit », a déclaré Melachio Keanfe Carlos, 34 ans, un Camerounais qui a déclaré qu’il était aux Émirats arabes unis depuis octobre 2019 et travaillait dans un restaurant à Abu Dhabi.

    « L’agent du CID qui m’a emmené me touchait les fesses et la poitrine. Dans ce bâtiment, ils touchaient les parties intimes des gens au nom de l’arrestation », a déclaré la reine Nkechi, une femme nigériane qui a déclaré qu’elle vivait avec son mari et travaillait légalement comme femme de ménage dans la capitale.

    Les agents ont demandé des pièces d’identité et des visas, mais même lorsque la plupart des travailleurs ont présenté les deux, ils ont été emmenés à la prison d’al-Wathba à Abu Dhabi et enfermés dans des cellules dans des conditions désastreuses. Les travailleurs ont été détenus pendant six semaines en moyenne, après quoi les autorités des Émirats arabes unis les ont mis sur des vols commerciaux vers leur pays d’origine sans aucun effet personnel, à l’exception des documents de voyage et des téléphones pour certains.

    La plupart de ces travailleurs ont été expulsés au cours de la première semaine d’août, mais un nombre inconnu est toujours détenu aux Émirats arabes unis, selon le rapport.

    Le ministère de l’Intérieur des Émirats arabes unis a déclaré avoir arrêté et détenu 376 hommes et femmes pour « infractions de traite des êtres humains, actes indécents et cas d’extorsion et d’agression qui menacent la sécurité de la société ». Il a également déclaré que le processus était basé sur des preuves concluantes et qu’il avait été effectué « dans le cadre de procédures judiciaires visant à lutter contre les crimes liés à la traite des êtres humains et les cas de préjudice causé aux femmes et d’extorsion, d’agression et d’actes contraires à la moralité publique ». Il a indiqué que la plupart des travailleurs avaient été expulsés, à l’exception de 50 personnes toujours détenues parce qu’elles n’avaient pas de documents de voyage.

    Mais les travailleurs et les deux groupes de défense des droits disent que le racisme était une motivation.

    « Nous avons été brutalement poursuivis sur la base de la couleur de la peau », a déclaré Kenneth Rubangakene, un enseignant ougandais qui a passé 38 jours à al-Wathba. « Ils nous ont fait savoir qu’il s’agissait de pur racisme et qu’ils n’avaient plus besoin d’Africains noirs dans le pays », a déclaré Lawrence Kingsley Ikechukwu, un Nigérian qui a déclaré que lui et sa mère de 60 ans avaient été déportés ensemble.

    Dans un communiqué, Michela Pugliese, qui étudie les migrations à Euro-Med Monitor, a déclaré que les actions des Émirats arabes unis étaient sans aucun doute « une violation massive des droits de l’homme à motivation raciale. Et cela continue aux Émirats arabes unis en ce moment. »

    Les migrants expulsés demandent justice
    Parce qu’ils sont riches en ressources et ont besoin de main-d’œuvre, les pays de la région du Golfe attirent de grands groupes de travailleurs migrants, en particulier en provenance d’Asie et d’Afrique. La disponibilité de voyages sans visa pour certains pays et les efforts de Dubaï pour attirer les visiteurs africains de la classe moyenne ont accru l’intérêt pour la région. 90% des 9 millions d’ habitants du pays sont des étrangers.

    Mais la main-d’œuvre migrante aux Émirats arabes unis est souvent bon marché et sans droits clairement définis, laissant les travailleurs vulnérables aux caprices de leurs employeurs ou, dans le cas de ces travailleurs africains, de l’État.

    « Il y a un besoin urgent de rendre justice aux victimes », a déclaré Pugliese. Elle suggère que les travailleurs portent plainte auprès de leur ministère des Affaires étrangères pour générer une pression politique en faveur de la justice et déposent des plaintes auprès de l’Organisation internationale du travail (OIT) contre les Émirats arabes unis.

    On ne sait pas exactement à quoi ces efforts aboutiront. Le ministère nigérian des Affaires étrangères n’a pas répondu à une demande de commentaires de Quartz. L’histoire sera mise à jour en conséquence.

    Certains travailleurs ont déclaré qu’ils n’avaient pas reçu de réponse des ambassades de leur pays lorsque leurs familles ont tenté de porter plainte. En attendant que justice soit rendue, les travailleurs devront recommencer leur vie sans les actifs qu’ils avaient aux Emirats Arabes Unis.

    Veronica Ebude, une Camerounaise qui a déclaré qu’elle était aux Emirats Arabes Unis depuis 2017, a déclaré qu’elle avait un visa valide qui expirerait le 24 décembre de cette année. « Je suis revenu dans mon pays uniquement avec mon téléphone. Mon acte de naissance et mes papiers sont toujours là. Ces gens nous ont kidnappés et nous ont renvoyés chez nous. Nous ne savons pas quoi faire de nos vies maintenant », a-t-elle déclaré, selon le rapport.

    Quartz Africa, 08/09/2021

  • Pegasus : Les traces de la folie

    Pegasus, Dubai, Espionnage, NSO Group, Emirats Arabes Unis, EAU, #Pegasus #NSOGroup


    Une nouvelle analyse technique montre : Un avocat britannique spécialisé dans les droits de l’homme, qui voulait libérer une princesse de Dubaï, était surveillé par le logiciel d’espionnage Pegasus.

