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  • L’Algérie, une histoire millénaire dans la résistance: 1830/1962

    Tags : Algérie, France, colonisation, mémoire, guerre de libération,

    Professeur des universités, expert international docteur d’ Etat 1974- Abderrahmane MEBTOUL Fils du feu Moudjahid Ali emprisonné à El Harrach et Lambèse 1958/1962

    La jeunesse a besoin de connaître son histoire, très riche, qui ne saurait se limiter à la période contemporaine de 1963 à 2022. L’histoire, fondement de la connaissance et de l’action future, une nation sans son histoire étant une nation sans âme. L’histoire de l’Algérie est une histoire millénaire devant remonter de la période des Numides à la période romaine, du kharidjisme et de la période de la dynastie des Almohades en passant par la période de l’occupation espagnole et ottomane (voir A. Mebtoul google.com 2010). Cette présente contribution, certainement imparfaite comme toute recherche à approfondir, en espérant qu’elle suscitera un débat contradictoire au profit exclusif de l’Algérie, sera scindée en deux parties: de la colonisation française au du nationalisme algérien à la révolution du 1er novembre 1954 pour aboutir à l’indépendance de l’Algérie le 5 novembre 1962.

    1.-De .la colonisation française au nationalisme algérien

    La conquête de l’Algérie de 1830 à 1871 par la France marque la fin de la domination ottomane et le début de la domination française. Il semblerait, peut être un prétexte, que tout aurait commencé par la fameuse affaire de l’éventail. Le 30 avril 1827 à Alger, le Dey soufflette avec son éventail le Consul de France, Deval. L’épisode entraîne la rupture diplomatique avec la France. Le Conseil des ministres français décide d’organiser une expédition punitive en Algérie le 31 janvier 1830. D’abord nommés «possessions françaises dans le Nord de l’Afrique», ces territoires prendront officiellement le nom d’Algérie, le 14 octobre 1839. La population algérienne est estimée à 3 millions d’habitants avant la conquête française de 1830.

    Selon l’ouvrage «Coloniser, exterminer» de l’historien Olivier Le Cour Grandmaison, je cite : «Le bilan de la guerre, presque ininterrompue entre 1830/1872 souligne son extrême violence ; il permet de prendre la mesure des massacres et des ravages commis par l’armée d’Afrique. En l’espace de quarante-deux ans, la population globale de l’Algérie est en effet passée de 3 millions d’habitants environ à 2 125 000 selon certaines estimations, soit une perte de 875 000 personnes, civiles pour l’essentiel. Le déclin démographique de l’élément arabe était considéré comme bénéfique sur le plan social et politique, car il réduisait avantageusement le déséquilibre numérique entre les indigènes et les colons».

    Plusieurs observateurs s’accordent à dire que la conquête de l’Algérie a causé la disparition de presque un tiers de la population algérienne. Guy de Maupassant écrivait dans «Au Soleil en 1884», je le cite : «Il est certain aussi que la population primitive disparaîtra peu à peu ; il est indubitable que cette disparition sera fort utile à l’Algérie, mais il est révoltant qu’elle ait lieu dans les conditions où elle s’accomplit». Nous pouvons scinder cette période historique en plusieurs phases.

    Sous Louis Philippe 1er de 1830 à 1848, l’Emir Abdelkader figure charismatique, fondateur de l’Etat algérien selon certains historiens, résiste pendant de longues années à l’occupation coloniale. Il attaque des tribus alliées de la France et bat le général Trézel dans les marais de la Makta près de son fief de Mascara dans l’Ouest algérien. Il encercle la ville voisine d’Oran pendant 40 jours. Arrivé en renfort de métropole, le général Bugeaud inflige une défaite à Abdelkader. Le traité de Tafna est signé, le 30 mai 1837 entre le général Bugeaud et l’Émir qui reconnaît la souveraineté de la France. En échange de pouvoirs étendus sur les provinces de Koléa, Médéa et Tlemcen, il peut conserver 59 000 hommes en armes. L’armée française passe, en septembre 1839, les Portes de fer dans la chaîne des Bibans territoire que l’émir comptait annexer.

    L’Emir Abdelkader, considérant qu’il s’agit d’une rupture du traité de Tafna, reprend la guerre contre la France le 16 mai 1843. Le 14 août 1844 le général Bugeaud écrase l’armée du sultan marocain à la bataille d’Isly. L’armée marocaine se replie en direction de Taza. Le sultan s’engage alors à interdire son territoire à Abdelkader, en traitant avec la France. Le 23 septembre, les troupes d’Abdelkader sortent victorieuses lors de la bataille de Sidi Brahim, engagée par le colonel Montagnac. En décembre 1847 , l’Emir Abdelkader se rend aux spahis (nomades des régions steppiques de l’Algérie). Placé en résidence surveillée pendant quatre ans en France, l’émir fut libéré par Napoléon III, visita plusieurs villes de la métropole avant de rejoindre Damas et résida le restant de sa vie en Syrie.

    Le 11 décembre 1848, la Constitution de 1848 proclame l’Algérie partie intégrante du territoire français. Bône, (Annaba actuellement) Oran, Alger deviennent les préfectures de trois départements français. Les musulmans et juifs d’Algérie deviennent «sujets français» sous le régime de l’indigénat. Le territoire de l’ex-Régence d’Alger est donc officiellement annexé par la France, mais la région de la Kabylie qui ne reconnaît pas l’autorité française résiste encore. L’armée française contrôle alors tout le nord-ouest de l’Algérie.

    Les succès remportés par l’armée française sur la résistance d’Abd el-Kader, renforcent la confiance française, et permettent de décréter, après débats, la conquête de la Kabylie qui devait intervenir à l’issue de la guerre de Crimée (1853-1856) et qui a mobilisé une partie des troupes françaises. C’est à cette époque que Fatma N’soumer la femme rebelle marqua une grande résistance. Née en 1830, l’année même de l’occupation française d’Algérie, en 1853, elle avait 23 ans dans son Djurjura natal. Elle est arrêtée le 27 juillet 1857 dans le village de Takhliit Ath Atsou près de Tirourda. Placée, ensuite, en résidence surveillée à Béni Slimane, elle y meurt en 1863, à l’âge de trente-trois ans, éprouvée par son incarcération.

    En mars 1871, profitant de l’affaiblissement du pouvoir colonial à la suite de la défaite française lors de la guerre franco-prussienne (1870-1871), une partie de la Kabylie se soulève, favorisée par plusieurs années de sécheresse et de fléaux. Elle débute au mois de janvier avec l’affaire des Spahis et en mars avec l’entrée en dissidence de Mohamed El Mokrani qui fait appel au Cheikh El Haddad, le grand maître de la confrérie des Rahmaniya. La révolte échoue et une répression est organisée par les Français pour «pacifier» la Kabylie, avec des déportations. À la suite d’un ordre qui a été donné par l’armée de les envoyer en France, les Spahis se soulèvent fin janvier 1871 à Moudjebeur et à Ain-Guettar dans l’Est algérien à la frontière avec la Tunisie. Le mouvement est rapidement réprimé. Dès lors, le seul moyen de prévenir les révoltes, c’est d’introduire une population européenne nombreuse, de la grouper sur les routes et les lignes stratégiques de façon à morceler le territoire en zones qui ne pourront pas, à un moment donné, se rejoindre. La loi du 21 juin 1871 (révisée par les décrets des 15 juillet 1874 et 30 septembre 1878) attribue 100 000 hectares de terres en Algérie aux immigrants d’Alsace-Lorraine.

    De 1871 à 1898 les colons acquièrent 1 000 000 d’hectares, alors que de 1830 à 1870 ils en avaient acquis 481 000. Le 26 juillet 1873 est promulguée la loi Warnier, visant à franciser les terres algériennes et à délivrer aux indigènes des titres de propriété. Cette loi donne lieu à divers abus et une nouvelle loi la complétera en 1887. Son application sera suspendue en 1890. Le Code de l’Indigénat est adopté le 28 juin 1881 distinguant deux catégories de citoyens : les citoyens français (de souche métropolitaine) et les sujets français, c’est-à-dire les Africains noirs, les Malgaches, les Algériens, les Antillais, les Mélanésiens. Le Code était assorti de toutes sortes d’interdictions dont les délits étaient passibles d’emprisonnement ou de déportation. Après la loi du 7 mai 1946 abolissant le Code de l’indigénat, les autochtones sont autorisés à circuler librement, de jour comme de nuit, et récupérer le droit de résider où ils voulaient et de travailler librement. Cependant, les autorités françaises réussirent à faire perdurer le Code de l’indigénat en Algérie jusqu’à l’indépendance en maintenant le statut musulman et en appliquant par exemple le principe de responsabilité collective qui consistait à punir tout un village pour l’infraction d’un seul de ses membres. L’Algérie possède un nouveau statut en 1900 : elle bénéficie d’un budget spécial, d’un gouverneur général qui détient tous les pouvoirs civils et militaires.

