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  • L’axe fragile Paris-Londres

    Tags : Union Européenne, France, UE, Royaume Uni, AUKUS, Emmanuel Macron,

    Les différends successifs du Royaume-Uni avec la France exacerbent la faiblesse de la cohésion interne de l’Union européenne.

    Un homme de sa noble formation universitaire (Oxford) comme Boris Johnson connaît sans doute la vieille expression latine pacta sunt servanda, selon laquelle les pactes lient : c’est l’un des principes les plus importants du droit et l’un des piliers de la civilisation occidentale. Mais il est inhabituel de voir à quelle fréquence il est nécessaire de le rappeler à la Première ministre britannique, qui est engagée dans une bataille constante avec l’Union européenne au sujet de l’accord commercial post-Brexit. Cette fois-ci, le différend entre Londres et Paris concerne apparemment les licences permettant aux pêcheurs français de pêcher dans les eaux britanniques de la Manche, mais il y a quelque chose de plus profond et de plus grave à l’œuvre ici : c’est un nouveau symptôme de la détérioration des relations entre les deux pays et cela exacerbe un climat de suspicion à l’égard de Londres qui s’est répandu sur tout le continent, comme c’était déjà le cas avec le différend contractuel que l’UE a eu pour l’achat du vaccin contre le covid.

    La gravité du désaccord avec Paris dépend de la participation du Royaume-Uni à l’Aukus (le pacte de défense annoncé par l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis le 15 septembre). Cet accord a fait perdre à la France un lucratif contrat de fourniture de sous-marins d’attaque à l’Australie. Outre l’exclusion du pacte et la déloyauté du pacte lui-même, l’Aukus a montré l’énorme vide géopolitique que représente l’Europe dans le monde. Le silence ostensible de l’UE après l’annonce de l’accord révèle une fois de plus les divisions internes de l’Europe en matière de politique étrangère. Elle n’a pas non plus servi à rappeler à l’Allemagne la nécessité d’inverser le déclin de sa puissance militaire et de renforcer l’autonomie stratégique de sécurité au sein même de l’UE.

    Les conséquences de l’affaire Aukus et du différend sur les droits de pêche vont plus loin que de simples déchirements réversibles, car elles impliquent la rupture de la confiance entre deux grandes nations, la France et le Royaume-Uni. Il montre l’aliénation du monde anglophone par rapport à l’UE et une division de l’Occident, qui a cessé de se penser et de se percevoir comme un bloc partageant des valeurs et une vision du monde communes. Outre l’érosion des liens amicaux qui ont uni les nations occidentales, l’Aukus entraîne un degré supplémentaire d’éloignement car il entérine la rivalité des États-Unis avec la Chine et approfondit encore la division interne de l’Occident. Le réalignement géopolitique des États-Unis autour de l’anglosphère se produit en même temps qu’ils se distancient du monde euro-atlantique, tout en entraînant Londres dans une course qui ne peut qu’affaiblir l’Union européenne elle-même.

    El Pais, 08/11/2021

    #France #Union_Européenne #UE #Royaume_Uni #AUKUS #Etats_Unis #Sousmarins #Brexit

  • Répercussions d’AUKUS sur la défense et la sécurité de l’UE

    Tags : AUKUS, Australie, Etats-Unis, Grande-Bretagne, Royaume Uni, sous-marins, France, UE, Europe, défense, sécurité,

    Introduction

    Le 15 septembre 2021 a marqué un tournant dans la relation transatlantique, destiné à ouvrir une nouvelle direction en termes de coexistence stratégique et à modifier l’orientation du projet européen de sécurité et de défense communes. En effet, à cette date, l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont annoncé la création d’une nouvelle collaboration en matière de sécurité baptisée AUKUS (des initiales des noms des pays en anglais) : un accord de coopération navale indo-pacifique qui devrait faire contrepoids à l’influence de la Chine sur son voisinage dans cette région cruciale. Cet accord a non seulement une valeur strictement opérationnelle mais aussi une valeur symbolique car il rouvre la question de longue date de l’autonomie stratégique de l’Union européenne en matière de défense et de sécurité.

    1. Accords et désaccords : la course aux sous-marins à propulsion nucléaire

    En 2016, l’Australie avait signé un accord intergouvernemental avec la France pour la construction d’une fourniture de 12 sous-marins conventionnels à moteur diesel. Il s’agissait d’un contrat avec le groupe industriel français Naval Group pour un montant total de 90 milliards de dollars australiens (environ 66 milliards de dollars australiens). La rupture de l’accord a déclenché une réaction furieuse de la part de Paris, qui a rappelé ses ambassadeurs de Canberra et de Washington (mais à l’heure où nous écrivons ces lignes, les diplomates ont été réintégrés dans leurs fonctions pour redéfinir les termes des relations mutuelles) et a qualifié le pacte de « coup de poignard dans le dos », selon les termes du ministre des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian. Mais derrière la décision de l’Australie de se tourner vers la production anglo-américaine, il y aurait des impératifs stratégiques et un nécessaire resserrement des délais, comme le souligne la mise à jour stratégique de la défense en 2020. En effet, l’accord initial conclu avec les Français piétinait en raison de renégociations défavorables et d’importants retards de livraison (les premiers modèles de Barracuda ne seraient pas prêts avant 2035 au plus tôt)[1].

    L’AUKUS sera bénéfique pour l’Australie car il permettra au pays de produire sous licence des sous-marins nucléaires de nouvelle génération, du modèle SSN-X, des navires à grande vitesse capables de chasser les sous-marins lance-missiles chinois et dotés de composants d’invisibilité sophistiqués contre les drones sous-marins. En outre, les sous-marins nucléaires peuvent effectuer une mission plus longue que les sous-marins conventionnels et sont moins détectables par les radars adverses[2].

    2. La double stratégie de la France : individualisme nationaliste et influence extérieure

    La France a, d’une part, soutenu le projet de défense européenne au premier rang avec l’Allemagne, et d’autre part, a mené une politique collatérale d’avantage compétitif, exploitant le concept de « puissance d’équilibre » soutenu par des investissements massifs dans la lignée de la traditionnelle « diplomatie de l’armement ». Cette approche permet au pays de se positionner comme une alternative au soutien des États-Unis en matière d’armement, étant donné que la France est le troisième exportateur d’armes au monde et le premier pays européen à avoir planifié une stratégie indo-européenne, en investissant dans la création de partenariats de sécurité mais aussi dans des projets culturels avec les principales puissances impliquées dans la zone, comme le Japon, l’Australie et les États-Unis. Paris possède également 93 % de la zone économique exclusive (ZEE) de la région[3].

