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  • Lettre à un ami marocain (Pierre Galand)

    Cher ami, chère amie,

    Le Sahara Occidental sera votre Vietnam et donc méfiez-vous de vos amis américains.
    Avant le scandaleux marchandage de Mr Trump qui, se pensant maître du monde, vous a vendu le Sahara Occidental en échange de l’allégeance de votre roi à Mr Netanyahou d’Israël et de la promesse de quelques milliards de dollars, c’est à la France que le Maroc avait confié ses projets d’annexion du Sahara Occidental. C’est en effet, la France qui bloquait toute négociation au Conseil de sécurité des Nations Unies en tentant d’imposer un projet d’autonomie sensé permettre au Maroc d’officialiser son annexion du territoire du Sahara Occidental où vit un peuple qui, lui, revendique son droit à l’autodétermination conformément au droit des peuples colonisés et qui lui est garanti par la Résolution XV 14 des Nations Unies. Cette résolution date de 1960 et est le résultat des luttes des peuples pour leur émancipation de la tutelle coloniale.
    Aujourd’hui, votre gouvernement et le roi lâchent votre protecteur français pour vous aliéner aux promesses de feu le président Trump dans l’espoir d’imposer à la communauté internationale et au peuple sahraoui la « marocanité » du Sahara Occidental.
    L’histoire se répète.
    Français et Américains ont tenté de la même manière d’annexer le Vietnam et ce furent, rappelez-vous, des guerres foisonnant d’horreurs et de crimes contre l’humanité.
    Aujourd’hui, la prise en main de votre destinée par les Américains et leurs deux principaux alliés Israël et l’Arabie Saoudite vous expose à un triple et inquiétant risque.
    Le premier : votre gouvernement et votre roi ont trahi aux yeux du peuple marocain la solidarité indéfectible de celui-ci avec les droits les plus légitimes du peuple palestinien à un État souverain avec Jérusalem-Est pour capitale. Votre peuple a cette promesse inscrite dans ses gènes et n’acceptera pas le marchandage honteux du Sahara Occidental contre Al-Quds et sa grande mosquée Al-Aqsa. Les conseillers du roi, le Makhzen, ont ainsi joué à la roulette russe et pris le risque de mettre leurs privilèges et la couronne de leur chef en péril.
    Le deuxième : le Maroc a fait entrer le loup dans la bergerie (1) car ni les États-Unis, ni Israël ne se soucient de votre avenir ni de celui du Maghreb car vous êtes des pions dans leur stratégie globale et vous risquez vite d’en faire les frais.
    Rappelez-vous, déjà le Français Sarkozy n’avait eu le moindre scrupule lorsqu’il a engagé sa guerre funeste et aux conséquences tragiques contre Kadhafi, pas plus que son successeur, en lançant des appels à la guerre contre la Syrie. Alors pensez donc un instant : en laissant les USA et Israël s’installer chez vous, avec les conseils éclairés de votre allié M.B.S., vous prenez le risque d’ouvrir un nouveau foyer de guerre et d’instabilité dans la région dont vous ne mesurez pas les conséquences pour votre peuple et ceux du Maghreb.
    Le troisième : le gouvernement marocain et le roi, en tournant le dos à la légalité internationale, aux résolutions des N.U. et à la charte de l’U.A., bafouent les droits fondamentaux d’un petit peuple, celui du Sahara Occidental. Or celui-ci, comme en 1974, lors des accords passés avec la puissance coloniale, l’Espagne (2), ne s’est pas laissé faire et il prit les armes à l’appel de son mouvement de libération nationale, le Front Polisario. Aujourd’hui, plus de 45 ans plus tard, les Sahraouis ont clairement dit qu’ils ne se laisseraient pas faire.
    Malgré les conseillers israéliens et américains et les armes sophistiquées saoudiennes et françaises, les Sahraouis vont vous mener la vie dure jusqu’à l’obtention du respect de leu droit inaliénable à l’autodétermination.
    Cher ami, chère amie,
    Je suis certain que, nombreux sont les démocrates de votre pays qui aspirent à la paix et qui peuvent mesurer le piège qui vous a été tendu et dans lequel vos gouvernants sont tombés. Les conseillers du roi, alléchés par l’offre américaine, ont vendu à votre pays un cadeau empoisonné, un risque de guerre et de déstabilisation qui aura un coût humain inacceptable.
    La puissance américaine a, vous le savez son propre agenda et le sort du peuple palestinien ni celui du peuple sahraoui ne la préoccupe pas. Mais avez-vous pensé qu’en cette circonstance le sort du peuple marocain est lui-même mis en péril ?
    Tant qu’il est encore temps, faisons appel ensemble pour qu’avec l’Union Africaine, l’ONU redevienne le cénacle au sein duquel des initiatives urgentes et audacieuses, conformes à la légalité internationale et aux résolutions pertinentes des N.U., soient prises pour l’application aux Palestiniens et aux Sahraouis de leur droit à l’autodétermination sous contrôle international et qu’enfin ce droit soit respecté et appliqué.
    Croyez en mes cordiales salutations,
    Pierre Galand
    Le 11/01/2021
    (1) Le 2 oct. 2020 le Maroc et les USA ont signé un accord de coopération militaire et, depuis, négocient l’installation d’une base américaine au Maroc… Dans le S.O. ?
    (2) Accord de Madrid du 14 nov. 1974 : l’Espagne puissance coloniale, plutôt que de répondre à l’injonction des N.U de se retirer du Sahara et de rendre sa souveraineté au peuple sahraoui, signe un accord de rétrocession de la puissance administrative du S.O. pour moitié avec le Maroc et pour l’autre moitié avec la Mauritanie. Cet accord ne sera jamais reconnus ni par l’ONU ni par l’OUA qui accueillera en son sein la R.A.S.D. comme membre à part entière.
    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, ONU, Etats-Unis, Donald Trump, Joe Biden, Israël, normalización,
  • Signe d’un changement radical de la politique extérieure US : Biden place William Burns à la tête de la CIA

    Par Ali Oussi

    Le président élu américain Joe Biden a annoncé le choix de William Burns, un diplomate chevronné qui a occupé plusieurs postes dans le monde entier, pour prendre la direction de la Central Intelligence Agency (CIA).

    Biden a expliqué de la sorte son choix : « Burns est un diplomate exemplaire avec des décennies d’expérience sur la scène mondiale afin de maintenir notre peuple et notre pays dans la paix et la sécurité ».

    Le correspondant d’Al-Hurra à la Maison Blanche a cité l’équipe de Biden en disant: « Le poste de directeur de la CIA sera un poste consultatif et non gouvernemental, comme c’était le cas à l’époque de Trump ».

    Burns est un homme de très grande expérience des affaires étrangères, un ancien député au Département d’État, qui a été ambassadeur des Etats-Unis en Russie et négociateur en chef dans les pourparlers secrets qui ont finalement ouvert la voie à l’accord nucléaire iranien de 2015.

    Il est maintenant président du Carnegie Endowment for International Peace.

    Ce choix, hautement significatif, et particulièrement stratégique, annonce un tournant à 180 degrés de la politique américaine au Moyen-Orient. Au Sahara Occidental aussi, comme il sera démontré incessamment.

    La Patrie News, 11 jan 2021

    Tags: Etats-Unis, Joe Biden, CIA, William Burns, sahara Occidental, Moyen Orient,

  • Le vice-président américain Mike Pence refuse d’invoquer le 25e amendement de la Constitution pour démettre Donald Trump

    Le vice-président américain Mike Pence a refusé mardi d’invoquer le 25e amendement de la Constitution pour démettre Donald Trump, ce qui ouvre la voie au lancement, dès cette semaine, d’une historique deuxième procédure de destitution contre le président sortant.

    « J’estime qu’un tel acte n’est pas dans le meilleur intérêt de notre nation ni ne correspond à la Constitution », a écrit Mike Pence à la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi.

    Sa réponse négative garantit que les démocrates soumettront dès mercredi à l’examen de la Chambre l’acte accusant Donald Trump d’avoir « incité à l’insurrection » lors des violences contre le Capitole le 6 janvier, dans une historique deuxième procédure d’ »impeachment ».

    Dans sa lettre, Mike Pence rappelle qu’il ne reste que quelques jours avant le départ de Donald Trump de la Maison Blanche, prévu le 20 janvier.

    Le 25e amendement autorise le vice-président et une majorité du cabinet à déclarer le président « inapte » à exercer ses fonctions.

    « D’après notre Constitution, le 25e amendement n’est pas un moyen de punition ou d’usurpation », affirme Mike Pence. « L’appliquer ainsi créerait une terrible jurisprudence ».

    Mike Pence, qui présidait la séance, rappelle dans sa missive qu’il avait refusé de bloquer la certification des résultats malgré la pression directe, et publique, de Donald Trump. Dans la foule, certains avaient d’ailleurs hurlé « Pendez Mike Pence ».

    AFP

    Tags : EtatsUnis #Donald Trump #Destitution #MikePence

  • Joe Biden nomme un éminent diplomate à la tête de la CIA

    Joe Biden, qui prendra ses fonctions de président des États-Unis la semaine prochaine, a annoncé, lundi, dans un communiqué, qu’il désignera le diplomate William Burns pour prendre les commandes de l’agence de renseignement américaine.

    Joe Biden poursuit ses nomminations. Il a choisi l’ancien diplomate de carrière William Burns pour prendre la tête de la CIA, l’agence de renseignement américaine, a annoncé, lundi 11 janvier, l’équipe du président élu dans un communiqué.
    « Bill Burns est un diplomate exemplaire avec des décennies d’expérience sur la scène mondiale pour garder notre peuple et notre pays sûr », a affirmé Joe Biden dans le communiqué.
    « Il partage ma conviction profonde que le renseignement doit être apolitique », ajoute le président élu, qui doit prendre ses fonctions le 20 janvier.
    Diplomate
    Diplomate pendant 33 ans, notamment comme ambassadeur des États-Unis en Russie de 2005 à 2008, William Burns avait pris sa retraite du corps diplomatique en 2014, avant de diriger la Fondation Carnegie pour la paix internationale, un centre de réflexion de relations internationales.
    Photo : William Burns
    Il succède à Gina Haspel, directrice de la CIA depuis 2018, qui elle-même avait succédé à Mike Pompeo, directeur de 2017 à 2018, avant d’être nommé secrétaire d’État par Donald Trump.
    Si sa nomination est confirmée par le Sénat, William Burns deviendrait le premier diplomate de carrière à diriger la CIA, souligne le communiqué.
    La Nation, 11 jan 2021
    #EtatsUnis #USA #CIA #WilliamBurns
  • Le temps des complots

    par Arezki Metref

    Quand Donald Trump se dégonfle, ça fait un sacré appel d’air ! C’est à cette sorte de tirage qui facilite la combustion que nous avons assisté comme à un spectacle plutôt surprenant : le dégonflement d’une baudruche !

    Depuis son accession pour le moins tonitruante au pouvoir en 2017, il n’a jamais cessé de brasser de l’air. Ses rodomontades dignes d’un satrape de conte cruel, son incorrection ostentatoire, son absence totale de surmoi, ses outrages répétés à la diplomatie et même, dans certains cas, à la simple politesse, ont installé, dans la première puissance mondiale, un processus de dégénérescence qui a tôt fait de contribuer à polluer le climat international qui, il faut le dire, était déjà pas mal entamé.

