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  • Monde : Retour en force de la diplomatie algérienne

    Algérie, diplomatie, Afrique, guerre de libération, Enrico Mattei, Palestine, Hamas, OLP,

    La diplomatie algérienne, fidèle aux principes du 1er Novembre 1954, fondés sur le soutien aux causes justes et au droit des peuples à l’autodétermination, a marqué un retour en force sur la scène internationale en contribuant au règlement des crises dans la région et à l’instauration de la paix, a affirmé le moudjahid et ancien ambassadeur, Noureddine Djoudi.

    Dans un entretien à l’APS à l’occasion de la célébration du 60e anniversaire du recouvrement de la souveraineté nationale, M. Djoudi a souligné que la diplomatie algérienne a joué un rôle important dans
    l’affranchissement du pays du joug colonial, précisant que le premier jalon fut lorsque les chefs de la Révolution ont compris l’importance de la lutte diplomatique pour combattre le colonisateur qui a tenté plus d’un siècle durant d’effacer l’identité algérienne.

    Pour contrer la propagande française, qui présentait l’Algérie comme une « partie intégrante de la France », il fallait créer un mouvement de sympathie et de solidarité mondial, et pour atteindre cet objectif, la « diplomatie de guerre » fut enclenchée par « l’ouverture de bureaux et de représentations du Front de libération nationale (FLN) dans plusieurs capitales, notamment dans les pays qui soutenaient la France », a-t-il expliqué.

    Il s’agissait, par cette démarche, de « révéler à l’opinion publique mondiale la réalité des faits pour faire pression sur les gouvernements des pays qui soutenaient la France coloniale, à travers leurs peuples, et de montrer que l’Armée de libération nationale (ALN) était composée de révolutionnaires et non de bandits sous la coupe de l’Internationale socialiste », selon le diplomate.

    Evoquant les moudjahidine ayant porté la cause algérienne sur la scène internationale, Noureddine Djoudi a cité Tayeb Boulahrouf qui a contribué, a-t-il dit, au « ralliement de responsables italiens, dont le fondateur d’Eni, Enrico Mattei, à la cause nationale ».

    Pour le diplomate, la lutte menée par Boulahrouf continue de porter ses fruits en témoignent les relations fortes qu’entretiennent aujourd’hui l’Algérie et l’Italie.

    Il a également rappelé l’ouverture d’un bureau aux Nations Unies à New York grâce à Hocine Aït Ahmed, M’hamed Yazid et Abdelkader Chanderli. Ce dernier a réussi à convaincre le sénateur John Kennedy qui a appelé dans son célèbre « discours algérien », devant le sénat à la reconnaissance de l’indépendance de l’Algérie ».

    « La diplomatie algérienne, qui a toujours été une arme, repose sur des principes solides, à l’instar du droit des peuples à la liberté et à la dignité, ce qui explique que notre diplomatie s’appuie, à ce jour, sur la défense du droit des peuples à l’autodétermination », considère l’ancien ambassadeur.

    Pour ce qui est de la diplomatie algérienne après l’indépendance, M.Djoudi a fait savoir que l’on aspirait, à l’époque, à mettre en place un corps diplomatique basé sur la formation et que des membres de l’Armée de libération, y compris lui, avaient été choisis et nommés aux postes d’ambassadeurs et avaient comme orientation principale que la lutte des peuples souffrant du joug colonial et de discrimination raciale était celle de l’Algérie.

    « Au lendemain de l’indépendance, un corps diplomatique commençait à se former, en accédant à des écoles de formation diplomatique à l’étranger, jusqu’à la création de notre propre école au ministère des Affaires étrangères et de la communauté nationale à l’étranger », a-t-il poursuivi.

    M. Djoudi a rappelé l’aide apportée par la diplomatie algérienne au dirigeant sud-africain, Nelson Mandela qui voulait s’imprégner de la lutte des Algériens et qui a été amené à lancer « la diplomatie de guerre », étant un outil important pour faire connaitre la cause de son peuple et la discrimination raciale qu’il subissait et expliquer au monde le système de « l’Apartheid », et c’est à partir de là qu’a commencé l’élimination de ce régime ségrégationniste en Afrique du Sud, a-t-il dit.

    Il a également évoqué la participation de l’Algérie au règlement de nombreuses crises, à l’instar de celle des otages américains en Iran, du règlement du conflit entre ce pays et l’Irak en 1975, ou encore le
    règlement de la crise du détournement de l’avion koweïtien en 1988, soulignant que la diplomatie algérienne a toujours aspiré à la paix et à la justice entre les pays en conflit et est pleinement convaincue que tout conflit interne d’un pays ne peut être réglé que par la diplomatie et le dialogue, et la recherche de solutions pacifiques contre l’ingérence politique ou armée des puissances étrangères.

    A cet effet, il a rappelé la position de l’Algérie à l’égard des pays voisins, dont la Libye, précisant qu’elle a appelé à la non ingérence dans les affaires internes de cette dernière, tout en insistant sur l’impératif d’aider les Libyens à concrétiser leur union, tout comme pour le Mali.

    « L’Afrique, première des priorités »

    L’ancien ambassadeur en Afrique du sud, en Angola et aux Pays bas regrette le recul de la diplomatie algérienne à une certaine période, mais a-t-il dit, « nous sommes revenus aujourd’hui en force » soulignant que le Président de la République, M Abdelmadjid Tebboune l’a clairement signifié en affirmant que l’engagement de l’Algérie aux côtés de l’Afrique était la première des priorités. »

    Il s’est dit « fier » de voir la nouvelle diplomatie aussi active que dans les années de la Révolution, ajoutant que « notre diplomatie est capable aujourd’hui de faire face à toute offensive contre l’Algérie. Il y a aujourd’hui ce qu’on appelle la diplomatie du militantisme, pareille à celle que nous avons connue durant la guerre de libération ».

    Il y a un lien entre la diplomatie de guerre et la nouvelle diplomatie, a-t-il dit, précisant que les démarches menées par l’Algérie pour le règlement des conflits renseignent sur le rôle pionnier et essentiel de sa diplomatie ».

    M. Djoudi a salué l’initiative du Président de la République pour « l’unification des rangs palestiniens » lors de la rencontre historique entre le chef du bureau politique du mouvement Hamas, Ismail Haniyeh et le président palestinien, Mahmoud Abbas après des années de marasme.

    « La diplomatie algérienne a réussi à poser le premier jalon pour mettre fin à la division entre les factions palestiniennes, a-t-il dit, ajoutant « c’est, désormais, aux Palestiniens de faire front uni contre l’entité sioniste ».