    Après une longue lutte de l’Emir Abdelkader considéré comme le précurseur de la fondation de l’Etat algérien, Messali Hadj dès 1927 réclame l’indépendance de l’Algérie ayant été le fondateur du Parti du peuple algérien (PPA). Cependant, bien que la résistance ait toujours existé depuis toutes les invasions, ce sont les guerres mondiales qui permirent une prise de conscience plus forte de l’injustice qui frappait la majorité des Algériens souvent analphabètes et travaillant à des salaires de misère. Pour faire face aux pertes humaines de la Grande Guerre, la France mobilisa les habitants des départements français d’Algérie: musulmans, juifs et Européens.73.000 mobilisés dans la population française, et 176. 000 dans la population «indigène». Le 08 mai 1945 alors que la Seconde Guerre mondiale prend fin en Europe, en Algérie, des manifestations nationalistes algériennes sont réprimées par l’armée française à Sétif et Guelma,, selon la source algérienne 45000 morts.

    Suite au Manifeste du peuple algérien de Ferhat Abbas en 1943, les élections législatives de 1946 sont un succès pour l’Union démocratique du Manifeste algérien (UDMA). Son parti remporte onze des treize sièges réservés à l’Algérie à l’Assemblée nationale. La loi sur le statut de l’Algérie est promulguée en septembre 1947: l’Algérie reste composée de trois départements et le pouvoir est représenté par un gouverneur général nommé par le gouvernement français. En 1948 trente-six des 59 candidats du MLTD sont arrêtés. Il est utile de préciser qu’au début du XXe siècle, plusieurs leaders algériens revendiquent le droit à l’égalité ou à l’indépendance. La plupart des figures du Mouvement national algérien vont être surveillées de près par les services policiers français, d’autres seront exilées vers d’autres pays comme l’a été l’émir Khaled El Hassani Ben El Hachemi en Égypte puis en Syrie. Nous avons des figures et sans être exhaustif, Messali Hadj, Malek Bennabi, Mohamed Hamouda Bensai, Ben Badis, Mohamed Bachir El Brahimi, Larbi Tebessi, Ferhat Abbas, Omar Ouzeggane qui ont posé le problème de l’indépendance de l’Algérie avec des approches différentes.

    2.-De la révolution 1954-1962 à l’indépendance politique

    Le CRUA est fondé en mars 1954 et organise la lutte armée. Le parti du Mouvement national algérien est fondé en juillet 1954 par les messalistes. Le Front de Libération nationale FLN lui succède en octobre 1954 par la branche du CRUA (Comité révolutionnaire d’unité et d’action). Par la suite, existera une divergence entre la tendance de Messali Hadj et celle du FLN, suite à l’échec de la médiation de Ben Boulaïd, ce qui entraînera par la suite des luttes fratricides. Le déclenchement de la révolution algérienne a été décidé dans la casbah d’Alger et à Batna sous la présidence de Mostefa Ben Boulaïd dans la réunion des 22 cadres du Comité révolutionnaire d’unité et d’action CRUA). Il s’agit de Badji Mokhtar- Belouizdad Athmane- Benboulaïd Mustapha- Benabdelmalek Ramdane- Benaouada Amar- Ben M’hidi Larbi- Bentobbal Lakhdar- Bitat Rabah- Bouadjadj Zoubir- Bouali Saïd- Bouchaïb Ahmed- Boudiaf Mohamed- Boussouf Abdelhafid- Derriche Elias- Didouche Mourad- Habachi Abdesslam- Lamoudi Abdelkader- Mechati Mohamed- Mellah Rachid- Merzougui Mohamed- Souidani Boudjema-Zighoud Youcef.

    L’une des décisions stratégiques du groupe est la mise en place d’un découpage territorial du pays en cinq zones coiffées par Mostefa Benboulaïd pour la zone 1, Didouche Mourad pour la 2, Krim Belkacem pour la 3 – Rabah Bitat pour la 4 et Larbi Ben M’hidi pour la 5, Mohamed Boudiaf assurant la coordination et les relations avec l’extérieur. La déclaration du 1er novembre 1954 est émise à partir de Tunis . Dans la nuit du 1er novembre 1954, la caserne de la ville de Batna est attaquée par les moudjahidine. Et c’est la guerre. Environ 100 000 soldats français sont affectés dans les Aurès et plus tard ils seront plus de 400 000 en Algérie. Le massacre de Skikda (ex-Philippeville) la mort d’une centaine de manifestants algériens, eut lieu du 20 au 26 du mois d’août 1955. La même année, à l’Assemblée générale de l’O.N.U, l’inscription de l’affaire algérienne est à l’ordre du jour. Le Congrès de la Soummam organisé par Abane Ramdane, Larbi Ben M’hidi, et Krim Belkacem le 26 août 1956 aux villages Ighbane et Ifri dans la commune d’Ouzellaguen (Kabylie) a été déterminant et a été l’acte fondateur de l’Etat algérien moderne et pilier déterminant pour la réussite de la révolution algérienne.

    Après le congrès de la Soummam, l’Algérie a été divisée en six wilayas ou états-majors. Une wilaya est divisée en quatre zones. Chaque zone est divisée en quatre régions. La région est divisée en quatre secteurs. Le Conseil national de la révolution algérienne CNRA désigné par le congrès de la Soummam se composait de 34 membres: 17 titulaires et 17 suppléants. Pour les titulaires, nous avons Mostefa Ben Boulaïd, Youcef Zighoud, Belkacem Krim, Amar Ouamrane, Med Larbi Ben M’hidi- Rabah Bitat, Mohammed Boudiaf, Ramdane Abane -Ahmed Ben Bella, Mohammed Khider, Hocine Aït Ahmed, Med Lamine Debbaghine, Idir Aïssat, Ferhat Abbas, M’hamed Yazid, Benyoucef Ben Khedda, Taoufik El Madani. Après la condamnation de Larbi Ben M’hidi et le déroulement du congrès de la Soummam, le FLN intègre les dirigeants du Mouvement national algérien (MNA).

    Plusieurs partis algériens adhèrent à la cause du FLN. Les Aurès, le Constantinois, l’Ouest de l’Algérie, la Kabylie, et. seront les zones les plus sensibles du point de vue stratégique et logistique. Les deux pays(le Maroc et la Tunisie) sont sous protectorat français mais aideront le FLN. Ils hébergent les deux armées de l’ALN aux frontières. Cependant, l’histoire se précipite. La délégation des principaux dirigeants du FLN Mohamed Khider, Mostefa Lacheraf, Hocine Ait Ahmed, Mohamed Boudiaf, et Ahmed Ben Bella est arrêtée, à la suite du détournement, le 22 octobre 1956 par l’armée française, de leur avion civil marocain, entre Rabat et Tunis. En 1959, Messali Hadj sort de prison, il est assigné à résidence.

    Durant cette période, des Algériens de l’armée française désertent, venant grossir les rangs de l’ALN dont certains seront connus au lendemain de l’indépendance politique et qui ont contribué à la modernisation de l’ANP, contrairement à certaines supputations de véritables patriotes, comme Khaled Nezzar, Larbi Belkheir, Mohamed Touati, Mohamed Lamari, Abbas Gheziel, Abdelmalek Guenaïzia etc… Les étudiants algériens s’impliquent. Après la création de l’UGEMA, en 1955, par Belaïd Abdesselam, Mohamed Seddik Benyahia, Lamine Khène, et Aït Challal, la section locale de Montpellier élit à sa tête Mohamed Khemisti (futur ministre des Affaires étrangères qui fut assassiné durant la période Ben Bella). Des intellectuels français vont aider le FLN comme Maurice Audin qui fut torturé et tué par les services français.

    Frantz Fanon s’engage auprès de la résistance algérienne. Albert Camus, natif d’Algérie, fut un défenseur des droits des Algériens, dans les années 1940, avant de refuser de prendre position pour l’indépendance avec cette phrase célèbre prononcée à Stockholm en 1957: «Si j’avais à choisir entre la justice et ma mère, je choisirais encore ma mère». Dès 1956, Jean-Paul Sartre, et la revue Les Temps modernes prennent parti contre l’idée d’une Algérie française et soutiennent le désir d’indépendance du peuple algérien. La découverte de pétrole dans le Sud algérien favorise les convoitises et ainsi est annoncé le plan de développement économique et social dit Plan de Constantine visant à la valorisation de l’ensemble des ressources de l’Algérie, mettant en relief les relations financières entre l’Algérie et la métropole (juin 1955) et les perspectives décennales du développement économique de l’Algérie (mars 1958).

    En 1960, l’ONU annonce le droit à l’autodétermination du peuple algérien. Le côté français organise des pourparlers avec le gouvernement provisoire algérien Plusieurs réunions à l’extérieur du pays vont aboutir aux accords d’Evian. Le 17 octobre 1961, la nuit noire appelée aussi la bataille de Paris avec le massacre du 17 octobre 1961. Plusieurs Algériens sont tués en métropole lors d’une manifestation du FLN. Il y aura aussi des milliers d’arrestations au sein des Algériens. Le tournant a été les accords d’Evian qui sont le résultat de négociations entre les représentants de la France et du Front de Libération nationale, accords signés le 18 mars 1962 à Evian -les- Bains (Haute- Savoie) et se traduisent immédiatement par un cessez-le-feu applicable sur tout le territoire algérien.