    Entre autres turpitudes qui resteront comme des stigmates du milliardaire incontrôlable : le déménagement de l’ambassade US de Tel-Aviv à Jérusalem cautionnant de ce fait l’atteinte aux résolutions de l’ONU qui ne reconnaît pas cette ville comme la capitale d’Israël, le troc avec le Maroc de la reconnaissance d’Israël contre la « marocanité » du Sahara Occidental et d’autres joyeusetés du même acabit.

    La dernière séquence de la mise en scène, à laquelle a participé Trump, de la forme la plus primitive de la politique, c’est-à-dire l’usage trash de la force, la diabolisation continue de l’adversaire, la division, lui a été fatale. On savait qu’il était capable de tout, mais le dernier round est une surprise pour les plus blasés. C’est « une tentative rapide de coup d’État. En un mot, c’était fasciste », déclare le Parti communiste des États-Unis.

    L’assaut donné par les partisans du Président milliardaire populiste contre le Capitole, le cœur nucléaire de la démocratie américaine, considéré comme un lieu sacré, le jour même où les grands électeurs devaient confirmer la victoire de Joe Biden, le candidat démocrate rival honni, est un acte inédit.

    Donald Trump, en chef de guerre, lance contre le Capitole ses troupes déterminées à en découdre enfin, c’est l’excès de trop. À partir de là, tout commence à s’effondrer pour l’intrus de la Maison-Blanche. Ses proches le lâchent. A quelques jours de la passation de pouvoir entre lui et son successeur, ses ministres démissionnent en cascade, signe de leur condamnation de son attitude. Son compte Twitter, grâce auquel il sévissait à toute heure du jour et de la nuit, lui est retiré, et définitivement. Mais, et c’est le pire, Nancy Pelosi, responsable des démocrates au Congrès, a entrepris de s’entretenir avec les chefs de l’armée américaine pour s’assurer que Donald Trump – un « Président déséquilibré » et « instable », dit-elle – ne lance, en guise de feu d’artifice avant sa sortie, des hostilités militaires ou n’accède aux codes de lancement et ordonne une frappe nucléaire. C’est le style !

    Au-delà de l’anecdote plus ou moins historique, pour spectaculaire que soit le chaos découlant des violences du Capitole, il y a sûrement une ou deux moralités à tirer de ce qui vient de se passer du fait du refus de Trump de reconnaître sa défaite et du complotisme qui lui sert de culture politique. Ces moralités ne sont pas définitives, cela va de soi.

    Tout est là, dans le spectre du complot. Trump a instillé cette idée qu’il est victime d’un complot et les États-Unis, auxquels il s’identifie, naturellement, n’échappent pas aux visées des conspirationnistes. Complot de qui ? De tout ce qui n’est pas lui !

    Galvanisés par les propos euphorisants de Donald Trump, ses nervis montent à l’assaut du Capitole. Violences. Morts ! Le flagrant résultat chaotique le contraint à dénoncer ses propres ouailles devenues soudain des extrémistes, et cette volte-face ultrarapide, qui n’a pris que quelques heures, a instantanément lézardé la mouvance d’extrême droite, suprématiste blanche, exhalant des miasmes néo-nazis, sur laquelle il s’est toujours appuyé.

    On pourrait presque soupçonner, en empruntant un peu de complotisme à Trump et ses fans, que des forces centrifuges ont trouvé le moyen de le pousser à la faute. Si tel est le cas, ça a réussi !

    Le casus belli constaté, il est confirmé que l’extrême droite sur laquelle il s’appuie n’a aucun respect de la démocratie. Elle a eu le vent en poupe avec lui. Elle subit un désastre avec cette histoire en apparaissant pour ce qu’elle est, une minorité d’enragés qui met les règles de la démocratie à la sauce de ses intérêts.

    Le passage de Trump au pouvoir a coïncidé et donné un coup de fouet à la montée de l’extrême droite dans beaucoup de pays du monde. Outre de nombreux pays d’Europe où il a ses supporters, le Président brésilien Jair Bolsonaro a continué jusqu’au bout à soutenir Trump en déclarant que la crise entraînée par l’attaque du Capitole est causée « par le manque de confiance » des Américains à l’égard des élections en relayant les accusations de fraude de Trump.

    L’autre moralité est moins subsidiaire. Les décisions contraires au droit international qu’a osé prendre Trump – (Ambassade des USA à Jérusalem, troc américano-israélo-marocain, etc.) — et qu’aucun président américain n’aurait sans doute pu prendre, ne sont pas antinomiques avec une vision géostratégique. Joe Biden, visiblement plus conscient du devoir de respecter les formes, ne les aurait sans doute pas prises avec cette désinvolture. Mais il a le pouvoir de revenir dessus. On peut gager qu’il n’en fera rien !
    A. M.

    Le Jour d’Algérie, 10 jan 2021

    Tags : Etats-Unis, USA, Algérie, Maroc, Sahara Occidental, Israël, Donald Trump, Palestine, Jérusalem,

  • Les événements de Washington et ce que cela signifie pour l’Europe

    10/01/2020 – Blog HR / VP – Les événements choquants à Washington mercredi dernier doivent être un signal d’alarme pour tous les défenseurs de la démocratie dans le monde. Nous devons lutter plus durement contre la désinformation et les inégalités et renouveler la coopération mondiale pour promouvoir l’état de droit et les valeurs démocratiques.

    J’ai été choqué, comme tous les défenseurs de la démocratie et amis des États-Unis dans le monde, par les scènes auxquelles nous avons assisté à Washington: une foule attaquant le Capitole pour empêcher le vote pour confirmer Joe Biden en tant que président du pays. Cela a eu un écho particulier pour moi parce que je devais me rappeler comment, il y a quarante ans, la jeune démocratie espagnole avait été menacée par un assaut du Congrès des députés par un groupe de police militaire. Heureusement, l’Espagne a pu surmonter cette épreuve, à partir des meilleures années de notre histoire moderne

    Une société américaine endommagée et divisée

    Les événements déconcertants de mercredi montrent à quel point la société américaine est endommagée et divisée après quatre ans d’administration Trump. Certes, il ne peut être comparé à l’assaut contre le Congrès espagnol en 1981 ou à d’autres précédents historiques de ce type: les forces de sécurité, comme la quasi-totalité de l’appareil d’État et des institutions démocratiques des États-Unis, ont rempli leurs devoirs, comme elles l’ont fait en les semaines précédentes, depuis le 3 novembre. Cependant, on ne peut sous-estimer l’importance de ce qui s’est passé et du désastre potentiel causé si l’affaire avait déraillé encore plus.

    «Ce que nous avons vu mercredi n’était que l’apogée de développements très inquiétants qui se sont produits dans le monde ces dernières années. Cela doit être un appel au réveil pour tous les défenseurs de la démocratie.

    Ce que nous avons vu mercredi n’était que le point culminant de développements très inquiétants survenus au niveau mondial ces dernières années. Ce doit être un signal d’alarme pour tous les défenseurs de la démocratie. Lutter contre les illusions et les attaques contre les valeurs démocratiques et surmonter les divisions de nos sociétés. Pas seulement aux États-Unis. Partout dans le monde, il y a des dirigeants politiques – dans l’opposition et aussi de plus en plus au pouvoir – prêts à saper les institutions démocratiques.

    Tout le monde doit comprendre que si nous acceptons les revers après les revers, même s’ils semblent mineurs, la démocratie et ses valeurs et institutions peuvent finir par périr de manière irréversible. Pour éviter ce sort, nous devons nous dresser immédiatement à toute violation de l’indépendance des institutions démocratiques, à toutes les explosions démagogiques des dirigeants populistes, à tous les discours incendiaires et haineux des démagogues, à toutes les campagnes de désinformation et les fausses nouvelles qui nourrissent et encouragent les ennemis. de la démocratie.

    «Chaque citoyen du monde doit comprendre que si nous acceptons des revers mineurs après des revers mineurs, la démocratie, ses valeurs et ses institutions peuvent finir par périr de manière irréversible»

    Mécontentement et dysfonctionnements de nos économies
    Cependant, nous devons également réfléchir aux causes profondes de la dynamique qui alimente ces forces. Le succès inquiétant des opposants à la démocratie dans le monde est également lié au fait qu’un nombre croissant de citoyens ne se sentent plus suffisamment protégés et respectés.

    Les raisons à cela sont nombreuses, mais elles sont aussi des deux côtés de l’Atlantique profondément liées aux dysfonctionnements de nos économies au cours des dernières décennies. La croissance significative des inégalités dans nos sociétés, l’évasion fiscale et les paradis fiscaux, l’affaiblissement de la capacité de régulation des grandes multinationales, la désindustrialisation et le chômage élevé – tous ces phénomènes ont contribué, en Europe comme aux États-Unis, à affaiblir la légitimité des démocratie représentative, en particulier parmi ceux qui se situent à une échelle inférieure de revenu et de richesse.

    «La croissance significative des inégalités, de l’évasion fiscale et des paradis fiscaux, la désindustrialisation et le chômage élevé ont affaibli, en Europe comme aux États-Unis, la démocratie représentative, en particulier parmi celles à plus faible échelle de revenus et de richesse. « 

    En Europe, nous avons commencé à agir pour inverser ces tendances. Nous voulons mieux protéger nos entreprises et nos emplois en filtrant les investissements étrangers et en demandant plus de réciprocité dans nos relations commerciales. Nous souhaitons également mieux réguler l’activité des grandes multinationales, notamment dans le secteur numérique, et lutter plus activement pour la justice fiscale. Et avec l’initiative Next Generation Europe EU, nous entendons renforcer la solidarité au sein de l’Europe en aidant les pays les plus touchés par la crise actuelle. Bien sûr, il y a encore un long chemin à parcourir sur toutes ces questions, mais nous sommes maintenant sur la bonne voie.

    La désinformation, une réelle menace pour la démocratie
    Au cas où quelqu’un aurait le moindre doute, les événements de Washington montrent également que la désinformation constitue une réelle menace pour les démocraties. Comme l’un de mes anciens collaborateurs au ministère espagnol des Affaires étrangères l’ a récemment écrit(le lien est externe), la démocratie repose sur la présomption que le libre échange d’idées et d’opinions conduira une communauté politique à prendre les meilleures décisions collectives. Si l’information échoue, la démocratie fait de même, en tant que moteur de voiture qui utilise un carburant non approprié.

    Contrairement à la propagande classique, visant à persuader les idées politiques, la désinformation n’opère pas sur les convictions, mais cherche à subvertir les faits, jusqu’à ce qu’ils forment une réalité parallèle. Il a eu d’énormes effets aux États-Unis. Briser le consensus sur les faits et la réalité signifie que les débats politiques ne portent pas sur les mesures à prendre pour résoudre les problèmes réels, mais sur la réalité à laquelle appliquer les politiques. Si certaines personnes croient qu’une élection était frauduleuse, parce que leur chef leur a répété à maintes reprises, elles se comporteront en conséquence.

    «Nous devons lutter plus efficacement contre le fléau de la désinformation et garantir le droit des citoyens à recevoir des informations véridiques.»

    La prolifération de la désinformation favorisée par les réseaux sociaux a puissamment renforcé les tendances autoritaires et xénophobes dans nos sociétés. Nous devons lutter plus efficacement contre ce fléau et garantir le droit des citoyens à recevoir des informations véridiques. Nous devons en particulier lutter contre les campagnes de désinformation soutenues par des régimes autoritaires. Le SEAE possède une vaste expérience dans ce domaine et accroît encore ses actions dans ce domaine.

