Étiquette : économie

  • Algérie : S’entrendre sur les mots

    par Abdou BENABBOU


    Ne pouvait-on pas appeler ce que l’on dénomme startup par des intitulés plus clairs et plus simples pour échapper à la pudibonderie des mots et pour que le sujet soit compris par tout le monde y compris par ceux qui sont directement concernés par le sujet ? Les Algériens dans leur majorité ne naviguent pas dans les hautes sphères savantes pour être familiers avec des termes pointus enfantés par des cercles autrement plus avancés qu’eux.

    On aura beau expliquer ce qu’est une startup, on ne s’éloignera pas de la compréhension vague au point de lui accorder une largesse sans bornes et la complication devient d’autant plus grande quand elle doit être abordée par la loi.

    Il en est ainsi ces derniers jours avec le dernier communiqué du conseil de la monnaie à propos des transactions avec l’étranger et des comptes devises. Après plusieurs lectures, on ne retient de ce qui n’est encore qu’un projet que les opérateurs marchands sont exclus des futures dispositions de facilitations et qu’ils n’auront pas eux aussi droit de gérer le retour en devises, fruits de leurs exportations, comme ils l’entendent. Les services dit-on seront à l’honneur sans une appréciation nette et claire de ce que l’on entend réellement par services. On laisse supposer aussi que les transactions commerciales ne seront pas concernées sans définir avec netteté ce qu’est une transaction commerciale.

    Dès lors, il semblerait à priori pour les acteurs économiques qui ne pipent mot aux théories bancaires et financières virtuelles que le sujet n’est pas pris par le bon bout et que les futures dispositions n’auront qu’une aléatoire efficience insuffisante pour donner un dynamisme à la politique d’exportation. Le bon sens amène à s’interroger sur la nature des services à exporter comme si les futurs acteurs algériens étaient les égaux en hardiesse et en génie avec les Sud-Coréens, les Singapouriens ou les Allemands.

    N’aurait-on pas dû d’abord se préoccuper du monde agricole et se soucier du producteur dynamique et génial qui mérite d’être débarrassé du mur de fer bancaire et l’accompagner pour qu’il puisse avec aisance avoir accès aux moyens techniques modernes pour inscrire sa production au niveau de la haute compétition mondiale en matière d’exportation ?

    Le Quotidien d’Oran, 31 mars 2021

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  • Algérie : Le Nouveau Modèle De La Connaissance

    Le défi de la nouvelle économie est lancé. Il s’inscrit dans le processus de réforme engagé par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, appelant, lors du conseil des ministres du 5 janvier, à la mise en place d’un «programme urgent» pour développer l’économie du savoir en locomotive d’une économie productive et diversifiée.

    «A vous le terrain, pour concrétiser vos projets au profit des jeunes», a lancé aux ministres concernés, le Président de la République attaché à garantir les conditions de l’émergence du réservoir des start-up et de la petite et moyenne entreprise. Toutes les garanties financières ont été apportées à travers, notamment une exonération fiscale, la création d’un fonds de financement et d’un conseil de l’innovation placée auprès du chef de l’Etat.

    Les impératifs d’une économie du savoir dictent la volonté de mettre en place un cadre réglementaire, juridique et financier pour favoriser le développement de la recherche, le financement de l’innovation, le transfert technologique, la formation et la protection de la propriété intellectuelle. Cette démarche est au centre des assises nationales dédiées à l’élaboration d’un modèle algérien.

    Une rencontre qui a pour ambition de fédérer toutes les énergies créatrices pour renforcer les bases de la réforme économiques. Elle se prévaut, dira le ministre délégué auprès du Premier ministre chargé de la Connaissance et des Start-up, Yacine El Mahdi Oualid, d’une «volonté inclusive» ouverte à toutes les bonnes volontés pour dégager une vision commune à hauteur des exigences de la nouvelle économie du savoir et de la connaissance en socle d’une économie durable et ambitieuse.

    En levier de la croissance, elle constitue un véritable atout pour sortir de la dépendance pétrolière et forger une place de choix dans le nouveau monde de la compétitivité et de la concurrence. Les énormes potentialités matérielles, souvent inexploitées, et la richesse des compétences marginalisées ou en exil à l’étranger sont la source du modèle algérien aux chances de réussite réelles tributaires de la mobilisation de toutes les ressources, une ouverture sur le monde des technologies nouvelles et une organisation efficiente.

    Horizons, 29 mars 2021

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  • Algérie : Première sortie du Président Tebboune sur le terrain après sa convalescence Les start-up l’autre chantier du président

    Par : Med Wali


    Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, présidera aujourd’hui au Centre international des conférences, une importante rencontre sur l’économie du savoir. Les membres du gouvernement et de hauts responsables y prendront part, en plus des porteurs de projets et des dirigeants des start-up.

