Étiquette : espionnage

  • Pegasus : Israël et le Maroc, une si longue histoire d’amour

    Pegasus : Israël et le Maroc, une si longue histoire d’amour. Le client présumé de la firme Pegasus collabore activement avec le gouvernement israélien, et ce, depuis des décennies.

    En coulisse des plaintes compulsives du Maroc envers les journalistes et les ONG ayant étayé les soupçons de son usage massif du logiciel Pegasus, et des dénégations de pure forme de l’État israélien, les différents gouvernements impliqués s’activent pour régler une affaire d’espionnage qui a dégénéré en brouille diplomatique. Selon le site Axios, un conseiller du premier ministre Naftali Bennett s’est rendu à Paris courant octobre pour discuter de l’usage du logiciel conçu par la firme israélienne NSO. Une réunion censée offrir des « garanties » futures à la partie française, explique le quotidien le Monde, auprès duquel l’Élysée a confirmé l’information.

    La France espère obtenir les mêmes privilèges que les plus proches alliés d’Israël, États-Unis et Royaume-Uni en tête. En clair, que les numéros français soient définitivement exclus des cibles de NSO et des autres logiciels espions israéliens exploités par ses clients, comme l’avait déjà indiqué la ministre des Armées, Florence Parly, dès la fin du mois de septembre.

    Une bataille judiciaire qui ne fait que commencer

    Des discussions qui confirment un secret de Polichinelle : la firme privée NSO agit en parfaite intelligence avec les services de sécurité israéliens, dont les clients étatiques figurent parmi les alliés ou partenaires de Tel-Aviv, qu’il s’agisse de la Hongrie de Viktor Orban, du Rwanda de Paul Kagame, ou du Maroc de Mohammed VI.

    L’avocat du royaume chérifien Olivier Baratelli maintient cependant que NSO «  n’a jamais eu de liens contractuels ou commerciaux » avec Rabat, qui poursuit au tribunal Amnesty International, le collectif médiatique Forbidden Stories, et les journaux qui ont relayé ou étayé ces soupçons, dont l’Humanité.

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  • Pourquoi l’Humanité dérange au Maroc

    Pourquoi l’Humanité dérange au Maroc. Affaire Pegasus: Le journal français a dénoncé les intimidations du Maroc qui l’a attaqué en justice pour diffamation dans le cadre de l’affaire liée au logiciel espion « Pegasus » conçu par l’entreprise israélienne NSO Group.

    Le journal français l’Humanité a dénoncé les intimidations du Maroc qui l’a attaqué en justice pour diffamation dans le cadre de l’affaire liée au logiciel espion « Pegasus » conçu par l’entreprise israélienne NSO Group. « L’Humanité a déjà affronté de nombreux obstacles, difficultés et tempêtes au cours de son histoire, dont des saisies et des attaques contre son siège. Mais, pour la première fois, nous sommes convoqués au tribunal par un Etat étranger qui entend nous faire taire et nous intimider », a écrit le directeur du journal l’Humanité, Fabien Gay, dans un édito intitulé « Nous ne céderons pas! ». « Le royaume du Maroc a ainsi assigné l’Humanité en justice pour diffamation, après avoir été confondu par l’association Forbidden Stories dans le scandale des écoutes par le logiciel espion Pegasus », rappelle Fabien Gay.

    Le sénateur de Seine-Saint-Denis a fait savoir que « cette manœuvre d’intimidation cible la journaliste Rosa Moussaoui, dont le nom figurait dans la liste des personnes espionnées et qui, à plusieurs reprises, a courageusement fait état des pressions, harcèlements et barbouzeries en tout genre exercés au Maroc contre des journalistes, des avocats et des personnalités progressistes diverses défendant les droits humains ». « Cette agitation procédurière n’est ni un signe de force, ni un témoignage de sérénité. D’autant que les preuves de l’utilisation par le Maroc du logiciel fabriqué et supervisé par la société israélienne NSO sont légion et accablantes », a-t-il assuré.

    Le directeur du journal l’Humanité rappelle, en outre, « qu’ils et elles seraient 30.000 à figurer sur les listes des personnes espionnées par le palais entre militants politiques et syndicaux, avocats, défenseurs des droits de l’homme, journalistes, élus, jusqu’aux plus hautes autorités de l’Etat français ». A cet égard, il a dénoncé la position de la France qui « n’a pas eu le courage de manifester sa réprobation face à ces pratiques hostiles et attentatoires à la dignité des citoyens français ».

    « Cette attaque en justice, aussi scandaleuse et déplacée soit-elle, doit être prise au sérieux », indique Fabien Gay, soulignant « qu’elle témoigne de l’acharnement dont use le pouvoir marocain pour faire taire toute critique à son encontre et entraver l’exercice d’un journalisme indépendant et décidé à informer les citoyens des combats qui se mènent à travers le monde contre l’arbitraire ». C’est aussi, poursuit l’auteur de l’édito, « une guerre d’usure, autant judiciaire que financière, que mène le gouvernement marocain pour qu’au final nous finissions par céder et nous autocensurer ».

    Fabien Gay a fait savoir que son journal n’allait pas céder aux menaces et intimidations du Maroc. « Nous continuerons notre travail, nos investigations, nos reportages et nos révélations », a-t-il assuré. Le directeur du journal l’Humanité a invité toutes les personnes attachées à la liberté de la presse et à la défense des droits « à participer à la soirée de soutien à la presse libre, à l’Humanité et à l’ensemble des journalistes menacés, lundi 25 octobre à la bourse du travail de Paris ».

    Le Maroc, impliqué dans l’affaire liée au logiciel espion « Pegasus » conçu par l’entreprise israélienne NSO Group, multiplie les attaques judiciaires contre les médias français, membres du consortium de 17 médias internationaux ayant révélé ou dénoncé le scandale.

    Le Monde et seize autres rédactions, coordonnées par Forbidden Stories, avaient révélé en juillet dernier l’ampleur de la surveillance menée par différents Etats contre des opposants politiques, journalistes, avocats ou militants des droits humains, à l’aide du puissant logiciel espion Pegasus, commercialisé par la société israélienne NSO Group et auquel le Maroc a eu recours.

