Étiquette : Mali

  • Au Sahel, même rêver est interdit. Heureusement, les occasions de désobéir ne manquent pas.

    La manifestation de l’opposition, annoncée il y a deux semaines et prévue pour le samedi 20 mars, a été interdite par un arrêté quelques jours avant la date. Il est trop tard pour réagir et s’organiser d’une autre manière. La justification de cette interdiction était la crainte de troubles dans la ville, après ce qui est arrivé à la publication rapide et anticipée des résultats des élections présidentielles. L’utilisation du net est suspendue dans le pays depuis une dizaine de jours, interdisant le droit à la communication.

    Profitant de l’épidémie, dont la propagation a été extrêmement limitée ici et en général dans le Sahel, les manifestations et de nombreux rassemblements ont été interdits et les écoles, les mosquées et les églises ont parfois été fermées. La circulation a été interdite car les frontières entre les pays d’Afrique de l’Ouest ont été fermées. Pour ceux qui voyagent en avion, il n’y a aucune interdiction si vous passez le test du poste de contrôle Covid au départ et à l’arrivée. Quant au passage des frontières entre ces pays, bien qu’il soit officiellement interdit, avec un peu d’imprudence et un peu d’argent aux douaniers et autres, vous pouvez passer.


    La mobilité vers le nord de l’Afrique est interdite car, comme on le sait, les frontières de l’Europe ont tellement migré et on peut jurer qu’elles vont encore descendre, vers la côte et jusqu’à l’Atlantique. Même la mobilité sociale, pourtant insinuée par la Constitution de la Septième République, est, à toutes fins utiles, interdite. Les enfants des propriétaires fonciers étudient dans des lycées et universités privés, ils peuvent même partir à l’étranger et bénéficier des meilleures conditions de séjour. Ce seront les « élites » au pouvoir au prochain tour. De père en fils et de mère en fille, selon les dynasties et les alliances politiques changeantes. Les paysans, les éleveurs, les mendiants mendiants et les politiciens, il faut le jurer, les politiciens. Cela s’additionne toujours pour ceux qui sont en haut de l’échelle des revenus.

    Pierre-Joseph Proudhon, philosophe et économiste anarchiste, disait que la propriété est un vol, mais aujourd’hui le vol est devenu une propriété et ceux qui sont pauvres, disent les économistes d’aujourd’hui, le méritent ou l’ont cherché. L’avenir est interdit pour la catégorie sociale la plus nombreuse au Sahel : les jeunes, qui représentent le miroir de ce que nous serons un jour, sans même nous en rendre compte. Il est interdit de rêver d’un nouveau monde qui ne soit pas déjà sous le contrôle des puissances dominantes du système. Interdit de croire en un autre Dieu qui ne correspond pas à ce que la majorité a décidé qu’il devait être. Puissant parmi les puissants et encore capable de réguler les choses pour que tout change pour que rien ne change.


    Le Sahel, une terre de violence et d’insécurité. Mais l’espace pour la confrontation et la croissance ne manque pas.

    Le Sahel, une terre de violence et d’insécurité. Mais l’espace pour la confrontation et la croissance ne manque pas.
    Il y a l’interdiction formelle de dire et de raconter ce qui semble être la vérité des choses, l’interdiction de dire et d’utiliser les mots de ce que l’on voit et de ce que l’on vit, l’interdiction de souligner la réalité du temps, l’interdiction formelle de reconnaître et de crier, comme dans le célèbre conte de Hans Christian Andersen, « Les habits de l’empereur », que le roi est nu. Il est interdit de montrer son visage, son cœur, ses pensées et ses mains, il est interdit de protester, de publier, de défendre les pauvres contre les abus de la justice, il est interdit d’essayer de changer le cours de l’histoire, il est interdit d’imaginer un monde libre et transparent, il est interdit de transgresser le désordre établi et garanti par la continuité de la violence légitime de ceux qui possèdent le monopole.

    Il est interdit de renverser ce qui est politiquement correct, il est interdit d’être dissident, sauf dans les conditions et selon les modalités prévues par la loi et à condition que cela ne porte pas atteinte à la paix publique. Il est interdit de se taire, de méditer, de contempler, d’écouter, de marcher et de perdre les sentiers battus. Il est formellement interdit de chanter et de jouer sans vouloir gagner, de siffler et de marcher sous la pluie, de s’asseoir sur le banc face à la mer, de chasser un nuage par la pensée et de s’imaginer en gardien de phare devant la tempête et le naufrage des promesses de la vie.

    Heureusement, au Sahel, nous ne manquons pas d’occasions de désobéir. Le sable, pour commencer, est désobéissant par nature et d’elle nous avons appris à ne pas être facilement organisé par le pouvoir établi. Comme elle, nous nous déplaçons au gré du vent et des situations. Nous arrivons en retard parce qu’entre-temps, il y a eu un décès, une crise de paludisme, la visite inattendue d’un étranger, l’électricité qui se coupe sans prévenir, l’institutrice toujours en congé de maternité, la fonctionnaire qui vient de sortir pour chercher ses enfants, la dame de la banque qui s’absente pour aller faire des courses, le mécanicien qui ne trouve pas les bons outils et répare tout avec la dernière prière pour réparer la voiture, les feux de signalisation qui ne fonctionnent pas et la circulation est plus fluide, les élections qui deviennent des batailles rangées, les enfants qui écrivent leur nom à la craie et sont fiers de porter la robe que leur mère leur a offerte pour leur anniversaire et qu’ils ont oubliée.

    https://www.ilfattoquotidiano.it/2021/03/22/nel-sahel-e-vietato-pure-sognare-per-fortuna-non-ci-mancano-le-occasioni-di-disobbedire/6141148/
  • Au Sahel, même rêver est interdit. Heureusement, nous ne manquons pas d’occasions de désobéir…

    La manifestation de l’opposition, annoncée il y a deux semaines et prévue pour le samedi 20 mars, a été interdite par un arrêté quelques jours avant la date. Il est trop tard pour réagir et s’organiser d’une autre manière. La justification de cette interdiction était la crainte de troubles dans la ville, après ce qui est arrivé à la publication rapide et anticipée des résultats des élections présidentielles. L’utilisation du net est suspendue dans le pays depuis une dizaine de jours, interdisant le droit à la communication.

