Étiquette : islamophobie

  • LFI : L’instrumentalisation de la mort de Samuel Paty à des fins politiques est indigne et abject.

    Chèr⋅e insoumis⋅e,

    Cette semaine a été ébranlée par l’assassinat de Samuel Paty, enseignant tué par un terroriste islamiste. Depuis, La France insoumise a fait l’objet de plusieurs attaques par des éditorialistes et des ministres macronistes qui tentent de nous imputer une responsabilité dans cet assassinat. Nous ferions preuve de « complicité intellectuelle » avec le terrorisme ! Nous aurions du sang sur les mains.

    Ces personnes instrumentalisent la mort de Samuel Paty à des fins politiques. C’est indigne et abject. Dans ces moments, notre devoir républicain est de faire preuve d’unité, comme l’a rappelé Adrien Quatennens sur France 2 : nous diviser, c’est rendre service aux terroristes islamistes et à l’extrême droite.

    Nous ne devons pas avoir honte de nos positions. Nous avons toujours proposé des solutions sérieuses pour vaincre le terrorisme islamiste et ne nous sommes jamais, nous, compromis avec les chefs de dictatures religieuses. À ceux qui veulent diviser les Français·es, nous répondons que nous serons toujours, dans toutes les occasions, les défenseurs du droit de croire ou ne pas croire, de la liberté d’expression, de la liberté de conscience.Vous nous trouverez toujours dans la cohérence. Car nous les insoumis·es nous refusons de trier. Nous refuserons toujours la haine et les tentatives de division du pays. Trier et diviser c’est l’agenda des terroristes et de l’extrême droite.

    Dans sa dernière note de blog, Jean-Luc Mélenchon est revenu sur cette semaine noire où toute la scène médiatico-politique a été emportée par l’extrême droite en quelques jours et où nous avons été accusé de tous les maux.


    Source : Avec Marx, 24 oct 2020

    Tags : Samuel Paty, La France Insoumise, extrême droite, Islam, islamophobie, racisme,

  • Maroc: Sur Twitter, un hashtag appelle au boycott des produits français

    Selon le site Middle East Monitor, les marocains ont adhéré à la campagne de boycott des produits français suite à la publications de caricatures illustrant le prophète Muhammad sur les murs d’immeubles français.

    La campagne a débuté sur les réseaux sociaux avec le hachtag #BoycottFrenchProducts « en réponse aux caricatures et à la suite des déclarations du président français Emmanuel Macron, qui ont suscité l’émoi des musulmans du monde entier ».

    Sur Twitter et Facebook, les photos de profil des utilisateurs ont été changés par « la bannière «Muhammad le messager d’Allah», en rejet des déclarations des responsables français », indique MEMO.

    Rania Lamlahi a tweeté: «En tant que Marocaine, je n’accepte pas la façon dont le président français se comporte envers l’Islam, alors je soutiens la campagne de boycott des produits français.»

    À son tour, l’activiste Siham Sark a critiqué dans un tweet la façon dont Macron a traité la question des caricatures offensives: «Malgré son allégation selon laquelle la France est un pays qui garantit les libertés.»

    Quant à Jalal Aouita, il a posté sur Facebook: «Il n’y a pas de différence entre la France d’autrefois et la France d’aujourd’hui sauf pour les tendances maquillage et les veilleuses de Paris. La même haine, la même discrimination, la même intimidation, les mêmes mentalités.

    Aouita a ajouté: «J’ai volontairement publié les caricatures pour que tout le monde prenne conscience de la rancune des décideurs français contre l’islam.»

    Dans un post Facebook, le consultant de la municipalité de Rabat, Hisham El-Harch, a déclaré: «C’est un triste jour dans l’histoire des musulmans, un triste jour dans le vrai sens du terme. La France est-elle devenue folle?

    El-Harch a ajouté: « Les caricatures publiées par le magazine français Charlie Hebdo visant le Messager d’Allah sont affichées sur les murs de certains hôtels de Toulouse et Montpellier en France, après que le président français a annoncé qu’il n’interdirait pas ces publications abusives. »

    La France a récemment été témoin d’une polémique sur les déclarations de politiciens français visant l’Islam et les musulmans, suite à la décapitation d’un enseignant le 16 octobre.

    « Ces derniers jours, les raids contre les organisations de la société civile islamique en France se sont multipliés suite à l’attaque. Mercredi, Macron a annoncé dans un communiqué de presse que son pays n’interdirait pas les caricatures insultant le prophète Mahomet et l’islam », conclue la mème source.

    Tags : Maroc, France, caricatures, Samuel Paty, prophète, Islam, Islamisme, terrorisme, amalgame, islamophobie, Charlie Hebdo,

  • « Une violente et cruelle histoire d’amour … »

    « El erss khayeb, l’basstela kane’t berda » : « La fête de mariage était nulle, la pastella était froide ».

    Voilà la première phrase qui m’est venue à l’esprit en entamant ce post … Allez savoir pourquoi ?

    Ce que je retiens pour l’heure des tueries dans la rédaction de Charlie Hebdo et du supermarché casher et que ma colère et ma tristesse peuvent commencer à entrevoir, se précise dans ce tourbillon où viennent se mêler passion, affecte et « déraison »… Comme une violente et cruelle histoire d’amour…

    Amour des mots, de la satire, de la liberté et de la folie.

    « Je préfère mourir debout que vivre à genoux »

    Charb

    Le poids des religions, de toutes les religions ça n’existait pas il y a 20 ans.