    La Patrie News, 24/10/2021

  • La France proteste timidement, discrètement, sans élever la voix, choisit ses mots…

    Algérie, France, Pegasus, Espionnage, Maroc, Israël,

    Israël espionne ses « alliés » en utilisant un de ses plus fidèles larbins maghrébins et ses alliés supplient d’arrêter, sans aucune garantie, sachant que le ver est dans le fruit depuis longtemps.
    Et dire que la victime, c’est quand même la France nom de nom, son président jupitérien compris.
    Hélas! La France est totalement transparente, n’a plus de secrets pour ses amis intimes d’Orient et d’Occident…
    Elle n’a plus aucun contrôle sur son économie, ses finances, son commerce, ses entreprises (enfin, ce qu’il en reste) et bientôt sur ses armées sous commandement américain…
    Et tous les jours ce sont les mêmes qui demandent aux Français plus de souveraineté contre les pauvres bougres qui croupissent dans leurs banlieues… au lieu de regarder dans la bonne direction, là où les ennemis de la France travaillent en toute quiétude à saper ce qui lui reste de souveraineté et d’autonomie de décision.
    Imaginez le tamtam s’il s’agissait de Palestiniens, de Libanais, d’Algériens, de Russes ou de Chinois…
    Djeha
    Algérie54, 22/10/2021
  • The Intercept : La machine de surveillance du Maroc

    The Intercept : La machine de surveillance du Maroc-L’appareil de renseignement du Makhzen alimente la répression de la dissidence.

    RABAT, MAROC – En février 2020, Fouad Abdelmoumni, militant marocain des droits de l’homme, a reçu une nouvelle effrayante : sa partenaire et lui avaient été filmés en train de faire l’amour dans leur propre maison, et des vidéos de leurs moments intimes circulaient sur WhatsApp.

    Des amis et des membres de la famille ont dit à Fouad Abdelmoumni qu’ils avaient reçu une séquence de sept vidéos d’un numéro inconnu, apparemment filmées depuis des bouches d’aération de la climatisation qui permettaient de voir l’intérieur de la chambre et du salon. Quand Abdelmoumni est allé vérifier lui-même les bouches d’aération, il n’a trouvé aucune caméra. « Je me suis senti violé et triste pour mon pays », a-t-il déclaré dans une interview à The Intercept.

    Cet économiste de 63 ans, qui critique fréquemment la corruption et les abus du makhzen, un terme général utilisé pour décrire les élites dirigeantes du Maroc et leurs alliés, dit qu’il n’a aucun doute sur le fait que les vidéos étaient destinées à des représailles pour son franc-parler. Quelques mois plus tôt, l’activiste, proche de l’Association marocaine des droits de l’homme et membre du conseil d’administration de l’affilié marocain de Transparency International, avait publiquement dénoncé une autre affaire de surveillance.

    En octobre 2019, Abdelmoumni avait été informé par le Citizen Lab, un groupe basé à l’Université de Toronto qui suit la surveillance numérique dans le monde entier, qu’il était apparu, aux côtés de sept autres activistes et journalistes marocains, sur une liste de cibles potentielles d’un logiciel alors peu connu appelé Pegasus. Développé par le groupe NSO, basé en Israël, ce logiciel espion pourrait permettre à des pirates de surveiller les communications et d’autres données du téléphone portable d’Abdelmoumni. Ce dernier a réagi en signant une lettre, à laquelle s’est joint le reste du groupe, adressée aux autorités marocaines chargées de la protection des données, dénonçant la surveillance et demandant au gouvernement d’ouvrir une enquête. (Divulgation complète : L’un des coauteurs de cette histoire, Abdellatif El Hamamouchi, a également été informé à l’époque qu’il avait figuré sur la liste et cosigné cette lettre).

    La vidéosurveillance du domicile d’Abdelmoumni n’était pas le produit du logiciel espion Pegasus. Il pense plutôt que cette intrusion dans sa vie privée est une forme d’extorsion destinée à le décourager de parler de la corruption. Il a publiquement affirmé que la surveillance avait été menée sur ordre du roi. « M. Abdelmoumni affirme que des dizaines de détracteurs du roi […] ont fait l’objet de campagnes de dénigrement similaires », rapportait The Economist en janvier.

    « On m’a filmé en train d’avoir des relations sexuelles avec mon partenaire pour me faire taire », a déclaré Abdelmoumni à The Intercept. « Je fais face à une pression immense, mais je ne me suis pas soumis et je ne me soumettrai pas à la police politique qui tente de me faire chanter. »

    Abdelmoumni n’est que l’un des nombreux militants, journalistes et critiques du gouvernement pris dans l’appareil de surveillance généralisée du Maroc. Bien que l’État marocain soit souvent considéré comme moins répressif que nombre de ses voisins du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, ses détracteurs estiment qu’il est au cœur d’une dangereuse dérive autoritaire. Les récentes révélations sur le logiciel espion Pegasus ont contribué à mettre en lumière une partie seulement de cette machine de surveillance sophistiquée et de grande envergure.

    En juillet, une enquête menée par l’ONG Forbidden Stories, le Security Lab d’Amnesty International et un consortium de reporters internationaux – connue sous le nom de Pegasus Project – a suggéré que le gouvernement marocain est un utilisateur majeur du logiciel de surveillance de NSO Group. Les conclusions, fondées sur une fuite de données, comprenaient une liste de plus de 50 000 numéros de téléphone qu’Amnesty et Forbidden Stories considéraient comme des cibles potentielles de Pegasus. Environ un cinquième de ces numéros de téléphone étaient basés au Maroc.

    Les médias participant au projet Pegasus ont analysé la liste, et le laboratoire de sécurité d’Amnesty a examiné 67 smartphones, dont 23 avaient été infectés avec succès par des logiciels espions et 14 autres présentaient des signes de tentative d’infiltration. NSO Group a nié toute implication, affirmant que toute surveillance de journalistes, d’activistes ou de politiciens constitue une utilisation abusive de sa technologie.

