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    Europe: Perspectives d’approvisionnement en gaz par l’Algérie

    Algérie, Europe, Gaz, Russie, Ukraine, Etats-Unis, Chine,

    Dans les relations internationales n’existant pas de sentiments, quelles sont les relations commerciales entre l’Algérie et l’Espagne et les perspectives de l’approvisionnement en gaz par l’Algérie de l’Europe ?
    L’Algérie, étant reconnu par la communauté internationale comme un acteur clef de la stabilité de la région méditerranéenne et africaine, dans ses relations s’en tient à la légalité internationale ayant adopté une position de neutralité dans le conflit en Ukraine lors du récent vote à l’ONU, tissant d’excellentes relations avec la Russie, la Chine les USA , la majorité des pays européens et d‘autres pays en Afrique, en Asie, en Amérique du Sud et au Moyen orient , défendant avant tout sa souveraineté qui n’ pas de prix.

    Aussi , les supputations récentes de certains responsables espagnols, avis qui ne fait pas l’unanimité en Espagne, que les tensions actuelles seraient dictées par Moscou à l’Algérie, ne tiennent pas la route du fait du renforcement récent des relations économiques avec l’Italie, la France, l’Allemagne et les USA tout en gardant des relations stratégiques avec la Russie. Espérons que le dialogue productif l’emporte sur les passions. Comme l’ont souligné le président de la république et récemment l’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles, elle honorera ses engagements internationaux pour l‘approvisionnement en hydrocarbures quel que soit le pays, dans le cadre strict du respect des contrats. La révision des prix est contenu dans les clauses, en principe toutes les deux années, en rappelant que par le passé, ce sont deux pays l’Italie et l’Espagne qui avaient demandé la révision des prix à la baisse, lorsque le cours étaient bas. Aujourd4hui en toute souveraineté, le cours étant la hausse l’Algérie est en droit de demander une révision des prix à la hausse

    1.-Quelles sont les relations économiques de l’Algérie avec le reste du monde ?

    En dépit des relations politiques mouvementées depuis de longues décennies, l’Europe demeure le premier partenaire de l’Algérie, mais les échanges restent loin d’un optimum possible, comme en témoigne la structure du commerce extérieur du pays. En 2019,, la France était le 1er client de l’Algérie (14 % du total), devant l’Italie (13 %) et l’Espagne (11 %). La Chine était en 2019 le 1er fournisseur de l’Algérie (avec une part de marché de 18 %), suivie par la France (10 %) et l’Italie (8 %). Sur la liste des pays fournisseurs de l’Algérie, la France occupe la première place parmi les pays de l’UE avec 10 %, suivie de l’Italie (7 %), de l’Allemagne (6,5 %) et de l’Espagne (6,2 %) contre 17 % pour la Chine. En matière d’exportations, l’Italie est le premier client de l’Algérie avec un taux de 14,5 % suivie de la France (13,7 %) et l’Espagne (10 %) contre 9 % pour la Turquie et 5 % pour la Chine. Selon les statistiques douanières bilan 2020,sur 34,39 milliards d’importation de biens et 23,80 milliards de dollars d’exportation, les principaux partenaires sont la Chine avec 16,81% suivi de l’Italie, de la France, l’Allemagne et l’Espagne avec respectivement 10,60ù, 7,05% , 6,48% et 6,22%.

    Pour les principaux clients nous avons l’Italie avec 14,47% suivi de la France, l’Espagne, la Turquie et la Chine avec respectivement 13,69%, 9,84%, 8,91% et 4,89% Ainsi, les tendances du commerce extérieur , montrent que l’Europe demeure le premier partenaire avec peu d’évolution entre 2021/2022. Selon les données douanières pour 2020 nous avons la ventilation suivante par grandes zones : l’Europe 48,45% d’importation et 56,76% d’exportation avec une baisse de 17,70% par rapport à 2019 du fait de l’épidémie du coronavirus et de la baisse en volume physique des exportations d’hydrocarbures, ; l’Afrique importation 3,27% et exportation 6,58% ; Amérique 15,55% importation et 8,41% d’exportation ; Asie et Océanie 32,73% d’importation et 28,71% d’exportation , pour ce dernier cas la dominance de la Chine avec 35,50% des importations principal fournisseur suivi de la Turquie 18,04% et de l’Inde 6,76%. Pour la zone de libre échange entre l’Algérie et le monde arabe GZALE , les échanges sont dérisoires , environ 1,20 milliard de dollars en 2020 contre 1,33 en 2019 soit une baisse de 9,61%. En 2022, le monde est caractérisé par l’interdépendance des économies Il faut éviter pour analyser les impacts, le mythe d’une analyse statique de la balance commerciale mais raisonner toujours en dynamique. Prenons deux exemples : l’épidémie du coronavirus a fait découvrir aux européens notamment qu’ils dépendaient de certains produits de la Chine du fait de leur désindustrialisation.

    Récemment avec es tensions en Ukraine ils ont découvert leur forte dépendance de lla Russie pour l’Energie, dépassant les 40% pour leur approvisionnement et le reste du monde dont l’Afrique de la dépendance alimentaire, la Russie et l’Ukraine représentant environ 30% des exportations mondiales. Certes le PIB russe est extrêmement faible, ayant une économie peu diversifiée mais contrôlant des matières premières stratégiques, un PIB proche de celui de l’Espagne 1775 milliards de dollars en 2021 contre 1483 en 2020. L’Énergie outre la consommation de ménages entrent dans toutes les chaînes de production, la hausse des prix alimentant l’inflation mondiale et idem pour les biens alimentaires. Car la production est production de marchandises par des marchandises. Les pays développés contrôlant à leur tour les segments à forte valeur ajoutée répercutent cette hausse des prix sur les pays producteurs d’hydrocarbures (biens équipements, matières premières et biens de consommation) d’où ce qu’ils gagnent d’un côté, ils le perdent de l’autre côté devant dresser la balance devises pour calculer le solde net.

    2.-Relations commerciales Algérie /Espagne en 2021

    Selon les données internationales nous avons la situation suivante des principaux indicateurs économiques de l’Algérie et de l’Espagne. Pour l’Espagne le PIB (produit intérieur brut à prix courant ( donc devant tenir compte des fluctuations monétaires euro/dollar étant plus juste de raisonner à prix constants ) de 1426 milliards de dollars en 2021 contre 1280 en 2020. Les exportations de biens ( non compris les services) ont totalisé 307 milliards de dollars en 2020 et les importations 324 contre en 2021 325 milliards de dollars pour les exportations et 354 milliards de dollars pour les importations. Pour l’Algérie le PIB est évalué à 147 milliards de dollars en 2020 et 163 en 2022.

    Du fait de l’épidémie du coronavirus qui a affecté surtout les exportations d’hydrocarbures représentant avec les dérivées environ 97/98% des entrées en devises, les exportations ont été de 23,9 milliards de dollars et les importations de biens non compris les services de 33,8 milliards de dollars en 2020. Pour 2021, les exportations avoisinent les 37/38 milliards de dollars dont 34,5 provenant des hydrocarbures, Sonatrach incluant environ 2, 5 milliards de dollars de dérivées comptabilisées dans la rubrique hors hydrocarbures. Pour 2022, comme je l’ai mis en relief dans une interview au quotidien français le Monde.fr Paris, début juin 2021, et récemment le 11 juin 2022 lors du Forum initié par le quotidien gouvernemental Ech Chaab sur les défis de la transition économique, les recettes prévues seraient entre 58/59 milliards de dollars.

    Pour le commerce entre l’Espagne et l’Algérie, nous avons les résultats suivants : En 2020, l’Algérie a importé pour 2,1 milliards de dollars d’Espagne contre 2,9 milliards en 2019, soit une baisse de près de 21%. Dans le même temps, les exportations algériennes vers l’Espagne ont chuté de 40%, passant de près de 4 milliards de dollars en 2019 à 2,3 milliards de dollars en 2020, selon les chiffres des Douanes algériennes. Pour 2021, nous avons une valeur d’environ 7 milliards de dollars, les exportations Algérie Espagne sont d’environ 4,9, principalement les hydrocarbures, et les importations d’ Espagne de 2,1 milliards de dollars. Les exportations espagnoles vers l’Algérie comprennent le fer et l’acier, les machines, les produits de papier, le carburant et les plastiques, tandis que les exportations de services comprennent la construction, les affaires bancaires et les assurances.

    Les entreprises énergétiques espagnoles Naturgy, Repsol et Cepsa ont des contrats avec la compagnie gazière publique algérienne Sonatrach. Selon les statistiques de l’organisme public espagnol Strategic Reserves of Petroleum Products Corporation (Cores), sous la tutelle du ministère de la Transition écologique, L’Algérie demeure le premier fournisseur de l’Espagne en gaz, avec 41,4% des importations espagnoles entre le 1er janvier 2021 et fin janvier 2022, Les Etats-Unis, qui tentent une plus grande percée en Europe, notamment à la faveur de la crise avec la Russie, sont le deuxième fournisseur de gaz de l’Espagne, loin derrière l’Algérie, avec une part de 16,9% du total des importations espagnoles la Russie est le quatrième fournisseur, avec 8,7% suivie par le Qatar (6,3%) et le reste du monde 8,8%.

    3.-L’Algérie acteur stratégique de l’approvisionnement en énergie de l’Europe

    Les réserves algériennes sont d’environ 2500 milliards de mètres cubes gazeux et 10 milliards de barils de pétrole ( source conseil des ministres 2019). Sans compter la part du GNL représentant 33% des exportations, pour les canalisations, part 67%, nous avons le Transmed via l’Italie, la plus grande canalisation d’une capacité de 33,5 milliards de mètres cubes gazeux via la Tunisie, avec en 2021 une exportation d’environ de 22 milliards de mètres cubes gazeux, existant une possibilité, au maximum, il ne faut pas être utopique ayant assisté à un désinvestissement dans le secteur, donc sous réserve de l’accroissement de la production interne d’un supplément à court terme, au maximum de 3⁄4 milliards de mètres cubes gazeux, de 10 à 11 à moyen terme.