    On est là pour ça, même si on traite de choses graves, il faut faire rire, c’est notre fonction.

    Cabu

    Un jour je vais faire des dessins sur le sexe, le lendemain je vais faire un dessin su F.Hollande, mais parfois le dessin sur le sexe peut être sur Hollande aussi, il nous a donné des exemples.

    Wolinski

    Waw, c’est maintenant que vous n’êtes plus que je vous découvre.

    Certaines analyses à chaud d’internautes en mal d’inspiration, voient derrière cette tragédie l’occasion de régler des pathos identitaires, si lourdement justifiés, vous ne trouvez pas ?

    Ils crient souvent à l’insoutenable et sempiternel sentiment de justification « imposé », du sentiment d’obligation d’une prise de position « si attendue ».

    Un fraternel message à cette majorité silencieuse indignée, qu’elle descende dans les rues, qu’elle envahisse l’espace public, l’heure est à la condamnation, l’heure est à la symbolique. Si cet espace reste vide, il sera envahi par des porte-voix autoproclamés.

    Avec ceci comme slogan par exemple :

    Au nom d’Allah et de son Prophète on a tué ici, comme on le fait au nom de la démocratie là-bas !

    Ces mots pèseront pour certains comme une attaque au bélier devant la porte du silence !

    D’autres préfèrent jouer avec des notions complexes, plutôt que de condamner sans ambivalence.

    Ceux qui craignent les amalgames peuvent être rassurés, ils existent depuis bien longtemps. Le manque de clarté ne fera que les renforcer.

    Aujourd’hui, moi, je me sens le devoir de me prononcer, mais personne ne m’oblige…

    Le sens des mots dans de pareilles circonstances a une importance capitale.

    De plus, je refuse toutes formes de prise d’otage et de braquage intellectuel, au nom d’un certain appel au consensus dans un camp comme dans l’autre.

    Zmagri, moi le zmagri, parti depuis un petit temps en croisade identitaire, victime d’un racisme occidental comme d’un racisme oriental, je vous la laisse votre terre sacrée que vous choisirez et je vous emmerde tous !

    Laissez-moi pleurer en paix, laissez-moi le droit de pleurer qui je veux en liberté.

    Au-delà des individus qu’était cette bande de potes, je pleure aujourd’hui ce qu’ils représentaient. Une voix discordante à l’ordre établi et à la « bonne conscience ».

    Je n’en étais même pas un lecteur, mais je me retrouve dans la notion de défenseur de la liberté qu’ils insufflaient.

    Aujourd’hui, nos têtes bien pensantes au gré de leurs humeurs distribuent ou confisquent des attestations de liberté d’expression à qui bon leur semble.

    Cela dénote d’un manque de maturité et d’iniquité flagrante !

    Complot or not complot … ?

    Pleurer Charlie, c’est comme souhaiter Joyeux Noël, c’est haram … !

    Hein ????
    Cela va du complexe militaro-industriel aux illuminatis en passant par les sionistes … Les médias nous mentent et sont cadenassés, la carte d’identité retrouvée dans le véhicule, l’employé caché dans un carton à Dammartin-en–Goële, la couleur des rétroviseurs qui mue, l’absence de sang sur le trottoir …

    Le complot fait office de foi, il explique tout, mais ne résout rien, servant de camouflet par moment. Je l’ai pratiqué et en suis revenu depuis.

    Et de lire et entendre aussi :

    Ils l’ont bien mérité, tu as vu ce qu’ils ont fait en Syrie et en Palestine …

    Hein ??
    Les adeptes des théories multifonctions ne font que réconforter leurs préjugés et leurs thèses sont même considérées pour certains, comme des écrits immuables, voire sacrés qu’ils répètent liturgiquement, en se gardant bien le droit de pratiquer toutes formes de remise en question …

    Ces théories sortent souvent de la bouche de ceux qui croient venir à bout des crimes commis par l’Etat d’Israël en arrêtant de manger des kiwis.( je précise LOL)

    Why not … Tout le monde a le droit d’avoir un avis, tout le monde a aussi le droit de dessiner en paix !

    -« Au nom d’Allah on tue aussi sur cette terre, il serait plus que temps de l’avouer … »

    -Moi j’ai juste envie de pleurer des grands rêveurs qui jouent avec des Magic Colors.

    Il y aura un après 7 janvier, souhaitons le plus humain que l’après-11- Septembre.

    -Moi je veux juste les pleurer …

    « Pour énerver les cons aussi on est manifestement utile, donc c’est agréable … ».

    Tignous

    Les manifestations ont été phénoménales avec évidemment des bémols et selon moi la triste palme revient au Maroc.

    Et l’attitude du ministre marocain des Affaires étrangères, Salahedinne Mezouar, qui s’est rendu à Paris, mais n’a pas participé à la marche prétextant qu’il y aurait des caricatures du prophète …

    Hein ??
    Toutefois, il est excusé, qu’attendre de plus d’une classe politique qui est encore selon la théorie freudienne au « stade anal ». Faites déjà bien caca les gars, bientôt vous pourrez vous tenir la bite tout seuls!

    Ensuite cette polémique sur certains représentants : Netanyahu aura fait parler de lui, une telle attitude, ça vous surprend ? cette arrogance est le propre des sans vergogne !