    Par Luisa Hommerich
    C’est une course-poursuite inégale que la princesse Latifa Al Maktum et sa famille ont engagée en février 2018 : la jeune femme alors âgée de 32 ans a tenté de fuir l’émirat du Golfe de son père Mohammed bin Rashid Al Maktum, le dirigeant de Dubaï, à l’aide de voitures, de jet-skis et d’un yacht. Mais les autorités de sécurité les ont repris à 30 miles nautiques de la côte indienne. Les partisans qui ont milité pour leur libération avec une campagne appelée #FreeLatifa sont aussi apparemment entrés dans le collimateur des autocrates à la suite de cela.
    Les recherches menées par le projet Pegasus, une coalition de 18 médias dirigée par l’association Forbidden Stories, confirment que le téléphone portable d’au moins un des principaux soutiens de la princesse a apparemment été attaqué avec l’une des cyber-armes les plus puissantes du monde, le logiciel d’espionnage Pegasus, et ce avec succès. C’est ce qu’indiquent les analyses techniques d’Amnesty International, qui sont à la disposition du consortium de recherche. Les experts du Security Lab de l’organisation de défense des droits de l’homme ont trouvé des traces du programme sur l’iPhone de David Haigh, avocat britannique spécialisé dans les droits de l’homme et militant de #FreeLatifa. 
    Son appareil a été infecté le 3 août 2020, dix jours après avoir perdu le contact avec Latifa Al Maktum, comme le montrent des captures d’écran WhatsApp. Les données qui ont été saisies de cette manière ne sont pas claires.
    Il était « horrifié », a déclaré Haigh au UK Guardian. L’attaque de son téléphone portable était finalement « une attaque contre les droits de l’homme par un régime despotique ». Il a demandé au gouvernement britannique d’enquêter sur l’utilisation de Pegasus sur le sol britannique. Il a déposé une plainte. La police enquête.
    David Haigh est l’un des nombreux militants des droits de l’homme dans le monde qui ont été visés par la cybersurveillance. Le logiciel est distribué par la société israélienne NSO. Il peut être installé de manière inaperçue sur les téléphones portables afin de lire chaque mot écrit et d’écouter chaque mot parlé. Le fabricant affirme ne vendre le programme qu’aux autorités étatiques qui s’engagent à l’utiliser exclusivement contre les terroristes et les criminels. Mais il y a quinze jours, DIE ZEIT et ses partenaires médiatiques ont révélé que plusieurs États utilisent apparemment Pegasus pour surveiller les opposants politiques, les journalistes et les avocats – comme la Hongrie et le Mexique. Outre Haigh, Amnesty International a également pu vérifier pour la première fois, grâce à de nouvelles analyses techniques, l’identité de quatre autres victimes du programme d’espionnage : un militant musulman au Royaume-Uni, deux journalistes de Hongrie et de Turquie, et un avocat en Inde.
    Des allégations antérieures selon lesquelles il aurait placé Latifa et son entourage sous surveillance ont été démenties par son père, Sheikh Mohammed Bin Rashid Al Maktum, « en tant que personne privée » et « catégoriquement ». Mais sur une liste de cibles possibles de surveillance, que DIE ZEIT et ses partenaires médiatiques ont pu consulter, le numéro de téléphone portable de la princesse a été trouvé, ainsi que ceux de plusieurs de ses confidents. Le plus probable est que les chiffres ont été saisis par un client de NSO à Dubaï – c’est-à-dire quelqu’un dans une agence d’État qui est subordonnée au père de Latifa Al Maktum. Au total, la liste compte plus de 50 000 numéros.
    Interrogé par le consortium de recherche, un avocat de NSO a contesté la signification de cette liste. La collecte de ces numéros pourrait avoir « de nombreuses utilisations légitimes et totalement propres qui n’ont rien à voir avec la surveillance ou les ONS ». Même si les hypothèses concernant la liste téléphonique étaient correctes, cela ne signifierait « pas nécessairement » que l’alimentation des numéros faisait « partie d’une tentative de surveillance ». Il n’a pas été dit non plus qu’ »une tentative d’opération a réussi ». Une tentative de surveillance n’était « pas la seule façon » d’utiliser les données. Les journalistes ont tiré « des conclusions erronées, trop poussées et calomnieuses de cette liste ».
    Dans plusieurs cas, cependant, des analyses techniques ont montré que les cibles de la liste étaient effectivement infectées par le logiciel – maintenant aussi dans le cas d’autres numéros. Et le numéro de téléphone portable de Haigh n’était pas sur la liste en premier lieu. L’analyse technique ne permet pas de déduire si c’est Dubaï ou un autre pays qui a ordonné l’attaque de son téléphone portable. La NSO n’a pas fait de commentaires spécifiques sur le cas de David Haigh, mais a assuré qu’elle enquêterait sur tout soupçon d’utilisation abusive de la technologie. NSO n’a pas connaissance des activités de reconnaissance respectives de ses clients, à savoir les services de renseignement et les autorités policières, et ne connaît pas les données de ses clients sur les personnes ciblées. 
    Zeit Online, 02/08/2021
  • Le malheur de la Tunisie fait le bonheur de certains pays arabes

    Des voix influentes en Égypte, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis célèbrent la crise tunisienne comme un coup porté à l’islam politique.

