Étiquette : justice

  • Opération Marquês. Le grand condamné est la justice portugaise, dit Boaventura de Sousa Santos.

    Le sociologue et juriste affirme que la justice portugaise est la grande condamnée de l’instruction de l’opération Marquis : « Voilà ce qui est vraiment condamné ».

    L’enquête sur l’opération Marquis a été « une grande condamnation de la justice portugaise », en particulier des procédures du ministère public dans les cas de crimes de grande complexité, a déclaré le sociologue et juriste Boaventura de Sousa Santos.

    « C’est une grande condamnation de la justice portugaise. C’est cela qui est vraiment condamné et très particulièrement les procédures du ministère public dans cette affaire », a-t-il déclaré à l’agence de presse Lusa, également professeur à l’université de Coimbra, soulignant qu’il y a « longtemps », il a dénoncé « l’erreur consistant à essayer de rassembler tous les crimes, toutes les indications de comportement criminel dans des méga-processus qui ne se terminent jamais parce qu’ils ont trop de cas et d’accusés ». Pour Boaventura de Sousa Santos, la décision d’ouvrir une enquête était « prévisible ».

    Le résumé le plus cruel est : La montagne a donné naissance à une souris. Parmi les crimes faisant l’objet d’une enquête, nous avons vu que ceux qui pourraient être politiquement plus dommageables et plus graves, à savoir les crimes de corruption, ne s’appliquent pas à José Sócrates. La vérité dans le processus judiciaire est toujours beaucoup plus forte que celle qui est simplement anecdotique, ou celle qui est rapportée dans les médias », a-t-il déclaré.

    Il a également déclaré que cette affaire montre les faiblesses de la justice dans les crimes très complexes, notamment la stratégie du ministère public.

    C’est une caricature cruelle de la justice portugaise dans cette situation. Heureusement, ce n’est pas un portrait de toute la justice portugaise et en fait, le juge Ivo Rosa a donné une image de la crédibilité de la justice portugaise en ce qu’il a strictement suivi les principes que nous tous, juristes, avons appris dans le processus pénal », a-t-il souligné.

    Selon le sociologue, il faut « des changements législatifs et procéduraux ». Boaventura de Sousa Santos a rappelé le cas de l’ancien président français, Nicolas Sarkozy, où « deux ans ont suffi pour être jugé ».

    « C’est la même culture juridique, c’est la même base des codes, mais il y a une stratégie pénale différente en France et au Portugal. En France, le procureur de la République se concentre sur les crimes pour lesquels il dispose de preuves solides », a-t-il souligné.

    Parmi les 28 accusés de l’opération Marquês (19 personnes et neuf sociétés), l’ancien Premier ministre José Sócrates et l’homme d’affaires Carlos Santos Silva, tous deux prononcés pour trois délits de blanchiment d’argent et trois délits de falsification de documents.

    Selon la décision lue par le juge Ivo Rosa, dans le Campus de Justice, à Lisbonne, ont été également prononcés l’ancien ministre et ancien directeur de Caixa Geral de Depósitos Armando Vara, pour un crime de blanchiment d’argent, et l’ancien président du Groupe Espirito Santo Ricardo Salgado, pour trois crimes d’abus de confiance.

    João Perna, ancien chauffeur de José Sócrates, sera jugé pour un délit de possession d’une arme prohibée. Dans le cadre de ce processus, 189 crimes économico-financiers étaient en cause. José Sócrates a été arrêté en novembre 2014. L’acte d’accusation de l’ancien Premier ministre et de 27 autres accusés était connu en octobre 2017.

    Observador, 9 avr 2021

    Etiquettes : Portugal, justice, détournement, corruption, malversation, Armando Vara, Ricardo Salgado, João Perna, Nicolas Sarkozy,

  • Israël : Les faveurs de M. Netanyahou étaient « monnaie d’échange », déclare le procureur à l’ouverture du procès pour corruption.


    JERUSALEM (Reuters) – Les procureurs israéliens ont accusé lundi le Premier ministre Benjamin Netanyahu d’avoir traité ses faveurs comme de la « monnaie d’échange » à l’ouverture d’un procès pour corruption qui, parallèlement à une élection non concluante, a assombri ses chances de rester au pouvoir.