    Afin d’encourager les jeunes porteurs d’idées innovantes, le gouvernement compte entreprendre plusieurs mesures pour accompagner et encourager l’activité des start-up, et ce, dans le but de relancer l’économie nationale hors le secteur des hydrocarbures. Plusieurs économistes et professionnels ayant adopté ce concept  » anglo-saxon », expliquent la nécessité de l’accompagnement de ces jeunes porteurs des idées innovantes pour que leurs start-up se transforment en entreprises, et même de grand groupe opérateur économique, par la suite.

    En effet, un bon encadrement assure un processus de reconstruction et de développement d’une économie convenable, sachant que des jeunes algériens pétris de qualité, et très talentueux possèdent des idées innovantes et extraordinaires dans plusieurs domaine. Cela a poussé l’Etat à accorder toutes les facilitations possibles aux jeunes porteurs de projets, afin de trouver des alternatives utiles pour dynamiser l’économie nationale.


    D’emblée, Mustapha Kamel, ingénieur en électronique et porteur d’un projet dira que « les start-up sont désormais le vivier duquel les entreprises pourront constituer le tissu industriel de demain, avec un objectif de relancer l’économie nationale, en dehors du marché pétrolier », a-t-il souligné avant de poursuivre son point de vue  » le gouvernement en place a mis la lumière sur les start-up, une très belle initiative, faut-il souligner, et justement c’est cet aspect qu’on cherche tandis qu’il implique en profondeur les jeunes porteurs des projets qui possèdent des idées innovantes ».  » Ces derniers temps, plusieurs pays ont adopté l’idée pour promouvoir les start-up, afin de créer l’emploi et absorber le chômage. Donc la start-up est un ensemble d’idées innovantes qui solutionne un problème, ou elle apporte un début d’une solution. Toutes ces idées deviennent une entreprise qui peut apporter un plus à l’économie et à l’industrie nationale, une fois qu’ils entrent dans la phase commerciale », s’est-il exprimé.

    Concernant l’organisation de ce type d’évènement, Mustapha Kamel comme beaucoup de jeune entrepreneur ont apprécié l’initiative entreprise par l’Etat, en disant  » les start-up atteignent le niveau de la concrétisation de l’idée sur le terrain, tandis que l’Etat a l’intention d’accompagner et encadrer ces jeunes. Puisque un jeune est censé d’être porteur d’idées, il restera donc toujours créateur, en continuant à faire des recherches, soit qu’ils feront suite aux premières idées, ou aller vers d’autres horizons. »

    Le Maghreb, 29 mars 2021

    Etiquettes : Algérie, Abdelmadjid Tebboune, startups, économie,

  • Algérie : La planification cherche ses «mentors»

    La journée d’étude, organisée hier par le Conseil national économique, social et environnemental (CNESE, ex-CNES) en hommage au sociologue M’hamed Boukhobza est des plus significatives. Le temps d’un événement, plusieurs aspects peuvent être mis en avant. Il y a évidemment l’axe central de cette journée d’étude qui a été celui de la planification en économie, dont l’importance est reconnue à tous les niveaux mais qui, concrètement, demande à être mieux valorisée. L’exécutif est d’ailleurs «défaillant» dans ce secteur. Il suffit de voir la composante de l’actuel gouvernement pour constater l’absence d’un ministère dédié à la planification. Cette «omission» n’est pas récente, mais elle est loin d’être irréfléchie. La planification ne semble pas être une priorité méritant un département ministériel. Au contraire, elle a été parmi les premières victimes du dernier remaniement ministériel. Pas la planification exactement, mais plutôt un autre outil d’aide à la décision gouvernementale, très proche dans la «perception», la prospective, en l’occurrence.

    Effectivement, il y avait dans le gouvernement Djerrad I (du 4 janvier au 23 juin 2020) un ministre délégué aux Statistiques et à la Prospective, Bachir Messaitfa. Ce dernier n’aura duré que 5 mois et 19 jours. Il sera remplacé, dans le gouvernement Djerrad II (23 juin 2020 au 21 février 2021) par Mohamed Chérif Belmihoub, avec, cette fois, les Statistiques en moins. Près de huit mois plus tard, ce portefeuille ministériel a été tout simplement effacé. Ni statistiques ni prospective et encore moins planification n’ont de place dans le gouvernement Djerrad III. L’exécutif s’en est ainsi détaché, sans que cela ait pu faire (mais est-ce une surprise ?) une «once» de remous, que ce soit médiatiquement ou encore politiquement.

    Toutefois, cette mise à l’écart peut être une occasion en or pour valoriser le travail des Think Tank.