    Après ce revers, Macron a annoncé un triomphe militaire le même jour avec l’assassinat par les troupes françaises d’Adnan Abu Walid al-Sahrawi, le chef du groupe terroriste islamique dans le Grand Sahara. En effet, la France mène depuis sept ans une mission au Sahel contre les groupes extrémistes djihadistes : l’opération Barkhane. Comme l’explique Nicki Anastasio dans son article publié sur le blog Quaderni Africani di Africa Rivista édité par AMIStaDeS, l’opération a été menée pour :  » soutenir les armées des pays précités, renforcer la coordination des moyens militaires internationaux et mener des actions en faveur de la population comme l’accès aux services. « [4] Mais derrière le battage français se cachait le soutien logistique des États-Unis à travers des opérations de reconnaissance par drones et le travail de repérage de cibles sensibles par le renseignement américain.[5]

    3. AUKUS et ANZUS

    L’AUKUS a remanié l’équilibre des forces existant et a contraint les secrétariats européens à se pencher une fois pour toutes sur la question longue et délicate de savoir où se placer sur l’échiquier transatlantique. Ce qui devait être un coup de pouce pour la communauté transatlantique semble s’être révélé, au contraire, un indicateur du déséquilibre entre les alliés en faveur du bloc anglophone et un signe précis de la direction prise par les États-Unis. L’accord trilatéral a élevé le niveau de coopération à un niveau opérationnel supérieur en renforçant les priorités communes des alliances transpacifiques. Rappelons, en effet, que les États-Unis ont déjà signé avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande un traité appelé ANZUS pour la sécurité du Pacifique, qui est devenu la base de la conduite de la politique stratégique australienne depuis 1951[5]. L’accord AUKUS, quant à lui, traduit concrètement la propension des États-Unis à déplacer leur centre de gravité géopolitique de l’océan Pacifique, siège du traité ANZUS, vers les océans Indo-Pacifique et Atlantique.

    Les États-Unis poursuivent une stratégie agressive contre la Chine en tant que rival systémique, rejetant la vision européenne de Pékin en tant que partenaire commercial. L’AUKUS n’a pas les caractéristiques d’une véritable alliance car elle ne comprend pas l’engagement de défense collective explicitement énoncé à l’article 5 du traité de l’OTAN. Il s’agit d’un réseau défensif destiné à contrer les menaces à la liberté de navigation et d’un signal clair envoyé à la Chine qui exploite sa position militaire périphérique dans la région, notamment à Taïwan. Ces dernières semaines, l’armée chinoise a envoyé plusieurs avions de guerre dans la zone de défense taïwanaise, provoquant l’indignation de Washington. Par conséquent, le pacte vise à acquérir une capacité de dissuasion sur la Chine ainsi qu’à poursuivre un objectif concret : couler la marine chinoise en moins de 72 heures en cas d’affrontement[6].

    4. Les paradoxes des Alliances : méfiance, défiance ou stratégie ?

    Selon certains, l’accord trilatéral est le résultat d’une démarche délibérée de l’administration Biden pour couvrir le faux pas qu’elle a fait dans la gestion du retrait des troupes américaines en Afghanistan. Pour la France, en revanche, cette  » décision unilatérale, brutale et imprévisible ressemble beaucoup au comportement assumé par Trump « [7]. En fait, elle révélerait une orientation stratégique précise des États-Unis pour s’engager dans le monde anglo-saxon mais aussi une tendance à concurrencer activement les visées économiques et industrielles françaises. En effet, comme le souligne Daniel Fiott, le paradoxe inhérent à la relation transatlantique voit le désir des Etats-Unis d’avoir : « une Europe suffisamment indépendante pour payer ses propres factures de sécurité et financer d’éventuelles collaborations avec les Etats-Unis, mais pas assez indépendante pour faire obstacle aux plans et aux priorités de Washington »[8] Un manque de collaboration européenne est considéré par les Etats-Unis comme un manque de coopération européenne.

    Un manque de collaboration européenne est perçu par les États-Unis comme une attitude trop douce à l’égard de la Chine, tandis que les initiatives potentiellement compétitives qui interfèrent avec l’agenda américain sont considérées comme une menace pour la solidité de l’OTAN. L’éloignement progressif des États-Unis des affaires européennes est également indiqué par le fait que l’AUKUS a été annoncé publiquement le jour même où l’UE a publié sa première stratégie indo-pacifique. Et coïncidant également avec un autre épisode, à savoir le refus de la Chine d’accorder l’accès à une frégate allemande pour sa première visite prévue à Shanghai[9].

    5. La défense européenne : une nouvelle marche ou une nouvelle impasse ?

    La colère des Français face à la situation a également alarmé les capitales européennes, en particulier celles des États baltes et des pays de l’ancien bloc communiste, qui sont les plus fervents partisans de l’OTAN et sont de plus en plus sceptiques quant à l’idée d’une défense européenne. Le Premier ministre danois, Mette Frederiksen, a notamment évoqué dans le journal danois Politiken la fidélité absolue de M. Biden à l’Alliance atlantique, minimisant la position française. Le Danemark est l’un des pays qui a réagi avec le plus de méfiance au nouvel appel de la France à l’autonomie stratégique, y voyant une tentative de Paris d’étendre sa souveraineté et de favoriser les contrats de défense aux entreprises françaises[9].

    Bien que l’idée d’une défense européenne soit déjà inscrite dans le traité de Lisbonne et qu’il ait été constamment question de la défense commune comme synonyme d’autonomie stratégique vis-à-vis des États-Unis, dans le cadre d’un renforcement mutuel avec l’OTAN, les Nations unies et les pays partenaires de l’UE, aucun résultat concret n’a encore été obtenu. À cet égard, des initiatives telles que la coopération structurée permanente (PESCO) et le Fonds européen de défense ont été mises en place pour promouvoir la coopération sur les projets de défense et favoriser un sentiment d’unité militaire. La PESCO est un mécanisme de coopération en matière de défense, juridiquement contraignant, auquel participent 25 États membres et qui vise à améliorer l’interopérabilité des forces armées. Le Fonds européen de défense est un fonds d’investissement innovant destiné à développer des projets de défense communs et à renforcer la base industrielle et technologique de défense commune[10].

