Étiquette : France

  • En France aussi, la police assassine les noirs

    En France aussi la police et ses soutiens de l’extrême droite utilisent les mêmes méthodes contre les Noirs et les Non-Blancs.

    Source : Urgence, notre police assassine
    Depuis des décennies au moins.
    Le 6 avril 1993 le jeune Makomé est exécuté dans un commissariat par un policier d’une balle dans la tête.
    Le 21 février 1995 le jeune Ibrahim Ali, 17 ans est assassiné d’une balle dans le dos par un colleur d’affiches du FN.
    C’est qu’en 1986 en arrivant aux affaires Charles Pasqua le ministre de l’intérieur de l’époque avait déclaré à ses hommes, au sujet des bavures policières :  » je vous couvrirais. »

    Source : Humanité
    Au lendemain de la mort de Malik Oussekine le 6 décembre 1986, lynché à mort dans une cage d’escalier par deux policiers de la section des voltigeurs,
    Robert Pandraud le ministre délégué à la sécurité, le second de Pasqua enfonce le clou en criminalisant la victime.
    Il insulte publiquement la mémoire de Malik Oussekine en déclarant :  » si j’avais un fils sous dialyse j’éviterais qu’il faille faire le con dans la nuit ».

    Source: France Inter
    Les policiers y ont vu un passe-droit et depuis, les violences policières contre les gens des quartiers sont devenues structurelles.
    Les morts de Zyed et Bouna le 27 octobre 2005 mettront le feu dans les cités de France pendant 3 semaines.
    Ce soulèvement avait surgi quelques mois après que Nicolas Sarkozy, le ministre de l’intérieur de l’époque, en déplacement à la Courneuve le 20 juin 2005 ait déclaré :
     » il faut nettoyer au Karcher les 4000. »
    Le 20 octobre suivant il avait récidivé dans l’insulte public à Argenteuil en traitant les jeunes des quartiers de « racailles ».
    Depuis, les affaires de meurtres policiers se sont multipliées.
    Et la liste des victimes ne cesse de s’allonger.
    Les affaires sont sordides. Ce sont des exécutions humaines, excusées par la justice, soutenues par le pouvoir politique.
    Le 20 janvier 2020, Emmanuel Macron a refusé de reconnaître ces actes comme des violences policières.

    Source: BFMTV
    Le cycle de violences policières se poursuit donc en France.
    Mais la police a désormais face à elle des familles de victimes des associations et collectifs de militants qui
    se sont organisés pour lui réclamer des comptes.
    En France aussi, la vie des des Noirs des Arabes des Musulmans des Migrants, des Rohms, celle des Non-Blancs et des populations issues des immigrations post-coloniales compte.

    Ahmed Nougbo

    Source

    Tags : France, racisme, noirs, discrimination,

  • Le Makhzen recrute des mercenaires français et américains pour attaquer l’Algérie

    Le lobbying marocain anti-algérien n’est pas nouveau et il semble avoir de beaux jours devant lui. Les pratiques suivies par le Makhzen en vue de s’en prendre à l’Algérie ont été largement exposées par les documents confidentiels de la diplomatie marocaine révélés par le mystérieux hacker Chris Coleman dans cette affaire connue sous le nom de « Marocleaks ».

    Grâce à ces révélations, nous avons compris enfin pourquoi la presse de l’Hexagone et des Etats-Unis se livraient constamment à des campagnes acharnées contre l’Algérie : des journalistes français sont recrutés et gracieusement payés pour mener ces campagnes.

    Ainsi, les lecteurs algériens ont découvert les activités et le financement du lobby pro-marocain aux Etats-Unis et en France, et les rapports secrets entre les services de renseignement marocains et le Mossad.

    Parmi les journalistes américains et français cités se trouvent Richard Miniter et Joseph Braude, deux blogueurs que Rabat fait passer pour des « analystes ». Leur tâche principale est de véhiculer des fausses informations sur le Front Polisario et des prétendues connexions avec le «terrorisme djihadiste soutenu par l’Algérie» en vue de duper l’opinion publique et les élites américaines.

    Dans la manipulation de ces journalistes, le rôle principal est confié à Ahmed Charaï, directeur du site L’Observateur du Maroc et d’Afrique. Pour les journalistes américains, c’était une aubaine. Pour un seul article, Richard Miniter a touche la somme de 60.000 dollars. Selon un de ses courriers adressés à Charaï, c’était un « cadeau ». A cela s’ajoute, les séjours de luxe au Maroc où, grâce aux services de la DGED ils pouvaient se livrer à toute sorte de perversion profitant de la misère du peuple marocain.

    Mais les efforts des agents marocains visaient principalement les entités juives et sionistes en quête de personnalités influentes susceptibles d’incliner la balance en faveur des thèses marocaines contre le Front Polisario et l’Algérie. Parmi elle le Comité Juif Américain (American Jewish Commitee) dont les membres ont été, à plusieurs reprises, invités à visiter le Maroc et dont le président a été honoré par le roi Mohammed VI avec une médaille du trône. Il est cité aussi John Hamre, président du Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS), une entité de lobbyistes pro-marocains dans laquelle est membre Henry Kissinger, architecte en chef de la livraison du Sahara Occidental au Maroc et concepteur du scénario de la Marche Verte pour sauver le trône de Hassan II.

    Des journalistes français aussi ont roulé pour le Makhzen en échange de fortes sommes d’argent et de vacances de rêve au Maroc. Parmi ceux qui ont été dévoilés par le hacker Chris Coleman se trouvent Vincent Hervouet (LCI), José Garçon (Libération), Mireille Duteil (Le Point) et Dominique Lagarde (L’Express). Dans un des emails interceptés, Ahmed Charaï se félicite d’avoir réussi à constituer un réseau de journalistes « amis ». Dans un autre, il réclame à l’un de ses correspondants plusieurs milliers d’euros pour rétribuer leurs services.

    Leur mission ? S’en prendre à l’Algérie et au Front Polisario et édulcorer l’image de la monarchie marocaine et soutenir la position du Maroc dans la question du Sahara Occidental. Leur contact au Maroc était aussi Ahmed Charaï dont les correspondances révélaient comment la DGED prenait en charge les frais de leurs déplacement au Maroc ainsi que ceux de leurs familles.



    Aveuglé par les faveurs du Makhzen, Vincent Hervouet n’a pas hésité à inviter sur les plateaux de LCI le dénommé Ferhat Mehenni, président du prétendu Gouvernement provisoire kabyle. En vantant son initiative, Hervouet a profité pour demander à Ahmed Charaï de l’argent. « Ahmed, ton « ami » Mehenni est Edifiant. Hier, j’ai passé une heure, après le journal, avec le Big Bos pour parler du sérieux de ce MAK…. Mais bon!! Est-ce tu es vraiment sûr que ça ne t’embête pas de m’avancer sur mon salaire les 38.000 euros? Dis- mois, sinon j’ai une autre solution « le Crédit LOG », il faut absolument que je déménage la fin de la semaine prochaine », a-t-il dit.

    Tags : Algérie, Maroc, France, Chris Coleman, lobbying, presse française,

  • Médiapart reconnaît que la France mène une guerre médiatique contre l’Algérie

    Dans un article intitulé » La France prépare-t-elle une insurrection en Algérie ? » Médiapart évoque une guerre médiatique française contre l’Algérie.

    L’auteur de l’article, Albert Farhat, s’interroge sur la déformation des faits lors de la couverture des évènements en Algérie par les médias français et cette hostilité inégalée à l’égard du pays de million et demi de martyrs.

    Sans l’annoncer ouvertement, l’auteur de l’article indique implicitement qu’il s’agit d’une campagne de dénigrement qui n’a rien avoir avec l’exercice noble du métier de l’information ».

    « Suivre de très près les événements qui se déroulent dans un pays est une chose, se focaliser avec un tel acharnement en est une autre », écrit-t-il, estimant que les médias français manquent de crédibilité et d’objectivité en se basant sur des analyses de pseudo-experts de l’Algérie.

    Il s’agit selon lui d’individus vendus en contrepartie de facilités d’obtention de visas pour la France, inféodés à la cause de la néocolonisation et affidés du deuxième bureau et de la diplomatie secrète, et qui ne prédisent que le chaos et la répartition de l’Algérie. « Devant le silence curieux et complice des autorités françaises, ces medias français de la zizanie dont France24, TV5, BFM-TV, M6 et C-News, s’acharnent à imposer leur vision apocalyptique de la situation actuelle de l’Algérie », écrit encore Albert Farhat.

    Ce dernier ajoutera que la France sombre de plus en plus dans la décadence et n’arrive pas à préserver son espace vitall dans le sillage des mutations géopolitique que connaît le monde, d’où la transformation de différents médias publics et privés en outils de propagande subversive, producteurs d’insurrections et d’instabilités dans les pays où elle est en train de perdre son influence et sa main mise, en raison de la perte de ses agents d’influence politique et économique locaux, débarqués ou emprisonnés ; le cas de l’Algérie est des plus éloquents.

