Les causes de friction seraient notamment le soutien algérien à un nouveau bloc africain et la rencontre de Tebboune avec Dbeibah à Doha. La tournée dans le Golfe du président algérien Abdelmadjid Tebboune, qui l’a conduit au Qatar et au Koweït, a été marquée par une montée inattendue des tensions avec l’Egypte.
La crise soudaine a entraîné l’annulation d’un sommet tripartite qui devait se tenir au Koweït entre le dirigeant algérien, son homologue égyptien, le président Abdel Fattah al-Sisi et l’émir du Koweït, le cheikh Nawaf Al-Ahmad Al-Sabah.
Des sources politiques algériennes ont lié l’annulation de la réunion à l’annonce par l’Algérie d’un nouveau bloc africain, que le Caire considère comme préjudiciable à ses propres intérêts en Afrique.
Une autre cause possible de friction, selon les sources, était la rencontre tenue à Doha entre le président algérien et le chef du gouvernement libyen d’unité nationale, Abdulhamid Dbeibah. Cette rencontre a pu irriter le président égyptien, dont le pays soutient le nouveau gouvernement de Fathi Bashagha, récemment désigné premier ministre par le parlement libyen.
Selon les médias arabes, le président égyptien a quitté la capitale koweïtienne quelques heures avant l’arrivée de son homologue algérien du Qatar, annulant ainsi le sommet entre les dirigeants des trois pays.
La rencontre Dbeibah-Tebboune aurait été interprétée par le Caire comme l’expression du soutien algérien au gouvernement libyen sortant, qui refuse de démissionner.
L’Egypte a également été apparemment ennuyée par les informations selon lesquelles le gouvernement de Tebboune est en train de lancer un groupe africain des quatre.
Les relations entre l’Égypte et l’Algérie semblaient s’être améliorées ces dernières semaines, avec la visite de Tebboune au Caire, où l’Égypte a soutenu la convocation du prochain sommet arabe en Algérie et s’est montrée disposée à aider à persuader les pays arabes d’y assister à un niveau élevé sur la base d’un ordre du jour convenu. en avance.
Ces dernières années, la crise libyenne a été un sujet de discorde entre Alger et Le Caire en raison de leurs positions divergentes sur le conflit et son éventuel règlement. Mais tous deux ont ensuite été en mesure de contenir leurs désaccords persistants avec la Libye.
L’annonce d’un groupe africain des quatre, comprenant l’Éthiopie, le Nigeria, l’Afrique du Sud et l’Algérie, a encore alimenté les inquiétudes égyptiennes, à la lumière de la crise qui couvait entre Le Caire et Addis-Abeba au sujet du barrage de la Renaissance.
Il n’y a eu aucun détail sur la nature et les objectifs de ce nouveau bloc africain, son lien avec l’Union africaine et sa position sur des questions controversées, telles que le barrage de la Renaissance et le Sahara occidental.
Selon des informations algériennes, les quatre dirigeants africains ont convenu de tenir un sommet officiel à une date ultérieure, afin d’établir une feuille de route pour l’Afrique dans les mois et années à venir.
Le président algérien avait cherché, à travers sa visite au Qatar et au Koweït, à rassurer les États du Golfe sur la volonté de son pays d’ouvrir un nouveau chapitre et d’éviter d’attiser les questions litigieuses, notamment celle du Sahara occidental, à la lumière d’un consensus du Golfe à l’appui de la souveraineté du Maroc sur le territoire en litige.
Des sources algériennes ont déclaré que Tebboune n’avait reçu aucune réponse claire lors de sa tournée dans le Golfe sur son désir d’un dégel des relations glaciales avec l’Arabie saoudite, malgré son expression de soutien à la sécurité du CCG face aux menaces extérieures.
Printemps Arabe: Panique dans les couloirs de la DGED – Maroc, Egypte, Tunisie, Moncef Marzouki, Hosni Moubarak,
Un texte envoyé le 18/01/2021 par Ahmed Charaï à Mourad El Ghroul témognant la panique suscitée par les événements du Printemps Arabe en Egypte.
L’Egypte le point faible
Le printemps arabe a suscité beaucoup d’espoirs, les résultats sont loin de répondre aux attentes. Les observateurs occidentaux en particulier, sont tombés dans le piège d’un monde arabe unifié et qui donc obéit aux mêmes règles.
Il s’agit là d’une erreur épistémologique énorme. L’Egypte s’est présentée officiellement et pendant 60 ans, comme l’icône de l’arabité. C’est évidemment faux, les égyptiens, en majorité, ne sont pas des arabes.
L’Egypte « Oum Dounia », berceau de l’humanité est une idée ancrée par la propagande officielle qu’en a faite une arme pour cacher les réalités sociales. La majorité du peuple vit dans la misère, le Caire est l’une des villes les plus sales du monde.
Le traitement journalistique des révoltes arabes, a été, est toujours très superficiel. Le pouvoir en Egypte s’appuyait sur l’armée. Depuis 1952, c’est celle-ci qui détient le pouvoir en Egypte. MOUBARAK et sa famille n’étaient rien d’autre que les représentants de l’armée. Les manifestants de la place ATTAHRIR ont eu tort de vouloir séparer le dictateur, Hosni MOUBARAK, de l’armée. Cela a évité un bain de sang à l’Egypte, certes, Mais l’on voit dès maintenant que l’armée dirigée par TANTAOUI n’est pas prête à rentrer dans les casernes et à subir un régime civil.
Il y a une série de contre-vérités qu’il faut dénoncer. La première c’est que l’armée a été neutre. Ce sont les généraux qui ont présenté l’alternative du Patron des services secrets, comme possibilité de la sortie de crise.
C’est l’armée égyptienne qui a poussé MOUBARAK vers la sortie. Elle lui a promis l’impunité, avant de céder à la pression de la rue et de l’amener au tribunal avec ses fils.
Le régime Egyptien est toujours le même. Les manifestants l’ont compris eux qui exigent le départ du Conseil Supérieur des armées. Mais il sera difficile de reconstruire l’Egypte parce qu’il n’y a pas de consensus autour de l’idée démocratique, ni de classes moyennes capables d’assurer la stabilité. La classe politique égyptienne est embryonnaire et n’a aucune prise sur la rue.
C’est une faute stratégique, que d’essayer d’évaluer les situations dans les pays arabes aux mêmes normes.
L’Histoire et les divergences
La situation dans des pays comme la Tunisie sont totalement différentes. La victoire des Islamistes en Tunisie était inscrite dans les gènes de la révolution tunisienne. C’est la seule force, crédible, imposante qui s’est opposée à la dictature de BEN ALI. L’existence d’une vraie classe moyenne, d’un attachement aux valeurs d’égalité, a permis un consensus où les islamistes respectent les acquis des femmes, des libertés publiques.