    L’un d’eux, en l’occurrence le CNESE, a bien saisi l’opportunité en organisant cette journée, dont les travaux (il faut toujours l’espérer) devront donner des résultats concluants et sur lesquels l’exécutif pourra travailler. Un autre Think Tank devrait également profiter de l’absence de la planification au sein du gouvernement, pour se l’approprier et y travailler. Il s’agit de l’Institut national d’études de stratégie globale (INESG), dont le Directeur, entre mars 1993 et juin 1993, était – avant qu’il ne soit assassiné – un certain M’hamed Boukhobza.

    Reporters DZ, 24 mars 2021

    Tags : Algérie, planification, économie, Conseil national économique, social et environnemental, M’hamed Boukhobza,

  • L’Algérie établit une feuille de route pour une économie fondée sur la connaissance

    Le gouvernement algérien a établi une feuille de route claire pour une transition rapide vers une économie de la connaissance, a déclaré le Premier ministre Abdelaziz Djerad.

    Lors de la conférence Oran Disrupt 2021 sur les startups, il a souligné la nécessité d’intensifier les efforts et d’impliquer tous les acteurs, basés en Algérie ou à l’étranger, pour atteindre cet objectif.

    L’économie nationale a actuellement besoin d’entreprises qui offrent une réelle valeur ajoutée et s’appuient sur la recherche et le développement pour fournir des services et des produits innovants, a-t-il expliqué.

    Le gouvernement a décidé de soutenir les innovateurs où qu’ils se trouvent, a-t-il souligné, citant la mise en place d’un cadre réglementaire pour les startups et d’un fonds d’investissement qui assure un financement fluide des projets innovants, ainsi que des incitations fiscales importantes conformément à la loi de finances pour 2021.

    Djerad a révélé le lancement du premier projet pour les startups, qui aura des branches à travers le pays.

    Pendant ce temps, les réserves de change du pays ont atteint 42 milliards de dollars, contre 60 milliards de dollars au premier trimestre 2020.

    Au début du mois, le président Abdelmadjid Tebboune a souligné qu’en calculant les recettes pétrolières de l’année dernière, qui s’élevaient à 24 milliards de dollars, les réserves de change du pays sont passées de 60 milliards de dollars à 42 milliards de dollars, et elles évoluent chaque semaine.

    La chute des prix mondiaux du pétrole a gravement affecté l’Algérie, membre de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), où les exportations de pétrole et de gaz représentent 60 % du budget de l’État et 94 % du total des recettes d’exportation.

    En avril 2019, les réserves ont atteint 72,6 milliards de dollars, contre 79,88 milliards de dollars en décembre 2018 et 97,33 milliards de dollars fin 2017.

    L’Algérie utilise ses réserves de change pour acheter des biens et services d’importation, pour un montant de 45 milliards de dollars par an.

    Le gouvernement a tenté de réduire les dépenses d’importation pour alléger la pression financière causée par la baisse des revenus du pétrole et du gaz.

    Tebboune soulignait alors que « la nouvelle tendance économique est de permettre l’importation de seulement ce dont l’économie nationale a besoin ».

    Asharq Al-awsat, 21 mars 2021

    Tags : Algérie, économie, Algeria Disrupt, startups, innovation, investissement,

  • Algérie : Priorités et défis

    L’Algérie à travers son nouveau modèle économique basé sur la diversification de la croissance et l’économie de la connaissance s’efforce de maintenir sa croissance économique. Le plan national de relance économique et sociale tracé a mis en lumière l’efficacité des mesures prises pour débloquer une certaine stagnation dans ce domaine résultant des conséquences de la poursuite de la chute des cours pétroliers, de la pandémie du coronavirus (Covid-19) et un monde en pleine récession.

    En dépit de ces contraintes, l’Algérie est l’un des rares pays à contenir l’épidémie. L’incroyable rapidité avec laquelle le gouvernement à réussi à contenir la pandémie et la relance de l’économie nationale a été un grand élan en ce quelle amorce une démarche répondant aux besoins de l’heure à savoir : évoluer vers la bonne gouvernance pour donner plus de place au citoyen et à l’économie nationale, la permanence continue de la veille sanitaire à travers une vigilance extrême pour limiter les risques d’infection au virus de coronavirus (Covid-19), l’amélioration de la stabilité macro-économique, la maîtrise de l’inflation et l’accélération du plan de relance économique et sociale à travers de nouvelles réformes structurelles visant à renouveler le modèle de croissance, l’amélioration de la productivité et la compétitivité.