    Conclusion

    Lors de la dernière réunion des ministres européens des affaires étrangères et de la défense en Slovénie, Macron a suggéré d’utiliser l’AUKUS comme un tremplin pour le développement de capacités conjointes et a promis qu’en 2022, la France pourrait utiliser la présidence du Conseil de l’UE pour faire progresser la stratégie de sécurité en tant que priorité absolue. Le service diplomatique de l’UE, le Service européen d’action extérieure (SEAE), aura le droit de présenter une première version du Compas stratégique, le document militaire destiné à normaliser les capacités de renseignement, en novembre 2021.

    L’aspect le plus urgent à prendre en compte est la nécessité de développer une culture stratégique commune et de rationaliser le processus décisionnel tout en maintenant des relations productives avec les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie en tant que partenaires stratégiques contre la Chine.

    Sara Ferragamo

    Amistades, 04/11/2021

    #AUKUS #ANZUS #France #Europe #Australie #Etats_Unis #Royaume_Uni #Défense

  • Le Royaume-Uni doit saisir l’importance stratégique du Maghreb

    Le Royaume-Uni doit saisir l’importance stratégique du Maghreb – Le nord-ouest de l’Afrique offre des possibilités à un pays qui réévalue ses priorités.

    En lisant la presse britannique ces derniers mois, vous n’avez peut-être pas remarqué que le seul gouvernement islamiste encore en place en Afrique du Nord a été chassé du pouvoir par des élections pacifiques et ordonnées au Maroc, ou qu’en Tunisie, la toute première femme Premier ministre a été nommée à la tête d’un gouvernement dans le monde arabe. Vous ne sauriez probablement pas non plus qu’après une série de prises de becs diplomatiques, l’Algérie a fermé son espace aérien aux avions français et menace maintenant de couper l’approvisionnement en gaz de l’Europe via le Maroc.

    Il se passe beaucoup de choses au Maghreb, mais les événements qui se déroulent dans la partie nord-ouest de l’Afrique, essentiellement francophone, sont systématiquement passés sous silence dans les médias britanniques, sauf lorsque des touristes britanniques en quête de soleil nord-africain sont concernés. Les progrès économiques remarquables du Maroc au cours des 20 dernières années ont attiré étonnamment peu d’attention ici. Il en va de même pour les énormes manifestations qui secouent le « géant endormi » de la région, l’Algérie, depuis 2019.

    Les pays du Maghreb, avec une population de près de 100 millions d’habitants à eux deux, constituent l’ »étranger proche » du Royaume-Uni, au-delà de nos voisins immédiats d’Europe occidentale. Ils couvrent une zone géographique plus grande que l’Europe – l’Algérie à elle seule est plus grande que la France, l’Espagne, l’Allemagne, la Pologne, l’Italie et le Royaume-Uni réunis – qui borde le Sahel, l’une des régions les plus pauvres et les plus instables du monde. L’effondrement politique de la Libye en 2011 et la propagation du djihadisme dans les espaces non gouvernés d’Afrique du Nord, ainsi que le défi croissant de la gestion de la migration irrégulière vers le nord en provenance d’Afrique subsaharienne, ont souligné l’importance de maintenir un partenariat étroit avec la région.

    C’est aussi une région au potentiel économique énorme, avec une population jeune de plus en plus intéressée par la Grande-Bretagne. Il existe un appétit, notamment au Maroc et en Tunisie, pour les investissements britanniques, ainsi qu’un intérêt croissant pour l’apprentissage de l’anglais. C’est donc un peu un mystère que la région ait attiré si peu d’attention de la part des gouvernements britanniques successifs. Ayant travaillé au Maghreb en tant que diplomate du Royaume-Uni et de l’Union européenne, j’ai parfois l’impression que les politiciens et les entreprises britanniques considèrent toujours cette région comme une chasse gardée française – une déférence curieuse, nettement absente de l’approche de la France à l’égard des régions d’influence britannique historique.

    Au cours des 20 dernières années, le Maroc a transformé ses infrastructures et son climat des affaires – dépassant un certain nombre de pays européens dans le classement Doing Business de la Banque mondiale – et a investi massivement dans les énergies renouvelables, dont il espère qu’elles fourniront la moitié de son électricité d’ici 2030. Elle s’est progressivement imposée comme un investisseur de premier plan en Afrique. Avec le plus grand port à conteneurs de la Méditerranée à Tanger et l’un des principaux centres financiers d’Afrique à Casablanca, il cherche à tirer parti de sa situation géostratégique entre la Méditerranée orientale et l’Atlantique, et à se positionner comme une « porte d’entrée sur l’Afrique » favorable aux entreprises.

    En revanche, l’impasse persistante en Algérie entre un régime figé et replié sur lui-même et une population frustrée est préoccupante pour la stabilité de la région. Son économie fermée, largement dépendante du pétrole et du gaz, reste le principal obstacle à la construction d’une prospérité durable dans tout le Maghreb. Comme l’ont montré de nombreuses études, l’intégration économique stimulerait la croissance et créerait des emplois pour les Marocains, les Algériens et les Tunisiens qui constituent une proportion importante des migrants irréguliers traversant la Méditerranée à la recherche d’opportunités en Europe. L’absence d’un marché régional est un problème particulier pour la Tunisie, qui reste très fragile, prise entre la guerre civile en Libye et un marché algérien fermé.

    Dans ce contexte, la nomination du diplomate expérimenté Staffan de Mistura comme envoyé spécial du secrétaire général des Nations unies pour le Sahara occidental est encourageante. Sans un règlement réaliste pour ce territoire contesté que les Marocains considèrent comme une partie intrinsèque de leur pays, il y a peu de chances que le Maghreb se ressaisisse au niveau régional. De Mistura aura du pain sur la planche. Le conflit du Sahara occidental est l’un des conflits les plus insolubles au monde, et il entre dans la mêlée diplomatique à un moment où les relations entre le Maroc et l’Algérie sont au plus bas. Il aura besoin de toute l’aide qu’il peut obtenir, en particulier des membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et de l’UE, pour progresser.