Le respect de la volonté populaire, l’accord trouvé entre les différentes tendances ont ouvert la vie à une vie démocratique réelle. L’Etat Tunisien est déjà debout, légitimé par le peuple un an après la révolution. MARZOUKI, le chef de cet Etat a choisi d’effectuer son premier voyage à l’étranger au Maroc, signe de la force des liens et des similitudes de la construction démocratique.
Il n’y a absolument aucun rapport entre les situations égyptienne et tunisienne.
Il faut en tenir compte, sinon les médias et les Etats occidentaux, multiplieront les erreurs qui peuvent se révéler tragiques par la suite.
Le temps des traîtres-Maroc, Israël, Algérie, Jordanie, Egypte, EAU, Palestine, Soudan, Monde Arabe
Que reste-t-il de la cause sacrée des Arabes ? Que reste-t-il de la cause palestinienne ? Rien, ou presque. Les pays arabes, les uns après les autres, tournent le dos à ce qui fut pourtant leur première raison d’être en tant que nation. Une cause pour laquelle ils ont mené trois guerres contre l’occupant sioniste. Nous voulions récupérer Jérusalem et rêvions « de prier ensemble à El Qods Charif » comme le répétait feu Yasser Arafat.
Mais que ce temps est révolu aujourd’hui. Après l’Egypte et la Jordanie, d’autres pays ont fait le choix d’aller du rapprochement avec le bourreau du peuple palestinien. Les Emirats, le Bahreïn et surtout l’innommable régime du makhzen qui est allé plus loin que tous les autres, signant même un accord militaire avec les sionistes représentés par leur ministre de la guerre, Benny Gantz, qui a encore les mains tachés du sang des innocents enfants de Ghaza dans les meurtriers raids qu’il a ordonnés, alors qu’il était chef d’état major en 2014. On ne fait pas que normaliser les relations avec l’ennemi, mais on en fait un allié contre les pays frères arabes.
La trahison n’a plus aucune limite. Le déshonneur est brandi comme victoire. Le régime marocain a rabaissé le peuple du Maroc au plus bas. Il n’a pas hésité à poignarder aussi les Palestiniens dans le dos. Et toute honte bue, le roitelet marocain, se pavane encore du titre de « amir el mouminine » et de président du comité d’Al Qods. La grande supercherie n’a plus aucune limite, lui qui aujourd’hui contribue à légitimer les horreurs des sionistes faites aux désarmés frères palestiniens.
Au moment où Israël multiplie les exactions et se permet toutes les horreurs, les traites arabes leur apportent leur caution au lieu de les isoler et de les mettre devant leurs horreurs. Une fuite en avant et un renoncement inacceptable en ces moments de troubles que traverse le Monde Arabe. L’Algérie quant à elle, reste l’un dernier soutien franc au peuple palestinien et milite pour que la cause palestinienne et les droits du peuple palestinien soient sauvegardés. Une position de principe et de courage, rappelée encore une fois ce lundi par le président Abdelmadjid Tebboune qui a mis la communauté internationale face à ses responsabilités historiques au regard des crimes perpétrés par les forces d’occupation sioniste, ajoutant « Fidèle à ses principes appelant à redoubler d’efforts pour protéger le peuple palestinien des violations, l’Algérie réitère aujourd’hui à l’occasion de la Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien, son soutien aux initiatives sincères et aux démarches sérieuses visant à instaurer la paix au Moyen Orient sur la base de l’égalité internationale ».
France, Egypte, Al Sissi, DRM, DGSE, Disclose – Opération Sirli: La source s’exprime pour la première fois
« Le silence n’est plus une option »
La source à l’origine des révélations de Disclose sur l’opération militaire Sirli, en Egypte, s’exprime longuement sur les raisons qui l’ont amenée à briser le secret de la défense nationale.
« Les mémos de la terreur » démontrent la responsabilité de la France dans des exécutions arbitraires perpétrées par la dictature du maréchal Abdel Fattah al Sissi, en Egypte. De possibles crimes contre l’humanité dissimulés depuis 2016 derrière le « secret-défense » et « la lutte contre le terrorisme ».
Témoin de ce scandale d’Etat, la source de Disclose ne pouvait rester silencieuse. « Tout cela décrédibilise l’action française et la République, soutient la logique mortifère et le mal qu’on prétend combattre. Les patriotes aveugles voudront bien nous excuser, mais nous ne pouvons pas TOUJOURS nous taire », a-t-elle écrit en préambule d’une série de questions que nous lui avons adressées au début de notre enquête.
Avec son accord, nous publions l’intégralité du texte qu’elle nous a fait parvenir pour motiver son acte, suivi de ses réponses à nos questions.
« Ni moi, ni ceux et celles que je connais qui ont pu contribuer à cette diffusion d’information, ne sont opposants politiques, militants anti républicains ou anti France, ou au service d’une puissance étrangère. C’est même tout le contraire. Ce qui fait rompre le silence, ce sont les dérives de l’action politico-militaire française qui entaillent profondément ce pour quoi des hommes et des femmes sont au service de la France.
Il n’y a pas de naïveté non plus. Évidemment, où qu’ils soient, les pouvoirs publics justifient certains agissements par « les intérêts supérieurs de l’Etat », qualifiés de tels sans en référer à leur peuple, sans explication, sans débat. C’est pourquoi le contrôle de l’action de l’exécutif est si précieux et qu’il est inexistant dans les régimes autocratiques. Chez nous, dans le domaine de la défense et de l’armement, il est quasi absent et surtout les maigres tentatives n’ont aucun effet réel. Si le Parlement pouvait véritablement jouer son rôle, nous n’en serions pas là. En somme, ce sont les dysfonctionnements de notre système qui conduisent des groupes d’individus comme nous à transgresser les règles établies pour le maintenir, parce que précisément, il ne devrait pas l’être.
Il n’y a pas non plus de pacifisme béat, « hors sol » comme on dit. A titre personnel, et je crois que c’est partagé par tous ceux que je connais, j’estime que la France a besoin d’une armée forte. S’armer ou exporter de l’armement n’est pas une « honte française » en soi. Cela le devient en revanche lorsque nos dirigeants utilisent nos armées sans tirer les leçons de l’histoire ; cela le devient lorsqu’ils violent les traités internationaux, les engagements de la France et son Histoire ; cela le devient lorsqu’ils se moquent des conséquences de leurs actes ; cela le devient lorsqu’ils détournent les prérogatives que leur octroie la constitution pour décider seuls, sans consultation ni contrôle ; cela le devient lorsque l’intérêt des Français, l’intérêt général, vient après celui de prétendus objectifs stratégiques ou sécuritaires. Certaines décisions politiques dévoient « le combat pour la France » ; elles mènent nos soldats, engagés pour la France, à mourir pour parfaire le dévoiement, et elles détruisent des populations, des enfants, tués par les armes que nous avons vendues.