    Algérie54

    Tags : France, Algérie, guerre médiatique,

  • Algérie-France : Histoire et mémoire, des dossiers plus que jamais d’actualité

    Les questions d’histoire et de mémoire devraient à l’avenir occuper une place importante dans la relation algéro-française et constituer un de ses dossiers marqueurs, voire décisifs de cette mesure attendue de part et d’autre depuis des années. C’est ce qui est suggéré en tout cas par le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian qui a déclaré hier lors d’une émission RTL/LCI/ Le Figaro qu’un « travail de mémoire » est souhaitable entre la France et l’Algérie.

    « La question qui se pose dans les relations entre la France et Algérie sur la mémoire, la manière dont les uns et les autres avons vécu ce conflit, reste là. Et il faudrait que nous ayons ensemble un travail de mémoire », a déclaré le chef de la diplomatie française qui a été invité à commenter la polémique franco-française suscitée par les déclarations du président Emmanuel

    Macron sur la Shoah et les rapprochements qu’on lui a prêté avec la
    « guerre d’Algérie » et les crimes coloniaux.

    L’intéressant dans ce qu’a déclaré M. Le Drian face aux médias de son pays est que les dossiers de l’histoire et de la mémoire relatifs à la séquence coloniale sont plus que jamais d’actualité et qu’ils constituent une partie importante des questions qui doivent être résolues dans le cadre de la relation bilatérale entre Alger et Paris.

    Cependant, bien des contraintes doivent être surmontées comme on le constate depuis la loi française de février 2005 qui reconnaîssait les
    « bienfaits de la colonisation », un texte voté par la droite et qui a été abandonné au temps du gouvernement Chirac après avoir provoqué l’ire de la partie algérienne et l’indignation d’une partie de l’opinion française : celle d’historiens qui revendiquaient un examen impartial des faits historiques durant la période coloniale et dénonçaient notamment, à l’image de l’éminent Claude Liauzu, une instrumentalisation de l’histoire à des fins politiques et politiciennes, au grand risque de l’occultation d’abominables crimes coloniaux disent encore des chercheurs comme Olivier Lecour Grandmaison.

    Hier, M. Le Drian a confirmé que les autorités algériennes souhaitaient ce processus et insisté sur le fait que les Français avaient eux aussi « besoin d’avoir sur ce sujet là un moment de rappel historique et de vérification », rappelant à nouveau l’énormité des contraintes qui subsistent pour parvenir à un règlement commun de la question historique et mémorielle. Le ministre français des Affaires étrangères, qui est, rappelons-le, historien de formation, a plaidé pour une réflexion « de manière sereine,y compris avec les historiens algériens », une proposition qui fait débat depuis des années sous nos cieux, depuis au moins l’appel du regretté Gilbert Meynier au milieu des années 2000 pour une « analyse commune » de l’histoire coloniale française en Algérie. Mais qui ne semble pas susciter l’enthousiasme de tous, des historiens algériens optant pour une « lecture nationale » de l’histoire algérienne et du mouvement national algérien. Il n’empêche que des promesses d’ouverture importantes sont signalées du côté français, depuis le début des années 2000 et en particulier depuis l’arrivée à l’Elysée du président Macron.

    Dans l’avion qui le ramenait jeudi d’Israël, où il participait à la commémoration du 75e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz, indique une dépêche de l’AFP, le chef de l’Etat français s’est dit convaincu que la France devait revisiter la mémoire de la guerre d’Algérie (1954-1962) pour mettre un terme au « conflit mémoriel » qui « rend la chose très dure en France ».

    La politique au secours de la décantation historique ?

    Question nationale française seulement comme le suggère ces paroles ? Sans doute pas et l’on comprend mieux le communiqué de la diplomatie algérienne, avant-hier, sur la « surprise » de l’Algérie à voir le chef de l’Etat truc Reccep Tayyip Erdogan, reprendre des propos « sortis de leur contexte » du Président de la République, M. Tebboune, sur le bilan humain des crimes coloniaux dans notre pays avant 1962.

    Dans ce communiqué des Affaires étrangères algériennes, on pressent le souci de la mise au point adressée au président turc mais sans doute aussi la préoccupation de se charger des questions d’histoire et de mémoire dans le cadre du bilatéral algéro-français avec l’espoir qu’elles connaissent des avancées potentiellement annoncées par les déclarations du chef de l’Elysée et qui restent à concrétiser par de nouveaux gestes forts. Ces gestes pourraient venir de l’amélioration de la relation politique entre Alger et Paris. Après une période de crispation, celle-ci semble connaitre une évolution dans le sens d’une relance : « Nous avons en Algérie une situation qui est complètement nouvelle, qui va sans doute engager des évolutions significatives de ce pays », a estimé Jean-Yves Le Drian. » De nouvelles perspectives s’offrent pour les relations entre la France et l’Algérie. Si la mémoire partagée peut faire partie de cetensemble nouveau, ce serait une très bonne nouvelle pour tout le monde », a encore insisté le patron du Quai d’Orsay.

    Tags : France, Algérie, mémoire, crimes de guerre,

  • Ces binationaux: des ingrats… .. …réfractaires à leur citoyenneté européenne

    La France, la Belgique, la Hollande, l’Allemagne et la Grande leur ont tout donné. Ils restent attachés à un état qui leur refuse tout.

    Ils ont nationalité française, parfois aussi la nationalité belge (comme c’est le cas de la députée Latifa Ait Baala.

    Francaise, Ait Baala a vu sa demande de la nationalité belge rejetée à deux reprises sur pression des services policiers marocains et de l’ambassadeur du Maroc en poste à Bruxelles. Ces services sont intervenus aupres du ministère de la justice belge pour dénoncer la demanderesse en la presentant aux autorités belges comme une dangereuse agitatrice à la tête d’une association marocaine bien active en Belgique. Cette association n’est autre que l’AMOME.

    Malgré cet acte hostile à l’encontre de l’intéressée, celle-ci se positionne comme la plus grande défenderesse du regile marocain

    Les pays européens ont tout donné à ces « cadres » ingrats: nationalité, droits politiques – que le Maroc leur a toujours refusés -, éducation pour leurs enfants, soins de santé, travail, allocations de toutes sortes…..

    Ils sont au fil des ans devenus en Europe, les égaux des citoyens européens.

    Et pourtant, ces malades mentaux ne cessent de se positionner en quémandeurs de la charité du roi du Maroc.

    En France, un groupe composé de ces tarés n’arrête pas de tendre la main aux structures khoubzistes chargées d’encadrer, sécuritairement s’entend, les éternels immigrés

    Ils en ont après le CCME qui avait jadis payé certains d’entre eux pour des écrits imbéciles que cet organisme publiait sur son site.

    Dès que cette officine leur a fermé les robinets, les insultes et autres dénonciations qu’ils adressaient il n y a guère aux responsables de cette structure ont fait place aux insultes et autres invectives.

    En Belgique, délaissés et désormais rejetés, les ex altras de Boussouf, El Yazami et Aajbali se déchaînent contre leur pourvoyeurs de pain

    Quand vont ils comprendre que leur citoyenneté s’exerce et se pratique au jour le jour en Europe et que leur prétendu pays d’origine a depuis longtemps décidé de les renvoyer se faire voir chez les Belges, Francais, Hollandais et autres Allemands.

    Certains d’entre ces masos ont vecu la même tragédie que les binationaux bloqués au Maroc et n’ont dû leur rapatriement chèrement payés qu’à des interventions occultes

    Leur cas désespéré relève de la psychologie.

    Source : Bruxellois, sûrement!, 16 mai 2020

    Tags : Maroc, Belgique, Pays Bas, France, binationaux, belgo-marocains,

  • Le franc CFA, un outil de contrôle politique et économique sur les pays africains de la zone franc

    La zone franc et le franc CFA, un système hérité de la colonisation

    La zone franc et sa monnaie le franc CFA constituent le seul système monétaire colonial au monde à avoir survécu à la décolonisation. La mise en place progressive de ce système est le résultat de choix stratégiques de la France mettant l’entreprise de colonisation au service des intérêts économiques français. Les monnaies africaines sont supprimées et des banques privées appartenant aux colons mais contrôlées par la France sont créées.

    La puissance coloniale exploite les matières premières des colonies pour alimenter l’industriefrançaise et utilise les colonies comme débouchés pour les produits français. Suite à la crise de 1929, la France accentue son repli sur l’empire colonial pour protéger son économie et son commerce extérieur.

    La création de la zone franc en 1939 offre le moyen de pérenniser cette stratégie : les échanges avec des pays extérieurs à la zone franc sont interdits, ce qui cimente lesliens économiques et commerciaux entre la France et son empire.

    La monnaie franc CFA (ColoniesFrançaises d’Afrique) est quant à elle créée en 1945 afin que la dévaluation du franc français au sortir de la guerre n’affecte pas les marchés des possessions africaines de la France. Celle-ci conserve ainsi le leadership dans le commerce extérieur des colonies et réaffirme sa suprématie surson empire.

    Au moment des indépendances, la quasi-totalité des anciennes colonies françaises d’Afrique subsaharienne décide de rester dans le giron de la France en signant des accords de coopération monétaire et en adhérant de ce fait à la zone franc. Le franc CFA est d’ailleurs renommé franc de la Communauté Française d’Afrique en 1958. Mais la Guinée refuse cet assujettissement monétaire et sort de la zone franc dans un coup d’éclat. Le président Sékou Touré veut une réelle indépendancepolitique et économique pour la Guinée, et pour ce faire crée le franc guinéen et quitte la zone en 1960.