    Prospect, 28/10/2021

  • AUKUS: Comprendre le partenariat USA-UK-Australie

    AUKUS: Comprendre le partenariat USA-UK-Australie. AUKUS vise à aider l’Australie pour être en mesure de développer sous-marins à propulsion nucléaire.

    Le nouveau partenariat AUKUS, la nouvelle alliance géopolitique de l’Australie, du Royaume-Uni et des États-Unis, pour renforcer la sécurité dans la zone des océans Indien et Pacifique envisage la fourniture de la technologie nécessaire par les États-Unis et la Grande-Bretagne à l’Australie pour être en mesure de développer sous-marins à propulsion nucléaire. Cette décision précipitée est clairement un changement de stratégie et de politique dans l’ensemble de la région.

    Avec ce geste, les États-Unis montrent qu’ils reviennent dynamiquement dans une zone de grande importance stratégique, afin de défendre leurs propres intérêts et ceux de leurs alliés, et de freiner les démarches agressives du Parti communiste chinois au pouvoir et limiter son influence principalement dans l’océan Pacifique, mais aussi dans l’océan Indien, la mer de Chine méridionale et le bassin de l’Indochine. Washington avec AUKUS redéploie ses forces sur l’échiquier mondial pour faire face à la Chine, le pays qui est perçu comme la plus grande menace pour la suprématie américaine.

    La Grande-Bretagne veut se donner les moyens

    La Grande-Bretagne, après le Brexit, tente de renforcer son rôle mondial, de lancer sa nouvelle identité géopolitique, celle de World Britain, et «brûle» de s’impliquer plus activement dans la zone Asie du Sud et Pacifique, tandis que l’Australie partage l’Anglo-américaine inquiétude quant à la montée en puissance du dragon chinois.

    Les USA avaient besoin d’une action géopolitique rapide au niveau de la «superpuissance» sous le régime de la mauvaise gestion du retrait d’Afghanistan et se sont donc tournés vers les pays anglo-saxons, avec lesquels ils entretiennent également des liens linguistiques et culturels forts, tout en excluant les négociations avec les autres pays puissants dans la zone. Dans une déclaration publiée par AUKUS le 15 septembre avec les Premiers ministres australien et britannique, Scott Morrison et Boris Johnson, le président Joe Biden a souligné qu’il s’agissait « d’un investissement dans notre plus grande source de force, nos alliances ».

    La France ignorée

    Cependant, la non-invitation de la France au Partenariat méconnaît le fait que la France a des intérêts géopolitiques spécifiques dans la région Indienne et Pacifique, à la fois en termes de sécurité internationale et parce qu’elle possède des territoires français dans la région élargie. Elle compte environ 7 000 soldats et compte près de 2 millions de civils, y compris ses territoires insulaires, comme la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française.

    L’accord prévoit une coopération dans de nombreux domaines de la défense et de la technologie, de l’information et de la technologie quantique, ainsi que l’acquisition de missiles de croisière, mais son aspect le plus important concerne les sous-marins à propulsion nucléaire, qui seront construits à Adélaïde, en Australie-Méridionale, avec l’implication des États-Unis et de la Grande-Bretagne. Dans un rôle de conseil et de savoir-faire pour leur production. Ces sous-marins sont beaucoup plus difficiles à détecter que les sous-marins conventionnels, fonctionnent silencieusement et se déplacent facilement. Ce sont des super-armes dotées d’une technologie de pointe que les deux pays se sont engagés depuis 1958 ne pas se libérer l’un à l’autre. Dans le cadre de l’accord AUKUS, au moins huit sous-marins à propulsion nucléaire seront construits, mais il n’a pas été précisé quand ils rejoindront la marine australienne, qui n’a pas d’infrastructure nucléaire et donc le processus sera retardé. Cependant, ils ne porteront pas d’armes nucléaires, comme l’a précisé le Premier ministre australien Scott Morrison.

    Le gouvernement chinois a également réagi à l’annonce d’une décision d’équiper l’Australie de sous-marins nucléaires, accusant Washington de revenir dans des logiques rappelant la guerre froide. Force est de constater que les données évoluent à une vitesse fulgurante et que la planète entière semble regarder les deux plus grandes puissances de l’époque se préparer à toutes les éventualités, même celle d’un conflit militaire.

    La vente de ces huit sous-marins nucléaires à l’Australie pose également la question de l’énergie nucléaire, non pas des armes nucléaires non comprises dans la vente, mais des réacteurs de propulsion des sous-marins nucléaires. Il ne viole pas les traités sur la prolifération nucléaire, mais s’il trouve des imitateurs parmi les pays négociant leurs capacités nucléaires, comme l’Iran, la situation deviendra encore plus compliquée.

    La fixation chinoise, l’obsession de Biden

    La plupart des États des océans Indien et Pacifique préoccupés par l’agression croissante de la Chine se tournent vers les États-Unis, et non la France, pour équilibrer la puissance chinoise. Ainsi, le Japon et l’Inde, les deux plus grandes économies de la région en dehors de la Chine, ont accueilli AUKUS. Singapour, qui a toujours soigneusement équilibré ses relations avec les États-Unis et la Chine, a également salué l’accord. La Nouvelle-Zélande a également fait des commentaires positifs sur la nouvelle alliance et le rôle qu’elle peut jouer dans le maintien de l’équilibre. Cependant, il a précisé que les sous-marins australiens n’ont pas leur place dans ses eaux territoriales.

    En revanche, le coût de cette option semble être très élevé car elle aliène et divise les alliés européens. «Les principes fondamentaux de toute alliance sont la solidarité et la transparence. Nous assistons ici à un manque total de transparence et de solidarité», a déclaré le président du Conseil européen Charles Michel. «Le président Joe Biden doit des explications à la France. De nombreuses questions restent sans réponse. L’un de nos États membres a subi une injustice flagrante et inacceptable. Cela doit être clarifié avant de revenir au nôtre», a également exprimé son mécontentement dans une interview à CNN, la cheffe de la Commission, Ursula von der Leyen.