Dire à celles et ceux qui sont au service de la France que ces questions les dépassent ou qu’ils doivent faire confiance aux dirigeants n’opère plus, et de plus en plus de fonctionnaires et militaires ressentent ce malaise. Ceux qui parlent, qui agissent, ne le font pas dans un élan de supériorité, d’idéologie ou de détention de la vérité, mais au nom d’une conscience personnelle qui refuse la complicité et au nom d’une responsabilité collective puisque si nous ne le faisons pas, personne ne peut le faire. Quand les notes internes d’analyses diplomatiques et militaires sont ignorées, quand les dirigeants politiques sont sourds aux appels bienveillants, le silence n’est plus une option.
Alors évidemment la France a besoin de partenaires stratégiques. Mais voilà, l’Egypte n’en est pas un, il ne l’a jamais été et, en l’état actuel, ne le sera jamais. Les militaires le disent, l’écrivent, mais cela n’empêche pas nos dirigeants de dire le contraire à tue-tête. Ce n’est pas parce que nos navires de guerre ont besoin de traverser le canal de Suez, que nos avions de chasse survolent le Sinaï, que des entreprises françaises font du business en Egypte, que cela fait du Caire un allié stratégique. Pendant des années, l’Egypte était un partenaire mineur : peu d’échange, peu de visite de haut rang, pas de partenariat économique ni de défense sérieux – toujours pas d’ailleurs.
Mais voilà, Sissi a pris le pouvoir et a acheté des Rafale à Le Drian. A partir de là, on a promu l’Egypte au rang de pays stratégique. Cela n’avait pas été le cas au début des années 1980 lorsque l’Egypte avait acheté massivement d’autres matériels de guerre. Sauf qu’aujourd’hui, il faut un « narratif » comme on dit, il faut faire passer ce genre de décision. Les prétextes de la guerre contre le terrorisme ou de la stabilité régionale fournissent le parfait scénario pour justifier notre action mercantile et « souveraine ». Qui peut croire que le régime autoritaire actuel de Sissi stabilise la région ? Qui peut croire que nos Rafale et frégates participent à la lutte contre le terrorisme ? Mais peu importe, il faut vendre pour maintenir notre industrie, tenir notre « format d’armée », sans que les Français ou leurs représentants aient leur mot à dire sur ce format et ses ambitions, et cela, « quoi qu’il en coûte ». La formule s’applique à l’armement bien avant la crise sanitaire.
Tout cela décrédibilise l’action française et la République, soutient la logique mortifère et le mal qu’on prétend combattre. Les patriotes aveugles voudront bien nous excuser, mais nous ne pouvons pas TOUJOURS nous taire.
De Gaulle a dit « La défense, c’est la première raison d’être de l’État. Il n’y peut manquer sans se détruire lui-même ». Il faudrait ajouter qu’à justifier toutes ses actions par la défense et la sécurité, il peut aussi détruire son identité démocratique. »
Pourquoi voulez rendre publique l’existence de l’opération Sirli ?
Si cette coopération avait un sens, si elle répondait à des objectifs précis, si elle apportait quelque chose à la France, personne ne la remettrait en question. Or ce n’est pas le cas. Plusieurs échelons de l’armée l’ont remise en cause d’abord parce que nos forces sont extrêmement sollicitées et n’ont pas le temps d’en perdre. Elles n’en retirent rien, aucune information sur la lutte antiterrorisme, c’est écrit noir sur blanc dans plusieurs rapports. Ensuite, alors qu’elles sont censées aider à lutter contre le terrorisme et à surveiller le chaos de la frontière libyenne, elles se retrouvent complices dans une chasse aux trafiquants civils du désert et à des bombardements non discriminés, au service d’un régime brutal.
Avez-vous pris la mesure des risques encourus par la diffusion de documents classifiés ?
J’aurais préféré qu’ils ne le soient pas évidemment. Tout comme je préférerais que les représentants du peuple aient accès à des informations qui engagent la France et donc les Français et les Françaises. Mais le système actuel est construit de telle manière qu’il se protège d’abord lui-même. Il n’y a pas d’autre option que d’enfreindre les règles qu’il établit si l’on souhaite espérer qu’il évolue.
En France, la loi ne protège pas les lanceurs d’alerte contre la « compromission de la défense nationale », en êtes-vous conscient.e ?
J’ai évidemment conscience des risques juridiques si mon identité était découverte. Mais j’ai aussi ma conscience personnelle et ma responsabilité qui m’obligent. J’espère simplement que le fond sera pris en compte, plus que la forme.
Parce qu’il faut tout de même remettre les choses dans le bon ordre : il est plus grave de participer au meurtre d’hommes, même des trafiquants, que de dévoiler une note estampillée « confidentiel-défense ».
Un élément en particulier a-t-il motivé votre décision ?
Ma décision a été prise après avoir acquis la certitude qu’il n’y avait pas d’autres alternatives pour que soit remise en question notre action avec l’Egypte. Cette opération est symptomatique d’un système sans contre-pouvoir, capable de devenir complice d’assassinats dans le plus grand secret, pendant des années. Il est temps que cela cesse.
La diffusion de ces informations fait-elle courir un risque, selon vous, aux militaires français déployés en Egypte ?
Les militaires français assistent l’armée égyptienne depuis 2016 et n’ont jamais subi la moindre menace par ailleurs. C’est la seule raison qui aurait pu m’empêcher de parler et empêcher ceux qui m’ont transmis certains documents à ne pas le faire. J’ai exigé qu’aucun nom de militaires déployés ne soit rendu public.
L’opération Sirli, n’a pas d’existence officielle, comment l’expliquez-vous ?
Les opérations de la direction du renseignement militaire (DRM) ne sont pas publiques. Mais avec celle-ci, il y a une double gêne : elle est critiquée en interne parce qu’elle ne sert pas les intérêts de la France et parce qu’elle participe à du ciblage qui ne contribue pas à la lutte antiterroriste. Il est difficile de s’en vanter. Et puis, il faut souligner qu’aucun ministre n’aime annoncer une mauvaise nouvelle comme l’arrêt d’une mission de coopération, lesdits ministres peuvent ainsi continuer à mettre ce geste français dans la balance lors de leurs discussions bilatérales.
A votre connaissance, l’opération Sirli a-t-elle contribué au meurtre de civils par l’armée égyptienne ?
Il n’y a que des civils qui sont tués. Vous voulez dire des civils qui ne sont pas de terroristes ? La réponse est oui, puisque comme l’attestent les comptes rendus de la DRM, les terroristes ne couraient pas cette partie de désert.
Existe-t-il un accord écrit encadrant la mission ?
La DRM a tenté au début de l’opération de faire signer un accord encadrant cette coopération, et donc cette opération, à la partie égyptienne. Mais elle n’a jamais accepté de signer et in fine la France a abandonné l’idée. Cet accord aurait obligé les deux parties à décrire noir sur blanc le cadre de la coopération, le type de mission et surtout ses limites.