    Nous avons le Medgaz directement vers l’Espagne à partir de Beni Saf au départ d’une capacité de 8 milliards de mètres cubes gazeux qui après extension depuis février 2022 la capacité ayant été portée à 10 milliards de mètres cubes gazeux et le GME via le Maroc dont l’Algérie a décidé d’abandonner, le contrat s’étant achevé le 31 octobre 2022, d’une capacité de 13,5 de milliards de mètres cubes gazeux. Mais, il faut être réaliste, Sonatrach est confrontée à plusieurs contraintes notamment la forte consommation intérieure, en 2021 presque l’équivalent des exportations , qui risque horizon 2025/2030 de dépasser les exportations actuelles, dossier lié à la politique des subventions sans ciblage, dossier sensible qui demande un système d’information en temps réel et la maîtrise de la sphère informelle qui contrôle, selon les propos du président de la République entre 6000/10.000 milliards de dinars, soit entre 33 et 47% du PIB. Sous réserve de sept conditions, l’Algérie horizon 2025/2027, pourrait pouvant doubler les capacités d’exportations de gaz environ 80 milliards de mètres cubes gazeux avec une part entre 20/25% de l’approvisionnement de l’Europe : La première condition concerne l’amélioration de l’efficacité énergétique et une nouvelle politique des prix renvoyant au dossier de subventions La deuxième condition est relative à l’investissement à l’amont pour de nouvelles découvertes d’hydrocarbures traditionnels, tant en Algérie que dans d’autres contrées du monde, mais pouvant découvrir des gisements non rentables financièrement un des conseils réent des ministres a annoncé 40 milliards de dollars d’investissement sur les 5 prochaines années dont 8 pour 2022; et le partenariat avec l’étranger étant liée aux décrets d’application de la nouvelle loi des hydrocarbures notamment son volet fiscal

    La troisième condition, est liée au développement des énergies renouvelables (actuellement dérisoire moins de 1% de la consommation globale) devant combiner le thermique et le photovoltaïque le coût de production mondial a diminué de plus de 50% et il le sera plus à l’avenir où, avec plus de 3000 heures d’ensoleillement par an, l’Algérie a tout ce qu’il faut pour développer l’utilisation de l’énergie solaire La quatrième condition, selon la déclaration de plusieurs ministres de l’Énergie entre 2013/2020, l’Algérie compte construire sa première centrale nucléaire en 2025 à des fins pacifiques, pour faire face à une demande d’électricité galopante. La cinquième condition, est le développement du pétrole/gaz de schiste, selon les études américaines, l’Algérie possédant le troisième réservoir mondial, d’environ 19 500 milliards de mètres cubes gazeux, mais qui nécessite, outre un consensus social interne, de lourds investissements, la maîtrise des nouvelles technologies qui protègent l’environnement et des partenariats avec des firmes de renom. La sixième condition, consiste en la redynamisation du projet GALSI, Gazoduc Algérie-Sardaigne-Italie, qui devait être mis en service en 2012 d’une capacité de 8 milliards de mètres cubes gazeux La septième condition est l’accélération de la réalisation du gazoduc Nigeria-Europe via l’Algérie d’une capacité de plus de 33 milliards de mètres cubes gazeux, un cout selon les études européennes d’environ 20 milliards de dollars et nécessitant l’accord de l’Europe principal client. Cependant, l’avenir appartenant à l’hydrogène comme énergie du futur 2030/2040.

    En résumé, pour l’Europe, l’Algérie est un partenaire clef, et pour l’Algérie, l’Europe est un partenaire stratégique dans le domaine économique et même sécuritaire afin dans le cadre d’un partenariat gagnant-gagnant afin de faire du bassin méditerranéen un lac de paix et de prospérité partagé. En n’oubliant jamais que dans les relations internationales n’existent pas de sentiments mais que des intérêts, chaque pays défendant ses intérêts propres. Car face aux nouveaux enjeux, l’épidémie du coronavirus, le réchauffement climatique avec la maîtrise de l’eau principal input de la sécurité alimentaire et la crise ukrainienne préfigurent d’importantes mutations mondiales dans les relations internationales, militaires, sécuritaires, politiques, culturelles et économiques.

    Professeur des universités, expert international docteur d’ Etat, 1974, Abderrahmane MEBTOUL ademmebtoul@admin

    #Algérie #Europe #Gas #Ukraine #Russie

  • L’Europe dans la tempête parfaite

    L’Europe dans la tempête parfaite

    Europe, Ukraine, Russie, Union européenne, OTAN, Etats-Unis, Allemagne,

    L’Union européenne ne cesse d’affronter des crises et des surprises stratégiques, toutes plus importantes et plus violentes.[1] La guerre russe en Ukraine constitue la dernière en date. Il n’y a plus de crises, il n’y a que l’accélération d’évènements imprévus et de mutations profondes. Après les subprimes, les finances grecques, les réfugiés syriens, la pandémie de Covid, voilà le spectre de la guerre de retour sur le continent.

    Tous ces défis mettent à mal la plupart des politiques communautaires tout en confirmant la pertinence de la construction européenne.

    Dans les crises, l’Union européenne a plus progressé en quelques mois qu’en trente ans.

    Mais elle paie comptant ses retards et ses hésitations

    Elle doit réviser nombre de ses politiques et se projeter résolument dans un monde global, nouveau et plus brutal.

    L’UNION EUROPÉENNE A DÉJÀ BEAUCOUP PROGRESSÉ.

    Dans la crise sanitaire, bien que le premier mouvement des Etats ait été national – fermeture des frontières, compétition pour les instruments anti-virus – il a rapidement cédé la place à une réaction commune qui s’est illustrée dans l’acquisition et la distribution des vaccins, dont l’Union européenne est vite devenue le premier producteur et le premier donateur mondial. Les Etats membres démunis se sont tournés vers la coopération européenne. Elle a fonctionné.

    Le plan de relance qui a suivi a fait tomber nombre de tabous jusqu’ici infranchissables. NextGenerationEU, financé pour moitié par des emprunts communs, a ouvert la voie à des subventions directes des Etats les plus touchés par la pandémie. Du jamais vu. Il a donné une expression concrète à une solidarité européenne qu’on pensait régresser dans tous les domaines.

    Enfin, la guerre russe en Ukraine a été l’occasion d’une réaction rapide et massive dans l’adoption de sanctions sévères envers nombre d’acteurs russes, au détriment parfois des intérêts économiques immédiats.

    L’Union européenne s’est montrée beaucoup plus réactive qu’elle ne l’avait été jusqu’ici. Face à l’urgence, le « réflexe européen », qui n’avait pas joué pour faire face à la vague migratoire de 2015, s’est exprimé fortement. Les institutions communes ont compris que le facteur temps était une condition pour démontrer leur efficacité. L’adoption rapide de règles nouvelles, à vocation internationale, a surpris. D’abord en permettant le contrôle des investissements étrangers, ensuite en acceptant les emprunts communs et un rôle pivot de la Commission européenne comme acheteur de vaccins, puis de gaz. Le Digital Market Act et les textes à venir qui vont encadrer les activités numériques sur le territoire des Vingt-sept ont sonné l’heure de règlementations européennes applicables à tous les acteurs du secteur, quelles que soient leurs nationalités. En matière de défense et de diplomatie, les Européens ont su adopter une « boussole stratégique », premier pas vers une véritable stratégie mondiale. L’accélération – hélas trop lente encore – de la prise en compte, au niveau européen, du nécessaire réarmement de l’Europe est la plus récente des évolutions vers une réactivité et une efficacité renforcée de la coopération et des institutions européennes.

    A ce titre, on pourrait aussi noter positivement un tournant de l’action commune des Européens, « rajeunie » par son plan de relance, mais aussi vers de nouveaux champs de compétences jusqu’ici en sommeil ou inexplorés, par exemple, le soutien aux technologies de rupture, la politique spatiale, l’informatique quantique ou la production de composants électroniques (Chip Act).

    Certains pourront estimer insuffisantes ces évolutions, mais nul ne pourra contester qu’il s’agît là de ruptures majeures avec les pratiques précédentes de l’Union européenne et avec ses propres règles, pour beaucoup mises en sommeil. On notera aussi des initiatives individuelles ou bilatérales des Etats qui s’inscrivent manifestement dans une analyse européenne, telles que « l’Airbus des batteries », le Cloud européen ou les plans « hydrogène » plus ou moins concertés, le rôle du couple franco-allemand se révélant parfois déterminant.

    Il n’en demeure pas moins que l’Union européenne paie comptant ses retards, ses hésitations et ses divisions. C’est particulièrement flagrant en matière énergétique et de défense.

    Les refus réitérés de tous les Etats membres de construire une politique énergétique commune ont généré des dommages qui éclatent au grand jour. La dépendance vis-à-vis de ses fournisseurs, trop longtemps considérée comme un atout pour la coopération et l’avancée de l’Etat de droit à l’est ou au sud, constitue désormais une entrave considérable à sa marge de manœuvre diplomatique.

    En matière de défense, le fait de considérer la construction progressive d’une autonomie stratégique, c’est-à-dire d’une liberté d’action, comme une attaque de l’OTAN, a freiné les velléités d’arrêter le désarmement européen et de bâtir en commun un véritable pilier européen de l’Alliance. Les Européens se sont trouvés à la remorque de leurs alliés d’outreAtlantique, peu désireux de s’impliquer en Europe dans un rapport de force avec la Russie, tout obnubilés qu’ils sont par leur rivalité avec la Chine. La guerre en Ukraine a vu les Etats-Unis et le Royaume-Uni aux avant-postes de la riposte contre la guerre d’agression, tant en matière de renseignement et d’analyse que de soutien tangible à l’Ukraine attaquée.

    Cette situation au demeurant démontre a contrario la complémentarité entre l’OTAN et l’Union européenne. La dernière dispose des moyens financiers pour assister l’Ukraine agressée, tandis que la première est performante sur le plan militaire. Les livraisons d’armes financées par l’Union européenne démontrent à la fois les limites de son action et l’évolution de ses règles. Inédites, elles transgressent les règles communes en s’en remettant aux Etats membres pour agir. L’un, la France, assurant la présidence semestrielle du Conseil, maintient le seul canal occidental de communication avec le dictateur russe, les autres, avec la Pologne et les pays d’Europe centrale et orientale, garantissant que l’Union européenne n’acceptera pas de laisser tomber un voisin qui l’appelle au secours.

    LA RÉVISION, L’ÉVOLUTION OU LE LANCEMENT DE POLITIQUES COMMUNES EUROPÉENNES CONSTITUENT DONC LES TRAVAUX INDISPENSABLES DE L’UNION DANS LE PROCHE AVENIR.

    A l’évidence le pacte vert européen ne résisterait pas à une guerre prolongée, voire à un conflit qui impliquerait davantage les Etats membres. Le risque en est important. Dans de telles circonstances qui font passer l’urgence avant les politiques de long terme, on peut craindre des exceptions « obligées » et répétées à des dispositions déjà contestées par certains Etats membres. L’Union européenne doit adapter ses politiques avant d’être contrainte à passer à une économie de guerre.