    La rupture avec la France due à l’annulation de la commande de 12 sous-marins nucléaires de type « Barracuda », d’une valeur de 90 milliards de dollars, un aspect critique de la « diplomatie de l’armement », qui nuit clairement à la construction navale et à l’économie françaises, et la grande colère justifiée de le gouvernement français, renforce la crise de l’OTAN à un moment critique. Et dans le même temps, le retrait brutal des États-Unis d’Afghanistan, sans tenir compte de leurs alliés, crée un nouveau paysage pour les questions de sécurité collective dans une région plus large.

    En conclusion, je voudrais souligner que la question cruciale et la plus importante qui se pose est de savoir si AUKUS sera essentiel pour essayer de contenir la Chine. Et la réponse est que c’était certainement au niveau de la communication politique car cela a fait grand bruit et détourné l’attention de la défaite humiliante des Américains en Afghanistan, mais les dimensions réelles et les résultats finaux de cette alliance tripartite dont le but est beaucoup plus large que celui mentionné dans l’annonce, ne sont pas encore visibles. Dans le même temps, cependant, le désordre et toute scission dans le camp occidental sont très difficiles à inverser ou à guérir en peu de temps.

    Par Isidoros Karderinis. Né à Athènes en 1967. Il est romancier, poète et journaliste. Il a étudié l’économie et a terminé des études de troisième cycle en économie du tourisme. Ses articles ont été publiés dans des journaux, des magazines et des sites Web du monde entier. Ses poèmes ont été traduits en anglais, français et espagnol et publiés dans des anthologies poétiques, des magazines littéraires et des chroniques de journaux littéraires. Il a publié huit recueils de poésie et trois romans en Grèce. Ses livres ont été traduits et publiés aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Italie et en Espagne.

    L’Express, 21/10/2021

  • Sahara occidental: Le Royaume-Uni bat en brèche les thèses marocaines

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    Le Royaume-Uni considère le statut du Sahara occidental comme «indéterminé», a indiqué le ministre d’État britannique pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, James Cleverly, réitérant le soutien de son pays aux résolutions de l’ONU concernant le statut de ce territoire non autonome.
    «Comme l’a déclaré le secrétaire aux affaires étrangères le 11 décembre 2020 (et comme mentionné dans les réponses précédentes), le Royaume-Uni considère le statut du Sahara occidental comme indéterminé», a déclaré James Cleverly, en réponse à une question de la députée du parti travailliste pour Liverpool Riverside, Kim Johnson. «Nous prenons note de la position de l’ONU sur le statut du Sahara occidental qui est disponible sur son site web», a-t-il ajouté. La députée travailliste a interpellé James Cleverly pour savoir si le gouvernement britannique soutenait la position de l’ONU qui considère le Sahara occidental comme territoire non autonome.
    En mai dernier, James Cleverly avait réitéré le soutien du Royaume-Uni aux efforts menés par l’ONU pour parvenir à une solution politique juste et durable qui prévoit l’autodétermination du peuple sahraoui.
    Soutien aux efforts de l’ONU
    «Le Royaume-Uni soutient pleinement les efforts menés par l’ONU, comme indiqué clairement dans la résolution 2548 du Conseil de sécurité de l’ONU, pour parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable (…) qui prévoit l’autodétermination du peuple du Sahara occidental conformément aux principes et objectifs de la Charte des Nations-unies», avait-il déclaré en réponse à une question de la députée travailliste, Rachel Hopkins.
    Mercredi, la porte-parole du gouvernement britannique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, Rosie Dyas, a réaffirmé l’appui de Londres au processus politique au Sahara Occidental, lors d’un entretien accordé à Radio Algérie internationale (RAI).
    Invitée à réagir sur les derniers développements au Sahara occidental, la responsable britannique a affirmé que «la Grande-Bretagne poursuivait son soutien aux efforts menés par l’ONU en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et acceptable qui aboutit à l’autodétermination du peuple sahraoui».
    R. I./APS

  • Des milliers de Néerlandais bloqués au Maroc

    Des milliers de Néerlandais bloqués au Maroc – Transavia examine la possibilité d’obtenir l’autorisation d’effectuer des vols plus longs pour récupérer les voyageurs bloqués au Maroc

    Le trafic aérien entre les Pays-Bas et le Maroc sera interrompu à partir de minuit. Le ministère des affaires étrangères le confirme. L’interdiction de vol s’applique non seulement aux Pays-Bas, mais aussi à l’Allemagne et au Royaume-Uni. Le Maroc aurait pris cette décision à cause de la coronapandémie. Au cours des sept derniers jours, environ 3500 passagers ont voyagé avec Transavia vers le Maroc. « Cela donne une indication approximative du nombre de personnes présentes actuellement », déclare un porte-parole.

    Les passagers bloqués
    La compagnie aérienne indique qu’elle étudie toujours les conséquences de cette interdiction pour elle. « Nous examinons la possibilité d’obtenir l’autorisation d’effectuer des vols plus longs pour récupérer les voyageurs bloqués au Maroc », a-t-il déclaré. Aujourd’hui, deux autres vols sont de toute façon prévus.

    Le tour opérateur TUI compte actuellement 78 vacanciers au Maroc. TUI indique qu’elle étudie la meilleure façon d’aider les voyageurs sur place.

    Le ministère des Affaires étrangères confirme l’interdiction de vol. « Il existe des alternatives pour voyager via d’autres pays, près des Pays-Bas. Nous conseillons aux Néerlandais de contacter leur agence de voyage dès que possible pour discuter des itinéraires alternatifs », selon le ministère. Par exemple, il est toujours possible de prendre un vol depuis la capitale belge, Bruxelles.

    On ne sait pas pour l’instant combien de temps durera cette suspension, a ajouté le ministère. « Les Pays-Bas resteront en pourparlers avec les autorités marocaines pour faire en sorte que le trafic aérien entre les Pays-Bas et le Maroc soit à nouveau possible dès que possible. »

    L’entraîneur néerlandais menace de manquer la course solaire
    La course de voitures solaires qui débute ce lundi au Maroc semble souffrir des restrictions de voyage. Marc Lammers est l’entraîneur de l’équipe de course des étudiants de Delft. Il est toujours aux Pays-Bas et semble manquer la course en raison de l’interdiction de vol, déclare un porte-parole. L’équipe Vattenfall Solar Team est déjà au Maroc et compte bien apparaître au départ avec sa voiture solaire.