    L’orateur a rappelé les déplacements continus du Président Tebboune dans de nombreux pays, l’intense activité de la diplomatie algérienne ainsi que les visites du Ministre des Affaires étrangères et de la communauté nationale à l’étranger Ramtane Lamamra, affirmant que les pays arabes ont favorablement accueilli et salué le Sommet arabe qu’abritera l’Algérie en novembre prochain.

    M. Djoudi a en outre souligné que la diplomatie algérienne qui a engendré une élite de diplomates de la trempe du chahid Mohamed Seddik Ben Yahia et bien d’autres, peut en former d’autres aussi compétents, sur les pas de leurs prédécesseurs et avec les mêmes principes de soutien aux cause justes et au droit des peuples à l’autodétermination.

    APS

    #Algérie #Diplomatie #Afrique #Palestine

  • « Le Maroc peut servir de médiateur entre Israël et le Hamas »

    « Le Maroc peut servir de médiateur entre Israël et le Hamas »

    Maroc, Palestine, Hamas, Israël,

    L’ambassadeur David Govrin parle du développement des liens entre Jérusalem et Rabat, de la position d’Israël sur le conflit du Sahara occidental, dans une interview avec The Media Line

    Interrogé pour savoir si Rabat pourrait devenir un médiateur entre Israël et le Hamas, l’ambassadeur d’Israël au Maroc, David Govrin, a déclaré à Media Line : « Nous pensons vraiment que le Maroc peut jouer un rôle très important, comme il le faisait dans les années 80 et 90. Nous pensons que le Maroc peut jouer à nouveau ce rôle, car il entretient de très bonnes relations avec Israël et avec d’autres pays arabes.

    L’ambassadeur a abordé lundi à Casablanca plusieurs questions concernant les relations entre les deux pays lors d’une conférence bilatérale sur le renforcement des liens avec le secteur privé.

    Lorsqu’on lui a demandé si les tensions entre Israël et les Palestiniens pouvaient compromettre les relations diplomatiques entre Israël et le Maroc, Govrin a expliqué que le lien entre les Juifs marocains et le Maroc, parallèlement à leur héritage historique, joue un rôle essentiel dans le réchauffement des liens avec le royaume.

    « Nos relations binationales ne sont pas uniquement basées sur des intérêts. Ils reposent sur une culture commune et des valeurs partagées. C’est pourquoi vous voyez un développement très rapide de nos relations bilatérales depuis la signature des accords », a-t-il déclaré.

    Le Maroc et Israël ont ouvert des relations diplomatiques officielles en décembre 2020, dans le cadre d’une série d’accords de paix entre Israël et des pays du Moyen-Orient connus sous le nom d’Accords d’Abraham. Cependant, le Maroc a maintenu ses relations avec le groupe islamiste extrême palestinien Hamas, et il a accueilli une délégation dirigée par le chef politique du Hamas Ismail Haniyeh en juillet dernier.

    Le royaume a participé aux efforts de médiation entre Israël et les parties arabes dans les années 70 et 80, accueillant l’une des premières réunions menant au traité de paix de 1979 entre Israël et l’Égypte. L’accueil de sommets liés au conflit israélo-palestinien pour les accords d’Oslo fait également partie de la politique de « neutralité constructive » du Maroc envers les conflits dans la région.

    Govrin a également abordé la position d’Israël sur le différend territorial du Maroc avec le groupe militant du Front Polisario basé en Algérie. Lorsqu’on lui a demandé comment Israël soutiendrait le Maroc dans ses efforts pour affirmer sa souveraineté sur la région du Sahara occidental, il a répondu : « Je pense que cette question sera discutée le plus tôt possible, entre les dirigeants des deux pays ».

    Interrogé par les médias internationaux sur ses attentes concernant la coopération future entre Israël et le Maroc dans les domaines du commerce et des affaires, Govrin a déclaré : « Il existe un proverbe en arabe : ‘Dieu est avec ceux qui ont de la patience, tant qu’ils restent patients.’ Nous avons accompli beaucoup de choses au cours de la dernière année et demie, et il reste encore beaucoup à faire, mais nous avons besoin de temps.

    L’ambassadeur a également discuté de la coopération dans le domaine du capital humain, affirmant qu’il y a beaucoup d’avantages à tirer pour les deux pays du fait que les entreprises israéliennes trouvent un moyen d’employer des ingénieurs et des programmeurs marocains. L’idée a été mentionnée par plusieurs hommes d’affaires et responsables gouvernementaux lors de la conférence, notamment par la ministre israélienne de l’Innovation, des Sciences et de la Technologie Orit Farkash-Hacohen dans son discours de clôture.

    Govrin s’est adressé aux médias internationaux lors de la conférence Start-Up Nation Central qui s’est tenue à Casablanca, où des responsables gouvernementaux marocains et israéliens et des chefs d’entreprise se sont rencontrés pour discuter de la coopération avec le secteur privé.

    « Les gouvernements ont signé l’accord officiel, et maintenant il est temps pour le secteur privé d’intervenir et de remplir son rôle dans la construction de cette paix », a déclaré Govrin dans son discours d’ouverture de la conférence.

    The media line, 26 mai 2022

    #Maroc #Palestine #Hamas #Israël

  • Normalisation avec Israël: Hamas salue la position de l’Algérie

    Normalisation avec Israël: Hamas salue la position de l’Algérie

    Tags : Algérie, Israël, Palestine, Hamas, normalisation – Normalisation avec Israël: Hamas salue la position de l’Algérie

    « Nous, au Hamas, sommes fiers de ces remarques algériennes et nous les soutenons », a déclaré samedi un haut responsable du Hamas, Sami Abu Zuhri.
    Agence de presse AhlulBayt (ABNA) : Le mouvement Hamas a applaudi le ministère algérien des affaires étrangères pour avoir réitéré le refus du pays d’avoir des relations avec l’ennemi de l’occupation israélienne et sa condamnation des démarches de normalisation arabes.

    « Nous, au Hamas, sommes fiers de ces remarques algériennes et nous les soutenons », a déclaré samedi Sami Abu Zuhri, haut responsable du Hamas.

    Abu Zuhri a décrit la position algérienne, qui a été exprimée dans des remarques récentes du ministre des affaires étrangères Ramtane Lamamra, comme un rempart contre la tentative israélienne d’empiéter davantage sur le monde arabe et le continent africain.

    ABNA, 14/11/2021

    #Algérie #Israël #Normalisation #Hamas #Palestine

  • Maroc : la normalisation d’Israël se heurte à la visite de Hamas

    Opinion : Alors que le royaume marocain présentait ses félicitations au nouveau gouvernement de Bennett en Israël, il déroulait le tapis rouge pour une délégation de haut rang du Hamas. Abdeddine Hamrouch expose les motifs possibles.