    Il faut également pouvoir mieux réguler le contenu des réseaux sociaux, tout en respectant scrupuleusement la liberté d’expression. Il n’est pas possible que cette régulation soit effectuée principalement selon des règles et des procédures fixées par des acteurs privés. En décembre dernier, la Commission européenne a proposé la loi sur les services numériques, notamment pour remédier précisément à ce problème.

    La nécessité de remodeler la mondialisation

    Un autre défi majeur auquel nous sommes confrontés pour maintenir des sociétés et des économies ouvertes et démocratiques est de réussir à remodeler la mondialisation et à reconstruire un système multilatéral capable de lutter contre les dysfonctionnements qui ont affaibli les démocraties au cours des dernières décennies. Compte tenu du poids que les régimes nationalistes et autoritaires ont acquis sur la scène mondiale, la tâche ne sera pas facile, mais elle est essentielle pour tous ceux qui croient en la démocratie et en son avenir. Ce projet doit être au cœur de nos futures relations avec la nouvelle administration Biden. Cela signifie également développer des liens plus étroits avec les autres démocraties partageant les mêmes idées dans le monde. L’UE jouera pleinement son rôle dans cette entreprise.

    «Notre défi est de renforcer la foi que nos sociétés démocratiques ont en elles-mêmes pour pouvoir traverser des eaux troubles, sans tomber dans les tentations autocratiques.»

    Plus largement, notre défi est de renforcer la foi que nos sociétés démocratiques ont en elles-mêmes pour pouvoir voyager dans des eaux troubles, sans suivre les chants de sirène des populistes irresponsables qui trouvent toujours quelqu’un à blâmer et proposent des solutions faciles, et sans tomber dans l’autocratie. tentations. Nous devons travailler au renouvellement de notre contrat social à une époque qui change et développer des récits collectifs plus forts capables de remettre en cause les doctrines populistes.

    La force des institutions américaines

    Revenons aux scènes horribles du Capitole: ce dont nous avons été témoins, ce n’est pas l’Amérique que nous connaissons et que nous identifions aux idéaux de démocratie et de liberté. Je crois en la force des institutions américaines et je suis convaincu que la démocratie américaine réussira à surmonter l’épreuve qu’elle traverse actuellement. J’espère même qu’il en sortira plus fort, pour le bien de ses citoyens et du monde entier.

    EEAS, 10 jan 2021

    Tags : Etats-Unis, Donald Trump, Europe, democratie, chômage,

  • La fin du Néron des temps modernes

    La grande démocratie américaine a vacillé ce mercredi 6 janvier. Trump a envoyé des milliers d’extrémistes, qu’il a chauffés à blanc, s’attaquer au temple de la démocratie dans ce pays, à savoir le parlement. Du jamais vu dans l’histoire des États-Unis. En Amérique et dans le monde, personne n’accorde plus aucun crédit à ce Néron des temps modernes sauf certains régimes totalitaires et corrompus du monde arabe. Ce qui vient de se passer au Capitole de Washington annule de facto tout ce qui a été décidé par Trump au nom de l’Amérique. La reconnaissance de la prétendue souveraineté marocaine sur le Sahara occidental vient en premier. Les Marocains qui ont vendu leur honneur et bafoué la légalité internationale en signant la normalisation avec l’entité sioniste en contrepartie de cette prétendue reconnaissance américaine doivent se mordre les doigts aujourd’hui. Le makhzen a failli partout et doit faire face aujourd’hui à la colère du peuple marocain qui ne cesse de prendre de l’ampleur de jour en jour.

    Trump a fait du chantage et exercé la menace contre tout le monde: les Russes, les Chinois, les Européens et même les Américains avec ce triste épisode du Capitole, mais tous n’ont pas cédé, sauf les lâches capitales arabes qui ont baissé tête et pantalon pour aller signer une paix inacceptable en ce moment où Israël piétine tous les accords internationaux et dépasse toutes les limites en s’accaparant des terres palestiniennes, en officialisant Jérusalem comme capitale, en tuant et exécutant d’innocents civils arabes, et en jetant en prison pour de longues années des Palestiniens dont le seul tort est de défendre leur droit à la liberté et à la justice.
    Les fous furieux lancés par Trump ont interrompu, par la violence, un grand moment de la démocratie dans un parlement qui devait valider la victoire de Joe Biden. Conséquence de cette ultime folie du milliardaire, tous les politiques américains, y compris les républicains, lui ont tourné le dos, à commencer par celui qui lui était le plus proche, le vice président Mike Pence.

    Dans le monde entier, même et surtout en Occident, les agissements de Trump sont vertement désapprouvés et condamnés.

    Il ne reste alors que ces rois de Rabat, de Dubaï ou de Manama, qui ont tourné le dos à leurs peuples et trahi la cause palestinienne, qui se murent dans un silence de honte. Et dire que même Netanyahu a condamné l’acte du locataire de la Maison Blanche. Mais pas les Arabes, pas ces dirigeants traîtres que l’histoire balayera comme de vils personnages dont les peuples méritent bien mieux que ces humiliations perpétrées par ceux censés défendre leur honneur.

    Par Abdelmadjid Blidi

    Tags : Etats-Unis, Donald Trump, Joe Biden,

  • TRUMP DAVID-PAN !

    par Belkacem Ahcene-Djaballah


    Jamais dans l’histoire contemporaine du monde occidental, pays d’Amérique du Nord y compris, après les tragiques périodes de Hitler, Mussolini et Franco, celle des années 50 et après et en dehors des comportements de certains nouveaux dirigeants des pays issus de l’ex-bloc «soviétique» et ayant rejoint l’UE, le monde pourtant dit «développé» ou «civilisé» ou «avancé» ou «industrialisé» n’avait connu un temps de gouvernance politique aussi délicat que celui vécu avec Donald Trump, président des Etats-Unis d’Amérique, les Usa, ce qui n’est pas peu, puisque pays classé première puissance mondiale en presque toutes choses et «phare» incontesté (mais pas incontestable) de la Démocratie. En plus de deux siècles d’existence, même si les élections, comme dans presque tous les pays du monde, ne sont jamais acceptées de gaieté de cœur par les perdants, les passations se sont toujours passées dans le strict respect de la loi, une loi fondamentale Us demeurée presque toujours la même avec seulement quelques légers amendements.

    Cependant, la catastrophe n’était jamais bien loin, souvent juste à vos portes, représentée par un «interventionnisme armé» tous azimuts, bien souvent dépassant tout entendement, jusqu’à l’incompréhensible. Gendarmes du monde ? Pas seulement ! Moralisateurs aussi. Si moralisateurs et si imbus de leur puissance que, pour paraphraser V.Poutine, «ils nous prennent (tous) pour des cons». Il est vrai que la culture de masse «westernisée» avec son «cow-boy» toujours armé et tirant plus vite que son ombre a, certes, inculqué du dynamisme, mais aussi de l’aventurisme, avec ses lynchages et ses dégâts. Surtout lorsque le «pouvoir» échoit à des personnages de «comics». Ainsi, les comportements de David (Trump) d’aujourd’hui (un prénom à la symbolique religieuse déjà bien «chargée» et qui annonce les prises de position et décisions «évangilico-sionistes» ne favorisant certes pas, à court terme, les Palestiniens mais encore moins, à long terme, les Israéliens.

    Il est vrai qu’avec un «Bibi» Netanyahu au pouvoir (on ne pouvait s’attendre à moins) relève beaucoup plus du syndrome Peter Pan (Une idée développée par un psychanalyste américain, Dan Kiley, en 1983). L’expression fait référence au personnage de Peter Pan, héros créé par J. M. Barrie et personnage principal de sa pièce «Le Garçon qui ne voulait pas grandir» (1904). Dan Kiley dans son ouvrage de 1983 «Le Syndrome de Peter Pan», sous-titré «Ces hommes qui ont refusé de grandir» (The Peter Pan Syndrome: Men Who Have Never Grown Up), décrit ces derniers comme «narcissiques, émotionnellement immatures, socialement irresponsables et dépendants».Une maladie mentale ? Presque ! Car, ce syndrome n’est pas (encore) reconnu par le corps médical comme une entité clinique réelle n’ayant pas encore fait l’objet d’études scientifiques suffisantes.

    Le psychologue (Jean-Yves Flament) avance, quant à lui, la possibilité d’un retard dans le développement émotionnel des individus touché par ce syndrome. Il explique : «Le syndrome de Peter Pan prend racine dans l’enfance, en particulier dans les familles où le père est absent, fuyant, dévalorisé ou tyrannique. Résultat : la mère porte péniblement le fardeau de la famille en prenant appui sur son fils, qui se retrouve tiraillé entre sa nature d’enfant et ses nouvelles responsabilités d’adulte, l’enfant se trouve alors déraciné de tout repère de son âge. Dans cette situation, l’enfant «sépare» son intellect de ses émotions pour se protéger. L’intellect grandit avec ses nouvelles responsabilités, mais les émotions restent «bloquées» dans l’enfance. «C’est pourquoi ces personnes, pourtant très fines et perspicaces quand il s’agit d’intellect, font preuve de réactions impulsives et puériles dès qu’il s’agit d’émotion». Ajoutez-y un soudain héritage de deux ou trois mds usd, sans avoir jamais travaillé une minute de sa vie. Une arme ultra -lourde au pays du capitalisme !

    Bien sûr, dans nos pays (en voie de développement, ou sous-développés, ou émergents, ou…) on en rencontre beaucoup de ces Peter Pan. La seule différence, c’est qu’ils n’ont pas un bouton nucléaire à portée de main… et les Etats qu’ils dirigent ne tiennent pas par les «bourses» bien des dirigeants politiques et d’autres Etats du monde.

    Le Quotidien d’Oran, 9 jan 2021

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  • 10 conflits à surveiller en 2021

    La nouvelle année sera probablement marquée par des héritages non résolus de l’ancien: COVID-19, des ralentissements économiques, des politiques américaines erratiques et des guerres destructrices que la diplomatie n’a pas arrêtées. Le président de Crisis Group, Robert Malley, énumère les dix conflits à surveiller en 2021.

    Robert Malley*

    S’il y avait un concours pour l’événement 2020 avec les implications les plus profondes pour la paix et la sécurité mondiales, le terrain serait bondé.

    De la pandémie de coronavirus à l’impact croissant du changement climatique, en passant par les politiques de la terre brûlée de l’administration Trump après l’élection de Joe Biden, la guerre azerbaïdjanaise et arménienne sur le Haut-Karabakh et un conflit meurtrier dans la région éthiopienne du Tigré, cette année a été riche en événements. En 2021, le monde devra faire face aux conséquences et passer au crible les débris.

    Commencez par COVID-19 et sa longue queue. Lorsque la pandémie a éclaté pour la première fois, beaucoup – moi y compris – craignaient qu’elle n’ait des conséquences immédiates et potentiellement dévastatrices dans les pays en développement, en particulier ceux confrontés à des conflits meurtriers. Bien que plusieurs pays à faible revenu aient été durement touchés, beaucoup ne l’ont pas été; l’activité diplomatique, la médiation internationale, les missions de maintien de la paix et le soutien financier aux populations vulnérables ont souffert, mais on peut se demander si le COVID-19 a considérablement affecté la trajectoire des grandes guerres, que ce soit en Afghanistan, en Libye, en Syrie, au Yémen ou ailleurs.