    Ils en auraient fait une superbe couverture satirique les gars de Charlie Hebdo …

    Et que dire des représentants de l’Arabie saoudite présents à Paris, alors qu’ au même moment était fouetté sur la place publique à Jeddah, le blogueur saoudien Raif Badawi …

    Et bien d’autres qui sans scrupule pointèrent leur gueule en front de manifestation, c’est juste dégueulasse… C’est dégueulasse !!!!

    Le clivage entre les « Je suis Charlie » et les « Je ne suis pas Charlie ».

    Il n’est guère étonnant celui-là.

    Pour ce qui est de notre cher royaume surréaliste, il est même logique.

    Nous restons encore en 2015 un pays communautariste, pour le vivre ensemble, on repassera aussi !

    Il pourrait trouver une partie de son explication dans la manière dont a été gérée l’immigration maghrébine et turque en Belgique.

    Dans la manière dont a été géré le culte musulman en Belgique …

    Vous me suivez toujours ?

    Avec dans les premières années, un entrisme édifiant du plus obscur et rétrograde des courants qui soient, made in Arabie saoudite : le wahhabisme.

    -L’argent n’a pas d’odeur… C’est des conneries ça… L’argent a une odeur et dans le cas qui nous préoccupe ici, une vilaine odeur de fuel !!

    Chère Belgique tu as été très gourmande en Afrique et ça ne t’a pas suffit, ton inquiétante naïveté et ta vanité t’ont poussé à faire des choses pas très catholiques !

    Et bien évidemment une connerie ne vient jamais seule. Des années plus tard, ce fut les partis politiques qui voyant un potentiel électoral significatif se sont lavés de tout principe séculier dans certaines de leurs opérations de séduction visant ces électeurs-là !

    Les espaces culturels, déjà maigres, se sont vus très vite dépassés par une multitude de mosquées qui pour certaines ont servi de lieu de propagande de courants tantôt anodins tantôt plus inquiétants.

    Enfin les stratégies de quadrillage des pays d’origine, Ankara et Rabat veulent faire partie du festin.

    Contrôler et cogérer voir gérer complètement l’obédience spirituelle de leur diaspora respective. Et nous savons tous que ces deux pays sont loin d’être des Etats de droit, de liberté d’expression et de libertés individuelles.

    Ils ont tous bossé en toute tranquillité depuis des décennies et aujourd’hui ils récoltent.

    Une politique non réfléchie sur des enjeux cruciaux se paie un jour ou l’autre

    Me voilà donc baisé, et tellement bien que je finis par y prendre plaisir.

    A chacune de mes positions, chacun de mes choix, mes identités me rappellent à l’ordre, l’une me trouvant trop flou m’invitant continuellement à lui présenter des gages de loyauté , l’autre jouant avec mon affect d’un attachement à des racines qu’elle m’octroie par moments et me confisque à d’autres.

    – « Aujourd’hui, il n’y a pas que les travestis prostitués du quartier « Yser » qui se lèvent en ayant mal au cul ! »

    Sauf que moi je ne veux plus de ça moi , je ne l’ai pas choisi ! Je veux être libre, comme le vent, me défaire de tout attachement communautariste et chérir moi-même mes identités , en les façonnant comme bon il me semble .

    « Je suis Charlie » au nom de l’esprit de liberté qu’insufflait cette presse, je le suis ne veut pas dire que j’en étais féru. Je le suis, car c’est nécessaire pour les personnes qui cultivent la liberté de pensée, d’expression et d’écriture.

    Il est nécessaire aussi, car derrière ce canard volontairement provocateur, irrévérencieux à souhait, brisant les limites de la bienséance et des « bonnes consciences », se trouve un refuge pour les bousculeurs… pour les affranchis. Et leur place est indispensable dans nos sociétés.

    Que nos gouvernants agissent en cohérence lorsqu’il s’agit de liberté d’expression.

    LA LIBERTE D’EXPRESSION EST PLEINE ET ACCESSIBLE POUR TOUS !!!!!

    Bordel de merde !!!!!

    Une manifestation à Bruxelles

    Lors de la manifestation à Bruxelles, je suis passé chez ma mère qui depuis le décès de mon père est morte aussi et que la télévision marocaine est en train de tuer une 2e fois.

    Mais dans un sursaut de lucidité, elle m’a dit :

    « Allah y Baadek min oulad el haram »

    -Que Dieu te tienne éloigné des “personnes indignes ».

    De qui parlait-elle ?

    Finalement, c’est ma sœur qui m’accompagna avec ses deux enfants. Près de 20 000 personnes dans les rues de la capitale, une très faible présence de la « communauté musulmane » s’il y a lieu de la nommer ainsi, comme le fait une grande majorité de la presse.

    Une chose est vraie, cette faible affluence est un signal pour la citoyenneté qu’il faudra avoir le courage d’analyser !

    Crispation justifiée ?

    Oui , oui et re-oui !

    C’est l’expression d’un malaise et d’ un mal-être qui ankylosent cette volonté de solidarité

    Il serait temps que ces anthropologues et que cette élite belge se penchent sérieusement là-dessus !

    Oui, les Belges d’origine turque et maghrébine sont mal aimés, ils sont mis au ban de la société, ils sont pointés du doigt quotidiennement !

    Oui, ils sont assignés à vivre l’ émancipation dans quartiers et écoles ghettos !

    Oui, on ne peut pas s’ouvrir aux autres si on ne s’est pas encore révélé à soi-même !

    Oui, ça crie à l’aide depuis des décennies. Personne ne l’entend vraiment !

    Oui, ça a payé, ça paie et paiera probablement encore !