    La liste des cibles de surveillance possibles s’étendait bien au-delà des frontières marocaines. Selon les archives fournies par Forbidden Stories et Amnesty, les entrées sélectionnées depuis le Maroc comprenaient les numéros de téléphone du président français Emmanuel Macron, de l’éminent journaliste français Edwy Plenel et du diplomate américain et principal négociateur de l’accord sur le nucléaire iranien de 2015, Robert Malley. Mais à l’intérieur du pays, des journalistes indépendants très en vue apparaissaient souvent. Outre les chefs d’État, les activistes et les politiciens figurant parmi les 50 000 entrées, 180 numéros appartenaient à des journalistes de 20 pays différents. Selon The Guardian, 38 d’entre eux se trouvaient au Maroc, parmi lesquels Taoufik Bouachrine, Soulaimane Raissouni et Omar Radi, qui sont tous aujourd’hui en prison.

    Le gouvernement marocain, une monarchie constitutionnelle dont le premier ministre est nommé directement par le puissant roi Mohammed VI, conteste vivement l’exactitude de ces conclusions. En juillet, le procureur général de l’État a annoncé qu’il ouvrait une enquête sur « les fausses allégations et accusations contenues dans des articles de presse publiés par des journaux étrangers », tandis que l’ambassade du pays à Paris a déposé une plainte devant un tribunal français, accusant Histoires interdites et Amnesty de diffamation.

    Mais malgré le tumulte, Pegasus n’est qu’un élément du tableau – l’un des nombreux instruments d’une boîte à outils de surveillance en expansion dont dispose l’État marocain pour réprimer les journalistes, les militants et les critiques du gouvernement. Parfois, disent les défenseurs des droits de l’homme, les renseignements peuvent être déployés dans le but de faire honte ou de faire chanter les cibles – comme dans le cas d’Abdelmoumni. D’autres fois, ils peuvent être mobilisés par les médias pro-gouvernementaux pour attaquer les voix critiques. Ils peuvent même être utilisés pour engager de véritables poursuites pénales contre des dissidents, comme l’ont appris de première main une poignée de journalistes indépendants.

    Selon Maati Monjib, historienne et militante de renom qui a passé trois mois en prison cette année pour « fraude » et « atteinte à la sécurité de l’État » avant de bénéficier d’une libération provisoire, la surveillance de l’État marocain joue un rôle essentiel dans le maintien du pouvoir du régime. Directeur de Freedom Now, une association qui défend la liberté d’expression et la liberté de la presse, et professeur d’histoire à l’université Mohammed V de Rabat, M. Monjib estime que les objectifs ne se limitent pas à décourager les critiques les plus virulents. Lorsqu’Amnesty a examiné son téléphone, les analystes légistes ont trouvé des preuves de processus suspects qui ont conduit à des domaines d’installation de Pegasus. Son appareil est devenu « instrumental » pour les modèles des analystes, ont écrit les chercheurs du Security Lab.

    « L’objectif général semble être que tout le monde ait le sentiment d’être surveillé, y compris les politiciens qui travaillent pour le régime », a déclaré Monjib à The Intercept quelques semaines avant une audience judiciaire liée à son cas. « Ce sentiment général paralyse une bonne partie de la société marocaine et encourage l’autocensure chez nous. Avant, même les politiciens pro-régime étaient parfois critiques envers le régime lorsqu’ils étaient entre eux ou en dehors du Maroc. Ce n’est plus possible aujourd’hui ».

    Joint sur son numéro personnel via WhatsApp lorsqu’il était en fonction, l’ancien ministre marocain des Droits de l’homme Mustapha Ramid n’a pas répondu aux demandes de commentaires de The Intercept pour cette histoire. L’ancien Premier ministre Saad-Eddine El Othmani n’a pas répondu aux multiples demandes de commentaires envoyées par son bureau. Depuis le 7 octobre, suite aux élections parlementaires de septembre et à l’approbation du roi, le Maroc a un nouveau gouvernement. Le nouveau premier ministre, Aziz Akhannouch, n’a pas non plus répondu à une demande de commentaire.

    Pegasus : Un outil dans la boîte à outils de la surveillance

    En août 2019, lorsque la police marocaine a arrêté la journaliste Hajar Raissouni, elle pensait être volée. Elle sortait du cabinet de son gynécologue à Rabat avec son fiancé de l’époque, aujourd’hui son mari, lorsqu’un groupe l’a confrontée à des détails intimes et à des accusations.

    « On m’a dit des informations très personnelles que personne n’aurait pu connaître à moins d’avoir écouté mes appels depuis le début », a déclaré Hajar à The Intercept. « Ils m’ont dit qu’à une certaine heure, je devais me rendre chez mon fiancé Rifaat lorsqu’il était en voyage pour sortir les chiens, et ils m’ont mentionné les heures et les jours précis. » Ce mois-là, elle a été arrêtée et accusée d’avortement et de relations sexuelles hors mariage, deux actes illégaux et souvent perçus négativement au Maroc.

    Parmi les nombreuses questions sur lesquelles les journalistes marocains doivent naviguer figurent les fameuses « lignes rouges » explicitement mentionnées dans le code pénal du pays : la place de l’islam, la légitimité de la monarchie et l’intégrité territoriale du pays. (Ce dernier point est particulièrement pertinent pour la revendication contestée du Maroc sur le territoire du Sahara occidental, que l’administration Trump a reconnu en décembre dernier, rompant avec des années de consensus international et facilitant l’établissement de relations diplomatiques entre le Maroc et Israël).

    Hajar se souvient des interrogateurs qui la bombardaient de questions sur ses convictions politiques et sa couverture du mouvement de protestation Hirak El-Rif de 2016, qui a exigé des améliorations socio-économiques dans la région berbérophone du nord du Maroc pendant plusieurs mois – jusqu’à ce que des dizaines de militants soient arrêtés et que les protestations s’estompent. En mai 2019, Hajar avait publié une série d’entretiens avec le père du leader du mouvement, Nasser Zefzafi, réfléchissant à la peine de 20 ans de prison que son fils avait récemment reçue. Elle dit que les interrogateurs l’ont également interrogée sur des membres influents de sa famille, notamment un journaliste et un universitaire, tous deux connus pour être critiques envers les autorités.