    Les ramifications à plus long terme sont une autre affaire. La pandémie a précipité une crise économique mondiale sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale, avec 150 millions de personnes supplémentaires poussées sous le seuil de pauvreté extrême. Bien que les niveaux de revenu ne soient pas directement corrélés avec les conflits, la violence est plus probable pendant les périodes de volatilité économique.

    Au Soudan, au Liban et au Venezuela, pour ne citer que quelques exemples, on peut s’attendre à ce que le nombre de chômeurs augmente, que les revenus réels s’effondrent, que les gouvernements rencontrent des difficultés croissantes pour payer les forces de sécurité et que la population en général compte de plus en plus un moment où les États sont les moins équipés pour le fournir. Les frontières séparant l’insatisfaction économique des troubles sociaux et les troubles sociaux des flambées de violence sont minces. Les États-Unis, l’Europe ou d’autres donateurs ne sont pas non plus susceptibles de consacrer la quantité requise d’attention ou de ressources continue de haut niveau aux conflits régionaux lointains alors qu’ils affrontent des ravages économiques, sociaux et politiques chez eux.

    Vient ensuite le changement climatique – un phénomène à peine nouveau, mais en accélération avec un impact de plus en plus perceptible sur les conflits. Il est vrai que la chaîne causale est détournée, les réponses politiques aux conditions météorologiques extrêmes jouant souvent un rôle plus important que les modèles eux-mêmes. Pourtant, avec des vagues de chaleur plus fréquentes et des précipitations extrêmes, de nombreux gouvernements ont plus de mal à faire face à l’insécurité alimentaire, à la pénurie d’eau, aux migrations et à la concurrence pour les ressources. C’est la première année qu’un risque transnational figure sur notre liste des principaux conflits, car la violence liée au climat s’étend du Sahel au Nigeria et en Amérique centrale.

    Pendant ce temps, les États-Unis – polarisés, méfiants à l’égard de leurs institutions, lourdement armés, déchirés par de profondes divisions sociales et raciales et dirigés par un président imprudemment diviseur – se sont rapprochés d’une crise politique ingérable qu’à aucun moment de leur histoire moderne. Alors que le pays a été épargné du pire, le président Donald Trump a passé ses dernières semaines en fonction à contester la légitimité de l’élection et donc de son successeur, apparemment déterminé à donner au président élu Biden la main la plus faible possible pour faire face à la situation désordonnée dont il héritera.

    Transformant la rancune politique en une forme d’art diplomatique, piégeant le terrain pour l’homme qui le remplacera, Trump a imposé une série de sanctions à l’Iran avec l’objectif à peine dissimulé d’entraver les efforts de Biden pour relancer l’accord nucléaire iranien. Il a étendu la reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental dans un échange inconvenant contre la décision du Maroc de normaliser ses relations avec Israël. Et il a ordonné une série de retraits militaires américains de dernière minute en Somalie, en Afghanistan et en Irak. En agissant précipitamment, sans coordination ni consultation avec les principaux acteurs locaux, il a réussi à donner une mauvaise réputation à des politiques potentiellement sensées. Il y a toutes les raisons d’encourager de meilleures relations entre les Etats arabes et Israël; personne ne peut le faire d’une manière inconsciente du droit international. Il y a toutes les raisons de mettre fin à l’enchevêtrement sans fin de l’Amérique dans les guerres étrangères; il n’y a personne pour le faire d’une manière qui diminue la main du nouveau président et restreint sa marge de manœuvre.

    L’élection de Biden a apporté un espoir rehaussé de réalisme. Certains des dommages causés par son prédécesseur peuvent être réparés avec une relative facilité. Mais la nouvelle équipe peut trouver l’impression d’un géant erratique, imprévisible et indigne de confiance plus difficile à effacer. En intimidant les alliés traditionnels et en déchirant les accords internationaux, Trump pensait qu’il projetait du pouvoir mais manifestait en réalité un manque de fiabilité. Dans la mesure où Biden a l’intention de négocier à nouveau avec l’Iran et peut-être la Corée du Nord, d’encourager le compromis au Yémen ou au Venezuela, ou de revenir à un rôle moins partisan au Moyen-Orient, il sera entravé par les souvenirs de l’homme qui l’a précédé et les prévisions de ce qui pourrait venir ensuite – surtout si le pouvoir ne dure que le temps du prochain cycle électoral américain.

    Le dernier héritage de 2020 est peut-être le plus inquiétant. Les derniers mois de l’année ont gravement blessé cet adage préféré des diplomates et des artisans de la paix – à savoir qu’il n’y a pas de solution militaire au conflit politique. Dites cela aux Arméniens, forcés face à une puissance de feu azerbaïdjanaise supérieure à abandonner les terres qu’ils détenaient depuis un quart de siècle; aux Tigréens éthiopiens, dont les dirigeants ont promis une résistance prolongée contre l’avancée des troupes fédérales pour voir ces forces installées dans la capitale régionale de Mekelle en quelques jours. Dites cela, d’ailleurs, aux Rohingyas contraints de fuir le Myanmar en 2017; aux Palestiniens, qui sont restés réfugiés ou sous occupation depuis la défaite arabe de 1967; ou au peuple sahraoui dont les aspirations à l’autodétermination ont été étouffées par les troupes marocaines et un président américain transactionnel,

     En l’absence de solutions politiques plus équitables, les gains militaires ont tendance à se révéler fragiles. 

    Les artisans de paix ont longtemps été convaincus qu’en l’absence de solutions politiques plus équitables, les gains militaires ont tendance à se révéler fragiles. Tout comme les Azerbaïdjanais n’ont jamais oublié l’humiliation du début des années 1990, les Arméniens s’efforceront également d’effacer l’indignité de 2020. Si leurs griefs ne sont pas résolus, de nombreux Tigréens résisteront à ce qu’ils pourraient percevoir comme une domination étrangère. Israël ne connaîtra pas une véritable sécurité tant que les Palestiniens vivront sous son occupation. Mais cette croyance fondamentale est attaquée et il devient de plus en plus difficile de s’accrocher.

    De nombreuses personnes dans le monde ont vécu l’année écoulée comme une annus horribilis, attendant avec impatience sa conclusion. Mais comme le suggère la liste des conflits à surveiller qui suit, sa longue ombre perdurera. 2020 est peut-être une année à oublier, mais 2021 continuera probablement, et malheureusement, à nous le rappeler.

    1. Afghanistan

    Malgré des progrès modestes mais importants dans les pourparlers de paix, beaucoup de choses pourraient mal tourner pour l’Afghanistan en 2021.

    Après près de deux décennies de combats, le gouvernement américain a signé un accord avec les insurgés talibans en février. Washington s’est engagé à retirer ses troupes d’Afghanistan en échange des engagements des talibans d’interdire aux terroristes d’utiliser le pays pour des opérations et d’entamer des pourparlers avec le gouvernement afghan.

    Afghan peace talks took time to get underway. The government stretched out for six months a prisoner exchange the U.S. had promised to the Taliban – the release of 1,000 government troops or officials held by the Taliban in return for 5,000 Taliban fighters – which Kabul saw as lopsided. The insurgents, who had initially reduced suicide bombings and assaults on cities and towns, responded to delays by stepping up attacks and assassinations.

    Negotiations eventually started in Doha in mid-September, but the two sides took until December to agree on procedural rules. Neither shows much appetite for compromise. Bloodshed has, if anything, escalated. The Taliban appear to have abandoned any initial restraint. Recent months have seen an uptick in suicide bombings and larger offensives on towns.

    Un défi réside dans la façon dont les parties envisagent les discussions. Kaboul s’est engagé publiquement. Mais les hauts responsables se méfient profondément des talibans ou considèrent les négociations comme pouvant entraîner la disparition du gouvernement. Kaboul a cherché à ralentir les pourparlers sans franchir ouvertement Washington. En revanche, les dirigeants talibans estiment que leur mouvement est ascendant. Ils perçoivent le retrait des États-Unis et le processus de paix comme reflétant cette réalité. Au sein des rangs des insurgés également, de nombreux combattants s’attendent à ce que les négociations livrent une grande partie de ce pour quoi ils ont combattu.

    La date limite fixée dans l’accord de février pour un retrait militaire complet des États-Unis et de l’OTAN est imminente en mai 2021. Bien que Washington soutienne que cela était implicitement conditionnel aux progrès des pourparlers de paix afghans, les talibans réagiraient probablement avec colère aux retards importants. Depuis février, Trump a retiré des milliers de forces américaines. Un tirage initial à 8600 a été mandaté dans l’accord bilatéral, mais Trump a réduit ses effectifs à 4500 et s’est engagé à atteindre 2500 avant de quitter ses fonctions. Les retraits supplémentaires inconditionnels ont renforcé la confiance des talibans et l’inquiétude du gouvernement.

    Le sort de l’Afghanistan repose principalement sur les talibans, à Kaboul, et sur leur volonté de compromis.

    Le sort de l’Afghanistan repose principalement sur les talibans, à Kaboul, et sur leur volonté de compromis – mais en grande partie aussi dépend de Biden. Son administration voudra peut-être conditionner le retrait à l’avancement des pourparlers. Mais il faudra du temps aux parties afghanes pour parvenir à un règlement. Maintenir une présence militaire américaine dans le pays bien après mai sans aliéner irrémédiablement les talibans ne sera pas une mince affaire. Pour compliquer encore les choses, Biden a exprimé sa préférence pour le maintien de plusieurs milliers de forces antiterroristes en Afghanistan. Il devra peut-être décider entre cela et un processus de paix potentiellement réussi. Ni les talibans ni les pays de la région dont le soutien serait crucial pour le succès de tout accord n’accepteront une présence militaire américaine indéfinie.

    Un retrait précipité des États-Unis pourrait déstabiliser le gouvernement afghan et potentiellement conduire à une guerre civile multipartite élargie. À l’inverse, une présence prolongée pourrait inciter les talibans à renoncer aux pourparlers et à intensifier leurs attaques, provoquant une escalade majeure. L’un ou l’autre signifierait que 2021 marque l’année où l’Afghanistan perd sa meilleure chance de paix depuis une génération.

    2. Éthiopie

    Le 4 novembre, les forces fédérales éthiopiennes ont lancé un assaut contre la région de Tigray après une attaque meurtrière et la prise de contrôle des unités militaires fédérales de la région. À la fin de novembre, l’armée était entrée dans la capitale tigréenne, Mekelle. Les dirigeants du Front de libération du peuple du Tigray (TPLF) ont abandonné la ville, affirmant qu’ils souhaitaient épargner les civils. Beaucoup reste incertain, étant donné une panne de courant dans les médias. Mais la violence a probablement tué des milliers de personnes, dont de nombreux civils; déplacé plus d’un million à l’intérieur du pays; et conduit quelque 50 000 personnes à fuir au Soudan.

