Étiquette : Etats-Unis

  • Jérusalem, boomerang du Proche-Orient

    La colonisation de la partie orientale de la ville était sortie des radars. Elle s’impose de nouveau à ceux qui l’avaient enterrée.

    Dans le «nouveau Proche-Orient» dessiné par Benyamin Netanyahou et Donald Trump, l’esplanade des Mosquées devait être une attraction touristique pour les visiteurs des Émirats, de Bahreïn ou du Maroc, après la normalisation des relations entre lsraël et ces États arabes. Une gifle pour les Palestiniens, spectateurs impuissants d’une paix conçue sans eux et contre eux. Leurs revendications sur la partie orientale de la ville étant hors sujet depuis le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem et la reconnaissance par les États-Unis de la ville comme capitale d’Israël.

    L’alignement américain marquait la consécration diplomatique de plus de cinquante ans de colonisation israélienne de Jérusalem-Est. Maison par maison, quartier par quartier, à coup d’expulsions de familles palestiniennes justifiées par les tribunaux israéliens. Dans l’indifférence générale, même lorsque l’occupation des propriétés palestiniennes par des colons israéliens se déroule sous le nez des diplomates, dans le quartier très prisé de Sheikh Jarrah, siège de nombreux consulats à Jérusalem-Est.

    Or, s’il est bien un domaine dans lequel Joe Biden ne semble pas vouloir rompre avec l’héritage de son prédécesseur, c’est bien celui de la question palestinienne. Le président a averti qu’il ne remettrait pas en question le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem. Il ne paraît pas plus pressé d’annuler les autres décisions favorables à Israël prises par Donald Trump.

    Soucieux de réussir son départ d’Afghanistan et son retour dans l’accord sur le nucléaire iranien, Joe Biden a mis le conflit israélo-palestinien sous la pile de ses priorités. L’embrasement de Jérusalem rappelle à l’Amérique qu’il ne disparaîtra pas, tant que persistera l’occupation d’un peuple par un autre.

    Malika Nedir, Cheffe de la Rubrique Monde

    Tribune de Genève, 10 mai 2021

    Etiquettes : Palestine, Israël, Al Qods, Jérusalem, Etats-Unis, Joe Biden,

  • Sahara Occidental : Ce que le Maroc veut, ce qu’il obtient et ce qu’il doit faire

    Depuis le 13 novembre 2020, l’expansion et l’occupation du Royaume du Maroc vit dans un brouhaha diplomatique, politique et militaire sans précédent après qu’il se soit assuré de son échec total à continuer de parier sur le fait accompli au Sahara Occidental comme statut final et de sa certitude et conviction que l’erreur de Guerguerat était fatale à tous points de vue le conduisant à un destin inconnu et au bord de l’effondrement total.

    Le discours de M. Guterres le vendredi 7 mai devant les représentants des Etats membres de l’Assemblée générale des Nations Unies n’était pas du tout innocent. Le fait qu’il ait dit qu’il avait soumis 12 candidats pour le poste d’envoyé personnel depuis la démission de M. Kohler, et qu’il ait admis qu’il n’y avait pas d’envoyé personnel jusqu’à présent, est une tentative misérable de M. Guterres pour couvrir le rejet par le Maroc de sa dernière proposition, l’Italien M. De Mistura, mais M. Dujarric l’a dit d’une autre manière lorsqu’il a confirmé que « Guterres continuera à proposer d’autres noms pour le poste de l’ONU. »

    Ce rejet s’inscrit pleinement dans la politique de confusion et de perte de repères que mène aujourd’hui le Maroc.

    – L’adhésion à l’Union africaine s’est transformée en malédiction après la récente décision du Conseil africain de paix et de sécurité et l’échec de toutes les tentatives d’influencer la réalité sahraouie.

    – L’erreur de Guerguerat en août 2016 a été fatale à tous points de vue, et la guerre qu’il n’avait pas du tout voulue et à laquelle il n’était pas prêt a repris le 13 novembre 2020.

    – L’ouverture de consulats dans les villes occupées du Sahara occidental et la dilapidation de l’argent des contribuables marocains au profit de fonctionnaires corrompus n’ont rien arrangé, ni même empêché la tenue du sommet du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine…

    – La décision de Trump a transformé une malédiction et a donné à la question sahraouie une nouvelle dimension et plus de visibilité qui n’aurait pas eu lieu sans la politique de marchandage sur laquelle le Maroc a parié.

    Tout a échoué, et tout a basculé à 180 degrés sans avertissement préalable.
    Le Maroc ne sait plus ni ce qu’il veut ni de qui il peut obtenir quoi.

    – Le Maroc a attaqué l’État du Kenya pendant sa présidence de la réunion prévue du Conseil africain de paix et de sécurité, après ses tentatives infructueuses pour l’empêcher d’avoir lieu.

    – Le Maroc a réprimandé la Mauritanie en la tenant pour responsable d’avoir reçu l’envoyé du président sahraoui, M. Al-Bashir Mustafa Al-Sayed, sans son autorisation préalable.

    Ce que veut le Maroc

    – Le Maroc veut que l’Union africaine reste à l’écart de la question sahraouie, et en même temps il veut que l’UA exclue la république sahraouie qui est un membre et un État fondateur de l’UA, violant ainsi l’acte constitutif et la charte de l’UA.

    – Le Maroc veut que les États-Unis d’Amérique s’en tiennent à la décision de Trump et impose même sa volonté à l’administration Biden en affirmant que la déclaration présidentielle est juridiquement contraignante, et que son administration doit légitimer l’occupation marocaine du Sahara occidental pour maintenir ses relations avec Israël. En outre, le Maroc veut forcer la nouvelle administration américaine à accepter que l’Iran est dans la région soutenant le Polisario et que la Chine est dans la région, et aussi la Russie, le Hezbollah, les Houthis, et, …. comme si les États-Unis ont besoin du Maroc pour savoir ce qui se passe dans le monde.

    Le Maroc veut que les Nations Unies nomment un envoyé personnel du Secrétaire Général des Nations Unies au Sahara Occidental, soit du Maroc, du Sénégal ou du Burkina Faso, et la seule solution viable pour être sur la table des négociations est l’autonomie, et pour la Minurso de ne pas surveiller les droits de l’homme, les ressources naturelles, ou quoi que ce soit mais de surveiller exclusivement le cessez-le-feu. Quant à la mission des Nations Unies, le Maroc souhaite qu’elle soit une antenne du ministère de l’Intérieur marocain.

    – Le Maroc veut que l’Espagne obtienne son accord pour recevoir le président sahraoui Ibrahim Ghali pour un traitement médical et donner à Rabat le droit d’administrer les tribunaux et le système judiciaire espagnols et de juger n’importe qui par n’importe quelle sentence selon les mesures du roi marocain. En outre, le Maroc veut être celui qui détermine les relations extérieures de l’Espagne et ses relations internationales, décidant ainsi avec qui l’Espagne doit traiter et avec qui elle ne doit pas, exactement comme la France le fait avec le Maroc lui-même, sur la base du traité d’Aix-les-Bains.

    – Le Maroc veut que l’Espagne aborde les droits de l’homme exactement comme il le fait. Le Maroc a une histoire complètement sombre dans le domaine des droits de l’homme, et parle d’oppression, d’arrestation et de viol comme s’il s’agissait de la Suède ou de la Norvège.

