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  • Comment le général Belkecir a obtenu un passeport étranger

    Par Mohamed Mecelti

    Un formulaire en ligne, un consultant à votre disposition et le tour est joué pour obtenir un passeport qui vous permettra de circuler librement dans au moins 140 pays. Une aubaine pour un Algérien soumis à des restrictions draconiennes pour décrocher un visa, notamment de type Schengen pour voyager plus librement.

    Mais ce sésame est cependant destiné à une poignée d’individus prêts à verser des centaines de milliers de dollars pour l’obtenir, dont l’ex-commandant de la gendarmerie algérienne, le général Ghali Belkecir.

    Sur la base de recoupements rigoureux, le Jeune Indépendant a pu lever le voile sur la procédure suivie par le général Ghali Belkecir, ainsi que le montant exact qu’il a déboursé pour s’offrir la nationalité de Vanuatu, un archipel de l’Océanie.

    En fuite entre l’Espagne et la France depuis août 2019, Ghali Belkecir a payé une petite fortune de 330 mille USD (plus de cinq milliards de centimes algériens), pour devenir un citoyen vanuatais. Une citoyenneté qui lui permet d’acquérir une nouvelle identité et d’échapper par conséquent aux poursuites judiciaires lancées par la justice militaire en Algérie.

    Dans cette voie suivie par l’ancien homme fort de la gendarmerie, de nombreux riches issus des pays sujets à des restrictions sur les visas, ou qui sont recherchés par la justice, ont eu recours aux services de bureaux spécifiques disponibles pour les nantis dont l’origine de la fortune est suspecte. Parmi ces bureaux, spécialisés dans l’obtention de la nationalité des pays des Caraïbes et du Pacifique, il y a notamment Citizenship Invest (CI), société britannique basée à Dubaï.

    Le bureau se charge via un conseiller d’orienter le demandeur sur la nationalité qui lui convient en fonction du domaine d’investissements choisi et des moyens financiers à sa disposition.
    Généralement, les fonds versés sont investis dans l’hôtellerie contre des dividendes de 1% par an.
    Le dépositaire du fonds ne pourra revendre ses actions qu’après cinq ans.

    Belekcir a ainsi fait un don de 200.000 USD (plus de trois milliards de centimes) au gouvernement du Vanuatu, pour que son dossier de naturalisation soit rapidement accepté. Si le demandeur souhaite ajouter son épouse ou ses enfants ou ses parents pour la naturalisation, il devrait ajouter pour chacun la somme de 14.000 USD.

    Le choix du Vanuatu n’était pas fortuit. Belkecir a opté pour ce paradis fiscal car son passeport lui permet d’accéder, sans visa, à l’Union européenne, aux pays d’Amérique Latine, d’Afrique, aux USA, au Royaume-Uni, à la Russie, à Hong Kong et à d’autres Etats habituellement difficiles d’accès pour certaines nationalités, dont l’algérienne.

    Le demandeur de naturalisation doit effectuer un paiement initial, non remboursable, de 6 000 dollars de frais de vérifications effectués par la Division de la cellule de renseignement financier du gouvernement (CRF) afin d’obtenir l’approbation du dossier. Cette procédure de vérification dure entre un et trois mois.

    Une procédure de cinq mois

    Belkecir a d’abord rempli un formulaire attestant qu’il ne fait l’objet d’aucune poursuite judiciaire dans son pays d’origine ou ailleurs, et présenté son relevé de compte bancaire des douze derniers mois, ainsi qu’un casier judiciaire et un certificat de résidence, ou encore une copie d’une facture d’électricité pour justifier son lieu de résidence. Il a ensuite effectué un paiement unique, non remboursable, au gouvernement du Vanuatu de 200.000 USD et a payé également la somme de 135.000 USD, dont 109.000 USD partent directement dans les caisses de l’État du Vanuatu, le reste constituant la rémunération des agents fixés à 15.000 USD.