    Oui, ça vit dans l’indifférence de sa différence sans qu’elle ne soit jamais valorisée, comme cet enfant né par accident à qui on a reproché « d’être » toute sa vie et qui réclame juste un peu d’amour …

    Cet amour… De cet amour absent et tant recherché, cette reconnaissance sincère « d’être » qui poussa peut-être deux frères dans cette escalade de la folie .

    Deux frères qui se sont aimés dans un schéma dénué d’humanité.

    Cela pourra en choquer plus d’un ce que j’écris là, j’en suis conscient… Mais tout ça, ça sent juste le manque d’amour.

    Conclusion facile me diront certains, peut-être …

    Non, à dire vrai il n’y a pas de conclusion.

    Et s’il devait y en avoir une pour moi, elle ressemblerait à ça :

    Je pleure ces grands rêveurs qui dessinent avec des Magic colors, je pleure Ahmed et toutes les autres victimes, je pleure pour la liberté, je pleure pour le musulman, je pleure pour le juif, je pleure pour l’athée , je pleure pour le chrétien, je pleure pour l’humanité …

    J’ai déjà moins mal au cul aujourd’hui, mais je mesure avec effroi la profondeur de l’enculade !

    En hommage à Charlie et à tous ceux qui sont tombés.

    Reposez en paix …

    Zmagri

    Source : Zmagri déliquescent, 14 janv 2015

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  • Foi et liberté, les feux de l’amour

    par Chaalal Mourad

    « Plus qu’une croyance, la liberté est devenue pour certains une sorte de religion qui a forgé ses propres dogmes, bâti ses propres temples et enrôlér ses propres Templiers. Bien que le sacré chez les uns ne le soit pas chez les autres, il n’en demeure pas moins que la liberté est définie, elle aussi, d’une façon disparate. Ces caricatures répétitives s’adressent-elles uniquement aux musulmans de France ou à ceux du monde entier ? Ces derniers, qui ne cessent de revendiquer chez eux la liberté d’expression au prix de leur vie, sont choqués par cette liberté d’expression made in France qui se donne même le luxe de passer en dérision des sujets sacrés. Ceux qui s’obstinent donc à opposer leur Liberté à la Foi et au Sacré des autres, ne cherchaient-ils pas finalement l’arbitrage du terrorisme pour des raisons obscures ? » disent certains.

    Bien que la liberté soit le présent de Dieu le plus onéreux légué aux hommes dotés de raison, les templiers de la liberté des temps modernes soutiennent, que nous ne serions jamais plus libres, que lorsque nous nous libérerons définitivement de Dieu et de la foi. Le débat sur la place de la liberté et de la foi dans l’espace public dépasse celui de la liberté dans la foi, définitivement tranchée par un principe fondamental de toute religion qui se respecte, celui de la liberté de conscience, qui s’est fait réapproprier par la laïcité moderne laquelle, n’a finalement, fait que bonne lecture de l’esprit saint de la religion.

    Depuis 1789, la laïcité française n’a pas encore soldé tous ses comptes avec la religion. Bien que le débat sur la raison et la foi et par ricochet sur la foi et la liberté ait été et pour longtemps, un débat islamo-islamique avec Al-Fârâbî, les Mutazilites et Averroès puis avec les autres géants de la pensée Juive et Chrétienne : Moïse Maïmonide et Saint Thomas d’Aquin.

    En réalité, la liberté n’a jamais été en rapport antagonique avec la foi, bien au contraire, elle est le seul chemin qui mène vers la vérité et vers Dieu. Quel est donc ce Dieu en déficit d’âmes, qui accepte que l’on lui rabatte des croyants, hauts-les mains et kalachnikovs pointées dans le dos ? Un vrai Dieu, ne devra pas craindre la liberté, pas plus qu’une vraie liberté ne devra craindre la foi, au point de la soumettre sans cesse à des taquineries laïques pour susciter une réaction.

    À cause du sang qui a coulé au nom de Dieu, la foi n’a plus la cote, en France surtout. Répudiée, elle est sans cesse tenaillée par le politique et les médias, alors que la liberté « sacralisée «, elle bénéficie d’une couverture des deux. En ces temps malheureux, où le terrorisme religieux a mis la foi dans le box des accusés, même Dieu s’est retrouvé dans la défensive. Personne n’osait venir la défendre publiquement, sans courir le risque d’être lui aussi, jeté dans le box des accusés.

    Il faut comprendre qu’en France, et depuis un demi-siècle, le conflit entre la foi catholique et l’État laïque était apaisé. À l’affrontement idéologique violent, qui durera du 18e siècle à 1937 pour le contrôle de l’école, a succédé une période de réconciliation, allant de 1945 à 2003. Dès lors, la laïcité allait de soi. Cependant, l’arrivée d’une importante population immigrée d’origine musulmane, la revendication du port du voile et le refus des cours d’éducation physique et de biologie par certains parents d’élèves, ajoutée à cela, les taquineries laïques de nature satirique contre leur religion et les actions terroristes qui s’en ont suivis, ont remis à jour la question de la « laïcité » et le débat sur la place de la liberté et de la foi dans l’espace public. La loi du 15 mars 2004 interdisant le port de signes religieux ostensibles dans l’enseignement public, a suscité de nombreuses controverses, aussi bien en France que dans le monde musulman.