    – Le Maroc veut que l’Allemagne bénisse la décision de Donald Trump, que l’Amérique elle-même n’a pas béni, et qu’elle reconnaisse la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. En outre, il demande à l’Allemagne d’inclure le Maroc dans les réunions sur la sécurité et la paix qui concernent des régions avec lesquelles le Maroc n’a pas de frontières, et que l’Allemagne ne prenne aucune décision concernant ses affaires intérieures ou extérieures, ni aucune position, sauf après l’avoir consulté ; la diplomatie marocaine qui est dotée de sagesse et de droiture absolue alors que le Maroc lui-même reçoit ses ordres de la France.

    – Le Maroc veut que l’Union européenne légitime son occupation du Sahara occidental, soutienne ses positions, pousse l’UE à piétiner ses décisions, ses institutions et les positions de ses pays, et dise que le front Polisario vole l’aide humanitaire, qu’il recrute des enfants pour la guerre et viole les droits de l’homme, sinon quel est le sens du partenariat si de telles allégations sans fondement ne sont pas adoptées par cette organisation continentale.

    – Le Maroc veut que la Grande-Bretagne n’adopte pas une position qui soutient le respect du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et piétine les décisions de justice et permette le pillage illégal des ressources naturelles du peuple sahraoui.

    – Le Maroc veut qu’Amnesty International accuse le journaliste marocain emprisonné Omar Radi de servir des parties étrangères et d’espionnage.

    – Le Maroc veut que Human Rights Watch reconnaisse que les autres journalistes éminents, Raissouni et Bouachrine, sont des délinquants sexuels, des violeurs et des trafiquants d’êtres humains.

    – Le Maroc veut que The Front Line dise que le penseur marocain et défenseur des droits de l’homme Muaati Monjib est un voleur qui a volé des fonds publics et a été arrêté pour corruption.

    – Le Maroc veut que Reporters sans frontières dise que la liberté de la presse est meilleure au Maroc qu’en Suède, en Norvège et au Danemark.
    Et pour le chantage, et alors que la corde se resserre sur son occupation militaire brutale du Sahara Occidental, le Maroc tire chaque fois une carte et la jette sur la table en menaçant le monde de l’apocalypse à venir ; les cartes du terrorisme, de l’immigration illégale, du trafic humain et de la drogue.

    Ce que le Maroc obtient

    Alors, qu’est-ce que le Maroc a gagné de cette tension omniprésente, si ce n’est un échec ?
    Le régime de Rabat doit maintenant récolter les fruits de son arrogance

    – Le ministre espagnol des affaires étrangères dit au Maroc, en langage diplomatique, que la politique intérieure espagnole ne concerne en rien le Maroc, et que le partenariat ne signifie pas le traité colonial d’Aix-Les-Bains.

    – Le ministère allemand des affaires étrangères, de son côté, confirme que sa position sur la question sahraouie est fixe et ne s’écarte pas de la solution de l’autodétermination.

    – Le ministre britannique des Affaires étrangères réaffirme la position de la Grande-Bretagne en faveur du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et souligne la nécessité de respecter les décisions de justice concernant le dossier des ressources naturelles.

    – De hauts responsables politiques des États-Unis d’Amérique qui sont considérés comme des références de leur politique étrangère, de Baker à Ross en passant par John Kerry et John Bolton affirment que le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance est inaliénable et ils parlent pour la première fois du modèle d’État du Sahara Occidental et de sa viabilité.

    – La nouvelle administration américaine reconnaît l’existence d’une guerre entre l’armée de libération du Polisario et le Maroc et exprime une position qui n’a rien à voir avec Trump lors de la dernière réunion du Conseil de sécurité.

    – Ce même département d’État américain a explicitement et instantanément démenti ce que le ministre marocain des Affaires étrangères avait déclaré par le biais du correspondant du site d’information Exion, Barak Rafid, affirmant que l’administration Biden ne reviendra pas sur la décision de Trump concernant le Sahara occidental et le Maroc.

    – Le Maroc s’est bousculé auprès de l’American Israeli Public Affairs Committee appelé AIPAC pour obtenir le soutien de l’organisation à la décision de Trump, ou au moins obtenir des garanties que la décision de Trump au niveau des États-Unis d’Amérique restera en vie, même pour un petit moment, mais le Maroc n’a obtenu ni cela ni le premier.

    – L’Iran condamne la tentative du Maroc de l’impliquer dans des problèmes qu’il n’a pas réussi à résoudre.

    – La Libye se dirige vers une véritable solution sans le Maroc, et le Mali progresse vers la stabilité sans le Maroc.

    – L’Union européenne renouvelle ses positions et dément la propagande du Maroc sur l’enrôlement d’enfants dans la guerre par le Polisario et réfute les affirmations du Maroc sur la question de l’aide humanitaire.

    – Depuis Genève, les Nations Unies mettent en garde le Maroc : « torture et persécution judiciaire, menaces et surveillance constante, une grave agression contre les défenseurs des droits de l’homme au Sahara Occidental. Les deux rapporteurs spéciaux de l’ONU sur les défenseurs des droits de l’homme et la liberté d’expression ont exprimé leur préoccupation quant à l’absence de sécurité et l’existence d’un environnement hostile pour les défenseurs des droits de l’homme au Sahara occidental et au Maroc.

    – Enfin, la Croix-Rouge internationale exprime ses regrets de ne pas être en mesure de mener à bien sa mission dans les villes sahraouies occupées.

    – Et sur le terrain, les bombardements de l’armée sahraouie se poursuivent et s’intensifient de manière disproportionnée, et les ramifications destructrices de la guerre contre les troupes d’occupation marocaines ne peuvent être occultées par personne aujourd’hui.

    Ce que le Maroc doit faire

    Par conséquent, devant ces portes hermétiquement fermées, vers quelle direction l’occupation marocaine se dirige-t-elle aujourd’hui ?

    Pourtant, une seule porte est ouverte pour le Maroc ; le respect du droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance à travers un référendum équitable et démocratique pour mettre fin au chapitre du colonialisme non seulement au Sahara Occidental occupé mais aussi en Afrique.

    Mohamed Salem Ahmed Labeid

    Sumoudsh, 9 mai 2021

    Etiquettes : Maroc, Sahara Occidental, Espagne, Allemagne, Front Polisario, Etats-Unis,

  • La nouvelle équipe de la Maison Blanche vise à séparer science et politique

    WASHINGTON (AP) – Désireuse de tourner la page sur les années Trump, la Maison Blanche Biden lance une initiative visant à déterrer les problèmes passés de politisation de la science au sein du gouvernement et à renforcer les règles d’intégrité scientifique pour l’avenir.

    Un nouveau groupe de travail fédéral sur l’intégrité scientifique, composé de 46 personnes issues de plus de deux douzaines d’agences gouvernementales, se réunira pour la première fois vendredi. Sa mission est d’examiner, au cours de l’année 2009, les domaines dans lesquels la partisanerie a interféré avec ce qui était censé être des décisions fondées sur des preuves et des recherches et de trouver des moyens de tenir la politique à l’écart de la science gouvernementale à l’avenir.

    L’effort a été stimulé par les préoccupations selon lesquelles l’administration Trump a politisé la science d’une manière qui a mis des vies en danger, érodé la confiance du public et aggravé le changement climatique.

    « Nous voulons que les gens puissent faire confiance à ce que le gouvernement fédéral leur dit, qu’il s’agisse de prévisions météorologiques ou d’informations sur la sécurité des vaccins ou autres », a déclaré Jane Lubchenco, directrice adjointe pour le climat et l’environnement au Bureau de la politique scientifique et technologique de la Maison Blanche.