    Du côté algérien, nous avons la délégation du FLN, Krim Belkacem, Saâd Dahlab, Benmostefa Benaouda dit Si-Aamar, Lakhder Bentobbal, Taïeb Boulahrouf, Mohamed Seddik Benyahia, Seghir Mostefaï, Redha Malek, M’hamed Yazid, Ahmed Boumendjel et Ahmed Francis. Côté français, il y avait Louis Joxe, Bernard Tricot, Roland Cadet, Yves Roland-Billecart, Claude Chayet, Bruno de Leusse, Vincent Labouret, le général Jean Simon, le lieutenant- colonel Hubert de Seguins Pazzis, Robert Buron et Jean de Broglie. Dans la foulée, le CNRA se réunit à Tripoli (Libye) du 27 mai au 5 juin 1962 pour, en principe, entériner les termes des accords d’Evian. L’ordre du jour est rapidement débordé et la conférence adopte, après amendements, un programme de gouvernement préalablement élaboré à Hammamet -Tunisie.

    Ce document que l’histoire retient sous le nom de programme ou parfois Charte de Tripoli, caractérisé par bon nombre de dissensions internes au sein de la direction, certains acteurs affirmant qu’il n’a jamais été adopté, établit pourtant le régime socialiste comme modèle de développement et impose le parti unique comme système politique. Rappelons que de septembre 1958 à janvier 1960, Ferhat Abbas a été président du GPRA, Benyoucef Benkhedda d’août 1961 à aout 1962, Abderrahmane Farés de juillet 1962 à septembre 1962, président de l’Exécutif provisoire et à nouveau Ferhat Abbas du 20 septembre au 25 septembre 1962 président de ‘l’Assemblée nationale constituante ANC. Lors du référendum d’autodétermination de l’Algérie où les électeurs ont eu à se prononcer par «Oui» ou par «Non» sur la question suivante: «Voulez- vous que l’Algérie devienne un Etat indépendant, Le ‘’Oui » l’emporte par 99,72% (5 994 000 sur 6 034 000 votants et 530 000 abstentions). La France reconnaît l’indépendance de l’Algérie le 3 juillet et celle- ci est proclamée le 5 juillet 1962.

    #Algérie #1ernovembre #Colonisation

  • Algérie-France: Une visite ratée, déformée et parodiée !

    Algérie-France: Une visite ratée, déformée et parodiée !

    Algérie, France, colonisation, mémoire, Emmanuel Macron,

    Lors de sa visite en Algérie, le président français a préféré parler d’«immigration choisie» et de projets d’«incubateurs high tech» franco-algériens. Le président a aussi évoqué la création de «studios de cinéma» pour favoriser la créativité de la jeunesse algérienne.

    Ah oui, également, une commission d’historiens des deux pays, qui sera chargée d’élaborer l’histoire de la colonisation à partir des archives de l’un et l’autre pays.

    Des formules à l’emporte pièce et uniquement pour la galerie, avec toujours le vide sidéral au niveau de l’action. il y aurait trop à dire sur tout cela, je me contenterai de deux observations, liées à ce voyage en Algérie. La première sur la création « d’une commission mixte d’historiens ». Cette initiative est une concession inutile qui ne nous (Algériens) voudra que des humiliations supplémentaires.

    Quel besoin en avons-nous de la France ?

    Et quels besoins, autres que politiciens, en ont les Français de l’Algérie ?

    Même s’il restait encore quelques archives à explorer, la colonisation de l’Algérie est aujourd’hui suffisamment documentée. Je parie que dans les mois et peut-être les années qui suivront, cette commission distillera, à destination des algériens, un lent poison de polémiques et de débats que nous devrons boire jusqu’à la lie.

    Cette commission pourra-t-elle dire aux uns et autres que formellement la colonisation était un crime en soi, quelque que soit ses motifs ?

    Cette commission pourra-t-elle dire que le système colonial avait poussé inexorablement les Algériens à la déchéance, la famine et les épidémies. C’est dire que Algériens et Français, ne dansent pas sur le même registre d’attribution. Les deux intentions sont diamétralement opposées.

    La deuxième observation c’était de voir le président Français passé nouvellement un cran en expliquant aux Algériens ce qu’ils savaient déjà, alors renier et garder sous silence encore une fois de plus, les crimes de la colonisation, c’est se donner le droit de dire quand commence l’histoire et quand elle finit. La guerre a été perdue par la France. C’est acté.

    Mais le Président Français a franchi un pas important en parlant «d’une histoire d’amour» entre la France et l’Algérie, il nous commente le futur dans une espèce d’élan mystique, pour demander à la jeunesse Algérienne d’oublier le passé, d’aimer un peu plus la France et que tous les Français leur doivent solidarité par amour éperdu pour l’humanité, la démocratie, les valeurs, enfin tous ces balivernes qui font l’ordinaire du blabla pour le reste du monde.

    Pas grave, suffira de faire semblant. Il en profitera pour offrir des nouvelles opportunités à la jeunesse algérienne, des visas, des incubateurs en faisant la promotion d’une immigration choisie en privilégiant ceux qui ont fait de hautes études. Un petit coup de pommade au passage, ça c’est davantage pour la politique de la France envers l’Algérie.

    Certes la France est un pays important, mais l’Algérie l’est également L’Algérie reste, en revanche, la clef de l’Afrique. Enfin et surtout, l’Algérie n’est plus colonisée, après 132 ans le peuple Algérien n’est pas mort, il est bien libre, une liberté acquise chèrement et cela mérite d’être bravement et fièrement dite.

    Sûrement, il faut normaliser nos rapports avec la France, mais ça ne passe pas et depuis des années la presse française ne cesse d’accuser l’immigration (surtout Algérienne) de tous les maux, de l’insulter quotidiennement, d’exiger son expulsion catégorique et plus encore d’exiger la reconnaissance des bienfait de la colonisation pour avoir construit un pays qui n’existait pas (routes, voies ferrées, barrages, aéroports, ports, infrastructures, écoles, etc.).

    Regardons déjà la France, longtemps, les actes anti-musulmans se sont résumés à des violences physiques qui se multiplient, ainsi qu’à des attaques à des lieux de culte musulman, toutes ces victimes suscitent compassion a minima chez les politiques et indifférence dans les médias, donc il n’y a pas de quoi donné des leçons en matière de haine et de mépris.

    La France l’a démontré par une presse conventionnée, que l’anti-algérien trouve sa source dans cette vieille « blessure d’orgueil » dont certains ne parviennent pas à se départir. Certains veulent se convaincre que l’Algérie restera un valet à l’ancien colonisateur, mais l’Algérie dans le monde et dans ses rapports avec d’autres pays se porte bien, après soixante année d’indépendance, l’Algérie d’aujourd’hui est en droit de condamner la colonisation Française et elle est en mesure de revendiquer tous ses droits dans la restitution des richesses spoliés et transférer en France.

    Aujourd’hui la France veut « renforcer » le partenariat avec l’Algérie ?

    Oui à un partenariat de gagnant-gagnant à l’image des relations italo-algériennes qui sont ce que devraient être les relations algéro-françaises : coopération, transfert de technologie et investissement à tous les niveaux. Plus de 200 entreprises italiennes travaillent en Algérie, contrairement à certaines entreprises françaises moins compétitives par manque d’investissement en sol algérien, deux entreprises françaises (Suez et RATP) ont vu leurs contrats non renouvelés et certaines, ont plier bagages, comme Alsthom, Crédit agricole, Société Générale et BNP. Ces derniers refusaient de réinvestisser dans le pays une partie de leurs bénéfices.

    Il faut noter que les entreprises françaises travaillant en Algérie savent qu’être là c’est juste pour vendre un produit et encaisser des marges, c’est plus facile. Alors que l’Algérie veut une approche globale comprenant par exemple du transfert de compétences, de l’assistance à l’installation et du support. L’Algérie veut du transfert de technologie et les parties françaises n’ont pas l’envie de transmettre.

    Aujourd’hui l’Algérie et sa jeunesse refusent et rejettent les valeurs dégénérées qui inculquent dans les écoles primaires qu’un homme peut bien être «enceinte» de son mari et qu’il s’agit là de l’un des plus beaux progrès de l’humanité ou encore cette volonté diabolique de diviser, cette culture de mort que l’Occident ne cesse de répandre partout.

    On a vu plus récemment le président français ouvrir joyeusement les bras à toute une jeunesse algérienne qui faisait retentir les rues d’Oran de slogans (On.Two.Three Viva l’Algerie) peu agréables vis-à-vis de la France qui finit tout de même par se rendre compte que NON, le jeunesse algérienne n’acclamait pas une distribution de visas.

    La Dame France, avec ces dirigeants politiques, ses médias et ses sinistres polémistes, artisans de la division et de la haine souscrit fortement à ces billevesées, ainsi nous méprisons cette hypocrisie, ces indignations calculées, qui aujourd’hui, dans ces organes de presse se font plaisir avec des clichés déformés, et toutes ces déclarations et actions en la matière sont donc purement racistes, et visent principalement à tenter de faire oublier les très longues années de colonisations et de spoliations et dépouillement des richesses, les Français doivent savoir que les intérêts de l’Algérie ne sont pas les intérêts de la France.