    Les Tunisiens s’efforcent de comprendre la crise politique que traverse leur pays après que le président a brusquement limogé le premier ministre et suspendu le parlement dimanche soir.
    Pour certains en Tunisie, seule démocratie survivante du Printemps arabe, les mesures prises contre les institutions dirigées ou soutenues par Ennahda, un parti islamiste modéré, équivalent à un coup d’État. D’autres ont salué la mise à l’écart de dirigeants politiques qu’ils considèrent comme dysfonctionnels et répressifs. Les groupes de la société civile sont restés sur la touche. Le président Kais Saied, quant à lui, a insisté sur la légalité de ces mesures.
    Mais le discours des principaux acteurs du monde arabe pour lesquels l’héritage du Printemps arabe en Tunisie représente un défi évident – l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Égypte – était beaucoup plus univoque : Les événements en Tunisie ont sonné le glas de l’islam politique en démocratie.
    Les journaux, les commentateurs de télévision et les influenceurs des médias sociaux en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis et en Égypte ont salué le geste de Saied comme le triomphe de la volonté populaire sur Ennahda. Les trois pays – ainsi que les opposants tunisiens à Ennahda – ont cherché pendant des années à lier le parti aux Frères musulmans transnationaux et l’ont accusé d’encourager le terrorisme. Ennahda a depuis longtemps désavoué ses liens avec la confrérie.
    « La Tunisie se révolte contre la confrérie », a proclamé le journal saoudien semi-officiel Okaz. Le média émirati 24Media a salué « une décision courageuse pour sauver la Tunisie ». Le quotidien égyptien Al-Ahram a qualifié les événements de « perte du dernier bastion des Frères dans la région » – et Ahmed Moussa, un éminent animateur de télévision égyptien que certains ont comparé à Sean Hannity, a déclaré que le monde arabe assistait à la « chute finale » des Frères musulmans.
    Selon les analystes, ce blitz médiatique montre que les pays autocratiques ont saisi l’occasion de faire avancer leur objectif commun, qui est d’étouffer le soutien à l’islam politique dans la région. L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Égypte considèrent tous les mouvements affiliés aux Frères musulmans, qui défendent un programme politique islamiste, comme une menace existentielle pour leurs régimes, en particulier à la lumière du soutien populaire que les groupes islamistes ont obtenu après les soulèvements du Printemps arabe il y a dix ans.
    « Il n’a pas été question des institutions tunisiennes ni du maintien d’une quelconque gouvernance démocratique ; le pays est simplement présenté comme un peuple qui s’est libéré d’un gouvernement islamiste oppressif », a déclaré Elham Fakhro, analyste principal du Golfe à l’International Crisis Group.
    Ennahda a recueilli le plus de voix lors de la première élection démocratique de la Tunisie après la révolution de 2011.
    En Égypte, le seul autre pays du Printemps arabe à faire la transition vers la démocratie, les Frères musulmans ont obtenu de bons résultats dans les sondages – avant d’être évincés par un coup d’État militaire en 2013 qui a rapidement obtenu le soutien de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis.
    Le coup d’État égyptien a effrayé Ennahda, qui a conclu des alliances avec des partis laïques.
    Mais sa popularité a baissé depuis, et la colère envers le parti est montée l’année dernière, alors que la pandémie ravageait le pays et son économie et qu’un mouvement contre les brutalités policières gagnait du terrain. Des appels se sont multipliés en faveur de la dissolution du Parlement, qui est dirigé par le très impopulaire chef d’Ennahda, Rachid Ghannouchi.
    Le président tunisien renvoie le Premier ministre, démantèle le gouvernement et gèle le Parlement.
    La décision de M. Saied de geler le Parlement et de limoger le Premier ministre a fait suite à des manifestations qui semblaient largement dirigées contre Ennahda. Des vidéos diffusées sur les médias sociaux montrent des manifestants en train de vandaliser les bureaux locaux du parti.
    Les partisans de Saied ont afflué dans les rues de la capitale et d’autres villes pour faire la fête après son annonce dimanche soir.
    Ennahda, quant à lui, a dénoncé le geste de Saied comme un coup d’État. Dans une déclaration mardi, Ghannouchi a déclaré que le parti appelait à de nouvelles consultations et demandait instamment à Saied de revenir sur sa suspension du parlement.
    La jeune démocratie tunisienne, seule survivante du printemps arabe, est en crise après que le président ait pris des pouvoirs d’urgence.
    La publication égyptienne indépendante Mada Masr a cité mardi des responsables gouvernementaux anonymes affirmant que l’Égypte pensait que les mesures prises par Saied visaient à réduire l’influence politique d’Ennahda, mais que Le Caire espérait la fin de la démocratie tunisienne, qui continue d’inspirer les militants égyptiens.
    Le ministre tunisien des affaires étrangères s’est entretenu lundi avec son homologue saoudien, qui a déclaré que l’Arabie saoudite soutenait tous les efforts visant à assurer « la sécurité, la stabilité et la prospérité » en Tunisie, a rapporté l’agence de presse saoudienne. Les Émirats arabes unis n’ont pas encore fait de commentaire public. Mais les États autoritaires contrôlent étroitement l’expression, de sorte que les experts ont déclaré que les rapports et les commentaires dans les médias reflètent la ligne du gouvernement.
    L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis « verraient [l’évolution de la situation en Tunisie] comme une victoire pour le type de politique étrangère qu’ils ont essayé de promouvoir dans la région », a déclaré M. Fakhro, une politique qui vise à contrer l’idéologie islamiste.
    Les influenceurs des médias sociaux ont également poussé ce discours. Marc Owen Jones, professeur à l’université Hamad Bin Khalifa de Doha, a déclaré avoir vu des preuves de ce qui semble être des campagnes de manipulation sur Twitter, menées en grande partie par des influenceurs saoudiens et émiratis. Jones a analysé des milliers de tweets et a constaté que la plupart des utilisateurs qui tweetent ou retweetent des messages avec le hashtag « La Tunisie se révolte contre la confrérie » indiquent que leur localisation est l’Arabie saoudite, l’Égypte ou les Émirats arabes unis. « Pour moi, c’est absolument typique des campagnes émiraties et saoudiennes », a déclaré Jones. « C’est presque comme une signature classique des comptes que l’on s’attend à voir s’engager dans ce type de comportement ».
    Twitter divulgue quand il découvre des opérations d’information liées à l’État, et a suspendu des centaines de comptes originaires des Émirats arabes unis et de l’Égypte et des milliers liés à des campagnes d’information soutenues par l’Arabie saoudite ces dernières années.
    Bien que l’impact de ces campagnes apparentes soit susceptible d’être limité, M. Fakhro a déclaré : « Cela soulève de nombreuses questions sur le degré d’implication des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite dans les événements de Tunis. »
    Trois jours avant l’annonce de Saied, Dhahi Khalfan Tamim, chef adjoint de la police de Dubaï, a tweeté un message énigmatique : « Bonne nouvelle … un nouveau coup … puissant. … à venir pour la Confrérie ».
    Dans une interview accordée lundi au service arabe de la chaîne publique turque TRT, Ghannouchi a accusé les médias émiratis de pousser à un « coup d’État » en Tunisie. La couverture médiatique en Turquie, qui soutient Ennahda, a été largement favorable à Ghannouchi.
    Il n’existe aucune preuve que des gouvernements étrangers aient fait pression sur Saied pour qu’il agisse, et l’analyste tunisien Mohamed-Dhia Hammami a déclaré que cela était peu probable.
    Mais les forces de sécurité tunisiennes ont fait une descente dans le bureau d’Al Jazeera à Tunis lundi, suscitant des inquiétudes quant à une répression de la liberté de la presse. Al Jazeera est financée par le Qatar, qui est proche d’Ennahda et sympathise avec les groupes islamistes.
    Le sénateur Chris Murphy (D-Conn.) a demandé à l’administration Biden d’enquêter sur une éventuelle ingérence de l’Arabie saoudite et des EAU dans la crise politique tunisienne.
    Fakhro a qualifié de « frappantes » les similitudes entre les réponses des médias saoudiens et émiratis au coup d’État de 2013 en Égypte et leur couverture de la Tunisie ces derniers jours. »
    Pourtant, des différences importantes dans les contextes subsistent. Saied a déclaré lundi aux groupes de défense des droits des Tunisiens qu’il restait attaché aux libertés civiles et au processus démocratique, et il a dit que le gel du parlement serait temporaire.
    « Ce qui se passe en Tunisie n’est pas une révolution contre les Frères musulmans » mais plutôt une réaction à « la paralysie de la vie politique », a écrit lundi sur Facebook le présentateur de la télévision égyptienne Moataz Abdelfattah.
    Mais quoi qu’il arrive en Tunisie, qui a été considérée comme le symbole de la promesse révolutionnaire dans la région, cela aura des répercussions, a déclaré H.A. Hellyer, spécialiste du Moyen-Orient à la Fondation Carnegie pour la paix internationale.
    « Les opposants à cette lutte pour un gouvernement responsable vont essayer de contenir leur joie face à ce pas très important en direction d’un processus responsable, d’autant plus qu’il est dépeint dans de nombreux secteurs comme une compression d’un courant pro-islamiste auquel ils s’opposent », a-t-il déclaré.
    Etiquettes : Tunisie, Arabie Saoudite, Egypte, Emirats Arabes Unis, EAU, printemps arabe,
  • Les EAU sont liés au listing de centaines de téléphones britanniques

    Les Émirats arabes unis sont liés au listing de centaines de téléphones britanniques dans la fuite du projet Pegasus.

    Un membre de la Chambre des Lords et un Britannique autrefois détenu aux EAU figurent parmi les personnes figurant dans la base de données.

    Un membre de la Chambre des Lords figure parmi plus de 400 personnes dont les numéros de téléphone mobile britanniques apparaissent dans une liste ayant fait l’objet d’une fuite de numéros identifiés par les gouvernements clients de NSO Group entre 2017 et 2019, peut révéler le Guardian.

    Le principal gouvernement responsable de la sélection des numéros britanniques semble être les Émirats arabes unis, selon l’analyse des données. Les Émirats arabes unis font partie des 40 pays qui ont eu accès au logiciel espion de NSO, capable de pirater et de prendre secrètement le contrôle d’un téléphone portable.

    Dubaï, l’émirat dirigé par le cheikh Mohammed bin Rashid al-Maktoum, aurait également été un client de NSO.

    Les téléphones de la fille du cheikh Mohammed, la princesse Latifa, qui a lancé une tentative ratée pour fuir Dubaï en 2018, et de son ex-femme, la princesse Haya, qui a fui le pays et est venue au Royaume-Uni en 2019, apparaissent tous deux dans les données.

    De même que les téléphones de plusieurs associés des deux femmes – y compris, dans le cas de Haya, des numéros principalement basés au Royaume-Uni.