    Les gens ont besoin de savoir qu’il ne s’agit pas d’une décision arbitraire, de l’opinion instinctive de quelqu’un sur quelque chose », a ajouté Alondra Nelson, directrice adjointe du bureau pour la science et la société. Nelson et Lubchenco ont parlé à l’Associated Press avant l’annonce lundi de la première réunion du groupe de travail et d’une partie de sa composition. Cette initiative découle d’un mémo présidentiel du 27 janvier exigeant « l’élaboration de politiques fondées sur des preuves ».

    Les scientifiques et d’autres personnes ont accusé l’administration Trump de mettre de côté les preuves scientifiques et d’injecter de la politique dans des questions telles que le coronavirus, le changement climatique et même la question de savoir si l’ouragan Dorian menaçait l’Alabama en 2019.

    Naomi Oreskes, une historienne de l’Université de Harvard qui a écrit sur les attaques contre la science dans le livre « Merchants of Doubt », a déclaré que la politisation de la science mine la capacité de la nation à résoudre des problèmes graves qui affectent la santé des Américains, leur bien-être et l’économie.

    « Il ne fait aucun doute que le nombre de morts américains dus au covid-19 a été beaucoup plus élevé qu’il n’aurait dû l’être et que le refus précoce de l’administration de prendre la question au sérieux, d’écouter et d’agir en fonction des conseils des experts et de communiquer clairement a contribué de manière substantielle à ce nombre de morts », a déclaré Mme Oreskes dans un courriel.

    Mme Lubchenco, qui a dirigé l’Administration nationale des océans et de l’atmosphère (NOAA) sous l’administration Obama, a évoqué un incident survenu pendant les années Trump, connu sous le nom de « Sharpiegate », comme un exemple clair d’ »interférence politique avec des informations scientifiques potentiellement extraordinairement dangereuses ».

    Pendant le Sharpiegate, la NOAA a réprimandé certains météorologues pour avoir tweeté que l’Alabama n’était pas menacé par l’ouragan, contredisant ainsi le président Donald Trump, qui avait déclaré que l’Alabama était en danger. L’affaire est devenue connue sous le nom de Sharpiegate après que quelqu’un à la Maison Blanche a utilisé un Sharpie noir – un stylo favori de Trump – pour modifier la carte d’alerte officielle du National Hurricane Center afin d’indiquer que l’Alabama pourrait être dans la trajectoire de la tempête. Un rapport de l’inspecteur général de 2020 a révélé que l’administration avait violé les règles d’intégrité scientifique.

    L’affaire Sharpiegate a révélé les failles du système d’intégrité scientifique mis en place en 2009 par le président Barack Obama, a déclaré Mme Lubchenco. Il n’y a pas eu de conséquences lorsque l’agence a violé les règles, a déclaré Mme Lubchenco. Il n’y a pas eu non plus de conséquences pour l’agence mère de la NOAA, le ministère du commerce. C’est pourquoi l’administration du président Joe Biden demande des règles d’intégrité scientifique dans l’ensemble du gouvernement et pas seulement dans les agences à vocation scientifique, a-t-elle ajouté.

    Selon Mme Lubchenco, la réticence à lutter contre le changement climatique au cours des quatre dernières années a retardé les progrès en matière de réduction des émissions de gaz qui piègent la chaleur. « Cela aura inévitablement pour conséquence que le problème sera pire qu’il ne devrait l’être », a-t-elle déclaré.

    « Ce que nous avons vu dans la dernière administration, c’est que la suppression de la science, la réaffectation des scientifiques, la distorsion des informations scientifiques autour du changement climatique n’était pas seulement destructive, mais contre-productive et vraiment problématique », a déclaré Mme Lubchenco.

    Kelvin Droemeier, qui a servi de conseiller scientifique de Trump, a répété dans un courriel ce qu’il a dit au Congrès lors de son audition de confirmation : « L’intégrité dans la science est tout », et la science devrait être autorisée à être faite « d’une manière honnête, pleine d’intégrité sans être encombrée par l’influence politique. »

    M. Droegemeier a déclaré que le bureau scientifique de la Maison Blanche, où Nelson et Lubchenco travaillent actuellement et où il était auparavant, s’occupe davantage de politique et n’a pas le pouvoir d’enquêter ou d’appliquer des règles.

    La semaine dernière, les législateurs républicains ont accusé la Maison Blanche de Biden de faire de la politique avec la science lorsqu’elle a retiré la climatologue Betsy Wetherhead, qui avait été félicitée par les scientifiques de l’atmosphère, de la direction de l’évaluation nationale du climat. Mme Lubchenco a déclaré qu’il était normal pour une nouvelle administration d’engager de nouvelles personnes.

    L’historien Douglas Brinkley, de l’université Rice, a déclaré que l’administration Biden faisait de gros efforts, mais qu’elle n’abordait pas tout à fait correctement la tâche de rétablir la science.

    « Il est impossible d’écarter la politique de la science », a déclaré M. Brinkley. « Mais vous pouvez faire de votre mieux pour l’atténuer ».

    Il a ajouté que le fait de ne remonter que jusqu’aux administrations Obama et Trump condamnera les efforts du groupe de travail à ne pas être lui-même politisé et regardé de manière partisane.

    Ce qu’il faut vraiment, selon M. Brinkley, c’est « aller à la racine des choses » et remonter jusqu’en 1945. Les présidents Dwight Eisenhower, un républicain, et John F. Kennedy, un démocrate, ont tous deux mis l’accent sur les efforts scientifiques et ont essayé d’éviter la politique. Mais Mme Brinkley a déclaré qu’avec le début du mouvement écologiste, la distraction de la guerre du Vietnam et les entreprises qui considéraient que la science conduisait à trop de réglementation pendant l’ère Reagan, l’admiration unifiée du public pour la science s’est effondrée.

    Mme Oreskes, de Harvard, a déclaré que ses recherches indiquaient que Ronald Reagan était « le premier président de l’ère moderne à faire preuve d’indifférence et parfois même de mépris à l’égard des preuves scientifiques ».

    Selon M. Nelson, le nouveau groupe de travail se concentrera davantage sur l’avenir que sur le passé.

    « On demande à chaque agence de démontrer réellement qu’elle prend des décisions fondées sur les meilleures preuves scientifiques disponibles », a-t-il ajouté.

    L’une des quatre coprésidentes du groupe de travail est Francesca Grifo, responsable de l’intégrité scientifique de l’Agence de protection de l’environnement depuis 2013. Elle s’est heurtée à l’EPA de Trump, qui n’a pas voulu l’autoriser à témoigner lors d’une audience du Congrès en 2019 sur l’intégrité scientifique.

    Les autres sont Anne Ricciuti, directrice adjointe pour les sciences à l’Institut des sciences de l’éducation du ministère de l’Éducation, Craig Robinson, directeur du Bureau de la qualité et de l’intégrité scientifiques à l’U.S. Geological Survey, et Jerry Sheehan, directeur adjoint de la Bibliothèque nationale de médecine.

    Associated Press, 10 mai 2021

    Etiquettes : Etats-Unis, Maison Blanche, Joe Biden, science, politique,

  • Institut espagnol : La position de Washington et le réarmement du Maroc, une menace pour l’Espagne

    Le réarmement du Maroc et sa consolidation au Sahara pourraient constituer un défi pour l’intégrité territoriale de l’Espagne.

    La reconnaissance américaine intervient dans un contexte de faiblesse des rivaux marocains et de réorganisation des relations existantes dans la région.