    La « taxonomie », dont se montrent si friands certains commissaires et le Parlement européen, a voulu exclure l’énergie nucléaire et a finalement accepté d’inclure le gaz dans les énergies « de transition ». Ce compromis boiteux n’aurait jamais dû concerner l’énergie nucléaire qui contribue à l’indépendance énergétique de l’Europe, ni inclure le gaz dont tous souhaitent désormais se délivrer ou pour lequel ils envisagent dans l’urgence de changer de fournisseurs. Les industries de défense qui font aussi l’objet d’une mise à l’index devraient être exclues expressément des mêmes tentatives.

    En matière agricole, le sort fait aux pesticides, sans étude d’impact, risque d’entraîner une diminution des productions de céréales et d’accroître les pénuries et le prix des denrées de base au moment où la Russie et l’Ukraine, les deux principaux fournisseurs des pays en développement, diminuent leurs exportations de manière drastique. L’Union européenne a le choix : ou poursuivre sa politique élaborée sous la pression du lobby excessif d’ONG militantes et contribuer aux famines et aux révolutions, notamment sur les rives sud de la mer Méditerranée, ou alors, comme les ministres de l’agriculture l’ont déjà manifesté, remettre en culture certains espaces, accroître dans l’urgence les productions de produits essentiels pour éviter les conséquences sociales et politiques de ces pénuries. Elle renforcerait ainsi son rôle géopolitique auprès des Etats dans le besoin.

    Il va de soi qu’une solidarité européenne effective entre ses membres doit aussi prendre en compte la dimension énergétique. Les Etats dépendants doivent pouvoir s’appuyer sur leurs partenaires pour mutualiser certains de leurs approvisionnements ou pour bénéficier d’une force collective de négociation auprès de nouveaux fournisseurs. Peut-être sera-ce l’occasion de jeter les bases d’une politique commune plus réaliste dans ce domaine-clé de la souveraineté européenne ?

    Il en va de même en matière de défense. Actuellement, l’Union européenne finance la distribution d’armes à l’Ukraine, ce qu’elle est incapable de faire en interne. L’accélération et le renforcement du financement des industries de défense en Europe constitue une priorité qu’exigent autant l’objectif d’autonomie stratégique que les instances de l’OTAN. La politique commune de sanctions a impressionné par son ampleur. Elle ne saurait suffire ni dans l’immédiat ni pour le futur. Après la boussole stratégique adoptée au printemps, la prochaine étape est un vaste plan de financement des investissements de défense. Il vaudrait mieux qu’il soit coordonné, les annonces du Chancelier allemand en la matière semblant bien solitaires.

    L’ALLEMAGNE VA D’AILLEURS ÊTRE AU CŒUR DES PROBLÉMATIQUES EUROPÉENNES À VENIR.

    N’ayant aucune autonomie de défense, ne disposant pas d’une force armée efficace, ayant procédé à des choix énergétiques unilatéraux et peu solidaires de ses partenaires, dépendant de ses approvisionnements russes, souffrant de la fermeture des marchés chinois qui pourraient découler de la pandémie et des priorités politiques du parti communiste chinois, et devant gérer la conversion de son important secteur automobile, l’économie allemande va se trouver confrontée à de redoutables défis.


    Evoluera-t-elle vers une intégration européenne renforcée comme elle l’affirme ou continuera-t-elle des politiques nationales qui ne manqueront pas d’avoir des impacts négatifs sur ses partenaires en leur faisant supporter une partie de ses erreurs passées ? Les réponses sont très importantes pour ce pays et pour l’ensemble de l’Union européenne.

    La meilleure réponse serait de poursuivre résolument le parachèvement du marché intérieur, de l’Union bancaire et de l’Union des marchés de capitaux. L’Allemagne comme l’Union toute entière peuvent trouver dans ces chantiers une solution partielle aux urgences du moment et des solutions pérennes à une économie structurellement dépendante de pays tiers.

    Les solutions sont européennes. Les réflexes des gouvernements et des citoyens deviennent de plus en plus européens. Les Etats membres pourraient y puiser la force de nouvelles initiatives, permettant de gommer les hésitations, les lenteurs, voire les erreurs du passé, pour se tourner résolument vers l’avenir.

    La « tempête parfaite », c’est-à-dire violente, que traverse l’Union européenne est l’occasion de réviser certaines certitudes, d’adapter ses politiques et de conquérir un peu plus, par l’efficacité et la réactivité, le cœur des citoyens européens.

    Le présent Rapport Schuman sur l’état de l’Union a été très largement nourri de contributions écrites avant le déclenchement de la guerre russe en Ukraine. Mais il demeure d’une grande actualité par les problématiques de long terme qu’il analyse et les propositions qu’il contient.

    Jean-Dominique GIULIANI, Président de la Fondation Robert Schuman
    Pascale JOANNIN, Directrice générale de la Fondation Robert Schuman

    Fondation Robert Schuman, 30 mai 2022

    #Europe #Union_Européenne #UE #Ukraine #Russie #OTAN #EtatsUnis #Allemagne

  • Morocco to buy LNG directly from Spain

    Morocco, Spain, Algeria, NATO, Europe, Gas, LNG,

    The Government of Morocco after long weigh has decided to initiate the procedures to use Spain as an intermediary to guarantee the supply of natural gas. The African country has not been able to access Algerian gas since last October and since then it has studied the best way to obtain the precious hydrocarbon, which it must now acquire on international markets and, to do so, it will create a trading company in our country.

    Will create a marketing company in Spain

    Specifically, sources from the energy sector assure Merca2 that the Moroccan National Electricity and Drinking Water Office (ONEE) has contacted the Spanish authorities to create a company that is registered as a gas marketer in Spain. Its mission will be to buy Liquefied Natural Gas (LNG), bring it in methane tankers, treat it in one of the regasification plants that our country has and send it to Morocco through the GME pipeline, which will work in the opposite direction. “The ONEE was not very clear about whether it should create a new marketer in Spain or sign an agreement with an existing company, but it has finally decided to start the process to be self-sufficient and not depend on third parties. The threat of the Government of Algeria to Spain seems to have weighed on that decision,” indicate the sources consulted.

    Since Spain and Morocco began negotiations to reopen the GME pipeline in the opposite direction, Algeria has expressed its opposition because it feared that the gas that it delivers to our country through Medgaz (and that reaches the coast of Almería) could end up in hands of Mohamed VI’s regime. Especially after an email was leaked from the 3rd Deputy PM of the Spanish Government and Minister for the Ecological Transition, Teresa Ribera, in which she anticipated the reopening of the Maghreb gas pipeline in the opposite direction (north south). The red line imposed by Algeria was accompanied by a threat: to cut off the supply through Medgaz if Spain was not able to certify that each cubic meter sent to its southern neighbor came from other countries.

    Since then, Ribera has taken advantage of every public intervention to ensure that « not a single molecule of the gas that reaches Morocco can be attributed to gas from Algeria. » Ribera’s strategy – closely followed by the PM, who does not trust his own minister – was to make Spanish infrastructure available in Morocco « in commercial terms », with the « indispensable condition » that Morocco be the one purchase the LNG. « The origin of that gas and the place where it is unloaded will be transparent and public so that we can be sure that the volume, origin and destination complies with that commitment to Algeria, » Ribera said last April at parliamentary HQ.

    Buy LNG and treat it in spanish plants

    And said and done. Although at first the initial idea was for Enagás technicians to certify that the gas that would travel through the infrastructure of the Maghreb did not come from Algeria, finally the Moroccan Ministry of Energy, Mines and Sustainable Development has considered it more appropriate that a company from your country, dependent on the ONEE, initiate the procedures to register as a marketer in Spain and thus purchase LNG directly using the regasification infrastructures of our country. This soap opera, propitiated to a great extent by the change of position of the Spanish Government regarding Western Sahara, takes place at a moment in which Algeria has decided to reinforce its alliance with Italy, which will become its main client.

    The agreement between Italy and Algeria

    The agreement reached between the Algerian President AbdelmadjidTebboune and the Italian PM Mario Draghi will serve to send part of the gas from the HassiR’Mel field to central Europe next winter, leaving Spain in the background. For this reason, as Merca2 advanced exclusively, Blackrock and the rest of the companies that manage the Medgaz gas pipeline have decided to put in a drawer the expansion project that contemplated the construction of a second tube on the seabed to reach the coasts Spanish.

    The rapprochement with Morocco is not only part of the strategy of Pedro Sánchez’s cabinet, but is also shared by the main opposition party. A few days ago, the SG of the Popular Party (PP), Alberto NúñezFeijoo, told the Moroccan PM Aziz Akhannouch, that his political party « will strengthen its commitments and ties of neighborliness, reciprocity, honesty and loyalty » with Morocco. It is not in vain that the Spanish strategy with respect to Morocco is marked by the network of NATO alliances and the two major Spanish parties have closed ranks obeying the orders that come from Washington. Spanish intelligence sources assure this newspaper that Sánchez and Feijoo have been promised that our country will play a very important role in creating an energy hub in southern Europe that promotes the development of renewable energies in Morocco. An objective behind which hides a much more important element: the need for the US to close ranks in North Africa in the face of the new international scenario that opens with the war in Ukraine.

    The White House presses Europe

    Precisely after the Russian military intervention, the White House began to pressure the European authorities to take advantage of the situation and strengthen the role of Morocco, which although it does not belong to NATO, is a country that the US considers vital to reduce China’s influence in the African continent. That is why the Biden Administration invited the country last May to a summit at the German base in Ramstein, which was also attended by other countries that are not part of the Atlantic alliance. “The main objective of the US State Department is to prevent the eternal confrontation between Algeria and Morocco from blowing up interests in the area and for this it has made it clear to both countries that they are condemned to understand each other. Spain and Italy are responsible for lubricating that relationship and the war in Ukraine is an opportunity to do so. The forgotten continent is a great source of natural resources that are now more important than ever”, point out military sources.

    The NATO Summit in Madrid

    With all these elements on the table, the NATO Summit will be held in Madrid at the end of June, a meeting in which Morocco will also participate, and which the Spanish PM hopes will serve to « give a strong message to the southern part of the Alliance » through the new « security concept » that will come out of this meeting. Sánchez referred to this issue in his recent participation in the Davos Forum, which some have already dubbed the « Madrid Strategic Concept » and which will consist of using immigration, the energy issue and Islamist terrorism to reinforce the role of NATO in the region.

    The great stone in the shoe that the Government has in its relationship with Morocco is the sovereignty of Ceuta and Melilla, which the regime of Mohamed VI has not renounced. The intelligence sources consulted assure that after the summer Morocco will resume its offensive to reclaim these cities, even though the Spanish government said last April that the turn with respect to Western Sahara would reduce tension with the southern neighbor in this matter. For now, the truth is that the expected commercial customs are still closed, and this week Sánchez will appear in Lower Chamber to explain the new relationship established with Morocco since last March he sent the famous letter to Mohamed VI.