    Dans de multiples déclarations, NSO a déclaré que le fait qu’un numéro apparaisse sur la liste ayant fait l’objet d’une fuite n’indiquait en aucun cas si un numéro était ciblé pour une surveillance à l’aide de Pegasus. « La liste n’est pas une liste de cibles ou de cibles potentielles de Pegasus », a déclaré la société. « Les numéros figurant sur la liste ne sont en aucun cas liés au groupe NSO ».

    Mais le Guardian et d’autres partenaires médiatiques qui ont eu accès aux données dans le cadre du projet Pegasus, un consortium médiatique, pensent que la liste indique des personnes d’intérêt sélectionnées par des clients gouvernementaux de NSO. Elle comprend des personnes du monde entier dont les téléphones présentaient des traces du logiciel espion de NSO, Pegasus, selon l’analyse médico-légale de leurs appareils.

    Les personnes dont les numéros britanniques figurent sur la liste sont les suivantes :

    Lady Uddin, un membre indépendant de la Chambre des Lords, dont le numéro est apparu sur les données en 2017 et 2018. Elle a déclaré que s’il y avait un espionnage des membres du Parlement, cela équivaudrait à « un grand abus de confiance » qui « contrevient à notre souveraineté ».

    Un avocat travaillant pour un cabinet d’avocats londonien qui conseille la princesse Haya. La princesse Haya est engagée dans une âpre bataille pour la garde de son enfant avec le cheikh Mohammed devant la division familiale de la Haute Cour de justice.

    John Gosden, un entraîneur de chevaux de premier plan basé à Newmarket, qui est également un ami de la princesse Haya, elle-même cavalière équestre internationale. Les numéros d’autres personnes travaillant pour l’équipe de sécurité et de relations publiques de Haya apparaissent également dans les données.

    John Chipman, directeur général du groupe de réflexion sur la défense, l’Institut international d’études stratégiques, qui organise une conférence annuelle à Bahreïn, l’un des alliés des Émirats arabes unis.

    Matthew Hedges, un Britannique détenu aux EAU pendant sept mois en 2018, dont le numéro apparaît pour la première fois dans les données alors qu’il se trouvait au Royaume-Uni, avant d’entreprendre son voyage. « Je veux savoir ce que le gouvernement britannique fait à ce sujet », a-t-il déclaré.

    D’autres noms britanniques très en vue qui figurent sur la liste ont déjà été cités, comme Roula Khalaf, rédactrice en chef du Financial Times, qui était rédactrice adjointe lorsque son numéro est apparu dans les données en 2018. NSO a déclaré plus tard qu’il n’y avait pas eu de tentative ou de réussite d’infection par Pegasus du téléphone de Khalaf.

    Plus tôt cette semaine, le Guardian a également révélé l’inscription du numéro de l’avocat des droits de l’homme Rodney Dixon QC, qui a représenté à la fois Hedges et la fiancée du journaliste saoudien assassiné Jamal Khashoggi, Hatice Cengiz. L’analyse des données suggère que son numéro fait partie d’un petit groupe de numéros britanniques qui semblent avoir été sélectionnés par l’Arabie saoudite.

    Les avocats de NSO ont suggéré qu’il était « techniquement impossible » que le téléphone de Dixon soit ciblé par l’Arabie saoudite. L’analyse médico-légale de l’appareil de Dixon réalisée par le laboratoire de sécurité d’Amnesty International a révélé une activité liée à Pegasus, mais aucune infection réussie.

    Amnesty a examiné deux autres téléphones britanniques dans les données. L’un présentait le même type d’activité de Pegasus que celui découvert sur l’iPhone de Dixon. Le second, un téléphone Android, ne présentait aucun signe de tentative d’infection ou d’infection réussie.

    Ni les Émirats arabes unis, ni Dubaï, ni l’Arabie saoudite n’ont répondu aux demandes de commentaires. Till Dunckel, un avocat allemand représentant Sheikh Mohammed, a déclaré au journal Süddeutsche Zeitung : « Notre client nie catégoriquement avoir tenté de ‘pirater’ les téléphones des personnes citées dans votre demande, ou avoir donné l’ordre à d’autres de le faire. » Les représentants du cheikh ont également déclaré précédemment qu’il craignait que Latifa soit victime d’un enlèvement et qu’il avait mené « une mission de sauvetage ».

    NSO Group a toujours affirmé qu’il n’avait pas accès aux données de ses clients. Dans des déclarations publiées par l’intermédiaire de ses avocats, NSO a déclaré que le consortium chargé de l’établissement des rapports sur le projet Pegasus avait fait des « hypothèses incorrectes » sur les clients qui utilisaient la technologie de l’entreprise.

    Des dissidents en exil et des militants solidaires du Royaume-Uni figurent également sur la liste qui a fait l’objet de la fuite, ce qui ne manquera pas de soulever des questions au sujet des Émirats arabes unis, traditionnellement considérés comme un allié britannique, et dont la famille dirigeante, les souverains d’Abou Dhabi, possèdent les champions de la Premier League, Manchester City.

    Les Émirats arabes unis sont devenus une cyberpuissance en plein essor, dont la puissante capacité de surveillance est contrôlée par la famille de son dirigeant, le cheikh Mohamed bin Zayed, et en particulier par son frère, le conseiller à la sécurité nationale, le cheikh Tahnoon bin Zayed.

    Trois sources familières avec les opérations de NSO ont confirmé qu’au cours de l’année écoulée, la société avait retiré à Dubaï sa licence Pegasus. Elles ont déclaré que la décision avait été prise principalement en raison de préoccupations liées aux droits de l’homme, mais elles n’ont pas contesté que la possibilité que Sheikh Mohammed utilise le logiciel contre les membres de sa propre famille avait également joué un rôle.

    Il n’est pas clair si le MI5 était au courant d’une quelconque activité d’espionnage des EAU. En général, si l’agence d’espionnage apprend qu’un Britannique fait l’objet d’une surveillance étrangère, elle prend des mesures pour alerter la victime si elle estime qu’il y a une menace de mort ou un autre danger grave au Royaume-Uni.

    Mais le gouvernement britannique a émis une réprimande codée cette semaine à la suite des révélations sur le projet Pegasus.

    Un porte-parole du gouvernement a déclaré : « Il est vital que tous les cyberacteurs utilisent les capacités d’une manière qui soit légale, responsable et proportionnée afin de garantir que le cyberespace reste un endroit sûr et prospère pour tous. »

    Il est difficile de déterminer pourquoi certaines personnes ont pu être inscrites sur la liste. Uddin a été la première femme musulmane à siéger à la chambre haute, mais elle n’est pas considérée comme une spécialiste de la politique étrangère. « Si l’espionnage a lieu contre la plus haute des institutions britanniques souveraines, des questions se posent pour savoir si notre gouvernement était au courant », a-t-elle déclaré.

    The Guardian, 21/07/2021

    Etiquettes : Pegasus, Espionnage, NSO Group, logiciels espions, Émirats arabes unis, EAU, Royaume Uni, Grande-Bretagne,

  • Joe Biden gèle le Fonds Abraham, alors que les liens commerciaux entre Israël et les Émirats arabes unis s'affaiblissent.