    Des projets économiques tels que le port de Tanger-Med, qui concurrence directement, avec des avantages importants, Algésiras, Valence et Barcelone, sont un autre facteur de déstabilisation des intérêts de l’Espagne.
    Lire le rapport « Le Maroc, le détroit de Gibraltar et la menace militaire pour l’Espagne ».
    La récente reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental est le dernier d’une série de succès diplomatiques, politiques et économiques pour le royaume alaouite. En outre, la puissance politique et militaire croissante du Maroc représente des défis évidents pour les intérêts économiques européens et l’intégrité territoriale de l’Espagne. Telles sont les principales conclusions du rapport Le Maroc, le détroit de Gibraltar et la menace militaire pour l’Espagne, publié par l’Institut pour la sécurité et la culture et rédigé par Guillem Colom, Guillermo Pulido et Mario Guillamó.

    Cette reconnaissance, qui engage le Maroc à normaliser ses relations avec Israël et que, selon certains rapports, l’administration Biden n’a pas l’intention d’annuler, fait partie des accords d’Abraham, grâce auxquels les États-Unis espèrent que « la normalisation des relations entre les pays arabes les plus puissants et Israël obligera les Palestiniens à signer un accord de paix avec Jérusalem aux conditions les plus avantageuses pour Netanyahu ». Les accords d’Abraham visent également à améliorer les relations stratégiques et de sécurité afin de relever le grave défi stratégique que représente l’Iran.

    Les auteurs du rapport expliquent que le Maroc a pu profiter de cette stratégie américaine pour obtenir un succès diplomatique à très faible coût, car « Israël et le Maroc entretiennent depuis longtemps de profondes relations économiques, politiques et sécuritaires. » Il reste à voir quel serait le coût intérieur d’une normalisation officielle des relations du Maroc avec Israël.

    La reconnaissance américaine porte également atteinte à l’influence que l’Espagne et, surtout, la France conservent au Maghreb et renforce la position des États-Unis en tant que puissance d’équilibre par le biais de leur allié marocain. Dans un contexte de faiblesse des autres pays de la région, d’autonomie stratégique de l’Europe et d’influence sino-russe croissante, pour les Etats-Unis. « Le Maroc devient un pari solide en tant que garant de la sécurité régionale et un agent pour canaliser ses intérêts nationaux ».

    Sur le plan diplomatique, la reconnaissance américaine profite et renforce le royaume alaouite dans son différend avec l’Union européenne sur l’exploitation des eaux du Sahara occidental, ainsi que l’aspiration du Maroc à étendre son plateau continental à 350 miles nautiques et à étendre sa zone économique exclusive, entrant en conflit direct avec les eaux des îles Canaries. Les intérêts économiques de ces eaux vont au-delà de la pêche, car les monts sous-marins des îles Canaries sont riches en métaux tels que le tellure, le cobalt et le plomb. Le soutien américain pourrait enhardir le Maroc vis-à-vis de ses pays voisins et conduire le royaume alaouite à « prendre des décisions qui portent unilatéralement atteinte à la souveraineté d’autres États ». Une semaine après la reconnaissance de Trump, le Premier ministre marocain a défendu que « le jour viendra où nous rouvrirons la question de Ceuta et Melilla, des territoires marocains comme le Sahara ».

    Sur le plan économique, la reconnaissance américaine favorise l’ouverture de nouveaux marchés et donne un sérieux coup de pouce à la volonté de leadership économique du Maroc, qui est déjà la cinquième puissance économique d’Afrique et l’un des « Lions africains ». Le Sahara occidental s’inscrit dans les plans de développement économique du royaume alaouite, d’abord comme une source d’exportation, principalement de phosphates. Deuxièmement, il est essentiel pour le principal projet d’infrastructure du Maroc, le port de Tanger-Med. En tant que point final du réseau d’infrastructure commerciale de « l’axe Tanger-Dakar », son succès et sa vision future dépendent du transit libre et sûr des marchandises terrestres à travers le Sahara occidental. Troisièmement, le Sahara Occidental a des implications économiques et géopolitiques importantes en raison du projet de construction d’un gazoduc transsaharien reliant le Nigeria, le Maroc et l’Europe. L’essentiel est qu’en plus de fournir du gaz à 13 nations d’Afrique de l’Ouest, ce projet ébranlera le monopole gazier de l’Algérie.

    Ce dernier point est important par rapport au conflit historique entre le Maroc et l’Algérie et à la nouvelle course aux armements entre les deux pays. En plus de ses ambitions politiques et économiques, le Maroc aspire à la suprématie militaire régionale, pour laquelle il a notamment mené depuis 2017 un plan de réarmement quinquennal de 22 milliards de dollars avec le soutien des États-Unis et de l’Arabie saoudite. Ce réarmement a éliminé les principales faiblesses militaires du Maroc et a doté ses forces armées d’importantes capacités avancées, qui visent à détrôner l’Algérie, qui ne traverse pas son meilleur moment, en tant que principale puissance militaire régionale.

    Outre l’instabilité stratégique que cette course génère à court et moyen terme en Afrique du Nord, à long terme, le réarmement marocain pourrait poser un défi aux capacités militaires de l’Espagne. Ceci, ajouté à des projets économiques tels que Tanger-Med, qui concurrence directement et avec des avantages significatifs les ports d’Algeciras, de Valence et de Barcelone, et aux ambitions politiques et territoriales du Maroc, signifie que les intérêts économiques et l’intégrité territoriale de l’Espagne pourraient être sérieusement menacés à l’avenir.

    Instituto de Seguridad y Cultura, 06 mai 2021

    Etiquettes : Espagne, Maroc, Etats-Unis, Sahara Occidental, Donald Trump, intégrité terroriale, Ceuta, Melilla,

  • Une cyberattaque au moyen d’un rançongiciel met hors service un important pipeline américain, selon la société

    Colonial Pipeline a été la cible d’une cyberattaque vendredi soir.

    Une cyberattaque a forcé la fermeture d’un important gazoduc aux États-Unis, qui fournit 45 % du carburant consommé sur la côte Est.

    La cyberattaque contre Colonial Pipeline, qui va de Houston à Linden, dans le New Jersey, a commencé à 19 heures vendredi soir, selon un rapport de l’Agence fédérale de gestion des urgences examiné par ABC News.

    « Nous avons mis hors ligne de manière proactive certains systèmes pour contenir la menace, qui a temporairement interrompu toutes les opérations du pipeline, et affecté certains de nos systèmes informatiques », a déclaré la société dans un communiqué.

    Colonial Pipeline a déclaré dans une mise à jour samedi que l’attaque impliquait un ransomware.

    Le réseau de Colonial fournit du carburant depuis les raffineurs américains de la côte du Golfe du Mexique jusqu’à l’est et au sud des États-Unis et transporte 2,5 millions de barils par jour d’essence, de diesel, de carburéacteur et d’autres produits par le biais de 5 500 miles de pipelines, a déclaré la société.

    On ne sait pas exactement combien de temps les pipelines seront fermés. La FEMA a indiqué que la fermeture affecterait d’autres pipelines, tels que le Buckeye and Twin Oaks Pipeline, qui traverse la région de New York, Long Island et le Maine.

    La société, basée à Alpharetta, en Géorgie, a déclaré qu’elle avait engagé une société de cybersécurité externe pour enquêter sur la nature et la portée de l’attaque et qu’elle avait également contacté les forces de l’ordre et les agences fédérales.

    « Colonial Pipeline prend des mesures pour comprendre et résoudre ce problème. À l’heure actuelle, notre objectif principal est le rétablissement sûr et efficace de notre service et nos efforts pour revenir à un fonctionnement normal. Ce processus est déjà en cours, et nous travaillons avec diligence pour résoudre ce problème et minimiser les perturbations pour nos clients et ceux qui comptent sur Colonial Pipeline », a déclaré la société.

    Le président Joe Biden a été informé de la situation, selon un porte-parole de la Maison Blanche.