    En soutenant donc qu’il n’y a pas plus sacré que la liberté, en taquinant sans cesse la foi y compris la leur, sans s’en soucier du sentiment de l’autre, les templiers de la liberté semblent franchir toutes les barrières de la retenue. Ces querelles contre-productives, ne servent finalement, ni la liberté ni la foi. Rien ni personne n’a le droit de justifier le terrorisme. Cependant, ces taquineries laïques, ne secouent-ils pas, encore plus qu’ils ne le sont déjà, des esprits secoués par le mal-vivre, l’absence chez eux, de justice, de libertés, de dignité humaine et surtout de culture, et où la religion y demeure la seule et l’unique consolatrice ?

    De l’autre, cet islam dont le discours virulent et anachronique, avec son hidjab, son niqab, sa burqa, sa bouffe halal, son séparatisme et la violence gratuite de certains de ses répondants, ne cesse-t-il lui aussi, d’étouffer les Français, d’imposer ses normes sociales et taquiner, à son tour, la république laïque ? Une république dans laquelle il vit, prospère et use de sa largesse de cœur ?.

    C’est parce que l’islam et la république laïque se connaissent trop bien, qu’ils ne cessent de se chamailler, disent certains. Malgré cela, chacun persiste à enseigner à l’autre ses fondamentaux. Cependant, et en l’absence de didactique, de pédagogie et de respect de l’autre, l’enseignement tourne au vinaigre et chacun reste réfractaire à ce que dit l’autre. Ça ne suffit pas d’être un érudit en quelque chose y compris dans l’exercice de la liberté pour prétendre l’enseigner à autrui, dit-on.

    C’est exactement ce qui se passe avec ces caricatures, qui au lieu de susciter un vrai débat au sujet de la liberté et de la foi, ô combien nécessaire et pertinent pour les deux parties et surtout, au gens de la foi ! Elles font écran à tout effort de réflexion et ne produisent que pincements aux cœurs chez une partie de leurs concitoyens, haine chez les autres et des réactions violentes et inacceptables chez certains radicaux.

    D’aucuns, assimilent ces caricatures à une moquerie de bourgeois et une taquinerie laïque de mauvais goût, à l’égard d’une partie du monde qui vit sous tension. Si ces gens devaient être libérés de quoi que ce soit, nous disent-ils, c’est de la stigmatisation, du dédain porté sans cesse à leur foi et à leur patrimoine culturel qui a tant donné au monde. Ces remparts psychologiques que dressent face à eux, le reflet distordu de l’image et de la peur de l’autre, forment une forteresse où se replient le radicalisme et la haine de l’autre.

    Si le terrorisme demeure la forme de haine religieuse la plus voyante, la plus violente et la plus ignoble; l’invective, le sarcasme médiatique répétitif contre des symboles religieux y compris les leurs, ne seraient-ils pas considéré aussi, comme une forme de haine religieuse light, exprimée à califourchon sur le droit à la liberté d’expression ?

    Heureusement, ces caricatures n’affectent qu’une infime catégorie bien ciblée d’individus, le gros des musulmans n’y prête même pas attention. Les musulmans, qui ont, eux aussi, de brillants artistes, pouvaient, s’ils le voulaient, répondre dessin contre dessin, mais leur système de croyances les empêche. Puisque pour eux, Jésus bénéfice du même statut religieux que leur prophète. En plus, ils risquaient de susciter une réaction encore plus vive chez une partie des chrétiens, très respectueux des autres religions et qui n’ont rien à voir dans cette querelle, imposée par des non-religieux, jugées» ultra laïcs», et risquer d’ouvrir un autre front de violence religieuse, plus vicieux encore.

    À l’instar de cette infime minorité, écervelés de musulmans, complètement disjonctés, qui enjambent la clôture de la raison et passent à l’acte terroriste répréhensible, ces satiristes ne souffrent-ils pas eux aussi, d’un trouble obsessionnel qui les pousse à taquiner sans cesse la religion ? Se sentent-ils, eux aussi, investis, d’une mission sacrée de «Djihad» pour la liberté ? Cet attitude purement Français, de confrontation permanente au fondamentalisme religieux, islamiste surtout, fut hissée au rang de dogme, dans l’exercice de la liberté d’expression made in France. La seule façon pour elle, d’affirmer son autorité médiatique sur son sol et d’élargir le cercle de ses libertés, contrariés par la présence même de l’islam sur son territoire.

    Afin de marquer son territoire de valeurs, réaffirmer et consolider l’ancrage sur son sol, de ce principe fondamental de liberté d’expression et susciter un débat, celle-ci a été poussée à des limites les plus extrêmes. Le risque terroriste qu’elle fait peser sur toute la profession était alors manifeste. Un grand courage, crient certains ! Une irresponsabilité et absence totale de pertinence médiatique, disent les autres.

    Cette énième attaque terroriste à Paris, perpétrée par un jeune pakistanais, dépossédé de son esprit et de sa raison, qui s’en est pris à coup de hachoir à deux pauvres journalistes de l’agence de presse Premières Lignes, non loin des anciens locaux de Charlie Hebdo, ce temple de la liberté d’expression made in France, en est la preuve. Dans cette confrontation, les victimes collatérales sont les musulmans de France qui doivent après chaque acte terroriste, se dédouaner sans ambiguïté de l’acte, se désolidariser des auteurs et se démarquer de l’esprit qui les anime. Ils se sentiront d’autant plus soulagés, que si parmi les victimes, se trouvaient d’autres musulmans, le sang mélangé, atténuera l’amalgame, la stigmatisation et l’islam bashing.