    #Morocco #Spain #Algeria #Gas #NATO #Europe

  • Guariglia: « L’Italie ne veut pas nuire à l’Espagne en Algérie »

    Guariglia: « L’Italie ne veut pas nuire à l’Espagne en Algérie »

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    Riccardo Guariglia (Chicago, 1961) est l’ambassadeur d’Italie en Espagne. Il est arrivé avec le bateau de Gênes au port de Barcelone il y a deux ans, au pire moment de la pandémie. De Barcelone à Madrid en voiture sur des routes désertes. Peu de gens seront entrés en Espagne de cette manière. Guariglia, d’origine napolitaine, a été ambassadeur en Pologne et chef du protocole diplomatique de l’État. Il mesure très bien les réponses et ne recule devant aucune question.

    L’Italie frappe à la porte de l’Algérie pour étendre les contrats d’achat de gaz naturel dans le but de réduire sa dépendance vis-à-vis de la Russie. L’Italie offre des investissements technologiques à l’Algérie pour développer sa capacité d’extraction de gaz. L’Italie s’est proposée à l’Algérie comme plate-forme pour la distribution de son gaz au reste de l’Europe. L’Italie essaie-t-elle de profiter de la crise des relations entre l’Espagne et l’Algérie ?

    Je nie catégoriquement cette hypothèse. Il n’y a aucune intention de ce genre de la part de l’Italie. Notre pays essaie seulement de devenir indépendant des approvisionnements russes [40% en ce qui concerne le gaz naturel]. L’Italie est beaucoup plus dépendante de la Russie que l’Espagne. Que fait l’Italie ? L’Italie rend visite à ses autres fournisseurs pour prolonger les contrats. Je parle de l’Azerbaïdjan, de l’Egypte, du Mozambique, du Congo, de l’Angola et de l’Algérie. Avec l’Algérie, nous avons un gazoduc qui ne fonctionne pas à pleine capacité depuis des années [le gazoduc Enrico Mattei-Tramsmed, qui traverse la Tunisie et atteint la Sicile par un pipeline sous-marin] et nous avons proposé de l’utiliser davantage. Je ne pense pas que cela nuise à l’Espagne.

    Q. En avez-vous discuté avec le gouvernement espagnol ?

    Je sais que le gouvernement espagnol le comprend. Nous n’essayons pas du tout d’influencer les relations entre l’Algérie et l’Espagne. Nous ne voulons nuire à personne, et je dois ajouter que les relations entre l’Italie et l’Espagne sont dans un de leurs meilleurs moments.

    L’Italie soutient-elle la reprise du Midcat, le gazoduc qui devait renforcer la connexion avec le reste de l’Europe à travers les Pyrénées catalanes, paralysée il y a plus de trois ans ?

    A. L’Italie soutient la reprise du Midcat. [La SNAM, société publique qui gère le réseau gazier italien, détient 40% de Téréga, société qui gère le réseau gazier du sud de la France].

    Le gouvernement italien a-t-il parlé avec les Français de la reprise du Midcat ?

    En tant qu’ambassadeur en Espagne, je ne peux pas vous le préciser, mais je peux vous dire que nous sommes en communication avec le gouvernement espagnol au sujet des interconnexions. L’Italie a également proposé la possibilité d’un gazoduc offshore entre Barcelone et le terminal italien de Livourne (Toscane). Une étude de faisabilité est en cours sur ce gazoduc, qui est cité dans le dernier document de l’UE sur la politique énergétique (plan Repower EU). Parallèlement, on travaille sur l’hypothèse d’un corridor maritime reliant Barcelone et les usines de Livourne et de La Spezia par une chaîne de petits navires de transport de GNL. Avec huit usines de regazéification de GNL [sept en Espagne et une au Portugal], la péninsule ibérique dispose d’une grande capacité. C’est un fait important. L’objectif est que l’Europe soit aussi indépendante que possible du gaz russe. Toute initiative visant à ouvrir de nouvelles routes et à obtenir de meilleurs approvisionnements doit être considérée comme stratégique.

    Revenons à l’Afrique du Nord. L’Italie et l’Espagne partagent-elles les mêmes critères sur la politique à développer par rapport à l’Afrique du Nord ?

    Les deux pays sont deux acteurs principaux de la Méditerranée. L’Italie a toujours voulu renforcer la stabilité dans cette région, en développant des relations économiques et politiques entre les deux rives de la Méditerranée qui soient mutuellement avantageuses. Nous sommes très impliqués dans la recherche de la stabilité en Libye [un pays en état de guerre civile depuis dix ans] et nous recherchons également la stabilité au Sahel, une région clé pour la lutte contre le terrorisme et l’action contre la migration illégale. L’Afrique du Nord est, à son tour, un groupe hétérogène de pays et ses spécificités doivent être prises en compte. L’Italie considère qu’il est très important, par exemple, de promouvoir les investissements dans la production d’énergies renouvelables en Afrique du Nord et dans la fabrication d’hydrogène vert, qui sera l’un des vecteurs énergétiques du futur. Nos objectifs sont sûrement très similaires à ceux de l’Espagne.

    Nous parlions auparavant des relations entre l’Italie et l’Espagne. Vous avez affirmé qu’elles sont meilleures que jamais. Il n’en a pas toujours été ainsi. Il y a eu des moments de froideur manifeste. Romano Prodi a fini par se fâcher avec José María Aznar. On ne peut pas dire que Silvio Berlusconi et José Luis Rodríguez Zapatero aient été en communion. Matteo Renzi et Mariano Rajoy se sont ignorés…

    Je pense qu’aujourd’hui nous sommes face à une relation très consolidée. Ces deux dernières années, il y a eu un véritable saut qualitatif. Dans la situation très délicate que nous vivons, l’Italie et l’Espagne ont mûri la conviction de faire un front commun sur de nombreux aspects. Lors de la négociation des plans européens de nouvelle génération (pandémie), l’Espagne et l’Italie ont agi conjointement. Maintenant, il y a une collaboration étroite avant la guerre en Ukraine. Il y a beaucoup de communication entre les deux gouvernements.

    La Vanguardia, 07/06/2022

    #Espagne #Italie #Algérie #RiccardoGuariglia #Russie

  • La Russie est en train de gagner la guerre économique

    La Russie est en train de gagner la guerre économique

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    Les effets pervers des sanctions se traduisent par une augmentation des coûts du carburant et des denrées alimentaires pour le reste du monde – et les craintes grandissent d’une catastrophe humanitaire. Tôt ou tard, un accord doit être conclu

    Cela fait maintenant trois mois que l’Occident a lancé sa guerre économique contre la Russie , et cela ne se déroule pas comme prévu. Au contraire, les choses vont vraiment très mal.

    Des sanctions ont été imposées à Vladimir Poutine non pas parce qu’elles étaient considérées comme la meilleure option, mais parce qu’elles étaient meilleures que les deux autres plans d’action disponibles : ne rien faire ou s’impliquer militairement.

    La première série de mesures économiques a été introduite immédiatement après l’invasion, alors qu’il était supposé que l’Ukraine capitulerait en quelques jours. Cela ne s’est pas produit, si bien que les sanctions – bien qu’encore incomplètes – se sont progressivement intensifiées.

    Il n’y a cependant aucun signe immédiat de retrait de la Russie de l’Ukraine et ce n’est guère surprenant, car les sanctions ont eu l’effet pervers de faire grimper le coût des exportations russes de pétrole et de gaz, d’augmenter massivement sa balance commerciale et de financer son effort de guerre. Au cours des quatre premiers mois de 2022, Poutine pourrait se vanter d’un excédent du compte courant de 96 milliards de dollars (76 milliards de livres sterling) – plus du triple du chiffre pour la même période de 2021.

    Lorsque l’UE a annoncé son interdiction partielle des exportations de pétrole russe plus tôt cette semaine, le coût du pétrole brut sur les marchés mondiaux a augmenté, offrant au Kremlin une autre manne financière. La Russie n’éprouve aucune difficulté à trouver des marchés alternatifs pour son énergie, avec des exportations de pétrole et de gaz vers la Chine en avril en hausse de plus de 50 % sur un an.

    Cela ne veut pas dire que les sanctions sont sans douleur pour la Russie. Le Fonds monétaire international estime que l’économie se contractera de 8,5 % cette année à mesure que les importations en provenance de l’ouest s’effondreront. La Russie dispose de stocks de biens essentiels au maintien de son économie, mais avec le temps, ils seront épuisés.

    Mais l’Europe ne se libère que progressivement de sa dépendance à l’égard de l’énergie russe, et ainsi une crise financière immédiate pour Poutine a été évitée. Le rouble – grâce au contrôle des capitaux et à un excédent commercial sain – est fort . Le Kremlin a le temps de trouver des sources alternatives de pièces de rechange et de composants auprès de pays désireux de contourner les sanctions occidentales.

    Lorsque les acteurs mondiaux se sont réunis à Davos la semaine dernière, le message public était la condamnation de l’agression russe et un engagement renouvelé à soutenir fermement l’Ukraine. Mais en privé, on s’inquiétait des coûts économiques d’une guerre prolongée.

    Ces inquiétudes sont tout à fait justifiées. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a donné un nouvel élan à des pressions déjà fortes sur les prix. Le taux d’inflation annuel du Royaume-Uni s’élève à 9 % – son plus haut niveau en 40 ans – les prix de l’essence ont atteint un niveau record et le plafond des prix de l’énergie devrait augmenter de 700 à 800 £ par an en octobre. Le dernier programme de soutien de Rishi Sunak pour faire face à la crise du coût de la vie était le troisième du chancelier en quatre mois – et il y en aura d’autres à venir plus tard dans l’année.

    À la suite de la guerre, les économies occidentales sont confrontées à une période de croissance lente ou négative et d’inflation croissante – un retour à la stagflation des années 1970. Les banques centrales – y compris la Banque d’Angleterre – estiment qu’elles doivent répondre à une inflation proche des taux à deux chiffres en augmentant les taux d’intérêt. Le chômage est appelé à augmenter. D’autres pays européens sont confrontés aux mêmes problèmes, sinon plus, car la plupart d’entre eux sont plus dépendants du gaz russe que le Royaume-Uni.

    Les problèmes auxquels sont confrontés les pays les plus pauvres du monde sont d’un ordre de grandeur différent. Pour certains d’entre eux, le problème n’est pas la stagflation, mais la famine, en raison du blocage de l’approvisionnement en blé des ports ukrainiens de la mer Noire.

