Étiquette : Guerre d’Algérie

  • La France va indemniser des milliers de proches de combattants harki algériens

    La France va indemniser des milliers de proches de combattants harki algériens

    Etiquettes : France, Harkis, Guerre d’Algérie, indémnisation,

    Augmentation du nombre de personnes pouvant réclamer une indemnisation pour le traitement de ceux qui ont combattu pour les Français dans la guerre d’indépendance

    Le gouvernement français doit verser des réparations à des milliers d’autres Algériens et à leurs familles détenus dans des camps d’internement en France après la guerre d’indépendance de ce pays d’Afrique du Nord.

    Agissant sur un rapport d’une commission indépendante, le gouvernement a accepté d’augmenter le nombre de Harkis et de leurs proches éligibles pour réclamer une indemnisation pour avoir été contraints de vivre dans des conditions de vie déplorables et sordides il y a plusieurs décennies.

    Jusqu’à 200 000 Algériens ont été recrutés pour combattre aux côtés des forces coloniales françaises ou comme « auxiliaires » dans la guerre d’indépendance entre 1954 et 1962. Le mot Harki vient de l’arabe pour « mouvement » et fait référence aux unités mobiles dans lesquelles de nombreux Algériens servi.

    Paris avait promis de s’occuper d’eux à la fin du conflit, mais les a ensuite laissés à eux-mêmes après la signature de l’indépendance le 18 mars 1962. Beaucoup de ceux qui sont piégés en Algérie et des traîtres de marque ont été massacrés pour se venger d’avoir soutenu les anciens maîtres coloniaux du pays. .

    On estime que 42 000 Harkis et environ le même nombre de parents qui ont fui vers la France ont été détenus dans des camps qui ont entraîné la mort de dizaines d’enfants entre 1962 et 1975.

    Le gouvernement français a d’abord refusé de reconnaître leur droit au séjour, les forçant à rester dans des camps sordides.

    La France a organisé sa première fête nationale en l’honneur des Harkis en 2001, mais ce n’est qu’en 2016 que le président socialiste, François Hollande, a officiellement reconnu le rôle de l’État dans leur abandon.

    « Je reconnais la responsabilité des gouvernements français dans l’abandon des Harkis , les massacres de ceux qui sont restés en Algérie et les conditions inhumaines de ceux qui ont été transférés dans des camps en France », avait alors déclaré Hollande.

    En 2021, Emmanuel Macron a demandé « pardon » au nom de la France pour avoir laissé les Harkis et leurs familles à leur sort après l’indépendance.

    En février 2022, le gouvernement français a reconnu la responsabilité du pays dans « l’indignité des conditions d’accueil et de vie sur son territoire » et « l’exclusion, la souffrance et les traumatismes durables » qui s’en sont suivis. Il a adopté une loi accordant des réparations à ceux qui avaient vécu dans 89 camps d’internement jusqu’à 3 000 € (2 600 £) pour ceux détenus pendant un an et 1 000 € supplémentaires pour chaque année suivante.

    À l’époque, environ 50 000 harkis devaient être éligibles à des réparations pour un coût total de 310 millions d’euros.

    Cependant, un rapport de la Commission nationale indépendante pour la reconnaissance et la réparation des préjudices subis par les Harkis (CNIH) a recensé 45 nouveaux sites, dont des « camps militaires, des bidonvilles, des cabanes de transit », où jusqu’à 14 000 Harkis et leurs familles ont été contraints de en direct.

    La décision d’élargir la possibilité pour les Harkis et leurs proches de demander une indemnisation est intervenue après la remise du rapport de la CNIH au Premier ministre français, Élisabeth Borne, lundi soir.

    Patricia Mirallès, secrétaire d’État aux anciens combattants et à la mémoire, a déclaré que cette décision contribuerait en quelque sorte à « réparer une nouvelle injustice, y compris dans des régions où jusqu’à présent la souffrance des Harkis qui y vivent n’était pas reconnue «  .

    Le comportement de la France pendant et après la guerre d’indépendance de l’Algérie n’est qu’un des héritages de l’héritage colonial du pays qui reste non résolu. Il s’agit notamment des essais nucléaires dans la zone Pacifique de la Polynésie française et de son rôle dans le génocide rwandais .

    The Guardian, 16 mai 2023

    #France #Harkis #Algérie #Guerre_Algérie #Indémnisation

  • Macron reconnaît que Djamila Boupacha a été «torturée»

    Tags : Algérie, Djamila Boupacha, France, Guerre d’Algérie, Mémoire, crimes coloniaux,

    Dans son hommage à Gisèle Halimi : Macron reconnaît que Djamila Boupacha a été «torturée»

    Le président français Emmanuel Macron a, dans son discours en hommage à l’avocate et militante féministe Gisèle Halimi, décédée en 2020, évoqué la militante du FLN, Djamila Boupacha, qu’elle défendait en 1960.

    Reconnaissant son combat pour la décolonisation, pour l’indépendance de l’Algérie et contre la guerre, le président Macron a parlé des affres subis par Djamila Boupacha qui a été, entre autres, torturée et humiliée.

    «L’humiliation, la torture, le viol, l’avaient accablée», a-t-il affirmé en référence à l’attitude de l’avocate lors de sa défense de la militante algérienne.

    «Gisèle Halimi a porté la cause de l’indépendance algérienne. La guerre d’Algérie doit maintenant prendre toute sa place dans notre mémoire, ici en France, et en Algérie», a-t-il souligné.

    Le président français reconnaît ici que Djamila Boupacha a été torturée et humiliée, pendant la révolution, franchissant un autre pas dans la reconnaissance des actes de torture et les assassinats dont ont été victimes des militants du FLN.

    M. Macron avait reconnu que l’avocat Ali Boumendjel avait été torturé et assassiné. Vint après le tour de Maurice Audin, également, tué par l’armée coloniale, en Algérie. M. Macron est allé plus loin en présentant des excuses officielles à sa veuve.

    Cependant, les gestes du président français se limitent à des actes symboliques qui ne participent nullement d’une démarche tendant à reconnaître, comme le réclame l’Algérie, les crimes coloniaux, les crimes de guerre commis par l’occupant dont l’armée a pratiqué le massacre à grande échelle, passant des exécutions ciblées aux fumigations et l’extermination de villages entiers.

    C’est la position d’un fort courant français qui ne veut pas reconnaître les crimes commis dans les colonies, particulièrement en Algérie, préférant mettre dans le même panier le FLN et l’armée française.

    Le président s’en est remis à une autre option consistant à réunir dans une même commission les spécialistes et les historiens des deux pays pour se pencher sur l’histoire de la colonisation et de la guerre de libération. Une démarche approuvée par les deux pays.

    Par ailleurs, dans son hommage à sa mère, Jean-Yves Halimi, un enfant de la guerre d’Algérie, a rappelé les menaces de mort qui pesaient sur sa mère et sa famille à l’époque, à cause de son combat pour la décolonisation et contre la guerre d’Algérie.

    Un engagement qui a poussé la famille à une vie sous la contrainte.

    Et s’adressant à elle, il dit : «Tu rejoins au Panthéon de notre récit national celles que j’appelais familièrement les deux Simone, De Beauvoir et Veil.» Et de conclure avec cette sentence post-mortem :

    «Ma mère aurait manifesté aux côtés des manifestants pour les droits des femmes dans toute la France ce mercredi.»

    L’autre fils de l’avocate, le journaliste, directeur du journal mensuel Le Monde Diplomatique, Serge Halimi, a refusé de participer à la cérémonie.

    Il a estimé que la cérémonie n’est pas opportune «alors que le pays est mobilisé contre une réforme des retraites extrêmement injuste, notamment pour les femmes».

    Il a affirmé que sa mère l’aurait combattue. L’aîné des Halimi est politiquement plus offensif, notamment à travers ses écrits et ses éditoriaux dans Le Monde Diplomatique.

    Et comme sa mère, il combat les options et orientations socioéconomiques du président Macron.

    Co-fondatrice, avec Gisèle Halimi en 1971, et présidente de l’association «Choisir la cause des femmes», Violaine Lucas a participé au boycott de la cérémonie qui y a vu «une instrumentalisation politique».

    Source

    #Algérie #Gisele_Halimi #Djamila_Boupacha #Macron #Colonisation #Mémoire

  • Les racines coloniales de l’Union européenne

    Tags : UE, colonialisme, colonisation, Françafrique, Algérie, Guerre d’Algérie,

    L’un des objectifs majeurs de l’intégration européenne réalisée dans les années 1950 était la préservation des colonies africaines de l’Europe. C’est ce que démontrent les historiens suédois Peo Hansen et Stefan Jonsson dans Eurafrique. Aux origines coloniales de l’Union européenne, publié en suédois en 2014 et récemment traduit en français et publié par les éditions La Découverte. Une lecture essentielle selon François Gèze, dont nous publions ci-dessous la recension, pour décrypter l’actualité politique internationale de l’Union européenne et en particulier ses dérives anti-migratoires.

    Eurafrique : un livre-révélation sur les racines coloniales de l’Union européenne
    par François Gèze

    Il n’est pas fréquent qu’un livre, aussi sérieux que documenté, constitue en lui-même un « scoop ». Tel est le cas pourtant du livre Eurafrique, écrit par les historiens suédois Peo Hansen et Stefan Jonsson et initialement publié en 2014, dont une traduction française actualisée vient de paraître à La Découverte. Sous-titré « Aux origines coloniales de l’Union européenne », il révèle en effet qu’un fondement essentiel du processus d’intégration européenne, institutionnalisé en mars 1957 par le traité de Rome créant la Communauté économique européenne (CEE), a été la volonté de ses États fondateurs de perpétuer sous une forme renouvelée le contrôle de leurs possessions coloniales, principalement africaines. Les auteurs rappellent ainsi la « une » du Monde du 21 février 1957, bien oubliée, qui titrait « Première étape vers l’Eurafrique » un article annonçant le succès des négociations préliminaires au traité de Rome entre les six dirigeants européens.