    Profitant de l’épidémie, dont la propagation a été extrêmement limitée ici et en général dans le Sahel, les manifestations et de nombreux rassemblements ont été interdits et les écoles, les mosquées et les églises ont parfois été fermées. La circulation a été interdite car les frontières entre les pays d’Afrique de l’Ouest ont été fermées. Pour ceux qui voyagent en avion, il n’y a aucune interdiction si vous passez le test du poste de contrôle Covid au départ et à l’arrivée. Quant au passage des frontières entre ces pays, bien qu’il soit officiellement interdit, avec un peu d’imprudence et un peu d’argent aux douaniers et autres, vous pouvez passer.


    La mobilité vers le nord de l’Afrique est interdite car, comme on le sait, les frontières de l’Europe ont tellement migré et on peut jurer qu’elles vont encore descendre, vers la côte et jusqu’à l’Atlantique. Même la mobilité sociale, pourtant insinuée par la Constitution de la Septième République, est, à toutes fins utiles, interdite. Les enfants des propriétaires fonciers étudient dans des lycées et des universités privés, ils peuvent même aller à l’étranger et bénéficier des meilleures conditions de vie. Ce seront les « élites » au pouvoir au prochain tour. De père en fils et de mère en fille, selon les dynasties et les alliances politiques changeantes. Les paysans, les éleveurs, les mendiants mendiants et les politiciens, il faut le jurer, les politiciens. Cela s’additionne toujours pour ceux qui sont en haut de l’échelle des revenus.

    Pierre-Joseph Proudhon, philosophe et économiste anarchiste, disait que la propriété est un vol, mais aujourd’hui le vol est devenu une propriété et ceux qui sont pauvres, disent les économistes d’aujourd’hui, le méritent ou l’ont cherché. L’avenir est interdit pour la catégorie sociale la plus nombreuse au Sahel : les jeunes, qui représentent le miroir de ce que nous serons un jour, sans même nous en rendre compte. Il est interdit de rêver d’un nouveau monde qui ne soit pas déjà sous le contrôle des puissances dominantes du système. Interdit de croire en un autre Dieu qui ne correspond pas à ce que la majorité a décidé qu’il devait être. Puissant parmi les puissants et encore capable de réguler les choses pour que tout change pour que rien ne change.


    Le Sahel, une terre de violence et d’insécurité. Mais l’espace pour la confrontation et la croissance ne manque pas.
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    DU BLOG DE MAURO ARMANINO
    Le Sahel, une terre de violence et d’insécurité. Mais l’espace de discussion et de croissance ne manque pas.
    Il y a l’interdiction formelle de dire et de raconter ce qui semble être la vérité des choses, l’interdiction de dire et d’utiliser les mots de ce que l’on voit et de ce que l’on vit, l’interdiction de souligner la réalité du temps, l’interdiction formelle de reconnaître et de crier, comme dans le célèbre conte de Hans Christian Andersen, « Les habits de l’empereur », que le roi est nu. Il est interdit de montrer son visage, son cœur, ses pensées et ses mains, il est interdit de protester, de publier, de défendre les pauvres contre les abus de la justice, il est interdit d’essayer de changer le cours de l’histoire, il est interdit d’imaginer un monde libre et transparent, il est interdit de transgresser le désordre établi et garanti par la continuité de la violence légitime de ceux qui possèdent le monopole.


    Il est interdit de renverser ce qui est politiquement correct, il est interdit d’être dissident, sauf dans les conditions et selon les modalités prévues par la loi et à condition que cela ne porte pas atteinte à la paix publique. Il est interdit de se taire, de méditer, de contempler, d’écouter, de marcher et de perdre les sentiers battus. Il est formellement interdit de chanter et de jouer sans vouloir gagner, de siffler et de marcher sous la pluie, de s’asseoir sur le banc face à la mer, de chasser un nuage par la pensée et de s’imaginer en gardien de phare devant la tempête et le naufrage des promesses de la vie.