    « Le gouvernement fédéral travaille activement pour évaluer les implications de cet incident, éviter toute perturbation de l’approvisionnement et aider la société à rétablir les opérations du pipeline aussi rapidement que possible », a déclaré le porte-parole.

    Le fonctionnaire a déclaré que l’administration s’adressait de manière proactive à l’ensemble du secteur pour s’assurer qu’ils disposent de protections permettant de détecter des attaques similaires.

    Le FBI a déclaré qu’il travaillait avec Colonial Pipeline sur l’attaque par ransomware.

    « Le FBI a été informé d’une perturbation du réseau chez Colonial Pipeline le 7 mai 2021 et travaille en étroite collaboration avec l’entreprise et les partenaires gouvernementaux », a déclaré le FBI. « Nous n’avons rien de plus à partager pour le moment ».

    L’Agence de cybersécurité et de sécurité des infrastructures a publié une déclaration disant qu’elle est « engagée » avec l’entreprise.

    « Nous sommes engagés avec l’entreprise et nos partenaires interagences concernant la situation », a déclaré Eric Goldstein, directeur adjoint exécutif de la division Cybersécurité de la CISA. « Cela souligne la menace que représente le ransomware pour les organisations, quels que soient leur taille ou leur secteur. Nous encourageons chaque organisation à prendre des mesures pour renforcer sa posture de cybersécurité afin de réduire son exposition à ce type de menaces. »

    La société de cybersécurité Fireye a confirmé à ABC News dimanche qu’elle aidait Colonial Pipeline avec ses systèmes à la suite de l’attaque.

    L’année dernière, Fireye a découvert le piratage massif de SolarWinds qui a affecté neuf agences gouvernementales.

    Le secrétaire d’État à la sécurité intérieure, Alejandro Mayorkas, a évoqué les dangers des ransomwares en début de semaine, compte tenu de la récente vague d’attaques de ce type, notamment le piratage de la police métropolitaine de Washington et du bureau du procureur général de l’Illinois.

    ABC News, 09 mai 2021

    Etiquettes : Etats-Unis, rançongiciel, Colonial Pipeline, cyberattaque, ransomware,

  • Les dirigeants européens reportent leur décision sur la levée des brevets de vaccins contre la COVID-19

    LISBONNE, 8 mai (Xinhua) — La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a déclaré samedi que les dirigeants européens comprennent qu’il y a des « questions plus urgentes » que la levée des brevets sur les vaccins contre la COVID-19.

    S’adressant aux journalistes à l’issue du sommet social de l’Union européenne (UE) tenu à Porto (Portugal), Mme von der Leyen a estimé que ce sujet « est important », mais qu’il serait discuté « à long terme, pas à court ou moyen terme ».

    Selon elle, l’Europe ne doit pas « perdre de vue les principales urgences », à savoir « la production de vaccins le plus rapidement possible et la manière dont ils seront distribués de façon juste et équitable ».

    « Jusqu’à présent, 400 millions de doses de vaccins ont été produites dans l’Union européenne. Et 50% d’entre elles – 200 millions de doses – ont été exportées vers 90 pays différents dans le monde. Nous invitons donc les autres à faire de même », a-t-elle ajouté.

    « C’est le meilleur moyen, à court terme, de remédier aux goulets d’étranglement et au manque de vaccins dans le monde », a dit Mme von der Leyen.

    « Nous avons désormais livré plus de 200 millions de doses à la population européenne. Nous sommes donc en bonne voie pour atteindre notre objectif de livrer suffisamment de doses en juillet pour vacciner 70% de la population adulte européenne. Près de 160 millions d’Européens ont déjà reçu une première dose de vaccin, soit plus de 25% de la population de l’UE », a-t-elle souligné.

    Elle a également annoncé que l’UE avait conclu les négociations avec BioNTech-Pfizer pour un nouveau contrat qui garantit 1,8 milliard de doses de vaccins jusqu’en 2023.

    Mme Von der Leyen s’est réjouie d’annoncer que les travaux juridiques et techniques relatifs au certificat de voyage de l’UE – le certificat de vaccination – sont en bonne voie pour que le système soit opérationnel en juin.

    Les Etats-Unis ont accepté mercredi de soutenir la levée des restrictions de propriété intellectuelle sur les vaccins contre la COVID-19 à l’Organisation mondiale du commerce.

    Xinhua, 09 mai 2021

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  • Mohamed-Seddik Benyahia, l’homme d’Etat dévoué et le diplomate infatigable

    L’homme politique et ancien ministre Mohamed Seddik Benyahia, décédé dans un accident d’avion le 3 mai 1982, incarnait l’homme d’Etat dévoué et le diplomate infatigable qui a fait connaitre la Guerre de libération dans le monde et servi le pays avec abnégation et humilité après l’indépendance.

    Né le 30 janvier 1932 à Jijel, Mohamed Seddik Benyahia, cet « homme hors normes », comme le qualifiait son compagnon de lutte, Rédha Malek, et au parcours irréprochable, avait marqué par son courage et son sens du sacrifice l’histoire du mouvement national et celle de l’Algérie combattante et indépendante. Le jeune militant qui a côtoyé plusieurs personnalités à l’image de Belaid Abdesselam et Lamine Khene, au lycée Albertini à Sétif, faisait déjà ses preuves en étant un membre actif et animateur de l’Union générale des étudiants musulmans algériens (UGEMA) et est l’un des partisans de 19 Mai 1956 qui a vu des centaines d’étudiants et de lycéens abandonner les amphis et les salles de classes pour rejoindre la Révolution.

    Diplômé en droit en 1954 de l’université d’Alger, le jeune Benyahia s’est fait remarquer sur la scène politique et s’est vu même confier d’importantes missions à l’étranger, à l’instar de la conférence de Bandung en 1955 à laquelle l’Algérie, qui était en guerre contre le colonialisme, avait pris part en tant que pays observateur. Benyahia, alors âgé de 23 ans, faisait partie de la délégation algérienne présidée par Ait Ahmed et M’hamed Yazid. Après la création de l’UGEMA, les autorités coloniales avaient lancé un mandat d’arrêt contre Benyahia et Lakhdar Ibrahimi, qui se trouvaient à l’époque à Jakarta. Pour assurer leur protection, les dirigeants du FLN avaient décidé de les affecter au bureau local du FLN en Indonésie.

    Le jeune militant a vite imposé son charisme et gravi les échelons dans la hiérarchie de la glorieuse Armée de libération nationale (ALN) en devenant le secrétaire général de la présidence du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), et membre de la délégation algérienne aux négociations des Accords d`Evian en 1962. Il avait également représenté, aux côtés de Rédha Malek, le GPRA lors d’une rencontre de négociations le 28 octobre 1961 à Bâle, en Suisse. Ses compagnons de lutte, dont les témoignages ont été recueillis lors de différentes commémorations de sa disparition, n’avaient cessé de brosser le profil d’un grand militant nationaliste et d’un diplomate au talent avéré et dont la mort était une grande perte pour l’Algérie. L’ancien Chef de Gouvernement et ami de lutte de Mohamed Seddik Benyahia durant la Guerre de libération nationale, lors d’une journée d’étude organisée en 2017 à l’université de Jijel, évoquait un homme « hors norme » qui a marqué de son emprunte les négociations d’Evian. Rédha Malek qui relatait le parcours révolutionnaire et diplomatique du militant nationaliste, affirmait que ses réalisations avaient « contribué au développement de l’histoire de l’Algérie contemporaine ». Il avait également mis en avant le rôle de Benyahia dans les négociations d’Evian, soulignant « ses compétences tactiques » et « son intelligence diplomatique » durant les négociations entre le Front de libération nationale (FLN) et la délégation française. Lors d’une cérémonie commémorant le 34e anniversaire de la disparition de Mohamed Seddik Benyahia, feu Zoheir Ihadadène avait évoqué les qualités d’un homme « nationaliste, intègre et compétent « , ajoutant qu’il était aussi un « fin politicien, doublé d’un diplomate et juriste aux talents avérés ». A l’indépendance, le moudjahid avait assumé plusieurs postes d’ambassadeur et de ministre, notamment ministre de la culture, de l’enseignement supérieur, ministre de l’information et celui des affaires étrangères.