    Certes, le singulier projet d’Eurafrique a déjà été évoqué et partiellement documenté dans divers ouvrages académiques, toutefois spécialisés et toujours incomplets. Plus récemment, un ouvrage de référence destiné à un public large, Un empire qui ne veut pas finir, a en revanche pour la première fois explicité le rôle majeur de ce projet néocolonial dans la mise en place de ce qui deviendra la « Françafrique » [1]. Mais force est d’admettre avec les auteurs suédois que la puissance du « récit fondateur [des] origines pures de l’Union européenne » a fait depuis « fonction de mythe » (p. 34 et p. 335), mythe qui a totalement éradiqué dans l’histoire officielle de la naissance de l’UE la place pourtant centrale assignée à « l’Eurafrique à édifier » par les décideurs français de l’époque (Guy Mollet, mars 1957 ; p. 309).

    Un impératif à leurs yeux d’autant plus aigu qu’ils étaient alors engagés dans deux guerres coloniales d’envergure, l’une secrète au Cameroun, l’autre ouverte en Algérie (il est significatif que la signature du traité de Rome coïncide avec la phase la plus brûlante de la fameuse « bataille d’Alger » déclenchée trois mois plus tôt par les parachutistes des forces spéciales). Pour autant, l’intrication des objectifs d’intégration européenne et de construction eurafricaine n’a rien d’un concours de circonstance : cette élaboration est le fruit de réflexions politiques développées de longue date. Et c’est d’ailleurs là un apport historiographique majeur de l’ouvrage des historiens suédois, qui documentent dans la longue durée la gestation du concept d’Eurafrique.

    Ils montrent ainsi comment il a été initialement pensé par le mouvement pour une Union paneuropéenne lancé en 1923 par l’historien et homme politique d’origine austro-hongroise Richard Coudenhove-Kalergi. Pour ce dernier et l’économiste de l’organisation Otto Deutsch, le salut économique et géopolitique de l’Europe, face aux États-Unis et à l’Union soviétique, passait par la constitution d’une « zone économique paneuropéenne » adossée à un « effort colonial commun en Afrique […] afin de tirer le meilleur profit de ses ressources » (p. 68). Ce projet « ne tarde pas à recueillir le soutien intellectuel et politique des esprits les plus influents de cette génération » (p. 66), comme le détaillent les auteurs. Il sera toutefois balayé par la Seconde Guerre mondiale, mais dès l’après-guerre, il resurgit comme « courant néo-impérial eurafricain » face à l’affirmation de l’« impérialisme “anticolonial” des nouvelles superpuissances » et aux « mouvements anti-impérialistes issus de ce qu’on commence à appeler le “tiers monde” » (p. 117).

    Dès lors, on lira avec grand intérêt le récit des années 1945-1954, période riche de rebondissements et de tensions, qui voient les États européens (et les forces politiques qui les traversent) s’affronter autour du projet d’Eurafrique et d’intégration européenne. La période est notamment marquée par la déclaration du 9 mai 1950 de Robert Schuman, ministre français des Affaires étrangères, « annonçant la démarche conjointe de la France et de l’Allemagne pour réguler de concert l’extraction et la production de charbon d’acier » (p. 177). Laquelle se concrétisera, en avril 1951, par la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), ancêtre direct de la CEE et inspirée des idées de Coudenhove-Kalergi – pour certains auteurs, « l’accord franco-allemand sur le charbon et l’acier n’est que le premier pas d’un processus conduisant à l’exploitation conjointe des ressources africaines » (p. 182). Les auteurs exhument maints documents méconnus ou oubliés, dont l’un des plus révélateurs est le livre de l’écrivain nationaliste et ancien agent du contre-espionnage Pierre Nord, L’Eurafrique, notre dernière chance (Fayard, 1955).

    Surtout, ils expliquent longuement à quel point, pour les dirigeants de la IVe République, toutes les négociations relatives à l’intégration européenne sont indissociables du maintien de la domination coloniale française en Afrique (et en priorité en Algérie) : « L’accord de Paris entre les chefs d’État européens les 19 et 20 février [1957] marque réellement le moment décisif de l’accord colonial de la CEE. Mais […] l’accord de Paris donne aussi naissance à la CEE en tant que telle. De fait, sans accord colonial, il n’y aurait pas d’accord sur l’intégration européenne, et vice versa » (p. 306). Et en effet, c’est en janvier 1957, « au plus fort des négociations sur le projet de CEE » et alors même que d’importants gisements pétroliers viennent d’être découverts dans le Sahara algérien, que la France promulgue la loi créant une « Organisation commune des régions sahariennes » (OCRS), regroupant les territoires du Sud algérien et du nord de l’AOF et l’AEF. Son objectif affiché : « La mise en valeur, l’expansion économique et la promotion sociale des zones sahariennes de la République française. » En 1958, la jeune Ve République reprendra cet objectif à son compte. Et on sait que la volonté farouche du général de Gaulle de garder français le Sahara algérien, pour exploiter ses hydrocarbures grâce à l’OCRS et à la dimension eurafricaine de la nouvelle CEE, l’amènera à prolonger la « guerre d’Algérie » de plusieurs années, alors même qu’il savait inéluctable l’indépendance du pays, survenue en 1962 [2].

    Dès 1960, la majorité des autres colonies africaines de la France était devenues indépendantes et l’OCRS sera liquidée en mai 1963. À partir de cette période, la CEE – devenue Union européenne en 1992 – poursuivra son développement sans que ses « gènes » eurafricains ne soient plus jamais mentionnés. Et pour cause : dans le récit officiel qui allait s’imposer, il était devenu essentiel d’affirmer que la construction européenne était un moyen de tourner définitivement la page de la période coloniale. Alors que c’était précisément l’inverse, comme l’avaient bien compris à l’époque les promoteurs du panafricanisme. Ainsi Frantz Fanon écrivait-il dès 1958 : « La France entend-elle, malgré l’opposition des Africains, donner naissance à cette “Eurafrique” qui doit consacrer le morcellement de l’Afrique en aires d’influences européennes, et pour le seul bien des économies européennes ? » (p. 351). Et le président ghanéen Kwame Nkrumah affirmant en 1961 que le traité de Rome « marque l’avènement du néocolonialisme en Afrique » (p. 352).

    Bien sûr, ces critiques lucides furent ignorées dans les représentations dominantes, ce qui explique la permanence du vieux rêve, qui ressurgit d’ailleurs périodiquement, de façon plus ou moins explicite : dans leur préface à l’édition française, les auteurs soulignent ainsi que la nouvelle Commission européenne entrée en fonction en décembre 2019 « s’engage à faire du partenariat européen avec l’Afrique sa priorité numéro un en matière de politique internationale » (p. 18) ; et que « cette alliance est explicitement présentée comme un moyen d’aider l’Europe à retrouver son lustre d’antan en matière de géopolitique » (p. 20). Et en septembre 2018, The Economist avait déjà titré un article « La renaissance de l’Eurafrique ».

    Face à ces évolutions, accompagnées plus discrètement par un durcissement sans précédent des politiques anti-migratoires de la « Forteresse Europe », on ne peut s’empêcher de s’interroger, comme le fait Étienne Balibar dans sa propre préface à cette traduction, sur la permanence du « racisme systémique dont toute l’idée de l’Eurafrique est comme imprégnée ». L’éclairante enquête historique de Peo Hansen et Stefan Jonsson constitue à cet égard un précieux viatique pour décrypter l’influence des racines profondes de l’Union européenne comme les évolutions récentes de sa politique internationale.

    Peo Hansen et Stefan Jonsson, Eurafrique. Aux origines coloniales de l’Union européenne, traduit de l’anglais par Claire Habart, préface d’Étienne Balibar, La Découverte, mai 2022, 24 €.
    Lire un extrait sur le site de La Découverte

    [1] Thomas Borrel, Amzat Boukari-Yabara, Benoît Collombat et Thomas Deltombe (dir.), L’Empire qui ne veut pas mourir. Une histoire de la Françafrique, Seuil, Paris, 2021 (voir ma recension : François Gèze, « Une somme incontournable sur la construction de la Françafrique », Histoire coloniale et postcoloniale, 28 janvier 2022)

    [2] Voir notamment Hocine Malti, Histoire secrète du pétrole algérien, La Découverte, Paris, 2010.

    Source

    #Afrique #Colonialisme #Union_Européenne #UE #Algérie #Françafrique

  • Tebboune :  » Le dossier de la Mémoire ne sera point occulté « 

    Tags : Algérie, France, mémoire, colonisation, Guerre d’Algérie,

    L’Algérie traite avec la France d’égal à égal, sans renoncer au dossier de la Mémoire, ni oublier ce qu’avait commis la France coloniale à l’encontre du peuple algérien, a affirmé le président de la République, Abdelmadjid Tebboune.

    Dans son entrevue périodique avec des représentants des médias nationaux, diffusée jeudi soir sur les chaînes de télévision et stations de radio nationales, le président Tebboune a évoqué les relations algéro-françaises, soulignant que le « dossier de la Mémoire ne sera point occulté ». Il a, cependant, rappelé que les autres aspects de ces relations étaient « positifs », d’autant que « plus de 5 millions d’Algériens vivent en France », ajoutant qu’ « il ne les abandonnera pas ». « Nous faisons en sorte d’entretenir la relation solide qui les lie à leur mère-patrie », a-t-il ajouté.

    Du point de vue stratégique, le président Tebboune a affirmé que l’Algérie, puissance africaine, et la France, puissance européenne, sont appelées à travailler de concert pour consolider leurs relations. « Cela ne veut pas dire que l’on oublie les massacres, ni les enfumades perpétrés par la France contre le peuple algérien durant la période coloniale », a-t-il poursuivi.

    L’occasion était pour le chef de l’Etat de préciser que la coopération sécuritaire, qui lie les deux Etats au plus haut niveau, a franchi « un grand pas ».

    L’évocation de ces relations bilatérales ne doit plus se limiter au « cadre restreint de la question des visas », a souligné le président Tebboune. L’attention, qui doit être accordée à l’histoire de la mémoire collective, est une nécessité  » incontournable car elle est liée à la démarche spécifique de la poursuite et la préservation du Message de Novembre 1954 et des fondements de la République, visant à débarrasser le passé des facteurs de déformation, d’altération et de falsification introduits par les historiens de l’école coloniale et les nostalgique de  » l’Algérie française « . D’où cette nécessité impérieuse de la préservation de la mémoire nationale en tant que reconnaissance aux artisans de l’Histoire de la Nation, la protection du patrimoine historique et culturel relatif à la résistance populaire, au mouvement national et à la glorieuse Révolution de Novembre 1954.