    Pour conclure et être plus clair, je donne tort à la France dont sa relation avec l’Algérie par manque de maintien, de tenue et surtout pour un orgueil colonial versé dans l’obscénité. La suprématie de cette civilisation en voie de pourrissement et son lot de valeurs inversées se trouvent, pour la première fois, frontalement contestées.

    L’immigration ou je dirais les musulmans de France,ont largement eu le temps de constater, durant ces deux dernières années, à quoi ressemble une société de l’inclusion, du vivre ensemble et de l’égalité, une société qui érige le «droit à la différence» comme repère d’une civilisation occidentale, c’est dire d’une population vidée de sa matière par un lavage de cerveau continu, qui les fait maintenir dans un monde virtuel, le reste du monde, en gros 80% de l’humanité, regarde ce monde occidental de plus en plus avec une immense perplexité !

    L’Algérie affirme haut et fort que son peuple refuse de cautionner les positions idéologiques à sens unique et chaque pays défend ses intérêts. C’est ainsi que l’Algérie vient de décider mettre la langue française à la porte de nos Ecoles.

    Source

    #Algérie #France #Macron #colonisation #mémoire

  • Réponse de la Chine aux accusations du président Macron

    Réponse de la Chine aux accusations du président Macron

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    Lors de sa visite en Algérie, le président français Emmanuel Macron a accusé des puissances impérialistes, en citant la Russie, la Chine et la Turquie, de nourrir un sentiment anti-français chez la jeunesse algérienne et africaine au sujet du passé colonial français en Algérie et en Afrique.

    Cette information a été relayée depuis le 21 août par des médias francophones dont le quotidien français Le Figaro et le site algérien TSA. C’est une acusation regrettable, lourde et sans fondement.

    A mon avis, si la France n’est pas aimée par des jeunes algériens, il faut leur demander pourquoi, il faut écouter leur voix pour comprendre ce sentiment anti-français. Accuser d’autres pays n’aide pas les choses. On ne peut pas accuser les autres pays avec des observations très personnelles du genre « il y a une immense manipulation sur les réseaux sociaux».

    La Chine et l’Algérie ont établi leurs relations diplomatiques en 1958. Quatre ans avant son indépendance. Depuis, les deux pays entretiennent de très bonnes relations. Un petit exemple : En 1963, la Chine a envoyé sa première équipe médicale en Algérie, première du genre en ce qui concerne son envoi d’équipes médicales à l’étranger.

    Si la Chine obtient une certaine popularité chez les algériens, c’est grâce à ce qu’elle a fait pour ce pays et son peuple et pas sur ce qu’elle a dit sur les réseaux sociaux. Les algériens, plus globalement les africains, sont sensés et autonomes. Ils ne sont pas des adolescents qui ont besoin de filtrage parental lorsqu’ils regardent les réseaux sociaux.

    Les dirigeants africains sont lucides et savent comment choisir les pays partenaires. Ils savent quels projets sont bénéfiques pour leurs pays. On ne peut pas dire qu’ils font le bon choix quand il s’agit d’un projet européen ou américain et qu’ils sont dupes quand il s’agit d’un projet chinois.

    Enfin, je dois rappeler une chose à nos amis français. La France et la Chine coopèrent en Afrique. Lors de la visite du Premier Ministre chinois Li Keqiang en France en 2015, les deux pays ont publié une déclaration conjointe sur la coopération dans les marchés tiers. En 2018, lors de sa visite en Chine, le président français Emmanuel Macron a même assisté à la signature d’un partenariat entre la Banque de Développement de Chine et l’Agence française de développement pour soutenir des projets en Afrique sur le climat. Ces projets ont été concrétisés au fur et à mesure. En 2020, la première phase d’un projet d’assainissement à Dakar, cofinancé par la Chine et la France, a été mise en service en présence de l’ambassadeur de Chine au Sénégal.

    Début 2022, la Chine et la France ont signé un document portant sur la liste des projets de démonstration du 4ème cycle de développement de la coopération sur les marchés tiers marquant la dernière étape de cette initiative visant à renforcer la coopération internationale. Cette liste comprend des projets d’infrastructure et d’énergie nouvelle en Afrique, en Europe Centrale, et en Europe de l’Est.

    L’Afrique est un continent ouvert et suffisamment grand pour accueillir les investisseurs français, chinois, américains, etc. Il est temps d’arrêter de considérer l’Afrique comme la chasse gardée d’un pays ou d’un autre.

    #France #Chine #Afrique #Macron #Algérie

  • France-Algérie : la délicate question des archives

    France-Algérie : la délicate question des archives

    France, Algérie, Archives, mémoire, colonisation,

    Les chefs d’État algérien et français ont récemment annoncé la création d’une commission d’historiens pour étudier la période coloniale. L’idée est de « regarder ensemble cette période historique »​, qui va du début de la colonisation, en 1830, à la fin de la guerre d’indépendance en 1962. Mais en ayant accès à quelles archives ? Éléments de réponse.

    Pour tenter d’éteindre l’incendie mémoriel​, selon l’expression de l’historien Benjamin Stora, qui existe entre la France et l’Algérie, les chefs d’État des deux pays ont décidé, la semaine dernière, de créer une commission mixte d’historiens. Pour regarder ensemble cette période historique​, ont-ils indiqué fin août. Cette période va du début de la colonisation (1830) à la fin de la guerre d’indépendance (1962).

    Apaiser les mémoires de part et d’autre de la Méditerranée en développant une meilleure connaissance de ce que fut cette période, l’enjeu est à la fois historique et politique. Le problème est que les incendies mémoriels sont allumés par les gouvernements eux-mêmes​, note l’historien français Emmanuel Blanchard, directeur adjoint de Sciences Po Saint-Germain-en-Laye et auteur d’une Histoire de l’immigration algérienne en France. En octobre 2021, les propos d’Emmanuel Macron qui s’interrogeait sur l’existence d’une nation algérienne avant la colonisation, avaient ouvert une crise entre les deux pays. On ne peut pas jouer avec l’Histoire. On ne peut pas, d’un côté, qualifier la colonisation de crime contre l’humanité (N.D.L.R. : en 2017) et, de l’autre côté, laisser entendre que c’est la France qui a créé une nation algérienne, ce qui est factuellement faux​, relève l’historien algérien Amar Mohand-Amer.

    Quelles archives seront accessibles ?

    Dans l’immédiat, le fonctionnement de cette commission n’a pas été précisé. Cinq à six historiens de chaque pays pourraient la composer. Pour quelle durée ? Avec quels moyens ? Et surtout, en ayant accès à quelles archives ? La grande majorité des archives sur la colonisation sont conservées en France​, note Amar Mohand-Amer. Mais toutes ne sont pas encore accessibles. Pour Emmanuel Blanchard, sur ce sujet, les autorités françaises ont effectué un pas de deux​.

    En décembre 2021, les archives judiciaires et celles liées aux enquêtes de police durant la guerre d’Algérie ont été ouvertes sans qu’il y ait besoin de dérogations. Mais l’accès aux archives des services de renseignement et celles liées à l’usage des armes chimiques reste plus difficile​, relève-t-il. Il faudrait trouver une solution afin que les archives conservées en France soient numérisées ou qu’une partie soit transférée en Algérie​, aimerait Amar Mohand-Amer qui vient de passer plusieurs mois à Nantes pour un travail universitaire sur l’année 1962 qui sera présenté à l’automne. Avec cette commission, la question de l’accès aux archives algériennes se posera aussi.

    7 millions de personnes concernées en France

    Mais si l’accès aux archives est essentiel, pour Emmanuel Blanchard, il ne faut pas partir avec l’idée qu’on va découvrir un tas de secrets. Depuis au moins vingt ans, des travaux ont été menés sur les violences commises par l’armée française ​pendant la période de conquête au XIXe siècle : les razzias, les enfumades, ces pratiques qui visaient à enfumer des populations algériennes enfermées dans des grottes.

    Ne serait-ce qu’en France, ce futur travail d’historiens concerne sept millions de personnes affectivement liées à la guerre d’Algérie, selon les estimations de Benjamin Stora, auteur d’un rapport sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie. C’est aussi une histoire mondiale car l’indépendance de l’Algérie a eu des échos dans le monde entier : à New York, Belgrade, au Caire​, rappelle Emmanuel Blanchard. Actuellement, on a tendance à davantage parler de mémoire que d’Histoire. Or, il ne faut pas que la mémoire remplace l’Histoire. J’attends donc que cette commission puisse créer de bonnes conditions de recherches​, insiste Amar Mohand-Amer.