    La semaine dernière, le Maroc a fait deux gestes officiels apparemment incongrus : il a présenté ses félicitations au nouveau gouvernement israélien et a reçu une délégation du Hamas, dirigée par le chef de son bureau politique, Ismail Haniyeh.

    À la lumière de l’accord de normalisation signé avec Israël en décembre dernier et de la réouverture subséquente du bureau de liaison d’Israël à Rabat, le fait que le roi Mohammed VI du Maroc ait décidé de féliciter le nouveau Premier ministre israélien, Naftali Bennett, après que son gouvernement ait réussi à obtenir l’approbation de la Knesset, n’est pas surprenant du point de vue officiel.

    En revanche, la réception de Haniyeh à la tête d’une délégation de haut rang du Hamas aurait été considérée comme impensable jusqu’à très récemment.

    S’il est vrai que l’ancien chef du bureau politique du Hamas, Khaled Meshaal, s’est rendu au Maroc à deux reprises, le contexte dans lequel s’inscrit la récente visite est unique, marqué par des développements majeurs à Jérusalem.

    Ces événements ont abouti à l’ »épée de Jérusalem » (ou Seif Al-Quds) – la tentative du Hamas de changer à la fois le cours du conflit et ses règles à de multiples niveaux. Quant aux origines du Hamas en tant que branche des Frères musulmans, et à son lien avec la République islamique d’Iran qui lui apporte soutien et approvisionnement, ce sont notamment ces éléments qui rendent l’accueil de sa délégation si inattendu.

    L’ambiguïté du Royaume

    Il n’y a pas de coïncidence lorsqu’il s’agit des politiques et des actions des États, même lorsque ces actions semblent stratégiquement inexplicables pour la plupart. En apparence, aucun motif clair ne pousse le régime officiel marocain à se rapprocher du Hamas. Bien que l’on ne puisse pas dire qu’il y ait une réelle inimitié entre les deux, il n’y a pas non plus de sympathie à quelque niveau que ce soit.

    Les dirigeants marocains ont toujours choisi de traiter avec l’Autorité palestinienne contrôlée par le Fatah plutôt qu’avec le Hamas, considérant l’AP comme plus proche d’eux-mêmes dans leur style de gouvernance. Alors, qu’est-ce qui a conduit le gouvernement de Rabat, aujourd’hui, à donner une ouverture au Hamas de cette manière publique, surtout à un moment aussi sensible ?

    Des attitudes changeantes

    Certains attribuent la motivation politique du Maroc au fait que le Hamas est soudainement perçu comme un joker en ce qui concerne le conflit israélo-palestinien/arabe.

    La récente victoire du Hamas dans l’opération « Epée de Jérusalem », et le déploiement réussi de ses chaînes militaires d’une manière qui a effectivement changé les règles du conflit, a conduit à une acceptation timide du groupe dans certains milieux. Même lorsque la bataille faisait rage, il n’était pas surprenant d’entendre des déclarations appelant à l’ouverture d’une communication indirecte avec le groupe, par exemple de la part de la chancelière allemande, Angela Merkel.

    Ce changement d’attitude a eu lieu au niveau international, avec des exceptions comme celle du ministre des affaires étrangères émirati, Sheikh Abdullah bin Zayed al Nayhan, qui a déclaré sans équivoque son opposition au Hamas, sa branche politique comme sa branche militaire.

    En outre, l’administration Biden s’accompagne d’un retour au discours traditionnel des États-Unis (du moins publiquement), ce qui pourrait limiter la portée des effets de cette position internationale plus nuancée. Cependant, la fin du mandat présidentiel de Donald Trump a réduit la probabilité de conséquences problématiques pour le Maroc s’il faisait un pas vers le Hamas.

    Agendas possibles

    Cela dit, il n’y a pas de raisons impérieuses pour expliquer l’ampleur de l’accueil officiel réservé à la délégation de Haniyeh, comme le banquet royal organisé à son intention au Palais des hôtes – qui est destiné à recevoir les visiteurs de haut rang.

    Tout cela soulève la question suivante : pourquoi le Maroc a-t-il reçu le Hamas de cette manière ? Les commentateurs politiques ont avancé plusieurs motifs possibles :

    Premièrement, cela indique le réengagement du Maroc envers les Palestiniens. Le soutien ouvert à la cause palestinienne dans le royaume avait stagné ces dernières années en raison du parti pris extrême de l’administration Trump envers Israël.

    Et bien que le roi Mohammed VI porte d’autres préoccupations gouvernementales, comme la question du Sahara occidental, depuis son accession au trône, le maintien de sa présidence du Comité Al-Quds ne lui a pas permis d’ignorer la question palestinienne.

    Le changement de leadership des Etats-Unis a également permis aux acteurs régionaux d’aborder la cause palestinienne avec une vigueur renouvelée. Dans ce contexte, le Maroc n’avait pas le choix – il devait renouveler son engagement envers la cause palestinienne, en particulier son symbole le plus proéminent, Jérusalem.

    Deuxièmement, il indique le désir du Maroc de confirmer qu’il n’a pas reculé par rapport à son engagement vis-à-vis de la question palestinienne, malgré la réouverture du bureau de liaison d’Israël à Rabat. Alors que ses réassurances ont été accueillies froidement par la direction palestinienne, voire avec une franche colère, on espère qu’en accueillant la délégation du Hamas, le Maroc retrouvera son rôle traditionnel et préféré, en favorisant les relations avec les Palestiniens et les Israéliens en même temps.

    Il est certainement significatif que la réception du Hamas ait eu lieu au moment même où Bennett recevait des félicitations pour avoir obtenu l’approbation de la Knesset. Avec ces actions simultanées, Rabat veut envoyer un message : La normalisation du Maroc avec Israël n’est pas la même que celle des EAU. Ce message ne serait pas passé sans l’accueil officiel du Hamas.

    Troisièmement, le Maroc veut ralentir le rythme de la normalisation face à un manque intentionnel d’interaction de la part de l’administration de Biden concernant ce qu’il considère comme la question de son unité territoriale.

    Même si le gouvernement de Rabat continue d’insister sur le fait qu’il n’y a aucun lien entre la normalisation et la reconnaissance américaine de la revendication du Maroc sur le Sahara occidental, les diplomates marocains sont conscients de la difficulté de séparer les deux questions, tant au niveau national qu’international.