    Les étudiants de Delft sont convaincus que la bataille de cinq jours sur 2500 kilomètres peut avoir lieu. « L’organisation a déclaré que tout le monde est là pour s’assurer que la course a lieu », déclare un porte-parole. Les autres équipes néerlandaises, composées d’étudiants de Twente et de Groningen, ont également déclaré qu’elles étaient déjà au Maroc.

    L’équipe de Delft est la favorite pour la victoire. Après avoir remporté l’or à sept reprises en Australie et à trois reprises en Afrique du Sud, les étudiants espèrent remporter la nouvelle course dans le pays d’Afrique du Nord. Bien plus que l’honneur n’est pas en jeu au Maroc. « Il s’agit principalement d’un titre très agréable à porter », déclare le porte-parole.

    Les compagnies aériennes marocaines Royal Air Maroc et Air Arabia Maroc ont déjà annoncé qu’elles devaient suspendre leurs vols à destination et en provenance, entre autres, des Pays-Bas après 23h59.

    Le gouvernement marocain avait déjà interrompu les vols avec la Russie par crainte d’infections coronaires. A partir de demain, le laissez-passer corona sera obligatoire au Maroc pour les voyages nationaux et internationaux.

    RTL Niews, 20/10/2021

  • Le Maroc à l’assaut du marché britannique des produits frais

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    Le Maroc a annoncé qu’il se lance dans l’offre de produits frais au Royaume-Uni grâce à une nouvelle gamme de produits marocains spécifiques aux besoins du marché britannique, des relations commerciales directes entre les opérateurs, de nouvelles lignes logistiques et une nouvelle situation concurrentielle vis-à-vis des producteurs continentaux.

    Le Royaume-Uni a longtemps été un importateur majeur de fruits et légumes frais et maintenant, le Royaume-Uni ne faisant plus partie de l’Union européenne, les accords commerciaux entre le Maroc et le Royaume-Uni ont ouvert un environnement complètement nouveau, prêt à être cueilli – et le Maroc est prêt à saisir cette opportunité.

    Cette annonce fait suite au lancement de la première campagne d’exportation de produits agricoles et de produits de la mer du Maroc au Royaume-Uni – FromMoroccoToUK – qui s’appuie sur les relations de longue date existant entre les deux pays pour positionner le Maroc comme une alternative commerciale fiable et crédible pour les produits frais et durables.

    Alors que les fruits et légumes frais marocains ne sont pas une nouveauté pour le commerce des produits frais au Royaume-Uni – agrumes, myrtilles, tomates et autres sont déjà disponibles dans les supermarchés – le Maroc a considérablement modernisé son agriculture et son industrie alimentaire au cours de la dernière décennie, renforçant les opportunités qui viennent de l’ouverture du marché britannique, post-Brexit.

    Jusqu’à présent, le Maroc était limité par un accord commercial avec l’UE. Maintenant, en élargissant les quotas de quantités et la capacité de les produire en totale conformité avec les spécificités du marché britannique, le Maroc est devenu un nouvel acteur important sur le marché international des produits frais.

    Ceci, couplé à une nouvelle route maritime reliant Tanger à Poole – qui réduit les temps de transport de six à trois jours – peut garantir la fraîcheur des produits et leur disponibilité dans les rayons des marchés et supermarchés du Royaume-Uni.

    « Au-delà des prix particulièrement compétitifs, l’offre marocaine est avant tout une offre de qualité qui répond aux exigences des distributeurs et de la population britannique, notamment en matière de production durable », a déclaré El Mehdi El Alami, directeur de la promotion et du développement de Morocco FoodEx.

     » Nous sommes convaincus de disposer de produits de haute qualité qui sont non seulement conformes aux règles administratives du Royaume-Uni mais qui correspondent également aux attentes de clients exigeants « .

    « Notre capacité de production s’améliore d’année en année, notre chaîne d’approvisionnement est fiable et transparente, et nos prix sont équitables. Le Maroc est prêt à concurrencer les autres pays de manière équitable et transparente – faisant du Maroc une alternative commerciale crédible et fiable pour les entreprises britanniques. »

     Food & Drink International, 18/10/2021

  • Impact géopolitique du retrait des USA d’Afghanistan

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    La sortie définitive des États-Unis d’Afghanistan et le trouble qu’elle a créé chez les alliés, principalement en raison des conditions dans lesquelles elle s’est produite, continuent d’avoir un impact sur l’agenda stratégique des parties prenantes en Syrie et dans la région. Un autre signe du « pivot » américain a été l’annonce du partenariat avec le Royaume-Uni et l’Australie (AUKUS) pour la vente de sous-marins à propulsion nucléaire à cette dernière. La récente réunion de la « QUAD » (États-Unis, Inde, Japon, Australie) à la Maison Blanche a été la dernière confirmation de l’importance accordée par l’administration Biden à la région indo-pacifique et à la rivalité avec la Chine. Une situation ironique alors que l’UE prépare sa propre stratégie indo-pacifique. Les tensions transatlantiques sont donc loin de diminuer. SOS Blinken s’est rendu à Paris début octobre et le président américain Biden s’est entretenu avec son homologue français dans un effort évident pour apaiser les tensions entre Paris et Washington. Aucun résultat visible jusqu’à présent.

    Les consultations de l’ESNU Pedersen ont permis un accord de principe des parties pour la reprise des pourparlers sur le Comité constitutionnel à Genève le 18 octobre (cf. déclaration au CSNU du 28 septembre). Ce résultat fait suite à sa visite à Damas, où il a rencontré le FM Mekdad et le chef de la délégation du régime aux pourparlers de Genève, à Istanbul où il a rencontré des représentants de l’opposition menés par Anas Al Abde et des officiels turcs. Ces derniers ont souligné l’importance du processus d’Astana et du partenariat avec le Qatar. L’accord est également le résultat de ses consultations avec les Américains et les Russes.