    Hajar n’a donc pas été surprise lorsque, environ deux ans plus tard, Forbidden Stories l’a informée que son numéro figurait sur la liste des fuites liée à Pegasus. Elle pense que la surveillance du gouvernement a joué un rôle clé dans son inculpation, pour laquelle elle a finalement passé un mois et demi en prison avant de quitter son pays en exil.

    Selon Forbidden Stories, Hajar a été sélectionnée comme cible par Pegasus en mai 2019.

    À l’époque, les accusations portées contre Hajar ont suscité l’indignation internationale, suscitant la condamnation de groupes comme Human Rights Watch, Front Line Defenders et Amnesty. Cette vague de critiques a permis à Hajar d’éviter une nouvelle peine de prison. Bien qu’un tribunal de Rabat l’ait condamnée à un an de prison en septembre 2019, elle a été libérée le mois suivant après avoir reçu une grâce royale directement du roi Mohammed VI.

    Mais même après avoir été libérée, Hajar dit avoir continué à être suivie par des personnes non identifiées dans les rues de la capitale marocaine. « Je ne pouvais plus aller nulle part », a-t-elle déclaré à The Intercept. « Des agents de police en civil étaient constamment autour de moi ».

    Finalement « fatiguée de tout le harcèlement et du ciblage », Hajar a choisi de quitter le pays au début de 2020, s’installant au Soudan avec son mari.

    Guerre de l’information et diffamation

    À l’instar de la Turquie, de l’Égypte et d’autres États à tendance autoritaire du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, le gouvernement marocain aime garder un contrôle étroit sur le flux d’informations. Bien qu’aucun géant médiatique étatique ne domine le secteur, le paysage médiatique du pays est marqué par un grand nombre de médias privés qui défendent régulièrement les actions du roi Mohammed VI et attaquent ceux qui s’opposent à la ligne officielle de l’État – souvent en citant des sources anonymes sans confirmation et en fouillant dans la vie personnelle des sujets. Dans certains cas, ces médias publient des informations extrêmement précises qui, selon beaucoup, ne peuvent provenir que des services de renseignement de l’État.

    Ces éditeurs, que les militants appellent communément la « presse de la diffamation », comprennent les sites web Cawalisse al-Youm et Barlamane. Ce dernier, par exemple, a publié une vidéo tristement célèbre de Zefzafi, le leader du mouvement de protestation Hirak El-Rif, en prison en 2017. Sur les images, le leader du mouvement Rif se déshabille et expose diverses parties de son corps – une scène vraisemblablement destinée à montrer qu’il n’avait pas été torturé, mais aussi largement interprétée comme une tentative d’embarrasser le militant. Parmi les médias similaires, citons Le360, Aldar, Telexpresse et Anfas Press, mais le leader incontesté du genre est Chouf TV.

    Soulaimane Raissouni, l’ancien rédacteur en chef d’Akhbar al-Yaoum, un quotidien imprimé aujourd’hui disparu, lancé en 2009 et connu pour sa ligne éditoriale indépendante, est en prison depuis mai 2020. Cinq jours avant sa détention, Chouf TV a publié une histoire écrite par « Abou Wael » – un pseudonyme souvent utilisé pour indiquer la proximité avec les responsables des services de renseignement – suggérant qu’il serait bientôt confronté à des problèmes.

    « Les portes de l’enfer s’étaient ouvertes » sur Soulaimane, affirmait le média, ajoutant que « [sa] politique de la terre brûlée allait le brûler » à la veille de la fête de l’Aïd al-Fitr. Le soir même, Soulaimane, l’oncle de Hajar, a été arrêté devant son domicile, entouré d’un groupe de journalistes de Chouf TV. Le média a diffusé la procédure sur sa chaîne YouTube, qui compte plus de 6 millions d’abonnés.

    « Une vingtaine de jours avant l’arrestation de Soulaimane, une voiture secrète de sécurité ne quittait pas la porte de la maison. Ils nous suivaient partout où nous allions », a déclaré la femme de Soulaimane, Kholoud Mokhtari, à The Intercept. « Certains appels de Soulaimane ont été publiés mot à mot dans des journaux proches des services de sécurité – des conversations portant sur le statut d’Akhbar al-Youm ainsi que sur certaines affaires familiales et très privées. »

    Détenu deux mois seulement après Soulaimane, Omar Radi a également fait l’objet d’attaques fréquentes de la part des médias pro-gouvernementaux – et de Chouf TV en particulier.

    Selon des documents juridiques obtenus par The Intercept, le bureau du procureur a semblé s’appuyer sur Chouf TV pour monter son dossier contre Radi, un journaliste connu pour sa couverture des mouvements sociaux. Le 23 juin 2020, le bureau a envoyé une lettre au chef de la Division nationale de la police judiciaire lui demandant de « mener des recherches préliminaires pour découvrir la vérité sur ce qui a été mentionné dans deux articles publiés » par Chouf TV. Le premier article prétendait que Radi travaillait avec les services de renseignements occidentaux ; le second détaillait les « scandales » d’Omar Radi et accusait l’écrivain de vendre des informations sur les Marocains de l’étranger.

    Alors que l’affaire Radi s’éternisait, un témoin clé nommé Imad Stitou a refusé de coopérer avec l’État. En septembre 2020, l’accusation a transformé Stitou en co-conspirateur présumé. Il a été reconnu coupable de « non-dénonciation d’un crime » et condamné à un an de prison.

    « Je n’étais pas le personnage qu’ils voulaient dans leur roman, et il était nécessaire de faire de moi un exemple », a déclaré Stitou, aujourd’hui libéré en attendant l’appel, à The Intercept. « Ce plan a largement réussi à intimider les autres sympathisants. J’entendais souvent dans mes cercles : « Voulez-vous être l’Imad Stitou ? » « .