    Au mois de novembre dernier, le général d’Armée, Saïd Chengriha, Chef d’état-major de l’ANP lors de l’allocution qu’il a prononcée à l’ouverture des travaux du colloque intitulé :  » L’information et la préservation de la Mémoire ; engagement de la responsabilité pour la consolidation de la défense nationale « , qui a coïncidé avec les festivités commémoratives du 6Oe anniversaire du recouvrement de l’indépendance nationale et du 68e anniversaire du déclenchement de la glorieuse Révolution de libération nationale, ayant connu l’organisation d’un grand défilé militaire et du 31e Sommet de la Ligue tenue à Alger, le 1er novembre 2O22, a souligné qu’  » inspiré par cette glorieuse histoire.

     » Inspiré par cette glorieuse histoire, à l’ère de l’Algérie nouvelle, dont les contours ont été tracés par le président de la République, Chef Suprême des Forces armées, ministre de la Défense nationale, notre pays a marqué cette soixantième année d’indépendance par l’organisation d’un important défilé militaire. Tout comme il a remémoré la symbolique du lieu et de la date, en abritant à l’occasion de la célébration du 68e anniversaire du déclenchement de la glorieuse Révolution de Libération, un grand événement arabe, à savoir les travaux du 31e Sommet de la Ligue Arabe, un Sommet mémorable à plus d’un titre, aussi bien sur le plan de la représentativité que sur le plan des décisions historiques qu’il a adoptées, reflétant ainsi notre attachement indéfectible à notre illustre histoire », a-t-il souligné.

    Il a rappelé, à ce propos, que l’un des plus grands défis auxquels l’Algérie fait face aujourd’hui, « se rapporte aux tentatives visant à briser l’attachement de notre peuple à sa mémoire et l’amener à rompre avec les principes et les valeurs que ses aînés ont portés et défendus avec tout ce qu’ils avaient de plus cher », ajoute le communiqué.

    Il a souligné que l’Algérie est « parfaitement consciente et œuvre à combattre cette pensée toxique et à annihiler son effet en accordant une importance majeure au dossier de la mémoire en tant que pilier intrinsèque de l’édification de l’Algérie nouvelle, notamment à travers l’ensemble des décisions qui témoignent de nos valeurs authentiques et de notre attachement à notre identité et notre illustre histoire », poursuit la même source.

    « Notre pays en est parfaitement conscient et œuvre à combattre cette pensée toxique et à annihiler son effet », a précisé le général d’Armée, relevant dans ce contexte, que « le président de la République, Chef suprême des Forces armées, ministre de la Défense nationale accorde une importance majeure au dossier de la mémoire en tant que pilier intrinsèque de l’édification de l’Algérie nouvelle, notamment à l’aune des intentions malsaines ciblant la mémoire nationale de la Nation algérienne ».

    Dans ce sens, a-t-il indiqué « le président de la République, réitère, à chaque occasion, le devoir de la préserver et de lui accorder l’attention et l’intérêt qui lui sont dus, à l’image des efforts visant à rapatrier les dépouilles des Chouhada des résistances populaires du Musée de l’Homme de Paris et les enterrer dans la terre pour laquelle ils se sont tombés en martyrs, institutionnaliser le 08 Mai de chaque année Journée nationale de la Mémoire et décréter une minute de silence commémorant les Massacres du 17 octobre 1961 sans omettre le lancement de la chaîne E-dhakira, tout en accordant un intérêt particulier aux événements nationaux ». »Toutes ces actions reflètent la plus noble image de loyauté et de fidélité envers le sacrifice de millions de Chouhada et témoignent de nos valeurs authentiques et de notre attachement à notre identité ainsi que notre illustre histoire », a affirmé le Général d’Armée Chanegriha.

    De tout ce qui précède, l’heure est donc à l’extensification des efforts en vue de recouvrer et d’éditer l’ensemble du patrimoine historique national, en mettant en exergue les hauts faits de la Révolution, les hommes illustres de cette grande histoire, afin de pérenniser leurs actes révolutionnaires, fixer leur biographie et les porter à la connaissance des générations montantes pour qu’elles s’en imprègnent et que ça leur serve de modèle et de référence. L’approche méthodologique et thématique doit englober toutes les épisodes de cette histoire du peuple algérien, sans négliger aucune des étapes. Une telle approche globale permettra de mettre en valeur les faits mémorables et tirer les enseignements qui guident la nation dans la définition de ses attitudes présentes et futures. Il est important d’accorder une attention particulière à la résistance populaire et à la guerre de libération nationale qui était un long combat, qui a fait jaillir des potentialités populaires grandioses et marqué l’histoire par des actes d’héroïsme, autant d’épopées qu’il est nécessaire de mettre en page et dont il faut souligner la grande dimension. Les générations futures pourront s’en inspirer de ce qui demeure une base indispensable à la bataille du renouveau national.

    B. C.

    Lemaghrebdz.com

    #Algérie #France #Colonisation #Mémoire

  • Algérie. 11 décembre 1960 : un acte fondateur

    Algérie. 11 décembre 1960 : un acte fondateur

    Tags : Algérie, 11 décembre 1960, manifestations, France, colonisation, mémoire, Guerre d’Algérie,

    L’Algérie célèbre aujourd’hui le 62e anniversaire des manifestations populaires du 11 décembre 1960. A cette date-là, les Algériens ont investi par dizaines de milliers les rues de la capitale et scandé leur amour de la liberté et promis de ne jamais abandonner la lutte armée, politique et sociale contre le colonialisme. Les cris des Algériens étaient on ne peut plus clairs : le combat jusqu’à la victoire finale.

    Le régime raciste et colonialiste de l’époque avait misé sur l’assèchement du soutien dont bénéficiait la révolution en dressant aux frontières est et ouest du pays, deux lignes de fils barbelés bourrées de mines anti-personnel. Les tristement célèbres lignes Charles et Maurice avaient pour fonction d’asphyxier l’ANL. Le colonisateur ne s’est pas contenté de cela. Il a institué des zones interdites où toute personne était abattue sans sommation. Il a fait usage du Napalm, arme interdite par les conventions internationales et l’a généralisée en Algérie. Et ce n’est pas fini. Il a fait du crime contre l’humanité qu’est la torture à grande échelle, un instrument de police légale. On torturait partout en Algérie. Dans les commissariats, dans les casernes, sur les lieux de combat. Des centres spéciaux ont été créés pour pratiquer cette activité immonde.

    Tout ce déploiement illégal au regard des règlements de l’Onu a été adopté à la seule fin de gagner la guerre contre le peuple algérien. La France coloniale voulait tout simplement couper les Algériens de leur aspiration à l’indépendance. Il en était parmi les politiques et les militaires colonialistes qui étaient prêts à tuer tous les Algériens jusqu’au dernier.

    Face à la politique de la terre brûlée, le 11 décembre 1960 a été une réponse claire et nette de l’attachement du peuple à sa révolution. Les sportifs, les artistes, les scientifiques et les écrivains, tous enfants du peuple, ont donné le meilleur d’eux-mêmes pour apporter leur contribution à la révolution, l’écho de cette symbiose entre l’élite politique, sportive et culturelle a retenti aux oreilles de l’humanité entière, un certain 11 décembre 1960.

    Au plan politique, les manifestations populaires du 11 décembre 1960 étaient une grande victoire politique pour le FLN et une défaite cuisante pour le gouvernement français, certes, mais pour l’histoire cette date est l’un des grands moments fondateurs de la nation algérienne.

    Ce que retient l’Histoire de ce glorieux épisode de la révolution, c’est que les manifestations populaires du 11 décembre 1960 étaient une grande victoire politique pour le FLN et une défaite cuisante pour le gouvernement français. Mais bien plus qu’un succès politique, cette date est l’un des grands moments fondateurs de la nation algérienne.

    Par Nabil G.

    Ouest Tribune, 11/12/2022

    #Algérie #France #Colonisation #Mémoire #11septembre1960

  • Les Algériens se détournent de la langue française

    Les Algériens se détournent de la langue française

    Les Algériens se détournent de la langue française – Héritage colonial, mémoire, crimes coloniaux, Guerre d’Algérie,

    L’héritage colonial de la France
    Les Algériens se détournent du français
    Un nombre croissant de ministères du gouvernement algérien annoncent qu’ils abandonneront le français à l’avenir. Ils réagissent peut-être à l’humeur de la population, mais cette décision est également délibérée.

    La ministre algérienne de la culture, Wafaa Chaalal, est à la télévision, à la recherche de mots. La conversation est en arabe – et ce n’est un secret pour personne que les Algériens passent souvent au français, ou du moins intègrent tellement de vocabulaire français qu’il chevauche rapidement l’arabe. La présentatrice égyptienne interroge la ministre sur la forte influence du français dans son pays d’origine. Avec un sourire amical, elle poursuit qu’elle connaît beaucoup d’Algériens qui parlent plus le français que l’arabe.

    Le ministre attribue cela à la forte influence française dans l’éducation. Puis elle ajoute : « On pense en français et on parle arabe. C’est pour ça que certains mots ne nous viennent pas si vite. » La présentatrice ne comprend pas très bien, et tente de la corriger : « Tu penses en arabe et tu parles en français. » Non, l’inverse, répond le ministre de la culture. La présentatrice semble avoir du mal à la croire. Sa question suivante, sur la différence entre la pensée française et la pensée arabe, doit être abandonnée. La question est trop sensible pour Chalaal.

    L’interview a déclenché un flot de commentaires sur les réseaux sociaux. De nombreux Algériens ont déclaré que Chaalal ne parlait qu’au nom de l’élite francophone, qui se répartit les postes gouvernementaux de prune entre eux, plutôt qu’au nom du peuple algérien, qui parle arabe. Un commentaire affirmait que « quand ils veulent tuer l’identité d’un peuple, ils tuent d’abord la langue » ; un autre a écrit que « leurs paroles sont vraies, tous les fonctionnaires sont francisés; mais nous n’acceptons pas la vérité, nous vivons comme des autruches qui s’enfouissent la tête dans le sable ».