    En outre, il semble peu clairvoyant de fermer les yeux sur les tentatives de l’Algérie de saper les liens du Maroc avec sa région du sud. En ralentissant les accords de normalisation et en accueillant le Hamas, les dirigeants marocains espèrent regagner la confiance de la population. Cette année étant une année d’élections, il faut s’attendre à d’autres initiatives similaires qui prendront une forme politique, fondée sur les droits ou sociale.

    Enfin, il s’agit d’une décision du Premier ministre Saad Eddine El Othmani, en réponse au mépris généralisé et aux multiples attaques dont lui et son parti ont fait l’objet à la suite de l’accord de normalisation – qui a établi des relations diplomatiques complètes avec Israël.

    Même s’il s’agissait clairement d’une décision prise en haut lieu, Othmani a reçu une grande partie des reproches de nombreux groupes civils et politiques pour avoir personnellement signé l’accord en tant que premier ministre et figure de proue d’un parti islamique. Peut-être Othmani pense-t-il que l’organisation de la réception du Hamas lui donnera un peu de répit.

    Cependant, la nouvelle de la réception n’a pas tardé à susciter des réactions. David Govrin, officier de liaison d’Israël à Rabat, a posté un tweet furieux, brisant toutes les normes diplomatiques établies, condamnant les commentaires de félicitations d’Othmani à Haniyeh immédiatement après la bataille de l’épée de Jérusalem.

    Le gouvernement marocain n’a pas répondu lorsque le ministère israélien des Affaires étrangères a reposté le tweet de Govrin, qui a rapidement supprimé de son compte Twitter jusqu’à ce qu’une réponse appropriée ait été élaborée.

    Il est peu probable que le Parti de la justice et du développement d’Othmani soit à l’origine de l’invitation de Haniyeh et de sa délégation au Maroc. S’il est vrai qu’un feu vert officiel a été donné, il est clair que des ordres sont venus d’en haut. Le parti n’est qu’une façade – derrière lui se trouvent des autorités supérieures qui souhaitent envoyer des messages et obtenir des résultats.

    Bien qu’il ne semble pas judicieux, d’un point de vue politique, d’avoir offert un cadeau aussi précieux au Parti de la justice et du développement au cours d’une année d’élections qui se rapprochent, pourrait-il y avoir d’autres agendas en plus de ceux mentionnés ci-dessus ? Le Maroc tente-t-il de jouer un rôle d’intermédiaire réussi entre Israël et le Hamas, analogue à son succès dans la médiation entre les groupes libyens par exemple ?

    Y a-t-il une tentative d’un rôle moins important de médiation entre les factions palestiniennes, surtout que l’Autorité palestinienne d’Abu Mazen à Ramallah refuse de réformer l’établissement dirigeant palestinien tout en attendant des initiatives spécifiques pour résoudre le conflit dans la région ?

    La visite officielle de la délégation du Hamas est lourde de sens. Mais les blogueurs et les politiciens marocains qui interprètent cette visite comme une simple stratégie idéologique rusée du Parti de la justice et du développement ou du Hamas font une erreur.

    The New Arab, 25 juin 2021

    Etiquettes : Maroc, Israël, normalisation, Palestine, Hamas,

  • Ismaïl Haniyeh vole au secours du roi du Maroc

    De nombreuses questions plannent autour de la visite au Maroc du premier responsable de l’organisation palestinienne Hamas, Ismaïl Haniyeh. Une initiative largement critiquée par les palestiniens en raison de la décision de Rabat de reconnaître officiellement l’entité sioniste.

    Le double jeu du pouvoir marocain est flagrant. Alors que les bombes israéliennes tombent sur la populations de Ghaza, le roi Mohammed VI envoie une lettre de félicitation à Naftali Bennett à l’occassion de sa nomination à la tête de l’exécutif israélien.

    Il est évident que le but de cette visite improvisée et inattendue est de redorer l’image du Maroc largement atteinte par les agressions israéliennes contre le peuple palestinien et la ville sainte d’Al Qods dont le comité est théoriquement président par le souverain chérifien.

    Les autorités marocains ont veillé à ce que cette visite s’inscrive dans un cadre non officielle. Haniyeh n’a pas été reçu par le roi du Maroc et sa rencontre avec Saadeddine El Othmani a été organisé sous un signe partisan et le Makhzen a veillé à ce que le leader palestinien rencontre des responsables de tous les partis politiques marocains.

    Etiquettes : Maroc, Palestine, Hamas, Ismaïl Haniyeh, Israël, normalisation, Mohammed VI,

  • Entre Gaza et le Golfe : Les accords d’Abraham, Israël et la Palestine

    Quiconque pensait que les accords d’Abraham élimineraient la nécessité d’aborder la question palestinienne se trompait. Les événements de Jérusalem et de Gaza marquent les premiers tests significatifs du processus de normalisation.

    par Yoel Guzansky Zachary A. Marshall*

    Pour certains, les accords qu’Israël a signés avec les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Maroc et le Soudan sous les auspices du processus des Accords d’Abraham de l’administration Trump avaient le potentiel d’inciter à progresser dans la résolution de l’insoluble conflit israélo-palestinien. Toutefois, pour d’autres, ces accords signifiaient qu’il n’était pas nécessaire de passer par Ramallah pour progresser d’abord sur la question israélo-palestinienne. Le temps qui s’est écoulé depuis la signature des accords est insuffisant pour obtenir une perspective appropriée pour répondre à cette question. Toutefois, les événements récents montrent que la question israélo-palestinienne n’est pas près de disparaître.

    Les quatre pays signataires des accords d’Abraham – les Émirats arabes unis (EAU), Bahreïn, le Maroc et le Soudan – ne sont pas profondément engagés dans la question palestinienne. Leur intérêt premier à signer les accords était principalement lié à leur relation avec les États-Unis et aux incitations qu’ils ont reçues de l’administration Trump, comme la reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental contesté et le retrait du Soudan de la liste américaine des États soutenant le terrorisme.

    La route vers les États-Unis ne passe plus par Jérusalem, car Israël ne jouit pas du même niveau d’influence à Washington qu’à l’époque de Trump. Par conséquent, les quatre pays doivent trouver de nouvelles pistes pour engager efficacement l’administration Biden. L’administration a déclaré qu’elle soutenait les accords de normalisation, mais il reste à voir si et ce qu’elle sera prête à fournir en échange de l’avancement des arrangements entre Israël et ses voisins. Pour chacun de ces pays arabes, soulever la question palestinienne peut être un moyen de faire pression sur Israël et de gagner des points à Washington.