    Le débat sur la laïcité et le séparatisme islamiste en France, ne s’est-il pas alimenté de ces tristes évènements ? N’est-il pas l’un des sous-produits de cette confrontation déraisonnée et disproportionnée entre les templiers de la liberté et les djihadistes de la foi ? Tout cela, a imposé au politique le ton et la cadence du discours, au point de questionner la présence même de l’islam chez eux et les concessions que celui-ci est sommé de faire à la république laïque, s’il comptait encore vivre sur son sol, selon ses seules et propres lois et règles.

    Il se trompe donc celui qui pense que ce débat ne concerne que l’islam. La voracité libertaire des templiers de la liberté, finira par toucher toutle monde, elle trouvera, un jour ou l’autre, le moyen et la brèche pour venir chatouiller les autres religions. La dernière tentation du Christ, ce film américain, de Martin Scorsese de 1988, que l’ ‘Église avait alors dénoncé très fermement, on est l’exemple. Un groupe fondamentaliste catholique avait même incendié le 23 octobre 1988 la salle du cinéma parisienne « Espace Saint-Michel » et la salle du Gaumont Opéra ainsi que celle de Besançon. Un autre attentat du même groupe causa la mort d’un spectateur.

    Plus que jamais, la laïcité est appelée à arbitrer entre la foi et la liberté, à protéger les religions des taquineries laïques impertinentes et protéger les libertés du tic invasive des religions, de nature à étouffer la société, en imposant une seule grille de lecture du dogme. Comme elle l’a déjà fait, en s’interposant entre la religion et le pouvoir et en marquant les limites de chacun dans la vie républicaine. Le faisant, elle a pacifié la vie publique, protégé la religion des abus du pouvoir et protégé le pouvoir des différentes lectures de la religion, de ses courants, de ses schismes et de ses dogmes.

    Finalement, il est nécessaire de rappeler que la diffamation des religions, fait l’objet d’une résolution n° 7/19, adoptée par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU et engageant les États à renforcer la lutte contre ce phénomène inquiétant. L’ONU qui a développé cette nouvelle approche des religions et de leur insertion dans l’espace public, mais vis-à-vis de laquelle, les Etats Occidentaux sont toujours réticents.

    Le Quotidien d’Oran, 8 oct 2020

    Tags : France, Macron, Islam, Islamophobie,

  • France : L’islamophobie en gants blancs

    par Djamel Labidi

    J’ai écouté le discours récent du Président français Emmanuel Macron, le 4 octobre dernier, sur «les séparatismes». L’impression qu’il m’en reste peut se résumer en quatre mots: deux poids, deux mesures.

    Le discours est au départ humaniste, civilisé, et, même, disons-le, élégant. Il se refuse à instrumentaliser contre les musulmans la laïcité, et à réduire celle-ci , au final , à une caricature d’elle même. Il fait l’analyse sociologique des causes de la révolte et du développement de l’islamisme dans les quartiers dits difficiles. Il les voit dans les inégalités sociales et culturelles, et dans la marginalisation sociale. Mais le discours se termine, pour son côté concret, par une série de mesures discriminatoires. C’est dommage. Une islamophobie bien pensante, élégante, en gants blancs. Le thème du discours, celui des» séparatismes» est, au début, mis au pluriel. Il se veut ainsi non discriminatoire. Mais ce pluriel s’efface vite pour laisser la place au thème réel, au seul objet du propos, lui au singulier : «le séparatisme islamiste».

    – Lorsqu’il s’agit de contrôler les financements des mosquées et des associations religieuses, ou culturelles c’est de l’Islam qu’il s’agit.

    – Lorsqu’il s’agit de contrôler le recrutement ou la formation des hommes de religion il s’agit des imams.

    – Lorsqu’il s’agit du contrôle des établissements scolaires étrangers en France, il s’agit de ceux des pays arabo-musulmans, notamment des pays du Maghreb. Bref. Une série de mesures discriminatoires envers les musulmans de France , et même les arabes, ou ceux censés l’être …à première vue. La discrimination : là est le fond du problème, là est la source des problèmes Et elle s’accroit au moment même où on déclare vouloir la combattre.

    Des mesures discriminatoires

    – Une série de mesures concerne le contrôle du financement des lieux de cultes musulmans et des associations religieuses et culturelles musulmanes. L’argument essentiel est que des financements viendraient de l’étranger, d’autres pays musulmans notamment. Pour les autres cultes le problème n’est même pas évoqué.

    Une enquête du journal français «Libération» révélait que c’est une idée reçue que celle du financement du culte musulman par des Etats étrangers: 70 à 80% des sommes viennent de collectes parmi les fidèles. Quant au reste, l’argent venant de l’étranger (mécènes et Etats) il va principalement aux grandes mosquées, ce qu’on appelle les «mosquées cathédrales» et qui sont loin d être des lieux de «l’Islam radical». («Liberation», 3 novembre 2016, six idées reçues sur le financement des mosquées et des cultes musulmans»). Le même rapport signale que c’est une autre idée reçue que de penser que ces financements proviennent de l’Arabie saoudite ou du Qatar mais qu’ils provenaient des pays d’origine des musulmans en France, principalement de l’Algérie et du Maroc et dans une moindre mesure de la Turquie. Par contre, une organisation comme «le Fonds social juif unifié», créé en 1950 en France, peut dire ouvertement sur son site, qu’Israël finance ses programmes éducatifs et sociaux sans qu’on trouve officiellement en France à redire ( cf site internet «Appel unifié juif de France « ).