    La militarisation de #MeToo

    Soulaimaine et Radi contribuent à illustrer un autre schéma inquiétant qui a émergé au Maroc ces dernières années : Ils font partie d’un trio de journalistes très en vue, connus pour avoir critiqué les autorités de l’État, qui ont tous été envoyés en prison à la suite d’allégations d’agressions sexuelles. Leurs procédures judiciaires respectives ont toutes été critiquées par d’importantes ONG de défense des droits de l’homme pour irrégularités. Reporters sans frontières, qui classe le Maroc au 136e rang sur 180 pays dans son classement de la liberté de la presse, a dénoncé ce qu’elle appelle « l’utilisation d’accusations sexuelles forgées de toutes pièces contre des journalistes ».

    La série d’affaires a commencé avec Taoufik Bouachrine, le fondateur et directeur d’Akhbar al-Yaoum. En février 2018, Bouachrine a été arrêté au siège de son journal à Casablanca. Accusé de viol, de traite des êtres humains et d’ »abus de pouvoir à des fins sexuelles », le journaliste a finalement été condamné à 15 ans de prison en octobre 2019. Tant les conditions de détention de Bouachrine que le procès lui-même ont été condamnés par Amnesty et Human Rights Watch, tandis qu’un rapport du groupe de travail du Conseil des droits de l’homme des Nations unies sur la détention arbitraire a montré comment de multiples victimes présumées ont cherché à prendre leurs distances par rapport à cette affaire.

    Parmi ces victimes figure Afaf Bernani, une ancienne journaliste d’Akhbar al-Yaoum qui affirme que la police a falsifié ses déclarations. D’abord interrogée en tant que témoin d’une agression sexuelle présumée de Bouachrine, elle a finalement été classée comme victime de son ancien patron. Après avoir contesté ce récit au tribunal, Bernani a été accusée d’un crime elle-même – « fausse communication et calomnie » – et condamnée à six mois de prison.

    « Le but de ma condamnation était d’intimider le reste des femmes impliquées dans le procès », a déclaré Bernani à The Intercept.

    Peu de temps après que l’État ait porté des accusations contre elle, Bernani a déclaré que les autorités ont fait monter la pression en l’espionnant. « J’ai été soumise à une étroite surveillance de sécurité dans la rue, où la police secrète était postée devant ma maison et me suivait partout où j’allais », a-t-elle déclaré. « J’étais même suivie lors de mes visites chez le médecin ».

    Finalement, elle a choisi de quitter le pays plutôt que de purger une peine de prison, s’installant en juillet 2019 en Tunisie, où elle se trouve encore aujourd’hui.

    Entre-temps, Soulaimane, l’homme qui a remplacé Bouachrine à la tête d’Akhbar al-Yaoum, a lui-même été arrêté et accusé d’agression sexuelle en mai dernier. Malgré le tollé des ONG et une grève de la faim qui a duré près de 120 jours, Soulaimane a été condamné à cinq ans de prison en juillet dernier.

    Radi, quant à lui, a été détenu l’année dernière et accusé de viol et d’espionnage avant d’être finalement condamné à six ans de prison en juillet.

    Khadija Ryadi, ancienne présidente de l’Association marocaine des droits de l’homme, estime que ces affaires sont loin d’être des victoires pour les droits des femmes ou la cause féministe dans le pays.

    « Le régime marocain fabrique des affaires criminelles contre des journalistes indépendants liées à de nobles causes comme la lutte contre la violence envers les femmes dans le but de discréditer les cibles et de limiter leur influence dans la société », a-t-elle déclaré à The Intercept. « Heureusement, la majorité des gens savent maintenant qu’il s’agit d’affaires fabriquées de toutes pièces visant à réduire au silence et à aliéner les journalistes qui dérangent les autorités. »

    Samir Bouaziz, responsable du département de plaidoyer pour le bureau Afrique du Nord de Reporters sans frontières, partage cet avis. Selon lui, le régime marocain ajuste sa tactique dans l’espoir de mieux masquer sa répression. « Les autorités ont investi dans #MeToo comme un moyen de confondre l’opinion publique nationale et internationale », a-t-il déclaré.

    Bouaziz voit un schéma lorsqu’il s’agit de ce qu’il considère comme la répression de l’État à l’encontre de Bouachrine, Soulaimane et Radi – chacun d’entre eux figurait également sur la liste révélée par Forbidden Stories des cibles possibles de Pegasus.

    « Les préparatifs pour l’arrestation des journalistes ciblés se font en coordination avec la presse diffamatoire proche des services de sécurité, qui lancent des campagnes contre les cibles avant les arrestations », a déclaré Bouaziz. « C’est le meilleur prélude et le plus efficace pour fabriquer des accusations ».

    Quoi qu’il en soit, la longue liste d’affaires judiciaires pèse sur ceux qui sont prêts à s’exprimer sur le makhzen – et ceux qui l’envisagent – alimentant le sentiment que la surveillance est omniprésente et que les ennuis judiciaires ne sont jamais loin.

    Malgré la vague de répression, Maati Monjib, de Freedom Now, essaie de garder espoir. Soutenant publiquement Radi, Soulaimane et d’autres journalistes emprisonnés, Monjib note que « la diffamation basée sur la surveillance semble être plus décourageante pour la majorité des militants que la répression physique. »

    Monjib lui-même a subi d’innombrables attaques dans la presse marocaine. L’année dernière, il a été accusé de blanchiment d’argent par des médias pro-gouvernementaux, et Chouf TV a publié une photo de lui dans un aéroport parisien, suggérant qu’il fuyait le pays.

    Accusé de « menace à la sécurité de l’État » depuis 2015, Monjib est empêtré dans une affaire apparemment sans fin qui l’a vu purger un séjour en prison et lancer deux grèves de la faim. L’homme de 59 ans est retourné au tribunal le mois dernier, mais il a confié à The Intercept qu’il s’inspire du fait que d’autres écrivains et dissidents continuent de labourer.