    L’accord ayant les plus grandes implications pour Israël et les États-Unis est celui conclu avec les Émirats arabes unis. Les relations entre les Émirats et les Palestiniens se sont détériorées depuis la signature des accords d’Abraham. L’Autorité palestinienne a choisi une approche conflictuelle avec les EAU, qualifiant l’accord de « trahison » du peuple palestinien, et a vivement critiqué son dirigeant, Mohamed bin Zayed. Les Palestiniens, qui considèrent la démarche des Émirats comme un manque de solidarité à leur égard, s’efforcent également de bloquer la participation des Émirats à divers projets, notamment le Forum gazier de la Méditerranée orientale. En réponse, les Émirats arabes unis ont considérablement réduit l’aide qu’ils fournissent à l’Office de secours et de travaux des Nations unies (UNRWA) : 1 million de dollars en 2020, contre environ 50 millions de dollars en 2019 et 2018.

    Le fait est qu’Israël entretient actuellement de bonnes relations avec ces pays, notamment les EAU, sur les questions de sécurité, en particulier en ce qui concerne l’Iran. En raison de cette coopération, les liens diplomatiques arabo-israéliens récemment établis n’ont pas été drastiquement endommagés. Par exemple, au-delà de leur condamnation rhétorique requise sur la question de Jérusalem, les Émirats n’ont pris aucune mesure pour nuire aux relations avec Israël, mais ont plutôt réaffirmé leur soutien au processus de normalisation.

    Les événements violents survenus à Jérusalem en avril-mai 2021, notamment la prise d’assaut de la mosquée al-Aqsa par les forces de police israéliennes et les manifestations liées à l’expulsion anticipée de plusieurs familles palestiniennes dans le quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem-Est, ont effectivement servi de lignes rouges aux pays signataires des accords d’Abraham. Les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Soudan et le Maroc ont vivement critiqué Israël pour ce qu’ils ont appelé une violation des droits des Palestiniens et du caractère sacré du Mont du Temple. En abordant les récents événements, ils ont exprimé une profonde sensibilité arabe et musulmane à ce qui se passait dans la ville. Les pays qui ont établi des relations avec Israël (et même l’Arabie saoudite, qui semblait soutenir les accords) ont l’occasion de montrer aux Palestiniens qu’ils sont à leurs côtés malgré les normalisations, qui ont été perçues par les Palestiniens comme une trahison et une négligence de l’idée palestinienne. Au-delà du désir d’occulter l’étiquette de « trahison » des Palestiniens et de montrer leur solidarité sur la question de Jérusalem, Abu Dhabi, Manama et Riyad ont intérêt à empêcher d’autres parties, notamment l’Iran, la Turquie et le Qatar, de contrôler le discours sur la situation actuelle. Conscients de cela, depuis la signature des accords, les EAU se sont progressivement impliqués dans ce qui se passe dans les territoires palestiniens et dans les relations israélo-palestiniennes.

    La réduction des tensions dans la ville et le déplacement de l’attention sur ce qui s’est passé à Gaza ont atténué le dilemme pour eux, et la couverture médiatique est devenue plus informative et équilibrée, en particulier dans tous les médias interarabes liés à la monarchie saoudienne – malgré la tendance de base à éprouver de la sympathie pour les Palestiniens. En fait, certaines personnalités des médias arabes pro-régime ont même exprimé leur condamnation du Hamas.

    Les événements de Jérusalem et de Gaza constituent les premiers tests significatifs du processus de normalisation. Il est intéressant de noter que le ton des dirigeants arabes sur Gaza était sensiblement différent de leurs réactions sur Jérusalem. Lorsque Jérusalem n’a plus été au centre des préoccupations, le degré de vocalité arabe a diminué, si ce n’est pour s’aligner sur les déclarations d’organismes largement inefficaces comme la Ligue arabe, car il n’est pas inconcevable qu’ils aient intérêt à ce qu’Israël batte et affaiblisse le Hamas – une ramification récalcitrante des Frères musulmans qui coopère avec l’Iran et la Turquie.

    Affaiblir et délégitimer le Hamas est un intérêt primordial pour les pays arabes. L’attention internationale sur Gaza doit être recentrée et il faut empêcher un nouvel embrasement à Jérusalem. Israël doit sortir vainqueur de sa dernière bataille avec le Hamas, non seulement dans l’intérêt de sa sécurité nationale, mais aussi pour maintenir ses relations avec ses partenaires régionaux, qui seront déçus par la conduite laxiste d’Israël. À leurs yeux, le conflit était une tentative du Hamas de s’approprier la question de Jérusalem et de montrer à la fois aux Palestiniens et au grand public arabe que c’est lui, et non le Fatah et l’Autorité palestinienne, qui est le représentant véritable et le plus efficace du peuple palestinien.

    Aller de l’avant

    Le cessez-le-feu conclu entre le Hamas et Israël est un développement bienvenu, mais probablement pas de nature à rapprocher le conflit israélo-palestinien d’une résolution. Le fait que de nombreux habitants de Gaza considèrent la récente bataille comme une « victoire coûteuse mais claire » montre clairement le niveau de souffrance qu’ils sont prêts à supporter dans la lutte contre Israël et ne sert qu’à renforcer l’ancrage du Hamas dans le territoire.

    Quiconque pensait que les accords d’Abraham élimineraient la nécessité d’aborder la question palestinienne se trompait. Israël devrait avoir intérêt à élargir et à approfondir le cercle de la normalisation – pour que davantage de pays rejoignent la cause de la paix régionale, et que les pays avec lesquels un accord a été conclu réchauffent leurs relations avec Israël. La façon dont Israël se conduit sur les questions de Jérusalem et de Gaza a un impact massif sur l’avenir du processus de normalisation. En outre, il y a des actions qu’Israël peut prendre (ou éviter de prendre) pour promouvoir un règlement avec les Palestiniens, même indépendamment du processus des Accords d’Abraham. Israël a payé cher en monnaie politique, et sous son contrôle, l’intention d’annexion s’est en fait alignée sur le principe de longue date de la terre en échange de la paix.

    Les accords de normalisation constituent un jalon important dans les relations entre Israël et le monde arabe. Toutefois, les seuls développements significatifs qui en découlent jusqu’à présent concernent la sphère économique. Ces accords offrent une excellente occasion d’entamer un dialogue régional visant à progresser vers un règlement du conflit israélo-palestinien. Les États arabes et Israël seraient bien avisés d’aider les Palestiniens à sortir de l’arbre de la « colère » et du refus en entamant un dialogue politique en vue d’un règlement à long terme. La crise de Gaza en particulier ne sera pas résolue sans l’implication et la coordination d’acteurs extérieurs. Les pays arabes régionaux doivent jouer un rôle de premier plan sur la question palestinienne. Une option consiste à former une « coalition arabe pour la paix » composée de partenaires actuels et potentiels d’Israël, ce qui leur permettrait d’adopter une approche articulée et unifiée pour aborder et soutenir les Palestiniens, y compris pour contrer le Hamas.