    Il reste prudent quant aux chances de succès. Certes, la méthode acceptée par les parties apporte une nouvelle dynamique, c’est-à-dire des discussions plus « orientées vers les résultats », et des perspectives de calendrier pour parvenir à un résultat final d’installation d’une réforme constitutionnelle concrète. Mais la réponse de Damas reste clairement prudente, suivant le ton du discours d’investiture provocateur d’Assad en juillet dernier. D’autre part, le dialogue russo-américain ne semble pas encore très dense, notamment sur le  » pas à pas « , qui devrait prendre place dans les négociations à Genève. Il n’en reste pas moins que le temps presse et que l’on ne peut se permettre de revenir au tempo lent et parfois régressif de ces derniers mois. Un engagement américain plus fort, incluant la nomination d’un nouvel envoyé spécial, est nécessaire. Aucun rôle européen visible pour l’instant. L’opposition syrienne critique la communauté internationale pour son manque d’engagement derrière le processus de paix.

    Cette situation amène les pays arabes (notamment la Jordanie, les EAU, le Bahreïn et l’Égypte, si ce n’est l’Arabie saoudite) à explorer davantage la notion de normalisation avec le régime de Damas. Ils partagent avec Israël l’inquiétude de voir l’Iran se montrer plus agressif en Syrie. La Jordanie et Israël en particulier refusent de voir les milices soutenues par l’Iran renforcer leur présence près de leurs frontières. C’est ce qu’a fait savoir le ministre israélien des affaires étrangères Lapid lors d’une visite à Moscou (alors que Lavrov exprimait l’impatience de la Russie face aux frappes israéliennes répétées contre le territoire syrien). La Jordanie a fait la même remarque à Moscou, notamment lors d’une rencontre du roi Abdallah avec Poutine en août dernier. Dans le même temps, Amman souhaite voir les échanges avec la Syrie reprendre pour des raisons économiques.

    La livraison d’hydrocarbures iraniens au Liban via les ports syriens a conduit à une réunion des ministres de l’énergie jordanien, égyptien, syrien et libanais à Amman le 8 septembre. Ils se sont mis d’accord sur une feuille de route pour fournir du gaz naturel égyptien au Liban via la Jordanie et la Syrie, dès que la Syrie aura réparé la section du gazoduc située sur son territoire. Ils ont également approuvé des plans visant à approvisionner le Liban en électricité depuis la Jordanie via le territoire syrien. Le ministre syrien de l’électricité a mentionné un coût de 3,5 millions de dollars pour la réhabilitation du réseau électrique dans le sud de la Syrie. Le ministre libanais de l’énergie a déclaré que son pays était en contact avec la Banque mondiale pour le financement de l’approvisionnement en gaz égyptien. Le jour même de cette réunion ministérielle, les forces armées syriennes sont entrées dans la vieille ville de Daraa après des semaines de siège et après un accord négocié par la Russie avec les rebelles de la province. Une conquête essentielle pour permettre la mise en place de l’accord de fourniture de gaz et d’électricité.

    Par ailleurs, le ministre de la défense et chef d’état-major syrien, le général Ali Abdullah Ayyoub, s’est rendu à Amman le 19 septembre où il a rencontré son homologue jordanien, le général Yousef Hunaiti, chef d’état-major, pour discuter de la sécurité des frontières après la prise de contrôle de Daraa par le régime et du poste frontière de Nassib. Cela confirme l’approche jordanienne (sécurité et intérêts économiques, notamment le commerce avec l’Europe) ainsi que l’attitude pragmatique de Damas. Pour couronner le tout, le président syrien Bachar al-Assad et le roi Abdallah de Jordanie se sont entretenus au téléphone le 3 octobre, la première conversation publiquement connue entre les deux dirigeants depuis le début de la guerre civile en Syrie en 2011. Les deux dirigeants ont « discuté des relations entre les deux pays frères et des moyens de renforcer la coopération », selon un communiqué du palais royal jordanien. Abdallah a déclaré que son gouvernement soutient l’intégrité territoriale, la stabilité et la souveraineté de la Syrie – un clin d’œil à la position d’Assad selon laquelle toute la Syrie déchirée par la guerre doit revenir sous le contrôle de Damas et un long chemin depuis le soutien initial de la Jordanie aux groupes rebelles en Syrie.

    Il s’agit sans aucun doute d’une victoire pour le régime.

    C’est aussi un succès du dialogue russo-américain initié avec la rencontre au sommet Poutine-Biden à Genève et qui se poursuit au niveau des experts des deux nations. Cette approche « pas à pas » a également permis aux Etats-Unis de s’engager à ne pas soumettre les travaux de réhabilitation des infrastructures électriques dans le sud de la Syrie aux sanctions de l’Acte de César.

    La Turquie, quant à elle, doit s’écarter de ses priorités : soutenir l’opposition dans le nord-ouest et faire face à une nouvelle offensive du régime à Idlib, combattre les milices kurdes, contenir l’afflux de réfugiés et gérer ses relations avec ses alliés occidentaux. L’offensive de Damas avec le soutien de la Russie à Idlib produit des tensions avec Moscou. Des soldats turcs ont été tués récemment dans une attaque de groupes rebelles. Les rivalités entre groupes djihadistes, la mauvaise gouvernance et leurs exactions contre la population locale (notamment les médias) compliquent sa tâche. Selon les rumeurs, les chefs des services de renseignement turcs et syriens se seraient rencontrés à Bagdad.

    La Russie contrôle plus que jamais le jeu, sur le terrain comme on l’a vu à Dara et Idlib récemment, ainsi qu’au niveau diplomatique. En plus de poursuivre des échanges discrets avec les Américains, elle a multiplié les rencontres avec les représentants des pays de la région. Assad a rencontré Poutine le 13 septembre à Moscou pour la première fois depuis 2018. La discussion a tourné autour de la situation dans le nord-ouest et du sort des accords de cessez-le-feu.

    Des représentants des factions kurdes de l’est de la Syrie, dont l’AANES (Administration autonome du nord-est de la Syrie), se sont également rendus à Moscou. L’AANES tente d’obtenir les garanties de Moscou pour protéger le nord-est de la Syrie contre l’invasion de l’ARS (Armée nationale syrienne) et de la Turquie, et de pouvoir négocier avec Damas des conditions spéciales pour la région dominée par les Kurdes. De telles demandes sont considérées avec scepticisme par Moscou tant que le SDF (Syria Democratic Forces) est un allié militaire des États-Unis. Mais les Kurdes prévoient sans doute des options de secours en cas de départ des Américains.