Ce qui est le plus dérangeant, c’est l’utilisation par les autorités françaises d’une coopération qu’ils savent meurtrière pour tenter d’obtenir des informations qu’ils n’obtiennent pas. Par ailleurs, ce type de complicité empêche tout discours français véritablement critique et crédible sur la répression ou les droits humains.
Comment expliquez-vous qu’une fois élu Emmanuel Macron a poursuivi cette opération débutée un an plus tôt par son prédécesseur ?
En 2017, au moment de son élection, la France a encore beaucoup d’espoir de vendre davantage d’armement à l’Egypte : des Rafale supplémentaires, un satellite supplémentaire, des ravitailleurs. Donc évidemment, dans ces conditions, la relation bilatérale ne pouvait pas changer. Tant que le coût politique de vendre des armes reste maîtrisables, il n’y a aucune raison de croire au changement de cap.
France, Opération Sirli, Disclose – Egypte Leaks: L’Elysée porte plainte
Fuite de l’opération en Egypte : la France intente une action en justice pour violation du secret de la défense Cette décision intervient après les révélations d’un site Web d’enquête selon lesquelles la France a facilité les meurtres parrainés par l’État dans le désert occidental égyptien
Le ministère français de la Défense a déposé mercredi une plainte pour « violation du secret national », après des révélations suggérant qu’une opération antiterroriste française en Egypte était utilisée à des fins de répression interne, a annoncé jeudi le ministère.
L’enquête menée par Disclose, un site d’investigation français, a indiqué que la France avait fourni des renseignements aux autorités égyptiennes, qui ont été utilisés par Le Caire pour « tuer des civils » soupçonnés de faire passer la frontière avec la Libye en contrebande, plutôt que des terroristes, comme convenu.
Le gouvernement français n’a pas démenti les révélations.
Selon un rapport publié dimanche par Disclose – basé sur des documents divulgués – les pays ont coopéré dans une mission nommée Opération Sirli, qui visait à l’origine à fournir des renseignements sur les menaces militantes le long de la frontière ouest de l’ Égypte .
Selon ces documents, l’armée française a été impliquée dans au moins 19 frappes aériennes contre des civils entre 2016 et 2018.
Un document note qu’au cours de l’opération le « problème terroriste n’a jamais été soulevé ».
La France accusée d’avoir aidé l’armée égyptienne à tuer des passeurs présumés En savoir plus « L’opération Sirli a débuté en février 2016 sous la présidence de François Hollande.
Elle s’est poursuivie malgré les réserves exprimées à la fois par le renseignement militaire français (DRM) et l’armée de l’air sur la manière dont l’Égypte utilisait le renseignement, a déclaré Disclose.
L’une de ces notes a été adressée à la ministre française de la Défense Florence Parly le 22 janvier 2019, avant la visite officielle du président français Emmanuel Macron en Égypte.
En réponse aux révélations, Hervé Grandjean, porte-parole du ministère de la Défense, a déclaré qu’il « a intenté une action en justice après cette fuite massive de documents classifiés », sans préciser qui était visé par la plainte.
« Il y a eu une fuite de documents couverts par le secret de la défense nationale. Cette fuite est une violation de la loi… extrêmement grave, car ce qui peut être révélé peut dire des choses sur les méthodes de fonctionnement de l’armée, peut mettre en danger la sécurité des personnes impliquées », a-t-il déclaré.
Contacté par l’AFP, le média Disclose a indiqué jeudi à la mi-journée n’avoir reçu aucune notification de la justice.
Le site Internet reconnaît que les révélations sont couvertes par le « secret de la défense nationale » mais affirme avoir publié les rapports « au nom d’un principe fondamental de la démocratie : le droit à l’information ».
Le ministère a également lancé une « enquête interne pour vérifier que les règles ont été appliquées » par leurs homologues égyptiens.
« Les contours de cette mission de renseignement répondent à des exigences extrêmement strictes : il s’agit de la lutte contre le terrorisme, à l’exclusion des questions intérieures », a déclaré Grandjean.
« Nous attendons les résultats de l’enquête pour en tirer les conséquences », a-t-il conclu sans plus de précisions.
Disclose cite des notes transmises en 2017 par le renseignement militaire et l’armée de l’air, qui s’inquiètent de la dérive de l’opération de renseignement, que les Égyptiens utiliseraient pour cibler des civils soupçonnés de trafic.
Malgré les efforts de Paris pour déplacer ses exportations d’armes vers l’Europe, l’Egypte reste l’un des principaux destinataires des équipements militaires français.
Maroc, Israël, Benny Gantz, normalisation – Accord militaire maroco-israélien: Duplicité et jeu dangereux
La visite du ministre israélien de la Défense à Rabat, ponctuée par la signature d’un accord cadre dans le domaine militaire, n’est pas anodine ni loin d’être une simple parade officielle ou protocolaire. Plus qu’une virée historique, elle comporte déjà des menaces réelles, chargée de messages périlleux comportant des risques durables sur la stabilité et la sécurité de toute la région.
Pour les diplomates, l’objectif recherchée par les décideurs du Makhzen, à travers cette visite et surtout la signature de l’accord de défense (le premier du genre dans le monde arabe, puisque ni l’Egypte, ni la Jordanie, n’ont ratifiés un tel accord avec l’entité sioniste en dépit d’une ancienne normalisation) est une lourde opération de marketing diplomatique.
Dans son aveuglement colonial et expansionniste, la palais royal mise sur la forte charge symbolique de cette visite d’un criminel de guerre, qui traîne des centaines de morts à Ghaza, pour arracher de potentiels sympathies chez le lobby juif aux Etats unis, ou à peser sur les tendances lourdes qui remuent le Congrès américain, seul habilité à valider les ventes d’armes ou à autoriser l’ouverture de consulats sur des territoires occupés, comme à Dakhla au Sahara occidental.
Mais ce jeu comporte en lui-même des dangers sur le Maroc lui-même et surtout sur son peuple, qui n’a pas cessé depuis plusieurs jours de contester une telle démarche et de dénoncer de tels accords, à travers des manifestations et des rassemblements dans les villes marocaines.
Car, l’examen minutieux des anciennes normalisations avec Israël démontrent qu’elles n’apportent ni un véritable investissement économique ou technologique, ni un authentique progrès ou un quelconque bien-être aux peuples. L’exemple le plus édifiant demeure celui de l’Egypte, ou depuis les accords de paix de Camp David, il y a plus de quarante ans, rien de concret sur le plan économique n’a été réalisé. Ni sur le plan industriel, ni sur le plan agricole ou agroalimentaire, ni même dans les échanges commerciaux ou les services.