    Désigné à la tête de la diplomatie algérienne en 1979, Mohamed Seddik Benyahia était au service de la paix dans le monde. L’historie retient encore aujourd’hui, 39 ans après sa disparition dans un tragique accident d’avion, son rôle dans le dénouement de la crise des 52 américains retenus otages pendant 444 jours au siège de l’ambassade des Etats-Unis à Téhéran, en amenant les deux parties à signer l’accord d’Alger le 19 janvier 1981. Le ministre des Affaire étrangères poursuivait sa mission de paix et s’était engagé, quelques mois après l’affaire des otages américains, dans le bourbier irako-iranien voulant à tout prix mettre un terme à une longue guerre dévastatrice. Après avoir échappé à la mort dans un crash d’avion en 1979 au Mali, il trouvera la faucheuse, avec 13 autres cadres du ministère, le 3 mai 1982, dans un autre crash de l’avion qui le transportait en direction de l’Iran où il était en mission de médiation dans le conflit frontalier entre Téhéran et Baghdad. Dans une lettre adressé au Martyr Benyahia, publiée au lendemain de son enterrement dans le quotidien El Moudjahid, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Salah Dembri, rendait hommage à un homme d’une « conscience aigue de l’injustice et cette foi nationaliste profonde qu’il sut toujours offrir aux influences harmonieuses et salutaires du devenir universel, sans jamais l’enfermer dans une crispation stérilisante, ni dans un quelconque rabougrissement desséchant ». « Il aimait à rappeler que l’indépendance n’est pas une fin en soi, mais qu’elle devait, dans cette conjonction du passé et du présent, favoriser le transfert indispensable de la Nation à la société et l’émergence de citoyens nouveaux, d’Algériens totalement libres et totalement libérés », poursuivait feu Dembri, dans sa dernière lettre à Benyahia (APS)

    APS

    Etiquettes : Algérie, Mohamed Seddik Benyahia, diplomatie, Iran, Irak, Etats-Unis,

  • La reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental et son réarmement constituent un défi pour l’Espagne.

    Selon un rapport publié jeudi par l’Institut pour la sécurité et la culture

    Un rapport publié jeudi par l’Institut pour la sécurité et la culture et rédigé par Guillem Colom, Guillermo Pulido et Mario Guillamó, intitulé « Le Maroc, le détroit de Gibraltar et la menace militaire pour l’Espagne » met en garde contre le défi que représentent pour l’Espagne les succès diplomatiques, politiques et économiques du royaume alaouite, ainsi que sa puissance politique et militaire croissante.

    Cette reconnaissance, sur laquelle l’administration Biden ne semble pas avoir l’intention de revenir, s’inscrit dans le cadre des « Accords d’Abraham », par lesquels les États-Unis cherchent à « normaliser les relations des pays arabes les plus puissants avec Israël » et à améliorer les relations stratégiques et sécuritaires afin de faire face au grave défi stratégique que représente l’Iran.

    Les auteurs du rapport expliquent que Rabat a pu profiter de cette stratégie américaine pour obtenir un succès diplomatique à très faible coût, puisque « Israël et le Maroc entretiennent depuis longtemps des relations économiques, politiques et sécuritaires profondes ». La reconnaissance américaine réussit également à saper l’influence que l’Espagne et, surtout, la France maintiennent au Maghreb et renforce la position des États-Unis en tant que puissance d’équilibre par le biais de leur allié marocain.

    TIRAILLEMENTS AVEC L’UNION EUROPÉENNE

    Sur le plan diplomatique, la décision américaine renforce Rabat dans sa lutte avec l’Union européenne sur l’exploitation des eaux du Sahara occidental, ainsi que l’aspiration du Maroc à étendre son plateau continental à 350 miles nautiques et à étendre sa zone économique exclusive, entrant en conflit direct avec les eaux des îles Canaries. Les intérêts économiques de ces eaux vont au-delà de la pêche, car les monts sous-marins des îles Canaries sont riches en métaux tels que le tellure, le cobalt et le plomb.

    Le soutien de Washington pourrait « enhardir » le Maroc vis-à-vis de ses pays voisins et l’amener à « prendre des décisions qui portent unilatéralement atteinte à la souveraineté d’autres États ». Une semaine après la reconnaissance de Trump, le Premier ministre marocain a défendu que « le jour viendra où nous rouvrirons la question de Ceuta et Melilla, des territoires marocains comme le Sahara ».

    D’autre part, le Sahara Occidental a des implications économiques et géopolitiques importantes en raison du projet de construction d’un gazoduc transsaharien reliant le Nigeria, le Maroc et l’Europe. L’essentiel est qu’en plus de fournir du gaz à 13 nations d’Afrique de l’Ouest, ce projet ébranlera le monopole gazier de l’Algérie.

    Le Maroc aspire à la suprématie militaire régionale, pour laquelle il a notamment mené depuis 2017 un plan de réarmement quinquennal de 22 milliards de dollars avec le soutien des États-Unis et de l’Arabie saoudite.

    Ce réarmement a éliminé les principales faiblesses militaires du Maroc et a doté ses forces armées d’importantes capacités avancées, qui visent à détrôner une Algérie qui ne traverse pas son meilleur moment en tant que principale puissance militaire régionale.

    À long terme, le réarmement du Maroc pourrait constituer un défi pour la capacité militaire de l’Espagne. Ceci, ajouté aux projets économiques tels que Tanger-Med, qui concurrence directement les ports d’Algésiras, de Valence et de Barcelone, et aux ambitions politiques et territoriales de Rabat, représente un véritable défi pour l’Espagne.

    SERVIMEDIA, 06 MAI 2021

    Etiquettes : Maroc, Espagne, Algérie, armée, Etats-Unis, Sahara Occidental,

  • Sahara occidental : le Maroc se fâche avec tout le monde

    Le conflit au Sahara occidental affecte sérieusement les relations diplomatiques entre le Maroc et deux de ses principaux partenaires européennes, l’Espagne et l’Allemagne.

    Les choses ne se passent pas tout à fait comme souhaité et attendu par le Maroc dans le dossier du Sahara occidental. En décembre dernier, le royaume avait signé un deal triangulaire avec Israël et les États-Unis en vertu duquel il établissait des relations avec Israël, et Donald Trump reconnaissait la souveraineté marocaine sur les territoires du Sahara occidental occupé.

    Plus de quatre mois après, les dividendes attendus ne s’enchaînent pas et le Maroc se retrouve « fâché » avec au moins deux grands pays européens, l’Allemagne et l’Espagne, tandis que rien de définitif n’est acquis concernant la position des États-Unis sur la question.

    C’est avec l’Allemagne que la crise est allée le plus loin. Le 1er mars, le Maroc avait décidé de couper tout contact avec l’ambassadeur d’Allemagne à Rabat. Ce jeudi 6 mai, il a annoncé le rappel de son ambassadrice à Berlin.