    L’administration Biden n’alloue pas de budget pour les projets régionaux, tandis que les EAU font pression sur Israël pour qu’il n’annule pas l’oléoduc Red-Med, ont déclaré des sources à « Globes ».

    L’administration américaine a suspendu le Fonds d’Abraham pour une durée indéterminée, ont déclaré à « Globes » des sources américaines et israéliennes proches du dossier. Le Fonds d’Abraham a été créé après la signature des accords d’Abraham entre Israël, les EAU et les États-Unis en septembre 2020 et les signataires étaient censés financer le fonds avec d’autres pays qui se joindraient plus tard.
    Au moment de sa création, une annonce a déclaré : « Le Fonds réalisera les engagements pris dans les accords d’Abraham. Le Fonds injectera plus de 3 milliards de dollars dans le marché des investissements pour le développement dans le secteur privé afin de promouvoir la coopération économique et d’encourager la prospérité au Moyen-Orient et au-delà. Les pays qui sont partenaires dans la création du fonds accueilleront favorablement l’adhésion d’autres pays afin de promouvoir ses objectifs. »
    Le Fonds Abraham était déjà opérationnel en octobre 2020 et, en trois mois, il a examiné des centaines de demandes de financement de diverses entreprises. Il a également approuvé plus de dix de ces entreprises dans les domaines de l’énergie, de la technologie alimentaire et de la technologie financière. Le Fonds Abraham a également approché les grandes institutions financières américaines, qui ont été invitées à se joindre à ses efforts afin d’augmenter le capital du fonds.
    Cependant, l’élection de Joe Biden en tant que nouveau président des États-Unis a mis un terme aux activités. Fin janvier, peu après la cérémonie de prestation de serment de Biden, le rabbin Aryeh Lightstone, qui avait été nommé par Donald Trump à la tête du Fonds Abraham, a démissionné. Depuis lors, l’administration Biden ne l’a pas remplacé. L’administration Biden soutient les accords d’Abraham, même s’ils ont été signés par Trump, mais elle est moins enthousiaste à l’idée d’allouer des fonds au Fonds d’Abraham sur son budget. Le ministère israélien des affaires étrangères s’est entretenu avec des sources à Washington à ce sujet et Washington a déclaré à Jérusalem que les activités du Fonds d’Abraham étaient en cours de réévaluation.
    Des rapports aux Etats-Unis ont indiqué que parmi les raisons de cette réévaluation figuraient les énormes dépenses que l’administration Biden doit faire pour la reprise économique après la crise de Covid-19. Une source américaine haut placée a déclaré à « Globes » que la Maison Blanche est intéressée par la promotion et le succès des accords d’Abraham et par l’apport de partenaires supplémentaires pour ces mesures, mais que l’accent sera mis sur la dimension diplomatique et que le fonds lui-même a été gelé indéfiniment. Une source israélienne l’a confirmé et a déclaré que lors des discussions avec les Américains, tant sous le précédent gouvernement israélien que sous le gouvernement actuel, il a été clairement indiqué que les activités du Fonds ne sont pas à l’ordre du jour.
    Cette suspension est l’une des raisons pour lesquelles les EAU ont créé un fonds d’investissement en Israël, qui a été annoncé en mars 2021. Mais depuis, ce fonds n’a pas non plus réussi à décoller. L’ancien Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le prince héritier des Émirats arabes unis Mohamed bin Zayed s’étaient mis d’accord sur le fonds et Netanyahu avait espéré se rendre à Abou Dhabi avant les élections de mars pour une déclaration commune sur la question, mais en raison d’une prise de bec diplomatique avec la Jordanie, la démarche n’a jamais abouti.
    En mars, bin Zayed a également annoncé la création d’un fonds supplémentaire de 10 milliards de dollars en Israël, qui investirait notamment dans l’énergie, l’industrie, les infrastructures, l’espace et la santé. Le fonds a déclaré qu’il mettrait l’accent sur le soutien d’entreprises susceptibles de promouvoir le bien-être et l’économie des deux pays et de toute la région et qu’il opérerait principalement dans le secteur privé.
    Mais près de quatre mois se sont écoulés, un nouveau gouvernement israélien a été mis en place et rien ne s’est passé avec ce fonds, à l’exception de quelques discussions générales entre les représentants du ministère israélien des affaires étrangères et leurs homologues des EAU, sur les moyens de promouvoir les activités du fonds et de renforcer les accords diplomatiques pour les adapter aux activités.
    Du côté israélien, les ministères de l’économie, des infrastructures et de l’énergie, entre autres, discutent des projets à proposer au nouveau fonds. L’espoir d’Israël est que les accords signés par le ministre des affaires étrangères Yair Lapid lors de sa visite aux EAU la semaine dernière fourniront un cadre juridique en Israël pour les investissements du gouvernement des EAU par le biais du fonds. Un ou deux ministres du gouvernement israélien devraient se rendre prochainement aux EAU pour discuter du fonds et des moyens de le mettre en œuvre.
    Mais dans la pratique, le fonds n’a pas encore été créé et ne semble pas se profiler à l’horizon. En attendant, à Abu Dhabi, on examine la conduite du nouveau gouvernement israélien et sa capacité à promouvoir les affaires et les liens économiques entre les deux pays. DP attend notamment l’évolution de l’appel d’offres pour le port de Haïfa, le sultan Ahmed bin Sulayem souhaitant faire une offre pour ce projet. Bien sûr, il y a aussi la question de l’Europe-Asia Pipeline Co. (EAPC) à l’ordre du jour.
    Les relations commerciales entre Israël et les EAU sont assombries par un différend naissant avec le nouveau gouvernement israélien et des incidents commerciaux diplomatiques. La semaine dernière, « Globes » a rapporté la colère des hommes d’affaires de deux des familles les plus riches des EAU suite à l’annulation d’une réunion avec Lapid lors de sa visite à Abu Dhabi.
    Une source d’affaires aux EAU a déclaré à « Globes » que le retrait d’Israël de l’accord que le CPEA a signé avec Med-Red Land Bridge Ltd, pour transporter le pétrole du Golfe Persique vers Israël afin de le fournir aux clients méditerranéens, nuira aux relations économiques entre les pays et servira de dissuasion future pour les entreprises des EAU. La source a déclaré que la mise en œuvre réussie de l’accord – en d’autres termes, l’expédition des premiers conteneurs de pétrole vers le port d’Eilat, puis leur transport vers Ashdod sans aucun problème ni fuite – dissiperait les inquiétudes israéliennes et que le potentiel d’extension de l’accord est énorme.
    Des voix s’élèvent au sein du nouveau gouvernement israélien pour annuler l’accord, notamment en raison de l’opposition du ministre de la protection de l’environnement Tamar Zandberg et d’autres ministres. Le ministre des Affaires étrangères Yair Lapid a déclaré à « Globes » lors de sa récente visite aux EAU qu’il étudiait la question. « Nous ne voulons pas nuire à l’environnement. Nous devons prendre soin de notre pays et nous ne pouvons pas avoir une répétition des catastrophes passées (la fuite à Nahal Evrona). » La question sera entendue par la Haute Cour de justice et le gouvernement doit encore répondre à la pétition sur la question.
    Une source diplomatique aux EAU a déclaré à « Globes » que la question a à peine été abordée lors de la visite de Lapid, bien qu’il ait été clairement indiqué à Israël que l’annulation de l’accord nuirait à la coopération dans le domaine de l’énergie, qui s’étendrait également au gaz naturel et à d’éventuels investissements de sociétés émiraties dans des projets d’infrastructure en Israël. La source émiratie a également déclaré que les EAU attendent du nouveau gouvernement qu’il respecte tous les engagements du gouvernement Netanyahu et l’accord du CPEA en fait partie.
    L’un des paradoxes de l’activité diplomatique israélienne aux EAU est le décalage entre les résultats économiques qu’elle génère et les conditions dans lesquelles les diplomates israéliens y travaillent en raison d’importantes difficultés budgétaires. Ainsi, le consulat de Dubaï, qui devait occuper tout l’étage d’un immeuble de bureaux, ne loue actuellement que quelques pièces. Même la cérémonie d’ouverture du consulat, à laquelle ont assisté Lapid et le ministre émirien de l’intelligence artificielle, s’est déroulée dans une salle louée uniquement pour l’occasion.
    En raison de ces difficultés, les activités ne sont pas assez étendues et l’énorme potentiel n’est pas exploité. « Globes » a appris que l’appartement officiel du consul général d’Israël à Dubaï, Ilan Shtulman, n’est que partiellement meublé et qu’il doit dormir sur une natte à même le sol car il n’a pas de budget pour l’achat d’un lit. En outre, le personnel du consulat ainsi que de l’ambassade à Abu Dhabi n’est pas au complet et des solutions administratives créatives ont été mises en place en raison du manque de budget.
    Le ministère des Affaires étrangères déclare : « L’ambassade d’Israël à Abu Dhabi et le consulat général à Dubaï fonctionnent tous deux comme des bureaux entièrement organisés depuis le début de l’année. Comme il s’agit de nouveaux bureaux, il existe une procédure établie pour l’approbation des budgets, des postes et du personnel. Le ministère des Affaires étrangères s’efforce de doter les bureaux de représentation d’un personnel complet dès que possible et de leur fournir un budget adapté à leurs activités. »
    Globes, 07/07/2021
    Etiquettes : Maroc, Emirats Arabes Unis, EAU, Israël, normalisation, Donald Trump, Joe Biden, Maison Blanche, Washington, 
  • Les EAU inaugurent leur ambassade en Israël