Quel est la part d’investissement des entreprises israéliennes en Egypte ? Même si on valorise le nombre de touristes israéliens qui visitent annuellement la station balnéaire de Charm Cheikh, Israël n’a rien apporté de concret aux égyptiens et à leur économie. Les hommes d’affaires israéliens se méfient encore de tout investissement dans le monde arabe. Ils ne mettent aucun dollar dans la moindre PME, ni en Jordanie, ni au Bahrein ou ailleurs. Encore moins au Maroc, ou certains laudateurs et crédules pensent le contraire.
On s’en souvient des milliers de miliciens de l’Armée du Sud-Liban (ALS) d’Antoine Lahoud, qui ont combattu à côté de l’armée sioniste dans son agression contre le Liban, et qui furent abandonnés juste après le cessez le feu, imposé par la communauté internationale. Longtemps, Israël leur a miroité la création d’un micro-Etat tampon, autonome, avec un drapeau et une population chrétienne toute acquise et soutenu internationalement.
Comment peut-on chercher une assistance ou des soutiens financiers ou économiques chez un Etat qui lui-même est assisté par les Etats unis, dont l’administration est l’allié viscéral de Tel Aviv, et dont l’aide annuelle dépasse allègrement les quatre milliards de dollars?
Au Maroc, les médias sont subjugués par les propos de Benny Gantz, ce ministre de la Défense, sur ces accords militaires de haute importance conclus. On applaudit sur le caractère inédit de ce mémorandum, évoquant la possibilité d’assister à «des exercices ou manœuvres militaires entre les armées des deux pays et une coordination sécuritaire », ou encore la livraison d’armement de pointe.
A ce propos, des sources médiatiques espagnoles ont révélé la création d’une base militaire maroco-israélienne à Nador. La signature d’un tel accord aurait été signée lors de cette visite de Gantz. Quand une telle normalisation qui commence par le domaine militaire et du renseignement et la coopération sécuritaire, c’est déjà un indicateur édifiant.
La leçon palestinienne est encore là. Les accords d’Oslo et les différentes résolutions pour le principe de « deux Etats en contrepartie de la paix » ont encore enfoncé les territoires palestiniens dans le sous-développement, dans l’arriération économique et la ghettoïsation. Même la capitale El Qods n’est pas épargnée par l’expansionnisme et l’apartheid sioniste. Alors de quelle normalisation parle t-on aujourd’hui?
France, Egypte, Opération Sirli, terrorisme – La France porte de graves accusations contre le l’Égypte
Selon le site d’informations en ligne, Disclose, ils était convenue entre la France et l’Égypte que ces renseignements devraient normalement servir à traquer des djihadistes, par contre l’Égypte l’utilise pour cibler des trafiquants.
La France fournit des renseignements aux autorités égyptiennes qui sont utilisés par L’Egypte pour cibler des trafiquants à la frontière égypto-libyenne, et non des djihadistes comme convenus, affirme dimanche le média en ligne d’investigation Disclose.
Selon Disclose, la mission de renseignement française «Sirli», commencée en février 2016 au profit de l’Égypte au nom de la lutte antiterroriste, a été détournée par l’Etat égyptien qui se sert des informations collectées pour effectuer des frappes aériennes sur des véhicules de contrebandiers présumés.
France, Egypte, Opération Sirli, DRM, Abdel Fatah Al Sissi – France-Egypte : Les mémos de la terreur (2/2)
A l’été 2016, les agents de la DRM sont sans ambiguïté : la mission a peu d’intérêt. D’autant que les zones de survol autorisées restent strictement limitées à la partie occidentale du pays, où les groupes armés sont quasi inexistants. Le Sinaï et la Libye, où la menace terroriste est réelle, leur sont interdits. Ce que déplore un membre de l’équipe Sirli, début septembre.
NOTE 3 septembre 2016 « Quasi aucun élément n’a permis d’aborder la problématique terroriste. » « L’impossibilité de survol du territoire libyen ainsi que du Sinaï a limité le recueil d’informations aux zones frontalières. » « La priorité de la mission va à la satisfaction du besoin du partenaire. »
Pour satisfaire son obsession sécuritaire, la dictature exige toujours plus. Comme « l’instauration d’une boucle courte de transfert d’informations » entre l’avion français et la base militaire. Objectif : permettre à l’aviation égyptienne d’arriver sur zone pour « traiter » la cible le plus vite possible. Une demande qui inquiète les militaires sur place, mais pas le sous-directeur recherche de la direction du renseignement militaire, qui accepte de réduire les délais de transmission des données récoltées. Dès lors, précise l’officier auteur de la note du 3 septembre, « l’implication de l’armée de l’air égyptienne dans la destruction de trafiquants a été plus visible ». La dérive de la mission de renseignement est actée : elle va servir à cibler des véhicules de civils.
FAILLITE DE LA MISSION Le 21 septembre 2016, les hommes de Sirli décollent de Marsa Matruh à bord du Merlin III, l’avion de surveillance français. Après avoir survolé le désert pendant plusieurs heures, ils repèrent un convoi de pick-up filant à travers les dunes. Ils transmettent leur localisation à leurs collègues au sol qui la communiquent à l’aviation égyptienne. Grâce à la fameuse « boucle courte », un Cessna 208 arrive sur zone peu de temps après. Les Français doivent changer de trajectoire pour éviter une collision. Quarante-trois minutes plus tard, lorsqu’ils survolent à nouveau la zone, un véhicule est en flammes.
Le lendemain, l’officier de liaison de la DRM informe sa hiérarchie : « La frappe a très probablement été perpétrée par le Cessna 208 de l’armée égyptienne. » Il ajoute :
Note du 22 septembre 2016 « La seule présence du Cessna armé atteste de la volonté de l’armée de l’air égyptienne d’utiliser les informations [fournies] à des fins répressives contre le trafic local. »
Quelques jours après la frappe, les militaires égyptiens déclarent avoir détruit huit pick-up et leurs occupants, des contrebandiers présumés. En fournissant leur localisation, l’Etat français s’est rendu complice d’une exécution arbitraire.
A la fin de l’année 2016, les Français se montrent de plus en plus critiques.
Note du 28 septembre 2016 « L’ELT 16 reste très vigilant mais néanmoins inquiet quant à l’utilisation faite des [renseignements] à des fins de [ciblage]. »Note du 15 décembre 2016 « L’armée de l’air égyptienne exerce une pression constante sur la planification des missions pour exploiter au maximum les capacités de l’ALSR à son profit. »
Note du 6 janvier 2017 « La problématique terroriste n’a jamais été abordée. »
Selon les documents « confidentiel-défense » obtenus par Disclose, les forces françaises auraient été impliquées dans au moins 19 bombardements contre des civils, entre 2016 et 2018. Les frappes détruisant souvent plusieurs véhicules, le nombre de victimes pourrait se chiffrer à plusieurs centaines. Selon les critères de la résolution 56/83 [2] de l’Assemblée générale des Nations unies, la complicité de la France dans ces exécutions illégales serait donc établie.