    Les racines de la crise du Tigray remontent à des années. Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed est arrivé au pouvoir en 2018 après des manifestations largement motivées par une colère persistante contre la coalition alors au pouvoir, qui était au pouvoir depuis 1991 et que le TPLF dominait. Le mandat d’Abiy, qui a débuté par d’importants efforts de réforme d’un système de gouvernance répressive, a été marqué par une perte d’influence pour les dirigeants tigréens, qui se plaignent d’être le bouc émissaire des exactions précédentes et regardent avec méfiance son rapprochement avec le vieil ennemi du TPLF, le président érythréen Isaias Afwerki. . Les alliés d’Abiy accusent les élites du TPLF de chercher à maintenir une part disproportionnée du pouvoir, d’entraver les réformes et d’attiser les troubles par la violence.

    Le conflit du Tigray est le plus amer de l’Éthiopie, mais il existe des lignes de fracture plus larges. Les régions puissantes sont en désaccord tandis que les partisans du système fédéraliste ethnique éthiopien (qui délègue le pouvoir à des régions ethniquement définies et que le TPLF a joué un rôle déterminant dans la conception) luttent contre les opposants à ce système, qui croient qu’il enracine l’identité ethnique et favorise la division. Alors que de nombreux Éthiopiens blâment le TPLF pour des années de régime oppressif, le parti tigréen n’est pas le seul à craindre qu’Abiy veuille en finir avec le système dans une quête de centralisation de l’autorité. Notamment, les critiques d’Abiy dans la région agitée d’Oromia – la plus peuplée d’Éthiopie – partagent ce point de vue, malgré l’héritage oromo d’Abiy.

    La question est maintenant de savoir ce qui vient ensuite. Les forces fédérales ont avancé et ont pris le contrôle de Mekelle et d’autres villes relativement rapidement. Addis-Abeba espère que ce qu’elle appelle son «opération de maintien de l’ordre» vaincra les rebelles restants. Il rejette les discussions avec les dirigeants du TPLF; autoriser l’impunité pour les hors-la-loi qui attaquent l’armée et violent la constitution récompenserait la trahison, disent les alliés d’Abiy. Le gouvernement central est en train de nommer un gouvernement régional intérimaire, a émis des mandats d’arrêt contre 167 responsables et officiers militaires tigréens, et semble espérer persuader les Tigréens d’abandonner leurs anciens dirigeants. Pourtant, le TPLF dispose d’un solide réseau de base.

    Il y a des signes inquiétants. Des rapports suggèrent des purges de Tigréens de l’armée et leurs mauvais traitements ailleurs dans le pays. Les milices de la région d’Amhara, qui borde le Tigré, se sont emparées d’un territoire contesté détenu depuis trois décennies par les Tigréens. Le TPLF a lancé des missiles sur l’Érythrée et les forces érythréennes ont presque certainement été impliquées dans l’offensive anti-TPLF. Tout cela alimentera les griefs tigréens et le sentiment séparatiste.

    Si le gouvernement fédéral investit massivement dans le Tigray, travaille avec la fonction publique locale telle qu’elle est plutôt que de la vider de la base du TPLF, arrête le harcèlement des Tigréens ailleurs et gère les zones contestées plutôt que de les laisser aux administrateurs d’Amhara, il pourrait être un espoir de paix. Il serait alors essentiel de s’orienter vers un dialogue national pour guérir les profondes divisions du pays au Tigré et au-delà. En l’absence de cela, les perspectives sont sombres pour une transition qui a inspiré tant d’espoir il y a seulement un an.

    3. Le Sahel

    La crise qui sévit dans la région du Sahel en Afrique du Nord continue de s’aggraver, la violence interethnique augmentant et les djihadistes étendant leur portée. 2020 a été l’année la plus meurtrière depuis le début de la crise en 2012, lorsque des militants islamistes ont envahi le nord du Mali, plongeant la région dans une instabilité prolongée.

    Les djihadistes contrôlent ou sont une présence de l’ombre dans des pans du Mali rural et du Burkina Faso et font des percées dans le sud-ouest du Niger. Les opérations françaises de lutte contre le terrorisme intensifiées en 2020 ont porté des coups aux militants, frappant l’affilié local de l’État islamique et tuant plusieurs dirigeants d’al-Qaïda. Combinées aux luttes intestines djihadistes, elles semblent avoir contribué au déclin des attaques militantes complexes contre les forces de sécurité. Mais les frappes militaires et les meurtres de chefs n’ont pas perturbé les structures de commandement ou le recrutement des djihadistes. En effet, plus les militaires étrangers s’empilent, plus la région semble devenir sanglante. Les autorités gouvernementales n’ont pas non plus pu récupérer les zones rurales perdues au profit des militants. Même là où la pression militaire oblige les jihadistes à sortir, ils ont tendance à revenir lorsque les opérations se calment.

    Les conditions dans lesquelles les militants prospèrent sont difficiles à inverser.

    Les conditions dans lesquelles les militants prospèrent sont difficiles à inverser. Les relations des États avec nombre de leurs citoyens ruraux se sont rompues, tout comme les systèmes traditionnels de gestion des conflits. En conséquence, ni l’État ni les autorités coutumières ne sont en mesure de calmer les frictions croissantes entre les communautés, souvent sur les ressources. Les abus des forces de sécurité alimentent le mécontentement. Tout cela est une aubaine pour les militants, qui prêtent de la puissance de feu et offrent une protection aux habitants ou même interviennent pour résoudre des conflits. Les milices ethniques mobilisées par les autorités maliennes et burkinabè pour lutter contre les jihadistes alimentent les violences intercommunautaires.

    Même au-delà des zones rurales, les citoyens sont de plus en plus en colère contre leurs gouvernements. Le coup d’État du Mali en août, résultat de manifestations provoquées par une élection contestée mais soutenu par une plus grande fureur contre la corruption et un régime inepte, est la preuve la plus flagrante. Un mécontentement similaire sévit au Niger et au Burkina Faso.

    Sans des efforts plus concertés pour lutter contre la crise de la gouvernance rurale au Sahel, il est difficile de voir comment la région peut échapper aux troubles actuels. De manière générale, de tels efforts exigeraient que les acteurs étatiques et autres se concentrent d’abord et avant tout sur la médiation des conflits locaux, en discutant avec les militants si nécessaire et en utilisant les accords qui en résultent comme base pour le retour de l’autorité de l’Etat dans les campagnes. Les opérations militaires étrangères sont essentielles, mais les acteurs internationaux doivent mettre l’accent sur le rétablissement de la paix au niveau local et faire pression pour une réforme de la gouvernance. Peu de choses suggèrent que l’approche militaire d’abord stabilisera le Sahel. En fait, au cours des dernières années, il semble avoir contribué à la montée des effusions de sang interethniques et du militantisme islamiste.

    4. Yémen

    La guerre au Yémen a causé ce que l’ONU considère toujours comme la pire catastrophe humanitaire au monde. Le COVID-19 a exacerbé la souffrance des civils déjà harcelés par la pauvreté, la faim et d’autres maladies. Les hauts responsables humanitaires mettent à nouveau en garde contre la famine.

    Il y a un an, il y avait une opportunité pour mettre fin à la guerre, mais les belligérants l’ont gaspillée. Les rebelles houthis parlaient par des canaux secondaires avec l’Arabie saoudite, le principal sponsor extérieur du gouvernement yéménite reconnu par l’ONU et dirigé par le président Abed Rabbo Mansour Hadi. Les Saoudiens faisaient également la médiation entre les factions anti-houthistes qui se disputaient le statut d’Aden, une ville du sud qui est la capitale provisoire du gouvernement et qui est contrôlée par le Conseil de transition du Sud (CTS) sécessionniste soutenu par les Emirats depuis août 2019. Ensemble, ces deux voies de négociation auraient pu servir de base à un processus politique négocié par l’ONU. Au lieu de cela, les combats se sont intensifiés, en particulier à Marib, le dernier bastion urbain du gouvernement Hadi dans le nord. Il a fallu un an de négociations de mauvaise humeur avant que les factions anti-Houthi se mettent d’accord sur la façon dont elles allaient partager les responsabilités en matière de sécurité dans le sud, éloigner leurs forces des lignes de front et former un nouveau gouvernement. Les négociations seront probablement confrontées à de nouveaux obstacles sur la relocalisation du cabinet à Aden. Les efforts de rétablissement de la paix de l’ONU ont également frappé un mur.

    Les Houthis et le gouvernement Hadi ont tous deux des raisons de ralentir. S’ils l’emportent à Marib, les Huthis auront conquis le nord et s’emparer de la centrale pétrolière, gazière et électrique de la province, ce qui leur permettra de générer l’électricité et les revenus dont ils ont tant besoin. Le gouvernement peut difficilement se permettre de perdre Marib, mais il recèle un autre espoir: l’administration Trump sortante pourrait, dans un coup de départ sur l’Iran, désigner les Houthis comme une organisation terroriste, resserrant le nœud économique sur les rebelles et compliquant les négociations avec eux par des acteurs extérieurs. . Une telle mesure augmenterait les risques de famine en entravant le commerce avec le Yémen, qui importe 90% de son blé et tout son riz. Cela pourrait également sonner le glas des efforts de médiation de l’ONU.

    Dans tous les cas, le cadre bipartite de l’ONU semble dépassé. Le Yémen n’est plus le pays qu’il était au début de la guerre; il s’est fragmenté alors que le conflit faisait rage. Les Houthis et le gouvernement n’ont pas de duopole sur le territoire ou la légitimité intérieure. D’autres acteurs locaux ont des intérêts, de l’influence et un pouvoir de gâchage. L’ONU devrait élargir son cadre pour inclure d’autres, notamment le STC et les forces soutenues par les Emirats sur la côte de la mer Rouge, ainsi que les tribus du nord, qui pourraient autrement bouleverser tout règlement qu’elles rejettent. Au lieu de négocier à deux, l’ONU devrait commencer à planifier un processus plus inclusif qui encouragerait la conclusion d’accords entre les principaux acteurs.

    En l’absence de correction de cap, 2021 s’annonce comme une autre année sombre pour les Yéménites, avec la guerre qui traîne, la maladie et potentiellement la famine se propage, les perspectives d’un règlement s’évaporant et des millions de Yéménites deviennent de plus en plus malades de jour en jour.

    5. Venezuela

    Près de deux ans se sont écoulés depuis que l’opposition vénézuélienne, les États-Unis et des pays d’Amérique latine et d’Europe ont proclamé le législateur Juan Guaidó président par intérim du Venezuela et prédit la disparition de Nicolás Maduro. Aujourd’hui, de tels espoirs sont en lambeaux. Une campagne de «pression maximale» menée par les États-Unis – impliquant des sanctions, un isolement international, des menaces implicites d’action militaire et même un coup d’État avorté – n’a pas renversé Maduro. Au contraire, ces actions l’ont rendu plus fort, car des alliés, y compris dans l’armée, se sont ralliés à lui, craignant que sa chute ne les mette en danger. Les conditions de vie des Vénézuéliens, dévastées par l’ineptie du gouvernement, les sanctions américaines et le COVID-19, ont touché le fond.

    Si Maduro reste retranché, ses adversaires pourraient voir leur fortune politique s’effondrer. Les bases de la revendication présidentielle de Guaidó reposaient sur la majorité parlementaire remportée par les partis d’opposition en 2015, combinée à l’argument selon lequel la réélection de Maduro en mai 2018 était une imposture. Maintenant, l’opposition est faible, divisée et à peine prise à l’Assemblée nationale. Le gouvernement a remporté les élections législatives de décembre, que tous, à l’exception de quelques petits partis d’opposition, ont boycottées, avec une majorité écrasante.