    Dans ce contexte, le chef de l’Etat a instruit le gouvernement à plus de dynamisme économique et social en ce qui concerne la mobilisation des ressources et leur utilisation efficace au service du développement national, l’accélération de la mise en œuvre des projets d’infrastructures socio-économiques essentielles rentables. C’est aussi, l’encouragement à l’innovation et l’entreprenariat qui est visé, la promotion de la recherche et le développement technologique et numérique. Ces préalables pour qu’ils soient légitimes, donc acceptés par tous doivent se conformer aux critères suivants : la responsabilité, la transparence et la lisibilité de la décision publique pour les citoyens, la possibilité de prévoir l’avenir commun de la Nation, donc d’envisager le moyen et le long termes ensemble et, enfin la capacité de prévenir, sinon, de réguler les contraintes liées à toute évolution politique, économique et sociale.

    Si l’on prend en considération le discours économique officiel, le débat autour de ce concept est loin d’être épuisé. Ses contours varient selon les priorités, les besoins et la conjoncture.Pour l’essentiel donc, une bonne gouvernance socio-économique vise tout d’abord la croissance et le développement durable, ses caractéristiques sont : la démocratie économique, la transparence, la responsabilité, l’obligation de rendre compte, la participation et la prise en compte des besoins du pays et de la société.

    Cette philosophie recouvre aussi bien les capacités du gouvernement à gérer efficacement l’économie nationale en mettant en œuvre des réformes pertinentes sur le plan politique, économique et administratif. Ce concept est également à même de faire de la bonne gouvernance un outil majeur au service du développement notamment les particularités liées à chaque secteur économique. De la même façon, la valeur de participation vient impliquer la société et le monde économique dans la définition de la destinée du pays et l’appropriation de la vision nationale et ceci constitue une garantie indéniable de stabilité, escalier de marche donnant accès au développement durable au service de la cohésion sociale.

    Le Maghreb, 18 mars 2021

    Tags : Algérie, pandémie, coronavirus, covid 19, inflation, économie,

  • Algérie – combien ça coute ?

    par Madjid Khelassi

    Le ministre des finances Aymen Abderahmane a déclaré samedi, que la monnaie nationale devrait enregistrer un regain avant la fin de l’année !

    «Le décollage économique, que connaîtra l’Algérie dans les prochains jours à la faveur de plusieurs projets de développement, va permettre à la monnaie nationale, de retrouver sa force économique et son pouvoir libératoire » affirme le ministre.

    Abordant le problème de l’inflation, le ministre a affirmé qu’elle est maîtrisée par rapport à ce qui se passe dans le monde, qu’on avait « qu’a voir les prix pour le constater ». Il termine par un fumant «je vous assure que les prix sont à la portée». !!!

    On se pince pour voir si on n’hallucine pas. Car c’est à croire qu’on ne partage pas la même monnaie avec le ministre des finances.

    Questions : Le ministre des finances fait-il ses courses où se fait-il livrer son quota de vivres sans qu’il sache combien de Copeck il a déboursé ? Peut-il nous dire combien coûte une botte d’épinards, un paquet de lentilles ou une bouteille de liquide-vaisselle? Au jeu du « combien ça coute, nul doute qu’il fera chou blanc.

    Ignore t-il qu’avec 1000 dinars, on ramène juste un plateau d’œufs, 2 briques de lait, et 2 paquets de couscous? Et que la virée chez le boucher est programmée dans une autre vie!

    Le dinar n’est plus une monnaie monsieur le ministre, c’est un mirage ! Sa valeur diminue tous les jours et se transforme en confettis dans le panier de la ménagère.

    Il était une fois le dinar…Monnaie de notre émancipation, devenue au fil du temps, le symbole de toutes les turpitudes des dirigeants.

    Arme de corruption massive…elle transforme les zigs en pontes, les interdits en légaux, les proscrits en élus, et la commande publique en galette partagée.

    Le premier argentier du pays nous rend ici des déclarations comme une fausse monnaie. Il fait dans la guimauve…d’une triste réalité.

    « Les prix sont à la portée », a dit El Wazir…Avec une prescience qui nous abasourdit !

    Le tout, empaqueté dans une insupportable langue de bois, qui est l’alliée grammaticale du boniment politique.

    La Nation, 14 mars 2021

    Tags : Algérie, économie, dinar, inflation, Aymen Abderahmane,

  • Corona peut-elle guérir notre complexe de supériorité?