[2] Article 16 L’Etat qui aide ou assiste un autre Etat dans la commission du fait internationalement illicite par ce dernier est internationalement responsable pour avoir agi de la sorte dans le cas où : a) Ledit Etat agit ainsi en connaissance des circonstances du fait internationalement illicite; b) Le fait serait internationalement illicite s’il était commis par cet Etat.
Le 7 mai 2017, Emmanuel Macron est élu président de la République. « L’Europe et le monde attendent que nous défendions partout l’esprit des Lumières menacé dans tant d’endroits, proclame-t-il le soir même, sur l’esplanade du Louvre. Ils attendent que partout nous défendions les libertés, que nous protégions les opprimés. » Pourtant, à peine élu, le président Macron va s’empresser de confirmer la poursuite de la coopération avec la dictature.
Trois semaines après son entrée à l’Elysée, le chef de l’Etat téléphone à son homologue égyptien. Un appel qui fait suite à un attentat survenu quelques jours plus tôt contre des chrétiens coptes et revendiqué par Daech. Selon le compte rendu de l’échange, la conversation se focalise très vite sur le partenariat militaire entre Paris et Le Caire. Emmanuel Macron assure à son interlocuteur qu’il est « parfaitement informé des opérations en cours » [3] en Egypte. Sollicité, le cabinet d’Emmanuel Macron n’a pas souhaité répondre à nos questions, renvoyant vers le ministère des armées, qui n’a pas donné suite.
[3] Note de l’Elysée datée du 30 mai.
Le lendemain, le chef d’Etat-major des armées, Pierre de Villiers, placé sous l’autorité du président de la République, est destinataire d’une note « confidentiel-défense ». Rédigé par le directeur de la DRM de l’époque, le général Christophe Gomart, ce bilan détaillé affirme à son tour que la plupart des pick-up localisés dans le désert égyptien ne sont pas liés à des groupes terroristes.
Note 1er juin 2017 « Les itinéraires de trafic sont principalement liés à de la ‘simple’ contrebande professionnelle bédouine. »
Le chef de la DRM souligne ensuite « l’ordre des priorités » de l’Egypte. La lutte contre le terrorisme arrive seulement en troisième position.
Note du 1er juin 2017 L’ordre des priorités du partenaire est le suivant : 1 – Le trafic 2 – L’immigration illégale 3 – Le terrorisme
Interrogé par Disclose sur ces différents points, Christophe Gomart, directeur de la DRM jusqu’en juillet 2017, assure que ses services n’ont « jamais donné de renseignement ayant permis, à [sa] connaissance, d’aller détruire des civils ou d’aller exécuter des gens. » Il insiste : « Si j’avais fait un tel constat, j’aurais préconisé de stopper la mission et de refaire un point avec les autorités égyptiennes. »
Le 6 juin, Sylvie Goulard, l’éphémère ministre de la défense d’Emmanuel Macron – elle quitte ses fonctions le 21 juin –, se rend au Caire pour y rencontrer le président égyptien. Malgré les dérives manifestes de l’opération, elle assure qu’Emmanuel Macron est « prêt à examiner la possibilité d’augmenter l’utilisation » de l’avion espion, dont elle félicite des résultats « exceptionnels ».
Note du 6 juin 2017 « Les résultats déjà obtenus grâce aux missions de l’ALSR [sont] exceptionnels. Ces missions [ont] permis en une année l’interception et la destruction de plus de 1 000 véhicules tout-terrain franchissant illégalement la frontière. »
Deux jours après Sylvie Goulard, Jean-Yves Le Drian, tout juste nommé chef de la diplomatie française, fait lui aussi le déplacement. Pour la huitième fois en moins de trois ans, il rencontre le ministre Sedki Sobhi. Après s’être complimentés sur « le niveau de confiance atteint », les deux hommes font un point sur le volet secret du partenariat militaire, comme le dévoile une note diplomatique du 11 juin 2017. « Les missions de l’ALSR [ont] été déterminantes pour l’identification et la désignation de nombreuses cibles », se réjouit le ministre égyptien. Un commentaire auquel Jean-Yves Le Drian a répondu par un « hommage au savoir-faire et à la précision des pilotes de l’armée de l’air égyptienne ». Presque un mois jour pour jour après cette séance d’autocongratulation, la « précision » de l’aviation égyptienne tue trois travailleurs, dont Ahmed El-Fiky, un ingénieur cairote, père de quatre enfants.
Le 5 juillet 2017, Ahmed El-Fiky et deux de ses collègues – nous ne sommes pas parvenus à confirmer leur identité – travaillaient au pavage d’une route, à proximité de l’oasis d’Al-Bahariya, 32 000 habitants. Dans l’après-midi, alors qu’ils roulent en pick-up, les trois hommes s’arrêtent sur le terrain d’une mine de fer où ils ont l’habitude de se ravitailler en eau, avec l’accord de la direction du site. L’instant d’après, un avion égyptien fend le ciel et frappe la voiture, tuant Ahmed et ses deux collègues. Le site local d’information indépendant Mada Masr et la chaîne de télévision qatarie Al-Jazeera relatent l’événement, suivi de quelques messages sur les réseaux sociaux. Puis, plus rien… L’armée égyptienne aurait étouffé l’affaire. « A la morgue, des hommes cagoulés et vêtus en noir ont menacé la famille pour que le certificat de décès d’Ahmed indique ‘raison de la mort inconnue’ », assure à Disclose une enquêtrice du site Killed in Egypt, sous couvert d’anonymat.
La mort d’Ahmed El-Fiky et de ses collègues n’est mentionnée dans aucun des documents transmis à Disclose. Mais deux jours seulement après le bombardement, un officier français s’entretient avec un général de l’armée de l’air égyptienne. « Le partenariat ne permet en aucun cas à l’ALSR de participer à des opérations de ciblage », martèle-t-il. Les informations transmises (…) doivent en effet être recoupées ». Quant au lieu de la frappe, il se situe dans l’une des zones de survol de la DRM à la même période.
« Vous pouvez être assurés que la DRM continuera à être votre partenaire pleinement engagé à vos côtés » (Lettre de Florence Parly, ministre des armées, au ministre égyptien de la défense, le 31 juillet 2017).
Près de deux ans après le début de la mission, les manquements de celle-ci deviennent une préoccupation majeure, non seulement à la DRM, mais aussi dans l’armée de l’air, qui s’inquiète de la persistance des frappes aveugles, comme en atteste cette note transmise à l’Elysée.
Note du 23 novembre 2017 « Par manque de moyens de surveillance, l’identification des pick-up ne peut être effectuée sans autre élément d’appréciation que le survol initial dont ils ont fait l’objet. Aussi, l’identification de certains véhicules et les frappes d’interdiction qui en découlent pourraient être soumises à caution. »
Tout au long de l’année 2018, les missions s’enchaînent. Les F-16 égyptiens frappent à un rythme de plus en plus soutenu.