    Comme l’a dit David Beasley, le directeur exécutif du Programme alimentaire mondial : « En ce moment, les silos à grains de l’Ukraine sont pleins. Dans le même temps, 44 millions de personnes dans le monde marchent vers la famine.

    Dans toutes les organisations multilatérales – le FMI, la Banque mondiale, l’Organisation mondiale du commerce et les Nations unies – les craintes grandissent d’une catastrophe humanitaire. La position est simple : à moins que les pays en développement ne soient eux-mêmes des exportateurs d’énergie, ils font face à un triple coup dur dans lequel les crises énergétiques et alimentaires déclenchent des crises financières. Confrontés au choix de nourrir leurs populations ou de payer leurs créanciers internationaux, les gouvernements opteront pour le premier. Le Sri Lanka a été le premier pays depuis l’invasion russe à faire défaut sur ses dettes , mais il est peu probable que ce soit le dernier. Le monde semble plus proche d’une véritable crise de la dette qu’à n’importe quel moment depuis les années 1990.

    Poutine a été condamné à juste titre pour avoir « militarisé » la nourriture, mais sa volonté de le faire ne devrait pas surprendre. Depuis le début, le président russe joue un long jeu, attendant que la coalition internationale contre lui se fragmente. Le Kremlin pense que le seuil de souffrance économique de la Russie est plus élevé que celui de l’Occident, et il a probablement raison à ce sujet.

    S’il fallait une preuve que les sanctions ne fonctionnent pas, alors la décision du président Joe Biden de fournir à l’Ukraine des systèmes de roquettes avancés le fournit . L’espoir est que la technologie militaire moderne des États-Unis réalisera ce que les interdictions énergétiques et la saisie des actifs russes n’ont pas réussi à faire jusqu’à présent : forcer Poutine à retirer ses troupes.

    La défaite complète de Poutine sur le champ de bataille est une façon dont la guerre pourrait se terminer, bien que dans l’état actuel des choses, cela ne semble pas si probable. Il y a d’autres résultats possibles. La première est que le blocus économique finit par fonctionner, avec des sanctions de plus en plus sévères forçant la Russie à reculer. Un autre est un règlement négocié.

    Poutine ne va pas se rendre sans condition, et le potentiel de graves dommages collatéraux de la guerre économique est évident : baisse du niveau de vie dans les pays développés ; la famine, les émeutes de la faim et une crise de la dette dans le monde en développement.

    Les atrocités commises par les troupes russes signifient qu’un compromis avec le Kremlin est actuellement difficile à avaler, mais la réalité économique ne suggère qu’une chose : tôt ou tard, un accord sera conclu.

    Larry Elliot

    Larry Elliott est le rédacteur économique du Guardian

    The Guardian, 02 juin 2022

    Lire aussi : Poutine compte se débarrasser du dollar et de l’euro

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    #Russie #Ukraine #Poutine #Guerre_économique #Gaz #Pétrole #Embargo #Occident #Europe #UE

  • La Guerre en Ukraine vue par les Think tanks (I)

    La Guerre en Ukraine vue par les Think tanks (I)

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    Premiers enseignements nucléaires de la guerre en Ukraine (IFRI, France)

    -L’invasion de l’Ukraine par la Russie s’est accompagnée de multiples signaux nucléaires envoyés par Moscou. Face à cette rhétorique offensive, les puissances nucléaires occidentales, dont la France, ont refusé une escalade dans ce domaine en produisant un signalement mesuré.

    -La doctrine nucléaire russe a évolué depuis la fin de la guerre froide et des conditions plus restrictives de l’emploi de l’arme ont été adoptées. Cependant, une certaine ambiguïté est maintenue et l’hypothèse de l’emploi d’une arme nucléaire non stratégique sur le champ de bataille ne doit pas être exclue.

    -Les conséquences de cette guerre sur les équilibres nucléaires mondiaux seront durables, notamment sur les traités de limitation des armements entre Russie et États-Unis.

    -La dissuasion élargie américaine en Europe de l’Est risque aussi d’être questionnée par des pays convaincus que seule la possession d’une arme nucléaire peut dissuader une autre puissance dotée, un narratif qui pourrait fragiliser le régime de non-prolifération.

    Une chronologie des allusions nucléaires de Moscou dans la guerre contre l’Ukraine (Fondation Science et Technologie Politique – Institut allemand pour la Politique internationale et Sécurité)


    Analyse

    Le soir du 23 février 2022, les forces russes ont attaqué l’Ukraine avec l’objectif de s’emparer de la capitale en quelques jours. Quelques heures plus tard, Vladimir Poutine a annoncé le lancement d’une « opération militaire spéciale ». Dans son discours, le président russe a mis en garde ceux qui pourraient être tentés de « faire obstacle » à la Russie. Ils devraient s’attendre à des « conséquences sans précédent » – une déclaration que beaucoup ont interprétée comme une allusion au potentiel d’armes nucléaires de la Russie. Le sabre nucléaire avait déjà commencé quelques jours avant l’invasion de l’Ukraine et des allusions nucléaires similaires se sont multipliées dans les semaines qui ont suivi. Elles ont été accompagnées de commentaires occidentaux, de condamnations et de quelques contre-réactions, peu nombreuses en comparaison. Mais surtout, les allusions de Moscou ont déclenché un débat public dans plusieurs pays occidentaux sur la manière dont elles devaient être interprétées et sur les réponses qu’elles appelaient.

    Ce document de travail rassemble et analyse les allusions nucléaires des décideurs russes et les réactions de l’Occident de la mi-février à la fin avril 2022. Fin avril au plus tard, la guerre a pris une nouvelle dimension politique et militaire. Le plan initial du Kremlin visant à conquérir rapidement Kyiv a échoué et les efforts de guerre de la Russie se sont désormais concentrés sur l’est de l’Ukraine. Dans ce document, nous proposons tout d’abord notre propre analyse des déclarations nucléaires russes et des réactions occidentales lors de la première phase de la guerre : Quel était l’objectif des déclarations du Kremlin ? Comment ont-elles été mises en œuvre ? Et comment peut-on interpréter ces réactions ? Dans un deuxième temps, nous énumérons les principaux développements et les représentons graphiquement. Dans la dernière partie, nous essayons de résumer toutes les déclarations pertinentes dans un récit, de les relier entre elles et de faire référence à la source originale si elle est disponible. Ce document n’a toutefois pas la prétention d’être exhaustif.

    Que cherche à faire la Russie avec ses allusions nucléaires ?

    Liviu Horovitz et Lydia Wachs soulignent trois objectifs dans un récent SWP-Aktuell.1 Premièrement, Poutine semble vouloir empêcher une intervention militaire directe de l’Occident. Les décideurs et décideuses occidentaux ont refusé à plusieurs reprises une intervention directe dans la guerre. Pourtant, du point de vue de Moscou, les conséquences d’une intervention occidentale seraient si importantes qu’elles justifieraient la réitération des lignes rouges. Il ressort des déclarations de presque tous les décideurs occidentaux que la Russie parvient en effet à dissuader une telle intervention – le risque d’une éventuelle escalade nucléaire est cité comme la principale raison pour laquelle l’OTAN n’interviendra pas directement. Le deuxième objectif est une dissuasion générale des mesures de soutien à l’Ukraine – plus on peut en dissuader, mieux c’est. Moscou formule ses menaces de manière vague afin de donner l’impression que les livraisons d’armes à Kyiv ou les sanctions économiques contre Moscou pourraient également franchir les lignes rouges nucléaires à partir d’un certain point. Compte tenu de l’impasse nucléaire dans laquelle se trouvent l’Occident et la Russie depuis des décennies, de telles menaces sont peu crédibles. Mais comme les risques et les incertitudes de la dissuasion nucléaire ne peuvent pas être totalement éliminés, les acteurs averses au risque sont particulièrement vulnérables à cette stratégie – un exercice d’équilibriste des élites occidentales dont les dirigeants russes se servent habilement.

    Troisièmement, Moscou tente d’effrayer l’opinion publique occidentale. En raison de l’immense pouvoir de destruction des armes nucléaires et du tabou nucléaire, ces armes suscitent une grande émotion. suscitent des émotions très fortes chez la plupart des gens. Moscou semble croire que qu’une population effrayée remettra en question les mesures de soutien de ses gouvernements à l’Ukraine. Le fait que l’opinion publique soit particulièrement importante dans les démocraties libérales profite à la Russie dans ce type d’influence. L’attention des médias et les craintes évidentes de la population suggèrent que la stratégie de Moscou fonctionne, du moins dans une certaine mesure.

    Comment Moscou tente-t-elle d’atteindre ces objectifs ?

    Avec une vingtaine de déclarations et d’actions entre la mi-février et la fin avril 2022, les dirigeants russes ont voulu suggérer, que l’utilisation d’armes nucléaires dans le contexte de la guerre contre l’Ukraine n’est pas exclue. D’un point de vue temporel, de telles déclarations se multiplient surtout lorsque des décisions occidentales sont sur le point d’être prises. Les rares déclarations qui sont plus explicites visent à visent à dissuader une intervention étrangère en Ukraine. La plupart des déclarations sont Les décideurs russes évoquent la possibilité d’une guerre nucléaire, mais n’expliquent pas qui aurait recours à de telles frappes. pourraient être utilisées et pourquoi. De plus, de nombreuses déclarations russes font référence à des mesures qui sont en fait routinières ou qui ont été annoncées et attendues auparavant. Fin avril, le test de par exemple, l’essai d’un missile intercontinental Sarmat à capacité nucléaire, prévu depuis un certain temps, s’est accompagné de la déclaration menaçante de Poutine selon laquelle cette arme « pourrait frapper tous ceux, qui tenteraient de menacer [la Russie] … les obligerait à réfléchir à nouveau ».

    Un modèle récurrent de la stratégie de communication russe est la rhétorique

    Des pointes suivies rapidement d’un affaiblissement de la rhétorique. On parvient ainsi à, d’une part, que le récit sur les armes nucléaires ne s’intensifie pas et, d’autre part, que des allusions similaires soient à nouveau perçues comme inquiétantes à une date ultérieure. Le président Poutine fait presque toujours preuve d’escalade, tandis que le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov est généralement celui qui relativise les déclarations. Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov est l’un de ceux qui s’expriment de plus en plus souvent de manière rassurante et précisent, que la doctrine nucléaire défensive de la Russie reste valable. Même au sein d’un même discours même discours, les décideurs russes font souvent des déclarations à la fois menaçantes et des allusions de désescalade. A titre d’illustration, Lavrov a déclaré fin avril que les risques d’une guerre nucléaire étaient « très importants », « sérieux » et « réels », tout en soulignant qu’il ne voulait pas les « exagérer ». ne voulait pas « augmenter artificiellement » ces risques – la position de la Russie étant qu’une guerre nucléaire est est inadmissible.