    Les relations israélo-arabes établies au cours du processus des accords d’Abraham ouvrent la porte à un niveau de collaboration régionale qui, jusqu’à l’année dernière, n’était qu’un rêve. Cependant, pour que cela se produise, un leadership politique fort en Israël, dans le monde arabe, aux États-Unis et dans la communauté internationale est nécessaire.

    Yoel Guzansky est chercheur principal à l’Institut d’études de sécurité nationale (INSS) à Tel Aviv. Son expertise porte sur les États arabes du Golfe.

    *Zachary A. Marshall est stagiaire de recherche à l’Institute for National Security Studies (INSS). Il a récemment obtenu son Master en gouvernement, spécialisé dans la diplomatie et les études de conflits au Centre interdisciplinaire (IDC) de Herzliya. Il a précédemment travaillé dans l’équipe des affaires gouvernementales et du Congrès au Center for Strategic and International Studies (CSIS) à Washington, DC, et a été stagiaire à la Commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants des États-Unis.

    The Nation interest, 24 mai 2021

    Etiquettes : Etats-Unis, Israël, Palestine, Ghaza, Hamas, Maroc, Emirats Arabes Unis, EAU, Bahreïn, Soudan, normalisation, Joe Biden, Donald Trump,

  • Maroc : El Othmani félicite Hamas pour sa « victoire » (presse israélienne)

    Le Premier ministre marocain félicite le Hamas pour sa « victoire » sur Israël lors des récents combats.

    Saad-Eddine El Othmani, dont le pays a normalisé ses relations avec Israël, envoie une lettre au chef du groupe terroriste Ismail Haniyeh pour le féliciter de sa « résistance suprême » contre « l’entité sioniste ».

    Le premier ministre du Maroc, un pays qui a normalisé ses liens avec Israël l’année dernière, aurait envoyé un message personnel au chef du groupe terroriste Hamas pour le féliciter de sa « victoire » sur « l’entité sioniste » lors des récents combats entre Israël et la bande de Gaza.

    Selon le site d’information Ynet, le Premier ministre Saad-Eddine El Othmani a envoyé samedi une lettre au chef du Hamas, Ismail Haniyeh, dans laquelle il lui adresse ses « plus chaleureuses félicitations » pour « la victoire remportée par le peuple palestinien et la résistance suprême après l’accord de cessez-le-feu entre les factions de la résistance et l’entité sioniste ».

    Le Maroc est devenu le troisième État arabe à normaliser ses liens avec Israël en 2020 dans le cadre d’accords négociés par les États-Unis, rejoignant ainsi les Émirats arabes unis et Bahreïn. En retour, le président américain de l’époque, Donald Trump, a rempli un objectif vieux de plusieurs décennies du Maroc en soutenant sa souveraineté contestée au Sahara occidental, que Rabat appelle ses « provinces du sud. »

    Israël et le Maroc prévoient d’établir des ambassades complètes dans leurs pays respectifs à l’avenir.

    Après 11 jours de combats, Israël et le Hamas ont accepté, par l’intermédiaire de médiateurs égyptiens, un cessez-le-feu qui a débuté vendredi à 2 heures du matin.

    Pendant le conflit, le Hamas et d’autres groupes terroristes ont tiré plus de 4 300 roquettes sur Israël, tandis que les FDI ont répondu par des centaines de frappes aériennes contre des cibles terroristes à Gaza.

    Selon le ministère de la santé de Gaza, dirigé par le Hamas, au moins 243 Palestiniens ont été tués, dont 66 enfants et adolescents, et 1 910 personnes ont été blessées. Il ne fait pas de distinction entre les membres des groupes terroristes et les civils. L’armée israélienne affirme que certaines des victimes de Gaza ont été causées par les roquettes des groupes terroristes qui ont manqué leur cible et ont atterri à l’intérieur de Gaza.

    Douze personnes ont été tuées en Israël, toutes sauf une, des civils, dont un garçon de 5 ans et une fille de 16 ans.

    Les combats ont commencé le 10 mai, lorsque des terroristes du Hamas à Gaza ont tiré des roquettes à longue portée en direction de Jérusalem. Les groupes terroristes palestiniens ont établi un lien entre les tirs de roquettes depuis Gaza et les troubles à Jérusalem liés aux prières sur le Mont du Temple pendant le mois sacré musulman du Ramadan et à l’expulsion imminente d’un certain nombre de familles palestiniennes du quartier de Sheikh Jarrah.

    The Times of Israel, 24 mai 2021

    Etiquettes : Israël, Palestine, Hamas, Ghaza, Maroc, Saadeddine El Othmani,

  • Le défi des accords d’Abraham

    RODGER SHANAHAN

    Les pays qui ont normalisé leurs relations avec Israël ont toujours eu à faire avec la question palestinienne.

    Pour les pays parties aux accords dits d’Abraham – la série d’accords diplomatiques qui ont normalisé les relations entre Israël et les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Soudan et le Maroc et qui ont été très applaudis par l’administration Trump – la dernière flambée de violence entre Israël et les Palestiniens a posé un défi difficile. L’élément manquant de la bonhomie bilatérale qui a résulté au cours de l’année écoulée d’un échange d’ambassadeurs et de promesses de potentiel économique a toujours été la question palestinienne.

    Des manifestations ont éclaté au Maroc pour soutenir les Palestiniens et condamner l’accord de normalisation des relations. Des rapports font état de manifestations au Bahreïn et aux Émirats arabes unis, ainsi que d’une réaction en ligne. Le Soudan a cherché à défendre sa décision, déclarant que sa reconnaissance d’Israël n’avait « rien à voir avec le droit des Palestiniens à créer leur propre État ».

    En septembre de l’année dernière, lorsque les Émirats arabes unis sont devenus le premier État du Golfe à signer un accord de normalisation avec Israël, ils ont cherché à apaiser tout sentiment de malaise à l’idée d’être dépeints comme le pays rompant la solidarité arabe sur le soutien à la cause palestinienne en affirmant que leur décision avait mis un terme à la menace du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu d’annexer le territoire palestinien. Mais il s’agissait d’une portée. Il a toujours été peu probable que Netanyahu mette une telle menace à exécution, même au moment où il bénéficiait du soutien ardent de la famille Trump à la Maison Blanche.