    Le malaise de l’opposition vient principalement de son incapacité à apporter des changements. Sa stratégie a sous-estimé la capacité de Maduro à survivre aux sanctions et à l’isolement international tout en surestimant la volonté de Washington de faire face à de vagues menaces de force.

    Le soutien des sanctions a également perdu le soutien des rivaux de Maduro, étant donné que ces mesures ont accéléré l’effondrement économique du Venezuela et appauvri davantage ses citoyens. Plus de 5 millions de citoyens ont fui, nombre d’entre eux se déplaçant maintenant dans les villes colombiennes ou dans les régions frontalières violentes. La plupart des familles qui restent ne peuvent pas mettre assez de nourriture sur la table. Des milliers d’enfants souffrent de dommages irréversibles dus à la malnutrition.

    Un nouveau gouvernement américain offre une opportunité de repenser. Le soutien à l’opposition vénézuélienne a été bipartite à Washington. Pourtant, l’équipe de Biden pourrait changer de cap, renoncer à tenter d’évincer Maduro et lancer des efforts diplomatiques visant à jeter les bases d’un règlement négocié avec l’aide des dirigeants de gauche et de droite en Amérique latine.

    Avec l’Union européenne, il pourrait tenter de rassurer les alliés de Maduro tels que la Russie, la Chine et Cuba que leurs intérêts fondamentaux dans le pays survivraient à une transition. Au-delà de la prise de mesures humanitaires immédiates pour atténuer la crise liée au coronavirus au Venezuela, la nouvelle administration pourrait également envisager de reprendre les contacts diplomatiques avec Caracas et de s’engager à lever progressivement les sanctions si le gouvernement prend des mesures significatives, telles que la libération de prisonniers politiques et le démantèlement des unités de police abusives. Des négociations soutenues au niveau international visant notamment à organiser des élections présidentielles crédibles, prévues pour 2024, pourraient venir ensuite, à condition que les deux parties montrent qu’elles sont réellement intéressées par un compromis.

    À l’heure actuelle, le gouvernement de Maduro ne montre aucun signe qu’il tiendrait un vote équitable. La plupart de ses rivaux veulent le renverser et le poursuivre. Un règlement semble plus éloigné que jamais. Mais après deux ans consacrés à des efforts infructueux et néfastes pour provoquer une rupture politique soudaine, la meilleure voie à suivre est de trouver un soutien pour une transition plus progressive.

    6. Somalie

    Des élections se profilent en Somalie au milieu de conflits amers entre le président Mohamed Abdullahi Mohamed (également connu sous le nom de «Farmajo») et ses rivaux. La guerre contre Al-Shabaab entre dans sa quinzième année, sans fin en vue, tandis que les donateurs s’irritent de plus en plus à payer les forces de l’Union africaine (UA) pour aider à garder les militants à distance.

    L’humeur à l’approche des élections – les élections législatives étaient prévues pour la mi-décembre mais ont été repoussées, et les préparatifs d’un vote présidentiel prévu pour février 2021 sont également en retard – est tendue. Les relations entre Mogadiscio et certaines régions de la Somalie – notamment le Puntland et le Jubaland, dont les dirigeants sont depuis longtemps rivaux de Mohamed et craignent sa réélection – sont tendues, en grande partie en raison de différends sur la répartition du pouvoir et des ressources entre le centre et la périphérie. Une telle discorde tend à opposer les communautés somaliennes les unes aux autres, y compris au niveau du clan, avec une rhétorique de plus en plus amère employée par toutes les parties.

    Al-Shabaab, quant à lui, reste puissant. Le groupe contrôle de grandes parties du sud et du centre de la Somalie, étend une présence de l’ombre bien au-delà de cela et attaque régulièrement la capitale de la Somalie. Alors que les dirigeants somaliens et leurs partenaires internationaux reconnaissent tous, en principe, que le défi d’Al-Shabaab ne peut être relevé avec la seule force, rares sont ceux qui proposent des alternatives claires. Des pourparlers avec des militants pourraient être une option, mais jusqu’à présent, les dirigeants du mouvement n’ont guère donné d’indication qu’ils veulent un règlement politique.

    Pour compliquer davantage les choses, la patience s’épuise avec la mission de l’UA qui lutte depuis des années contre Al-Shabaab. Sans ces forces, les grandes villes, voire Mogadiscio, seraient encore plus vulnérables aux assauts des militants. Les donateurs comme l’UE sont fatigués de se lancer dans ce qui semble être une campagne militaire sans fin. Le plan actuel est de confier la responsabilité principale de la sécurité aux forces somaliennes d’ici la fin de 2021, mais ces troupes restent faibles et mal préparées à diriger les efforts de contre-insurrection. Le risque d’un vide sécuritaire a été aggravé par le retrait soudain des forces éthiopiennes en raison de la crise du Tigray et du plan de l’administration Trump de retirer les troupes américaines de la formation et du mentorat de l’armée somalienne.

    Beaucoup dépend du vote présidentiel de février. Une élection raisonnablement propre, dont les résultats acceptent les principaux partis, pourrait permettre aux dirigeants somaliens et à leurs soutiens étrangers d’intensifier leurs efforts pour parvenir à un accord sur les relations fédérales et les arrangements constitutionnels et accélérer la réforme du secteur de la sécurité. Un vote contesté, en revanche, pourrait provoquer une crise politique qui élargit le fossé entre Mogadiscio et les régions, déclenche potentiellement la violence clanique et risque d’encourager Al-Shabaab.

    7. Libye

    Les coalitions militaires rivales en Libye ne se battent plus et l’ONU a relancé les négociations visant à réunifier le pays. Mais parvenir à une paix durable restera une tâche ardue.

    Le 23 octobre, l’Armée nationale libyenne (ANL) – dirigée par le général Khalifa Haftar et soutenue par l’Égypte, les Émirats arabes unis et la Russie – et le gouvernement d’union nationale (GNA) soutenu par la Turquie, dirigé par Fayez al-Sarraj , a signé un cessez-le-feu mettant officiellement fin à une bataille qui faisait rage à la périphérie de Tripoli et ailleurs depuis avril 2019. Les combats avaient tué quelque 3 000 personnes et déplacé des centaines de milliers de personnes. L’intervention militaire directe de la Turquie pour aider Sarraj au début de 2020 a inversé ce qui avait été l’avantage de Haftar. Les lignes de front sont désormais gelées dans le centre de la Libye.

    Le cessez-le-feu est bienvenu, mais sa mise en œuvre tarde. L’ANL et le GNA se sont engagés à retirer leurs troupes des lignes de front, à expulser les combattants étrangers et à arrêter toute formation militaire étrangère. Pourtant, les deux parties ont fait marche arrière. Leurs forces sont toujours sur les lignes de front et les avions-cargos militaires étrangers continuent d’atterrir sur leurs bases aériennes respectives, ce qui suggère que des soutiens extérieurs réapprovisionnent toujours les deux côtés.

    De même, les progrès ont été freinés dans la réunification d’un pays divisé depuis 2014. Les négociations de l’ONU organisées en novembre ont rassemblé 75 Libyens chargés de s’entendre sur un gouvernement d’unité intérimaire et une feuille de route pour les élections. Mais les discussions ont été entachées de controverses sur la manière dont l’ONU a sélectionné ces délégués, leur autorité légale, les luttes intestines et les allégations de tentative de corruption. Les participants ont accepté des élections à la fin de 2021 mais pas sur le cadre juridique régissant ces scrutins.

    Au cœur de tous les problèmes se trouve un désaccord sur le partage du pouvoir. Les partisans de Haftar exigent qu’un nouveau gouvernement place les camps de la LNA et du GNA sur un pied d’égalité. Ses rivaux s’opposent à l’inclusion de dirigeants pro-LNA dans toute nouvelle dispensation. Les puissances étrangères ont des vues tout aussi contrastées. La Turquie veut un gouvernement ami – sans partisans de Haftar – à Tripoli. À l’inverse, le Caire et Abu Dhabi veulent réduire l’influence d’Ankara et renforcer celle des politiciens pro-LNA. La Russie, qui soutient également l’ANL, tient à conserver son ancrage en Méditerranée, mais on ne sait pas si elle préfère le statu quo qui préserve son emprise à l’Est ou un nouveau gouvernement avec une représentation de l’ANL.

    Il est peu probable que les combats reprennent dans un avenir immédiat car les acteurs extérieurs, bien que désireux de consolider leur influence, ne veulent pas d’une autre série d’hostilités ouvertes. Mais plus les termes du cessez-le-feu ne sont pas respectés, plus le risque d’accidents provoquant un retour à la guerre est élevé. Pour éviter ce résultat, l’ONU doit aider à forger une feuille de route pour unifier les institutions divisées de la Libye et désamorcer les tensions entre les ennemis régionaux.

    8. Iran-États-Unis

    En janvier 2020, l’assassinat par les États-Unis du commandant iranien Qassem Suleimani a amené les tensions américano-iraniennes à un point d’ébullition. En fin de compte, la réponse de l’Iran a été relativement limitée et aucune des deux parties n’a choisi de s’intensifier, même si la température est restée dangereusement élevée. La nouvelle administration américaine pourrait calmer l’une des impasses les plus dangereuses au monde, notamment en revenant à l’accord nucléaire de 2015, également connu sous le nom de Plan d’action global conjoint (JCPOA). Mais le faire rapidement, gérer les relations avec l’Arabie saoudite et Israël – tous deux farouchement opposés à l’Iran – et passer ensuite à des discussions sur des questions régionales plus larges ne sera pas une mince affaire.

    La politique iranienne de l’administration Trump a entraîné ce qu’elle appelle une pression maximale. Cela a signifié la sortie du JCPOA et l’imposition de sanctions unilatérales sévères à l’Iran dans l’espoir de forcer de plus grandes concessions sur son programme nucléaire, de tempérer son influence régionale et – certains responsables espéraient – même de renverser le gouvernement de Téhéran.

    Les sanctions ont dévasté l’économie iranienne mais n’ont guère réussi à faire autre chose.

    Les sanctions ont dévasté l’économie iranienne mais n’ont guère réussi à faire autre chose. Tout au long de la présidence de Trump, le programme nucléaire iranien s’est développé, de moins en moins contraint par le JCPOA. Téhéran a des missiles balistiques plus précis que jamais et plus d’entre eux. Le tableau régional est devenu plus, pas moins, chargé d’incidents – du meurtre de Suleimani sur le sol irakien aux attaques contre des cibles de l’industrie énergétique saoudienne largement attribuées à Téhéran – déclenchant de multiples brosses avec la guerre ouverte. Rien n’indique que le gouvernement iranien, malgré des explosions périodiques de mécontentement populaire, soit en danger d’effondrement.

    Même dans ses derniers jours, l’administration Trump a doublé. Les dernières semaines de son mandat l’ont vu imposer davantage de désignations de sanctions. Le meurtre d’un scientifique nucléaire iranien de haut niveau, attribué à Israël, a encore enflammé les tensions et incité l’Iran à menacer d’étendre encore son programme nucléaire. Washington et certains alliés semblent déterminés à infliger un maximum de douleur à l’Iran et à restreindre la marge de manœuvre de la nouvelle administration Biden. Les risques de confrontation avant que Trump ne quitte ses fonctions restent vivants alors que les milices chiites pro-iraniennes ciblent les Américains en Irak.