    M. Netanyahou, qui a plaidé non coupable des accusations de corruption, d’abus de confiance et de fraude, s’est présenté au tribunal de district de Jérusalem dans un costume sombre et un masque de protection noir, s’entretenant tranquillement avec ses avocats alors que ses partisans et ses détracteurs organisaient des manifestations bruyantes à l’extérieur.

    « La relation entre M. Netanyahou et les accusés est devenue une monnaie, quelque chose qui pouvait être échangé », a déclaré la procureure Liat Ben-Ari en présentant l’affaire 4000, concernant les liens présumés du premier ministre avec les propriétaires d’un site d’information israélien.

    « Cette monnaie pouvait fausser le jugement d’un fonctionnaire ».

    Netanyahou est parti avant que le premier témoin de l’accusation ne témoigne dans le premier procès de ce type d’un Premier ministre israélien en exercice. Il s’est décrit comme la victime d’une chasse aux sorcières à motivation politique.

    Pendant ce temps, le président israélien Reuven Rivlin a commencé à consulter les chefs de parti pour savoir qui pourrait former le prochain gouvernement de coalition – un choix difficile après les élections du 23 mars, les quatrièmes en deux ans, qui n’ont donné ni à Netanyahou ni à ses rivaux un mandat clair.

    Rivlin a déclaré aux délégués du parti conservateur Likoud de Netanyahou que des considérations éthiques pourraient peser dans sa décision, faisant apparemment allusion au procès de Netanyahou.

    « Je ne vois pas comment un gouvernement peut être établi », a déclaré Rivlin aux représentants du parti centriste Yesh Atid, le plus grand parti d’opposition, qui espère déloger Netanyahou.

    « Le peuple d’Israël devrait être très préoccupé par le fait que nous pourrions être entraînés dans une cinquième élection ».

    Au tribunal de district de Jérusalem, les procureurs ont cherché à établir que M. Netanyahou a accordé des faveurs réglementaires à la principale entreprise de télécommunications d’Israël, Bezeq Telecom Israel BEZQ.TA, en échange d’une couverture plus positive de lui-même et de sa femme Sara sur un site Web d’information de l’entreprise connu sous le nom de Walla.

    L’ancien PDG de Walla, Ilan Yeshua, a témoigné qu’il avait été « assailli » de demandes par e-mail et par SMS, émanant à la fois des propriétaires de Walla et de personnes de confiance de Netanyahou, pour améliorer les reportages sur le Premier ministre tout en minimisant ou en attaquant ses rivaux politiques.

    « Jusqu’à quel point pouvez-vous mentir ? » Iris Elovitch, épouse du propriétaire de Walla à l’époque et co-accusée dans l’affaire 4000, a crié à Yeshua.

    (Cette histoire a été reclassée avec le nom complet du témoin)

    Reuters, 5 avr 2021

    Etiquettes : Israël, Benjamin Netanyahou, corruption, procèes, justice, faveurs, monnaie d’échange, abus de confiance, fraude, Liat Ben-Ari, Reuven Rivlin, élections présidentielles,

  • Algérie : La justice traque les suppôts de la Issaba

    OULD KADDOUR, CHAKIB KHELIL, BOUCHOUAREB, BELKECIR ET ZITOUT AND CO : La justice traque les suppôts de la Issaba

    Le sulfureux Abdelmoumen Ould Kaddour, ancien P-DG du géant pétrolier Sonatrach, arrêté samedi à Dubaï en provenance de Paris, reste en instance d’extradition vers l’Algérie, pour rendre des comptes à la justice pour les graves torts causés au Trésor public, notamment dans ce qu’il est convenu d’appeler le scandale de la raffinerie d’Augusta, dont il est le principal concepteur.

    Ce dernier qui était un soutien de poids pour le clan Bouteflika n’aurait dû jamais prendre la direction de la Sonatrach, lui qui avait été condamné pour une charge lourde, l’espionnage économique dans le cadre de l’affaire BRC (Brown Root and Condor). Et malgré un casier judiciaire chargé et une condamnation infamante, il fut bombardé patron de la plus grosse firme pétrolière algérienne.