    Au Togo, ancienne colonie allemande membre de la zone franc depuis 1949, des voix s’élèvent également contre le franc CFA en la personne du président Sylvanus Olympio. La sortie de la zone est prévue pour 1963 mais Sylvanus Olympio est assassiné juste avant que l’indépendance monétaire du pays ne soit acquise. Ce n’est que dix ans plus tard, en 1973, que la zone connaît denouvelles modifications avec la sortie de la Mauritanie et de Madagascar.

    C’est également à la période des indépendances que des banques centrales dont seulement la moitié des administrateurs sont des représentants africains sont créées pour émettre le franc CFA.

    Les présidents de ces institutions sont néanmoins français et restent maîtres de toute décision. Pendant les années 1970 la zone franc connaît des ajustements à la fois techniques et symboliques : révision des accords de coopération monétaire, déménagement des sièges des banques centrales de Paris à Dakar et Yaoundé, diminution du nombre de représentants français au sein des Conseils d’Administration.

    D’autre part deux nouveaux pays signent des accords de coopération avec la France et adoptent le franc CFA : la Guinée Équatoriale en 1985 et la Guinée-Bissau en 1997. Malgré ces changements, la France garde la mainmise sur la politique monétaire de la zone franc dont les pays subissent des choix économiques et monétaires dictés par les intérêtsfrançais. La France va même jusqu’à décider unilatéralement de la dévaluation du franc CFA en 1994.

    La zone franc : une gestion et des principes au service des intérêts français

    La zone franc englobe donc aujourd’hui quinze pays : huit pays d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina-Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo), six pays d’Afrique centrale (Cameroun, République Centrafricaine, Congo-Brazzaville, Gabon, Guinée Equatoriale, Tchad) et lesComores. C’est une organisation financière, monétaire et économique, dont le cœur est la France et l’instrument principal le franc CFA.

    Cette organisation, gérée par la France, s’appuie sur des institutions africaines : la Banque Centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO), la Banque des Etats d’Afrique Centrale (BEAC), la Banque Centrale des Comores (BCC).

    Le système franc CFA est basé sur quatre grands principes : la centralisation des réserves de change au Trésor public français, la fixité de la parité franc CFA/euro, la libre convertibilité du francCFA à l’euro, et la libre circulation des capitaux entre la France et les pays africains de la zonefranc. A ces principes s’ajoutent la participation française aux instances de direction des banquescentrales africaines, pièce maîtresse du système CFA puisqu’elle garantit l’application sans faille des quatre principes précédemment cités.

    La centralisation des réserves de changes : un principe qui bloque l’économie despays de la zone franc

    Chaque banque centrale de la zone franc possède un compte d’opérations au Trésor public françaiset doit y déposer une partie de ses réserves de monnaie. Depuis 2005, 50% des réserves de change doivent être stockées sur le compte d’opérations en France (jusqu’en 2005 ce pourcentage était de 65). Il y a donc actuellement environ 8000 milliards de francs CFA venant de la BCEAO et la BEAC stockés au Trésor public, soit plus de 12 milliards d’euros.

    C’est autant d’argent qui est amputé du budget des États de la zone franc. La France rémunère les banques centrales africaines en intérêts, tout en se servant au passage grâce à des placements privés (des sommes dégagées au profit de laFrance qui se comptent en centaines de millions d’euros). Pire, la part d’intérêts versée aux banques centrales est comptabilisée dans l’Aide Publique au Développement !

    Dépouillés de la moitié de leurs recettes, les pays africains de la zone franc se retrouvent ainsi dans une situationéconomique et sociale très difficile, d’autant plus que la France leur impose une rigueur budgétaire (c’est-à-dire une baisse des dépenses publiques) pour que l’approvisionnement du compte d’opérations soit garanti.

    La parité fixe franc CFA-euro : une entrave à la compétitivité des économies africaines dans le monde

    Hier lié au franc français, le franc CFA est aujourd’hui arrimé à l’euro, c’est-à-dire que la valeur dufranc CFA sur les marchés mondiaux dépend de celle de l’euro. Autrement dit, les pays africains de la zone franc n’ont pas le contrôle de leur politique de change et subissent les fluctuations du cours de la monnaie unique européenne. Les recettes de leurs exportations doivent être converties en euro avant de l’être en franc CFA, ce qui signifie que si la conversion entre l’euro et les monnaies étrangères fluctue, les recettes des pays africains de la zone franc fluctuent également.

    Actuellement la valeur de l’euro se renforce par rapport aux monnaies étrangères. Par conséquent, la compétitivité des pays de la zone euro, et donc de la zone franc, diminue par rapport au reste du monde. Une baisse de la compétitivité signifiant une plus grande difficulté à vendre ses produitssur le marché mondial, les conséquences pour les pays africains de la zone franc d’un arrimage à une monnaie forte comme l’euro sont considérables : les économies restent faibles, et lespopulation se paupérisent car les matières premières qu’elles produisent ne peuvent ni être exportées ni être transformées.

    La libre convertibilité franc CFA/ euro et la libre circulation des capitaux ou comment légaliser la fuite des capitaux

    La libre convertibilité s’applique des pays africains de la zone franc à la France et inversement, mais ne concerne pas les échanges entre les trois zones du système CFA. Ce principe facilite lesinvestissements français en Afrique, le rapatriement des capitaux, et l’importation par la France de matières premières, mais bloque les échanges inter-africains.

    Les principes de libre convertibilité et libre circulation des capitaux favorisent également la fuite des capitaux de l’Afrique vers la France. Les entreprises françaises installées dans les pays africainsde la zone franc peuvent rapatrier librement leurs liquidités vers la France et les transferts d’argent entre la France et l’Afrique s’opèrent sans entraves au profit des élites françafricaines.

    La participation française à la gestion des banques centrales africaines

    Dans les trois banques centrales de la zone franc, des administrateurs français siègent aux Conseils d’Administration (CA). Dans les faits, la présence d’administrateurs français garantie par les statuts des banques centrales confère à la France un droit de veto lors de la prise de décision. Au CA de la BCC, 4 administrateurs sur 8 sont français alors que les décisions doivent être votées à la majorité.

    A la BCEAO seuls 2 administrateurs sur 16 sont français, mais l’unanimité est requise pour toute décision majeure (et notamment la modification des statuts). La situation est la même à la BEAC avec 3 administrateurs français sur 13. Le pouvoir de la France dans ces institutions est donc considérable et la présence de représentants français garantit la mise en œuvre de tous lesprincipes centraux du système CFA.

    Un système monétaire qui constitue une entrave à la souveraineté des Étatsafricains de la zone franc

    Le franc CFA est un liant qui cimente les relations économiques entre la France et les pays africainsde la zone franc. Ces pays ne sont pas libres de la gestion de leur politique économique et monétaire, domaine pourtant constitutif de la souveraineté d’un État. Preuve en est la dévaluation de 1994 décidée unilatéralement par la France.

    Malgré le passage à l’euro, la France garde la mainmise sur la zone franc, alors même qu’elle n’est plus émettrice de la monnaie d’arrimage. L’adoption de l’euro aurait pu se traduire par une disparition du pouvoir tutélaire de la France sur ses anciennes colonies, or la France a obtenu queles accords de coopération monétaire de la zone franc ne soient pas affectés par l’intégration européenne.

    Cinquante ans après les indépendances, la politique monétaire de la zone franc reste donc décidée par la France en fonction de ses intérêts propres. Cinquante ans pendant lesquels cette politique a été complètement déconnectée des vrais enjeux du développement africain tout en permettant à laFrance de contrôler économiquement et politiquement ses anciennes colonies au profit de son économie nationale, et au préjudice du développement des relations entre pays africains.

    Le modèle imposé par le système franc CFA induit une verticalité des échanges (Nord-Sud) au détriment d’une coopération horizontale (Sud-Sud). Un tel système financier, au service des intérêts économiques etpolitiques de la France, ne peut pas être le vecteur de l’autonomie monétaire et du développement. Il perpétue les relations asymétriques et néocoloniales entre la France et les pays de la zone CFA.

    Survie.org

    Source

    Tags : Françafrique, France, colonialisme, colonisation, franc CFA, FCFA, CEDEAO, UEMOA,

  • Alger convoque l’ambassadeur français à cause d’une photo publiée par l’armée (Journal)

    – Publiée par le commandement de l’armée française à la fin du mois d’avril sur son compte Twitter, la photo a été retirée entre temps.

    Le journal français “L’Opinion” a rapporté, jeudi, que le ministère algérien des Affaires étrangères a convoqué l’ambassadeur français accrédité à Alger (sans préciser de date) pour protester contre une photo publiée par le commandement de l’armée française sur son compte Twitter.

    Le ministère algérien des Affaires étrangères n’a pas annoncé, officiellement, la convocation de l’ambassadeur Xavier Driencrout, à cause de cette photo, qui a été supprimée entre temps par le commandement de l’armée française de son compte.