    « Des intellectuels et des journalistes courageux défient la diffamation et l’emprisonnement », a déclaré Monjib. « Ils poursuivent leur travail pour la démocratie et la liberté en exposant la corruption de l’élite étatique et ses violations des droits de l’homme. »

    Cole Stangler, Abdellatif El Hamamouchi

    The Intercept, 21/10/2021

  • Affaire Omar Radi: La Haye exige des clarifications

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    Le ministère des Affaires étrangères a demandé au Maroc de clarifier l’accusation selon laquelle le journaliste et militant marocain Omar Radi aurait espionné pour le compte des Pays-Bas. « Le cabinet rejette les accusations en matière d’espionnage et ce message a été immédiatement transmis à l’ambassadeur du Maroc à La Haye à haut niveau », écrit jeudi le ministre sortant Ben Knapen (Affaires étrangères) à la Chambre des représentants.

    Radi a été condamné à six ans de prison en juillet. Puis vinrent des informations dans les médias selon lesquelles il avait été reconnu coupable, entre autres, d’espionnage pour les Pays-Bas. La semaine dernière seulement, le ministère a eu accès à une partie du verdict. Il indique que Radi a également été reconnu coupable d’activités d’espionnage présumées pour l’ambassade des Pays-Bas dans la capitale Rabat. Maintenir le contact avec les journalistes fait partie du travail régulier de l’ambassade, souligne Knapen.

    Les autorités marocaines affirment qu’elles ne s’ingéreront pas dans le processus judiciaire. L’appel est toujours pendant. Radi a précédemment qualifié toutes les allégations de « tout à fait ridicules ». Il a enquêté, entre autres, sur la corruption et les violations des droits humains dans ce pays d’Afrique du Nord.

    Leidsch Dagblad, 14/10/2021

  • Affaire Omar Radi: Lettre du ministre Ben Kappen

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    Madame la Présidente,

    En référence aux consultations sur les droits de l’homme du 4 octobre dernier, je reviens sur la promesse que j’ai faite de vous informer de la condamnation de M. Omar Radi. Le 19 juillet, Omar Radi a été condamné à six ans de prison par un juge marocain. Il aurait été accusé de porter atteinte à la sécurité extérieure de l’État par des contacts avec des puissances étrangères, de viols et d’atteintes à la sécurité intérieure. Selon les rapports des médias marocains et néerlandais, les Pays-Bas ont été liés à des activités d’espionnage présumées de M. Radi.

    Le Cabinet a suivi d’aussi près que possible l’évolution du procès contre Omar Radi (voir également les documents parlementaires 2020Z14508 et 2021Z06395), ce qui n’a pas été facile puisque l’acte d’accusation et la motivation du verdict n’ont pas été rendus publics. Les Pays-Bas se sont renseignés à plusieurs reprises auprès des autorités marocaines à ce sujet, notamment en ce qui concerne l’espionnage présumé en faveur des Pays-Bas. Ce problème a été porté à l’attention des autorités marocaines, tant au niveau bilatéral que dans le cadre de l’UE. En outre, les droits de l’homme au sens large ont été abordés lors des entretiens bilatéraux avec les autorités, ainsi que le cas de M. Radi.

    La semaine dernière, le ministère des affaires étrangères a reçu une traduction de travail informelle d’une partie du jugement. Il en ressort que M. Radi a été reconnu coupable de plusieurs chefs d’accusation, notamment de prétendues activités d’espionnage pour l’ambassade des Pays-Bas à Rabat.

    Le Cabinet rejette les allégations d’espionnage et ce message a été immédiatement transmis à l’ambassadeur du Maroc à La Haye. Une clarification de ces allégations a été demandée. Il a été souligné que les ambassades sont libres de maintenir le contact avec les journalistes. Cela fait partie des activités régulières d’une ambassade. Dans une première réaction, les autorités marocaines ont indiqué qu’elles attachaient une grande importance aux bonnes relations avec les Pays-Bas. Ils ont également indiqué qu’ils ne disposaient pas du jugement et qu’ils n’interviendraient pas dans le processus judiciaire. Nous continuerons à discuter de cette affaire avec les autorités marocaines.

    Pour l’heure, l’affaire relève toujours de la juridiction marocaine, car M. Radi a fait appel du verdict. C’est maintenant au juge marocain d’entendre cet appel. Les Pays-Bas continueront à suivre l’affaire de près.

    Votre Assemblée recevra ultérieurement une lettre sur le Maroc qui abordera les relations plus larges avec le Maroc, comme promis à votre Assemblée le 8 juillet et le 4 octobre lors des débats du Comité permanent des affaires étrangères.

    Le ministre des Affaires étrangères,
    Ben Knapen

    Source : Parlement néerlandais

  • Affaire Radi: Amsterdam nie l’accusation d’espionnage

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    Le Cabinet dément qu’un journaliste marocain ait espionné pour l’ambassade des Pays-Bas à Rabat. Le journaliste en question a été condamné à six ans de prison au Maroc, en partie sur la base de ces accusations, mais le ministre sortant Knapen rejette cette accusation dans une lettre adressée au Parlement.

    Knapen écrit que les Affaires étrangères ont demandé des éclaircissements à l’ambassadeur du Maroc à La Haye. Le ministère a souligné que les ambassades sont libres d’entretenir des contacts avec les journalistes et que cela fait partie des activités normales d’une ambassade.

    Elle concerne le journaliste Omar Radi. Des parlementaires ont déjà attiré l’attention sur sa situation à plusieurs reprises. Il a été arrêté l’été dernier pour suspicion d’espionnage, entre autres. En juillet de cette année, il a été condamné.

    Jugement non public

    Knapen écrit que le Cabinet a suivi les développements du procès de Radi « d’aussi près que possible », mais que cela n’a pas été facile car l’acte d’accusation et le verdict n’ont pas été rendus publics. Selon le ministre, les Pays-Bas ont effectué plusieurs démarches auprès des autorités marocaines.

    La semaine dernière, le ministère des Affaires étrangères a vu de manière informelle une traduction d’une partie du verdict. Il en ressort que Radi a été condamné pour plusieurs chefs d’accusation, dont celui d’espionnage pour l’ambassade des Pays-Bas.