    JERUSALEM (AP) – Les Emirats arabes unis ont officiellement ouvert leur ambassade en Israël mercredi, inaugurant ses bureaux diplomatiques à Tel Aviv moins d’un an après que les deux pays aient annoncé qu’ils allaient établir des relations ouvertes.

    S’exprimant lors de la cérémonie, le président israélien Isaac Herzog a déclaré que l’ouverture de l’ambassade était « une étape importante dans notre voyage commun vers un avenir de paix, de prospérité et de sécurité pour le Moyen-Orient ».

    L’inauguration de l’ambassade émiratie a eu lieu deux semaines après qu’Israël ait coupé le ruban de son ambassade à Abu Dhabi lors de la visite du ministre des affaires étrangères Yair Lapid aux EAU en juin.

    Israël et les EAU ont officiellement établi des relations diplomatiques l’année dernière après des décennies de liens clandestins. Les deux pays ont signé l’accord de normalisation sous l’égide des États-Unis sur la pelouse de la Maison Blanche en septembre, et une multitude d’accords économiques et de coopération bilatéraux dans les mois qui ont suivi.

    L’ambassade des EAU est située dans la même tour que la bourse d’Israël, au cœur du quartier des affaires de Tel Aviv. La plupart des pays maintiennent des ambassades à Tel Aviv en raison du statut contesté de Jérusalem, l’une des questions les plus épineuses du conflit au Moyen-Orient. Les États-Unis ont déplacé leur ambassade à Jérusalem en 2018, et une poignée de pays ont suivi le mouvement.

    Israël s’est emparé de Jérusalem-Est lors de la guerre du Proche-Orient de 1967 et l’a ensuite annexée dans une démarche non reconnue par la majeure partie de la communauté internationale. La ville est le siège du parlement israélien, de la Cour suprême et de nombreux bureaux gouvernementaux. Les Palestiniens souhaitent que Jérusalem-Est devienne la capitale d’un futur État indépendant.

    L’ambassadeur des Émirats arabes unis en Israël, Mohamed Al Khaja, a déclaré aux journalistes que l’ambassade sera « une base pour notre tâche de continuer à construire sur notre nouveau partenariat, de rechercher le dialogue, et non la dispute, de construire un nouveau paradigme de paix et de fournir un modèle pour une nouvelle approche collaborative de la résolution des conflits au Moyen-Orient ».

    Associated Press, 14/07/2021

    Etiquettes : EAU, Israël, ambassade, normalisation,

  • Biden gèle l'argent promis par Trump au Maroc, les EAU et le Soudan

    Les États-Unis gèlent le Fonds Abraham, alors que les liens commerciaux entre Israël et les Émirats arabes unis s’affaiblissent.