    Par Sven Biscop

    UE et partenaires stratégiques, stratégie de l’UE et politique étrangère
    Un complexe de supériorité est difficile à guérir. Personne en Europe n’aspire à un retour à l’empire (enfin, personne en Europe continentale, du moins). La plupart des Américains prétendent encore qu’ils n’ont même jamais eu d’empire. Mais les Européens et les Américains estiment toujours que nous avons le droit de dominer la politique internationale et qu’il est parfaitement naturel que l’UE et les États-Unis soient les pays les plus riches de la planète. Au fond, nous pensons que nous l’avons mérité, grâce à notre travail acharné – l’implication étant que si d’autres personnes sont moins bien nanties, elles l’ont également mérité. La réalité est, bien entendu, que nous avons créé l’ordre international à notre avantage économique. Si le dollar américain est la monnaie de réserve du monde, et si la Banque mondiale est toujours dirigée par un Américain et le Fonds monétaire international par un Européen, ce n’est pas une loi de la nature, mais le résultat d’une stratégie clairvoyante quE les États-Unis et leurs alliés européens ont mis en œuvre à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

    De toute évidence, personne en dehors de l’UE et des États-Unis ne pense que nous avons droit à une prééminence permanente. L’Europe et l’Amérique ont déjà perdu une grande partie de leurs plumes par leur incapacité à prévenir, puis à gérer résolument, la crise financière de 2008. C’est notre propre échec qui a laissé un vide que la Chine a profondément comblé; nous avons permis la percée finale de Pékin. La Chine a senti l’opportunité d’utiliser ses énormes ressources pour obtenir un gain d’influence massif et s’est fermement établie en tant que grande puissance au même niveau que les États-Unis et l’UE.

    Aujourd’hui, la crise corona a définitivement lavé le dernier glas des réputations européennes et américaines. Nous ne réalisons pas la perte de crédibilité accablante que nous avons subie dans les autres régions du monde, notamment en Asie. Il était déjà difficile de comprendre pour les personnes en Asie pourquoi nos États supposés bien organisés, avec leurs systèmes de santé complets, ont réagi si tard à l’épidémie en Chine. Mais alors notre manque d’expérience avec le virus du SRAS, qui a frappé durement l’Asie en 2003, pourrait servir d’excuse. Bien que cela indique également notre complexe de supériorité: n’avons-nous pas vu le COVID-19 comme un simple virus «extraterrestre» qui nous passerait? Cela pourrait frapper la Chine, mais certainement pas nous – jusqu’à ce que ce soit le cas. Ce qui est vraiment incompréhensible en Asie, cependant, c’est que l’UE et les États-Unis se laissent à nouveau submerger par la deuxième vague de la pandémie. Du coup, il semble que le coronavirus soit devenu «le fardeau de l’homme blanc»… Après cet échec gigantesque de la part des États les plus riches et les plus forts du monde, il sera très difficile de faire le tour du monde en agitant les doigts, en faisant semblant que nous savons mieux que d’autres comment gérer les choses.

    Ne répétez pas nos erreurs

    Si la pandémie peut guérir définitivement l’Occident de son complexe de supériorité, elle aura au moins eu un effet secondaire positif. Dans sa stratégie globale de 2016, l’UE a inscrit un ordre international fondé sur des règles comme l’un de ses intérêts vitaux. Ces règles ne peuvent plus être simplement imposées par l’Occident aux autres. Cela ne signifie pas que nous devons abandonner notre programme stratégique. Mais nous devrons convaincre activement les autres États de la validité de ce que nous considérons comme les règles fondamentales: ne pas faire la guerre, ne pas clôturer les sphères d’intérêt exclusives, respecter les droits de l’homme et respecter les règles que vous voulez que les autres suivent. Nous devrons négocier avec d’autres États sur un pied d’égalité et être prêts à partager le pouvoir afin de créer un ordre fondé sur des règles auquel tous les États adhèrent. Cela nécessite que nous formulions un projet positif pour l’ordre international. «Nous ne sommes pas la Chine» ne suffit pas; nous devons annoncer quels biens publics mondiaux nous cherchons à créer pour le bénéfice de tous.

    Malheureusement, de nombreux régimes autoritaires présentent l’échec de l’Occident comme un échec de la démocratie et sapent ainsi la crédibilité de notre vision des règles fondamentales. Il suffit de se pencher sur Taiwan démocratique, qui a probablement traité le coronavirus mieux que quiconque, pour savoir que le problème n’est pas la démocratie. Sans un leadership résolu et un appareil d’État fort, les régimes démocratiques, populistes et dictatoriaux échouent tous. Mais la crise corona représente un échec du sens du collectif en Occident. Les États-Unis démontrent que le patriotisme et même le nationalisme peuvent aller de pair avec l’absence de responsabilité collective. De nombreux patriotes fervents voient les États-Unis d’Amérique comme un ensemble d’individus qui se débrouillent seuls plutôt que comme une communauté de citoyens qui se soucient les uns des autres grâce à des institutions solides. Dans l’UE, vice versa, les États providence forts incarnent le sens de la responsabilité collective, mais ils sont victimes de leur propre succès. De nombreuses personnes n’ont plus le sentiment d’avoir une responsabilité personnelle à assumer. C’est probablement pourquoi le Japon, la Corée du Sud et Taïwan réussissent tellement mieux que nous à contrôler l’épidémie.