    L’absence de menaces explicites mérite d’être mentionnée

    L’expérience de la guerre de la guerre froide suggèrent que même des menaces peu crédibles susciteraient des mesures de préparation politique et technique de la part des gouvernements occidentaux. Moscou veut manifestement éviter cela. De plus, la Russie ne semble pas non plus vouloir ne prend aucune mesure militaire préparatoire pertinente pour une éventuelle intervention nucléaire. Les déclarations de Poutine après l’annonce de l’invasion en sont l’illustration. a certes déclaré qu’une obstruction de la Russie aurait des « conséquences sans précédent ». mais n’a ensuite mentionné les armes nucléaires que dans un contexte défensif. La Russie est « l’une des plus puissantes puissances nucléaires du monde ». une attaque directe conduirait à une défaite – une déclaration qui peut être conciliée avec la politique déclaratoire de toute puissance nucléaire.

    Comment l’Occident réagit-il ?

    Premièrement, les représentants occidentaux communiquent en permanence sur ce qui a effectivement été dissuadé. Il est possible qu’ils veuillent ainsi éviter tout malentendu avec la Russie. En outre, cette approche permet d’éviter toute pression politique interne pour entreprendre quelque chose qui a été découragé par les armes nucléaires de la Russie. Le président américain Joe Biden, le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg et de nombreux décideurs européens répètent ainsi que l’OTAN n’interviendra pas avec des troupes en Ukraine et ne souhaite pas de confrontation directe avec les troupes russes, principalement parce qu’une telle action comporte des risques nucléaires. Accompagnés de telles déclarations, les pays de l’OTAN ont par exemple décidé début mars de s’opposer à l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne en Ukraine – une mesure qui semblait au départ bénéficier d’un certain soutien public dans les pays occidentaux et qui aurait des « conséquences catastrophiques » selon Poutine.

    Deuxièmement, les hommes et femmes politiques occidentaux tentent de saper la stratégie de la Russie. Biden a par exemple déclaré à plusieurs reprises que les citoyens américains ne devaient pas craindre une attaque nucléaire de la Russie. A Washington, Londres et Paris, on ne cesse de répéter publiquement qu’il n’y a aucun signe que la Russie se prépare à une attaque avec des armes nucléaires. Mais surtout, les gouvernements occidentaux indiquent clairement que les menaces de Moscou n’ont pas d’effet dissuasif en ce qui concerne les sanctions contre la Russie ou les livraisons militaires à l’Ukraine – et agissent en conséquence, ce qui joue un rôle bien plus important.

    Troisièmement, les gouvernements occidentaux, en particulier les Etats-Unis, tentent de ne pas laisser la situation s’envenimer. Si Washington répondait aux insinuations de Moscou par un récit similaire, les deux puissances nucléaires pourraient rapidement se retrouver dans une situation difficilement contrôlable. Au lieu de cela, les Etats-Unis ont par exemple d’abord reporté un test de missile Minuteman III, qui a ensuite été complètement annulé. Washington a également souligné à plusieurs reprises qu’il ne voyait aucune raison de repositionner ses forces nucléaires. En outre, l’Occident a visiblement tenté de faire comprendre à Moscou qu’il n’avait pas l’intention de créer une menace existentielle pour l’Etat russe – le seuil d’une escalade nucléaire dans la doctrine russe. Les représentants des Etats membres de l’OTAN ont ainsi souligné à plusieurs reprises qu’ils ne se trouvaient pas dans une confrontation directe avec la Russie. Même lorsque le président américain Biden a déclaré fin mars que Poutine « ne pouvait pas rester au pouvoir », les représentants de son gouvernement ont immédiatement précisé que les Etats-Unis ne pratiquaient pas de politique de changement de régime en Russie.

    En fin de compte, l’administration américaine exprime ses propres lignes rouges. Bien que de telles déclarations soient principalement faites à huis clos afin d’éviter une escalade, Washington est plus crédible, tant vis-à-vis de la Russie que de ses alliés, lorsqu’il les rend publiques, du moins après coup. On a par exemple appris à la mi-mars que le gouvernement américain avait mis en garde la Russie contre l’utilisation d’armes nucléaires tactiques vers le 28 ou le 1er mars, c’est-à-dire juste après que Poutine ait ordonné l’état d’alerte élevé des forces nucléaires russes. Le 23 mars, un collaborateur du Conseil national de sécurité américain a en outre déclaré à la presse que l’utilisation d’une arme nucléaire tactique en Ukraine redistribuerait les cartes en vue d’une participation directe des Etats-Unis à la guerre. Enfin, avant et après le déclenchement de la guerre en Ukraine, Washington a clairement indiqué à Moscou que toute utilisation d’armes nucléaires serait considérée comme stratégique par le gouvernement américain.

    LA TEMPÊTE À VENIR (Center for Strategic and International Studies)

    Le point de vue de l’Ukraine sur l’escalade dans la guerre moderne

    Benjamin Jensen et Adrian Bogart

    À L’AVENIR…

    • Il y aura d’autres crises comme celle de l’Ukraine qui attireront les grandes puissances, feront naître des risques d’escalade fondés sur la peur et l’incertitude et mettront à l’épreuve la viabilité de la dissuasion intégrée.
    • Plus un conflit comme celui de l’Ukraine durera, moins il sera susceptible de se limiter à un seul État.
    • La communauté de la sécurité nationale devra mettre au point des outils et des techniques pour évaluer la concurrence, les tendances à l’escalade et les attitudes à risque des dirigeants étrangers, en combinant d’anciens concepts issus de la psychologie politique et les nouvelles capacités offertes par la science des données et le traitement du langage naturel.

    D’après trois simulations de crise organisées fin mars 2022 avec des membres de groupes de réflexion, des planificateurs militaires et des membres du Congrès, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) aura probablement du mal à faire face à des vecteurs d’escalade presque certains de pousser la guerre actuelle en Ukraine au-delà des frontières du pays. Ce document présente les principales conclusions de ces simulations basées sur deux événements déclencheurs : (1) une frappe chirurgicale russe sur un centre logistique de l’OTAN utilisé pour fournir des armes à l’Ukraine dans le sud-est de la Pologne, et (2) l’utilisation par la Russie d’armes chimiques le long de la frontière polonaise alors qu’elle se mobilise simultanément pour menacer les pays baltes. Alors que le conflit franchissait un seuil clé et risquait de se transformer en guerre régionale, la plupart des participants ont constaté une tendance naturelle à l’escalade dans chaque scénario, malgré des attentes limitées quant à l’obtention d’une position d’avantage concurrentiel. L’analyse de la manière dont les individus et les équipes ont abordé la prise de décision permet de repenser les modèles d’escalade au XXIe siècle et de tirer parti des nouveaux concepts et capacités pour mieux soutenir la signalisation en cas de crise.

    La guerre de la Russie en Ukraine : les objectifs et les hypothèses du Kremlin (International Centre for Defence and Security)

    Ce dossier aborde les objectifs de guerre de la Russie. Ceux-ci ne se limitent pas à la destruction de l’État ukrainien, ni même de la nation ukrainienne, de sa culture et de sa langue, mais incluent la modification de l’architecture de sécurité de l’Europe en sapant l’OTAN et l’UE. Il évalue également dans quelle mesure les hypothèses de la Russie étaient justes et fausses, comme le prouve le cours des événements après le 24 février 2022. Il conclut que le régime de Vladimir Poutine a tendance à faire des erreurs de calcul et semble avoir un appétit pour les aventures futures.

    -L’ambition de la Russie ne se limite en aucun cas à l’anéantissement de l’Ukraine.
    -L’objectif à long terme de la Russie – la destruction de l’Ukraine – ne changera pas tant que Poutine restera au pouvoir.
    L’objectif indéniable de Poutine est un Occident incapable de se mobiliser de manière solidaire pour défendre l’Ukraine et, en fin de compte, lui-même.
    -La Russie s’est montrée efficace pour exploiter les opportunités, mais incapable de tirer les leçons du passé.

    La guerre Russie-Ukraine à trois mois (Brookings)
    L’auteur examine les différents développements et note que l’issue souhaitée de cette guerre serait que les Ukrainiens forcent la Russie à se retirer ou, au minimum, que Moscou accepte un règlement négocié dans des conditions acceptables pour Kiev. Faire en sorte que l’agression russe échoue et que l’Ukraine obtienne l’un de ces résultats devrait être l’un des principaux objectifs de l’Occident.

    (Suivra)

    #Ukraine #Russie #Europe #OTAN #Guerre #EtatsUnis

  • Algérie: l’alternative au gaz russe?

    Algérie: l’alternative au gaz russe?

    Algérie, Gaz, Italie, Europe, Russie,

    Le président algérien Tebboune est à Rome, en Italie, pour parler des questions gazières. L’Algérie n’a jamais été aussi courtisée en ces temps de sanctions contre la Russie.

    Le gaz algérien comme substitut au gaz russe sur les marchés ? Totalement personne ne l’envisage, mais partiellement, certains pays font tout pour que cela devienne une réalité. C’est le cas de l’Italie, qui importait jusque-là 45 % de son gaz de Russie et qui est le premier acheteur européen de gaz algérien via le gazoduc Transmed. Le pays a multiplié les rencontres avec les autorités algériennes et a réussi en avril à conclure un accord pour des livraisons accrues de gaz. Mais au-delà de leur volonté d’aider ou non l’Europe, les Algériens ont-ils les capacités d’accroître rapidement leur production pour répondre à toutes les demandes à venir ?

    À court terme, la demande sera difficile à satisfaire
    D’ici quelques années, l’Algérie pourrait mettre à disposition quelques dizaines de milliards de m3 supplémentaires sur le marché, selon les déclarations d’Ali Hached, l’ancien vice-président de la Sonatrach, géant algérien du gaz et du pétrole, en février dernier.

    « Mais dans l’immédiat, les marges de négociations sont réduites au vu des faibles quantités additionnelles disponibles rapidement », confirme un expert algérien. Notre interlocuteur pointe un choix stratégique que le pays doit faire : une fraction du gaz algérien sert à maintenir la pression des gisements de pétrole.

    Puiser dans ces quantités disponibles, c’est courir le risque de réduire les capacités de production du pays en or noir demain. Sachant qu’aucun appel d’offre n’a par ailleurs été lancé ces dernières années et qu’entre une découverte et une mise en production, il faut compter en moyenne 5 ans, l’Algérie aura effectivement du mal à augmenter de manière significative ses capacités de production à très court terme.