    Ouest France, 01/09/2022

    #France #Algérie #Archives

  • Algérie : Macron n’a pas effacé les cicatrices coloniales

    Algérie : Macron n’a pas effacé les cicatrices coloniales

    Algérie, Emmanuel Macron, France, mémoire, colonisation,

    ORAN, Algérie (AP) – Les dirigeants de la France et de l’Algérie ont franchi samedi une étape importante vers la réparation des relations marquées par les différends sur la migration et l’héritage des crimes coloniaux, acceptant de coopérer en matière d’énergie, de sécurité et de réévaluer leur histoire commune.

    Le président français Emmanuel Macron a conclu une visite de trois jours en Algérie par une série d’accords qui, espère-t-elle, faciliteront les relations avec le plus grand pays d’Afrique, un important fournisseur de gaz et de pétrole de l’Europe et un acteur militaire régional influent.

    Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a salué « une visite excellente et très réussie » et a crédité les efforts personnels de Macron vers le rapprochement. Les deux étaient amis lors de leur dernière rencontre samedi, souriant, s’embrassant et se tenant la main. Tebboune a spécifiquement fait l’éloge d’une réunion de sécurité conjointe sans précédent, sans donner plus de détails.

    Mais les accords publiés par le bureau de Macron étaient minces sur les détails et s’arrêtent loin d’une excuse officielle pour les méfaits de l’époque coloniale de la France, que les Algériens réclament depuis longtemps.

    Les pays ont convenu de coopérer sur le développement du gaz et de l’hydrogène et sur la recherche médicale, et de créer une commission mixte pour examiner les archives des 130 années où l’Algérie était le joyau de la couronne de l’empire français.

    L’étude comprendra les retombées des essais nucléaires français dans le Sahara algérien, des questions non résolues sur les restes de combattants de la résistance tués et d’autres chapitres sombres de la guerre d’indépendance de huit ans de l’Algérie.

    « Je veux la vérité et la reconnaissance », au lieu du « repentir », a déclaré Macron.

    Mohand Arezki Ferrad, un ancien législateur qui enseigne à l’Institut d’histoire d’Alger, a qualifié la nouvelle commission de « manœuvre astucieuse pour se dégager de l’obligation de demander pardon à l’Algérie pour ce qu’il a lui-même qualifié de crimes contre l’humanité ».

    En tant que premier dirigeant français né après l’ère coloniale, Macron a cherché à confronter les méfaits passés de son pays tout en se tournant vers une nouvelle ère de relations avec des terres autrefois colonisées.

    « Nous avons eu des moments émouvants ces derniers jours qui nous ont permis de jeter les bases de ce qui est à venir », a déclaré Macron en concluant son voyage.

    Il a rencontré des chefs religieux, enregistré une vidéo TikTok dans un magasin de disques emblématique algérien et regardé une performance de break-dancers qui espèrent participer aux Jeux olympiques de 2024 à Paris. Il a également fait face à quelques chanteurs en colère qui lui ont rappelé qu’ils n’ont pas oublié les « martyrs » de la guerre d’Algérie pour l’indépendance.

    « Il reste beaucoup à faire », a-t-il reconnu plus tard.

    Le nombre réel d’Algériens morts pendant la guerre et ses conséquences est inconnu, car beaucoup n’ont jamais été identifiés. L’année dernière, Macron a reconnu que les forces françaises avaient utilisé la torture en Algérie, et il a commémoré les victimes d’une répression policière meurtrière contre des manifestants indépendantistes à Paris en 1961, que les autorités françaises ont cherché à dissimuler pendant des décennies.

    Mais les efforts de réconciliation de Macron ont fait l’objet de critiques dans son pays, dans un contexte de soutien public croissant aux nationalistes d’extrême droite qui défendent les griefs des descendants français de la domination coloniale.

    « Il n’y a aucune volonté politique des autorités françaises, qu’elles soient de droite ou de gauche, de regarder le passé colonial en face », a déclaré Abdelmalek Alouane, professeur à l’université Science Po d’Alger.

    Tout en saluant le message global du voyage de Macron, Alouane a demandé : « Une commission d’experts est-elle vraiment nécessaire pour que les autorités françaises nous restituent des crânes de résistants ? … Pourquoi la commission d’indemnisation des victimes algériennes des essais nucléaires français dans le sud de l’Algérie entre 1960 et 1967 n’a-t-elle jamais pu faire la lumière sur cette catastrophe humaine et écologique ?

    « Les Algériens ne veulent pas marchander la mémoire de leurs martyrs », a-t-il déclaré.

    Plus tôt samedi, le dirigeant français a visité Disco Maghreb, un magasin de disques emblématique de la ville d’Oran, dans l’ouest de l’Algérie, et un label d’enregistrement pour les artistes qui interprètent la musique traditionnelle Rai. L’artiste franco-algérien DJ Snake a contribué à attirer l’attention sur les rythmes Disco Maghreb et Rai, et Macron a envoyé au DJ un message vidéo TikTok depuis la boutique.

    Cela a été considéré comme faisant partie des efforts de Macron de s’appuyer sur les jeunes pour faire avancer les relations franco-algériennes au lieu de s’attarder sur le passé.

    Macron a promis que la France deviendrait plus flexible dans la délivrance de visas aux Algériens après une crise diplomatique majeure sur la question l’année dernière. La France a fortement réduit les visas pour les personnes originaires d’Afrique du Nord parce que les gouvernements refusaient de reprendre les migrants auxquels l’asile avait été refusé en France.

    L’Algérie a ensuite rappelé son ambassadeur en France suite aux commentaires de Macron sur l’histoire précoloniale et le système de gouvernement postcolonial de l’Algérie, et a refusé l’autorisation à la France de faire voler des avions militaires dans son espace aérien.

    Le voyage de Macron a grandement contribué à la réconciliation et à la relance de la coopération économique. La guerre de la Russie en Ukraine a notamment renforcé le rôle de la nation nord-africaine en tant que fournisseur d’énergie clé alors que les pays européens cherchent des alternatives à l’énergie russe .

    Le bureau de Macron a déclaré qu’il soulèverait également des préoccupations en matière de droits de l’homme. L’Algérie a connu une répression rampante de la dissidence depuis les manifestations pro-démocratie en 2019.

    Macron aborde la question des visas lors d’un voyage en Algérie

    ALGER, Algérie (AP) – Le président français Emmanuel Macron a déclaré vendredi qu’il s’était mis d’accord avec son homologue algérien pour lutter contre l’immigration clandestine tout en garantissant des moyens plus flexibles pour les ressortissants du pays d’Afrique du Nord de venir légalement en France.

    Les commentaires de Macron vendredi sont intervenus lors d’une visite de trois jours en Algérie destinée à réinitialiser les relations entre les deux pays, après qu’une crise diplomatique majeure a éclaté l’année dernière sur la question des visas.

    Les tensions ont été exacerbées par une décision française de réduire considérablement le nombre de visas délivrés aux personnes en Afrique du Nord, y compris en Algérie, car les gouvernements refusaient de reprendre les migrants expulsés de France.

    Les deux pays ont repris leur coopération en décembre.

    S’adressant aux journalistes à Alger, Macron a reconnu que la question « sensible » avait été discutée jusque tard dans la nuit avec le président Abdelmajid Tebboune, lors d’une réunion et d’un dîner au palais présidentiel.

    « Nous partageons la même volonté » de mettre en œuvre des politiques de lutte contre l’immigration clandestine et le trafic, a déclaré Macron. Cela inclut d’être « plus efficace » pour renvoyer en Algérie les personnes en séjour irrégulier en France, a-t-il dit.

    La France veut avoir « une approche beaucoup plus flexible » sur l’octroi de visas aux familles de binationaux franco-algériens, artistes, sportifs et entrepreneurs, a-t-il ajouté.

    Interrogé pour savoir s’il avait discuté des questions de droits de l’homme avec Tebboune, Macron a déclaré que « nous avons discuté très librement de tout », mais n’a pas fourni de détails.

    Les militants des droits de l’homme critiquent le système de gouvernance algérien qui considère les dissidents comme des criminels et ne permet pas la liberté d’expression.

    Macron a déclaré que la France souhaitait renforcer son partenariat économique avec l’Algérie. Le pays est un partenaire clé dans la fourniture de gaz au continent européen, un statut qui a été renforcé au milieu de la guerre en Ukraine.

    La France dépend de l’Algérie pour environ 8 % de ses importations de gaz. Aucun nouveau contrat ne devait être signé lors de la visite.

    Vendredi matin, Macron s’est rendu au cimetière chrétien et juif de Saint-Eugène à Alger, où il a rendu hommage aux Français morts pendant la guerre d’indépendance de l’Algérie.

    Macron, le premier président français né après la fin de la guerre en 1962, a promis un règlement des torts de l’ère coloniale. Le pays a été occupé par la France pendant 132 ans.

    Jeudi, Macron et Tebboune ont convenu de former une commission mixte d’historiens qui examinera le passé depuis le début de la colonisation française en 1830 jusqu’à l’indépendance de l’Algérie.

    Macron devait avoir une autre réunion avec Tebboune vendredi pour discuter de la paix et de la stabilité dans la région. Il devait également se rendre à la Grande Mosquée d’Alger plus tard dans la journée, avant de se rendre à Oran, la deuxième ville du pays.