    Radi en appel

    Selon M. Knapen, les autorités marocaines ont déclaré qu’elles attachaient une grande importance aux bonnes relations avec les Pays-Bas. Mais ils ne veulent pas interférer dans le processus judiciaire.

    L’affaire est toujours en cours de jugement, car Radi a fait appel. « Il appartient maintenant au juge marocain de traiter cet appel et les Pays-Bas continueront à suivre l’affaire de près », a déclaré le ministre à la Chambre. Les relations entre les Pays-Bas et le Maroc sont difficiles depuis un certain temps déjà.

    NOS, 14/10/2021

  • Affaire Omar Radi: Le Makhzen acculé par les Pays Bas

    Maroc, Pays, Omar Radi, Espionnage, #Maroc, #PaysBas, #Omar_Radi

    Les Affaires étrangères demandent des éclaircissements au Maroc sur une accusation d’espionnage
    Le ministère des Affaires étrangères demande au Maroc de clarifier l’accusation selon laquelle le journaliste marocain Omar Radi aurait espionné pour les Pays-Bas.
    Selon le ministre sortant Ben Knapen, le cabinet sortant « rejette » les accusations d’espionnage. « Et ce message a été immédiatement transmis à l’ambassadeur du Maroc à La Haye à un haut niveau officiel », a-t-il écrit à la Chambre basse jeudi.
    Radi a été condamné à six ans de prison en juillet. Par la suite, les médias ont rapporté qu’il avait été condamné, entre autres, pour espionnage au profit des Pays-Bas. Ce n’est que la semaine dernière que le ministère a pu accéder à une partie du jugement. Il indique que Radi a également été condamné pour des activités d’espionnage présumées pour l’ambassade des Pays-Bas dans la capitale Rabat. Le maintien des contacts avec les journalistes fait partie du travail régulier de l’ambassade, souligne M. Knapen.
    Complètement ridicule
    Radi a précédemment qualifié toutes les accusations de « totalement ridicules ». Il a notamment enquêté sur la corruption et les violations des droits de l’homme dans ce pays d’Afrique du Nord. L’appel est toujours en cours.
    WNL, 14/10/2021
  • J’veux devenir marocain !

    Maroc, France, Pegasus, espionnage, football, Guinée-Bissau, intoxication, #Maroc, #Pegaus, #Guinéé_Bissau,

    J’aimerais être marocain ! Si ! Si ! Oh ! Ne pensez pas que c’est une phrase lancée comme ça, à la légère, sans réfléchir. J’ai réfléchi ! Oui, Môssieur ! J’ai réfléchi, et j’en suis arrivé à cette conclusion : finalement, j’aimerais être marocain ! C’est top d’être marocain. Ne me dites pas le contraire, c’est le pied intégral. J’ai des exemples. Quand vous êtes marocain, vous pouvez espionner la terre entière, mettre sous écoute les plus grands dirigeants de cette planète, lorsque l’info sort, devient publique, ça s’agite un peu, ça grogne dans le poulailler cinq minutes, puis… rien ! Le soufflet retombe. Tout le monde sait que vous avez écouté tout le monde, mais tout le monde range votre dossier au fond d’un tiroir et on passe à autre chose ! C’est pas génial, ça ?

    Un autre exemple, là, tout de suite. En tant que Marocain, vous pouvez recevoir chez vous une équipe de foot pour un match officiel, lui mettre plein de saloperies dans sa bouffe ; en clair, l’empoisonner au risque de décimer toute l’équipe, et hop ! Un p’tit coup de laxatifs, de pansements gastriques et de sérum pour retaper le tout et… rien ! Tout le monde range votre tentative d’empoisonnement dans une fiole cachetée au fond d’un grimoire lui-même dissimulé dans une douve du Palais et le foot continue.

    Vous voulez un autre exemple ? J’en ai ! J’en ai tout un tas ! Quand vous êtes marocain, vous pouvez torturer des détenus rifains, les affamer en cellule, mais c’est votre voisin que l’on accusera de porter atteinte aux droits de l’Homme ! Non, moi je vous le dis, être marocain, ça vaut le coup !

    Quoi, le baisemain ? Oui, bon, ils ont ce satané baisemain. Je vous fais tout de même remarquer que, de par le monde bien-pensant, les grands défenseurs de la démocratie et les adversaires acharnés des monarchies autocratiques et despotiques qualifient pourtant ce baisemain marocain de « signe d’une civilisation ancestrale » !

    Et puis, de toutes les façons, on s’habitue, vous savez. On finit par s’habituer. Demandez à ceux des nôtres qui sont devenus marocains et dont les lèvres sont encore toutes humides !

    Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.

    Hakim Laâlam

    Le Soir d’Algérie, 12/10/2021

  • Pegasus: Malgré l’espionnage, la France reste bien timide

    France, Maroc, Pegasus, NSO Group, Espionnage, #Macron, #Maroc, #Espionnage, #Pegasus, #NSOGruoup,

    Les révélations du vaste scandale d’espionnage permis par le logiciel «Pegasus» n’ont pas suscité de vive réaction d’Emmanuel Macron et son gouvernement. Eux-mêmes ainsi qu’un millier de Français sont pourtant concernées. Le scandale est mondial, la réaction bien timide. Face aux révélations du consortium Forbidden Stories, d’Amnesty International et de leurs médias partenaires, la France est jusque-là restée très prudente. Un millier de personnes sont pourtant concernées, des journalistes, des avocates, des responsables politiques et même le président de la République et une grande partie de son gouvernement.

    Pris de cours par ces révélations, l’exécutif a d’abord cherché à conserver un équilibre précaire dans son expression. Il s’agissait de montrer que les faits étaient pris très au sérieux, sans pour autant sombrer dans la panique générale ou le procès en incompétence. Les premiers éléments de langage livrés par l’Élysée ont donc été répétés en boucle par les rares ministres interrogés sur le sujet.

    L’instruction de Castex : en dire le moins possible

    Tous étaient priés d’en dire le moins possible à ce stade de la «série d’investigations» ordonnée par le gouvernement, selon les mots de son chef. «Je crois qu’il serait un peu irresponsable de notre part de dire des choses tant que nous ne savons pas exactement ce qu’il en est», a d’ailleurs déclaré Jean Castex au «13heures» de TF1, mercredi 21juillet.