    Biden a signalé qu’il changerait de cap, accepterait de rejoindre le JCPOA si l’Iran revenait à se conformer, puis chercherait à négocier un accord de suivi sur les missiles balistiques et la politique régionale. Téhéran a indiqué qu’il était également prêt à adhérer mutuellement à l’accord nucléaire existant. Cela semble le pari le plus sûr et le plus rapide, même si les obstacles ne manquent pas. Les gouvernements américain et iranien devront se mettre d’accord sur une séquence d’étapes entre l’allégement des sanctions et les restrictions nucléaires et également sur les sanctions à lever. La fenêtre pourrait être courte, avec des élections présidentielles en Iran prévues pour juin et un candidat plus radical devrait gagner.

    Mais s’ils reviennent au JCPOA, le plus grand défi sera de résoudre les tensions régionales et la polarisation qui, laissées à s’aggraver, continueront de compromettre l’accord et pourraient déclencher un conflit. Les gouvernements européens explorent la possibilité d’inciter l’Iran et les États arabes du Golfe à s’engager dans un dialogue pour réduire les tensions régionales et empêcher un déclenchement involontaire de guerre; l’administration Biden pourrait mettre tout son poids diplomatique derrière un tel effort.

    9. Russie-Turquie

    La Russie et la Turquie ne sont pas en guerre, souvent de mèche, mais soutiennent fréquemment des camps opposés – comme en Syrie et en Libye – ou se disputent le pouvoir, comme dans le Caucase. Ils se considèrent souvent comme des partenaires, compartimentent la discorde sur une question par rapport aux discussions sur les autres et coopèrent alors même que leurs alliés locaux s’affrontent. Pourtant, comme le montrent la destruction par la Turquie d’un avion russe en 2015 près de la frontière turco-syrienne et les meurtres en 2020 de dizaines de soldats turcs lors de frappes aériennes par les forces syriennes soutenues par la Russie, le risque d’affrontements inattendus est élevé. Alors que le président turc Recep Tayyip Erdoğan et son homologue russe, Vladimir Poutine, se sont jusqu’à présent révélés capables de gérer de tels incidents, toute brouille pourrait exacerber les conflits dans lesquels ils sont tous deux enchevêtrés.

    Les contradictions des relations Ankara-Moscou sont les plus claires en Syrie. La Turquie fait partie des antagonistes étrangers les plus féroces du président Bachar al-Assad et un fervent partisan des rebelles. La Russie, quant à elle, a jeté son poids derrière Assad et, en 2015, est intervenue pour tourner de manière décisive la guerre en sa faveur. La Turquie a depuis renoncé à évincer Assad, plus préoccupée par la lutte contre les Unités de protection du peuple (YPG), la ramification syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène une insurrection contre la Turquie depuis près de quatre décennies et qu’Ankara (et États-Unis et Europe) considère une organisation terroriste.

    Un accord de mars 2020 concocté par Moscou et Ankara a mis fin au dernier combat à Idlib, la dernière poche détenue par les rebelles dans le nord-ouest de la Syrie, et a montré à quel point les deux puissances ont besoin l’une de l’autre. La Russie attend de la Turquie qu’elle applique le cessez-le-feu d’Idlib. Ankara reconnaît qu’une autre offensive du régime, qui pourrait conduire des centaines de milliers de Syriens supplémentaires en Turquie, repose sur le soutien aérien russe, qui donne à Moscou un droit de veto virtuel sur une telle opération. Mais le statu quo est ténu: la guerre syrienne n’est pas terminée et une autre offensive soutenue par la Russie à Idlib reste possible.

    En Libye également, la Russie et la Turquie sont opposées. Les entrepreneurs russes soutiennent la LNA de Haftar, tandis que la Turquie soutient la GNA basée à Tripoli. Un cessez-le-feu fragile a eu lieu depuis octobre. Mais il est loin d’être clair qu’un accord puisse garantir à la Turquie les dirigeants libyens amicaux qu’elle souhaite tout en donnant à la Russie le pied qu’elle cherche.

    La Russie et la Turquie ont également été mêlées à la récente guerre du Haut-Karabakh. La Russie a une alliance militaire avec l’Arménie mais a évité de choisir son camp et a finalement négocié le cessez-le-feu qui a mis fin aux combats. La Turquie a prêté un soutien diplomatique et militaire à l’Azerbaïdjan, les drones turcs (et israéliens) aidant à supprimer les défenses aériennes arméniennes. Malgré leur concurrence dans le Caucase du Sud, Moscou et Ankara ont gagné cette fois-ci. La Russie a déployé des soldats de la paix et a considérablement accru son influence dans la région. La Turquie peut prétendre avoir joué un rôle important dans la victoire de l’Azerbaïdjan et bénéficiera d’un corridor commercial établi par l’accord de cessez-le-feu.

    Tout comme Moscou et Ankara s’affrontent sur un nombre croissant de champs de bataille, leurs liens sont plus forts qu’ils ne l’ont été depuis quelque temps.

    Paradoxalement, tout comme Moscou et Ankara s’affrontent sur un nombre croissant de champs de bataille, leurs liens sont plus forts qu’ils ne l’ont été depuis quelque temps. Leur «frenmité» est symptomatique de tendances plus larges – un monde dans lequel les puissances non occidentales repoussent de plus en plus les États-Unis et l’Europe occidentale et sont plus affirmées et plus disposées à conclure des alliances fluctuantes.

    La Russie a vu les tensions avec l’Occident monter sur fond de guerres en Ukraine et en Syrie, des accusations d’ingérence électorale et d’empoisonnement d’opposants sur le sol étranger, ainsi que des sanctions américaines et européennes. La Turquie s’irrite du soutien américain aux YPG et du refus d’extrader Fethullah Gülen – le religieux Ankara accuse d’avoir organisé une tentative de coup d’État en 2016 – ainsi que des critiques européennes de son recul démocratique et de ses prétendus préjugés dans le conflit chypriote. Les sanctions imposées par Washington en réponse à l’achat et aux tests par Ankara du système de défense antimissile russe S-400 résument ces tensions. En concluant des accords bilatéraux dans diverses zones de conflit, la Russie et la Turquie voient le potentiel de gain.

    Pourtant, les liens nés d’opportunités ne durent pas toujours. Avec leurs forces respectives si proches de plusieurs lignes de front, les points d’éclair potentiels abondent. Un ralentissement de leurs relations pourrait causer des problèmes aux deux nations et à plus d’une zone de guerre.

    10. Changement climatique

    La relation entre la guerre et le changement climatique n’est ni simple ni linéaire. Les mêmes conditions météorologiques augmenteront la violence dans une zone et pas dans une autre. Si certains pays gèrent bien la concurrence induite par le climat, d’autres ne la gèrent pas du tout. Tout dépend du fait que les États sont gouvernés de manière inclusive, sont bien équipés pour arbitrer les conflits sur les ressources ou peuvent subvenir aux besoins des citoyens lorsque leur vie ou leurs moyens de subsistance sont bouleversés. L’ampleur de la violence liée au climat en 2021 est incertaine, mais la tendance générale est assez claire: sans action urgente, le danger d’un conflit lié au climat augmentera dans les années à venir.

    Sans action urgente, le danger de conflit lié au climat augmentera dans les années à venir.

    Dans le nord du Nigéria, les sécheresses ont intensifié les combats entre éleveurs et agriculteurs au sujet de la diminution des ressources, qui en 2019 a tué deux fois plus de personnes que le conflit Boko Haram. Sur le Nil, l’Égypte et l’Éthiopie ont échangé des menaces d’action militaire contre le Grand barrage de la Renaissance éthiopienne, en partie en raison des craintes du Caire que le barrage aggrave la pénurie d’eau déjà grave. Pour l’instant, l’Afrique voit sans doute les pires risques de conflit liés au climat, mais certaines parties de l’Asie, de l’Amérique latine et du Moyen-Orient sont confrontées à des dangers similaires.

    Dans les pays fragiles du monde entier, des millions de personnes connaissent déjà des vagues de chaleur records, des précipitations extrêmes et irrégulières et une élévation du niveau de la mer. Tout cela pourrait alimenter l’instabilité: par exemple, en exacerbant l’insécurité alimentaire, la pénurie d’eau et la concurrence des ressources et en poussant davantage de personnes à fuir leurs maisons. Certaines études suggèrent qu’une augmentation de la température locale de 0,5 degré Celsius est associée, en moyenne, à un risque accru de conflit meurtrier de 10 à 20%. Si cette estimation est exacte, l’avenir est inquiétant. Les scientifiques de l’ONU estiment que les émissions d’origine humaine ont réchauffé la Terre d’un degré depuis l’époque préindustrielle et, avec l’accélération du rythme, prévoient un autre demi-degré dès 2030. Dans de nombreuses zones les plus instables du monde, cela pourrait se produire plus rapidement encore.

    Les gouvernements des pays à risque doivent réglementer pacifiquement l’accès aux ressources, qu’elles soient rares ou abondantes, à l’intérieur ou entre les États. Mais les pays en développement menacés de conflits ne devraient pas faire face seuls aux pressions d’un climat changeant.

    Il y a lieu d’être optimiste. La nouvelle administration américaine a placé la crise climatique au sommet de son agenda, et Biden a appelé à une action plus rapide pour atténuer les risques d’instabilité associés. Les gouvernements et les entreprises occidentaux se sont engagés à fournir aux pays les plus pauvres 100 milliards de dollars par an pour l’adaptation au changement climatique à partir de 2020. Ils devraient respecter ces engagements: les pays en développement méritent un soutien accru de la part de ceux dont l’intempérance des combustibles fossiles a provoqué la crise en premier lieu.

    Publié à l’origine dans Foreign Policy: 10 conflits à surveiller en 2021

    *Président de ICG

    Source : International Crisis Group, 30 déc 2021

    Tags : Vénézuela, Soudan, Liban, Etats-Unis, Joe Biden, Afghanistan, Ethipie, Sahel, Mali, Niger, Nigeria, Burkina Faso, Yémen, Somalie, Afrique, Libye, Iran, Russie, Turquie, Changement climatique, environnement,




  • Aboubakr Jamaï : Le Maroc n'a rien gagné dans le deal de la normalisation avec Israël

    Dans une interview en vidéoconférence, Aboubakr Jamaï, Enseignant de Relations Internationale à l’Université Américaine d’Aix en Provence, a déclaré que le Maroc n’a rien gagné dans le deal de la normalisation avec Israël qu’il a qualifié de « moralement corrompu ». Voici la transcription de l’intégralité de sa déclaration à ce sujet:

    Qu’est-ce qu’on a gagné avec ce deal? On a gagné, c’est vrai, la reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental par les Etats-Unis d’Amérique. Les Etats-Unis d’Amérique n’est pas n’importe quel pays, c’est la première puissance mondiale. C’est ce que l’État marocain nous a expliqué en large et en travers. « C’est une performance extraordinaire de notre diplomatie ». Très bien, creusons un peu. Qu’est-ce que le Maroc essaie d’obtenir aujourd’hui? Quel est le combat du Maroc ? Je parle du Maroc qui se bat pour la reconnaissance de son intégrité territoriale et donc de la marocanité du Sahara Occidental.