    En mai 2018, alors que tous les experts du secteur des hydrocarbures avaient crié au scandale, l’homme-lige du clan Bouteflika, affirmait que Sonatrach venait de réaliser l’affaire du siècle en rachetant auprès d’Esso Italiana une filiale du groupe américain ExxonMobil, la Raffinerie Augusta en Italie. Il avait soutenu que cette opération est plus rentable que la réalisation d’une raffinerie à Hassi Messaoud pour un coût de 3 à 4 milliards de dollars. Mais en réalité il avait déboursé de l’argent pour s’offrir un tas de ferraille pour une raffinerie dépareillée. Alors que la maintenance du complexe avait ruiné son propriétaire, Ould Kaddour lui offre une solution tombée du ciel en achetant cette station et ses oléoducs.
    Ould Kaddour ne devait jamais accéder à un poste aussi sensible en raison des casseroles qu’il trainait, mais sa proximité avec le clan Bouteflika lui a permis de revenir, en seigneur, à la direction de la Sonatrach.

    Les maillons de la chaîne

    Cette affaire nous renvoie aux dossiers Sonatrach 1 et 2, et dans lesquels est cité nommément l’ancien ministre des hydrocarbures, Chakib Khelil. Dans le cadre de l’enquête diligentée il y a quelques années par le parquet d’Alger, le magistrat instructeur, l’actuel ministre de la Justice, Belkacem Zeghmati, alors procureur général près la cour d’Alger, avait émis en 2013 un mandat d’arrêt international contre Chakib Khelil. L’accusé qui faisait partie du cercle très rapproché de l’ancien Président avait alors fui le pays, le temps de permettre à l’ancien garde des Sceaux, Tayeb Louh, de trouver la parade pour invalider le mandat émis par la justice.

    Ce qui fut fait en arguant un vice de forme, permettant ainsi à Chakib Khelil de revenir au pays et de se lancer dans une véritable campagne de séduction des zaouïas en se posant, pour la « Issaba », comme une alternative en cas de retrait de Bouteflika pour la course à un cinquième mandat. Ce plan fut éventé grâce au Hirak du 22 février 2019. Aujourd’hui, l’homme est sous la menace d’un mandat d’arrêt international qui pourrait être délivré par la justice algérienne tant son nom est cité dans plusieurs affaires et scandales de corruption.

    La justice a également condamné l’ancien ministre de l’industrie, Abdeslam Bouchouareb et émis, à son encontre, un mandat d’arrêt international. Ce dernier, cité à comparaitre dans l’affaire du montage des véhicules et plusieurs autres affaires, a quitté le pays depuis la chute de l’ancien Président et ses relais. Plusieurs autres noms d’acolytes de la Issaba pourront bientôt faire face à la justice algérienne.

    Le général Ghali Belkecir et son épouse, l’ancienne présidente de la cour de Tipaza, qui avaient mis en place une justice parallèle avec le soutien de Tayeb Louh, en fuite à l’étranger, pourraient un jour revenir au pays pour répondre des lourdes charges qui pèsent sur eux.

    C’est dans la même veine que des mandats d’arrêt international ont été lancés, ce dimanche, contre Zitout, Hichem Aboud, Amir Dz et le gendarme déserteur Mohamed Abdallah, s’inscrivent d’ailleurs dans la nouvelle dynamique de la justice algérienne qui veut faire payer ceux qui ont voulu attenter à la stabilité du pays et de le ruiner, d’avilir le peuple par leurs pratiques maffieuses, et surtout osé mettre le pays et ses richesses au seul service de la Issaba et ses relais.
    Slimane B.

    Le Courrier d’Algérie, 24 mars 2021

    Tags : Algérie, justice, Zitout, Hichem Aboud, Amir Dz, Mohamed Abdallah, Abdelmoumen Ould Kaddour, Sonatrach, Augusta, Bouteflika, Chakib Khelil, Tayeb Louh, Ghali Belkecir, Issaba,



  • France Inter : Au Maroc, porter plainte pour viol c’est risquer la prison

    Cette semaine sur la planète LGBT, une websérie marocaine dans la lignée de #MeToo, des violences envers les femmes en hausse en Belgique, les Japonais qui sont de plus en plus favorables au mariage gay, et une image choc sur les réseaux sociaux : des aisselles non épilées !