    Néanmoins, il ne sert à rien que l’Occident ne conquiert son complexe de supériorité que pour que d’autres en assument un, notamment la Chine. De nos jours, les responsables américains ne parlent plus de la Chine; ils parlent tous du Parti communiste chinois. De toute évidence, le PCC a tout le pouvoir dans un État à parti unique, mais si les États-Unis appliquaient ce principe de manière cohérente, ils devraient également parler de la Maison d’Al-Saud plutôt que de l’Arabie saoudite. Plus important encore, ce trope rhétorique rate le défi principal, qui est le nationalisme chinois. La propagande du PCC a été très efficace, non pas pour promouvoir le communisme, mais pour créer le nationalisme. Le patriotisme est une force pour le bien, et le peuple chinois peut être fier à juste titre de nombre des réalisations économiques de la Chine. Le nationalisme, cependant, est une force négative, et s’il n’est pas maîtrisé, il risque de mettre la Chine sur une voie qui ne peut que contrarier d’autres États, au détriment des intérêts de la Chine.

    Au lieu de cela, une pandémie mondiale appelle à une coopération mondiale. Les dirigeants mondiaux ont raté la première occasion: lorsque l’épidémie a frappé pour la première fois, beaucoup l’ont instrumentalisée pour poursuivre leur rivalité avec d’autres puissances. Mais nous avons une seconde chance: si et quand un vaccin devient disponible, il ne doit pas devenir un instrument de compétition, mais une raison de coopérer et d’assurer sa disponibilité à tous. Prouvons que nous sommes supérieurs à nos pires pulsions.

    Le professeur Sven Biscop, membre honoraire du Collège européen de sécurité et de défense, est directeur du programme Europe dans le monde à l’Egmont – Institut royal des relations internationales à Bruxelles, et professeur à l’Université de Gand.

    Source : Egmont Institute, 9 nov 2020

    Tags : Coronavirus, impérialisme, économie, coopération,

  • 1980 : quand l’Occident soutenait Saddam …

    La guerre a duré huit ans et a fait près d’un million de morts. À l’époque, le président irakien était soutenu par les États-Unis, la France et les pays du Golfe, y compris lorsqu’il a utilisé l’arme chimique de masse.

    Lorsque, le 22 septembre 1980, les troupes irakiennes franchissent la frontière et envahissent l’Iran, Saddam Hussein est persuadé que l’offensive sera de courte durée, que son voisin se pliera à ses volontés. Très mauvais calcul du président de la République d’Irak. C’est bien une guerre qu’il déclenche ce jour-là. Elle durera huit ans, jusqu’en août 1988, et fera près d’un million de morts. Une véritable hécatombe pour un affrontement qui n’est pas sans rappeler la Première Guerre mondiale. Les deux armées face à face sont importantes. Des tranchées sont creusées. Des assauts lancés pendant lesquels les hommes, dans chaque camp, sont fauchés, vague après vague. Parmi les photographes qui ont documenté ce conflit, le travail d’ Alfred Yaghobzadeh est sans doute l’un des plus poignants parce que d’une terrible humanité. Des images qui en disent beaucoup plus que les mots.

    Qu’est-ce qui a déclenché ce conflit ? Pourquoi à ce moment-là ? Quelles sont les puissances réellement impliquées ? Pour tenter de comprendre, quarante après, il convient d’abord de revenir à l’un des épisodes des relations entre l’Iran et l’Irak : la signature des accords d’Alger, le 6 mars 1975. Les tensions entre les deux pays concernaient essentiellement, à cette époque, le Chatt-el-Arab, fleuve formé par la jonction du Tigre et de l’Euphrate. Pour Bagdad, il constitue le seul accès à la mer et il est vital. Mais il l’est tout autant pour Téhéran, qui possède une raffinerie (Abadan) et un port (Khoramshahr) sur les bords du Chatt. De plus, nombre de puits de pétrole iraniens se trouvent à proximité. Par les accords d’Alger, l’Irak reconnaissait une partie de la souveraineté de l’Iran sur le Chatt et obtenait en échange l’arrêt de l’aide iranienne aux Kurdes.