    La photo, considérée comme attentatoire par Alger, a conféré davantage de tension aux relations, initialement tendues entre les deux pays, depuis plusieurs mois.

    Publiée à la fin du mois d’avril dernier, la photo représente un panneau routier qui signale plusieurs destinations internationales, dont l’Algérie. Un écriteau apparaissait en affichant à côté du drapeau algérien, la bannière des Amazighs d’Algérie et la région de Tizi Ouzou où ils résident, comme s’il s’agissait d’une région indépendante du pays.

    La photo en question a soulevé une vague de colère en Algérie qui s’est illustrée, notamment, à travers les réseaux sociaux.

    Le journal « Echourouk » a indiqué que cette photo « recèle une haine viscérale héritée depuis la période de la détestable colonisation française, qui décline de manière explicite ses tentatives de dislocation de l’unité nationale ».

    Si l’information de la convocation s’avérerait juste, c’est la deuxième fois, en l’espace de quelques semaines, que l’ambassadeur français est convoqué au siège du ministère algérien des Affaires étrangères.

    L’ambassadeur avait déjà été tenu informé à la fin du mois de mars dernier, d’une vive protestation contre l’invitation par la chaîne de télévision « France 24 » (officiel), un analyste qui alléguait que l’armée algérienne a détourné une aide reçue de la Chine pour lutter contre la propagation de la pandémie de la Covid-19 à un hôpital militaire d’Alger.

    Le président algérien Abdelméjid Tebboun avait accusé, le 7 mai courant, la France d’avoir assassiné, durant 132 ans d’occupation (1830-1962), la moitié de la population algérienne (5,5 millions de victimes) dans des crimes imperceptibles en dépit des tentatives de les blanchir, a-t-il dit.

    Le président algérien affichait cette position dans un message adressé à son peuple, à l’occasion du 75ème anniversaire des massacres du 8 mai 1945 commis par l’armée coloniale française contre des manifestants civils algériens.

    Depuis la démission de l’ancien président algérien, Abdelaziz Bouteflika, le 2 avril 2019, sous la pression d’un soulèvement populaire hostile à son pouvoir, les relations entre Alger et Paris se sont tendues, tout particulièrement, depuis que la France ait annoncé son appui à une réforme soumise par Bouteflika pour prolonger son mandat.

    Tags : Algérie, France, Tizi-Ouzou, Kabylie,

  • France : les étrangers à l’avant-garde de la lutte contre la pandémie (vidéo)

    Quelle était grande la surprise du président Emmanuel Macron lors de sa visite à l’hôpital de Marseille pour rencontrer le Professeur Didier Raoult !

    Portant un masque, Macron bavarde avec le personnel médical et leur pose une question de leur provenance. Il ne s’attendait pas à une telle réponse : Maroc, Algérie, Mali, Sénégal, Burkina Faso…

    Devant telle réponse, le mandataire français est resté bouche bée même si elle était cachée derrière le masque. La France est prise en charge par des médecins et des infirmiers étrangers alors que le gouvernement français mène une lutte implacable contre la migration et a bâti un mur devant les demandes de visa en Afrique et ailleurs.

    Tags : France, Emmanuel Macron, migration, coronavirus, covid19, pandémie, Maroc, Mali, Sénégal, Burkina Faso, Algérie,

  • Maroc-leaks : Compte Rendu de la convocation de l’ambassadeur espagnol suite à un incident maritime

    Suite à un incident maritime, les autorités marocaines ont convoqué l’ambassadeur espagnol. Voici le compte rendu de cette rencontre

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    Non
    Le 22 févr. 2014 20:58, « bourita » <bourita@maec.gov.ma> a écrit :

    Bonsoir
    A t il parler de  » dysfonctionnement »?

    Envoyé depuis un mobile Samsung

    ——– Message d’origine ——–
    De : Mbarka
    Date :22/02/2014 3:06 PM (GMT+01:00)
    A : SALAHEDDINE MEZOUAR
    Cc : bourita
    Objet : Projet de Compte Rendu de la convocation d’hier

    Priere trouver ci dessous le compte rendu de ma rencontre hier avec M. l’Ambassadeur de France en presence de son numero 2 et de M. Loutfi Bouchaara, chef de cabinet du Ministre.

    Objet: Convocation de l’Ambassadeur de France pour protester contre l’incident lie a la demande d’audition du DGST.

    Message transmis a l’ Ambassadeur:

    – le Royaume du Maroc exprime sa protestation vigoureuse devant cet acte grave et inedit.

    – Il est inadmissible que la residence du Royaume soit touchee et traitee de la sorte, sans que la poloce judiciaire francaise soit passee par la voie diplomatique

    – la forme et le fond de cette affaire poussent a croire qu’il s’agit d’une action bien orchestree

    – Nous demandons a ce que la verite soit retablie et que les responsables soient identifiees.

    – Nous demandons a ce que la France s’exprime clairement sur cette affaire.

    – Nous sommes un pays souverain; nos relations avec la France ont toujours ete caracterisees par un respect mutuel.

    De son cote, M. L’Ambassadeur a exprime:

    -Son regret total et absolu de cette situation.

    – Sa comprehension de la reaction et de la colere marocaine.

    – Le Gouvernement Francais n’est pas responsable des decisions de la justice, et n’est pas responsable de ce qui s’est passe.

    – Le quai d’orsay n’etait pas au courant de cette affaire.

    – L’Ambassade a entame ses contacts depuis vendredi avec le ministere de l’interieur, justice et affaires etrangeres de don pays ppur comprendre ce qui s’est passe.

    – Selon les informations dont ils disposent, le DGST est sujet de 3 plaintes. L’un des juges a decide d’envoyer ces officiers de police judiciaire a la residence de l’ambassade du Maroc a Paris.

    – L’Ambassadeur reconnait qu’on peut se poser des questions sur le moment et la maniere.

    – Une enquete est en cours et devrait permettre de clarifier les faits et  mieux comprendre les soubassements de cette affaire.

    – L’Ambassadeur a insiste que l’objectif est que les relations des 2 pays ne soient pas affectees. La confiance doit etre maintenue et notre cooperation doit continuer voire se renforcer.

    – L’Ambassadeur pense que cet incident doit etre gere entre nos deux departements sans faire appel a la presse. Selon lui, tout communique ne fera qu’augmenter la tension et donnera l’occasion a nos detracteurs de nuire a nos relations.

    Fin de la rencontre.

    Tags : Maroc, Abdellatif El Hammouchi, France,

  • L’œuvre négative du néocolonialisme français et Européen en Afrique. La francophonie

    La diffusion de la langue française en Afrique est partie intégrante du projet colonial. Elle fait partie intégrante de l’ « œuvre civilisatrice » que prétendait apporter le colonialisme. La civilisation est, en effet, entendue dans le projet colonial, comme l’extraction de l’homme africain de ses cultures « barbares » pour le faire entrer dans l’histoire et dans la civilisation par l’assimilation. Les indépendances africaines de la décennie 60 voient ainsi arrivées au pouvoir des « élites » francophones dans des pays où les cultures et langues maternelles ont été asphyxiées quand elles n’ont pas été réduites à du folklore. Ce qui s’appelle déjà dès l’ère coloniale « francophonie » s’impose rapidement comme politique publique de maintien de la dépendance des élites et d’aliénation des masses populaires africaines.



    Langue française et colonisation

    Le terme de francophonie apparaît en 1883 sous la plume du géographe Onésime Reclus dans ses analyses de défense de la politique coloniale française. Prônant une expansion coloniale offensive, il considère que l’expansion et l’imposition de la langue française est une des assises essentielle de celle-ci. Dans son livre « France, Algérie et colonies » où il utilise pour la première fois ce néologisme, il argumente comme suit l’importance de l’imposition du français aux indigènes des colonies :

    Nous les amènerons à nous en leur donnant notre langue : le Kabyle n’y perdra que des patois sans littérature, et qui osera comparer à nos livres ce qu’il y a de vrais chefs-d’œuvre dans l’idiome osseux, décharné, dur, prodigieusement guttural, d’ailleurs poétique, énergique et bref, dont Mahomet usait avec l’ange Gabriel, et l’ange Gabriel avec lui ? Il nous faut donc asseoir les enfants des indigènes à côté des nôtres sur les bancs de l’école. Dès que la jeune génération musulmane parlera le français, tout le reste viendra par surcroît[i].