    #TaAnaMeToo, « moi aussi je suis MeToo » : c’est le titre de la websérie de la semaine. Elle est évidemment produite et diffusée par le studio Jaw Jab, à la fois pépinière de talents et laboratoire à idées du réalisateur Nabil Ayouch. Autrement dit : c’est là que se retrouve l’essentiel de la créativité marocaine sur le web aujourd’hui.

    Dernier exemple en date donc, la série #TaAnaMeToo que l’on doit à une jeune journaliste, Zaina Aboulfaraj. Pendant des mois, elle est allée à la rencontre d’associations pour convaincre des femmes de témoigner sur les violences sexuelles qu’elles ont subies. Cela donne lieu à une parole rare, inédite même, au Maroc ; un dessin, un graphisme aussi pudique qu’affirmé ; et des histoires comme celles-ci.

    Au Maroc, une femme sur deux a été victime d’agression sexuelle – un peu comme en France, en fait. Dans 30% des cas, il s’agit d’un viol. Mais la plupart du temps, elles n’en parlent pas. Pourquoi ? Le poids de la culture et de la religion bien sûr, et cela, c’est le cas à peu près partout dans le monde.

    Mais dans celui du Maroc, il y a cette petite spécificité qui vient encore compliquer la donne : le fameux article 490 du Code pénal, qui punit de prison les relations sexuelles hors mariage. Techniquement, il concerne les hommes comme les femmes, mais je vous le donne en mille, qui finit derrière les barreaux à votre avis ?

    Dans ce contexte, celles qui oseraient venir porter plainte pour viol courent le risque, non négligeable, que la démarche se retourne contre elles et que, de victimes, elles en deviennent coupables, accusées d’avoir eu des relations adultères. Les associations féministes militent depuis de longs mois pour l’abrogation de cet article.

    Réunion de crise à Bruxelles

    La secrétaire d’État à l’égalité des genres, Sarah Schlitz, a convoqué d’urgence ses collègues de l’intérieur et de la justice. Le nombre d’infanticides et de féminicides flambe en Belgique avec la seconde vague de Covid-19.

    Au 21 mars, 8 femmes et 6 enfants ont été tués, soit deux fois plus que l’an dernier à la même époque… Le phénomène va bien au delà de la Belgique : au total, depuis le début de la pandémie, le nombre d’appels d’urgence de victimes de violences conjugales a augmenté de 60% dans toute Europe.

    Une première juridique au Japon

    Un tribunal de Saporo déclare la non-reconnaissance des couples homosexuels contraire à la Constitution… et à son article 14 notamment, qui stipule que tous les citoyens sont égaux devant la loi. Le Japon est le dernier pays du G7 à ne pas autoriser le mariage entre personnes du même sexe. Mais ça pourrait changer… En tous cas, les mentalités bougent : plus de 60% des Japonais y sont désormais favorables.

    Des aisselles poilues, l’image de la semaine

    Cest une très belle femme, noire, en brassière, Stella Mac Cartney qui enflamme les réseaux. Elle, c’est Leila Davis, chorégraphe, danseuse de pole dance, égérie Adidas, posant devant l’objectif bras relevés et, -oh mon dieu ! – aisselles non épilées. Le cliché est immédiatement devenu viral, aussi viral que clivant.

    D’un côté, une génération de jeunes femmes enthousiastes applaudissent l’équipementier allemand : oui, le droit de disposer de son corps c’est aussi celui d’en finir avec une série de contraintes qui pèse sur celui des femmes, et des femmes seulement d’ailleurs – les poils des hommes n’ayant jamais posé problème, bien au contraire… Exactement ce qu’on appelle un double standard.

    Visiblement, cette nuance là échappe toujours à une partie du public qui pousse des cris d’orfraie à la moindre aisselle féminine non épilée. Leila Davis a donc eu droit au lot habituel de vomi qui attend toujours celles qui osent jeter le rasoir à la poubelle. Elles sont de plus en plus nombreuses, alors il faudrait peut-être s’y habituer, voire – attention audace – à leur laisser le choix.