    De plus en plus, l’état d’esprit qui prévaut au sein de la population est reconnu par les politiciens : ces derniers mois, plusieurs ministères ont banni le français – la langue de l’ancienne puissance coloniale – de la correspondance officielle. En octobre dernier, le ministère de la jeunesse et des sports, le ministère de la formation professionnelle et le ministère du travail, de l’emploi et de la sécurité sociale ont rendu l’arabe obligatoire à la place. Début avril, le ministère de la culture, désormais dirigé par Soraya Mouloudji, a emboîté le pas. De tels développements doivent également être considérés dans le contexte de la querelle diplomatique entre Alger et Paris l’automne dernier. Du moins, officiellement.

    Emmanuel Macron a demandé si l’Algérie avait déjà été une nation avant l’époque coloniale
    À l’époque, les déclarations du président français Emmanuel Macron dans Le Monde ont provoqué une crise diplomatique entre les deux États. Macron a accusé le « système politico-militaire » algérien de toujours utiliser le colonialisme pour excuser ses propres échecs. « Depuis 1962, la nation algérienne se nourrit d’une mémoire qui dit que la France est le problème », a déclaré Macron dans le journal français. De plus – et cela provoqua un tollé à Alger – il se demanda si l’Algérie avait jamais été une nation avant l’ère coloniale.

    Les troupes françaises ont occupé l’Algérie dès 1830 et ont déclaré le pays d’Afrique du Nord une province française. Un massacre de dizaines de milliers d’Algériens à Sétif commis par les troupes coloniales françaises en mai 1945 a conduit au renforcement du mouvement indépendantiste algérien. En 1954, sous la direction du FLN (Front de Libération Nationale), la soi-disant guerre d’Algérie contre la puissance coloniale française a commencé, qui a abouti à l’indépendance du pays en 1962. La lutte pour la libération a été brutalement réprimée par les troupes françaises et des centaines de milliers d’Algériens ont été tués.

    En conséquence, le gouvernement d’Alger a rappelé son ambassadeur à l’automne dernier et a suspendu les droits de survol des avions militaires français au-dessus du Sahel. Macron a fait savoir peu après – par l’intermédiaire d’un conseiller – qu’il regrettait la « polémique » et les « malentendus ». Début décembre dernier, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, s’est rendu en Algérie. Au bout de trois mois, la crise diplomatique était terminée. Mais pas un seul représentant officiel du gouvernement algérien n’a pris part à la commémoration du 60e anniversaire du cessez-le-feu dans la guerre d’Algérie qui s’est tenue fin mars. Macron a appelé à une nouvelle réconciliation entre la France et l’ancienne colonie française.

    Mais les déclarations controversées de Macron à Alger ne sont pas oubliées, estime le politologue algérien Zine Labidine Ghebouli. Le jeune homme de 26 ans étudie les relations euro-méditerranéennes à l’Université de Glasgow. « Les propos de Macron ont alimenté une ancienne rivalité linguistique et socioculturelle et conduit à un scepticisme post-colonial accru », dit-il. Mais il décrit la décision de la nouvelle ministre de la Culture principalement comme une « bataille traditionnelle de son camp conservateur contre l’élite culturelle francophone » et une « stratégie de relations publiques pour capitaliser sur les propos de Macron pour gagner en popularité ». L’Algérie connaît une profonde mutation sociale, après laquelle, estime Labidine, les Français ne bénéficieront plus des mêmes privilèges et du même statut d’élite.

    Les jeunes se détournent de la langue française

    Le sentiment anti-français a augmenté dans le pays au cours des trois dernières années, dit Labidine. Elle est également liée, dit-il, au mouvement de protestation Hirak, qui appelle à une réorganisation complète du système politique qui existe en Algérie depuis l’indépendance. Au cours des trois dernières années, le mouvement a su mobiliser des centaines de milliers de manifestants – pour d’abord renverser le président de longue date Abdelaziz Bouteflika, puis pour lutter contre le réseau politique des militaires, des services secrets et des magnats de l’industrie encore au pouvoir aujourd’hui.

    Le président Abdelmadjid Tebboune, élu fin 2019, est perçu par de nombreux Algériens comme un partisan de l’ancien système. Des slogans et des pancartes anti-français ont pu être entendus et vus à plusieurs reprises lors des manifestations – des slogans tels que « Partout où il y a la France, la destruction vient » ou « Macron, va, tu n’es pas le bienvenu au pays des martyrs ».

    Lors des manifestations, les manifestants ont à plusieurs reprises établi des parallèles entre leurs revendications et la lutte anticoloniale, raconte Andrew Farrand. L’auteur de « Le rêve algérien : la jeunesse et la quête de la dignité », paru en 2021, ajoute que la jeune génération, notamment, s’éloigne de plus en plus de la langue française. Près des deux tiers de la population algérienne ont moins de 35 ans. Farrand a vécu en Algérie de 2013 à 2020 pour voir ce qui fait vibrer « la prochaine génération du géant endormi de l’Afrique du Nord », comme il l’écrit dans son livre. L’Algérie est le plus grand pays d’Afrique par sa superficie. Bien qu’il existe des différences significatives selon la région et la classe, dit Farrand, de nombreux jeunes Algériens se sentent aujourd’hui moins à l’aise d’utiliser le français que leurs parents ou grands-parents.

    Les entrepreneurs algériens se plaignent souvent de ne pas trouver de jeunes employés capables d’écrire ou de parler correctement le français, nous dit Farrand. De plus, « Les jeunes grandissent dans un monde en ligne. L’anglais a pris un nouveau sens et le français ressent vraiment la chaleur pour la première fois. » Cette tendance est également évidente dans d’autres domaines. Lorsque le principal journal francophone Liberté a cessé de paraître la semaine dernière après trente ans, seule une petite minorité francophone a pleuré sa perte.

    Les seuls jeunes Algériens exemptés de cette évolution sont ceux qui flirtent avec l’idée d’émigrer en France. Malgré le fait qu’ils sont de plus en plus nombreux à être conscients que la vie peut être difficile pour les migrants algériens en France. Surtout avec la montée de l’extrême droite. Bien que Marine Le Pen ait une fois de plus échoué aux urnes, elle a recueilli plus de soutien populaire que jamais.

    Dunja Ramadhan

    © Suddeutsche Zeitung

    Qantara.de, 25/04/ 2022

    #Algérie #France #Mémoire #Colonisation #Guerredalgérie #Langue_française

  • Macron a une opportunité historique de régler des dossiers sensibles avec l’Algérie

    Macron a une opportunité historique de régler des dossiers sensibles avec l’Algérie

    Macron a une opportunité historique de régler des dossiers sensibles avec l’Algérie – Mémoire, essais nucléaires, Guerre d’Algérie

    Mohamed Meslem

    Le président français Emmanuel Macron a remporté le second tour des élections présidentielles françaises, en battant sa rivale d’extrême droite, Marine Le Pen, par une marge confortable, réalisant un deuxième mandat, en tant que deuxième président à réaliser cet exploit depuis l’ancien président Jacques Chirac en 2002.
    Macron a remporté une nette victoire sur son adversaire d’extrême droite avec 58 % du total des suffrages exprimés, pour la deuxième fois consécutive, contre environ 42 % pour son rival, le candidat du « Parti républicain », sachant que les deux candidats s’étaient déjà affrontés il y a cinq ans, et Le Pen a perdu la course.
    Le second mandat est le dernier pour Macron à l’Elysée, selon les exigences de la loi électorale française, ce qui signifie que l’ancien cadre de la « Banque Rothschild » s’est davantage affranchi des contraintes des comptes pour préserver son avenir politique, qui en 2027 deviendra son successeur.

    Depuis que le détenu de l’Elysée a annoncé sa candidature à un second mandat, aucune déclaration n’a été publiée par la partie algérienne exprimant son intention de soutenir l’un des candidats. L’Algérie s’est plutôt distanciée de se présenter aux élections avant le premier tour, et cela s’est manifesté par ses réserves à recevoir le Premier ministre français, Jean Castex, pour ne compter sur aucun des candidats à l’Elysée, mais sur les résultats des première étape de la course a décidé, bien qu’implicitement, la position algérienne, en faisant obstacle au candidat d’extrême droite, dans l’intérêt de Macron.

    Cette position a été démontrée par l’appel du doyen de la mosquée de Paris, Shams El-Din Hafeez, à ne pas rester neutre et à voter en faveur de Macron, un appel qui n’est pas sorti de nulle part puisqu’il a été annoncé deux jours seulement après la visite du ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, en Algérie, ainsi qu’un autre indice, qui est que la Mosquée de Paris est affiliée à l’Algérie dans le financement et dans la nomination de son doyen, ce qui responsabilise ses positions d’une manière ou d’une autre à l’Etat algérien.

    Après que Macron a remporté le second mandat, la question sur les lèvres de beaucoup en Algérie est devenue : le président réélu osera-t-il prendre des mesures audacieuses et ouvrir des dossiers sensibles qu’il n’a pas pu ouvrir lors du premier mandat, concernant des questions qui concernent l’Algérie ? ? Ou va-t-il continuer son slogan pour les cinq prochaines années ?
    L’ancien diplomate, Mustapha Zaghlache, estime que la continuité sera le mot d’ordre du président réélu dans son second mandat : ​​« Macron est connu pour avoir été soutenu par certains milieux financiers lors des élections de 2017 comme lors des dernières élections. Je pense qu’il a une marge de manœuvre régie par les lignes tracées par ces cercles pour lui.

    Quant aux relations algéro-françaises, Zaghlache a déclaré, dans une déclaration à Echorouk, que les relations bilatérales sont régies par la continuité en vertu des liens historiques, sociaux, économiques et commerciaux. L’Algérie ne peut pas abandonner ces relations, ni Paris ne peut ignorer ces liens.
    S’agissant de la question de la mémoire, ajoute l’oratrice, il est possible de revenir sur le rapport préparé par l’historien Benjamin Stora, à la demande de la présidence française, alors qu’il parle de résoudre progressivement les arcanes de cet épineux dossier.

