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  • Algérie/ Acrobaties ! (analyse du Quotidien d’Oran)

    par Abdelkrim Zerzouri

    Le doute a été levé lors de la dernière réunion du Conseil des ministres, on est bien partis pour une loi de finances complémentaire 2021. La difficile conjoncture financière et économique du pays contraint le gouvernement à recourir à une loi de finances complémentaire (LFC) pour l’année 2021.

    Une solution pour faire face à de nouvelles dépenses et à une nouvelle situation économique? C’est la motivation essentielle du recours à une LFC, corriger le déséquilibre budgétaire qui résulte de la loi de finances initiale, laquelle devait déterminer pour l’exercice en cours « la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’Etat, ainsi que l’équilibre budgétaire et financier qui en résulte », comme le stipule l’article 1 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001. Les gouvernements successifs ont tous eu recours à la LFC, excepté en 2013 où toutes les mesures qui étaient prévues au titre de la LFC ont été reportées et inscrites dans le projet de loi de finances pour 2014, mais rien à comparer entre le présent et cette époque marquée par une explosion des dépenses de fonctionnement de l’Etat (entre 2007 et 2012 elles ont pratiquement été multipliées par 3, passant de 22 milliards de dollars à 65 milliards de dollars). C’était l’époque où le pays disposait d’importantes réserves en devises, et on ne se gênait pas pour en abuser à souhait.

    Cette loi de finances complémentaire 2021 ne ressemble, donc, en rien aux précédentes. Il y a lieu de la concevoir et de trouver les ressources financières qui permettraient l’application de ses articles. Mais, où les chercher ces ressources financières dans cette période marquée par une double crise économique et sanitaire sur le plan planétaire ? La remontée du prix du baril de pétrole pourrait fournir des appuis au gouvernement, mais il ne faut pas compter sur ce marché pétrolier très frivole, en tout cas pas tant que les devises ne soient dans les caisses de l’Etat. Cette prochaine loi de finances complémentaire chercherait ainsi à mettre d’autres mécanismes pour arriver à ses fins. Et, les premiers indices dans ce sens sont repérés dans l’inédit, avec l’introduction des dispositions au titre de l’avant-projet d’ordonnance portant loi de finances complémentaire pour 2021, relatives à la création d’un Fonds devant accueillir les fonds et biens détournés et confisqués en vertu de décisions de justice dans le cadre des affaires de lutte contre la corruption, selon les instruction du président de la République. Ainsi que la poursuite des efforts dans le sens de l’encouragement de l’inclusion financière en vue de capter les fonds en circulation dans le marché parallèle, notamment à travers une émission de bons de Trésor. Cela pourrait-il constituer une base solide de ressources financières pour honorer les nouvelles dépenses et parer au déséquilibre budgétaire qui résulte de la loi de finances initiale ?

    Pour le moment, on ne sait pas grand chose sur l’évaluation exacte du Fonds pour les fonds et biens détournés et confisqués en vertu de décisions de justice dans le cadre des affaires de lutte contre la corruption. Quant à la bancarisation de l’argent informel, si les moyens mis en place ont réussi à capter une partie de cette masse, une grosse partie reste en circulation en dehors du circuit bancaire, et on ne sait rien sur ce que réserverait l’avenir à ces bons de Trésor qu’on s’apprête à mettre sur le marché. Loin de ces acrobaties, rien ne serait donc plus sûr que les ventes des hydrocarbures.

    Le Quotidien d’Oran, 18 mai 2021

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  • Algérie/ Le déficit budgétaire se creuse de plus en plus : La facture sera lourde à payer

    Faire face au déficit qu’enregistre le budget de l’Etat durant cette année et qui est estimé à plus de 3310 milliards de dinars, n’est pas une tâche facile pour l’Exécutif, notamment avec la crise économique qui rend les ressources de la trésorerie très rares et les dépenses de plus en plus insupportables.

    Le ministre des Finances, Aymen Benabderrahmane, avait expliqué lors de la présentation de la loi des finances que le déficit budgétaire prévu dans la LF 2021 sera financé à travers l’application des mécanismes de la politique monétaire, stipulés dans la loi, en concertation avec la Banque d’Algérie. Le ministre faisait référence à l’utilisation d’une partie des réserves et affectations constituées par la Banque centrale.

    Il a expliqué que dans le cadre de ces mécanismes, «il sera procédé également au placement d’une partie des fonds propres de la Banque d’Algérie en bons du Trésor, conformément à l’article 53 de l’ordonnance n° 03-11 relative à la monnaie et au crédit, en sus de la dynamisation du marché des bons du Trésor, à travers le rachat d’importants crédits bancaires communs et le refinancement des bons du Trésor émis en contrepartie du rachat de ces crédits bancaires communs».

    Sommes-nous dans la même configuration aujourd’hui alors que l’on sait que cette procédure n’est pas suffisante pour combler un aussi important déficit, sachant qu’il a été décidé de ne plus faire appel au financement non conventionnel (planche à billets), qui a été mis en place en 2017. Selon des économistes, le recours à cette dernière option n’est pas écarté, et risque même de «s’imposer», a estimé Ferouk Nemouchi, docteur en économie à l’université de Constantine.

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    M. Nemouchi a considéré que la question du déficit engage directement l’avenir du pays, et que le gouvernement actuel «se retrouve face à une impasse, notamment avec le manque de recettes». Selon ses explications, il n’est pas possible d’avoir plus de recettes en ce moment, particulièrement avec le recul de la croissance économique.

    Affichant son étonnement quant au taux de croissance de 4% mentionné dans l’avant-projet de la loi de finances complémentaire de 2021, notre interlocuteur soutient que le recours à l’augmentation des recettes fiscales est «une utopie». «Nous nous dirigeons inéluctablement vers la réactivation de la planche à billets», a encore estimé M. Nemouchi, pour qui l’option de «la dépréciation du dinar que nous remarquons actuellement ne suffit pas pour combler le déficit». «Nous sommes condamnés à vivre avec pour une bonne période», dit-il.

    Pour l’économiste Smaïn Lalmas, le gouvernement n’a pas beaucoup de solutions pour faire face au déficit budgétaire. «Il fera appel aux vieilles méthodes», a-t-il souligné. M. Lalmas a expliqué que le gouvernement procédera à «l’augmentation des impôts pour avoir plus de recettes fiscales, et à la dépréciation de la valeur du dinar ainsi que le recours à la planche à billets.» «Toutefois, il y aura une forte restriction sur les importations», prévoit l’économiste qui affirme que les conséquences de ces démarches seront «très lourdes sur le pouvoir d’achat des citoyens qui va se détériorer avec la hausse de l’inflation dont nous n’avons pas les chiffres réels jusqu’à présent». M. Lalmas a fait savoir aussi que le recours à un endettement extérieur «n’est pas possible actuellement».

    La raison en est que «le pays est instable politiquement et juridiquement». Il ne faut pas oublier que «tous les pays ont besoin d’argent avec la crise sanitaire et économique que connaît le monde». Notre interlocuteur a tenu à souligner que la solution réside en premier lieu «dans la résolution de la crise politique que traverse le pays».

    Sans cela, dit-il, «les investisseurs ne vont pas s’aventurer pas manque de confiance». «No trust no business», estime Smaïl Lalmas. La marge de manœuvre se rétrécit davantage pour le gouvernement qui est au pied du mur. La crise financière est en train de s’aggraver avec une crise sociale qui commence à s’installer chez la classe moyenne et défavorisée.

    El Watan, 11 mai 2021

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