    « La République fédérale d’Allemagne a multiplié les actes hostiles et les actions attentatoires à l’égard des intérêts supérieurs du royaume », a affirmé le ministère marocain des Affaires étrangères dans un communiqué.

    Le royaume n’apprécie pas la position de l’Allemagne sur la question du Sahara occidental, l’accusant d’actes « hostiles » et d’ « activisme antagonique » depuis la reconnaissance par l’ex-président américain Donald Trump de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.

    Il reproche aussi à l’Allemagne son « acharnement continu à combattre » son rôle régional du Maroc. Celui-ci n’avait pas été invité au sommet de Berlin sur la Libye en janvier 2020. Autre grief retenu à l’égard du pays d’Angela Merkel, sa « complicité à l’égard d’un ex-condamné pour des actes terroristes », en référence à Mohamed Hajib, un Germano-Marocain condamné en 2010 par la justice marocaine à dix ans de réclusion pour « terrorisme ».

    La contrepartie de la reconnaissance d’Israël risque de tomber à l’eau
    Si, avec l’Allemagne, le Sahara occidental n’est pas le seul sujet de discorde, avec l’Espagne, c’est essentiellement cette question qui brouille les relations entre les deux pays en ce moment. Précisément, l’hospitalisation du président de la République sahraouie, Brahim Ghali, dans un hôpital espagnol. M. Ghali est atteint de Covid-19.

    Dans un premier temps, des sources marocaines, notamment médiatiques, ont tenté de faire croire que le président de la RASD a reçu une convocation de la justice espagnole.

    Une information qui se trouve démentie de fait par la colère du Maroc, qui dénonce « l’inaction de la justice espagnole ». La diplomatie marocaine reproche à l’Espagne « un acte grave et contraire à l’esprit de partenariat et de bon voisinage », et évoque des « manœuvres ourdies derrière le dos d’un partenaire et d’un voisin ».

    L’Espagne a expliqué qu’elle a reçu M. Ghali pour des considérations « humanitaires ».

    Le fait que les autorités espagnoles n’aient pas informé leurs homologues marocaines de l’hospitalisation de M. Ghali en Espagne n’est pas une « omission » pour la diplomatie marocaine qui estime qu’« il s’agit d’un acte prémédité, d’un choix volontaire et d’une décision souveraine de l’Espagne, dont le Maroc prend pleinement acte » et « en tirera toutes les conséquences ».

    Avec les États-Unis, ce n’est pas la lune de miel non plus. Depuis le départ de Donald Trump de la Maison Blanche, les Marocains redoutent fortement une renonciation de son successeur Joe Biden à la reconnaissance de la marocanité du Sahara occidental.

    Et la dernière désillusion en date du Maroc sur la question est survenue la semaine dernière. Il s’agit du démenti apporté à une information faisant état de la décision de l’administration Biden de maintenir de décret de Trump.

    « Aucune décision de ce type n’a été prise. Nous menons des consultations particulièrement avec les parties sur la meilleure voie à suivre, et on a rien de plus à annoncer », a déclaré un porte-parole du département d’État américain sous couvert de l’anonymat. C’est toute la contrepartie des relations établies avec Israël qui risque de tomber à l’eau.

    TSA-Algérie, 08 mai 2021

    Etiquettes : Maroc, Sahara Occidental, Front Polisario, Allemagne, Etats-Unis, Espagne, ONU,

  • Mohamed Seddik Benyahia, un monument de la diplomatie algérienne au destin tragique

    Militant indépendantiste, homme d’État remarquable et brillant diplomate au destin tragique, Mohamed Seddik Benyahia était un illustre enfant de l’Algérie. Le 3 mai 1982, alors qu’il se trouve à bord d’un Grumman Gulfstream II, son avion est abattu par le tir d’un missile irakien, au dessus de la frontière irano-turque. Retour sur le parcours de celui qu’on a parfois nommé « le Talleyrand algérien ».

    De l’avocat au diplomate

    Né à Jilel le 30 janvier 1932, il est diplômé d’une licence de droit à l’université d’Alger, et s’inscrit au barreau de la capitale dès 1953. En sa qualité d’avocat, il défendit notamment Rabah Bitat, l’un des 6 fondateurs du FLN. En 1955 il participe à la fondation de l’UGEMA – Union générale des étudiants musulmans algériens – dont il prend la présidence, et qui rejoint le FLN en 1956. Il est l’un des instigateurs de la grève estudiantine lancée par l’UGEMA le 19 mai 1956, qui a été un succès pour le mouvement national. Il devient un cadre du FLN, rapidement il intègre les délégations diplomatiques chargées de représenter le parti à l’étranger, notamment chez les pays amis. Il va au Caire, à Jakarta, ou Accra, il participe à des conférences internationales, telle que celle de Bandung, sa carrière de diplomate est lancée.

    Proche collaborateur de Ferhat Abbas, il a notamment occupé la fonction de secrétaire général de la présidence du GPRA. Compètent, fin négociateur, humble et intègre, il joue un rôle majeur dans l’insertion de la cause indépendantiste dans l’agenda international. À ce titre il participe aux négociations des accords d’Évian – signés le 18 mars 1962 – en tant que membre de la délégation du GPRA. C’est à cette occasion que Louis Joxe – Ministre d’État aux affaires algériennes – lui donne le surnom de « renard du désert ». Ce dernier dira que pendant ces négociations la volonté de fer de Benyahia lui paraissait redoutable et fascinante. En mai 1962, il organise le congrès de Tripoli, véritable prélude à l’affrontement armé fratricide de l’été 1962 pour la conquête du pouvoir.

    Au service du jeune État algérien

    A l’indépendance de l’Algérie, le pouvoir du président Ben Bella fait appel à lui pour occuper la fonction d’ambassadeur à Moscou en 1963. Le 19 juin 1965, le président Ben Bella est renversé par le ministre de la défense, Houari Boumediène. Ce dernier dit-on, est autant séduit par le diplomate que méfiant à son égard, pragmatique cependant, il veut mettre ses compétences au service de l’État. Benyahia, toujours critique, préfère néanmoins être « à l’intérieur du système, car à l’intérieur on peut toujours faire quelque chose », disait Youcef Ferhi en rapportant ses dires.

    Seddik Benyahia est nommé ministre de l’information le 24 octobre 1966. Sa plus grande réalisation à la tète de ce ministère est l’organisation du festival panafricain d’Alger en 1969. Esprit éclairé, il est l’un des architectes du projet révolutionnaire algérien – malgré des divergences avec la ligne du président – en 1970, il écrivait pour Révolution africaine un article intitulé « Les mutations psychologiques dans la révolution algérienne », dont voici un extrait :

    « L’indépendance nationale n’est pas seulement un acte de libération politique et économique, mais la restauration d’une identité nationale qui donne à cette indépendance sa substance et sa dynamique. La décolonisation politique et économique serait inopérante sans une décolonisation des esprits »

    À la formation du gouvernement Boumediène III le 21 juillet 1970, il est nommé ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, poste qu’il occupa jusqu’en avril 1977. Il a la lourde tâche de construire ce ministère nouvellement crée et de bâtir l’université algérienne, cependant l’enseignement supérieur n’a pas atteint les objectifs qualitatifs escomptés. Quand le gouvernement Boumediène IV est formé en 1977 il devient ministre des finances, jusqu’en mars 1979.

    Outre ses fonctions de ministre, il a activement prit part à la construction de l’édifice institutionnel. Membre du Bureau Politique du FLN, il a participé à la rédaction de la charte d’Alger en 1964, puis à l’élaboration de la charte nationale adoptée en 1976, qui était le guide idéologique de l’Algérie socialiste. Enfin il était membre de la commission de rédaction de la constitution de 1976, promulguée en novembre de la même année.