    Ainsi, les tensions plus profondes dans la région concernant la voie empruntée par les pays signataires de l’accord d’Abraham se sont manifestées à travers la couverture médiatique des combats actuels. Al Jazeera du Qatar, par exemple, a publié des articles d’opinion très critiques à l’égard des accords d’Abraham à la lumière des événements actuels, tout comme TRT World d’Ankara.

    Le ministre turc des affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a été encore plus virulent lors d’une réunion de l’Organisation de la coopération islamique, accusant les pays signataires de l’accord d’Abraham d’avoir « perdu leur boussole morale » et de porter atteinte à la solidarité régionale. « S’il y a des déclarations tièdes au sein de notre propre famille », a déclaré Cavusoglu, « comment pourrions-nous critiquer les autres ? Qui prendra nos paroles au sérieux ? »

    Pour leur part, les Émirats arabes unis ont navigué dans la politique en raison de l’importance accordée à Gaza. Les Émirats arabes unis considèrent l’islam politique, qu’il s’agisse du Hamas, qui maintient son contrôle sur Gaza, ou d’autres groupes tels que les Frères musulmans, comme une menace existentielle. Et Gaza en tant que lieu ne suscite pas la même réaction émotionnelle dans les populations arabes que Jérusalem et la Cisjordanie.

    Mais les scènes de manifestations en Cisjordanie et de forces de sécurité israéliennes à l’intérieur de la mosquée al-Aqsa ont été beaucoup plus problématiques pour les signataires de l’accord d’Abraham.

    Les Émirats arabes unis se sont joints à la critique d’Israël sous les auspices de la Ligue arabe et de l’Organisation de la coopération islamique, mais ils ont été accusés, avec d’autres, d’être lents à réagir. Une interview de l’ambassadeur émirati nouvellement nommé après son arrivée récente en Israël a été mal lue quelques jours seulement après sa publication.

    Les pays qui ont signé les accords d’Abraham ont toujours eu à faire face à la question palestinienne, même s’ils ne pensaient pas que cela se produirait aussi rapidement. Si l’accent mis sur Gaza et le Hamas dans les combats actuels a permis à des pays comme les Émirats arabes unis, le Maroc et le Bahreïn de surmonter l’épidémie actuelle sans troubles intérieurs importants, les conflits futurs pourraient être plus difficiles sur le plan politique. Et cela peut également dépendre de la durée du cessez-le-feu promis.

    Plus le conflit se déplacera au-delà de Gaza, plus les dirigeants arabes devront probablement payer un prix élevé sur le plan politique. Et il est peu probable que le Hamas, ses partisans ou les Palestiniens en général n’aient pas compris cette leçon. Les graines d’un combat plus important à l’avenir ont peut-être été semées au cours de ce conflit actuel.

    The Interpreter, 21 mai 2021

    Etiquettes : Etats-Unis, Israël, pays arabes, normalisation, Maroc, Emirats Arabes Unis, EAU, Soudan, Bahreïn, Palestine, Ghaza, Hamas,

  • Quel a été le résultat de la dernière guerre de Gaza ?

    JERUSALEM (AP) – Un cessez-le-feu est entré en vigueur vendredi après 11 jours de violents combats entre Israël et le Hamas, le parti militant de Gaza, qui ont été déclenchés par des manifestations et des affrontements à Jérusalem.

    Israël a mené des centaines de frappes aériennes contre ce qu’il a qualifié de cibles militantes dans la bande de Gaza, détruisant des maisons et endommageant des infrastructures vitales dans ce territoire appauvri, soumis à un blocus paralysant depuis que le Hamas y a pris le pouvoir il y a 14 ans.

    Les militants palestiniens, quant à eux, ont tiré plus de 4 000 roquettes sur Israël, dont certaines ont atteint Tel Aviv, paralysant ainsi certaines parties du pays.

    Au moins 243 Palestiniens ont été tués, dont 66 enfants et 39 femmes, et 1 910 personnes ont été blessées, selon le ministère de la Santé de Gaza. Douze personnes en Israël, dont un garçon de 5 ans et une fille de 16 ans, ont été tuées.

    Voici un aperçu de la suite des événements :

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    UNE AUTRE IMPASSE

    Les Palestiniens de Gaza, de Jérusalem-Est et de la Cisjordanie occupée ont célébré ce que beaucoup considèrent comme une victoire du Hamas contre un Israël beaucoup plus puissant. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a quant à lui été confronté aux critiques de sa base faucon, beaucoup l’accusant de mettre fin prématurément à la guerre sans avoir vaincu le Hamas.

    M. Netanyahu a déclaré qu’Israël avait infligé des dommages importants aux capacités militaires du Hamas, tuant 200 militants, dont 25 commandants supérieurs. Il affirme avoir frappé plus de 100 kilomètres de tunnels militants, ainsi que des lance-roquettes et d’autres infrastructures militaires.

    Mais Israël n’a jamais réussi à arrêter les tirs de roquettes.

    Les militants palestiniens ont lancé des barrages massifs de roquettes qui semblaient parfois avoir raison des formidables défenses aériennes d’Israël. L’armée israélienne affirme avoir eu un taux d’interception de 90 % et que des centaines de roquettes sont tombées sur Gaza, l’une d’entre elles ayant tué une famille palestinienne de huit personnes.

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    UNE AUTRE TRÊVE FRAGILE

    Comme lors des trois dernières guerres, les combats ont pris fin par un cessez-le-feu informel négocié par l’Égypte et d’autres médiateurs, dont les termes exacts n’ont pas été rendus publics.

    Le Hamas a affirmé qu’Israël avait accepté de mettre fin aux opérations de police dans l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, qui constitue un point chaud, et à la menace d’expulsion de familles palestiniennes du quartier voisin de Sheikh Jarrah. Ces deux mesures avaient déclenché des protestations palestiniennes et des affrontements avec la police qui ont fini par déclencher la guerre. Mais il n’y a eu aucune confirmation de la part d’Israël ou des médiateurs.

    Les cessez-le-feu précédents ont permis de mettre fin à des combats importants, mais se sont avérés fragiles. Israël et le Hamas se sont livrés quatre guerres et ont échangé des tirs à de nombreuses reprises depuis que le groupe militant islamique a pris le contrôle de Gaza aux forces loyales à l’Autorité palestinienne en 2007. Des affrontements épars à Al-Aqsa après la prière du vendredi ont constitué un premier test de la durabilité de la trêve.

    Aucun cessez-le-feu n’a permis de résoudre les problèmes sous-jacents qui alimentent ce conflit vieux de plusieurs décennies, notamment l’occupation par Israël de terres que les Palestiniens souhaitent voir se constituer en un futur État et le refus du Hamas de reconnaître le droit d’Israël à exister. Israël et les Palestiniens n’ont pas tenu de pourparlers de paix substantiels depuis plus de dix ans.