    C’est le cas aussi des Eglises évangélistes françaises qui ont des relations étroites avec leurs consœurs à l’étranger, en particulier aux Etats Unis. Elles entretiennent plus de 350 missionnaires à l’étranger et tout un réseau notamment en Afrique francophone, ainsi qu’en Algèrie et dans tout le Maghreb, à travers le MENA (« ministère évangélique parmi les nations arabophones»). On évaluait en 2005 entre 20 000 et 30 000 le nombre, en Algérie, de protestants évangéliques issus de l’Islam ( cf «cairn.info, les protestants évangéliques français, 2005 ).

    Ailleurs, ces financements ne sont pas dramatisé à outrance: c’est ainsi qu’en Algèrie, la basilique de Saint Augustin à Annaba et l’Eglise «Santa Cruz» à Oran ont été rénovées avec la participation de l’Etat algérien mais aussi de donateurs étrangers ( Etats, comme l’Allemagne, et mécènes). Personne n’a crié au scandale.

    – Un autre train de mesures vise à la formation «nécessairement en France» des hommes de religion. L’argument est le refus qu’ils viennent de l’étranger. Mais ceci vise uniquement les imams.

    Il suffit simplement de signaler, à ce propos, qu’en 2012, on recensait 1689 prêtres étrangers catholiques dans les diocèses de France ( cf Wikipédia, «Eglise catholique en France»).

    Il est exigé, par ailleurs, des imams qu’ils aient un bon niveau de français. Exige-t-on un bon niveau d’Arabe des moines et des prêtres chrétiens en Algèrie et au Maghreb. Exige-t-on qu’ils officient en arabe, ce qui serait au fond possible , comme cela se fait au Liban, en Irak, en Syrie, en Egypte pour ce qui est des coptes. Mais personne ne le demande et c’est tant mieux.

    En Algèrie, et dans d’autres pays arabes et musulmans, les prêtres, les moines viennent bien souvent d’autres pays, notamment de France, sans que personne ne s’en formalise.

    Ces mesures sont présentées au nom de la défense de l’Etat laïque. Elles annoncent en fait son effondrement. En effet, sa base même, la séparation de l’Eglise et de l’Etat, s’affaiblit ainsi peu à peu, pour laisser la place au contrôle de l’Etat sur la religion dés qu’il s’agit de l’Islam. D’ailleurs le socle de la laïcité en France, la loi de 1905, va être modifiée pour la première fois depuis 115 ans, à cause de…l’Islam.

    – Il y a enfin aussi les mesures concernant le contrôle des établissements scolaires, notamment les lycées, dépendants d’autres Etats, comme c’est le cas des lycées et établissements algériens en France.

    Les dispositions, à ce sujet, sont particulièrement choquantes. Le président Macron est allé, là aussi, jusqu’à parler du contrôle du niveau de français des enseignants. S’il y a bien des lycées importants, influents socialement et culturellement au Maghreb, et ailleurs en Afrique, notamment à travers la formation des élites, ce sont bien les lycées français. Exige-t-on en Algèrie, un contrôle du niveau en Arabe des enseignants français..

    Le 24 juillet 2020, Au Liban, devant la banqueroute financière de l’Etat, le ministre français des affaires étrangères, jean Yves le Drian, avait tenu à annoncer une aide de 15 millions d’euros ….»aux écoles francophones, pilier du système éducatif» ( cf le Monde, «En visite dans un Liban en crise, Jean- Yves Le Drian ), 25 juillet 2020 ). Il faut donc rapprocher ceci de cela.

    Les mesures annoncées ou prévues sont discriminatoires au sens plein du terme. Elles n’ont même pas pour argument la réciprocité car, en face, la tolérance est bien plus grande quoique certains en pensent. Mais de cela, l’opinion en France n’ est pas informée.

    En fait tout cela prend sa source dans une vision complètement fantasmatique, paranoïaque «d’une invasion et d’une menace arabo-islamique. Cette vision semble, désormais, gagner les plus hautes sphères françaises. «Il faut libérer l’Islam en France des influences étrangères», a proclamé le président Macron dans son allocution. On a l’impression d’une razzia sur le sol français. S’il y a menace et invasion et si ces mots pouvaient avoir un sens, elles ne sont certainement pas du côté de l’Islam ou du monde arabe. Imaginons une France, où la plupart des écoles et lycées auraient une grande partie de leurs programmes en arabe. Imaginons une France où la moitié des universités enseigneraient en Arabe. Imaginons une France où une grande part des affaires, des échanges commerciaux se dérouleraient en Arabe. Imaginons une France, où les Français dans la rue parleraient arabe. Et bien, c’est ce qui se passe en Algèrie et au Maghreb ou au Liban, et ailleurs en Afrique, mais au profit du français. S’il y a menace sur l’identité, s’il y a problème civilisationnel, ce n’est surement pas le cas pour la France. Soyons sérieux. Dans cette vision inversée de la réalité, qui sert hélas de pensée à une partie des élites françaises, dans cet esprit rejoignant celui moyenâgeux des croisades, dans cette véritable aliénation à une représentation fantasmatique de l’Islam , dans cette peur pathologique, on se demande comment pourrait progresser une pensée rationnelle, progressiste, comme c’était le cas en d’autres temps comme au siècle des lumières. La pandémie du Corona a joué à cet égard un rôle révélateur, dévoilant l’effondrement de l’esprit scientifique, le glissement vers l’irrationnel, vers la pensée magique, vers des théories complotistes à la recherche tôt ou tard de boucs émissaires, et cela dans des pans entiers de la société, y compris la plus instruite, y compris dans des milieux traditionnellement progressistes.