    France Inter, 23 mars 2021

    Tags : Maroc, viol, femmes, abus, justice, machisme, genre,

  • La justice française: la réputation d’être de gauche

    Les procès Sarkozy et leurs conséquences: Le pouvoir judiciaire en France est confronté à des réformes majeures.

    Corona fait de l’ombre à tout. Pour le gouvernement d’Emmanuel Macron, cependant, ce n’est pas aussi dramatique qu’il n’y paraît pour le moment. Il est vrai qu’en France aussi, la campagne de vaccination, qui a pris de l’ampleur, est quelque peu ralentie par l’affaire Astra-Zeneca, mais cela détourne aussi l’attention du scandale politique qui couve depuis début mars à la suite d’un verdict étonnant contre l’ancien président Nicolas Sarkozy, et qui continuera vraisemblablement à jouer un rôle dans les mois à venir. Il s’agit du système judiciaire idéologiquement biaisé en général et des poursuites de la Cour fiscale nationale en particulier.

    Y a-t-il une méthode pour de telles poursuites ?

    Cette cour spéciale, fondée par le prédécesseur de Macron, François Hollande, et opportunément de gauche, s’est apparemment donné pour mission de passer au crible les candidats potentiels dans les camps de la droite et de la bourgeoisie jusqu’à ce qu’elle trouve quelque chose, puis de lancer des enquêtes avec effet de publicité, de préférence avant des élections importantes. C’est ce qui s’est passé avec l’ancien candidat prometteur à la présidence François Fillon il y a quatre ans, qui a été mis hors course par cette intrigue, et c’est ce qui se passe maintenant avec l’ancien président Nicolas Sarkozy.

    Trois ans de prison, dont deux avec sursis – telle est la sentence prononcée dans la salle d’audience bondée du 1er mars. C’est vrai, il pourrait purger l’année de prison en résidence surveillée. Mais les espoirs ou les craintes d’un come-back sont terminés. Même si Sarkozy a annoncé le soir même qu’il allait faire appel. Et le lendemain, lors d’une interview télévisée dans le cadre de la première émission, il a déclaré à plusieurs reprises qu’il n’avait pas l’intention, et n’a toujours pas l’intention, de se présenter aux élections. Cependant, il n’a jamais voulu renoncer à donner des conseils ou à s’engager dans le camp bourgeois parce qu’il était un homo politicus. Maintenant, cependant, il se battrait bec et ongles pour son honneur et pour le droit et la justice.

    Plusieurs procès pour corruption, pots-de-vin et financement illégal de campagne sont en cours depuis plus de huit ans contre M. Sarkozy, aujourd’hui âgé de 66 ans. Dans le verdict actuel – un autre est attendu prochainement – il a été reconnu coupable d’avoir soudoyé un procureur en promettant d’user de son influence en tant qu’ancien président de la cour princière de Monaco pour obtenir de cet avocat un poste de consul honoraire de Monaco. En contrepartie, le procureur devait l’informer, ainsi que son avocat, de l’état de l’enquête sur les procès de Sarkozy. Les conversations à ce sujet entre Sarkozy et son avocat Thierry Herzog, qui a également été condamné, ont été secrètement interceptées et ont servi de seule preuve. Cela viole le secret professionnel et la protection de la confiance entre l’avocat et son client, mais, ont déclaré les juges, « en raison de la gravité de l’infraction », ils ont autorisé les enregistrements à servir de preuve. Il est difficile d’imaginer que la Cour aurait agi de la même manière avec un homme politique de gauche.

    La course dans le camp bourgeois est ouverte

    Il est également difficile d’imaginer que le président sortant, Emmanuel Macron, n’avait aucune idée de cette évolution. En tout cas, cela élimine un concurrent potentiellement indésirable. Car chez les Républicains conservateurs (LR), de nombreux barons du parti avaient placé leurs espoirs dans le fait que Sarkozy monte une nouvelle fois sur le ring et brigue la présidence. Maintenant, la course est ouverte dans le camp bourgeois. Plusieurs noms circulent.