    Les diverses institutions de la francophonie revendiquent l’héritage de Reclus en suggérant qu’il était partisan d’un colonialisme non raciste. Le site de la Documentation française le présente encore aujourd’hui comme suit : « C’est un hymne à la conquête coloniale que compose le géographe, concevant une véritable doctrine de l’impérialisme français. Mais sa conception du colonialisme ne s’appuie pas sur des considérations mercantilistes ou raciales ; son argumentation est géographique, linguistique, démographique. La théorie qu’échafaude Onésime Reclus repose sur l’idée d’influence du milieu ; la langue apparaît comme le socle des empires, le lien solidaire des civilisations [ii]. »

    Loin d’être isolé l’idée d’une langue française civilisatrice préside à la création de « l’Alliance française » (dont le titre intégral est : Association nationale pour la propagation de la langue française dans les colonies et à l’étranger) en juillet 1883. La diversité politique des fondateurs de cette institution souligne le consensus colonial quasi-total de l’époque : Le général Faidherbe, le cardinal de Lavigerie, Ferdinand de Lesseps, Paul Bert, Louis Pasteur, Ernest Renan, etc. Les objectifs sont, en effet, sans ambiguïtés et sont résumés comme suit deux ans après la création de l’institution coloniale : « Par l’école, vulgariser l’usage du français dans nos colonies et nos protectorats ; par l’école, soutenir le prestige de la France dans les contrées barbares [sic] où il domine depuis longtemps, particulièrement dans les pays musulmans du Levant ; etc[iii]. »

    La troisième république laïque n’hésite pas à s’appuyer sur l’Église pour diffuser cette langue française que l’on considère nécessaire à la « conquête des esprits » devant parachever la conquête militaire. « Les missionnaires doivent être des agents de l’influence française par la diffusion de la langue. […] L’objectif fixé aux écoles confessionnelles est précis et limité : [faire des élèves] des auxiliaires de la colonisation[iv] » résume le prêtre et historien Joseph Roger Benoist. Le chercheur en sciences sociales Raberh Achi évoque même une « exception coloniale à la laïcité ».

    Il n’y a donc aucun projet de scolarisation généralisée des colonisés mais volonté de créer une « élite » francisée au service de la colonisation. « Les autorités françaises utilisaient ces élites comme instruments de leur domination sur les masses indigènes. Elles espéraient également qu’elles guideraient par leur exemple l’évolution de leur société dans la voie de l’association, du rapprochement, voire de la « fusion des races[v] » analyse l’historien Guy Pervillé. Faisant le bilan de l’œuvre civilisatrice française dans les colonies en 1943, l’historien et directeur de l’école coloniale en Afrique Occidentale Française de 1926 à 1943, Georges Hardy insiste sur la fonction politique de cette élite indigène :

    L’amélioration morale et intellectuelle de l’indigène n’est pas moins nécessaire à l’augmentation de son rendement et c’est ici l’œuvre de l’école. […] Il faut reconnaître que, dans l’ensemble, le développement de l’enseignement français a dès maintenant fourni à la colonisation un nombre considérable d’auxiliaires indigènes vraiment utiles et qu’au prix de quelques précautions – adaptation, éducation morale – l’école française aux colonies doit devenir de plus en plus un précieux instrument d’amélioration matérielle et d’apprivoisement[vi].

    L’auteur développe dans ses thèses l’idée d’une limitation de l’accès à l’enseignement à une infime élite. Une ouverture plus large aurait des effets dangereux pour le système colonial : « On reproche souvent à l’enseignement des indigènes de former des déclassés, des « dévoyés », hostiles à la fois à leurs congénères et aux Européens, et il est bien certain qu’un jeune indigène qui est passé par l’école française peut paraître moins souple qu’un autre[vii] » remarque-t-il. La solution proposée est duale : la production d’une petite élite accédant à l’enseignement secondaire d’une part et la limitation à la maîtrise d’un français usuel et fonctionnel pour la grande masse des colonisés.

    Un grand soin est apporté à la production de cette élite conçue comme chainon entre le colonisateur et le colonisé. On se préoccupe par exemple de leur mariage avec la création d’écoles féminines visant à produire les épouses de ces « évolués » : « C’est un malaise de constater le nombre croissant de jeunes hommes instruits et le petit nombre de femmes éduquées que nous plaçons à côté d’eux […]. Qui épouseront-ils tous ces médecins, ces comptables, ces employés de postes et quantité d’hommes évolués que nous créons à jets continus suivant les besoins de la colonie[viii]. » Il s’agit bien de produire un groupe social spécifique culturellement et socialement attaché à la culture et à la langue du colonisateur. L’historienne Pascale Barthélémy mentionne et cite un document non signé et non daté d’une trentaine de pages argumentant comme suit la nécessité de cet enseignement féminin : « La France a fait des unités éclairées, elle n’a pas de familles éclairées. Elle s’est occupée de l’homme. Elle s’est peu souciée de la femme. Or l’individu isolé est un faible, le couple seul est fort. La France veut faire entrer l’Afrique dans la voie de la civilisation, elle n’y parviendra que quand elle élèvera la mentalité de la femme, cheville ouvrière de la société indigène[ix]. »

    L’enseignement offert à cette élite évoluée est articulé à un processus d’aliénation qu’un livre consacré à « l’aliénation colonialiste » en Algérie décrit comme suit en 1961 :

    « Convaincre les indigènes de leur infériorité, à tous égards par rapport aux français est selon lui (Cavaignac) le devoir fondamental des dirigeants de l’entreprise en Algérie ». Complexe qu’on s’est efforcé de créer surtout chez ceux qui ont eu le privilège des bancs de l’école. En effet, chez ces derniers les enseignants et la propagande officielle ont contribué à faire exister, valoriser, admirer en exclusivité comme étant le bien et le beau absolus, le patrimoine de la France : sa culture, son histoire, ses héros, ses poètes, ses savants, ses coutumes, sa mode vestimentaire, etc., en bref la civilisation française. Par là même, tout a concouru à nier l’existence d’autres valeurs, à refuser toute qualité à ce qui n’est pas français ou au moins occidental et en premier lieu donc, à tout ce qui est algérien[x].

    La confrontation avec l’injustice coloniale conduira une partie non négligeable de cette élite au combat pour l’indépendance. Cependant les socialisations scolaires et les habitus continuent de les rattacher à l’ancienne puissance coloniale : habitudes de vie, modes de consommation, contenus des enseignements, réseaux d’amis, souvenirs de voyages et/ou d’études en France, capital de lectures et donc système de références, etc. Le dispositif institutionnel de la francophonie s’appuie sur cette dépendance culturelle pour la faire perdurer et la renforcer au-delà les indépendances.

    La toile d’araignée francophone

    Si Onésime reclus est présenté par le discours officiel de la francophonie comme le père fondateur du concept, l’événement fondateur pour la « mythistoire francophone[xi] » est la publication en 1962 du numéro de la revue esprit intitulé «Le français, langue vivante ». La raison de ce mythe fondateur est la suivante :

    Cette date […] est en effet présentée comme la véritable naissance de la véritable francophonie. Ses défenseurs veulent ainsi prouver que ce sont bien les anciens colonisés, africains et asiatiques – et non pas l’ancienne métropole – qui décidèrent de faire de la langue française l’objet et le sujet d’une organisation internationale. Ainsi, il est systématiquement rappelé que ce sont des héros des indépendances africaines et asiatiques (on comptait parmi les auteurs Habib Bourguiba, Hamani Diori, Norodom Sihanouk), proclamant à la fois leur attachement à la langue et leurs identités culturelles qui créèrent la francophonie[xii].

    L’insistance est, à elle seule, significative des critiques nombreuses de « néocolonialisme » qui accompagnent le déploiement du dispositif institutionnel francophone des indépendances à nos jours. Si le numéro de la revue esprit est réellement une défense de la francophonie à laquelle participent des chefs d’État de l’ancien empire colonial, il n’est pas contrairement à l’affirmation officielle « l’acte de naissance ». Deux ans plus tôt le gouvernement français prenait l’initiative de créer la « Conférence des Ministres de l’Éducation des pays africains et malgache d’expression française» (Confemen) qui est de ce fait la première institution intergouvernementale francophone postcoloniale. Cette institution qui regroupe à sa naissance 15 États (c’est-à-dire la plupart des pays de l’ancien empire colonial africain français et la France) se réunit tous les deux ans pour « pour tracer les orientations en matière d’éducation et de formation au service du développement[xiii] ».

    Le choix de l’éducation nationale comme premier terrain de la francophonie n’est, bien entendu, pas anodin. La colonisation et sa scolarisation sélective ont suscité une soif et une attente de scolarité qu’aucun État nouvellement indépendant ne peut ignorer. La légitimité politique passe, entre autre, au moment des indépendances, par une démocratisation de l’enseignement. De fait tous les États nouvellement indépendant d’Afrique, quel que soit leur orientation politique mettront en place une telle orientation qui en quelques années donneront des résultats laissant loin derrière toute « l’œuvre scolaire » coloniale.

    Dans ce contexte l’enjeu devient dès lors le contenu et la langue de cette scolarisation. En témoigne la passe d’arme lors de l’inauguration de l’Université de Dakar le 9 décembre 1959 entre le recteur français Lucien Paye et le président de l’Union générale des Étudiants d’Afrique occidentale (UGEAO) Daouda Sow. Le premier déclare : « Est-il plus noble programme que celui auquel le Conseil de l’université, lors de sa récente séance, apportait une adhésion unanime : « Être une université française au service de l’Afrique ? » Le second lui rétorque : « L’Université de Dakar se doit de porter, selon nous, un cachet typiquement africain. On y doit sentir battre le cœur de l’Afrique d’hier et de demain. Vous comprenez alors que notre souhait demeure de voir cette université devenir un foyer de chercheurs à vocation africaine, mais au service de l’Universel et de la vérité[xv]. » L’auteur à qui nous empruntons ces citations, l’historien ivoirien Chikouna Cissé, analyse comme suit la stratégie française de ces premiers pas de la francophonie postcoloniale :

    Confrontée à l’exaltation de la ferveur panafricaniste, la France choisit de resserrer les liens avec ses anciennes colonies, au début des années 1960, à des fins de contrôle politique. Ce bornage du pré-carré trouva son expression tangible dans la multitude de rencontres des ministres de l’Éducation d’expression française où l’on pouvait noter souvent, une surreprésentation française. Dix-huit conférences, selon le décompte de l’historien Laurent Manière, réunirent Français et Africains entre 1960 et 1969, dans le cadre de la signature et de l’application d’accords de coopération signés[xvi].