    L’Algérie possède moins de 2 % des réserves mondiales de gaz conventionnel

    L’autre question est celle des réserves de gaz qui permettraient au pays d’assurer une durabilité d’approvisionnement. Le chiffre est a priori technique, mais en réalité très politique. Les données officielles sont rares sur le sujet. Selon l’édition 2021 du BP Statistical Review, rapport de référence dans le domaine de l’énergie, l’Algérie possédait, en 2020, 1,2 % des réserves mondiales connues de gaz naturel – soit 2 300 milliards de m3. La tendance est à une baisse graduelle de ces réserves. Il n’y a en effet pas eu de découverte majeure depuis des années, et en revanche la consommation interne ne fait qu’augmenter.

    L’Algérie possède cependant un autre atout : elle abrite les troisièmes réserves mondiales de gaz de schiste. Mais celles-ci ne sont pour l’heure pas du tout exploitées et demanderaient de gros moyens techniques et financiers pour l’être. Après une tentative d’exploration avortée dans le sud du pays, le président Tebboune a promis un débat national sur le sujet.

    RFI, 26 mai 2022

    #Algérie #Gaz #Europe #Italie #Russie

  • La variole du singe s’étend en Europe

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    Après les Etats-Unis et plusieurs pays européens, notamment l’Espagne et le Portugal, la France et l’Allemagne sont touchées à leur tour par la variole du singe. Si la plupart des cas sont pour l’heure sans gravité, cette vague inhabituelle hors d’Afrique préoccupe les autorités sanitaires.

    « A ce jour, au moins huit pays (européens) – le Portugal, l’Espagne, l’Allemagne, la Belgique, la France, l’Italie, le Royaume-Uni et la Suède – ont signalé des cas de variole du singe », a résumé vendredi dans un communiqué Hans Kluge, responsable de l’antenne européenne de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

    « Des cas semblables et récents ont également été signalé en Australie, au Canada et aux Etats-Unis », a-t-il précisé.

    Au total, 80 cas sont confirmés et une cinquantaine d’autres sont à l’étude, selon l’OMS.

    Ce décompte, voué à progresser ces prochains jours, ne concerne que des pays où la présence de malades de la variole du singe est inhabituelle. Elle est présente en temps normale, considérée comme « endémique », dans 11 pays d’Afrique.

    Cette maladie est une cousine moins dangereuse de la variole, éradiquée depuis une quarantaine d’année. Elle se traduit d’abord par une forte fièvre et évolue rapidement en éruption cutanée, avec la formation de croutes, notamment sur le visage.

    Elle a gagné vendredi la France et l’Allemagne, avec un cas confirmé dans chaque pays par leurs autorités sanitaires.

    Une souche bénigne

    En France, il s’agit d’un homme de 29 ans, localisé dans la région parisienne, sans antécédent de voyage dans un pays où circule le virus. Dès la suspicion de son infection, cette personne a été prise en charge et, en l’absence de gravité, est isolée depuis à son domicile.

    En Allemagne, ce sont les autorités médicales militaires qui ont fait état d’un cas, isolé dans une clinique de Munich. En Espagne, le ministère de la Santé a recensé 7 cas confirmés et 23 cas positifs via PCR d’une « variole non humaine » qui doivent encore être « séquencés pour déterminer le type de variole ». 23 cas ont été confirmés au Portugal.

    Ils viennent s’ajouter à une vague entamée au Royaume-Uni où les premiers malades ont été repérés début mai.

    Ces cas ne sont pour le moment pas graves. Même s’il est tôt pour s’en assurer, ils semblent ressortir d’une souche plutôt bénigne du virus avec un taux de mortalité de 1 %. Ce chiffre doit, de plus, être relativisé par le fait qu’il se rapporte à des pays en voie de développement où les systèmes de santé sont moins efficaces.

    « Il faut insister sur le fait que la plupart des cas actuellement examinés en Europe sont légers », a insisté M. Klug. « La variole du singe est généralement une maladie qui se guérit d’elle-même (…) après quelques semaines sans traitement. »

    Pour autant, ce qui inquiète les autorités sanitaires, c’est le fait que ces cas apparaissent simultanément dans de nombreux pays, chez des personnes qui, pour la plupart, n’avaient pas de lien direct avec les pays où la maladie circule.

    Suivi des « cas contact » plus léger

    Depuis 2017, quelques cas importés, notamment du Nigeria, avaient certes été sporadiquement identifiés dans plusieurs pays, en particulier au Royaume-Uni, sans donner lieu à des épidémies.

    Mais « récemment, l’alerte est relativement différente: les signalements faits correspondent à des cas de personnes n’ayant pas voyagé dans les pays où le virus circule habituellement et n’ayant pas eu de contacts avec des personnes revenant de ces pays », a souligné vendredi lors d’un point presse Alexandra Mailles, épidémiologiste à Santé Publique France.

    Par ailleurs, ces cas sont survenus principalement, mais pas uniquement, chez des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes.

    Nombre de chercheurs insistent quant au fait qu’il est trop tôt pour en conclure que le virus a évolué pour devenir transmissible sexuellement. Mais l’apparition de ces multiples cas dans le monde pose la question d’une contagiosité devenue plus élevée.

    La variole du singe est habituellement transmise à l’homme par des rongeurs sauvages ou des primates. Mais une transmission inter-humaine est également possible, par contact direct avec les lésions cutanées ou les muqueuses d’une personne malade, ainsi que par les gouttelettes.

    Les autorités sanitaires se gardent, en tout cas, de dresser des parallèles avec la pandémie de Covid qui a bouleversé le monde au cours des deux dernières années.

    « Il y aura un suivi des +cas contact+ beaucoup plus léger que celui du Covid: contrairement à ce qui se produit avec le virus du SARS-Cov2, une personne infectée n’est en effet pas contagieuse avant le début des symptômes », a noté Mme Mailles.

    AFP/LePoint

    Source : L’Espoir libéré, 21 mai 2022

    #Variole @Europe

  • Voici comment l’Europe a été poussée au suicide économique

    Voici comment l’Europe a été poussée au suicide économique

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    Avec l’aide active des « dirigeants » européens, les États-Unis parviennent à ruiner l’Europe.

    Comme l’écrivait Michael Hudson, professeur et chercheur en économie à l’université du Missouri à Kansas City, début février, avant l’intervention de la Russie en Ukraine :

    L’Amérique n’a plus la puissance monétaire, l’excédent commercial et une balance des paiements toujours positive qui lui permettait d’élaborer les règles du commerce et de l’investissement dans le monde depuis 1944-45. La menace qui pèse sur la domination américaine est que la Chine, la Russie et le cœur de l’île-monde eurasienne de Mackinder offrent de meilleures opportunités de commerce et d’investissement que celles offertes par les États-Unis, qui demandent de plus en plus désespérément des sacrifices à leurs alliés de l’OTAN et autres.

    L’exemple le plus flagrant est la volonté des États-Unis d’empêcher l’Allemagne d’autoriser la construction du gazoduc Nord Stream 2 afin d’obtenir du gaz russe pour les prochains froids. Angela Merkel s’est mise d’accord avec Donald Trump pour dépenser un milliard de dollars dans la construction d’un nouveau port GNL afin de devenir plus dépendante du GNL américain, dont le prix est élevé. (Le plan a été annulé après que les élections américaines et allemandes ont changé les deux dirigeants). Mais l’Allemagne n’a pas d’autre moyen de chauffer un grand nombre de ses maisons et immeubles de bureaux (ou d’approvisionner ses entreprises d’engrais) que le gaz russe.

    Le seul moyen qui restait aux diplomates américains pour bloquer les achats européens était d’inciter la Russie à lancer une réponse militaire, puis de prétendre que la réplique à cette réponse doit l’emporter sur tout intérêt économique purement national. Comme l’a expliqué la sous-secrétaire d’État aux affaires politiques, Victoria Nuland, lors d’un point de presse du département d’État, le 27 janvier : « Si la Russie envahit l’Ukraine, d’une manière ou d’une autre, le Nord Stream 2 n’avancera plus ». Le problème est de créer un incident suffisamment offensif et de dépeindre la Russie comme l’agresseur.

    À la mi-février, un observateur de l’OSCE notait que les bombardements d’artillerie sur le Donbass par les Ukrainiens était passé d’une poignée à plus de 2 000 explosions par jour. La Russie a réagi à ces préparatifs d’attaque en reconnaissant les républiques du Donbass, en signant des accords de défense avec elles et en leur venant finalement en aide.

    Peu après le lancement de l’opération militaire russe, le professeur Hudson a approfondi ses réflexions :

    La récente provocation de la Russie par l’expansion de la violence ethnique anti-russe par le régime néo-nazi ukrainien de Maiden post-2014 vise à provoquer une épreuve de force. Elle répond à la crainte des intérêts américains de perdre leur emprise économique et politique sur leurs alliés de l’OTAN et d’autres satellites de la zone dollar, car ces pays ont vu leurs principales opportunités de gain dans l’augmentation de leur commerce et de leurs investissements avec la Chine et la Russie. …

    Comme l’a expliqué le président Biden, l’escalade militaire actuelle (« en agaçant l’ours ») ne concerne pas vraiment l’Ukraine. Biden a promis dès le départ qu’aucune troupe américaine ne serait impliquée. Mais il exige depuis plus d’un an que l’Allemagne empêche le gazoduc Nord Stream 2 d’approvisionner son industrie et ses logements en gaz à bas prix et se tourne vers les fournisseurs américains, dont les prix sont beaucoup plus élevés. …

    L’objectif stratégique américain le plus urgent de la confrontation entre l’OTAN et la Russie est la flambée des prix du pétrole et du gaz. En plus de créer des profits et des gains boursiers pour les entreprises américaines, les prix plus élevés de l’énergie vont faire perdre une grande partie de sa vapeur à l’économie allemande.

    Au début du mois d’avril, le professeur Hudson refaisait un point sur la situation :

    Il est maintenant clair que la nouvelle guerre froide a été planifiée il y a plus d’un an par les États-Unis, avec la stratégie de bloquer le Nord Stream 2 dans le cadre de son objectif d’empêcher l’Europe occidentale (« OTAN ») d’augmenter sa prospérité par le commerce et les investissements mutuels avec la Chine et la Russie. …

    Ainsi, les régions russophones de Donetsk et de Louhansk ont été bombardées avec une intensité croissante, et comme la Russie s’abstenait de répondre, des plans auraient été élaborés pour lancer une grande épreuve de force en février dernier ;- une attaque lourde de l’Ukraine occidentale organisée par des conseillers américains et armée par l’OTAN. …

    Avant la guerre des sanctions, le commerce et les investissements européens promettaient une prospérité mutuelle croissante grâce aux relations entre l’Allemagne, la France et d’autres pays de l’OTAN d’un côté et la Russie et de la Chine de l’autre. La Russie fournissait une énergie abondante à un prix compétitif, et cet approvisionnement énergétique devait faire un bond en avant avec Nord Stream 2.