    Il y a le chef de file des Républicains au Sénat, Bruno Retaillau, il y a les personnalités Pierre de Villiers, l’ancien chef d’état-major, que les sondages donnent à 20 %, ou le publiciste Eric Zemmour, qui est à 13 %. Il y a l’ancien chef de parti Laurent Wauquiez ou l’ancien ministre de Sarkozy Xavier Bertrand et quelques autres. En l’état actuel des sondages, ils ne parviendraient pas à se qualifier pour le second tour. La chef du parti de l’Assemblée nationale, Marine Le Pen, les devancerait et serait même dangereuse pour le président sortant, selon les sondages d’aujourd’hui. Emmanuel Macron n’est pas menacé par la gauche. Les socialistes, les Verts et les communistes atteignent ensemble un maximum de 30 %.

    Si le camp bourgeois se mettait d’accord sur un candidat, il aurait certainement une chance, même contre Macron. Sarkozy aurait pu être ce candidat. Aujourd’hui, près de 13 mois avant le premier tour de scrutin de l’élection présidentielle et trois mois avant les élections régionales nationales, les conservateurs doivent rapidement se mettre d’accord sur un candidat. Les élections régionales constituent le test final et servent de critère de sélection.

    Il est fort possible que le sénateur vendéen de 60 ans, Bruno Retaillau, s’allie au général Pierre de Villiers, voire à Xavier Bertrand. Ils étaient tous unis par leur opposition cordiale à Sarkozy. Le verdict pourrait donc même marquer un tournant pour la France : la fin des éternelles batailles de chefferies en politique. À moins, bien sûr, que la justice de gauche ne retrouve ce qu’elle cherche dans ses opérations d’écoutes et ne fasse ainsi éclater les alliances. Elle préfèrerait certainement un Macron semi-gauchiste à un Retaillau droitier, qui d’ailleurs, comme Marine Le Pen, dissoudrait rapidement le tribunal de gauche d’un trait de plume.

    Le ministre de la justice annonce une réforme

    Cependant, les reconstitutions juridiques et les enquêtes contre Sarkozy ont une fois de plus gravement ébranlé la confiance du peuple dans le troisième pouvoir et son indépendance. Ce n’était pas très fort de toute façon. Des jugements comme celui contre Sarkozy « approfondissent la méfiance », comme l’admet même le ministre de la justice dans une interview au Point, et annonce également une grande réforme de la justice. Il souhaite présenter le projet de loi à la mi-avril. Il doit y avoir des règles également pour les pouvoirs indépendants des États. Oui, dit le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, « plus une institution insiste sur son indépendance, plus elle doit respecter strictement les règles. »

    La réforme prévoit des changements complets, mais pas la suppression du Tribunal financier. C’est précisément ce qu’il faudrait faire et cela donnera encore lieu à de vives controverses.

    Die Tagespost, 20 mars 2021

    Tags : France, Justice, Nicolas Sarkozy,

  • Les Américains pourraient trouver cela choquant, mais en Europe, les anciens présidents sont condamnés à la prison.

    Source : The Washington Post, 4 mars 2021

    L’ancien président français Nicolas Sarkozy apparaît au journal du soir de la chaîne de télévision française TF1 le 3 mars (Ludovic Marin / AFP via Getty Images)

    Par Sheri Berman*

    Lundi, l’ancien président français Nicolas Sarkozy a été reconnu coupable de corruption – il a tenté d’obtenir des informations confidentielles d’un juge en échange d’avoir usé de son influence pour obtenir un emploi pépère pour le juge – et condamné à la prison. Les juges ont jugé ses actes «particulièrement graves, ayant été commis par un ancien président de la République qui était autrefois le garant d’un pouvoir judiciaire indépendant». Dans le passé, Sarkozy a également été accusé d’accepter des fonds du gouvernement de Mouammar Kadhafi, une affaire qui est toujours en cours, ainsi que de manipuler une héritière vieillissante pour obtenir des contributions illégales à la campagne et plus encore.

    Au moins un journaliste américain a trouvé que l’idée que l’ancien président de la France pouvait être condamné et emprisonné était «absolument choquante». Il est certain que de nombreux Américains seraient choqués si l’ancien président américain Donald Trump, maintenant confronté à une myriade de problèmes juridiques, finissait en prison. Pourtant, le cas de Sarkozy n’est pas si choquant pour les étudiants en politique européenne. Il n’est pas le premier dirigeant européen à être inculpé et reconnu coupable de crimes pendant ou après son départ, et ne sera sûrement pas le dernier.