    Heureusement, au Sahel, nous ne manquons pas d’occasions de désobéir. Le sable, pour commencer, est désobéissant par nature et d’elle nous avons appris à ne pas être facilement organisé par le pouvoir établi. Comme elle, nous nous déplaçons au gré du vent et des situations. Nous arrivons en retard parce qu’entre-temps, il y a eu un décès, une crise de paludisme, la visite inattendue d’un étranger, l’électricité qui se coupe sans prévenir, l’institutrice toujours en congé de maternité, la fonctionnaire qui vient de sortir pour chercher ses enfants, la dame de la banque qui s’absente pour aller faire des courses, le mécanicien qui ne trouve pas les bons outils et répare tout avec la dernière prière pour réparer la voiture, les feux de signalisation qui ne fonctionnent pas et la circulation est plus fluide, les élections qui deviennent des batailles rangées, les enfants qui écrivent leur nom à la craie et sont fiers de porter la robe que leur mère leur a offerte pour leur anniversaire et qu’ils ont oubliée.

    https://www.ilfattoquotidiano.it/2021/03/22/nel-sahel-e-vietato-pure-sognare-per-fortuna-non-ci-mancano-le-occasioni-di-disobbedire/6141148/
  • La combinaison des connaissances indigènes et scientifiques améliore la gestion des incendies au Sahel

    par Natalie Duncan*

    Le Sahel est une ceinture aride et chaude qui ne pardonne rien et qui s’étend sur le continent africain, du Sénégal au Tchad. Il marque la zone de transition entre le désert du Sahara au nord et les savanes humides au sud. Cette zone est caractérisée par un régime pluvial unique. Une longue saison sèche est suivie d’une saison des pluies courte mais intense ; certaines régions peuvent connaître jusqu’à 80 % de leurs précipitations annuelles entre les mois d’août et de septembre. Les populations qui vivent dans cet écoclimat difficile sont particulièrement vulnérables aux effets de la variabilité et du changement climatique.

    Au Sahel, le pastoralisme, ou l’élevage de bétail et d’autres ruminants, est le moyen de subsistance dominant. Les pasteurs s’appuient sur des informations liées au climat, comme la quantité et le moment des précipitations dans une région, pour prendre des décisions qui ont un impact sur leurs troupeaux. Cependant, les pasteurs signalent que la variabilité accrue du climat compromet leur prise de décision traditionnelle. Il est peut-être possible de surmonter ce problème en combinant les connaissances indigènes avec des informations scientifiques essentielles.

    En particulier, l’apport scientifique pourrait être utile aux communautés pastorales qui utilisent le brûlage dirigé dans le cadre des pratiques traditionnelles de gestion des terres, comme les Fulani au Sénégal.

    Le brûlage dirigé est différent des incendies de forêt, qui sont incontrôlés et ont souvent des effets dévastateurs. Les feux contrôlés sont allumés au début de la saison sèche pour améliorer les pâturages en éliminant les chaumes non appétissants, encourager la repousse et réduire le risque de feux de brousse plus incontrôlables plus tard dans la saison. Les pasteurs s’appuient sur les modes de connaissance indigènes pour élaborer leurs stratégies de brûlage. Ces modes de connaissance sont centrés sur la surveillance de la végétation et la prévision des conditions météorologiques futures ; pour la plupart, les connaissances indigènes reposent sur des preuves empiriques qui peuvent être vérifiées par l’expérience vécue.

    L’utilisation pastorale du feu pour la gestion des terres – y compris le moment, la fréquence et l’intensité des feux – correspond bien à la compréhension scientifique de la préservation de l’écologie dans le biome de la savane. Au Sénégal, la stratégie consiste généralement à allumer des feux au début de la saison sèche. Les feux sont plus fréquents dans le sud pour encourager la nouvelle croissance, mais rarement dans le nord, où la perte de fourrage l’emporte sur les autres avantages. L’étendue du brûlage est fonction du résultat souhaité : le brûlage de zones spécifiques d’herbes vivaces sèches permet de créer des pâturages, tandis que le brûlage de grandes étendues de zones environnantes crée des coupe-feu qui protègent les pâturages.

    Face à l’incertitude croissante du climat, il est possible d’intégrer des données scientifiques pour améliorer la résilience de la surveillance du climat par les autochtones et la prise de décision quant à savoir si, quand et comment effectuer un brûlage contrôlé. Trois paramètres cruciaux doivent être pris en compte pour s’assurer que les régimes de brûlage dirigé répondent de manière optimale aux besoins des pasteurs : la probabilité d’inflammation, la vitesse de propagation du feu et la quantité de combustible consommé. Pour quantifier ces paramètres, il existe cinq variables qui peuvent être mesurées à l’aide d’une collecte de données scientifiques : la teneur en humidité du combustible, la charge en combustible mort, le couvert végétal, la vitesse du vent et l’humidité relative. Ces variables sont liées aux conditions climatiques actuelles et passées et sont utiles pour prédire les risques de déclenchement d’un incendie.

    En incluant ces variables dans les simulations de la propagation des incendies, il est possible de développer un modèle météorologique des incendies pour les pays du Sahel, comme le Sénégal. Cela permettrait de formaliser la prédiction du comportement du feu, qui a été historiquement sous-étudiée dans les écosystèmes de savane d’Afrique. Les pasteurs bénéficieraient d’une meilleure compréhension de quand, comment et où utiliser le feu pour préparer efficacement les pâturages pour leurs troupeaux. Cela permettrait d’éviter les feux qui se propagent de manière intense et incontrôlée, endommageant les ressources naturelles limitées. En fait, lors d’un récent atelier financé par USAID, les pasteurs sénégalais ont déclaré avoir besoin de plus d’informations sur les conditions favorables aux feux de brousse.

    Cependant, l’utilité des données scientifiques et des modèles prédictifs seuls est limitée. Les cinq variables qui pourraient être utilisées comme intrants dans les simulations de propagation des feux ne tiennent pas compte des autres perturbations propres aux modes de vie pastoraux. Par exemple, les modèles par lesquels les pasteurs font migrer leurs troupeaux vers différents pâturages peuvent grandement influencer le comportement du feu, car la présence du bétail qui broute et piétine réduit naturellement la quantité d’herbe et donc l’intensité du feu.