Note du 1er avril 2018 « Il semblerait que la patrouille des deux F-16 de l’Egyptian Air Force ait réussi à traiter six pick-up sur les huit observés. »Note du 5 juin 2018 « Les coordonnées et la nature de la détection ont été transmis au partenaire (…) Deux des pick-up ont été détruits. »
Début 2019, Emmanuel Macron et Florence Parly entament une visite officielle en Egypte. A cette occasion, le chef de l’Etat et sa ministre des armées sont abreuvés de notes. L’une d’elles, rédigée le 19 janvier par la cellule Afrique de l’Elysée, rappelle à Emmanuel Macron la « nécessité » d’un accord écrit garantissant « un cadre juridique solide » à l’équipe sur le terrain. Une autre, destinée à Florence Parly, l’exhorte à mettre fin aux dérives de l’opération.
Note 22 janvier 2019 « Des cas avérés de destruction d’objectifs détectés par l’aéronef sont établis (…) Il est important de rappeler au partenaire que ALSR n’est pas un outil de ciblage. »
Pourtant, aucun accord ne sera signé ni la mission remise en cause. Le soutien à la dictature reste la priorité, quoi qu’il en coûte. Le 5 décembre 2020, Emmanuel Macron décore le maréchal Sissi de la grand-croix de la Légion d’honneur lors d’un dîner organisé à l’Elysée. Quatre mois après la cérémonie, la dictature commande discrètement 30 avions Rafale à la France, pour un montant de 3,6 milliards d’euros. Selon nos informations, l’armée française est toujours déployée dans le désert égyptien.
France, Egypte, Al Sissi, Opération Sirli – France-Egypte : Les mémos de la terreur (1/2).
Disclose a obtenu des centaines de documents « confidentiel-défense » qui dévoilent les dérives d’une opération militaire secrète de la France en Egypte. Révélations sur la complicité de l’Etat dans des bombardements contre des civils.
En début de matinée, le samedi 13 février 2016, un bus aux rideaux tirés franchit le portail de la base militaire de Marsa Matruh, à 570 kilomètres du Caire. Le véhicule s’arrête devant un baraquement couleur sable. Dix hommes en descendent, des Français arrivés en Egypte quelques jours plus tôt avec des visas « touristes ». Précédé par des militaires locaux, le groupe s’engouffre dans un bâtiment aux équipements rudimentaires, sans point d’eau et à la climatisation défectueuse. Ce sera leur quartier général. Le centre de commandement d’une opération militaire clandestine de la France en Egypte. Nom de code : Sirli.
Une source a transmis à Disclose plusieurs centaines de documents classés « confidentiel-défense ». Des notes issues des services de l’Elysée, du ministère des armées et de la direction du renseignement militaire (DRM) qui révèlent les dérives de cette mission de renseignement débutée en février 2016, au nom de la lutte antiterroriste. Une fuite inédite de documents qui démontrent comment cette coopération dissimulée au public a été détournée par l’Etat égyptien au profit d’une campagne d’exécutions arbitraires. Des crimes d’Etat dont François Hollande et Emmanuel Macron ont été constamment informés. Sans jamais en tirer les conséquences.
« Ce qui fait rompre le silence, ce sont les dérives de l’action politico-militaire française qui entachent profondément ce pour quoi des hommes et des femmes sont au service de la France » (La source)
Le projet de la mission Sirli naît le 25 juillet 2015. Ce jour-là, Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la défense de François Hollande, s’envole pour Le Caire en compagnie du directeur du renseignement militaire, le général Christophe Gomart. Il y rencontre son homologue égyptien, le ministre Sedki Sobhi dans un contexte « extrêmement favorable (…) reposant sur les récents succès des contrats Rafale et [frégates] FREMM », souligne une note diplomatique obtenue par Disclose – en avril, l’Egypte a acheté 24 avions de chasse Rafale et deux navires de guerre pour un montant de 5,6 milliards d’euros.
Ordre du jour du rendez-vous : la sécurisation des 1 200 kilomètres de frontière avec la Libye, en plein chaos. Le ministre égyptien évoque en particulier un « besoin pressant » en matière de renseignement aérien. Jean-Yves Le Drian s’engage alors à mettre en œuvre « une coopération opérationnelle et immédiate », dans le cadre d’une « manœuvre globale contre le terrorisme ». Elle prendra la forme d’une mission officieuse pilotée par la DRM sur une base militaire égyptienne.
Ne reste plus qu’à signer un accord technique entre les deux pays. Lequel doit préciser l’objectif de l’opération, et permettre aux militaires de s’y référer pour en connaître les contours précis. Selon nos informations, un tel document n’a jamais été signé.
« Cet accord aurait obligé les deux parties à décrire noir sur blanc le cadre de la coopération, le type de mission et surtout ses limites » (La Source)
Début 2016, une équipe est secrètement envoyée dans le désert occidental, une zone de 700 000 km2 qui s’étend du Nil à la frontière égypto-libyenne. L’opération Sirli est née. Elle mobilise dix agents : quatre militaires et six anciens de l’armée reconvertis dans le privé – deux pilotes d’avion et quatre analystes. Ces derniers sont employés par CAE Aviation. Spécialisée dans l’imagerie et l’interception des communications, la société, basée au Luxembourg, loue également à la DRM la pièce maîtresse du dispositif : un avion léger de surveillance et de reconnaissance (ALSR) de type Merlin III. Les yeux et les oreilles des militaires. Sollicitée, la direction de CAE Aviation n’a pas répondu à nos questions.
En principe, la mission du détachement, baptisé « ELT 16 » pour « équipe de liaison technique 16 », consiste à scruter le désert occidental pour y détecter d’éventuelles menaces terroristes venues de Libye. A chaque sortie, les Français sont accompagnés d’un officier égyptien. Ce dernier est chargé d’écouter en direct les conversations interceptées. Théoriquement, les données recueillies devraient faire l’objet de recoupements afin d’évaluer la réalité de la menace et l’identité des suspects.
Mais très vite, les membres de l’équipe comprennent que les renseignements fournis aux Egyptiens sont utilisés pour tuer des civils soupçonnés de contrebande. Une dérive dont ils vont alerter leur hiérarchie à intervalles réguliers. Pendant un an, puis deux, puis trois… en vain.
Les premiers doutes interviennent deux mois à peine après leur prise de fonction, comme l’indique un rapport de la DRM du 20 avril 2016. Dans cette note, l’officier de liaison avertit sa hiérarchie : les Egyptiens veulent « mener des actions directes contre les trafiquants ». La lutte antiterroriste semble déjà loin.
Quatre mois plus tard, un nouveau rapport confirme les soupçons des militaires français.