    AP

    #Algérie #Macron #Mémoire #Colonisation #France

  • Algérie-France: La grande explication pour un nouveau départ

    Algérie-France: La grande explication pour un nouveau départ

    Algérie, France, Emmanuel Macron, mémoire, colonisation,

    Le Président français, Emmanuel Macron, a achevé hier sa visite en Algérie, entamée jeudi dernier. Et c’est à partir d’Alger qu’il a regagné son pays, alors qu’initialement il devait le faire à partir d’Oran dans laquelle il s’est rendu vendredi en début de soirée.

    Un changement de programme, loin, très loin d’être anodin. « Le Président français Emmanuel Macron prolongera demain ( samedi) sa visite en Algérie en revenant dans la capitale pour signer un accord de « partenariat renouvelé » avec son homologue Abdelmajid Tebboune », a annoncé vendredi la Présidence française.« Demain, le Président français reviendra à Alger, après Oran, pour signer avec le Président Tebboune une déclarationcommune pour un partenariat renouvelé, concret et ambitieux », a en effet annoncé l’Elysée. « Cette déclaration commune pour un partenariat renouvelé » n’était pas au programme et n’a été décidé qu’à l’issue des discussions entre les deux présidents Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron.

    Des discussions approfondies « jusqu’au milieu de la nuit » du jeudi au vendredi comme l’a indiqué l’hôte de l’Algérie dans une déclaration à la presse. C’est dire combien cette visite officielle du Président français a incontestablement permis aux deux parties d’aller vers l’essentiel des choses et de mettre sur la table des discussions toutes les questions , même celles qui fâchent, afin d’aplanir tous les malentendus et reparti sur de nouvelles bases dans l’approfondissement de leur partenariat. Apparemment les deux présidents se sont dits en toute franchise toutes les « vérités » puisque beaucoup de dossiers ont été passé au peigne fin lors des discussions.

    Il a ainsi été question bien sûr du lourd volet de l’histoire, de la question de la libre circulation des personnes (les visas), des relations économiques ainsi que des questions relatives à la défense et aux affaires sécuritaires. Sur la question mémorielle , qui constitue la pierre angulaire de tout développement des relations entre les deux pays , les deux parties ont convenues de l’installation d’une commission mixte d’historiens chargés d’ouvrir les archives liées à la colonisation française « sans tabou et avec une volonté libre d’accès » comme l’a précisé le Président Français.

    Il a aussi été convenu d’intensifier les rencontres entre les deux parties à tous les échelons pour booster la coopération économique. Il s’agit notamment de la notamment de la redynamisation du Comité intergouvernemental de haut niveau (CIHN), le Comité mixte économique franco-algérien (COMEFA) et le Dialogue stratégique algero –français. Rien n’a été laissé au hasard et même la coopération sécuritaire ou une réunion de concertation inédite s’est tenue sous la présidence des deux Présidents. Une réunion regroupant des responsables des services sécuritaires des deux pays.

    Ont pris part à cette réunion, le général d’armée Saïd Chanegriha, chef d’état-major de l’Armée nationale populaire, le directeur général de la lutte anti-sabotage, le directeur général de la sécurité intérieure et le directeur général de la documentation et de la sécurité extérieure, coté algérien. La délégation française comprenait le ministre de la Défense Sébastien Lecornu, le général d’armée général d’armée Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées, ainsi que le directeur général de la Sécurité extérieure. Cette réunion de coordination est la première du genre à ce niveau depuis l’Indépendance. Cela atteste de la volonté commune d’approfondir la concertation et la coopération dans tous les domaines .

    Cette visite « ouvrira de nouveaux horizons aux relations de partenariat et de coopération » a indiqué le président Tebboune ce qui consacre une nouvelle orientation « fondée sur l’établissement d’un partenariat global d’exception conformément aux principes du respect et de la confiance mutuels, et de l’équilibre des intérêts entre les deux états.»

    Par : KAMAL HAMED

    Le Midi libre, 28/08/2022

  • Création d’une commission d’historiens français et algériens

    Création d’une commission d’historiens français et algériens

    Algérie, France, Emmanuel Macron, colonisation, mémoire,

    Macron annonce la création d’une commission d’historiens français et algériens sur la colonisation

    Le président français Emmanuel Macron a annoncé jeudi à Alger l’établissement d’une commission mixte d’historiens algériens et français pour étudier les archives sur la colonisation et la guerre d’Algérie.

    “Nous avons un passé commun” qui “est complexe, douloureux” et “nous avons décidé ensemble” de créer “une commission mixte d’historiens” pour “regarder l’ensemble de cette période historique”, “du début de la colonisation à la guerre de libération, sans tabou, avec une volonté (…) d’accès complet à nos archives”, a déclaré M. Macron au cours d’une déclaration commune avec son homologue Abdelmadjid Tebboune au premier jour de sa visite en Algérie.

    #Algérie #France #Macron #Mémoire #Colonisation

  • La visite de Macron en Algérie vue de Paris

    La visite de Macron en Algérie vue de Paris

    Algérie, France, Emmanuel Macron, pieds noirs, harkis, mémoire,

    Le président français, Emmanuel Macron, entame aujourd’hui une visite de trois jours en Algérie, après de longs mois de tensions entre les deux pays. La première depuis celle de 2017, la visite de Macron est loin d’être un événement sans importance à Alger et à Paris.

    Karim Aimeur – Alger (Le Soir) – La presse française, tous supports confondus, en parle depuis son annonce officielle ce 20 août. Et pour cause ! La crise qui secoue les relations entre les deux pays depuis plusieurs mois et qui a commencé à se dissiper ces dernières semaines a toutes les chances de disparaître (définitivement ?) à l’occasion de la visite de Macron en Algérie, à l’invitation de son homologue Abdelmadjid Tebboune. À moins que les choses ne se passeront pas comme souhaité !

    Dans un article consacré à cette visite, le journal Le Point a parlé d’un «séjour périlleux» de Macron en Algérie, réduisant la visite à deux questions, en la situant entre «rente mémorielle» et «visas».

    Cette question de visas qui est une conséquence malheureuse et dramatique de la colonisation utilisée par la France comme un moyen de pression politique et diplomatique. «Pour le pouvoir algérien, c’est une visite très importante, une demande à laquelle l’Élysée répond avec enthousiasme afin de «relancer les relations bilatérales», comme on dit dans le jargon diplomatique», écrit Le Point, ajoutant qu’«Alger prépare l’artillerie lourde protocolaire afin de montrer à la région et au monde que le président de la France accède à sa proposition dans les grandes argeurs». Pour le journal Le Monde, à l’occasion de la visite de Macron, «Paris et Alger espèrent tourner la page d’une série de malentendus et de tensions qui ont culminé avec le rappel de l’ambassadeur d’Algérie en octobre 2021 après des propos du président français sur le système politico-militaire algérien et la nation algérienne».

    Même lecture au sein de la rédaction de Libération qui a souligné que «cette visite intervient après plusieurs mois de brouille diplomatique entre Alger et Paris», précisant que «la relation bilatérale s’est envenimée en octobre 2021 lorsque Emmanuel Macron a affirmé que l’Algérie s’était construite après son indépendance sur «une rente mémorielle», entretenue par «le système politico-militaire», suscitant l’ire d’Alger». «Avec ce déplacement, Paris et Alger espèrent tourner la page d’une série de malentendus et de tensions», ajoute le même média, soutenant que la réconciliation mémorielle entre les deux pays et les «enjeux régionaux» comme le retrait de l’armée française du Sahel ou l’approvisionnement en gaz seront abordés. Pour BFMTV, l’objectif de la visite de Macron est de poursuivre le travail d’apaisement entre les deux pays.

    «Pour Emmanuel Macron, c’est un objectif majeur. Parce qu’on explique à l’Élysée que l’Algérie, ce n’est pas seulement un dossier international, c’est aussi une affaire franco-française. Apaiser les tensions avec l’Algérie, c’est aussi apaiser les tensions en France, entre les Français d’origine algérienne, les descendants des pieds-noirs ou des harkis», lit-on dans un article publié sur le site de BFMTV. Et d’ajouter que cette politique d’apaisement n’a pas de grands succès pour le moment, expliquant que «tout a très mal commencé». Quant à Francetvinfo, elle soutient que Macron entend «refonder» durablement une relation abîmée par des mois de brouille mémorielle entre les deux pays, comme cela a été assuré par l’Élysée ce mardi 23 août.

    Francetvinfo ajoute que la relation entre les deux pays s’est détériorée au cours du premier mandat d’Emmanuel Macron.

    «Ses propos sur la ‘’rente mémorielle’’ exploitée par le ‘’système politico-militaire’’ algérien depuis 1962, la ‘’haine de la France’’ et ses interrogations sur l’existence d’une nation algérienne avant la colonisation ont consommé la rupture à l’automne 2021. En réponse, Alger avait rappelé pendant trois mois l’ambassadeur d’Algérie à Paris», rappelle le même média. Aussi bien en France qu’en Algérie, le déplacement de Macron constitue un événement majeur, vu les liens historiques entre les deux pays et la crise qui secoue leurs relations.