    D’autres présidents ont été condamnés

    Sarkozy n’est même pas le premier président français à subir ce sort. En 2011, Jacques Chirac, qui a exercé deux mandats à la présidence de 1995 à 2007, a été reconnu coupable de «détournement d’argent, d’abus de confiance du public et de conflit d’intérêts en créant de faux emplois à la mairie de Paris». Sa peine de deux ans de prison a cependant été suspendue parce qu’il était trop vieux et affaibli pour la purger. La France a un exécutif mixte dans lequel non seulement les présidents mais aussi les premiers ministres jouent tous deux des rôles importants. L’ancien Premier ministre de Sarkozy, François Fillon, a été condamné à cinq ans de prison et à une amende de 375 000 euros (421 000 dollars) pour utilisation abusive des fonds publics et des actifs de l’entreprise à des fins privées.

    Prenons l’exemple de l’ancien chancelier allemand Helmut Kohl, qui a supervisé la réunification allemande et a été le plus ancien chancelier depuis Otto von Bismarck à la fin des années 1800. Après avoir quitté ses fonctions, Kohl a été inculpé dans un scandale de corruption de longue date et de grande envergure qui comprenait des dons de campagne illégaux, le trafic d’influence, les caisses noires du parti et l’évasion fiscale; d’autres politiciens allemands ont également été inculpés. Fidèle à l’amour des Allemands pour l’invention de mots composés, ce scandale a été appelé Schwarzgeldaffäre, ou «affaire de l’argent noir».

    À côté de l’Autriche, de tels scandales et accusations font désormais partie de la politique quotidienne. En décembre, l’ancien ministre des Finances Karl-Heinz Grasser a été reconnu coupable de corruption et condamné à huit ans de prison; sa condamnation est intervenue dans le cadre d’une enquête sur des «crimes aux proportions incroyables» qui ont pris au piège d’autres politiciens de haut rang, y compris l’ancien chancelier Wolfgang Schüssel à deux reprises. Il y a quelques semaines à peine, le domicile de l’actuel ministre des Finances a été perquisitionné par des responsables de la lutte contre la corruption. La liste des anciens premiers ministres accusés de corruption et d’autres crimes pourrait également inclure des scandales en Belgique, en Espagne, en Estonie et ailleurs.

    Les populistes ont raison d’une grande chose: les démocraties sont de moins en moins ouvertes.

    Cela a des leçons pour la droite et la gauche américaines

    L’expérience de l’Europe en matière d’inculpation et même de condamnation d’anciens dirigeants a des implications importantes pour les débats sur la question de savoir si Donald Trump devrait être inculpé de divers crimes commis avant et pendant son mandat.

    Certains, pour la plupart à droite, soutiennent qu’inculper Trump de crimes empêcherait la «guérison» et déstabiliserait la démocratie. D’autres, pour la plupart à gauche, soutiennent que Trump doit être puni pour protéger l’état de droit et rétablir la démocratie. Bien qu’ils ne s’entendent sur rien d’autre, les deux parties conviennent que la manière dont les États-Unis traitent Trump «aura des implications durables» pour la démocratie.

    L’expérience européenne suggère que ce consensus est erroné. Les accusations et même les condamnations d’anciens dirigeants n’ont pas eu d’implications particulièrement profondes ou durables pour les démocraties européennes.

    Bien entendu, les politiciens inculpés et condamnés ont subi des atteintes à leur réputation. Sarkozy, par exemple, verra probablement son influence politique décliner; Helmut Kohl a dû renoncer à la présidence d’honneur de son parti; Wolfgang Schüssel a été contraint de quitter définitivement la politique, etc. Mais même après des condamnations, peu de ces politiciens ont été traités comme des parias. Chirac et Kohl ont tous deux été félicités par les camarades du parti et d’autres lors de leurs funérailles.