    Zaghlache dit : « Je pense que la partie algérienne est consciente de la sensibilité du dossier de la mémoire ramifiée à d’autres dossiers, à savoir les archives, les restes des martyrs et les répercussions des explosions nucléaires… Cependant, la réélection de Macron contribuer à avancer sur cette voie, ce qui est dans l’intérêt de la stabilité des relations bilatérales qui étaient fortement tendues.

    Malgré cela, l’ancien diplomate ne voit pas beaucoup d’avancées dans le domaine de la mémoire, car les positions françaises sur ce dossier ne peuvent franchir certaines lignes, quel que soit le parcours du nouveau président, qu’il soit de gauche, de droite ou d’une autre sensibilité politique.

    Macron, dit Zaghlache, est condamné à travailler pour son parti « La France en avant » pour obtenir une nouvelle victoire aux élections législatives de juin prochain, afin qu’il puisse travailler avec un grand confort loin des pressions de l’extrême droite, et cela nécessite de prendre des positions. qui préservent ses intérêts politiques.

    Une autre question qui reste sujette à anticipation dans la position française est la question sahraouie, et ici l’ancien diplomate s’attend à ce que la continuité prévale, mais l’Algérie insiste pour que la position française soit favorable à la légitimité internationale représentée dans l’autodétermination du peuple sahraoui, dans la réunions du Conseil de sécurité de l’ONU, et contribuer à la décolonisation du territoire pour ne pas perdre la face avec un pays de la taille de l’Algérie.

    Echourouk Online, 26/04/2022

    #Algérie #France #Mémoire #Guerredalgérie #Essais_nucléaires



  • France: L’anti-impérialisme de Sartre est encore trop radical

    France: L’anti-impérialisme de Sartre est encore trop radical

    France: L’anti-impérialisme de Sartre est encore trop radical – crimes de l’empire, Frantz Fanon, colonialisme, Algérie, Vietnam,

    UNE ENTREVUE AVEC OLIVIER GLOAG

    L’opposition sans concession de Jean-Paul Sartre aux crimes de l’empire en fait une figure taboue de la culture française. Le courant politique français est toujours dans le déni de l’histoire sanglante du colonialisme.

    Le philosophe français Jean-Paul Sartre était l’un des penseurs les plus influents du siècle dernier. Sa mort, en 1980, a laissé de nombreuses personnes en France et dans le monde entier se sentir privées de direction politique.

    L’une des principales questions éthiques et politiques qu’il a abordées dans son travail était la relation coloniale entre les pays occidentaux et les pays du Sud. De la guerre brutale de son propre pays en Algérie à l’invasion américaine du Vietnam, Sartre s’est prononcé avec acharnement contre les crimes de l’empire.

    Oliver Gloag enseigne le français et les études francophones à l’Université de Caroline du Nord et est l’auteur d’ Albert Camus : une très courte introduction . Ceci est une transcription éditée du podcast Long Reads de Jacobin . Vous pouvez écouter l’épisode ici .

    DF- Quand Sartre a-t-il commencé à s’intéresser à la question des colonies françaises et quelles ont été ses premières interventions publiques à ce sujet ?

    OG- La première réaction publique à la guerre coloniale de la France en Indochine est survenue en décembre 1946, après le début de la guerre. C’était un éditorial du Temps modernes . Sartre était le directeur de cette publication, mais l’éditorial n’était pas signé. Il a fait une comparaison entre le rôle de l’armée française en Indochine et le rôle de l’armée allemande en France. C’était une condamnation absolue de l’intervention de la France et une attaque contre son hypocrisie.

    Même si Sartre n’a pas écrit l’éditorial, il a été pointé du doigt par François Mauriac, une figure très importante de la littérature et des milieux intellectuels français, qui était une sorte d’auteur anticolonialiste de droite. Mauriac est extrêmement choqué par la comparaison entre la France et l’armée d’occupation allemande.

    Sartre a répondu avec Maurice Merleau-Ponty dans un autre éditorial, intitulé « SOS Indochine ». Ils prennent position, anticipant l’argument qu’Aimé Césaire fera plus tard dans son Discours sur le colonialisme en refusant de hiérarchiser les massacres et les occupations. Ils ont insisté sur le fait qu’il était légitime de comparer ce que les puissances coloniales ont fait aux peuples et aux pays colonisés avec ce que l’Allemagne a fait en Europe, lorsqu’elle a de facto colonisé la France.

    La première intervention publique en son nom propre intervient au début des années 1950, avec l’affaire Henri Martin. Martin était un marin de la marine française qui avait cru aux affirmations du gouvernement selon lesquelles la guerre en Indochine était une guerre contre l’impérialisme japonais, puis avait découvert que ce n’était pas le cas. À son retour en France, il devient un militant anti-guerre et est arrêté et emprisonné pendant cinq ans.

    Sartre a signé une pétition contre l’emprisonnement d’Henri Martin avec des intellectuels et des membres du Parti communiste français. Finalement, Martin a été libéré sous la pression populaire, en 1953. Il y avait un livre publié cette année-là avec un résumé de Sartre, où il a attaqué l’entreprise coloniale et le système judiciaire français. Je dirais que c’était son premier engagement public à l’égard de l’anticolonialisme

    DF – Quel rapport Sartre a-t-il eu avec le mouvement de la négritude et des personnalités comme Aimé Césaire et le Sénégalais Léopold Senghor ?

    OG- Cela a commencé en 1947, avec une publication intitulée African Presence , qui est devenue la voix principale de la négritude . Dans sa présentation, Sartre a pris à partie l’hypocrisie des Français métropolitains qui se considéraient comme tolérants et compréhensifs parce qu’ils socialisaient avec des hommes noirs dans la métropole. Mais qu’en est-il de ceux des colonies ? Sartre a demandé rhétoriquement. Qu’en est-il de l’exploitation et de la misère là-bas ?

    Il s’est concentré sur l’oppression concrète. Il a parlé des salaires, du prix du boeuf, de la richesse que ces colonies généraient pour la métropole. Il était attentif aux conditions de vie.

    Sartre a déclaré qu’il ne suffirait pas d’accepter simplement quelques Noirs en France métropolitaine dans le cadre d’une tentative de réprimer ou de nier l’oppression et l’exploitation économiques en cours des hommes et des femmes africains dans les colonies. Il a également souligné le fait que le racisme n’était pas le seul aspect du colonialisme : il y avait aussi la classe. C’est devenu un problème théorique important pour Sartre : lequel est venu en premier ?

    Sartre a souligné que les auteurs comme lui ne devraient pas être condescendants en regardant cette poésie naissante. Il ne s’agissait pas d’être à la hauteur de la culture française mais plutôt de tourner la langue française dans des directions différentes, d’injecter du sang révolutionnaire et politique dans cette langue et de lui donner un nouveau sens. Dans African Presence , le romancier Richard Wright était également en tête de mât, il faisait donc le lien entre les Afro-Américains et les auteurs africains francophones. Sartre a contribué au lancement de ce projet et lui a prêté son prestige.

    L’autre grande intervention fut sa préface à l’anthologie de la poésie noire et malgache de Léopold Senghor. Ce fut un grand moment pour Sartre. A l’époque, les guerres de libération nationale n’avaient pas encore pris l’importance qu’elles auraient plus tard. Sartre était un nouveau venu en politique, écrivant dans un paysage où l’indépendance des colonies en Afrique était encore un espoir et pas encore une lutte armée en cours.

    Il a commencé l’essai en défiant l’attente condescendante d’exotisme du lecteur blanc lorsqu’il a ouvert le livre. Il a appelé de manière préventive leur surprise face aux poèmes et leur inconfort à la réalisation que le regard des Blancs était subverti. Ils étaient maintenant l’objet de regards noirs. Avec ce renversement, Sartre s’est moqué de la prise de conscience soudaine du lecteur blanc qu’ils possèdent une race, et qu’eux aussi peuvent être l’objet d’un regard.

    Je vais citer ce qu’il a dit ici : « Voici des hommes noirs debout, qui nous regardent, et j’espère que vous, comme moi, ressentirez le choc d’être vu. Depuis trois mille ans, l’homme blanc jouit du privilège de voir sans être vu. C’était le passage d’ouverture, qui était crucial et qui fondait la perspective de Sartre. Il ne regardait pas cela d’un point de vue paternaliste.

    La préface compare le statut des Européens dans le monde à celui des aristocrates français sous l’ancien régime. Il les qualifia d’ »Européens de droit divin » et annonça prophétiquement que le mouvement culturel de la négritude allait se développer en une force politique qui renverserait l’ancien ordre colonial, tout comme l’institution de la monarchie avait été renversée à travers l’Europe.

    Ce fut un moment crucial. Il a cité quarante-quatre passages de poèmes de personnalités telles que Senghor, Césaire et David Diop, et a donné un aperçu de ce contre quoi la négritude se battait. L’essai allait au-delà d’une description immédiate et d’une dénonciation du racisme. Elle a inscrit la race et le colonialisme dans l’histoire.

    La partie la plus controversée de la préface de Sartre était qu’elle décrivait également l’idée d’une dialectique où, d’une part, nous aurions un racisme blanc et un colonialisme blanc et, d’autre part, nous aurions un « racisme antiraciste ». Dans une troisième étape, les deux finiraient par s’annuler, et nous arriverions à une conscience de classe générale et à la phase ultime de libération universelle.

    On peut comparer cela à Aimé Césaire. Il a exposé cette dialectique, incorporant la violence noire libératrice dans un processus d’émancipation universelle, dans sa pièce de 1958 And the Dogs Were Silent , sur un descendant d’esclaves qui s’est rebellé contre l’autorité coloniale. La marque d’universalisme de Césaire était également présente dans ses travaux antérieurs. En fait, je pense que Césaire a joué le rôle d’intermédiaire entre Sartre et un autre interlocuteur important, Frantz Fanon, très influencé par la négritude.

    DF – Comment Sartre et ses associés ont-ils répondu à la lutte pour l’indépendance de l’Algérie qui a débuté en 1954 ?