    Le Soir d’Algérie, 25/08/2022

    #Algérie #France #Macron #Mémoire #Visas #Pieds_noirs #Harkis

  • Algérie-France : l’éclaircie ?

    Algérie-France : l’éclaircie ?

    Algérie, France, Emmanuel Macron, mémoire, colonisation,

    La visite, à partir d’aujourd’hui et sur trois jours, du président français en Algérie a lieu dans un contexte bilatéral, le moins qu’on puisse dire, parmi les meilleurs que les deux pays aient connu depuis plusieurs années de relations en dents de scie. Il y a lieu de relever, en effet, que les échanges téléphoniques entre les deux chefs d’Etat, après les regrets exprimés par Emmanuel Macron en rapport avec les propos offensant à l’Algérie, qu’il a tenu lors d’une rencontre avec les jeunes, dont les familles étaient impliquées dans la guerre d’indépendance, ont remis le train du dialogue sur les rails. Force est donc de reconnaître que les Présidents Tebboune et Macron sont parvenus à consolider un dialogue bilatéral qu’il va falloir transformer en partenariat mutuellement bénéfique pour les deux pays.

    Il faut pour cela que M. Macron retrouve sa marque de franche sincérité dans le discours de l’Hexagone pour ce qui concerne l’histoire commune des deux pays. Du côté de l’Algérie, le problème ne se pose pas. Aux deux chefs d’Etats de faire en sorte de laisser à leurs successeurs une opportunité de poursuivre sur la voie de la reconnaissance des méfaits historiques de la France coloniale, sans incriminer le peuple français dans son écrasante majorité.

    D’ailleurs les criminels sont presque tous morts et constituent une minorité de colonialistes. Il faut dire que cet aspect est prioritaire dans la refondation des relations algéro-françaises. En cela le Président Macron devra donner à son peuple une image claire de ce que seront les rapports « d’égal à égal » entre Alger et Paris. La France de Macron ne doit pas avoir de complexe vis-à-vis de son ancienne colonie. Elle est censée ne plus entrevoir ses rapports avec notre pays sous l’angle étroit et paternaliste du colonisateur complexé d’avoir perdu son «paradis sur terre».

    En fait, Emmanuel Macron a fait la démonstration, au début de son premier mandat à la tête de son pays, d’être l’un des rares hommes politiques français décomplexé par rapport à la question de l’Histoire. S’il veut réussir sa mission vis à vis de l’Algérie, il est appelé à renouer avec l’audace qu’il avait en 2017. Il y aura peut être des voix discordante de l’Elysée, de Matignon ou du Quai d’Orsay qui voudraient « saboter » sa mission. Mais c’est un combat qu’il faut mener. L’Histoire le retiendra. Cela n’empêche pas que les relations entre les Etats soient exclusivement une affaire d’intérêts mutuels. Dans les projets communs que peuvent lancer les entreprises des deux pays, la France a sans doute beaucoup à gagner et l’Algérie aussi.

    Maintenant que le climat politique semble autrement plus serein que d’habitude, il y a là une belle occasion pour aller de l’avant et gagner une bataille décisive contre les nostalgiques de l’Algérie-française.

    Par Nabil G.

    Ouest Tribune, 25/08/2022

    LE PRÉSIDENT MACRON AUJOURD’HUI EN ALGÉRIE POUR UNE VISITE DE TROIS JOURS:
    La jeunesse, la mémoire et l’économie au programme

    Le président français sera accompagné d’une délégation composée de 90 personnes. A ses côtés, plusieurs ministères stratégiques seront présents. Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie et des Finances. Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, Catherine Colonna la ministre de l’Europe Affaires Etrangères.

    Le président Français Emmanuel Macron entamera aujourd’hui une visite d’amitié en Algérie de trois jours. Le chef de l’Etat français qui séjournera à Alger et Oran ambitionne de contribuer avec le Président Tebboune à détendre l’atmosphère politique entre les deux pays.

    L’ objectif assigné à cette visite consiste, selon l’agenda français, à rétablir des relations saines entre l’Algérie et la France. L’intérêt de la France est plus qu’évident, sachant qu’elle subit de plein fouet une grave crise énergétique. Le potentiel algérien en la matière peut aboutir à terme à la stabilisation de la situation dans l’Hexagone. Mais cela ne se fera pas en un claquement de doigt.

    Un long parcours de plusieurs années est nécessaire pour consolider le partenariat dans l’énergie entre les deux pays. Cela au plan des objectifs assignés à la visite.

    Quant au programme, les services de l’Elysée soulignent le désir du Président Macron de rencontrer des jeunes à Alger et Oran. Il souhaiterait, à lire l’agenda de la visite, voir des jeunes artistes ou entrepreneurs. Il entend également rendre hommage à l’Histoire et même visiter la mythique boutique Disco Maghreb dans le centre-ville de la deuxième ville d’Algérie. Dans la littérature de l’Elysée, on parle de «première étape » pour qualifier cette visite de trois jours. Le programme de M.Macron a été validé par son homologue Abdelmadjid Tebboune, affirme-ton, à l’Elysée, qui espère voir cette visite impulser d’autres échanges entre les deux pays et pourquoi pas peut-être donner lieu à une visite d’Etat plus tard. Sur le volet politique, on retiendra une cérémonie d’hommage aux Martyrs de la révolution du 1er novembre 1954 et un entretien en tête à tête avec le Président Tebboune au Palais d’El Mouradia.

    Les deux chefs d’Etat ont beaucoup de thèmes à évoquer ensemble et surtout ils doivent décider ensemble du fil directeur de cette visite en Algérie. Le président français sera accompagné d’une délégation composée de 90 personnes. A ses côtés, plusieurs ministères stratégiques seront présents.
    Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie et des Finances. Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, Catherine Colonna la ministre de l’Europe Affaires étrangères. Rima Abdul Malak, la ministre de la Culture ou encore Patricia Miralles, secrétaire d’État auprès du ministre des Armées, chargée des Anciens combattants et de la Mémoire.

    A voir la composante de la délégation ministérielle, l’on peut deviner les thématiques qui seront abordées et qui concerneront, l’économie, l’énergie et la mémoire notamment. Autant de thèmes, dont les divergences sont connues entre les deux Etats. Il s’agira d’aplanir les différends pour construire une nouvelle trajectoire mutuellement bénéfique.

    Le président français aura dans ses bagages des personnalités impliquées dans les relations entre les deux pays. Des députés français, d’anciens ministres comme Jack Lang ou Jean-Pierre Chevènement feront partie du voyage. Des personnalités médiatiques d’origine algérienne seront aussi du voyage. Le journaliste Rachid Arhab et le chef cuisinier Mohamed Cheikh ont été invités. De nombreux entrepreneurs se joindront aussi au voyage du président français.

    L’Elysée assure avoir voulu surtout privilégier la présence de plusieurs petites et moyennes entreprises plutôt que les grands groupes, qui seront en nombre réduit. Mais il n’en demeure pas moins que des figures majeures de l’économie française feront le déplacement. Ainsi, l’homme d’affaires Xavier Niel à la tête du groupe Iliad ou encore Catherine MacGregor, la directrice générale du groupe énergétique Engie figurent sur la liste des voyageurs. Cela traduit le sérieux et la volonté de Paris de veiller à la réussite de cette visite, dans la perspective de lancer un partenariat sérieux et fécond. Par ailleurs, des moments de recueillement sont programmés au cimetière Saint-Eugène à Alger le deuxième jour de visite.
    Nadera Belkacemi

    Ouest Tribune, 25/08/2022

    #Algérie #France #Macron


  • Macron se rend en Algérie au milieu de liens tendus

    Macron se rend en Algérie au milieu de liens tendus

    France, Emmanuel Macron, Algérie, mémoire, colonisation,

    Le président français sera surveillé pour des faux pas sur le passé colonial de la France lors d’une visite à fort enjeu en Algérie.

    ALGER – Le président français Emmanuel Macron débarquera en Algérie jeudi – sa première visite dans l’ancienne colonie en cinq ans – dans le but d’améliorer les relations tendues avec la nation riche en gaz alors que l’UE lutte pour diversifier les approvisionnements énergétiques loin de la Russie.

    Des questions telles que la sécurité, les liens économiques et l’énergie figurent en bonne place sur l’agenda du président français, mais c’est ce qu’il a à dire sur le passé colonial du pays qui retiendra probablement le plus l’attention. La nation méditerranéenne a fait partie de l’empire colonial français pendant plus d’un siècle jusqu’à ce qu’elle obtienne son indépendance en 1962 à la suite d’une guerre qui a fait un lourd tribut humain et s’est caractérisée par une brutalité sauvage, laissant une marque durable sur la politique et la société françaises.

    Les relations franco-algériennes ont touché le fond l’année dernière à la suite des commentaires de Macron sur l’instrumentalisation présumée par l’Algérie de griefs passés. L’Algérie a retiré son ambassadeur en réponse, bien que les deux nations aient fait des progrès dans le rétablissement des liens depuis.