    Les électeurs pourraient-ils cesser de soutenir le parti d’un politicien inculpé? Les preuves suggèrent que lorsque les accusations ont été limitées à un président, un premier ministre ou un groupe circonscrit de hauts fonctionnaires, les partis n’ont subi que des revers électoraux temporaires, même lorsque le politicien a été condamné. Mais il y a une exception clé: lorsque les accusations discréditent le chef d’un nouveau parti qui n’a pas de base électorale ou d’infrastructure organisationnelle stable, ce parti peut facilement s’effondrer.

    Les affaires européennes offrent également peu de preuves que les cas individuels d’anciens présidents ou premiers ministres accusés de crimes affectent la démocratie de manière significative ou à long terme. Les électeurs et les autres politiciens semblent avancer assez rapidement lorsque certains dirigeants sont inculpés, condamnés et même emprisonnés pour des crimes. Cependant, les cas européens montrent clairement qu’il peut y avoir de grandes conséquences pour la démocratie lorsque non seulement certains politiciens mais la classe politique au sens large se révèlent corrompus ou enfreignant la loi. L’exemple le plus extrême en est l’Italie, où tout le système de partis s’est effondré à la fin du XXe siècle après des révélations de corruption systémique.

    La question cruciale pour la santé de la démocratie est de savoir s’il est possible d’empêcher la corruption et les activités criminelles de se propager au-delà des politiciens individuels à la politique dans son ensemble. En France, de nombreux hommes politiques – certains assez puissants – ont été inculpés et condamnés, ce qui montre que de telles actions n’arrêtent pas la corruption dans son élan. Pour cela, pas seulement des affaires judiciaires, mais des réformes systémiques sont probablement nécessaires.

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    *Sheri Berman est professeur de sciences politiques au Barnard College.

    Tags : Nicolas Sarkozy, justice,

  • Algérie : La gestion démocratique des…fourbes

    En vrac par Madjid Khelassi

    Corona ou pas corona…Le passage devant la justice des ex-membres du système Boutef ne connaît ni pause ni ajournement. Et depuis quelques jours, c’est une grosse pointure de l’ancien régime qui défraie la chronique.

    Abdelghani Hamel, ex-premier flic du pays, ou plus prosaïquement Directeur général de la sûreté nationale- DGSN, comme on dit dans les commissariats.

    Il est poursuivi avec l’ensemble de sa famille dans plusieurs affaires dont entre autres, enrichissement illicite, blanchiment d’argent, trafic d’influence, abus de fonction, obtention de foncier par des moyens illégaux.

    Ce n’est pas un procès mais une saga judiciaire digne d’un époustouflant thriller. Cela pourrait s’intituler : gestion démocratique des fourbes…tant les protagonistes de cette affaire se sont alignés comme des oignons pour « rendre service » à Si El Hamel et sa famille.

    Terrains agricoles et assiettes touristiques en milliers d’hectares, appartements, villas, locaux commerciaux, ports secs.

    Walis serviles, chefs de sûreté de wilaya religieusement obéissants, ministres indignes, directeurs des domaines marrons, banquiers-entremetteurs peu regardant sur le fric du peuple.

    Des entreprises labyrinthiques, des comptes bancaires à foison, milliards sur milliards à donner le tournis au plus matheux des juges.

    Un des rejetons qui gagne 130 milliards en 3 ans, la fille qui s’égare jusqu’à ignorer où commencent et où finissent ses affaires, la mère perdue dans ce magma de monstruosités. L’inventaire ne rechignerait Prévert himself !

    L’affaire El Hamel ou la face trompeuse des mondes gigognes de l’exercice du pouvoir, qui mêlent mission de service public et rapine. Éthique et malversations, abus de fonction et enrichissement sans gène.

    L’affaire El Hamel, qui loin d’être sans pareille est la chronique d’un pillage programmé.

    Les poursuivis dans cette affaire nient en bloc, affirment que les Hamel ont obtenu ces avantages comme le reste des citoyens !!! Argent et bakchich, prévarication et fourberie…gigantesques entrelacs du crime en col blanc. Et galerie de personnages qui ne sont pas moins que les enfants dégénérés d’un système qui ne l’est pas moins.

    Zoukh a donné instruction pour ne pas inquiéter Chahinez Hamel, dit l’un des prévenus…La consanguinité du poste et des méfaits fut un mariage programmé dans la gestion démocratique des…fourbes.

    La Nation, 16 mars 2020

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