    L’Europe devait gagner les devises étrangères nécessaires pour payer ce commerce d’importation croissant en exportant davantage de produits industriels vers la Russie et en investissant dans la reconstruction de l’économie russe, par exemple par des entreprises automobiles allemandes, des avions et des investissements financiers. Ce commerce et ces investissements bilatéraux sont désormais interrompus pour de très nombreuses années, étant donné la confiscation par l’OTAN des réserves étrangères de la Russie conservées en euros et en livres sterling.

    La réponse européenne à la guerre par procuration des États-Unis contre la Russie est basée sur une moralisation hystérique menée par les médias, ou alors une hystérie moralisatrice. Elle n’était et n’est toujours ni rationnelle ni réaliste.

    Les « dirigeants » européens ont décidé que le suicide économique de l’Europe était nécessaire pour montrer à la Russie que Bruxelles était sérieusement fâchée. Des gouvernements nationaux imbéciles, y compris celui de l’Allemagne, ont suivi ce programme. S’ils continuent sur leur lancée, le résultat sera une désindustrialisation complète de l’Europe occidentale.

    Pour reprendre les termes d’un observateur sérieux :

    Aujourd’hui, nous constatons que pour des raisons purement politiques, poussés par leurs propres ambitions, et sous la pression de leur suzerain américain, les pays européens imposent davantage de sanctions sur les marchés du pétrole et du gaz, ce qui entraînera davantage d’inflation. Au lieu d’admettre leurs erreurs, ils cherchent un coupable ailleurs. …

    On a l’impression que les politiciens et les économistes occidentaux oublient tout simplement les lois économiques de base ou choisissent simplement de les ignorer. …

    Dire non à l’énergie russe signifie que l’Europe deviendra systématiquement et durablement la région du monde la plus coûteuse en ressources énergétiques. Oui, les prix vont augmenter, et des ressources vont aller contrer ces hausses de prix, mais cela ne changera pas la situation de manière significative. Certains analystes affirment que cela portera gravement, voire irrévocablement, atteinte à la compétitivité d’une partie importante de l’industrie européenne, qui perd déjà du terrain au profit d’entreprises d’autres régions du monde.

    Maintenant, ces processus vont certainement s’accélérer. Il est clair que les possibilités d’activité économique, avec ses améliorations, quitteront l’Europe pour d’autres régions, tout comme les ressources énergétiques de la Russie.

    Cet autodafé économique… ce suicide est, bien sûr, l’affaire interne des pays européens. …

    Or, les actions erratiques de nos partenaires – c’est ce qu’elles sont – ont entraîné une croissance de facto des revenus du secteur pétrolier et gazier russe, en plus des dommages causés à l’économie européenne. …

    En comprenant les mesures que l’Occident prendra dans un avenir proche, nous devons tirer des conclusions à l’avance et être proactifs, en tournant les mesures chaotiques irréfléchies de certains de nos partenaires à notre avantage pour le bien de notre pays. Naturellement, nous ne devons pas espérer que leurs erreurs se répètent. Nous devons simplement, pratiquement, partir des réalités actuelles, comme je l’ai dit.

    Tiré du discours de Vladimir Poutine, lors d’une réunion sur le développement de l’industrie pétrolière, 17 mai 2020, Kremlin, Moscou

    Moon of Alabama

    Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

  • L’Occident peut-il survivre sans pétrole russe ?

    L’Occident peut-il survivre sans pétrole russe ?

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    Les pays qui demandent un embargo pourraient ne pas trouver d’autres fournisseurs de brut

    L’UE et le Royaume-Uni ont récemment annoncé leur intention d’interdire tous les achats de pétrole russe d’ici la fin de l’année en réponse à l’opération militaire russe en Ukraine. Washington a déjà déclaré une interdiction complète du pétrole russe. Moscou, quant à lui, a prévenu que couper son brut entraînerait « des conséquences catastrophiques pour le marché mondial », une notion approuvée par le chef de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), Mohammed Barkindo, qui a récemment averti les responsables de l’UE que il serait impossible de remplacer les volumes perdus si le pétrole russe était interdit. La Russie est le troisième producteur mondial de pétrole et le deuxième exportateur mondial. Au milieu des inquiétudes mondiales d’une crise énergétique imminente, les pays occidentaux recherchent des fournisseurs alternatifs.

    La Norvège
    Norvège est le deuxième fournisseur de pétrole de l’Europe après la Russie, fournissant 8 % des importations de pétrole de l’UE, contre 27 % pour la Russie en 2021. Elle pompe environ 4 millions de barils d’équivalent pétrole par jour et devrait augmenter sa production de 9 % d’ici 2024. Le pays a annoncé en mars qu’il offrirait de nouvelles licences pour forer du pétrole et du gaz, y compris dans des zones jusqu’alors inexplorées de l’Arctique. Cependant, à plus grande échelle, la production norvégienne ne représente que 2 % de la demande mondiale totale de pétrole brut, ce qui signifie qu’il s’agit d’un petit acteur. Pendant ce temps, les nouveaux sites de forage prennent du temps à explorer et à développer – un temps que l’Europe n’a pas.

    Kazakhstan

    L’ancienne république soviétique possède les plus grandes réserves prouvées de pétrole de la région de la mer Caspienne. La plupart de ses exportations de pétrole brut sont destinées à l’Europe, représentant environ 6 % de ses importations de pétrole. Cependant, le Kazakhstan compte sur la Russie pour exporter la majeure partie de son pétrole brut via un oléoduc depuis ses champs pétrolifères occidentaux via le sud de la Russie jusqu’au terminal pétrolier russe de la mer Noire à Novorossiysk. Cela soulève la question de savoir si le pétrole kazakh serait autorisé à venir en Europe s’il était expédié via la Russie.

    Nigeria
    Le pays fait également partie des fournisseurs de pétrole de l’Europe, couvrant environ 6% des besoins pétroliers du continent. Il fournissait autrefois du pétrole aux États-Unis, mais a été remplacé par le Canada lorsque ce dernier a augmenté sa production de sables bitumineux. Le Nigéria a des réserves prouvées égales à 237,3 fois sa consommation annuelle. Cependant, le pays se débat en raison du manque de raffineries fonctionnelles, alors que le pétrole raffiné représente la plus grande partie de la facture d’importation du Nigeria (environ 17%). Cela peut signifier que le pays serait difficilement en mesure de se concentrer sur l’augmentation de ses exportations de brut alors que les réservoirs à la maison sont vides.

    Moyen-Orient
    Les nations du Moyen-Orient détiennent près de la moitié des réserves pétrolières prouvées du monde et une grande partie de sa capacité de production inutilisée. Cependant, le sous-investissement dans les infrastructures, les conflits politiques et, dans le cas de l’Iran, les sanctions, peuvent entraver la capacité de la région à venir à la rescousse lorsque l’Occident perd le pétrole russe. L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, par exemple, constituent la majeure partie de la capacité de production de réserve de l’OPEP. Mais l’Arabie saoudite a rejeté à plusieurs reprises les appels des États-Unis à augmenter la production au-delà de l’augmentation convenue par l’OPEP après la conférence de Copenhague. Selon les analystes, il est également peu probable que les deux pays détournent des expéditions de pétrole de l’Asie vers l’Europe, de peur de perdre le principal acheteur de la région, la Chine. L’Irak et la Libye pourraient augmenter leur production, mais les troubles politiques intérieurs rendent cette éventualité peu probable. Reste l’Iran, qui, bien que parfaitement équipé pour augmenter sa production de brut, est toujours sous le coup de sanctions américaines et les efforts pour relancer l’accord nucléaire de 2015 avec les puissances mondiales continuent de ne porter aucun fruit.

    Brésil
    Onzième exportateur mondial de pétrole, le Brésil a récemment été invité par les États-Unis à augmenter sa production de pétrole. Cela a été provoqué par la flambée des prix de l’essence aux États-Unis suite à son interdiction du pétrole russe. Même si le pétrole en provenance de Russie ne représentait que 8 % des importations américaines de brut, l’incertitude sur les approvisionnements avait fait grimper les prix intérieurs. Cependant, le Brésil a refusé la demande de Washington. La compagnie pétrolière publique du pays, Petrobras, a déclaré que les niveaux de production étaient déterminés par la stratégie commerciale plutôt que par des considérations diplomatiques et qu’une augmentation significative de la production à court terme ne serait pas possible sur le plan logistique.

    Venezuela
    Washington a également approché le Venezuela, qui possède les plus grandes réserves prouvées de pétrole au monde, s’engageant à assouplir certaines des sanctions imposées au pays en échange d’une augmentation des exportations de pétrole vers les États-Unis. Cependant, Washington aurait plus tard fait marche arrière sur l’offre, bien que Caracas ait déclaré qu’elle pourrait augmenter la production d’au moins 400 000 barils par jour.

    États-Unis
    Les États-Unis sont le premier producteur mondial de pétrole brut, avec une production d’environ 11,6 millions de barils par jour en décembre 2021. Cependant, le pays est également le plus grand consommateur de pétrole au monde, utilisant environ 20 % du total mondial, ce qui en fait un importateur net. Les États-Unis pourraient potentiellement augmenter leur production et vendre davantage de brut à l’Europe, mais le pétrole américain est très léger et inapte à produire le diesel et l’essence nécessaires aux marchés, tant américains qu’européens.

    Canada
    Le Canada est le cinquième producteur de pétrole au monde et possède les troisièmes réserves prouvées de pétrole les plus importantes au monde. Toutefois, la capacité des oléoducs et des infrastructures d’exportation du pays est limitée et la quasi-totalité de son pétrole est acheminée vers le marché nord-américain à bas prix. En mars, le ministre canadien des ressources naturelles s’est engagé à augmenter la production pour aider à résoudre la crise énergétique en Europe, mais on s’inquiète de la quantité de pétrole supplémentaire que le pays peut pomper, étant donné que la production dans l’Ouest canadien était déjà proche des niveaux records l’hiver dernier. Selon les estimations, le Canada ne peut augmenter sa production de pétrole que de 200 000 barils par jour. Cela n’aiderait les États-Unis qu’à compenser une partie du manque à gagner résultant de la perte des 500 000 barils de pétrole russe – et il n’y a pas de calendrier précis quant au moment où le Canada pourrait livrer ces barils.

    Big News Network, 15 mai 2022

    #Russie #Ukraine #Occident #UE #Europe #Pétrole #Gaz