    Cela a commencé par Le Temps modernes . La guerre d’indépendance du peuple algérien débute officiellement à l’automne 1954 et se termine à l’été 1962. Au printemps 1955, paraît un numéro spécial des Temps modernes sur l’Algérie. L’éditorial s’intitulait « L’Algérie n’est pas la France ». C’était une réprimande cinglante et une réplique aux paroles officielles des ministres du gouvernement français tels que François Mitterrand , le futur président, qui avait dit : « L’Algérie, c’est la France ».

    Sartre compare le statut des Européens dans le monde à celui des aristocrates français sous l’ancien régime.
    Tout au long de la guerre, Le Temps modernes devient un espace de voix en faveur de l’indépendance algérienne. Ce fut une fantastique chambre d’écho pour la lutte anticoloniale. Bien sûr, c’était censuré. Je pense que le journal a été saisi six fois au total.

    Il ouvrit ses colonnes à Aimé Césaire, qui prédit la mort des colonies dans un article très important. Il a protesté contre les exécutions. Sartre lui-même a écrit de nombreux éditoriaux et articles, ainsi qu’une préface pour le livre du journaliste Henri Alleg, La Question , sur l’usage systématique de la torture en Algérie.

    Son premier article en 1956 était intitulé « Le colonialisme est un système ». C’était à un moment important, alors que le gouvernement français poussait vraiment, avec le soutien du Parti communiste français, à la guerre contre l’Algérie. Dans cet article très célèbre, Sartre parlait des réalités spécifiques du colonialisme français.

    Il a donné des chiffres en termes de richesse et en termes de terres saisies par le gouvernement français aux Algériens. Il a raconté comment l’agriculture algérienne a été détruite, avec toute la culture du blé supprimée pour faire place à la production de vin. Bien sûr, les musulmans ne boivent pas, et tout cela était destiné à l’exportation.

    C’est aussi le moment de la rupture de Sartre avec le parti communiste. Il signe le « Manifeste des 121 », dans lequel 121 intellectuels et personnalités publiques soutiennent le refus des soldats français de servir en Algérie. Il souhaite explicitement la défaite de l’armée française. Certains journalistes qui ont signé cette pétition sont allés en prison pendant deux ou trois semaines, et beaucoup d’universitaires et d’employés de l’État qui l’ont signée ont été rétrogradés.

    Sartre a écrit un certain nombre d’articles qui reliaient les impératifs économiques derrière le projet colonial. Sa rhétorique n’arrêtait pas de s’intensifier à mesure que l’intensité des combats augmentait. Il a pris à partie l’hypocrisie française dans des passages très célèbres. Dans l’une d’elles, il disait : « Nous, Français, devons faire face à ce spectacle inattendu, le strip-tease de notre humanisme. La voici complètement nue et pas belle. Ce n’était qu’une idéologie illusoire. L’exquise justification du pillage, sa tendresse et son affection, sanctionnaient nos actes d’agression.

    Il s’est adressé à des gens qui ne voulaient pas choisir leur camp et leur a dit : « Vous savez très bien que nous sommes les exploiteurs, vous savez très bien que nous avons pris l’or, les métaux et le pétrole des pays, non sans d’excellents résultats — palais, cathédrales, capitales industrielles. Et puis chaque fois que la crise menaçait, les marchés coloniaux étaient le coussin.

    Cet engagement a culminé lorsqu’il s’est défini comme un « porteur de valises ». Il existait un réseau souterrain de citoyens français, connus sous le nom de porteurs de valises, qui travaillaient avec le Front de libération nationale , les aidant à transporter des armes, des fonds et des communications. Sartre a défié le gouvernement français de l’arrêter. Il a également été témoin dans de nombreux procès, défendant ces porteurs de valises.

    Sartre a participé à de nombreuses manifestations, comme celles qui ont suivi le massacre de Paris en octobre 1961. Il a été présent publiquement de manière très agressive. C’était au grand risque pour sa vie. Il a été la cible de deux tentatives d’assassinat, mais il a continué. Cette période a beaucoup influencé ses écrits : sa Critique de la raison dialectique a été rédigée pendant la guerre d’indépendance algérienne.

    DF- Dans ce contexte plus large, quelle était la relation entre Sartre et Frantz Fanon , dont l’œuvre propre était indissociable de la lutte pour l’indépendance algérienne ?

    OG- Le rapprochement entre Sartre et Fanon peut sembler un peu délicat, car Fanon a critiqué l’essai de Sartre sur la négritude, Black Orpheus , dans son premier livre, Black Skins, White Masks . Il a critiqué l’inclusion de la négritude par Sartre dans une dialectique universelle comme une étape négative qui allait être transcendée. Ce faisant, selon Fanon, Sartre avait relégué l’expérience d’être noir dans de nombreuses colonies françaises à un statut destiné à céder rapidement la place à un autre. Il a dit que le schéma hégélien de Sartre ignorait ou effaçait l’expérience et l’individualité au profit de l’universel.

    Cependant, même dans sa critique d’ Orphée noir , Fanon ne ferme pas complètement la porte à un avenir universel. Il a finalement partagé l’objectif de Sartre. Il y a une citation célèbre à la fin de Black Skin, White Masks : « Le soldat estropié du Pacifique dit à mon frère : ‘Habitue-toi à ta couleur comme je m’habitue à mon moignon — nous sommes tous les deux des victimes’ », a déclaré Fanon. , « De tout mon être, je refuse d’accepter cette amputation. Je sens mon âme aussi vaste que le monde, vraiment une âme aussi profonde que le plus profond des fleuves. Ma poitrine a le pouvoir de se dilater à l’infini.

    Je pense que Sartre et Fanon ont finalement partagé plus que le but final de l’universalisme. Ils étaient tous les deux préoccupés par la façon de transformer les griefs empiriques en une lutte mondiale, et leur dialogue portait sur la meilleure façon de s’y prendre. Si l’on regarde Les Misérables de la Terre , le grand traité de Fanon sur les conséquences du colonialisme et comment le combattre, il écrivait qu’il n’était pas question pour le colonisé de concurrencer le colon : ils voulaient prendre sa place.

    Il a décrit le colonialisme comme une violence nue et a déclaré que la réponse à cela était une plus grande violence – la violence avait une sorte de valeur thérapeutique. Pour Fanon, en effet, la contre-violence du colonisé était rédemptrice. En fin de compte, la violence a créé la reconnaissance de l’ancien esclave en tant qu’être humain, et cela est né de la peur du maître.

    Ce n’était pas un appel insensé à l’abattage, mais plutôt une refonte de la dialectique maître-esclave, l’ancien esclave cherchant à être reconnu par la résistance armée. C’était un approfondissement et une complication de la deuxième étape de Sartre dans Black Orpheus .

    Sartre en a été influencé et l’a synthétisé par une formulation provocatrice dans sa préface aux Misérables de la Terre , où il a dit qu’abattre un Européen faisait d’une pierre deux coups : faire d’une pierre deux coups : faire disparaître à la fois un oppresseur et un opprimé. Ce qui restait était un homme mort et un homme libre. Le survivant, pour la première fois, sentit un sol national sous ses pieds.

    Bien sûr, les gens ont violemment critiqué Sartre pour cela. Je pense que la controverse s’articule autour d’une distinction entre la force et la violence : dans cette compréhension, la force est quelque chose que l’État a le droit d’utiliser, tandis que la violence est par définition illégale et laissée à la classe inférieure ou aux colonisés.

    En fin de compte, Sartre a été profondément influencé par Fanon et a cessé de parler d’universalisme et l’a critiqué à la place. Il s’est retiré de l’accent mis sur l’universalisme et s’est concentré sur la lutte identitaire liée à ce système colonial. Ce fut un grand échange d’influence entre les deux, tout en luttant pour un universalisme subversif, plutôt que l’universalisme du colonialisme et de l’État français.

    DF- Qu’ont dit Sartre et Les Temps modernes de la guerre américaine au Vietnam telle qu’elle s’est progressivement intensifiée au cours des années 1960 ?

    OG- Le Temps modernes est devenu, comme pour l’Algérie, un espace où les intellectuels écrivaient contre la guerre du Vietnam et lançaient des idées comme le Tribunal Russell, un lieu où d’anciens soldats américains pouvaient témoigner des horreurs de la guerre. Des dirigeants et des militants qui ont suivi Ho Chi Minh y ont également publié des articles. Le Temps modernes a poursuivi cette mission courageuse d’être le lieu de contestation intellectuelle de la guerre du Vietnam comme aucun autre espace de la presse française.

    Pour Sartre, il y a eu un durcissement de sa position. À l’époque de la résolution sur le golfe du Tonkin au Congrès américain, Sartre était censé se rendre à une conférence à Cornell et parler de son livre sur Gustave Flaubert. Mais Sartre a alors déclaré qu’il n’y avait plus aucune possibilité de dialogue et a refusé d’aller aux États-Unis. Il a annulé la conférence prévue juste au moment où les États-Unis intensifiaient leurs bombardements sur le Vietnam. Ce fut un moment crucial, et il a généré une énorme polémique.

    Puis, en 1965, dans une série intitulée « Un plaidoyer pour les intellectuels », Sartre a défini le rôle d’un intellectuel comme quelqu’un qui n’était pas seulement un spécialiste dans son propre domaine mais qui était prêt à risquer sa position de spécialiste et à aller dans d’autres domaines, prendre position sur des questions politiques qui ne correspondaient pas au statu quo. Il défiait ce qu’il appelait les intellectuels organiques, des intellectuels qui étaient là pour défendre les intérêts de leur classe sociale. Il a qualifié ces spécialistes de « faux intellectuels ». Le romancier Paul Nizan les appelait « les chiens de garde du système ».

    L’exemple que Sartre a donné était l’intellectuel pacifiste incarné par Albert Camus . Il l’a paraphrasé en disant : « Nos méthodes coloniales ne sont pas ce qu’elles devraient être, il y a trop d’inégalités dans nos territoires d’outre-mer, mais je suis contre toute violence ». C’était, pour Sartre, une approbation de la violence ultime, la violence infligée aux colonisés par leurs gouvernants — exploitation, chômage, malnutrition.