    Ce Maroc se bat pour que les Nations Unies reconnaissent cette souveraineté. Pas que les Etats-Unis la reconnaisse ou que la France la reconnaisse. Pourquoi ?Parce que, d’un côté que les Etats-Unis reconnaisse ou ne reconnaisse pas ne change pas grand chose parce que le Maroc, il faut bien le dire, bénéficie déjà de l’amitié américaine, du soutien français et américain . Les américains ne nous ont jamais puni du fait qu’on « occupait », ce que disent les indépendantistes sahraouis, cette région de l’Afrique que les Nations Unies nous disent n’est pas la nôtre. Que nous disent les Nations Unies selon le droit international?. Ça c’est le droit, ce n’est pas une prise de position de ma part, c’est le droit internationale qui dit qu’il faut le peuple sahraoui qui est reconnu comme peuple et le Polisario est reconnu encore une fois par le droit international comme étant son représentant légitime, ont le droit à l’autodétermination. Ça, c’est les règles de l’ONU, ce n’est pas moi qui ai mis en place ces règles, des « règles » qui ont été acceptées par le Maroc puisque le Maroc, lui-même, à un moment, a accepté à ce qu’il y ait un référendum, donc le droit à l’autodétermination.

    Malgré le fait que le Maroc est présent et contrôle la grande majorité du territoire qui s’appelle le Sahara Occidental en droit international et que nous, au Maroc, on appelle nos provinces du sud, cela ne nous a pas empêché d’être un acteur régional et mondial important, à avoir, en termes de relations avec l’UE, l’UE ne nous a jamais puni réellement du fait qu’on occupe cette partie de ce que nous considérons comme notre pays, les Etats-Unis de même, les relations commerciales sont totalement ouvertes, ne sont pas diminuées par le fait que nous y sommes déjà.

    Donc, sur le plan pratique, à part peut-être de mettre un drapeau américain à Dakhla, la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, ne change pas grand chose, en réalité. Nous y sommes déjà, nous exploitons le phosphate du Sahara, nous exploitons les richesses halieutiques du Sahara. Tout ça, on l’a déjà, même si parfois il y a quelques petits soucis, le monde pratiquement entier travaille avec nous malgré cela. Donc, ce qui compte pour nous. Donc, ce qui compte pour nous, ce n’est pas de nous assurer quant à nos relations avec les Etats-Unis ou avec l’UE soient plus développées et plus importantes parce qu’elles le sont déjà. Ce qui importe pour nous, c’est que les Nations Unies nous disent officiellement « il n’y a plus de droit d’autodétermination pour le peuple sahraoui, le Sahara marocain vous appartient, c’est le Maroc ». Donc, il faut convaincre les Nations Unies et donc convaincre le Conseil de Sécurité.

    Or, qu’est-ce qui s’est passé? Au lendemain de la reconnaissance de la marocanité du Sahara par les américains? Il s’est passé que l’Allemagne qui est, probablement, le pays le plus puissant d’Europe, a demandé une réunion d’urgence du Conseil de Sécurité. Au lendemain de cette réunion d’urgence provoquée par cette reconnaissance, les allemands ont publié un communiqué qui était très largement en défaveur du Maroc puisque les allemands nous ont dit, officiellement, que le Conseil de Sécurité restait attaché aux résolutions de l’ONU. Donc, on est toujours dans le cadre de l’autodétermination, même si, effectivement, dans les résolutions de l’ONU on parle de la possibilité d’étudier la solution de l’autonomie, mais le principe reste l’autodétermination. Donc, on bouge pas, personne n’a suivi les Etats-Unis d’Amérique. Ce qui nous intéresse beaucoup, ce sont nos alliés. La France n’a pas suivi les Etats-Unis d’Amérique. La France n’ pas emboîté le pas aux Etats-Unis en disant, après tout, « nous aussi nous reconnaissons la marocanité du Sahara Occidental ». Et évidemment, les allemands. Juste un petit détail qui a quand même son importance. Lorsque vous lisez ce communiqué, les allemands, au début de ce communiqué parlent un peu de l’historique de ce conflit et dans l’historique de ce conflit ils parlent du référendum. Et pour parler du référendum, ils disent que le Maroc a envoyé 10000 colons au Sahara Occidental pour le référendum, ce qui est, évidemment, la position du Polisario vis-à-vis de l’attitude marocaine. Eh bien, cette position est épousée par l’Allemagne qui est un Etat très important en Europe.

    Non seulement, l’Allemagne a publié un communiqué, mais l’Afrique du Sud qui est un pays quand même très important. Toute la politique marocaine de retour vers nos racines africaines, etc, était basée sur la notion d’essayer de convaincre donc les pilliers de l’Afrique de la marocanité du Sahara, petit à petit, et l’un des pillier les plus importants, avec le Nigeria, le Ghana, c’est l’Afrique du Sud. Avec son pouvoir symbolique extrêmement important, l’Afrique du Sud c’est le pays de Nelson Mandela. Eh bien, le représentant de l’Afrique du Sud à l’ONU a fait une déclaration extrêmement négative pour le Maroc en disant que l’Afrique restait attachée au processus d’autodétermination et au soutien du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.

    Pourquoi est-ce qu’il y a eu ces réactions qu’on peut considérer comme négatives malgré tous les mensonges qu’on raconte aux marocains à travers les médias officiels? Parce que les Etats-Unis qui ont reconnu la souveraineté du Maroc, c’est pas les Etats-Unis d’Amérique, c’est Donald Trump. C’est vrai, c’est le président des Etats-Unis. Donc, institutionnellement; on peut dire que c’est les Etats-Unis mais c’est Donald Trump. Depuis quand Donald Trump prend des décisions sages en terme de relations internationales? Ce que je veux dire, c’est que la valeur de cette proclamation présidentielle est d’autant plus diminuée que la crédibilité de celui qui en est l’auteur et qui est, elle-même, diminuée. Or, il se trouve que c’est Donald Trump. Et Donald Trump, justement, est très fortement critiqué, d’ailleurs, pas seulement par les démocrates, mais aussi par les républicains parce que sa politique étrangère a aliéné les alliés traditionnels. je ne parle des ennemis des Etats-Unis, je parle même des alliés traditionnels et que l’un des éléments importants de la politique future de Biden, d’ailleurs c’est ce que l’équipe de Biden elle-même, a proclamé, c’est d’essayer justement de rétablir, de reconnecter les Etats-Unis avec ses alliés traditionnels. Donc, vous imaginez bien que lorsque demain y aura l’administration Biden, que le dossier du Sahara va être étudié, et que les Allemands auront la position qu’ils ont aujourd’hui et que, évidemment, la Russie, la Chine, etc, aussi parce que c’est, à minima, c’est de s’attacher aux résolutions de l’ONU, vous pouvez très bien imaginer une administration américaine qui sent revenir, parce que je ne sais pas sûr qu’ »ils reviennent sur la proclamation de Trump, mais en fait ne lui donne pas de substance derrière, c’est que les Etats-Unis peuvent toujours dire « on reconnaît mais ça ne veut pas dire que l’ONU elle reconnaît et que pour résoudre le problème on va suivre, en fait, le travail de l’ONU et on va confirmer et soutenir l’approche qui contient en elle le droit à l’autodétermination des sahraouis. Pourquoi? Parce que le reste du Conseil de Sécurité est attaché à ce principe » qui, il faut pas l’oublier, est un principe essentiel. En fait, on découvre que nous, les marocains, on n’est pas très bien informés sur la réalité juridique de ce conflit. Il faut bien comprendre que nous on dit « l’intégrité territoriale ». C’est vrai que le concept de l’intégrité territoriale est dans la charte de l’ONU et qu’il est important sauf que dans notre cas à nous, cette intégrité territoriale à nous n’est pas opposable aux autres légalement. Pourquoi? Parce que le concept d’intégrité territoriale est opposable lorsque l’ONU vous reconnaît cette intégrité territoriale. Or, l’ONU ne nous a jamais reconnu la marocanité du Sahara. Donc, le concept qui est dominateur dans le dossier c’est le concept d’autodétermination qui lui aussi et l’autre concept de l’intégrité territoriale qui est essentiel à la construction de l’ordre international et qui est, peut-être, avec la souveraineté des Etats et donc de l’intégrité territoriale, un des éléments les plus importants de la Charte de l’ONU.

    Pour ces raisons, je considère que même sur l’affaire du Sahara, je ne suis pas persuadé de l’extraordinaire impact positif de cette reconnaissance d’autant plus que le Maroc n’est pas, malheureusement, institutionnellement équipé pour, justement gérer une autonomie du Sahara acceptable pour le reste de la communauté internationale. Parce que, ce qu’il faut bien comprendre c’est que le Maroc aujourd’hui dit que la seule solution, en ce qui nous concerne dans le conflit du Sahara Occidental, c’est la souveraineté marocaine et nous concédons que cette région aura une autonomie avancée. Le problème, c’est que lorsque vous étudiez les cas internationaux d’autonomie, d’autodétermination, etc, l’élément majeur qui détermine l’attitude de la communauté internationale à travers l’ONU pour, justement, accepter ou ne pas accepter la souveraineté d’un Etat sur un territoire c’est la démocratie et le respect des droits de l’homme. La communauté internationale ne peut pas venir chez vous qui n’avez pas de justice indépendante, qui violez les droits de vos propres citoyens de façon régulière et vous dire « voilà un autre peuple, le peuple sahraoui puisque l’ONU considère que c’est un autre peuple, d’abord on va vous le confier et c’est vous qui allez gérer ses affaires ». Elle ne peut pas le faire. Donc, même dans le cadre de la solution marocaine, nous sommes dans une contradition qui est nodale, qui est absolument essentielle, qui est de demander une solution pour laquelle nous, les marocains, nous sommes pas équipés institutionnellement. C’est-à-dire que si demain, une véritable étude du plan d’autonomie marocaine l’ONU et que le Polisario accepte de parler d’autonomie tout de suite les défauts de la cuirasse, le sous-développement institutionnel marocain va faire en sorte que ça va être une proposition très difficile à accepter, pas seulement par les sahraouis, mais aussi par le reste du monde. Et c’est en cela d’ailleurs, et je lis les deux sujets majeurs dont on a parlé aujourd’hui, que les violations des droits de l’homme, que ces mascarades de procès et de poursuites judiciaires dont sont coupables nos confrères, nos collègues et nos intellectuels, au fond va à l’encontre de la reconnaissance de la marocanité du Sahara. Paradoxalement et ironiquement. Parce que, encore une fois, on ne peut pas être crédible à demander à ce qu’il y ait une résolution du conflit à travers un projet d’autonomie alors que notre système politique est un système politique qui est sous-développé et autoritaire.
    Question : Donc, si je vous suis bien, on peut dire qu’à cette heure précise, le véritable gagnant de cette normalisation n’est pas le Maroc?
    Réponse : Le gagnant, ça ne concerne pas seulement le Maroc, mais c’est l’une des caractéristiques des Etats autoritaires c’est que les intérêts des élites au pouvoir prennent le pas sur les intérêts du pays. Donc, il faut différencier, lorsque les gens, si vous voulez, se félicitent d’un quelconque succès, en l’occurrence; ce succès c’est peut-être le succès des élites, d’ailleurs, à court terme, autoritaires marocaines. Mais, très franchement, il m’est difficile de voir en quoi le Maroc a fait avancer sa cause par ce deal qui, comme je l’ai dit et je le répète est moralement corrompu, d’un côté, et d’un autre côté, même sur un plan purement instrumental, ne me paraît pas, évidemment, à l’avantage du Maroc.
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