    L’enquête qui sera confiée aux services de l’Etat choisi par le demandeur dure trois mois. Une fois terminée, la procédure de délivrance du passeport prendra un mois, soit un total de quatre à cinq mois à partir de la date de dépôt du dossier.

    Interrogé sur cette procédure, un consultant de Citizenship Invest explique que cette phase prend généralement un mois, afin que la Banque Centrale du Vanuatu s’assure notamment de la bonne réception des fonds transférés.
    Une fois les fonds envoyés par le général algérien, le dossier a été traité lors d’une réunion de la Commission nationale de naturalisation, qui a, à son tour, émis son approbation finale autorisant Ghali Belkecir à prêter virtuellement serment en qualité de citoyen du Vanuatu.

    Citizenship Invest, propose ses services pour l’obtention des passeports de St. Kitts & Nevis, Grenade, la république Dominicaine, St. Lucia, Antigua & Barbade dans les Caraïbes, Chypre, Malte et le Monténégro, la Turquie et le Vanuatu.

    Outre les passeports, le bureau de conseil propose des cartes de résidences pour des pays au Portugal, Espagne, Bulgarie, Royaume-Uni, Irlande, Grèce, Bulgarie et USA pour des montants qui varient en fonction du pays et la nature de l’investissement.

    Grâce à ce système « licite » qui favorise le blanchiment d’argent, le général algérien en fuite jouit actuellement d’une « citoyenneté d’honneur », avec tous les droits de ce paradis fiscal, sans toutefois le droit de voter et de postuler à un emploi publique ou à une fonction politique.

    Il est à signaler que la vente de passeports n’est pas illégale et se pratique aussi dans d’autres pays du monde, y compris au sein de l’Union européenne, où des pays comme Chypre, Malte et la Bulgarie proposent ces « passeports dorés ». Ce système de vente de passeports représentait 42% des recettes publiques du Vanuatu en 2020, rapportant plus de 116 millions de dollars pour ce petit pays très endetté et aux ressources limitées.

    Ghali Belkecir fait l’objet de quatre mandats internationaux émis par le tribunal militaire de Blida pour corruption et enrichissement illégal. On ignore le montant des fonds transférés par Belkcir à l’étranger, mais le prix de l’achat de son passeport et l’acquisition de biens immobiliers par ses enfants, donnent à penser qu’il a détourné des sommes colossales.

    Selon des indiscrétions, il aurait acquis de nombreux biens en Espagne et en France, dont deux appartements dans le très cossu XVIe arrondissement de Paris, où le prix minimal du m² varie de 11.800 €/m² (près de 190 Millions de centimes le M²) à 14.000 €/m² (plus de 220 millions de centimes).

    Le Jeune Indépendant, 21/07/2021

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  • Algérie : La justice traque les suppôts de la Issaba

    OULD KADDOUR, CHAKIB KHELIL, BOUCHOUAREB, BELKECIR ET ZITOUT AND CO : La justice traque les suppôts de la Issaba

    Le sulfureux Abdelmoumen Ould Kaddour, ancien P-DG du géant pétrolier Sonatrach, arrêté samedi à Dubaï en provenance de Paris, reste en instance d’extradition vers l’Algérie, pour rendre des comptes à la justice pour les graves torts causés au Trésor public, notamment dans ce qu’il est convenu d’appeler le scandale de la raffinerie d’Augusta, dont il est le principal concepteur.

    Ce dernier qui était un soutien de poids pour le clan Bouteflika n’aurait dû jamais prendre la direction de la Sonatrach, lui qui avait été condamné pour une charge lourde, l’espionnage économique dans le cadre de l’affaire BRC (Brown Root and Condor). Et malgré un casier judiciaire chargé et une condamnation infamante, il fut bombardé patron de la plus grosse firme pétrolière algérienne.