    Cette première institution francophone inscrite dans les accords de coopération (dont nous avons soulignés la dimension néocoloniale dans une livraison antérieure[xvii]), sera suivie de nombreuses autres : l’Association des universités partiellement ou entièrement de langue française en 1961, qui devient l’Agence Universitaire de la Francophonie en 1999 ; l’association internationale des parlementaires de langue française en 1967 qui se transforme en Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) en 1997 ; La Conférence des ministres de la Jeunesse et des Sports (Conféjes) en 1969 ; L’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT) en 1970 qui se renomme Organisation Internationale de la Francophonie en 2005 (OIT); Le Conseil international des radios télévisions d’expression française (CIRTEF) créé en 1978 ; etc. L’ensemble des champs éducatif, sportif, médiatique et culturel sont désormais couvert par le réseau institutionnel francophone. Outre leurs propres réseaux, ces institutions peuvent s’appuyer sur le plus que centenaire réseau des « alliances françaises » qui regroupe 835 agences en 2018 dont 115 en Afrique couvrant 35 pays.

    Pour couronner l’ensemble du dispositif des « Sommets des chefs d’État et de gouvernement des pays ayant le français en partage », plus connus sous le nom « Sommet de la Francophonie » se réunissent à partir de 1986 tous les deux ans avec pour objectif de définir « les orientations de la Francophonie de manière à assurer son rayonnement dans le monde, dans un Cadre stratégique décennal[xviii] ». Comme dans les autres domaines de coopération la sphère géographique n’a cessé de s’élargir sous le coup de la montée en puissance de l’Union Européenne et de la hausse de la concurrence économique liée à la mondialisation. Le dernier sommet de 2016 a ainsi vu la participation de 54 États membres, 4 membres associés et 26 observateurs (dont 31 pays africains).

    Les mécanismes de la dépendance

    La question et le problème que pose la Francophonie n’est, bien entendu pas réductible à la question de l’usage du français. L’approche essentialiste de la langue n’aide en rien à comprendre l’enjeu posé par la francophonie néocoloniale. Comme le souligne Kateb Yacine, la langue de l’ancien colonisateur, peut s’appréhender comme un « butin de guerre » pouvant être mis au service de l’émancipation. Après tout de nombreux leaders des indépendances ont subvertit les enseignements appris à l’école coloniale française pour les mettre au service de la libération de leurs pays. Il ne s’agit donc pas de rejeter une langue en soi mais d’interroger les mécanismes d’un dispositif institutionnel politique et ses conséquences sur les États africains.

    Le refus de l’essentialisme en matière de langue ne doit cependant pas nous amener à faire l’erreur exactement inverse c’est-à-dire ne considérer celle-ci que comme un instrument de communication neutre rendant toutes les langues interchangeables sans conséquences. La langue est un système […] par le biais duquel les membres d’une communauté se représentent la réalité (physique, psychologique, sociale, conceptuelle, virtuelle, etc.), communiquent entre eux et s’identifient culturellement[xix] » explique le chercheur canadien en sciences de l’éducation Pierre Legendre. « Il est clair que la langue est nécessaire à la constitution d’une identité collective, qu’elle garantit la cohésion sociale d’une communauté, qu’elle en constitue d’autant plus le ciment qu’elle s’affiche[xx] » complète le linguiste français Patrick Charaudeau. On ne change pas de langue comme de lunettes. Celle-ci apporte au sujet une dimension culturelle et identitaire, une vision du monde résultat d’une expérience historique collective. Elle inscrit le sujet dans une filiation et une histoire.

    Bien entendu la langue est une réalité vivante mutant avec l’expérience collective du groupe qui la parle. L’utilisation d’une même langue ne signifie donc pas en soi une similitude des identités. Qu’un sénégalais ou un québécois parlent le français ne signifient donc pas qu’ils ont la même identité. Cependant la présence d’une situation et de rapports de domination ouvre un processus d’aliénation qui à son tour alimente et renforce la domination. C’est pourquoi le choix de la langue nationale n’est jamais une question secondaire et c’est aussi la raison d’une telle insistance à promouvoir la francophonie de la part de l’ancienne puissance coloniale.

    Sur le plan de chaque nation la question linguistique s’articule à la question des classes sociales du fait d’une maîtrise inégale de la langue officielle selon l’appartenance sociale. Le romancier kenyan N’Gugi wa Thiong’o explique comme suit sa décision de ne plus écrire en anglais pour écrire désormais en Kikuyu et en kiswahili : « Coupée du peuple [la littérature des premières décennies des indépendances], prisonnière des barrières linguistiques héritées du colonialisme, la nouvelle littérature échouait à rassembler au-delà d’une frange d’étudiants, de professeurs et de fonctionnaires en tous genres[xxi]. ». Autrement dit l’inégalité de maîtrise de la langue nationale contribue au renforcement des pouvoirs néocoloniaux. « Préconiser la francophonie dans le cadre d’un enseignement de classe destiné à for­mer une élite de technocrates, c’est vouloir tout simplement perpétuer le système de relais de domination entre l’ancienne métropole et les peuples exploités[xxii] » résume Hassan Benaddi un des animateurs de la revue progressiste marocaine Souffles. Pour prévenir les critiques il précise : « clamons-le encore nous sommes contre la Francophonie et seuls les messieurs Jourdain du néo-colonialisme oseront désormais nous traiter de francophobes[xxiii]. »

    Le lien entre la Francophonie et les classes dominantes de nombreux pays africains et résumé comme suit par le chercheur en sciences politiques François Constantin :

    En Afrique francophone, les comportements politiques reproduisent peut être les attitudes plus idéologiques de la culture politique française. […] Paris demeure un centre de ralliement, non seulement pour des raisons financières, mais aussi parce qu’il est source de légitimité politique […] Les classes dirigeantes actuelles appartiennent encore à une génération dont la socialisation a été fortement métropolitaine, y compris les militaires qui sont passés dans les écoles militaires françaises. […] Les liens coloniaux entre établissements d’enseignement, des écoles techniques aux Universités, se sont maintenus comme s’ils étaient dans la nature éternelle des choses[xxiv].

    L’auteur précise les mécanismes qui ont présidés à cette articulation entre classes dominantes locales et ancienne puissance coloniale : « réseaux de relation prioritaires » des nouveaux pouvoirs ; « rencontres régulières au sommet » ; « études des élites en métropole » ; « liens clientélistes » ; prédominance de la littérature hexagonale ; etc. La place centrale de la francophonie dans ce processus d’ensemble est pour sa part résumée de la manière suivante : « Ces regroupements des pays francophones […] n’étaient signifiants que pour les classes dirigeantes francophiles et pour la France ; ils permirent de récupérer les satellites culturels qu’étaient les anciens territoires belges, en particulier le Zaïre et le Rwanda, dont aucune économie politique sérieuse du colonialisme ne peut expliquer le rattachement au conglomérat franco- centré. C’était en tout cas suffisant pour gêner une unité africaine qui eût pu être préjudiciable au Nord[xxv]. »

    La figure de Senghor illustre pleinement la dimension aliénante de la francophonie dominante c’est-à-dire celle qui fonctionne réellement et concrètement. Celui qui est présenté avec le tunisien Habib Bourguiba comme un des « fondateurs » de la francophonie) défend la thèse d’une symbiose harmonieuse entre le français (langue officielle) et les six langues nationales (le wolof, le serere, le diola, le peul, le manding, le soninke). Pourtant plus de cinquante ans après l’indépendance le français reste la langue de l’élite, de ses institutions et du pouvoir, alors que les langues nationales sont la langue des masses et de la rue. Un de ses arguments est le nombre important de langues africaines empêchant d’en choisir une (c’est-à-dire rendant nécessaire de choisir le français comme langue commune). Cet argument ne tient pas pour le Sénégal. D’une part comme l’a démontré Cheikh Anta Diop, les différentes langues du Sénégal sont apparentées entre elles[xxvi]. D’autre part toutes les minorités sont très majoritairement bilingues et parlent la langue majoritaire le Wolof. « Environ 80 % de la population le pratique sur toute l’étendue du territoire[xxvii] » rappellent le linguiste sénégalais Jean Léopold Diouf et la linguiste française Marina Yaguello. La situation est sensiblement la même dans de nombreux pays africains.