    Compte tenu de l’incertitude liée au développement de modèles de prévision des incendies pour les écosystèmes de savane d’Afrique, il sera nécessaire de recourir à des techniques de vérification sur le terrain. Celles-ci s’appuieront probablement sur la surveillance du climat et de l’environnement effectuée par les éleveurs eux-mêmes, soulignant la nécessité de systèmes de connaissances à la fois scientifiques et indigènes.

    La création de partenariats entre les producteurs et la communauté scientifique est un domaine d’intérêt de l’Institut international de recherche sur le climat et la société de l’université Columbia, par le biais du projet « Adapting Agriculture to Climate Today, For Tomorrow (ACToday) Columbia World ». En se concentrant récemment sur la zone sahélienne, ACToday travaille au Sénégal pour établir des liens et accroître l’utilisation des données climatiques afin d’améliorer la résilience des éleveurs et de lutter contre l’insécurité alimentaire.

    L’utilisation en parallèle des modes de connaissance scientifiques et indigènes permet de surmonter les lacunes de chacun. Cela est soutenu par la littérature, qui a montré que l’utilisation des deux a eu un effet positif sur l’adaptation des pasteurs au climat. Les modèles de prévision des incendies qui prennent en compte les deux modes de connaissance seront essentiels pour améliorer la résilience pastorale face au changement climatique, ce qui permettra de mieux garantir que les feux de brousse restent contrôlés et que les brûlages dirigés sont d’une efficacité optimale.

    *Institut de la Terre de l’Université de Columbia

    Phys.org, 22 mars 2021

    Tags : Sahel, France, Barkhane, Tchad, Burkina Faso, Mali, Niger, Mauritanie,changement climatique, sécheresse, désertification,

  • Sahel, l’autre menace djihadiste

    L’Espagne a jeté son dévolu sur les héritiers de l’État islamique en Afrique subsaharienne, des groupes armés et très violents.

    Après leur expulsion de Syrie et d’Irak, les groupes djihadistes ont pris pied dans la région du Sahel. Une étroite bande de no man’s land en Afrique subsaharienne comprenant 11 pays : le Sénégal, le sud de la Mauritanie, le Mali, le nord du Burkina Faso, l’extrême sud de l’Algérie, le Niger, le nord du Nigeria, la bande centrale du Tchad et du Soudan, l’Érythrée et le nord de l’Éthiopie.

    C’est là que l’ancien État islamique est à l’aise, menaçant non seulement les États voisins, mais aussi l’ensemble de l’Europe.

    En fait, le gouvernement espagnol a jeté son dévolu sur ces groupes semi-nomades, islamistes et armés qui se consacrent à l’enlèvement d’étudiants, à l’attaque de soldats et à la pose de voitures piégées.

    C’est ce que dit la secrétaire d’État aux affaires étrangères, Cristina Gallach, lorsqu’elle explique que le terrorisme djihadiste, en particulier en provenance du Sahel, continue d’être l’une des graves menaces pour la sécurité mondiale et pour l’Espagne en particulier.

    Ce n’est pas en vain que, selon les données dont dispose le ministère de l’Intérieur, sur les 10 pays qui ont subi l’année dernière un plus grand nombre d’attaques terroristes, sept se trouvent dans la zone du Sahel, « très proche de l’Espagne ».

    Le haut responsable politique explique que c’est le résultat du déplacement des groupes terroristes du Moyen-Orient et du Proche-Orient vers cette région, car « bien que Daesh se soit calmé, il y a de plus en plus de réseaux djihadistes situés en Afrique », notamment dans des endroits relativement proches de l’Afrique du Nord et de l’Europe, comme la Mauritanie, le Niger, le Mali, le Burkina Faso et le Tchad.

    Mais il n’y a pas que le terrorisme djihadiste au Sahel, les services de renseignement se montrent également très préoccupés par d’autres zones comme le Golfe de Guinée, où l’on craint que des groupes liés à la piraterie ne soient liés à des islamistes.

    M. Gallach souligne qu’afin de coopérer avec les pays touchés par cette  » dynamique d’expansion dans la zone sahélienne  » des groupes terroristes, l’Espagne collabore à la formation de leurs forces de sécurité, en plus de participer avec leurs gouvernements à des travaux de développement dans des domaines tels que l’agriculture, le soutien aux femmes et aux jeunes filles et l’éducation, et ainsi  » renforcer  » la société et empêcher le recrutement de djihadistes.

    Montée exponentielle

    Les experts de la police espagnole mettent en garde contre la « croissance extraordinaire » du recrutement de djihadistes sur les réseaux sociaux pendant la période de la pandémie de coronavirus.

    Selon les données de l’annuaire du terrorisme djihadiste en 2020, 2 350 attaques ont été commises dans le monde, soit une augmentation de plus de 50 % par rapport à 2019, qui a fait 9 748 morts, soit 5 % de plus que l’année précédente.

    Le directeur de l’Observatoire international pour l’étude du terrorisme (OIET), Carlos Igualada, explique que le fait que le nombre de morts ait augmenté dans une moindre mesure que le nombre d’attentats est dû au fait qu’après la défaite militaire de Dáesh, il n’y a plus autant d’actions indiscriminées contre la population civile, mais que la cible principale de celles-ci sont les forces de sécurité.

    La majorité des décès, 3 959, ont été enregistrés en Afghanistan, suivi du Nigeria (1 463), du Burkina Faso (799), du Mali (624) et du Niger (380).