    En 1978, tout commence à basculer. Saddam Hussein, jusque-là vice-président, devient le numéro 1 du régime baassiste et amplifie la répression contre le clergé chiite. En 1979, la révolution iranienne et la chute du shah rebattent les cartes dans la région. Saddam craint une révolte des chiites en Irak, où ils sont majoritaires, alors que les pays occidentaux voient d’un très mauvais œil cette révolution qui pourrait se répandre comme une traînée de poudre dans l’ensemble du Moyen-Orient et remettre en cause leurs intérêts. L’imam Khomeini annonçant même : « Nous exporterons notre révolution dans le monde entier. »

    Aux yeux de Saddam, l’heure est à l’offensive. Le shah, qui l’a humilié en le forçant à signer les accords d’Alger, est parti. Quant à l’Iran, il semble affaibli. Le moment semble opportun pour mettre la main sur la province iranienne du Khuzestan, riche en pétrole et peuplée surtout de populations arabes. Le 17 septembre 1980, il abroge unilatéralement les accords d’Alger. Cinq jours plus tard, il lance son offensive, qu’il présentait alors comme la « Qâdisiyya de Saddam ». Une référence à la victoire, en 636, des armées musulmanes sur la Perse, qu’elles voulaient convertir à l’islam.

    Si, les premiers jours, tout se passa comme prévu – l’armée irakienne rencontrant peu de résistance et se positionnant sur les principaux axes de la province, notamment dans la montagne Zagros –, la guerre s’est vite s’enlisée. Saddam Hussein est pourtant adoubé tant par les États-Unis (qui trouvent là un moyen de punir ce pays retenant en otage des ressortissants américains), la France et le Royaume-Uni, que par les pétromonarchies du Golfe qui voient en lui le rempart contre l’Iran.

    Les livraisons d’armes s’enchaînent, y compris les armes chimiques qui seront utilisées pour gazer les Kurdes à Halabja (nord-est de l’Irak), faisant près de 5 000 morts civils, en mars 1988, soit six mois avant la fin de cette guerre. Celle-ci aurait sans doute pu se poursuivre plusieurs années encore, si les bombardements réciproques sur les raffineries et l’interception de pétroliers dans le Golfe persique n’avaient fait craindre une crise énergétique de grande ampleur. Le Conseil de sécurité de l’ONU vote la résolution 598, le 20 juillet 1987, mais le cessez-le-feu décidé est refusé par l’Iran. Celui-ci comprend qu’il est en train de jouer ses dernières cartes, avant de négocier un véritable arrêt de la guerre. Le cessez-le-feu prend effet le 8 août 1988 et les combats cessent le 20 août.

    Il n’y eut ni vainqueur, ni vaincu. Mais les deux pays en sont sortis exsangues et les peuples endeuillés, meurtris. Saddam Hussein pensait que son statut de leader régional était approuvé par les pays occidentaux et du Golfe. Il allait déchanter moins de trois ans plus tard. Après avoir envahi le Koweït, il en a été délogé par ses anciens amis. Le début de la chute, qui s’est terminée en 2003 avec son éviction. Aujourd’hui, à Bagdad, règnent ainsi beaucoup de ses opposants qui se trouvaient à Téhéran pendant la guerre…

    Source : Decryptnewsonline

    Tags : Armement, Économie, sécurité, sanctions, négociations, islam, iran, international, guerre, défense, dictature, Politique, géopolitique, Saddam Hossein, Occident,

  • Le Soudan et l’Algérie, nouveaux alliés des Etats-Unis ?

    Washington veut passer par Khartoum pour convaincre les pays arabes de normaliser leurs relations avec Israël, et par Alger pour lutter contre le terrorisme sur le continent.

    L’Afrique revient dans le viseur des Etats-Unis. Alors que le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, est engagé dans une course contre la montre pour dénouer le contentieux de son pays avec le Soudan avant l’élection présidentielle aux Etats-Unis, le chef du Commandement militaire américain en Afrique (Africom), Stephen Townsend, s’est rendu mercredi 23 septembre en visite en Algérie.

    « Les Etats-Unis ont une occasion qui ne se présente qu’une fois d’assurer enfin une compensation aux victimes des attentats terroristes de 1998 menés par Al-Qaïda contre les ambassades des Etats-Unis au Kenya et en Tanzanie », a écrit Mike Pompeo dans une lettre à des sénateurs dont l’AFP a eu connaissance. « Nous avons aussi une fenêtre unique et étroite pour soutenir le gouvernement de transition dirigé par un civil au Soudan, qui s’est enfin débarrassé de la dictature islamiste », a-t-il ajouté.

    Au cœur de ce dossier, l’inscription du Soudan dans la liste noire américaine des Etats soutenant le terrorisme. Cette sanction, synonyme d’entrave aux investissements pour le pays, remonte à 1993. La crise s’est envenimée avec les attentats de 1998, qui avaient fait plus de 200 morts. Le Soudan d’Omar al-Bachir était alors devenu un paria pour avoir accueilli le chef d’Al-Qaïda, Oussama ben Laden.