    L’administration Biden n’alloue pas de budget pour les projets régionaux, tandis que les EAU font pression sur Israël pour qu’il n’annule pas l’oléoduc Red-Med, ont déclaré des sources à « Globes ».
    L’administration américaine a suspendu le Fonds d’Abraham pour une durée indéterminée, ont déclaré à « Globes » des sources américaines et israéliennes proches du dossier. Le Fonds d’Abraham a été créé après la signature des accords d’Abraham entre Israël, les EAU et les États-Unis en septembre 2020 et les signataires étaient censés financer le fonds avec d’autres pays qui se joindraient plus tard.
    Au moment de sa création, une annonce a déclaré : « Le Fonds réalisera les engagements pris dans les accords d’Abraham. Le Fonds injectera plus de 3 milliards de dollars dans le marché des investissements pour le développement dans le secteur privé afin de promouvoir la coopération économique et d’encourager la prospérité au Moyen-Orient et au-delà. Les pays qui sont partenaires dans la création du fonds accueilleront favorablement l’adhésion d’autres pays afin de promouvoir ses objectifs. »
    Le Fonds Abraham était déjà opérationnel en octobre 2020 et, en trois mois, il a examiné des centaines de demandes de financement de diverses entreprises. Il a également approuvé plus de dix de ces entreprises dans les domaines de l’énergie, de la technologie alimentaire et de la technologie financière. Le Fonds Abraham a également approché de grandes institutions financières américaines, auxquelles il a demandé de se joindre à ses efforts afin d’augmenter le capital du fonds.
    Cependant, l’élection de Joe Biden en tant que nouveau président des États-Unis a mis un terme aux activités. Fin janvier, peu après la cérémonie de prestation de serment de Biden, le rabbin Aryeh Lightstone, qui avait été nommé par Donald Trump à la tête du Fonds Abraham, a démissionné. Depuis lors, l’administration Biden ne l’a pas remplacé. L’administration Biden soutient les accords d’Abraham, même s’ils ont été signés par Trump, mais elle est moins enthousiaste à l’idée d’allouer des fonds au Fonds d’Abraham sur son budget. Le ministère israélien des affaires étrangères s’est entretenu avec des sources à Washington à ce sujet et Washington a déclaré à Jérusalem que les activités du Fonds d’Abraham étaient en cours de réévaluation.
    Des rapports aux Etats-Unis ont indiqué que parmi les raisons de cette réévaluation figuraient les énormes dépenses que l’administration Biden doit faire pour la reprise économique après la crise de Covid-19. Une source américaine haut placée a déclaré à « Globes » que la Maison Blanche est intéressée par la promotion et le succès des accords d’Abraham et par l’apport de partenaires supplémentaires pour ces mesures, mais que l’accent sera mis sur la dimension diplomatique et que le fonds lui-même a été gelé indéfiniment. Une source israélienne l’a confirmé et a déclaré que lors des discussions avec les Américains, tant sous le précédent gouvernement israélien que sous le gouvernement actuel, il a été clairement indiqué que les activités du Fonds ne sont pas à l’ordre du jour.
    Cette suspension est l’une des raisons pour lesquelles les EAU ont créé un fonds d’investissement en Israël, qui a été annoncé en mars 2021. Mais depuis, ce fonds n’a pas non plus réussi à décoller. L’ancien Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le prince héritier des Émirats arabes unis Mohamed bin Zayed s’étaient mis d’accord sur le fonds et Netanyahu avait espéré se rendre à Abou Dhabi avant les élections de mars pour une déclaration commune sur la question, mais en raison d’une prise de bec diplomatique avec la Jordanie, la démarche n’a jamais abouti.
    En mars, bin Zayed a également annoncé la création d’un fonds supplémentaire de 10 milliards de dollars en Israël, qui investirait notamment dans l’énergie, l’industrie, les infrastructures, l’espace et la santé. Le fonds a déclaré qu’il mettrait l’accent sur le soutien d’entreprises susceptibles de promouvoir le bien-être et l’économie des deux pays et de toute la région et qu’il opérerait principalement dans le secteur privé.
    Mais près de quatre mois se sont écoulés, un nouveau gouvernement israélien a été mis en place et rien ne s’est passé avec ce fonds, à l’exception de quelques discussions générales entre les représentants du ministère israélien des affaires étrangères et leurs homologues des EAU, sur les moyens de promouvoir les activités du fonds et de renforcer les accords diplomatiques pour les adapter aux activités.
    Du côté israélien, les ministères de l’économie, des infrastructures et de l’énergie, entre autres, discutent des projets à proposer au nouveau fonds. L’espoir d’Israël est que les accords signés par le ministre des affaires étrangères Yair Lapid lors de sa visite aux EAU la semaine dernière fourniront un cadre juridique en Israël pour les investissements du gouvernement des EAU par le biais du fonds. Un ou deux ministres du gouvernement israélien devraient se rendre prochainement aux EAU pour discuter du fonds et des moyens de le mettre en œuvre.
    Mais dans la pratique, le fonds n’a pas encore été créé et ne semble pas se profiler à l’horizon. En attendant, à Abu Dhabi, on examine la conduite du nouveau gouvernement israélien et sa capacité à promouvoir les affaires et les liens économiques entre les deux pays. DP attend notamment l’évolution de l’appel d’offres pour le port de Haïfa, le sultan Ahmed bin Sulayem souhaitant faire une offre pour ce projet. Bien sûr, il y a aussi la question de l’Europe-Asia Pipeline Co. (EAPC) à l’ordre du jour.
    Les relations commerciales entre Israël et les EAU sont assombries par un différend naissant avec le nouveau gouvernement israélien et des incidents commerciaux diplomatiques. La semaine dernière, « Globes » a rapporté la colère des hommes d’affaires de deux des familles les plus riches des EAU suite à l’annulation d’une réunion avec Lapid lors de sa visite à Abu Dhabi.
    Une source d’affaires aux EAU a déclaré à « Globes » que le retrait d’Israël de l’accord que le CPEA a signé avec Med-Red Land Bridge Ltd, pour transporter le pétrole du Golfe Persique vers Israël afin de le fournir aux clients méditerranéens, nuira aux relations économiques entre les pays et servira de dissuasion future pour les entreprises des EAU. La source a déclaré que la mise en œuvre réussie de l’accord – en d’autres termes, l’expédition des premiers conteneurs de pétrole vers le port d’Eilat, puis leur transport vers Ashdod sans aucun problème ni fuite – dissiperait les inquiétudes israéliennes et que le potentiel d’extension de l’accord est énorme.
    Des voix s’élèvent au sein du nouveau gouvernement israélien pour annuler l’accord, notamment en raison de l’opposition du ministre de la protection de l’environnement Tamar Zandberg et d’autres ministres. Le ministre des Affaires étrangères, Yair Lapid, a déclaré à « Globes » lors de sa récente visite aux EAU qu’il étudiait la question. « Nous ne voulons pas nuire à l’environnement. Nous devons prendre soin de notre pays et nous ne pouvons pas avoir une répétition des catastrophes passées (la fuite à Nahal Evrona). » La question sera entendue par la Haute Cour de justice et le gouvernement doit encore répondre à la pétition sur la question.
    Une source diplomatique aux EAU a déclaré à « Globes » que la question a à peine été abordée lors de la visite de Lapid, bien qu’il ait été clairement indiqué à Israël que l’annulation de l’accord nuirait à la coopération dans le domaine de l’énergie, qui s’étendrait également au gaz naturel et à d’éventuels investissements de sociétés émiraties dans des projets d’infrastructure en Israël. La source émiratie a également déclaré que les EAU attendent du nouveau gouvernement qu’il respecte tous les engagements du gouvernement Netanyahu et l’accord du CPEA en fait partie.
    L’un des paradoxes de l’activité diplomatique israélienne aux EAU est le décalage entre les résultats économiques qu’elle génère et les conditions dans lesquelles les diplomates israéliens y travaillent en raison d’importantes difficultés budgétaires. Ainsi, le consulat de Dubaï, qui devait occuper tout l’étage d’un immeuble de bureaux, ne loue actuellement que quelques pièces. Même la cérémonie d’ouverture du consulat, à laquelle ont assisté Lapid et le ministre émirien de l’intelligence artificielle, s’est déroulée dans une salle louée uniquement pour l’occasion.
    En raison de ces difficultés, les activités ne sont pas assez étendues et l’énorme potentiel n’est pas exploité. « Globes » a appris que l’appartement officiel du consul général d’Israël à Dubaï, Ilan Shtulman, n’est que partiellement meublé et qu’il doit dormir sur une natte à même le sol car il n’a pas de budget pour l’achat d’un lit. En outre, le personnel du consulat ainsi que de l’ambassade à Abu Dhabi n’est pas au complet et des solutions administratives créatives ont été mises en place en raison du manque de budget.
    Le ministère des Affaires étrangères déclare : « L’ambassade d’Israël à Abu Dhabi et le consulat général à Dubaï fonctionnent comme des bureaux entièrement organisés depuis le début de l’année. Comme il s’agit de nouveaux bureaux, il existe une procédure établie pour l’approbation des budgets, des postes et du personnel. Le ministère des Affaires étrangères s’efforce de doter les bureaux de représentation d’un personnel complet dès que possible et de leur fournir un budget adapté à leurs activités. »
    Etiquettes : Etats-Unis, Joe Biden, Donald Trump, normalisation, Maroc, Emirats Arabes Unis, EAU, Soudan, Fonds Abraham, Accords Abraham, 
  • L’Égypte et le Soudan demandent à l’ONU d’agir sur le barrage du Nil, l’Éthiopie dit « non ».