    Igualada souligne également que près de la moitié des attentats perpétrés sur le sol européen entre 2018 et le premier semestre 2020 ont été commis par des détenus radicalisés ou déjà condamnés précédemment pour leurs liens avec le djihadisme.

    De l’avis des auteurs de l’annuaire, cela montre qu’une révision des programmes de déradicalisation et de prévention du radicalisme mis en œuvre dans les prisons est nécessaire.

    Le rapport montre que 37 personnes ont été arrêtées en Espagne en 2020 pour leur implication dans des activités djihadistes, soit 21 de moins qu’en 2019. Ils ont été arrêtés lors de 23 opérations, la majorité, sept, à Madrid, suivie de cinq à Barcelone, deux à Alicante et Las Palmas de Gran Canaria et une à Saragosse, Almería, Ciudad Real, Melilla, Tarragone, Valence, Gérone, Guipúzcoa, Tolède et Castellón.

    Diario de Avila, 21 mars 2021

    Tags : Sahel, Mali, Etats Islamique, ISIS, Daech, JNIM, Al Qaida, Barkhane, terrorisme,

  • Communiqué sur la participation de la Grèce à la réunion ministérielle de la Coalition internationale pour le Sahel

    Annonce du ministère des Affaires étrangères sur la participation du ministre des Affaires étrangères Nikos Dendias à la réunion ministérielle de la Coalition internationale pour le Sahel (19 mars 2021)

    Le ministre des Affaires étrangères Nikos Dendias a participé aujourd’hui, 19 mars 2021, à la réunion ministérielle de la Coalition internationale pour le Sahel («Coalition pour le Sahel»), qui s’est déroulée par vidéoconférence.

    Dans son intervention, le Ministre a noté que la situation dans la région du Sahel continue de requérir l’attention de la communauté internationale tant d’un point de vue humanitaire que sécuritaire. La coopération des partenaires internationaux avec le groupe G5 des pays du Sahel contribue à la réponse aux défis complexes auxquels la région est confrontée en raison de la fragilité de l’environnement sécuritaire. Les problèmes interdépendants comprennent la pauvreté croissante, les activités des organisations criminelles et terroristes et l’augmentation des flux migratoires illégaux.

    Le ministre a souligné que, dans ce contexte, la Grèce renforce sa présence dans la région à travers l’ouverture récente d’une nouvelle ambassade au Sénégal et la nomination de l’ambassadeur de Grèce à Dakar en tant qu’envoyé spécial du ministère des Affaires étrangères pour le Sahel. M. Dendias a souligné qu’il s’agissait d’une manifestation pratique de l’intérêt de la Grèce pour l’Afrique de l’Ouest et les pays du Sahel, dans le but de soutenir activement les efforts visant à renforcer la sécurité et la stabilité de la région, en collaboration avec les pays de la région, la Union et autres partenaires internationaux.

    Ministère grec des affaires étrangères, 19 mars 2021

    Tags : Sahel, Mali, Burkina Faso, Tchad, Niger, Mauritanie, Grèce, Coalition internationale pour le Sahel,

  • Les États Unis au Mali, quels enjeux géopolitiques ?

    Par Ezechiel KITA KAMDAR

    Au Sahel, la présence des Etats-Unis se manifeste désormais plus publiquement après de longues années de discrétion. La Libye, surtout la Somalie ( ou ils y sont présents depuis 1997) sont les deux pays du continent africain où les soldats américains seraient susceptibles de mener des opérations qui dépassent le cadre de la formation et de l’appui.

    La présence militaire des États-Unis en Afrique est aussi discrète que tentaculaire. Le pays a établi son unique base permanente à Djibouti, « hub » de ses activités militaires dans la Corne de l’Afrique où sont stationnés environ 4 000 soldats.
    Des documents déclassifiés, émanant du Commandement des opérations spéciales américaines dévoilés en 2016, seulement 1 % des soldats rattachés à ce Commandement, déployés à l’étranger, se trouvaient en Afrique. Ainsi est créé le Commandement des États-Unis pour l’Afrique (en anglais United States Africa Command ou AFRICOM) est un commandement unifié pour l’Afrique, mis en place par le Département de la Défense des États-Unis en 2007 et entré en fonction en 2008. Il coordonne toutes les activités militaires et sécuritaires des États-Unis sur ce continent.

    En 2010, ce nombre est passé à 10 %, bondissant à 17 % en 2016. En volume, cela représente 1 700 militaires disséminés dans une vingtaine de pays où ils mènent une centaine de missions concomitantes. Cette donnée place l’Afrique juste après le Moyen-Orient en matière d’opérations spéciales menées par les États-Unis selon le même document déclassifié.

    Par ailleurs pour le cas précis du Mali et du Sahel, en octobre 2017, la mort de trois soldats américains tués dans une embuscade au Niger a révélé au grand jour la présence de forces armées américaines dans la région, c’est la première fois qu’une présence opérationnelle de soldats américains est reconnue dans la zone sahélo-saharienne.

    Et pourtant, les Américains y étaient présents avant toute autre puissance notamment la France ( l’Operation serval en janvier 2013), Les activités américaines y sont nombreuses depuis le début des années 2000 par le biais de l’initiative Pan Sahel Initiative (PSI) de lutte contre le terrorisme lancée en 2002, renommée en 2004 Trans-Sahara Counter Terrorism Initiative (TSCTI).