    Ces dernières années, Washington a changé de ton lorsque l’ex-autocrate soudanais a commencé à coopérer dans la lutte antiterroriste et joué le jeu de la paix au Soudan du Sud. Les Etats-Unis ont renoué avec Khartoum, déjà sous l’ex-président démocrate Barack Obama, puis engagé un dialogue pour retirer le Soudan de leur liste noire. La révolution qui a balayé Omar al-Bachir, en 2019, n’a fait qu’accélérer le mouvement. Depuis, Mike Pompeo ne ménage pas son soutien au premier ministre de transition, Abdallah Hamdok.

    Mais les négociations achoppaient sur l’épineux dossier judiciaire de l’indemnisation des familles des victimes des attaques de 1998. Le secrétaire d’Etat pense désormais qu’une solution est en vue et en a fait « une de ses premières priorités », a dit à l’AFP une porte-parole de la diplomatie américaine. Son « plan » prévoit le versement par Khartoum, sur un compte bloqué, de fonds qui ne seront versés que sous conditions aux Etats-Unis pour indemniser les plaignants. Des médias américains ont cité le montant total de 335 millions de dollars (environ 287 millions d’euros).

    Parmi ces conditions, le retrait du Soudan de la liste noire antiterroriste et l’adoption d’un texte de loi proclamant la « paix légale » avec Khartoum, pour écarter le risque de nouvelles poursuites. Dans son courrier, Mike Pompeo fait pression sur le Congrès américain afin qu’il vote cette disposition. « Cette loi doit entrer en vigueur mi-octobre au plus tard afin de garantir le paiement des indemnisations aux victimes dès que le Soudan sera retiré de la liste des Etats soutenant le terrorisme », ce qui interviendra « très probablement » d’ici fin octobre, a-t-il expliqué. C’est-à-dire avant l’élection présidentielle américaine du 3 novembre. Au sein du gouvernement, on s’inquiète toutefois d’une résistance de quelques influents sénateurs démocrates.

    Pourquoi un tel empressement de la part d’un secrétaire d’Etat par ailleurs peu intéressé par l’Afrique ? C’est probablement au nom d’un autre dossier cher à l’administration Trump. Mike Pompeo s’est rendu fin août à Khartoum lors d’une tournée pour convaincre des pays arabes de normaliser leurs relations avec Israël. Le camp du président-candidat veut capitaliser sur les accords historiques conclus sous son égide par l’Etat hébreu avec les Emirats arabes unis et Bahreïn – un succès qui manquait à son bilan diplomatique, qui plus est favorable aux intérêts israéliens et donc susceptible de galvaniser son électorat évangélique.

    Abdallah Hamdok avait semblé doucher les espoirs américains, en affirmant qu’il n’avait « pas de mandat » pour trancher cette question sensible. Mais les tractations se poursuivent en coulisses, avec des positions peut-être moins figées. Le général Abdel Fattah al-Burhane, chef du Conseil souverain au Soudan, qui avait rencontré en février le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a eu trois jours de pourparlers cette semaine à Abou Dhabi avec une délégation américaine. Au menu, bien entendu, la sortie de la liste noire, mais aussi, selon l’agence officielle soudanaise Suna, « l’avenir de la paix arabo-israélienne » et « le rôle que le Soudan devrait jouer dans la réalisation de cette paix ».

    En parallèle à ce front, mais plus au nord sur le continent, le général Stephen Townsend, chef de l’Africom, a effectué mercredi une visite à Alger dans un contexte de tensions régionales, en particulier en Libye et au Mali, a-t-on appris de source officielle. Le général Townsend, « accompagné de membres de l’ambassade américaine en Algérie », a été reçu par le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, précise un communiqué de la présidence algérienne, qui ne divulgue pas la teneur des discussions. Le gradé de haut rang américain a également eu des entretiens avec le chef d’état-major de l’armée algérienne, le général Saïd Chanegriha, et le ministre des affaires étrangères, Sabri Boukadoum.

    « Nous avons beaucoup à apprendre et à partager les uns avec les autres. Renforcer cette relation est très important pour nous », a expliqué le chef de l’Africom, cité dans un communiqué de l’ambassade des Etats-Unis en Algérie. « L’Algérie est un partenaire engagé dans la lutte contre le terrorisme. Affaiblir les organisations extrémistes violentes, les activités malveillantes et renforcer la stabilité régionale est une nécessité mutuelle », a plaidé le général Townsend. Il s’agissait de la première visite en Algérie d’un commandant de l’Africom depuis 2018.

    L’Algérie, qui craint les risques d’instabilité à ses frontières, s’efforce de réactiver son rôle sur la scène diplomatique régionale et tente d’endosser un rôle de médiateur dans les crises en Libye et au Mali.

    Source : Decryptnews.com, 27 sept 2020

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