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    UNE AUTRE ÉLECTION ISRAÉLIENNE ?

    Les adversaires politiques de Netanyahou étaient sur le point de former un gouvernement et de l’évincer après quatre élections non concluantes en deux ans. Mais les délicates négociations de coalition avec les partis arabes ont été suspendues lorsque les combats ont éclaté.

    La guerre a d’abord semblé renforcer les perspectives politiques de Netanyahou, lui permettant de se présenter comme un dirigeant dur qui punissait les ennemis du pays. Mais depuis que le cessez-le-feu est entré en vigueur, il a dû faire face à de nouvelles critiques.

    Il n’a jamais été évident que les adversaires de M. Netanyahou, qui couvrent l’ensemble de l’échiquier politique – de ses anciens alliés de droite aux partis arabes – seraient capables de mettre de côté leurs différences pour le pousser hors du pouvoir. Une autre élection plus tard dans l’année est une possibilité distincte.

    Ces dernières années, les Israéliens se sont profondément polarisés sur Netanyahou, qui a dû faire face à des allégations de corruption pour lesquelles il est actuellement jugé. Dans les mois qui ont précédé la guerre, des militants avaient organisé des manifestations hebdomadaires devant sa résidence. Ces manifestations vont maintenant reprendre.

    UNE AUTRE INTERVENTION AMÉRICAINE

    L’administration Biden, qui espérait sortir les États-Unis des conflits insolubles de la région pour se concentrer sur la montée en puissance de la Chine et le changement climatique, a été prise au dépourvu et a été entraînée à nouveau dans le rôle décourageant de médiateur du Moyen-Orient.

    Dès le début de la dernière guerre, les États-Unis ont affirmé à plusieurs reprises le droit d’Israël à se défendre tout en encourageant discrètement les efforts de cessez-le-feu. Mercredi, cependant, le président Joe Biden a dit à Netanyahu qu’il voulait voir une « désescalade significative ».

    M. Netanyahu a d’abord semblé le balayer d’un revers de main, se disant « déterminé à poursuivre » l’offensive jusqu’à ce que ses objectifs soient atteints. Mais il a accepté le cessez-le-feu le jour suivant.

    Cet échange a marqué un premier test de la relation entre les deux dirigeants, qui ont connu des moments de tension au fil des ans. Entre-temps, Biden est confronté à la pression intérieure d’une base démocrate qui sympathise de plus en plus avec les Palestiniens.

    Le secrétaire d’État américain Antony Blinken prévoit de se rendre dans la région dans les prochains jours.

    Associated Press, 21 mai 2021

    Etiquettes : Palestine, Ghaza, Israël, Hamas, bombardements, violence, résistance,

  • A la recherche de l’homme aux neuf vies

    Mohamed Habili

    Il ne suffit pas d’entrer en guerre, il faudrait encore savoir comment et à quel moment en sortir, de façon à en paraître le vainqueur, d’autant plus si la victoire ne se décide pour aucun des deux camps. La guerre de 2014 entre le Hamas et Israël avait duré près de deux mois, et fait bien plus de morts et de blessés – pour la plupart bien sûr parmi les Palestiniens, autrement Israël ne serait pas rassuré sur son avenir – que celle qui est en cours, mais qui, il est vrai, n’a pas encore bouclé sa deuxième semaine. On pourrait penser au vu de cette différence en termes de bilan et de durée que celle d’aujourd’hui a encore de la marge devant elle, que n’étant qu’à ses débuts, elle a encore forcément du temps avant de devoir attribuer la victoire. Et l’on se tromperait, n’ayant pas suffisamment tenu compte du fait que les deux guerres n’interviennent pas dans un contexte qui lui serait resté le même. Un jour des affrontements actuels compte pour plusieurs de ceux de 2014. Cela tient à quelque chose qui ne doit rien aux Israéliens ni aux Palestiniens, mais en revanche tout aux évolutions politiques survenues aux Etats-Unis, la première puissance militaire au monde, sans l’aide inconditionnelle de laquelle Israël aurait soit déjà cessé d’exister soit en grand danger de disparaître.

    De 2014 à aujourd’hui, les Etats-Unis ont connu une sorte de révolution, même si leur paysage politique semble être resté le même. Il y a toujours en effet d’un côté les républicains et de l’autre les démocrates pour à la fois alterner au pouvoir et se le partager. Mais ce ne sont pas exactement les mêmes formations que par le passé. Elles ont changé, ou plus exactement elles se sont davantage polarisées, s’éloignant le plus possible l’une de l’autre sans devoir pour autant basculer dans la guerre civile. Le premier effet en est qu’au sein des démocrates les pro-palestiniens, et il en existe de toute origine, de descendance arabe et juive notamment, qui se sentent suffisamment forts pour interpeller le président Biden sur sa politique de soutien traditionnel à Israël, que celui-ci soit dans son droit ou dans son tort.

    Cela n’était pas possible en 2014, alors même que le président de l’époque, Barack Obama, n’était pas dans les meilleurs termes avec le gouvernement israélien, qui lui par contre est toujours dirigé par le même Benyamin Netanyahou. Le grand changement, en vertu duquel les moins de deux semaines des affrontements actuels paraissent déjà démesurément longs, est donc américain. C’est le retour au pouvoir des démocrates, après la parenthèse Trump, mais de démocrates dans les rangs desquels le ton est donné par la gauche, chose qui ne leur est pas arrivée depuis des décennies.

    Dans ce contexte, les camps en guerre se doutent bien qu’ils doivent remporter la victoire, ou seulement la revendiquer de façon plus ou moins crédible, dans les deux ou trois jours qui viennent, guère plus. Israël, lui en particulier, serait obligé de consentir à l’arrêt des hostilités sous la pression américaine sans avoir pour cela à crier victoire. On sait quel visage, quel goût, quelle incarnation, il veut qu’elle ait pour lui cette fois-ci. Par deux fois au cours de ces derniers jours l’homme qu’elle veut tant assassiner lui a échappé, et de peu à ce qu’il semble. C’est Mohammed Deif, le chef de la branche armée du Hamas, Izz al-Din al-Quassam, qu’elle a tant de fois raté qu’il est surnommé «le chat aux neuf vies». Israël serait capable d’annoncer unilatéralement un cessez-le-feu s’il pouvait venir à bout de lui. Et pour cause, sa victoire ne serait pas dans ce cas contestable.

    Le Jour d’Algérie, 19 mai 2021

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