    Ministre des affaires étrangères : Le Talleyrand algérien

    Le 9 février 1979, le colonel Chadli Bendjedid succède à Houari Boumediène – décédé le 27 décembre 1978 – au poste de président de la République. Le 8 mars 1979, Mohamed Seddik Benyahia devient ministre des affaires étrangères.

    Dès sa prise de fonction il entreprend des réformes au sein du ministère. D’abord il le dote d’un nouvel organigramme, d’effectifs plus importants et crée la fonction de chef de bureau. Révolutionnaire, il rompt avec les pratiques régionalistes au sein de l’institution, véritables mécanismes d’attributions des postes sous son prédécesseur.

    Il enregistre plusieurs succès aux affaires étrangères, notamment dans les relations algéro-françaises. Il entreprend un rapprochement entre Alger et Paris, malgré d’importants sujets de discorde (contrats gaziers, question de la libre circulation et des cartes de résidence, service militaire des binationaux). Le 3 février 1982, le contrat Sonatrach-Gaz de France est signé, il supporte un surcoût de 25 % en faveur de l’Algérie, le contrat favorable à cette dernière, avait fait scandale en France (Naoufel Brahimi El Mili, 2012). Cependant il ne s’agit pas du plus important succès du ministre des affaires étrangères, en effet, sa consécration internationale eut lieu un an auparavant.

    L’artisan des accords d’Alger de 1981

    Dans la crise des otages américains retenus à l’ambassade américaine de Téhéran, Alger tente de s’imposer en médiateur. Dans les faits, c’est même l’Iran qui a sollicité la médiation algérienne – lors d’un discours du guide suprême Khomeini en date du 12 septembre 1980 – comme le souligne Patrick Juillard en 1981, dans un article sur la médiation algérienne dans cette crise. Dans ce même écrit il indique que l’action de Benyahia était essentielle, et qu’il agissait comme une « centrale de renseignement ».

    Après des discussions et négociations s’étalant de novembre 1980 à janvier 1981, américains et iraniens parviennent à des accords le 19 janvier 1981, en partie grâce aux manœuvres algériennes pour faciliter certains arrangements (comme les modalités du transport des otages). Le 20 janvier, les 52 otages américains quittaient Téhéran à bord d’un Boeing d’Air Algérie.

    C’est un succès total pour le ministre Mohamed Seddik Benyahia, dont la signature est présente sur ces accords. Salah Benkobbi – ancien diplomate et membre fondateur de l’UGEMA – racontait le rôle primordial du défunt ministre : « C’est lui qui a rédigé l’accord et qui a réussi à le faire signer par les deux parties ». Il ajoutait également que c’était un coup de maître lui ayant valu le respect de la communauté internationale.

    3 mai 1982, une mort tragique

    Ce jour là, il est dans un avion volant en direction de Téhéran. Deux ans plus tôt, l’Irak lançait l’opération Qadisiya, déclenchant alors une guerre meurtrière contre l’Iran qui allait durer jusqu’en 1988. L’Algérie propose sa médiation, forte de son expérience dans le règlement des contentieux irako-iraniens (accords d’Alger, 1975). Seddik Benyahia s’active, il multiplie les passages à Bagdad et Téhéran, et tente d’imposer sa médiation à deux camps fermement résolus à continuer la guerre.

    Selon Pierre Razoux dans son ouvrage La guerre Iran-Irak, L’Algérie aurait discrètement torpillé le plan de paix de l’OCI d’avril 1982 (jugé trop favorable à l’Irak) ce qui aurait fait enrager Saddam Hussein, ce dernier accusant l’Algérie de favoriser systématiquement les iraniens. Le 3 mai 1982, alors que son avion (avec à son bord des cadres du MAE et d’autres ministères) survole la frontière turco-iranienne, un missile – d’abord d’une provenance non-identifiée – abat l’aéronef qui s’écrase à Qottour en Iran, le crash ne laissant aucun survivant.

    En Algérie, un deuil de trois jours a été décrété. L’émotion est considérable, plusieurs dizaines de milliers d’algérois se déplaçaient lors de ses obsèques le 7 mai, pour lui rendre hommage. Il était l’un des responsables politiques les plus populaires du pays.

    Un mystère dont l’histoire n’a pas encore dévoilé touts ses secrets

    Dans un premier temps, irakiens et iraniens s’accusent mutuellement, tandis qu’Alger, enrage envers les deux pays et ne sait pas qui accuser pour ce crime (Pierre Razoux, 2013). Très rapidement une commission d’enquête est formée, sous la direction de Salah Goudjil, ministre des transports.

    Les premiers éléments de l’enquête semblent disculper l’Iran, on comprend vite que le missile était irakien. De plus, l’absence de Tarek Aziz aux obsèques des défunts, contrairement au ministre des affaires étrangères iranien Ali-Akbar Velayati, ne fait qu’agacer d’avantage les responsables politiques algériens. La version officielle irakienne affirme que l’avion algérien a été prit pour un aéronef iranien, dans un contexte ou des combats aériens se déroulaient à ce moment, dans cette zone.

    Ahmed Taleb Brahimi – ancien ministre et compagnon de longue date de Benyahia – est revenu sur cette affaire dans ses mémoires publiées en 1999 (Mémoires d’un algérien – Tome 3). Il écarte les thèses du complot d’une fraction radicale du Baath irakien hostile à la paix ou de la responsabilité directe de Saddam Hussein. Pour d’autre, comme l’ancien ministre de la défense, le général à la retraite Khaled Nezzar (1990-1993), Saddam Hussein est bien responsable de cet assassinat. Rien ne permet de vérifier l’hypothèse d’un ordre de Bagdad, il est pour l’instant impossible d’avoir le fin mot de cette affaire. Les résultats de l’enquête n’ont jamais été rendus publics.

    Selon Ahmed Taleb Brahimi, l’affaire a été étouffée par le président Chadli Bendjedid, qui tenait les propos suivants lors d’une réunion du Bureau Politique du FLN le 1er septembre 1982 : « Si l’hypothèse du missile irakien se vérifiait, il sera difficile de dire la vérité au peuple algérien car cela risquerait de développer un sentiment anti-arabe, préjudiciable à notre soutien au peuple palestinien et à nos efforts pour une solution au Moyen-Orient ». Un autre témoignage vient renforcer la thèse de l’affaire étouffée, celui de Ahmed Al-Jebouri, qui rapportait à la chaîne Al-Jazeera en 2008, une conversation qu’il avait eu avec Salah Goudjil. Ce dernier était à Bagdad pour une réunion avec Al-Jebouri et Saddam Hussein. Le ministre algérien aurait dit aux deux irakiens que les résultats de l’enquête incriminant l’Irak ne seraient connus que par un nombre restreint de personnes, et qu’il s’agit des instructions du président algérien.

    Mohamed Seddik Benyahia était un homme dont l’intégrité et le sens de l’État avaient conquis le cœur du peuple algérien. Sa vivacité, ses talents de diplomate et sa finesse d’esprit avaient également marqué les responsables politiques étrangers qui l’ont vu à l’oeuvre. Benyahia est l’un des bâtisseurs de l’État, ainsi qu’un monument de la diplomatie algérienne, qui est incontestablement l’une des réussites de l’Algérie indépendante. Le 3 mai 2021, le ministère des affaires étrangères a décidé de baptiser son siège au nom de Mohamed Seddik Benyahia, un acte symbolique, qui permet à l’institution d’honorer son patrimoine.

    Kassaman Times, 4 avr 2021

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