    En outre le choix du français reproduit la balkanisation issue des anciennes puissances coloniales. Ainsi la Gambie « anglophone » et le Sénégal « francophone » ont le Wolof comme langue commune. Alors qu’existent de nombreuses langues transnationales de communication, chacun des États continue d’utiliser comme langue officielle celle de son ancien colonisateur. C’est le cas du Haoussa qui est utilisé au Nigéria, au Niger et au Tchad ; du Soninké parlé au Sénégal, au Mali et en Mauritanie ; du peul que l’on trouve au Mali, en Mauritanie, au Sénégal, en Guinée, au Burkina Faso, au Niger et au Nigéria ; etc. Ces différentes langues parlées par les paysans et les ouvriers constituent des ponts entre les États africains pouvant servir de base à un développement économique autocentré correspondant aux besoins de ces peuples. C’est ce que souligne Cheikh Anta Diop dans son combat pour l’adoption de langues officielles africaines. Dès 1954 il soulignait qu’ « on ne saurait insister suffisamment sur le fait que l’impérialisme culturel est la vis de sécurité de l’impérialisme économique ; détruire les bases du premier c’est donc contribuer à la suppression du second[xxviii] ».

    La francophonie ne se limite pas à sa seule dimension linguistique. Cette dernière n’est qu’une des facettes et un des outils de ce que Diop nomme « impérialisme culturel ». Kwame Nkrumah nous invite à prendre toute la mesure de cet impérialisme culturel. Décrivant les mécanismes du néocolonialisme états-uniens, il insiste sur les mises en dépendance culturelles en citant pêle-mêle l’encouragement du gouvernement états-uniens à des échanges entre syndicalistes ou universitaires; à la mise en place d’Organisations Non Gouvernementale dans de nombreux secteurs ; la mise en place d’organes de presses écrites; l’implantation divers groupe évangélistes ; la promotion de la littérature états-uniennes ; la diffusion de films et de séries télévisuelles ; etc. Sur ce dernier aspect, il présente comme suit les effets :

    Même les scénarios des films d’Hollywood sont des armes. Il suffit d’écouter les applaudissements des spectateurs africains quand les héros hollywoodiens massacrent les Indiens ou les Asiatiques pour se rendre compte de la puissance d’un tel moyen. En effet, dans les continents en voie de développement où l’héritage colonialiste a laissé une grande majorité d’illettrés même le plus petit enfant est atteint par le message contenu dans les histoires de sang et de violence venues de Californie. Et avec le meurtre et le Far West arrive un barrage incessant de propagande antisocialiste, dans lequel le syndicaliste, le révolutionnaire ou l’homme à la peau sombre joue généralement le rôle du traitre, alors que le policier, le détective, l’agent fédéral – en un mot l’espion type CIA – est toujours un héros[xxix]

    Ingérences et résistances

    Le socio-économiste malien Hamidou Magassa propose de situer la Francophonie dans l’histoire de la domination colonialiste et dans ses différentes phases. Il dénombre trois phases : celle de la « mission civilisatrice » allant de la conquête coloniale à 1956 ; celle de la « communauté française » qui lui succède jusqu’aux indépendances et celle de la Francophonie depuis. Concernant cette dernière, il souligne : « la troisième phase néocoloniale est celle actuelle de la récupération indirecte, des acquis de cette lutte [la lutte pour l’indépendance] en s’appuyant sur l’élite locale, « francophonisée » au préalable[xxx]. »

    Le lien entre francophonie et intérêts économiques est parfois publiquement assumé comme en témoigne la déclaration du ministre français des affaires étrangères, Yvon Bourges, à l’assemblée nationale française le 23 octobre 1967 :

    Et naturellement le premier objectif de mon département est de favoriser la pénétration de la langue et de la culture françaises dans les pays d’Afrique et de Madagascar…; le second objectif que nous nous proposons est d’ordre économique : le maintien et le développement des intérêts commerciaux et industriels français constituent également une préoccupation constante du Secrétariat d’Etat aux Affaires Etrangères en charge de la coopération. Je le dis sans aucune honte. Cela n’a d’ailleurs rien d’illégitime ni de sordide. La coopération n’est pas une entreprise intéressée au sens égoïste du terme, mais il ne peut s’agir ni de gaspillage ni de prodigalité …[xxxi]

    La parole se fera plus prudente ultérieurement mais l’articulation entre francophonie et défenses des intérêts économiques français reste une constante jusqu’à aujourd’hui. L’évolution des thèmes des sommets de la francophonie en témoigne. Ainsi en est-il du quinzième sommet de Dakar en 2014 dont l’objectif était d’adopter une « stratégie économique pour la Francophonie ». Ceux qui pensent encore que la Francophonie institutionnelle est une affaire de « langue en partage » sont ou naïfs ou malhonnêtes face à la simple idée d’une stratégie économique commune possible en maintenant le franc CFA, les accords de partenariat économique (APE), la dette et ses plans d’ajustement structurel, les multiples interventions militaires, etc. L’annulation de la dette publique de 7 pays africains par le Canada lors du sommet du Québec en 1987 puis l’annulation partielle de la dette publique par la France lors du sommet de Dakar en 1989 pèsent peu face à l’immensité de la dette privée et aux pressions des « amis francophones » pour qu’elle soit remboursée au prix de Plans d’ajustement structurel qui empêchent toute possibilité de développement.

    Au fur et à mesure des différents sommets se sont tous les aspects de vie politique et économique d’une part et de la souveraineté nationale d’autre part qui sont abordés c’est-à-dire mis en conformité avec les intérêts des puissances occidentales francophones et en particulier de la France. Le troisième sommet à Dakar en 1989 met ainsi en place « une coopération juridique et judiciaire ». Celui de Paris en 1991 et de Maurice en 1993 se donnent pour objectif de « faire avancer le processus de démocratisation » c’est-à-dire de légitimer l’ingérence dans les affaires intérieures des États africains. Le sommet de Cotonou en 1995 est consacré à « l’affirmation politique de la communauté internationale dans le contexte d’après-guerre froide ». Ces quelques exemples suffisent pour illustrer que nous ne sommes pas en présence d’une « langue en partage » mais d’un processus de production et de reproduction des dépendances néocoloniales.

    Donnons un dernier exemple qui se déroule lors du sommet de Kinshasa en 2012. Interviewé par la journaliste Belge Colette Braeckman, le commissaire congolais du sommet Isidore Ndaywel déclare : « Un effort est en cours et le Sommet de la francophonie sera l’opportunité d’une plus grande ouverture qui s’adresse cette fois à tout le monde, dont nos partenaires traditionnels, les pays francophones du Nord et du Sud, et pas seulement à la Chine, comme on nous l’a reproché [xxxii]. » Nous sommes bien en présence d’un outil visant à influer sur les choix économiques des pays africains dans l’objectif de défendre les intérêts des pays francophones occidentaux en général et de la France en particulier.

    Si la Francophonie connaît un élargissement notable des pays membres en s’élargissant désormais à des pays de l’Est de l’Europe, elle est en revanche de plus en plus critiquée et remise en cause en Afrique. En témoigne les multiples écrits visant à démontrer qu’elle n’est pas de nature néocolonialiste. Les arguments mis en avant sont sans cesse les mêmes :

    Il suffit d’un coup d’œil à la liste des pays membres de plein droit et observateurs de l’OIF pour abolir l’idée que la Francophonie décalque les frontières des anciennes colonies françaises, et encore plus qu’elle ne serait que l’un des habits neufs du néo-colonialisme. [ …] Le reproche de néo-colonialisme repose en outre sur un contresens historique. Ce n’est pas, en effet, par la France qu’a été conçu le projet de structurer l’ensemble des pays francophones, mais par un groupe de personnalités dont beaucoup avaient en commun d’avoir été, justement, de grandes figures du mouvement des indépendances dans les années cinquante et soixante. Ils s’appelaient Léopold Sédar Senghor, Habib Bourguiba, Hamani Diori, Norodom Sihanouk, notamment[xxxiii].

    L’argument de l’élargissement extra-africain souligne justement que la francophonie est devenue un des outils dans la concurrence mondiale entre les USA, l’Union européenne et le Canada qui n’a cessé de s’exacerber depuis le début de la mondialisation. Celui de l’origine de ses fondateurs rappelle simplement le mode d’accès à l’indépendance ayant pour cœur la préparation d’une transition entre le colonialisme et le néocolonialisme. Les trois chefs d’État africains généralement cités (Senghor, Bourguiba et Diori) ont été dans cette période de transition de « bons élèves ».

    Les voix africaines remettant en cause la francophonie institutionnelle ne cessent en revanche de se multiplier. « Si le français, en Afrique de l’Ouest, à mesure que les colons justifiaient leur « mission » civilisatrice, a longtemps valu comme langue du progrès, il constitue aujourd’hui, pour certains, de par son ambiguïté, un symbole d’assujettissement qui, du point de vue local, serait à l’origine de la négation, voire de la destruction des cultures africaines. […] il est alors possible d’entendre à Bamako : « À bas la francophonie ! » dans un meeting associatif[xxxiv] » remarque la sociolinguiste Cécile Canut. A l’occasion du quarantième anniversaire de la francophonie en 2010, le quotidien Burkinabais « Le pays-Ouagadougou » va dans le même sens en soulignant :

    En francophonie, on note un réel déséquilibre entre pays du Nord et du Sud, les seconds étant étroitement dépendants des premiers qui assurent pour la plupart le financement du développement. Ce déséquilibre s’est accentué au fil du temps du fait du poids de la France en rapport avec les visées géostratégiques de l’Élysée. Le rayonnement culturel étant sous-jacent à l’influence économique, la France qui n’a plus ses colonies, sent qu’elle perd de son lustre d’antan. La francophonie devient
    alors le cadre idéal pour restaurer cette influence. On le sent lors des
    grandes messes rituelles. Paris dissimule à peine qu’elle se trouve au centre
    des prises de décisions[xxxv].