    Depuis lors, des programmes de formations, d’entraînement et d’équipement y sont effectués . Et, chaque année, des opérations conjointes d’exercice militaire en l’occurrence l’opération la plus médiatisée Flintlock qui s’est d’ailleurs déroulée à plusieurs reprises au Niger où ils ont une base militaire de drones de surveillance et de frappes. Le Mali, à maintes reprises, admis à participer à l’exercice Flintlock, la dernière en date de 2019 sur plusieurs sites en Mauritanie et au Burkina Faso.

    Les actions des Etats-Unis sur le continent s’accompagnent généralement de programmes d’entraînement des forces locales, (« train and equip », selon la terminologie militaire américaine) l’unité antiterroriste malienne nouvellement créée (les Forces spéciales anti-terroristes, ou FORSAT) a bénéficié plusieurs formations. Malgré les réticences de l’administration Trump sur le Sahel, cette dernière a créé en 2018, un poste d’envoyé spécial au Sahel face à la recrudescence des attaques terroristes et des groupuscules extrémistes.

    L’occasion de rappeler que depuis l’indépendance du Mali, en dépit de son rapprochement idéologique et économique aux soviétiques, a toujours attisé l’intérêt stratégique américain, ainsi les États-Unis organisent des stages de formation pour les parachutistes maliens dès avril 1966 sans toutefois concurrencer la mainmise soviétique. L’assistance technique se résume en 1968 à huit experts en poste au Mali. Et plus loin, une affaire d’espionnage a terni les relations américano-maliennes en février 1966. Les services de renseignements américains via un sous-officier de l’armée malienne récoltaient des informations et des documents de l’État-major. Aussitôt la trahison découverte, le sous-officier fut immédiatement jugé et jeté en prison. S’il ne manque pas de refroidir les relations entre les deux pays, cet incident diplomatique atteste l’intérêt des États-Unis pour les affaires intérieures maliennes.

    Depuis le début de la crise malienne, les forces américaines ont travaillé étroitement avec les Français au Mali, les troupes françaises bénéficient sur le champ de bataille du soutien de drones américains Predators et les services de renseignements américains. Les Etats-Unis ont déployé plusieurs drones au Niger, sur une base de Niamey, d’où ils décolleront pour effectuer des vols de reconnaissance sur le Nord malien. Après avoir suspendu son aide militaire au Mali lors du coup d’État d’août 2020, Washington redémarre effectivement une collaboration plus solide avec les autorités de la transition, et le contexte semble bon du côté des État unis avec l’arrivée de l’administration Biden plus favorable à un engagement accru au Mali et au Sahel.

    Selon plusieurs spécialistes, cette augmentation de présence américaine dans la région peut être motivée par trois grands enjeux géostratégiques, premièrement la sempiternelle lutte contre la terreur ( le terrorisme). Deuxièmement la géopolitique du pétrole, pour sécuriser les approvisionnements américains par le golfe de Guinée afin d’amoindrir la dépendance aux réserves du Moyen-Orient et enfin la compétition économique, visant à contrer par un pré-positionnement militaire des États-Unis la montée en puissance de la Chine sur le continent africain.

    Le commandant des opérations spéciales américaines, Donald Bolduc dit ceci en 2016 dans le document déclassifié “Les défis auxquels est confrontée l’Afrique pourraient créer une menace qui surpasserait celle à laquelle les États-Unis font actuellement face à cause des conflits en Afghanistan, en Irak, et en Syrie ».

    Guindo Issiaka, Correspondant Tachad au Mali

    Tachad.com, 20 mars 2021

    Tags : Etats-Unis, USA, AFRICOM, Sahel, Mali,



  • Les États-Unis vont accorder plus de 80 millions de dollars d’aide humanitaire aux pays de la région du Sahel : Département d’Etat

    WASHINGTON (Reuters) – Les Etats-Unis vont accorder plus de 80 millions de dollars d’aide humanitaire aux pays de la région du Sahel, a déclaré vendredi la porte-parole du Département d’Etat américain, Jalina Porter.

    Le sous-secrétaire d’État aux affaires politiques, David Hale, a annoncé cette aide lors d’une réunion sur la région, où 3 millions de personnes sont réfugiées ou déplacées à l’intérieur du pays au Burkina Faso, au Tchad, au Mali, en Mauritanie et au Niger, a précisé Mme Porter.

    Reuters, 19 mars 2021

    Tags : Sahel, Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad,

  • Comment la France et les États-Unis peuvent travailler à la stabilisation du Sahel

    Après l’indifférence des années Trump, l’administration Biden devrait élargir et approfondir sa coopération avec la France au Sahel.

    Andrew Lebovich

    La gravité de la situation au Sahel a été rappelée une fois de plus. Cette semaine, une explosion de violence contre des soldats et des civils au Mali et au Niger a rappelé de manière brutale les risques considérables auxquels le Sahel est confronté. Pourtant, le mois dernier encore, un air de triomphalisme régnait lors d’un sommet organisé par la communauté internationale et les nations qui composent le groupement G5 Sahel, qui cherche à apporter la stabilité dans la région.

    Alors que la menace militante continue de s’étendre, des acteurs tels que la France et l’Union européenne – parmi les principaux acteurs internationaux de la sécurité et du développement au Sahel – ont besoin d’une aide accrue. Mais le soutien dont ils ont besoin ne se limite pas à une coopération militaire ou financière ; ils ont également besoin d’une assistance politique, d’autant que les pays de la région privilégient de plus en plus les négociations avec les groupes armés, y compris certains mouvements djihadistes.