    NATIONS UNIES (AP) – L’Egypte et le Soudan ont exhorté le Conseil de sécurité de l’ONU jeudi à entreprendre une « diplomatie préventive » et à demander un accord juridiquement contraignant pour résoudre un différend avec l’Ethiopie sur la disponibilité de l’eau de son barrage sur le Nil, mais l’Ethiopie a insisté sur le fait que la question peut être résolue par l’Union africaine et de nombreux membres du Conseil ont approuvé.

    L’Égypte et le Soudan ont demandé la réunion du Conseil et envoyé leurs ministres des affaires étrangères à New York pour appeler à une action du Conseil, affirmant que dix années de négociations avec l’Éthiopie ont échoué et que le barrage de la Grande Renaissance éthiopienne (Grand Ethiopian Renaissance Dam ou GERD) commence à remplir une deuxième fois son réservoir, ce qui non seulement viole un accord de 2015, mais constitue une « menace existentielle » pour 150 millions de personnes dans les pays en aval.

    Le barrage sur le Nil bleu est achevé à 80% et devrait atteindre sa pleine capacité de production en 2023, ce qui en fait la plus grande centrale hydroélectrique d’Afrique et la septième du monde, selon les rapports des médias d’État éthiopiens. L’Éthiopie affirme que le barrage de 5 milliards de dollars est essentiel pour promouvoir le développement économique et s’assurer que la grande majorité de sa population ne manque pas d’électricité.

    Le ministre éthiopien de l’eau, Seleshi Bekele Awulachew, a déclaré au Conseil que le remplissage du réservoir faisait partie de la construction du barrage et que le Conseil de sécurité ne devrait pas être impliqué dans la question des eaux du Nil, affirmant qu’aucune question n’est plus éloignée de son mandat consistant à assurer la paix et la sécurité internationales.

    « L’Union africaine est saisie de la question et facilite habilement nos négociations », a-t-il déclaré. « L’Éthiopie estime qu’un accord est à portée de main, compte tenu de la volonté politique nécessaire et de l’engagement à négocier de bonne foi. »

    Awulachew a déclaré que le Conseil de sécurité devrait encourager l’Égypte et le Soudan à négocier sérieusement un accord sur le remplissage et le fonctionnement du GERD.

    Le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Shukry et le ministre soudanais des Affaires étrangères Mariam al-Mahdi ont reproché à l’Ethiopie de manquer de volonté politique.

    Ils ont exhorté le Conseil de sécurité à approuver une résolution rédigée par la Tunisie qui exigerait de l’Égypte, du Soudan et de l’Éthiopie qu’ils négocient un accord juridiquement contraignant dans un délai de six mois sous les auspices de l’Union africaine « qui garantisse la capacité de l’Éthiopie à produire de l’hydroélectricité […] tout en évitant d’infliger des dommages importants à la sécurité de l’eau des États en aval ».

    Le projet encourage les autres parties « à s’engager activement dans les négociations en vue de régler les questions techniques et juridiques en suspens ». Et il exhorte l’Éthiopie « à s’abstenir de continuer à remplir unilatéralement le réservoir du GERD » et appelle l’Égypte, le Soudan et l’Éthiopie « à s’abstenir de faire des déclarations ou de prendre des mesures susceptibles de compromettre le processus de négociation. »

    Mme Al-Mahdi a déclaré que le Soudan et l’Égypte estiment que la conclusion d’un accord dans les six mois est « très possible si la volonté politique est présente. »

    Elle a déclaré aux journalistes après la réunion du conseil : « Ce que nous avons entendu là-bas est vraiment encourageant – qu’il s’agit d’une question très importante qui suscite l’intérêt du monde parce qu’il s’agit d’une menace imminente pour la stabilité et la sécurité d’une région importante dans la partie orientale de l’Afrique. »

    « Nous sommes très optimistes quant au fait que le Conseil de sécurité abordera cette question de manière responsable, et qu’elle ne sera pas simplement rayée de son ordre du jour », a déclaré Mme al-Mahdi.

    Elle a noté que certains membres du Conseil s’inquiètent du précédent que constituerait le traitement d’un problème d’eau, mais elle a souligné que le traitement de la DIRD constituerait « un précédent » en matière de diplomatie préventive « et d’examen des signes d’alerte précoce », ce qui éviterait d’avoir à gérer une mission de maintien de la paix par la suite.

    L’Égyptien Shukry a déclaré que tous les membres du Conseil ont indiqué qu’aucune action unilatérale ne devait être entreprise par les trois pays, mais il a omis de mentionner que l’Éthiopie a déjà pris deux fois des mesures unilatérales pour remplir le réservoir du GERD, ce qui a « un impact négatif sur les négociations ».

    Néanmoins, a-t-il ajouté, les membres du Conseil ont manifesté leur soutien à tous les éléments du projet de résolution. L’Égypte attend donc avec impatience son approbation, qui « renforcera et habilitera » les efforts déployés par le président congolais Felix Tshisekedi, en sa qualité de président de l’UA, pour engager des négociations avec les trois parties et négocier un accord juridiquement contraignant.

    « Il ne s’agit pas d’une question d’eau. C’est une question de diplomatie préventive, une question de résolution de conflit » qui concerne le barrage « et la menace existentielle qu’il représente », a déclaré M. Shukry. Chaque membre du Conseil devra fournir une justification s’il n’aborde pas la question, d’autant plus que le projet de résolution reflète « chaque chose qui a été dite par les membres du Conseil » et soutient les négociations menées par l’UA.

    Le ministre égyptien a déclaré que les actions de l’Éthiopie menacent « la sécurité de l’Égypte et du Soudan » et que son manque de volonté politique a été « un obstacle majeur à la conclusion d’un accord, malgré la modération et la flexibilité dont ont fait preuve l’Égypte et le Soudan. »

    Interrogé sur l’utilisation de moyens militaires, M. Shukry a déclaré que l’Égypte continuerait à faire preuve de flexibilité et de volonté de soutenir le processus dirigé par l’UA, mais qu’en même temps, elle « défendrait les intérêts des citoyens et leurs moyens de subsistance avec tous les moyens à sa disposition. »

    L’ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield a déclaré que les États-Unis pensent que la question du partage des eaux du Nil « peut être réconciliée … avec un engagement politique de toutes les parties, à commencer par la reprise urgente des négociations sous la direction de l’UA ».

    Elle n’a pas mentionné la résolution tunisienne mais a déclaré : « Nous pensons que l’Union africaine est l’instance la plus appropriée pour régler ce différend, et les États-Unis s’engagent à fournir un soutien politique et technique pour faciliter une issue favorable. »

    L’ambassadeur russe à l’ONU, Vassily Nebenzia, s’est dit préoccupé par « l’escalade de la rhétorique de la confrontation » et a déclaré que « les affirmations concernant un éventuel recours à la force sont inacceptables. »

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