    La veille, à l’Assemblée nationale, peu avant la publication des révélations sur le ciblage des téléphones d’Emmanuel Macron, Édouard Philippe et quatorze ministres, il avait expliqué que les «investigations» sur la «matérialité» des faits n’avaient «pas abouti». À ce moment-là, l’Élysée était déjà au courant, puisque le consortium l’avait informé quatre jours plus tôt.

    Jeudi, le chef de l’État réunissait un conseil restreint de défense et de sécurité nationale (CRDSN), dédié à l’affaire «Pegasus». «Le président de la République suit au plus près ce dossier et prend cette affaire très au sérieux», soulignait le matin même le porte-parole du gouvernement, sur France Inter. «Aucune certitude à ce stade n’est apparue, donc la prudence reste de mise dans les commentaires», indiquait aussi l’Élysée à l’issue de ce CRDSN, précisant qu’Emmanuel Macron avait toutefois changé d’appareil et de numéro de téléphone «pour certains de ses échanges». À cette occasion, le chef de l’État a également «exigé un renforcement de tous les protocoles de sécurité en parallèle des opérations techniques de détection et clarification en cours», a encore souligné l’Élysée, alors que certaines figures de l’opposition, telles que le patron des sénateurs Les Républicains (LR) Bruno Retailleau, déploraient l’«imprudence» et l’«amateurisme» du pouvoir exécutif en matière de cybersécurité. Le sujet s’est également invité à l’Assemblée, jeudi, lors de l’adoption du projet de loi relatif à «la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement».

    Ce jour-là, le député La France insoumise (LFI) Adrien Quatennens, dont le nom figure parmi les personnalités politiques ciblées par le logiciel espion, s’est étonné qu’«aucun service de l’État ne [l’ait] contacté». «Qu’est-il prévu pour procéder aux vérifications que notre protection exige?», a-t-il interrogé, sans obtenir de réponse. Dans la foulée, l’Élysée a fait savoir que l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) avait proposé «ses services à celles et ceux pour qui il y a des soupçons d’intrusion sur la base d’un protocole et un accompagnement renforcés».

    Les ministres nagent dans le brouillard

    Informés pour la plupart dans la journée de lundi 19 juillet, les ministres dont les numéros de téléphone figurent sur la liste du «Projet Pegasus» semblaient, la semaine suivante, nager dans le brouillard le plus complet. Plus étonnés qu’inquiets par la nature des révélations de Forbidden Stories, plusieurs d’entre eux ont confié à Mediapart que leur appareil, potentiellement infecté, n’avait pas encore été pris en charge pour vérification. De son côté, l’Élysée se contentait de répéter que les analyses étaient encore en cours et qu’elles pouvaient prendre du temps. Sans plus de précisions.

    La procédure d’examen des données des téléphones, réalisée par les spécialistes du Security Lab d’Amnesty International à Berlin, et permettant d’identifier des traces de Pegasus, a été publiée dès le début du scandale sur Internet – avec le bilan détaillé des appareils où l’infection a été détectée. Un manuel à usage de celles et ceux qui voudraient vérifier. Par ailleurs, une fois le protocole en place, les premiers retours sont très rapides – quelques heures à peine. Dans le JDD du dimanche 25 juillet, Laurent Nuñez, le coordinateur national au renseignement, indique que les résultats pourraient de toute façon rester confidentiels, au nom du secret

    Parmi les responsables politiques ciblés, seul l’ancien ministre François de Rugy a accepté que son appareil soit examiné par Amnesty International qui y a décelé des traces de tentatives d’intrusion – sans succès apparent.

    La justice poursuit son enquête

    De son côté, le Maroc – qui a annoncé une plainte en diffamation en France – et NSO ont tous deux multiplié les prises de parole médiatiques pour contenir la polémique. Après le ministre des affaires étrangères marocain, dans Jeune Afrique, l’ambassadeur du Maroc en France a repris dimanche les mêmes éléments de langage : le royaume n’est pas client de NSO, il n’a jamais espionné Emmanuel Macron, ces révélations ressemblent à un complot algérien et des «réseaux hostiles au Maroc en France et ailleurs» dans un «timing particulier».

    Quant à la société israélienne au cœur du scandale, son patron Shalev Hulio a accordé plusieurs entretiens à la presse, dont le magazine Forbes. Il y répète les éléments de langage habituels de NSO, structurellement liée au gouvernement israélien. Pegasus est vendu à des gouvernements qui en font un usage que NSO ne contrôle pas, et sert à lutter contre les criminels et les terroristes. «Les personnes qui ne sont pas des criminels, qui ne sont pas des “Ben Laden” de ce monde n’ont rien à craindre», affirme le patron de la société. S’il assure ne pas connaître la liste des cibles de son logiciel, Shalev Hulio peut toutefois attester que le président français, mais aussi les proches du journaliste saoudien assassiné Jamal Khashoggi, n’y figurent pas…

    Après l’annonce d’une enquête en Israël, il précise aussi que NSO dispose bien d’un moyen de vérifier si ses clients «font un mauvais usage du système». À l’image des autres États visés par les récentes révélations, le Maroc et NSO font également entendre une petite musique mettant en cause l’enquête de Forbidden Stories et de ses partenaires, sa méthodologie, soulignant notamment que les preuves ne sont pas fournies. Et ce, en dépit des explications techniques d’Amnesty International et de l’expertise des spécialistes de Pegasus, déjà éprouvée par le passé.

    Cette petite musique est entendue jusqu’à Paris où elle est parfois reprise dans la bouche de responsables politiques. La justice, elle, a déjà commencé à travailler dans le cadre de l’enquête préliminaire ouverte après la plainte de Mediapart.

    Pris de cours par ces révélations, l’exécutif a d’abord cherché à conserver un équilibre précaire dans son expression. Il s’agissait de montrer que les faits étaient pris très au sérieux, sans pour autant sombrer dans la panique générale ou le procès en incompétence.

    L’Algérie aujourd’hui