    En mai 2018, alors que tous les experts du secteur des hydrocarbures avaient crié au scandale, l’homme-lige du clan Bouteflika, affirmait que Sonatrach venait de réaliser l’affaire du siècle en rachetant auprès d’Esso Italiana une filiale du groupe américain ExxonMobil, la Raffinerie Augusta en Italie. Il avait soutenu que cette opération est plus rentable que la réalisation d’une raffinerie à Hassi Messaoud pour un coût de 3 à 4 milliards de dollars. Mais en réalité il avait déboursé de l’argent pour s’offrir un tas de ferraille pour une raffinerie dépareillée. Alors que la maintenance du complexe avait ruiné son propriétaire, Ould Kaddour lui offre une solution tombée du ciel en achetant cette station et ses oléoducs.
    Ould Kaddour ne devait jamais accéder à un poste aussi sensible en raison des casseroles qu’il trainait, mais sa proximité avec le clan Bouteflika lui a permis de revenir, en seigneur, à la direction de la Sonatrach.

    Les maillons de la chaîne

    Cette affaire nous renvoie aux dossiers Sonatrach 1 et 2, et dans lesquels est cité nommément l’ancien ministre des hydrocarbures, Chakib Khelil. Dans le cadre de l’enquête diligentée il y a quelques années par le parquet d’Alger, le magistrat instructeur, l’actuel ministre de la Justice, Belkacem Zeghmati, alors procureur général près la cour d’Alger, avait émis en 2013 un mandat d’arrêt international contre Chakib Khelil. L’accusé qui faisait partie du cercle très rapproché de l’ancien Président avait alors fui le pays, le temps de permettre à l’ancien garde des Sceaux, Tayeb Louh, de trouver la parade pour invalider le mandat émis par la justice.

    Ce qui fut fait en arguant un vice de forme, permettant ainsi à Chakib Khelil de revenir au pays et de se lancer dans une véritable campagne de séduction des zaouïas en se posant, pour la « Issaba », comme une alternative en cas de retrait de Bouteflika pour la course à un cinquième mandat. Ce plan fut éventé grâce au Hirak du 22 février 2019. Aujourd’hui, l’homme est sous la menace d’un mandat d’arrêt international qui pourrait être délivré par la justice algérienne tant son nom est cité dans plusieurs affaires et scandales de corruption.

    La justice a également condamné l’ancien ministre de l’industrie, Abdeslam Bouchouareb et émis, à son encontre, un mandat d’arrêt international. Ce dernier, cité à comparaitre dans l’affaire du montage des véhicules et plusieurs autres affaires, a quitté le pays depuis la chute de l’ancien Président et ses relais. Plusieurs autres noms d’acolytes de la Issaba pourront bientôt faire face à la justice algérienne.

    Le général Ghali Belkecir et son épouse, l’ancienne présidente de la cour de Tipaza, qui avaient mis en place une justice parallèle avec le soutien de Tayeb Louh, en fuite à l’étranger, pourraient un jour revenir au pays pour répondre des lourdes charges qui pèsent sur eux.

    C’est dans la même veine que des mandats d’arrêt international ont été lancés, ce dimanche, contre Zitout, Hichem Aboud, Amir Dz et le gendarme déserteur Mohamed Abdallah, s’inscrivent d’ailleurs dans la nouvelle dynamique de la justice algérienne qui veut faire payer ceux qui ont voulu attenter à la stabilité du pays et de le ruiner, d’avilir le peuple par leurs pratiques maffieuses, et surtout osé mettre le pays et ses richesses au seul service de la Issaba et ses relais.
    Slimane B.

    Le Courrier d’Algérie, 24 mars 2021

    Tags : Algérie, justice, Zitout, Hichem Aboud, Amir Dz, Mohamed Abdallah, Abdelmoumen Ould Kaddour, Sonatrach, Augusta, Bouteflika, Chakib Khelil, Tayeb Louh, Ghali Belkecir, Issaba,