    Plus grave encore pour la stratégie néocoloniale, on assiste à un mouvement populaire de réaffirmation de soi et de réinvestissement des langues locales. Ainsi au Sénégal présenté par l’histoire officielle francophone comme le berceau de la francophonie, « le français recule au profit du wolof. Un phénomène de fond qui n’est pas sans conséquence sur la vie quotidienne[xxxvi] » souligne un article au titre significatif (« Le Sénégal est-il encore un pays francophone ? ») de SlateAfrique de 2016. Une émission de TV 5 Monde titre dans le même sens en février 2018 : « Le Sénégal perd son français au profit du wolof. »

    Ces réactions populaires convergent avec des prises de position politique à l’exemple de l’appel à un « contre-sommet anti-francophone » en 2014 à l’occasion du sommet de la francophonie : « Les parties signataires de la présente plateforme considèrent que les Sommets dits francophones ne sont qu’un mauvais cirque destiné, principalement à couvrir et cautionner les abus de puissance multiformes du néocolonialisme français en Afrique, aujourd’hui placé sous la tutelle des Usa depuis sa réintégration dans le commandement de l’Otan ; et accessoirement à entretenir la corruption, la concussion et des trafics « françafricains » en tous genres[xxxvii].» L’évènement a été évalué comme suffisamment important pour susciter une interdiction des manifestations publiques par le gouverneur de Dakar pendant la durée du sommet francophone pour des raisons de « sécurité ».

    Comme tous les autres fronts s’opposant au néocolonialisme que nous avons mentionnés dans nos livraisons précédentes, ces militants qui s’opposent à la francophonie institutionnelle restent encore largement minoritaire. Leur simple existence est un signe du développement des consciences au regard de la période précédente. Le jeune âge de ces militants souligne l’émergence d’une nouvelle génération militante porteuse d’avenir pour les peuples africains.

    [i] Onésime Reclus, France, Algérie et colonies, Hachette, Paris, 1883, p. 690.

    [ii] Les pères de la Francophonie, http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/d000124-la-francophonie/les-peres-de-la-francophonie, consulté le 11 août 2018 à 16 h 50.

    [iii] Paul Dupuy, conférence intitulée « les deux premières années de l’alliance française », 1886, cité in Ivan Barko, L’alliance française : les années Foncin (1883-1914). Contexte, naissance, mutations, Documents pour l’histoire du français langue étrangère ou seconde, n° 25, 2000, p. 9.

    [iv] Joseph Roger Benoist, Eglise et pouvoir colonial au Soudan français. Administrateurs et missionnaires dans la boucle du Niger (1885-1945), Karthala, Paris, 1987, p. 47.

    [v] Guy Pervillé, La notion d’élite dans la politique indigène de la France, in Sylvie Guillaume (coord.), Les élites fin de siècles (XIXe-XXe siècles), Editions de la Maison des sciences de l’homme Aquitaine, 1992, p. 181.

    [vi] Georges Hardy, Histoire de la colonisation française, Larose, Paris, 1943, p. 322.

    [vii] Ibid, p. 322.

    [viii] Cité in Pascale Barthelemy et Jean Hervé Jezequel, Marier les « demoiselles frigidaires » et les « mangeurs de craies » : l’idéal du ménage lettré et l’administration coloniale en Afrique, in Odile Goerg (dir.), Perspectives historiques sur le genre en Afrique Occidentale française, L’Harmattan, Paris, 2007, pp. 77-96.

    [ix] Cité in Pascale Barthelemy, Instruction ou éducation ? La formation des africaines à l’Ecole normale d’institutrices de l’AOF de 1938 à 1958, Cahiers d’études africaines, n° 169-170, 2003, p. 375.

    [x] Saadia-et-Lakhdar, L’aliénation colonialiste et la résistance de la famille algérienne, La Cité éditeur, Lausanne, 1961, p. 46.

    [xi] Nous empruntons l’expression à la chercheuse en sciences politiques Alice Goheneix, Les élites africaines et la langue française : une appropriation controversée, Documents pour l’histoire du français langue étrangère ou seconde, n° 40-41, 2008, p. 3.

    [xii] Ibid, pp. 3-4.

    [xiii] Une histoire de la Francophonie, Organisation Internationale de la Francophonie (OIT), https://www.francophonie.org/Une-histoire-de-la-Francophonie.html, consulté le 12 août 2018 à 17 h 50.

    [xv] Cité in Chikouna Cissé, Le « CAMES » (Conseil Africain et Malgache pour l’Enseignement Supérieur) avant le CAMES (1968-2018) : Un demi-siècle au service de l’enseignement supérieur et de la recherche en Afrique, éditions Science et Bien Commun, Québec, 2018, pp. 13-14.

    [xvi] Ibid, p. 28-29.

    [xvii] Conférer : Saïd Bouamama, L’œuvre négative du néocolonialisme français et européen en Afrique. Les Accords de partenariat économique (APE) : de la Françafrique à l’Eurafrique, https://bouamamas.wordpress.com/2018/08/05/loeuvre-negative-du-neocolonialisme-francais-et-europeen-en-afrique-les-accords-de-partenariat-economique-franc-ape-de-la-francafrique-a-leurafrique/.

    [xviii] Le sommet, Organisation Internationale de la Francophonie, https://www.francophonie.org/Le-Sommet.html, consulté le 12 août 2018 à 20 h 10.

    [xix] Renald Legendre, Dictionnaire actuel de l’éducation, Guerin, Montréal, 2005, p. 825.

    [xx] Patrick Charaudeau, Langue, discours et identité culturelle, Revue Ela, n° 123-124, 2001/3, p. 342.

    [xxi] Ngugi wa Thiong’o, Décoloniser l’esprit, La Fabrique, Paris, 2011, pp. 48-49.

    [xxii] Hassan Benaddi, Francophonie et néocolonialisme, Souffles, n° 18, mars-avril 1970, p. 24.

    [xxiii] Ibid, p. 25.

    [xxiv] François Constantin, Et si le pouvoir était au bout de la culture ? Réalités culturelles et politique internationale de l’Afrique, Politique Africaine, n° 9, mars 1983, p. 16.

    [xxv] Ibid, p. 17.

    [xxvi] Cheikh Anta Diop, Les fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral d’Afrique Noire, Chapitre 2, Présence Africaine, Paris, 1960.

    [xxvii] Jean Léopold Diouf et Marina Yaguello, J’apprends le Wolof, Karthala, Paris, 1991, p. 8.

    [xxviii] Cheikh Anta Diop, Nations nègres et culture, Présence Africaine, Paris, 2009 (première édition 1954), p. 407.

    [xxix] Kwame Nkrumah, Le néocolonialisme, Présence Africaine, Paris, 1973 (première édition 1965), pp. 251 -252.

    [xxx] Hamidou Magassa, Les langues et leur statut en Afrique dite francophone, Etudes maliennes, n° 22, 1977, pp. 40-71.

    [xxxi] Yvon Bourges, intervention à l’assemblée nationale du 25 octobre 1967, journal officiel du 26 octobre 1967, p. 4088, http://archives.assemblee-nationale.fr/3/cri/1967-1968-ordinaire1/026.pdf, consulté le 13 août 2018 à 20 h 30.

    [xxxii] Colette Braeckman et Isidore Ndaywel, la réunion la plus importante jamais tenue au Congo du 10 octobre 2012, http://www.lesoir.be/archive/d-20121010-300L51?referer=%2Farchives%2Frecherche%3Fdatefilter%3Dlast10year%26sort%3Ddate%2Bdesc%26start%3D1790%26word%3DColette%2BBraeckman, consulté le 14 août 2018 à 18 h 30.

    [xxxiii] Claire Tréan, Idées reçues. La Francophonie, La cavalier bleu, Paris, 2006, pp. 19-20.

    [xxxiv] Cécile Canut, « A bat la francophonie ! » De la mission civilisatrice du français en Afrique à sa mise en discours postcoloniale, Langue française, n° 167, 2010/3, pp. 142-143.

    [xxxv] Francophonie. Un instrument politique au service de la France, https://www.courrierinternational.com/article/2010/03/25/un-instrument-politique-au-service-de-la-france, consulté le 14 août 2018 à 19 h 30.

    [xxxvi] Le Sénégal est-il encore un pays francophone ?, http://www.slateafrique.com/21377/linguistique-senegal-est-il-encore-un-pays-francophone, consulté le 14 août 2018 à 20 h 00.

    [xxxvii] Dialo Diop et Moussa Dembélé, Plate-forme pour un contre-sommet anti-francophone à Dakar, 26 novembre 2014, https://www.pambazuka.org/fr/governance/n%C3%A9ocolonialisme-plateforme-pour-un-contre-sommet-anti-francophone-%C3%A0-dakar, consulté le 14 août 2018 à 20 h 15.

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