    «Charlie Hebdo» et le «droit au blasphème»

    J’écoutais ainsi, le même jour, celui du 4 octobre, sur BFM TV, l’interview de Riss, Directeur de publication de Charlie Hebdo. C’est comme si l’actualité traçait un trait entre les deux évènements, cette interview et le discours du Président Macron.

    Riss est un personnage attachant, s’il en est. Et pourtant, soudain, il dit, signe du climat dominant, et sans qu’on comprenne la logique de son propos : « L’existence de Dieu n’a jamais été démontrée scientifiquement. C’est une hypothèse.» Comment peut-on dire tant de bêtises en si peu de mots. On voit donc le bagage intellectuel qui a servi aux caricatures du prophète. Si l’existence de Dieu n’a pas été démontrée, son inexistence l’a-t-elle été ? Si elle n’a pas été démontrée, c’est précisément pour cela qu’elle est une croyance. Si l’existence de Dieu était démontrée, ce ne serait pas une croyance mais une certitude.

    Si elle avait été prouvée, serait- elle une foi? Aurait-elle alors, d’ailleurs, un sens ? A-t-on démontré que deux droites parallèles ne se rencontrent jamais, ou, ce qui revient au même, se rencontrent à l’infini? Mais c’est pourtant un postulat.

    Vision scientiste primaire qui veut, encore une fois, confronter science et religion, rationalité et foi, deux domaines différents de la connaissance, l’un objectif, l’autre subjectif, comme la science et l’art . C’est la même erreur que font des croyants lorsqu’ils veulent faire entrer en compétition science et religion, le fini avec l’infini. Mais passons.

    Ce qu’il y a peut être à noter, c’est qu’avec une telle approche , on ne peut que passer à côté des autres aspects des réactions aux caricatures du prophète, de leurs déterminants sociaux, culturels, historiques, et s’en tenir au fond à une approche bien pauvre.

    L’acte insensé, monstrueux, barbare de ce jeune Afghan devant les anciens locaux de Charlie hebdo aurait-il été possible s’il n’avait pas été obligé de fuir son pays , ravagé par la guerre, menée par des armées «civilisées» dont l’armée française. On apprend même à l’occasion que des unités de sécurité intérieure françaises comme le GIGN sont en opération de guerre en Afghanistan.

    Ce qui complique toujours les choses et les rend inextricables c’est que le bourreau diabolise sa victime, la «barbarise», indiens d’Amérique arrachant «les scalps», «fellaghas égorgeurs» en Algérie, Mau Mau à la machette au Kenya etc…et que la victime, la vraie, finit souvent par ressembler, elle-même, à la caricature que le bourreau en donne. Alors, qu’on ne nous dise pas seulement, comme toujours, que «rien ne peut justifier de tels actes». D’accord. Mais tout ce qui se passe, hélas, dans le monde, peut aussi les expliquer. Que la dénonciation de tels actes ne soit pas le moyen, comme toujours, d’empêcher toute explication, c’est-à-dire d’empêcher de penser, de réfléchir.

    Le problème c’est quand on confond, dans une approche laicarde, la religion en tant qu’institution et la religion en tant que ferment culturel, spirituel, moral de la protestation contre la domination étrangère ou sociale. Qu’on regarde bien: derrière toute protestation violente contre les caricatures du prophète, il y a toujours des groupes sociaux qui souffrent de discrimination sociale ou des pays qui souffrent de la domination étrangère. On s’inquiète en France de «l’invasion islamiste». On s’étonne de la présence d’Afghans sur le sol français. Mais y a- t-il des troupes militaires afghanes en France comme il y a des troupes françaises en Afghanistan ? Combien de morts, femmes, enfants confondus, ont fait les actions de guerre françaises et autres en Afghanistan ? Les bombardements sur la Lybie, dont ceux de l’aviation française, ont fait des milliers de morts. Y a- t-il eu des actions de guerre libyenne sur la France. Et la liste est longue, ponctuée de dizaines de milliers de victimes, et de souffrances sans nom. Le vrai courage, la vraie liberté d’expression ne sont-ils pas de dénoncer tout cela. Sont-ils, au nom d’une tolérance bien pensante, de dessiner des caricatures anti- islamiques, et de caresser ainsi dans le sens du poil une certaine opinion étroite et chauvine, ou bien consistent-ils à affronter les vraies limites à la liberté d’expression: celle par exemple de dénoncer le sionisme en France. Mais sur ce point, c’est la tolérance zéro et il est interdit définitivement de penser. Qu’on se souvienne de ce qui est arrivé à Dieudonné, devenu officiellement un pestiféré, pour son jeu de mots «Isra-Heil ! « sur un plateau de télévision, ou du dessinateur «Siné» congédié de «Charlie hebdo» pour avoir caricaturé le fils de l’ex président Sarkozy se convertissant au judaïsme. C’était pourtant dans les deux cas de l’humour, celui dont se réclame le journal «Charlie Hebdo», celui du «droit à plaisanter de tout». Etrange droit que ce «droit au blasphème» qui est revendiqué. N’a-t-il pas finalement pour fonction de cacher derrière la revendication d’une liberté de pensée totale, la soumission en réalité aux paradigmes de la pensée dominante en France et une intolérance de fait, celle là en gants blancs.

    Le Quotidien d’Oran, 8 oct 2020

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