    L’enjeu est important pour le président français au cours de sa visite de trois jours, car la France vise non seulement à normaliser les relations bilatérales avec l’Algérie, mais également à sauver sa sphère d’influence en Afrique alors que la Russie et la Chine cherchent à renforcer leurs alliances à travers le continent.

    Amis et ennemis semblent avoir supplanté la France en tant que partenaires privilégiés du pays. L’Algérie, l’un des principaux producteurs de gaz au monde, a signé le mois dernier un accord énergétique majeur avec l’Italie et prévoit d’organiser des exercices militaires conjoints en novembre avec son allié de longue date, la Russie.

    La visite se concentrera résolument sur « l’avenir » de la relation, a déclaré l’Elysée lors d’un point de presse mardi, notant plusieurs rencontres à venir avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune qui ne sont pas axées sur les différences historiques.

    « Le président a déjà beaucoup travaillé sur les questions [du passé colonial]… Il faut continuer à travailler sur ces questions et le président veut, mais il y a d’autres sujets… il y a l’avenir, la jeunesse, les nouvelles technologies, etc. »

    Signe que le président français est sérieux, la délégation présidentielle comprendra pas moins de six ministres français et plusieurs chefs d’entreprise dont la patronne de l’énergéticien Engie Catherine MacGregor et le milliardaire magnat des télécommunications Xavier Niel.

    Mais les pièges et les occasions de faux pas seront nombreux pour un président français qui aime les rencontres en face à face avec les citoyens ordinaires et n’hésite pas à dire ce qu’il pense.

    Le choix des mots de Macron sur le passé colonial sera également surveillé de près chez lui par les communautés «Pied Noir», descendants des Français rapatriés de la colonie qui ont leurs propres griefs avec l’État français. Macron se rend vendredi dans la ville d’Oran après avoir appelé plus tôt dans l’année à ce que « le massacre » de « des centaines d’Européens, pour la plupart des citoyens français », y soit reconnu.

    « Macron prend un risque. Visiter l’Algérie, une ancienne colonie, est toujours une visite risquée pour un président français, et c’est une année importante, cela fait 60 ans depuis la fin de la guerre d’indépendance de l’Algérie », explique Hasni Abidi, politologue à l’Université de Genève.

    « Macron veut envoyer un message, qu’il veut aller au-delà de l’histoire et ouvrir une nouvelle page dans les relations », a-t-il déclaré.

    Rétablir les liens avec une ancienne colonie
    Les relations entre la France et l’Algérie se sont détériorées l’année dernière lorsque le président français a été cité comme ayant tenu plusieurs propos incendiaires sur l’Algérie dans la presse française. Macron a accusé le « système militaro-politique » algérien de réécrire l’histoire et d’encourager « la haine envers la France ». Il s’est également demandé si l’Algérie existait en tant que nation avant la colonisation française.

    Les commentaires ont exaspéré le régime algérien, qui a rappelé son ambassadeur pendant plusieurs mois.

    Le pays d’Afrique du Nord a obtenu son indépendance de la France à la suite d’une guerre brutale et prolongée de huit ans qui s’est terminée par la signature en mars 1962 des accords d’Evian. Les historiens français disent qu’un demi-million de personnes sont mortes pendant la guerre, dont 400 000 Algériens, tandis que les autorités algériennes disent que 1 500 000 vies ont été perdues.

    En juillet de la même année, 99,72% ont voté pour l’indépendance lors d’un référendum et l’Algérie a finalement brisé le joug de la domination coloniale française – mais les souvenirs de l’occupation de 132 ans continuent de jeter un nuage sur les relations franco-algériennes.

    Macron devra faire face à un examen minutieux de ces questions après que ses commentaires ont déclenché ce qu’Amar Mohand-Amer, historien d’un centre de recherche à Oran, a qualifié de « crise grave ». À l’époque, Macron était accusé de flatter l’électorat d’extrême droite avant l’élection présidentielle de 2022.

    « Ce qu’il dit sera observé de près… Je pense qu’il fera une déclaration sur le passé colonial pour mettre fin aux fluctuations avec l’Algérie. Et puis il arrêtera de parler de ces problèmes.

    Lors de son premier mandat, le président français a commencé avec un important capital politique en Algérie. Lors de la campagne pour l’élection présidentielle de 2017, Macron a qualifié la colonisation de l’Algérie par la France de « crime contre l’humanité ».

    En tant que premier président français né après la guerre d’indépendance de l’Algérie, Macron a fait plusieurs déclarations audacieuses et, bien qu’il ait refusé de présenter des excuses officielles, il a pris des mesures pour aborder le passé colonial de la France, comme la déclassification des archives de l’État et la commémoration des victimes de la guerre.

    Mais il reste à voir si les Algériens ordinaires se montreront à nouveau favorables à Macron lors de sa visite.

    « Beaucoup d’Algériens n’aiment pas la volte-face de Macron. Nous avons accueilli le candidat Macron qui a été courageux et a déclaré que la colonisation était un crime contre l’humanité », a déclaré Mohand-Amer.

    « Mais cinq ans plus tard, il dit que la France coloniale a créé la nation algérienne. Son ambiguïté offense les gens », a-t-il déclaré.

    Les gouvernements français et algérien ont fait peu de progrès dans la résolution des conflits historiques non résolus. L’éminent historien d’origine algérienne Benjamin Stora a été chargé en 2020 par le gouvernement français de rédiger un rapport sur la colonisation, mais ses recommandations ont été largement ignorées par l’Algérie.

    « Aucune des recommandations n’a été mise en œuvre [du côté algérien], qu’il s’agisse de lancer des échanges de jeunes, de travailler sur des cimetières de guerre, il n’y a eu aucune réponse », a déclaré l’historien français Pierre Vermeren à l’Université de la Sorbonne.

    « Il ne peut pas y avoir de coopération franco-algérienne sur le passé, si l’une des deux parties ne veut pas y participer », a-t-il déclaré.

    Alors que Macron a fait peu de progrès pour résoudre les différends historiques avec les Algériens, il a cependant provoqué l’indignation du Rassemblement national d’extrême droite français, avec une figure rejetant le rapport Stora comme « une guerre mémorielle contre les familles françaises ».

    La sphère d’influence de la France se rétrécit

    Malgré l’absence d’avancées sur les dossiers historiques, l’Elysée voit désormais des signes d’un tournant dans les relations avec le gouvernement algérien.

    Les avions militaires français sont à nouveau autorisés à voler dans l’espace aérien algérien après avoir été interdits l’année dernière, une décision qui aide les opérations militaires alors que la France conclut son opération anti-islamiste au Sahel. Un désaccord de longue date sur la réadmission des immigrants illégaux en Algérie semble également trouver une solution.

    Selon le politologue Hasni Abidi, l’invasion russe de l’Ukraine a changé les perspectives non seulement pour la France qui cherche à diversifier les fournisseurs d’énergie de l’UE, mais aussi pour l’Algérie.

    « L’Algérie a compris qu’elle ne veut pas rester en marge et apparaître comme faisant partie de l’axe russe, elle veut travailler avec le camp occidental », a déclaré Abidi.

    « Le gaz et le pétrole sont le pain et le beurre de l’Algérie. Il a vu comment la Russie a été ostracisée par la communauté internationale et il veut rester crédible », a-t-il ajouté.

    L’Algérie est déjà un fournisseur de gaz de la France, et alors que l’Elysée a averti qu’ »aucun accord révolutionnaire » ne serait annoncé pendant le voyage, l’augmentation des livraisons de gaz vers l’Europe pour compenser la baisse des livraisons russes sera au centre du voyage selon plusieurs observateurs.

    « Il est clair que l’Algérie est devenue plus importante sur le front énergétique [pour la France]. Mais les Italiens sont arrivés les premiers, la crise ukrainienne était déjà grave en novembre de l’année dernière et ils ont entamé des négociations », a déclaré l’expert en énergie Francis Ghilès du centre de recherche CIDOB à Barcelone, faisant référence à un accord de 4 milliards d’euros signé le mois dernier entre l’Algérie et Italie.

    « Mais en regardant au-delà de la crise ukrainienne, il y a des pans entiers du territoire qui sont inexplorés ou qui pourraient être réexplorés », a-t-il déclaré.

    Au-delà des questions épineuses de la coopération gazière et sécuritaire au Sahel, l’influence culturelle de la France est également en jeu. En juillet, le président algérien a annoncé que les écoles primaires commenceraient à enseigner l’anglais aux élèves, une décision qui pourrait signaler un abandon du français, une langue encore utilisée dans l’administration. Les élites algériennes frustrées sont détournées de la France pour des questions de visa et préfèrent souvent des destinations telles que la Turquie ou les États du Golfe.

    « Mais tout n’est pas perdu pour la France. L’Algérie a montré qu’elle pouvait diversifier ses partenaires, et je pense que le message a été entendu haut et fort à Paris », a déclaré Abidi.

    Il y a des cartes dans la main de Macron – une histoire commune, une communauté franco-algérienne forte, une coopération militaire – s’il peut bien les jouer.

    America Hernandez a contribué au reportage.

    Politico, 25/08/2022

    #Algérie #France #Macron