    Pour Sartre, un véritable intellectuel était quelqu’un qui n’était ni moraliste ni idéaliste, et qui allait prendre position sur l’attaque américaine contre le Vietnam. Cela, pour lui, était le test décisif. C’était la définition de Sartre d’un intellectuel :

    Il sait que la seule véritable paix au Vietnam coûtera du sang et des larmes. Il sait que cela commence par le retrait des troupes américaines et la fin des bombardements, donc par la défaite des USA. En d’autres termes, la nature de ses contradictions l’oblige à s’engager et à s’impliquer dans tous les conflits de notre temps, car ils sont tous — conflits de classe, de nationalisme ou de race — des conséquences particulières de l’oppression des défavorisés par les dominants. classe.

    À ce moment-là, pour Sartre, tout d’un coup, la guerre du Vietnam était tout. C’était le combat ultime. Le Tribunal Russell a été organisé pour répondre à la question de savoir si les États-Unis étaient engagés dans une activité génocidaire au Vietnam – une question posée par Lord Bertrand Russell. Il devait se tenir à Paris, mais Charles de Gaulle, le légitimant paradoxalement, a dit qu’on ne pouvait pas avoir ce tribunal en France. Ce n’était pas valable, a-t-il insisté, car la justice est inséparable de l’État. Ils l’avaient en Suède et au Danemark à la place.

    Il y avait toutes sortes de témoins – des Vietnamiens, des soldats américains et des officiels. Cela a pris environ un an. L’accusation de génocide était basée sur la définition des Nations Unies de 1948, qui nécessite essentiellement une preuve d’intention uniquement. C’était une accusation large, avec une norme inférieure à celle de prouver qu’un génocide avait eu lieu. Bien sûr, beaucoup d’allégations de massacres se sont avérées plus tard vraies, avec des cas comme My Lai, où des villages entiers ont été massacrés par des soldats américains, ainsi que les attentats à la bombe autorisés par des politiciens américains comme Henry Kissinger .

    Le verdict de Sartre est sorti sous la forme d’un livre intitulé Sur le génocide . Ce fut aussi un énorme scandale. Son résumé de clôture était crucial. Il a déclaré: «Nous devons faire preuve de solidarité avec le peuple vietnamien parce que son combat est le nôtre, parce que c’est le combat contre l’hégémonie américaine – le Vietnam se bat pour nous – le groupe que les États-Unis veulent intimider et terroriser par le biais de la nation vietnamienne est la race humaine dans son ensemble.

    DF- Les Temps modernes ont publié un numéro spécial célèbre et célèbre après la guerre des Six jours entre Israël et les États arabes en 1967. Quelle était la signification de cela pour le débat sur Israël en France et à l’extérieur également ?

    OG- Pour répondre à cette question, nous devons revenir un peu en arrière sur l’influence de l’occupation allemande de la France et de l’Holocauste sur le développement intellectuel de Sartre. Son premier grand texte sur une forme de racisme est Antisémite et Juif , paru en 1946. Sartre a toujours vu en Israël un lieu de refuge pour le peuple juif, qui avait été opprimé, attaqué et tué à une si grande échelle. , même après le soutien israélien à l’invasion de l’Égypte par la Grande-Bretagne et la France en 1956, qu’il a condamnée. Parallèlement, il s’est engagé dans la lutte contre le colonialisme dans le monde arabe, non seulement en Algérie mais aussi au Maroc et en Tunisie.

    À un moment donné au milieu des années 1960, Sartre a déclaré dans une interview pour un journal égyptien qu’il était déchiré entre des amitiés opposées. Ce sentiment d’être complètement déchiré a été en partie l’impulsion pour créer ce numéro du Temps modernes – environ mille pages. Il a été largement divisé en deux parties, avec des intellectuels israéliens et des intellectuels arabes qui ont discuté de la question de la Palestine et d’Israël. L’idée était d’essayer de favoriser le dialogue entre Arabes et Israéliens.

    Pour se préparer à l’émission, Sartre fait le tour de la région. En Egypte, il rencontre Gamal Abdel Nasser. Il est allé au Liban, en Syrie et en Israël. Il est allé dans des camps de réfugiés palestiniens. Ce fut pour lui une période très difficile en Israël : il refusa de rencontrer des militaires ou des partis politiques de droite, mais il rencontra la presse et la gauche israélienne.

    En fin de compte, la position de Sartre était de soutenir l’existence de l’État d’Israël, mais il voulait aussi un État légitime et une souveraineté pour la Palestine. Cela a enragé les deux côtés et l’a mis dans une position très difficile, même au sein de son propre groupe d’amis. Claude Lanzmann, qui était très proche de Simone de Beauvoir et qui publia alors ses travaux dans Le Temps modernes , partit au milieu du voyage, tant il était furieux des critiques de Sartre contre Israël.

    L’ironie était que ce numéro est sorti juste après la guerre des Six jours en 1967, bien que tout ce qu’il contenait ait été écrit auparavant. Dans son éditorial, intitulé « Pour la vérité », Sartre ne prend pas vraiment position dans un sens ou dans l’autre. Une pétition est sortie en France, juste avant la guerre, dans laquelle des intellectuels français de gauche disaient qu’ils ne voulaient pas assimiler Israël à l’impérialisme américain et qu’ils pensaient toujours qu’Israël devait avoir le droit d’exister. Sartre a signé cette pétition, puis, peu de temps après, la guerre a éclaté.

    Rien de ce que Sartre a fait n’était une approbation de la guerre sous quelque forme que ce soit, mais cela a créé un énorme choc. Le prestige de Sartre dans le monde arabe était sur une énorme trajectoire descendante, peut-être à l’exception des pays du Maghreb – certainement l’Algérie. Il y avait aussi une fracture dans la gauche française. À ce jour, Sartre est toujours attaqué par certains segments de la gauche pour ne pas avoir suffisamment soutenu la Palestine.

    Cependant, je pense que si nous regardons ce que Sartre a écrit et dit, il était pour l’existence d’Israël, mais il n’a jamais reculé sur sa croyance dans les droits des Palestiniens. Cette question est importante car elle nous aide à clarifier le dossier. Sartre était déchiré — il voulait être en faveur des deux côtés ; il voulait une solution à deux États.

    DF – Quel est l’état du discours public en France sur son histoire coloniale ? Où pensez-vous que Sartre et son héritage se situent dans ce débat ?

    OG- Je pense que la façon de commencer cette discussion est de regarder ce que Sartre a dit juste après la guerre d’indépendance en Algérie, qui s’est terminée par une victoire douce-amère :

    Il faut dire que la joie n’a pas sa place. Depuis sept ans, la France est un chien enragé traînant chaque jour une casserole attachée à sa queue, devenant un peu plus terrifié par son propre vacarme. Aujourd’hui, personne n’ignore que nous, la France, avons ruiné, affamé et massacré une nation de pauvres gens pour la mettre à genoux. Ils restent debout, mais à quel prix ? Pendant que les délégations mettaient fin aux affaires de guerre, 2 400 000 Algériens restaient dans les camps de la mort lente. Nous en avons tué plus d’un million. Après sept ans, l’Algérie doit repartir de zéro ; il faut d’abord gagner la paix, et ensuite s’accrocher avec le plus grand mal à la misère que nous avons créée. Ce sera notre cadeau d’adieu.

    Cette citation peut être interprétée comme un appel au règlement des comptes et à la mémoire de l’état des choses. Bien sûr, c’est exactement le contraire de ce qui s’est passé en France après la guerre. Le paysage politique actuel de l’histoire coloniale de la France est un mélange de déni et de manipulation. La guerre d’indépendance algérienne n’a été officiellement considérée comme une guerre qu’en 1999. En 2005, le Parlement français a adopté une loi pour dire que le colonialisme était dans l’ensemble bénéfique au peuple colonisé. Le président de droite de l’époque, Jacques Chirac, a pris un décret pour abroger cette loi.

    En octobre 1961, il y a eu une manifestation contre le couvre-feu des Algériens dans les rues de Paris. Ils sont massacrés par la police : des centaines de corps sont jetés dans la Seine. C’était complètement absent de l’histoire de France. Les livres à ce sujet ne sont apparus que dans les années 80 et 90. Il y a eu deux grands romans, Meurtres pour mémoire de Didier Daeninckx et La Seine était rouge de Leïla Sebbar , en 1983. En 2012, il y a eu une commémoration par François Hollande où il n’a pas pointé du doigt la police comme coupables, et, plus récemment, celle d’Emmanuel Macron en octobre dernier, à l’occasion du cinquantième anniversaire, qui ne s’excusait pas spécifiquement pour les crimes de l’État français.

    Nous sommes dans un endroit très étrange. Macron a récemment eu une querelle publique avec le gouvernement algérien parce qu’il a invité des descendants de colons colonialistes et leurs alliés indigènes au palais de l’Élysée. Au cours de cette réunion, il a essentiellement dit qu’il n’y avait pas de nation algérienne avant que la France n’envahisse l’Algérie en 1830. C’était un sujet de discussion colonialiste d’extrême droite et une tentative de voler la base de Marine Le Pen et d’Eric Zemmour.

    Aujourd’hui, la France est encore objectivement une puissance impériale. Son contrôle des anciennes colonies en Afrique est plus subtil qu’avant la décolonisation, mais pas de beaucoup. Ces anciennes colonies ont leurs ports et leurs infrastructures majoritairement détenus par des entreprises françaises, bien que la Chine se profile également à l’arrière-plan. Fondamentalement, la monnaie de la plupart des anciennes colonies françaises est contrôlée par la Banque de France : c’est le franc CFA , indexé sur l’euro.

    C’est une situation qui perdure, dénoncée par Sartre lui-même, mais que la quasi-totalité de la classe intellectuelle française ferme aujourd’hui les yeux. Afin de maintenir cet état de déni qui permet la poursuite de l’exploitation des anciennes colonies françaises, il est nécessaire de vilipender le plus grand opposant intellectuel au colonialisme et au néocolonialisme français, qui est ce qu’était Sartre.

    Dans les grands champs politiques et culturels de la France d’aujourd’hui, il y a une forte réticence à accepter le passé colonial et un refus obstiné de condamner le néocolonialisme. Dans ce contexte idéologique, Sartre ne peut pas être largement célébré pour ses écrits politiques ou philosophiques dans la France du XXIe siècle. Il ne peut pas être complètement ignoré – vous pouvez avoir des livres sur sa vie, sa biographie – mais les tentatives infaillibles de Sartre pour relier race et colonialisme rendent impossible de le revendiquer tout en renonçant simultanément à un engagement en faveur d’un changement social radical.