NOTE 15 août 2016 « Le colonel [égyptien] a insisté sur sa volonté d’effectuer des vols principalement au-dessus de la ‘banane’ afin de réduire sensiblement l’activité des trafiquants transitant entre la Libye et l’Egypte. »
Ce que le militaire appelle la « banane » est une vaste zone désertique qui va du sud de l’oasis de Siwa aux villes du delta du Nil. C’est là, selon lui, que se concentrent les pick-up de contrebandiers qui franchissent la frontière libyenne en direction du Caire, d’Alexandrie ou de la vallée du Nil. Des véhicules tout-terrain conduits le plus souvent par des jeunes âgés de 18 à 30 ans, des civils qui peuvent transporter des cigarettes, de la drogue ou des armes, mais aussi du maquillage, de l’essence ou encore du riz et des céréales, comme l’indiquent les notes « confidentiel-défense » de la DRM.
Disclose s’est rendu dans la région de Marsa Matruh, où près de 50 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté. Sur place, le trafic est perçu par beaucoup comme une échappatoire au travail dans les champs d’olives ou de dattes. « Quand tu travailles du matin au soir dans les champs, tu gagnes juste 120 livres égyptiennes par jour [6,61 euros], témoigne un ancien fonctionnaire qui vit au cœur de la zone frontalière. Avec ça, tu ne peux même pas acheter un kilo de viande. » Alors, ajoute-il, « quand les jeunes du coin, qui n’ont jamais plus de 30 ans, et qui sont parfois mariés avec des enfants en bas âge, voient un gars se construire une villa ou un grand jardin, ils veulent la même chose sans penser au danger ».
Un ancien trafiquant reconverti dans le tourisme renchérit : « Un conducteur de pick-up chargé de cigarettes gagne 3 800 euros pour un aller-retour entre la Libye et l’Egypte. » C’est près de quarante fois le salaire mensuel moyen en Egypte. De quoi attirer les candidats malgré le risque mortel – en juillet 2020, la présidence égyptienne a annoncé le chiffre probablement exagéré de « 10 000 voitures remplies de terroristes et de trafiquants » détruites en sept ans, soit « 40 000 personnes tuées ».
Mais selon Jalel Harchaoui, chercheur au sein de l’ONG suisse Global Initiative Against Transnational Organized Crime, la menace terroriste venant de Libye est « largement surestimée par l’armée égyptienne afin d’obtenir du soutien sur la scène internationale ». Depuis 2017, aucun groupe terroriste ou se revendiquant comme islamiste n’est implanté dans la partie est de la Libye. « Il n’y a quasiment aucun élément permettant d’affirmer que l’Etat islamique ou d’autres groupes utilisent le trafic de drogue pour financer leurs opérations en Libye », conclut également un rapport de l’Institut européen pour la paix publié en mai 2020.
« Il n’y a que des civils qui sont tués. Les terroristes ne courent pas cette partie de désert, ils sont surtout concentrés dans le Sinaï, à l’extrême nord-est du pays » (La Source)
Redéploiement géostratégique de la diplomatie algérienne. Tout a commencé en février 2020 avec le discours de Tebboune au Sommet de l’UA
Tout a commencé en février 2020, lorsque le président de la République, Abdemadjid Tebboune, avait livré un discours historique à Addis Abeba, prononcé devant les Chefs d’Etat des pays africains participants au Sommet de l’Union africaine (UA), annonçant le grand retour de l’Algérie sur le Continent noir. Un discours révélateur d’une nouvelle ère de la diplomatie algérienne et d’une nouvelle donnée géostratégique, celle du repositionnement de l’Algérie sur la scène régionale, continentale et mondiale.
Depuis ce discours du chef d’Etat, la diplomatie algérienne, dirigée par l’ex-ministre des Affaires étrangères Boukadoum puis par le chevronné ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a retrouvé sa place dans le monde. Dans le Bassin méditerranéen, le Grand Maghreb, le Sahel, l’Afrique et le Proche-Orient, toutes ces zones géostratégiques ont fait l’objet d’une nouvelle reconquête de la diplomatie algérienne. L’Algérie est aujourd’hui un pays médiateur dans la crise opposant l’Ethiopie, Soudan et l’Egypte autour de l’exploitation du Grand Nil. Aussi, la diplomatie algérienne joue un rôle capital dans les crises et conflits en Libye, au Yémen, au Mali, au Niger, en Tunisie, où elle a arrivée même à créer un équilibre géopolitique. L’Algérie, pays stabilisateur par excellence, est devenue également un pays clé pour de nombreuses Nations. Elle est déjà convoitée et sollicitée par de nombreux pays et organisations internationales pour de nouvelles relations politiques, économiques, commerciales et surtout stratégiques.
Ce nouvel élan diplomatique et géopolitique de l’Algérie a été marquant lorsque le pays s’est engagé, en janvier 2020, dans la crise libyenne pour trouver une issue politique, loin des armes, au conflit opposant les deux parties, d’un côté le général Khalifa Haftar, chef suprême de ce qu’on appelle l’Armée nationale libyenne (ANL), et son rival de Tripoli, le Président légitime du Parlement libyen, Aguila Salah.
L’engagement de l’Algérie pour protéger la Libye d’un sale bourbier a permis, surtout, de rebondir haut et fort la crise libyenne sur la scène internationale, après un laisser-aller de la communauté internationale de plusieurs années. Forte de son passé très honorable dans la médiation dans les conflits armés et de sa diplomatie aguerrie dans le traitement des tensions et guerres, en plus d’être une force majeure sur le plan régional avec une armée qui ne cesse de glaner de l’expérience et de puissance, l’Algérie est désormais un pays important dans la médiation internationale. Ce fut le cas des conflits du Yémen et de l’Ethiopie, où la diplomatie algérienne est en train de jouer le rôle de médiateur. L’Algérie, ce pays médiateur qui sait apporter et ajuster de l’équilibre dans ses relations avec le monde entier, fait déjà l’objet d’une grande admiration dans le monde, d’ailleurs, les récents propos livrés par l’ambassadeur de l’Union européenne (UE) en Algérie, John O’Rourke, à Alger, sont une preuve à l’appui.
En effet, l’ambassadeur de l’UE a déclaré, en janvier 2020 à Alger, sa grande admiration du rôle qu’est en train de jouer la diplomatie algérienne notamment, dans le dossier libyen où l’habilité et la détermination de la diplomatie algérienne pour mettre fin à la guerre en Libye ont été fortement appréciées. Et c’est cette admiration et cette grande capacité que la Mauritanie a dépêché son ministre des Affaires étrangères pour s’ouvrir à l’Algérie dans l’espoir de trouver ce qu’elle n’a pas trouvé chez le Maroc.
Aujourd’hui, l’Algérie est devenue un pays clé pour de nombreuses Nations en quête d’une nouvelle approche géostratégique pour défendre leurs intérêts. Sofiane Abi