    Les États-Unis peuvent contribuer à fournir cette aide, et devraient la cibler en particulier sur les questions difficiles de la stabilisation et de la réforme politique. Une telle assistance permettrait de s’appuyer sur un partenariat sécuritaire déjà solide entre la France et les États-Unis, d’approfondir le partenariat transatlantique tout en contribuant à pousser la France, l’UE et leurs partenaires sahéliens à poursuivre des mesures difficiles mais nécessaires axées sur la gouvernance dans la région.

    Rattraper les négligences du passé

    Sous l’administration Trump, la coopération transatlantique sur le Sahel a été l’un des rares domaines de coopération multilatérale à s’en sortir largement indemne, et pourrait même s’être renforcée. Grâce à des efforts concertés nés d’abord de leur expérience commune en Afghanistan, les forces françaises et américaines opèrent de mieux en mieux ensemble, la France étant désormais considérée comme l’un des partenaires de sécurité les plus importants et les plus fiables des États-Unis. En retour, le soutien américain en termes d’approvisionnement, de transport et de renseignement est essentiel aux opérations françaises au Sahel, tant dans le cadre de l’opération Barkhane que de la Special Operations Task Force Sabre. Et, malgré les menaces de l’administration Trump de réduire la présence américaine au Sahel, le coût relativement faible de l’assistance – environ 45 millions de dollars par an – et la relative indifférence de l’ancien président pour l’Afrique signifiaient que le soutien pouvait largement se poursuivre sans relâche. Les dirigeants français ont également salué à plusieurs reprises la coopération américaine en matière de sécurité au Sahel, qui a joué un rôle important dans l’élimination des chefs djihadistes et dans les opérations françaises et du G5 en cours. Les États-Unis siègent également au sein du Comité de suivi de l’Accord d’Alger, aux côtés d’autres représentants de la communauté internationale.

    Cela dit, sous Trump, le soutien de plus haut niveau pour tout ce qui dépasse les initiatives de sécurité dans la région est resté largement absent. Pendant cette période, les États-Unis étaient loin d’être aussi investis dans la région que leurs homologues européens ; lorsque la communauté internationale organisait des conférences de donateurs majeurs pour des initiatives telles que l’Alliance Sahel ou pour soutenir le G5 Sahel, les États-Unis étaient souvent représentés par des fonctionnaires de niveau inférieur à ceux des autres pays présents. Dans l’ensemble, l’administration a peu fait pour donner la priorité à l’Afrique, et encore moins au Sahel.

    Jusqu’à présent, l’administration Biden a donné un ton différent, non seulement en poussant au renforcement des liens transatlantiques, mais aussi en soulignant l’importance de renouveler et de renforcer la politique étrangère américaine en Afrique, y compris au Sahel. Il s’agit notamment d’un langage positif sur la recherche de liens plus profonds avec le continent, le soutien aux institutions africaines, et l’engagement sur une variété de questions au-delà de la politique de sécurité. Le soutien américain aux opérations militaires françaises est également relativement peu controversé à Washington, et la géopolitique de la région favorise une collaboration étroite entre l’Europe et les États-Unis, notamment dans un contexte d’inquiétude des deux côtés de l’Atlantique face à l’influence croissante de la Russie, de la Chine et de la Turquie en Afrique.

    Une alliance qui fonctionne mieux pour tous

    Vers la fin d’une récente discussion avec le Conseil Atlantique, Emmanuel Macron a noté que les Etats-Unis et la France travaillent « main dans la main » dans la région, et que « dans les mois à venir, notre partenariat avec les Etats-Unis au Sahel, à la fois sur la sécurité mais aussi sur les questions de développement, sera absolument crucial ». Mais ce serait une erreur de limiter une telle coopération aux domaines où la France pense avoir le plus besoin d’aide, et où elle a précédemment demandé plus de soutien à ses partenaires européens également.

    Au contraire, elle devrait également englober des domaines plus délicats tels que la politique régionale et les questions épineuses de gouvernance. Une coopération et une participation américaines plus étroites et plus actives aux efforts déployés au Sahel, plutôt qu’une simple assistance visant à soutenir les efforts de lutte contre le terrorisme, pourraient permettre d’atteindre plusieurs objectifs clés. Elle peut créer une plus grande pression et un élan pour le soutien du Conseil de sécurité de l’ONU aux efforts politiques, ainsi que les réformes politiques nécessaires et une poussée vers des objectifs de longue date tels que la mise en œuvre plus complète de l’accord de paix d’Alger pour le Mali. L’expérience américaine (et les leçons tirées de graves erreurs) dans d’autres zones de conflit peuvent contribuer à informer ces approches politiques au Sahel.

    En outre, dans leur empressement à participer plus activement aux opérations menées par la France, comme la Task Force Takuba, certains responsables européens ont exprimé en privé leur inquiétude d’être entraînés trop loin dans des initiatives ostensiblement « multilatérales » qui restent souvent dominées par la France, ou guidées par le poids de la politique et de l’influence françaises dans la région. Une présence politique américaine plus active pourrait contribuer à apporter non seulement un soutien, mais parfois un contrepoids nécessaire à ces préoccupations. Elle contribuerait également à maintenir l’accent promis sur les solutions politiques, qui est un élément important de la doctrine de stabilisation américaine.

    Dans ses remarques au Conseil atlantique, M. Macron a décrit l’autonomie stratégique comme un moyen d’alléger le fardeau de la politique étrangère des États-Unis, en particulier dans des régions du monde telles que l’Afrique et le Moyen-Orient qui sont « voisines » de l’Europe, plutôt que des États-Unis. Mais, au Sahel, les États-Unis pourraient soulager la France non seulement d’une partie de la charge militaire, mais aussi de la charge politique. Les États-Unis pourraient aider la communauté internationale à définir une nouvelle stratégie indispensable dans la région tout en continuant à approfondir la relation franco-américaine.