    La quasi-totalité de la classe intellectuelle française et les politiciens du Parti socialiste français ont renoncé de cette façon depuis 1968. Aujourd’hui, nous avons encore ces chiens de garde du système, qui sont attachés à l’ordre néolibéral et doivent donc rejeter Jean-Paul Sartre .

    A PROPOS DE L’AUTEUR
    Oliver Gloag est professeur agrégé d’études françaises et francophones à l’Université de Caroline du Nord, Asheville. Il est l’auteur de Albert Camus: A Very Short Introduction (Oxford University Press, 2020).

    À PROPOS DE L’INTERVIEWEUR
    Daniel Finn est l’éditeur de fonctionnalités chez Jacobin . Il est l’auteur de One Man’s Terrorist: A Political History of the IRA .Jacobin, 24/04/2022

    #France #Colonialisme #Jean_paul_sartre #Crimes #empire #Algérie #Vietnam

  • Driencourt: « Pour la France, l’Algérie est une affaire interne »

    Driencourt: « Pour la France, l’Algérie est une affaire interne » – Guerre d’Algérie, colonisation, Xavier Driencourt,

    L’ancien ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, raconte la sensibilité de la relation entre l’Algérie et son ancien colonisateur, dans la mesure où elle incite quiconque écrit ses mémoires et est exposé à ce pays, à réfléchir à l’avance aux conséquences de ses mots et phrases.

    En effet, Driencourt a exprimé dans ses mémoires, qu’il a intitulés « L’énigme algérienne : papiers d’ambassade en Algérie », ce qui l’entourait lorsqu’il a écrit les premiers mots de son livre : « Tout ce qui s’écrit sur l’Algérie, notamment à Paris , ce qui peut, dans une certaine mesure, être incompatible avec ce qui est dit.

    Avant de décider d’écrire ses mémoires sur la mission diplomatique qu’il a accomplie en Algérie comme ambassadeur pendant près de dix ans, il dit avoir bien réfléchi et bien pesé les conséquences : « J’attends que ces quelques souvenirs et les observations qui suivent soient analysées, commentées sur et sans doute critiqué, en Algérie, d’après ce qu’en disent les extraits du livre publié par la maison d’édition l’« Observatoire ».

    Cela peut même revenir à convoquer l’ambassadeur de France sur fond de notes émises par un ancien ambassadeur, et dans ce qu’il écrit : « L’ambassadeur de France peut être convoqué, et il demandera si la France parle par l’intermédiaire de l’ancien ambassadeur, et la presse se déchaînera et les réseaux sociaux seront activés. Bien que ces notes n’engagent pas les autorités françaises, elles n’engagent que leur auteur.

    A cet égard, le diplomate français a rappelé les réactions suscitées par les mémoires de l’ancien ambassadeur de France en Algérie, Bernard Bajolet, et les quelques phrases extraites de son livre, sorties de leur contexte et agrémentées d’autres lectures déplacées, bien qu’il a parlé du courage, de la bienveillance, de la lutte et de la persévérance des Algériens, alors qu’ »ils l’ont aussi montré pendant les longues années de lutte contre la France », a-t-il dit.

    Le diplomate français a évoqué la période politique difficile qu’a connue l’Algérie après l’accident vasculaire cérébral de l’ancien président, Abdelaziz Bouteflika, et comment cela a affecté son travail d’observateur de la situation (en tant qu’ambassadeur) dans un pays plus qu’important pour la France. : « Je savais à quel point ce pays est difficile, la vie difficile en Algérie, la très grande complexité, due à la situation politique intérieure depuis l’accident vasculaire cérébral du président Bouteflika en 2013, et bien sûr l’immense solitude vécue par un ambassadeur de France en Algérie.

    Il a également parlé du « mouvement populaire » ou « Hirak » qui a éclaté le 22 février 2019, qui a renversé l’ancien président, et comment cela a affecté son travail, car les autorités de l’époque avaient exigé son expulsion en raison de ce qui avait été rapporté à être sa relation à l’aggravation de la situation interne.

    Les mémoires de l’ancien ambassadeur de France ont clairement révélé l’importance de l’Algérie pour la France, lorsqu’il a enregistré « sans aller jusqu’à reprendre la phrase de l’ancien président François Mitterrand en 1954, dans laquelle il disait que l’Algérie, c’est la France. Je dis après près de huit ans que j’y ai passé (c’est-à-dire l’Algérie), c’est bien « la politique intérieure française autant que diplomatique, car l’Algérie est aussi importante pour les Français que l’Allemagne en termes d’histoire commune et de partenariat économique » .

    Driencourt cite une déclaration de Maurice Gordo Montaigne, secrétaire général de l’ambassade lorsqu’il était en Algérie, dans laquelle il disait : « Pour la France et sa diplomatie, il y avait deux pays qui étaient particulièrement importants et, bien sûr, pour des raisons différentes : Allemagne et Algérie. Nous devons donc être attentifs à nos relations avec ces deux principaux partenaires.

    Ces confessions confirment l’enracinement de la mentalité cosmopolite des hommes politiques français dans leur rapport au paradis perdu, mais à la lumière d’aujourd’hui la parité imposée par l’Algérie est devenue un rêve du passé.

    Mohamed Meslem

    Echourouk online, 14/03/2022

    #Algérie #France #Colonisation

  • Guerre d’Algérie : il y a 60 ans, tensions et incompréhensions dans les coulisses d’Evian

    Guerre d’Algérie : il y a 60 ans, tensions et incompréhensions dans les coulisses d’Evian

    Guerre d’Algérie : il y a 60 ans, tensions et incompréhensions dans les coulisses d’Evian – France, colonisation, GPRA,

    Il y a 60 ans, en mars 1962, les représentants français et ceux du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) se réunissaient à Evian pour conclure les accords qui allaient mettre fin à la guerre d’Algérie.

    Les négociations entre Français et Algériens à Evian (centre-est de la France) ont été émaillées de moments de tension et d’incompréhensions avant d’aboutir aux accords ayant mis fin à la guerre d’Algérie il y a 60 ans, selon des témoignages confiées à l’AFP.
    A l’issue de ces négociations, les représentants français et du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) avaient signé, le 18 mars 1962, les accords dits d’Evian, ouvrant la voie à l’indépendance de l’Algérie après plus de sept ans de guerre et 132 ans de colonisation.
    Dès sa déclaration lançant la « Guerre de libération » le 1er novembre 1954, le Front de libération nationale (FLN) s’était dit prêt à négocier avec les autorités françaises mais il faudra attendre janvier 1961 pour que des négociations directes débutent entre la France et le GPRA. Elles dureront 18 mois, la plupart du temps en secret.

    Elles commencent notamment grâce au représentant du GPRA en Italie, Tayeb Boulahrouf, qui demande au président italien de l’époque, Giovanni Gronchi, au Premier ministre, Giorgio La Pira, et à l’influent patron du groupe pétrolier Eni, Enrico Mattei, de sonder le président français sur ses intentions.

    Au travers des Italiens, M. Boulahrouf obtient « la confirmation que le général De Gaulle est dans l’état d’esprit de négocier avec ‘la rébellion’ », a raconté son fils Jalil à l’AFP.

    « Cigarette au bec »
    L’atmosphère très tendue au début des négociations se relâche au fur et à mesure que les négociateurs apprennent à se connaître.

    Selon une anecdote racontée par Tayeb Boulahrouf à son fils, lors des discussions de Lucerne qui précèdent en 1961 celles d’Evian, Georges Pompidou, homme de confiance de De Gaulle, est entré « cigarette au bec » alors que c’était le ramadan. « Il a éteint sa cigarette par respect mais mon père lui a signifié qu’il pouvait fumer à son aise, car l’islam étant une religion extrêmement tolérante, cela ne posait aucun problème ».

    Amar Mohand-Amer, historien algérien et résident à l’Institut d’Etudes avancées de Nantes, souligne à l’AFP que « dans les derniers mois, le GPRA et le gouvernement français étaient dans une logique positive, celle d’aboutir rapidement à un compromis ». Même s’il fallait parfois dissiper des incompréhensions.

    Ainsi, à un moment, Lakhdar Bentobal, l’un des négociateurs algériens, a dû rappeler à l’ordre le chef de la délégation française qui s’adressait au GPRA en leur disant « vous de l’autre côté de la table », au motif que la France ne reconnaissait ni le GPRA ni le FLN.

    Pour l’inciter à plus de respect, Bentobal a dressé un parallèle avec « certains hommes algériens qui ne citent jamais le nom de leur épouse, même quand ils s’adressent directement à elle ». Pendant la phase préparatoire et les négociations, la délégation algérienne a pu compter sur le soutien de la Suisse.

    « Décontraction »
    Une partie des accords ont été négociés dans une première phase près de Genève et la délégation algérienne logeait dans une villa à Bois D’Avault, du côté suisse de la frontière. Grâce au Dr Djillali Bentami, représentant du Croissant rouge algérien (CRA) en Suisse qui l’avait mis en contact avec Redha Malek, un autre négociateur algérien, le photographe André Gazut a pu y entrer et réaliser des clichés.

    Les négociateurs étaient « venus en Suisse depuis Tunis par un vol spécial de Swissair qui avait pour consigne de ne pas survoler la France », a raconté le photographe à l’AFP. La propriété autour de la villa était surveillée par l’armée suisse « de crainte d’une opération de l’OAS (organisation terroriste française opposée à l’indépendance, ndlr) contre les négociateurs ».

    « Il y avait même des canons de DCA (défense anti-aérienne) en cas d’apparition d’un petit avion près de la propriété », selon M. Gazut. Le célèbre photographe Raymond Depardon a raconté en décembre au quotidien algérien Liberté comment la délégation algérienne qu’il avait suivie « impressionnait par sa décontraction et le port vestimentaire très élégant de ses membres » qui étaient « des jeunes de 30-40 ans ».

    « Cela tranchait avec l’image qu’on se faisait du FLN dans le maquis, en tenue militaire », a-t-il dit.

    GEO, 14/03/2022

    #Algérie #France #Colonisation