    European Council on Foreign Relations, 19 mars 2021

    Tags : Sahel, Union Européenne, France, UE, Mali, Barkhane, Emmanuel Macron, Etats-Unis, USA, AFRICOM,

  • La solution malienne sera à 90% algérienne

    Cette perception de la crise malienne, exprimée par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, traduit l’engagement et le soutien indéfectibles de la nouvelle Algérie fortement attachée au retour à la stabilité en fondement de la sécurité nationale. En puissance d’équilibre reconnue et, dans un environnement régional miné par les ingérences étrangères, en acteur de la paix et de la réconciliation, conforté par une expérience réussie, l’Algérie entend peser de tout son poids pour consolider le processus de paix et de réconciliation nationale.

    La visite du président malien, Bah N’Daw, reçu à l’aéroport Houari-Boumediene, par le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, le ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, et le ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire, Kamel Beldjoud, sera, à coup sûr, une bonne opportunité pour renforcer les relations bilatérales et les acquis du processus de paix. Le devoir d’accompagnement pour une transition démocratique apaisée, porteuse d’espoirs de stabilisation institutionnelle, et l’approfondissement de l’Accord d’Alger constituent la voie idoine pour sortir d’une crise multidimensionnelle aggravée par l’intervention militaire étrangère aujourd’hui menacée d’enlisement.

    A la faveur des traditions de dialogue, acquis au règlement pacifique des conflits, l’Algérie a marqué, de son empreinte indélébile, une dynamique jugée positive par l’ONU et la communauté internationale. Il est important de souligner le caractère stratégique de la percée de Kidal qui a abrité la dernière réunion du comité de suivi de l’Accord d’Alger, présidé par l’Algérie. Pour la première fois depuis six ans, l’armée et l’administration sont de retour dans cette région. Les progrès attestent de la volonté de dialogue et de réunification des parties maliennes confortées par l’engagement des autorités de transition en faveur du processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) ouvert désormais à l’intégration des groupes armés dans l’armée malienne.

    Sur le chemin de la paix et de la stabilité, le Mali a indéniablement trouvé dans la nouvelle Algérie le partenaire précieux pour panser les blessures d’un drame
    incommensurable.

    Horizons, 14 mars 2021

    Tags : Algérie, Mali, Sahel,

  • Mali-Algérie : Des chiffres et des dates

    Tout ce qui touche le Mali touche l’Algérie. C’est, depuis longtemps, clair et net. La profondeur africaine de l’Algérie se matérialise surtout avec ce pays, et pour plusieurs raisons. Il y a ainsi des chiffres qui peuvent éclairer davantage la donne. Deux précisément. Le premier est 1329, et qui est le nombre de kilomètres de frontières terrestres entre les deux pays. Un chiffre loin d’être négligeable. Sur les sept pays avec lesquels l’Algérie partage des frontières terrestres, le Mali est en seconde position (le premier étant le Maroc avec 1739) en nombre de kilomètres.

    Le second chiffre à relever est 7000. Il représente le nombre de Maliens installés en Algérie. Une diaspora dont l’image est parfois liée à celle des migrants, alors qu’elle ne représente pas uniquement cette «catégorie» souvent en situation irrégulière et soumise aux «campagnes» d’expulsion vers les frontières.

    La «maîtrise» de ces deux chiffres est une sécurisation des intérêts et une stabilité renforcée pour les deux pays.

    Entre l’Algérie et le Mali, il y a également des dates à relever, en relation avec les soubresauts enregistrés dans la région, depuis moins d’une décennie. La première d’entre elles est le 20 juin 2015, jour de la finalisation de ce qui est communément connu comme les Accords d’Alger pour la paix au Mali. Un événement majeur et pour le Maghreb et pour le Sahel, qui ont sombré dans la cacophonie totale depuis la chute de Kadhafi en Libye. Un accord qui avait été mis de côté par IBK (Ibrahim Boubacar Keïta), le président malien de l’époque, et dont les conséquences ont été les principales raisons de sa propre mise à l’écart. Là, arrive la seconde date à mentionner, le 18 août 2020. Elle coïncide avec la prise de pouvoir à Bamako par le CNSP (Comité national pour le salut du peuple) et qui a «déclenché» une période de transition qui devrait aboutir aux élections programmées pour mars 2022.

    Les deux chiffres et les deux dates cités plus hauts donnent un aperçu de l’importance à accorder à la visite officielle, entamée hier, du président malien, Bah N’Daw à Alger. Une occasion d’aborder concrètement la situation entre les deux pays, et de mettre sur table les thèmes épineux. L’un d’eux ne peut être évité, celui qui est lié à un chiffre, 200 et une date, le 8 octobre 2020. Ce jour là les nouvelles autorités maliennes avaient relâché 200 terroristes en échange de la libération de quelques otages européens. Un deal dénoncé par l’Algérie, notamment à cause du versement d’une rançon auprès des groupes terroristes de la région. Un épisode qu’Alger n’a pas oublié, et ne pourra pas oublier. La sécurité de la région en dépend. Il va falloir revoir les «mécanismes» liant les deux pays.

    Reporters, 14 mars 2021

    Tags : Algérie, Mali, Sahel, IBK, terrorisme, CNSP, Comité national pour le salut du peuple,