    Et bien sûr, la Russie profite également des tensions transatlantiques mentionnées ci-dessus. La rencontre entre Poutine et Erdogan à Sotchi le 29 septembre semble avoir privilégié le style sur la substance, chaque dirigeant semblant mesurer le pouvoir de l’autre à imposer ses priorités et son statut sur la scène intérieure de son pays, tout en soulignant l’importance de la relation entre leurs deux pays, tant sur le plan stratégique qu’économique. Ni le ministre turc des affaires étrangères ni le ministre turc de la défense ne faisaient partie de la délégation d’Erdogan. Aucune conférence de presse conjointe n’a été organisée à l’issue de la rencontre. Outre l’Afghanistan, la Libye et le Caucase, la Syrie était à l’ordre du jour, notamment la situation à Idlib où l’accord de stabilisation entre Moscou et Ankara reste fragile. Comme pour réaffirmer le rapport de force, l’armée russe a mené des frappes contre l’enclave dans les zones contrôlées par les HTS et à Afrin contre des positions des ANS le 26 septembre. Les médias turcs font également état d’un mécontentement au sein de l’armée turque concernant les opérations dans le nord-ouest de la Syrie. Ankara n’est pas non plus particulièrement à l’aise avec l’invitation faite à l’AANES des YPG, dominée par les Kurdes, pour des contacts à Moscou le 16 septembre, juste après la visite d’Assad le 13 septembre.

    Quant à l’UE et aux Européens, ils peinent à trouver enfin un rôle stratégique digne de la boussole du même nom. Le consensus semble s’effriter, y compris sur la question de la normalisation avec le régime.

    Cependant, ils ne peuvent pas rester les bras croisés face au scepticisme croissant quant aux chances de succès du processus politique. Par ailleurs, la situation humanitaire désastreuse en Syrie et le traitement cruel et dégradant des réfugiés de retour au pays, mis en évidence dans le dernier rapport d’Amnesty International le mois dernier, ne nous permettent pas de rester les bras croisés. De même après le rapport du Réseau syrien pour les droits de l’homme (RSDH) qui indique que 94 civils ont été tués lors d’exécutions extrajudiciaires en Syrie en août dernier, dont 32 enfants, 10 femmes et autres. Le rapport note que c’est dans le gouvernorat de Daraa que l’on a constaté le plus de victimes civiles aux mains du régime.

    Cette destruction de la société civile en plus des infrastructures risque d’aboutir à un État failli qui rend toute reconstruction problématique même si les conditions politiques que nous posons sont plus ou moins remplies. Une réflexion s’impose sur les leviers dont nous disposons pour infléchir ce cours désastreux, en coordination et en dialogue avec les autres acteurs qui partagent tout ou partie de ces préoccupations, y compris les pays arabes.

    Marc Otte

    Egmont Institute, 14/10/2021

  • GB: Député poignardé à mort dans un « incident terroriste »

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    LEIGH-ON-SEA, Angleterre, 15 octobre (Reuters) – Le législateur britannique David Amess a été poignardé à mort dans une église de l’Essex vendredi par un assaillant qui s’est jeté sur lui alors qu’il rencontrait des électeurs, dans ce que la police a considéré comme une attaque terroriste.

    Amess, 69 ans, membre du parti conservateur du Premier ministre Boris Johnson, a été poignardé à plusieurs reprises lors de l’attaque survenue vers midi dans l’église méthodiste de Belfairs à Leigh-on-Sea, à l’est de Londres. La police métropolitaine, dont l’unité de lutte contre le terrorisme dirige l’enquête sur l’incident, a déclaré dans un communiqué, tôt samedi, qu’elle considérait l’attaque mortelle au couteau comme un incident terroriste. L’enquête préliminaire a révélé une « motivation potentielle liée à l’extrémisme islamiste », a ajouté la police.

    Un homme de 25 ans a été arrêté sur les lieux pour suspicion de meurtre, et les détectives ont déclaré que des agents spécialisés dans le contre-terrorisme menaient l’enquête initiale.

    « Dans le cadre de l’enquête, des agents effectuent actuellement des perquisitions à deux adresses dans la région de Londres et celles-ci se poursuivent », a déclaré la police, ajoutant que l’on pense que le suspect en détention a agi seul.

    Des hommes politiques ont décrit l’attaque comme une atteinte à la démocratie.

    « David était un homme qui croyait passionnément en ce pays et en son avenir et nous avons perdu aujourd’hui un excellent fonctionnaire et un ami et collègue très aimé », a déclaré M. Johnson, qui s’est précipité de l’ouest de l’Angleterre vers Londres après l’annonce de la nouvelle.

    Des policiers armés ont fait irruption dans l’église et les ambulanciers ont lutté en vain pour sauver la vie du législateur sur le sol de l’église, où un panneau indique : « Tous sont les bienvenus ici : là où les vieux amis se rencontrent et où les étrangers se sentent chez eux ».

    « Tragiquement, il est mort sur place », a déclaré aux journalistes Ben-Julian Harrington, chef de la police de l’Essex. Il a ajouté que la police, au moment de l’incident, ne pensait pas qu’il y avait une menace immédiate pour quiconque.

    Il n’a donné aucun autre détail sur ce meurtre, la deuxième attaque mortelle contre un législateur britannique dans sa circonscription au cours des cinq dernières années, ce qui a suscité des questions sur la sécurité des politiciens.

    La chaîne de télévision Sky News a déclaré que l’homme arrêté était un ressortissant britannique d’origine somalienne.

    UN LÉGISLATEUR DE LONGUE DATE

    Des collègues de tout le Parlement ont exprimé leur choc et ont rendu hommage à M. Amess, l’un des législateurs les plus anciens de Grande-Bretagne, pour son engagement envers ses électeurs, avec lesquels il tenait des réunions régulières les premier et troisième vendredis du mois.

    Les drapeaux sur tous les bâtiments du gouvernement britannique seront mis en berne en hommage.

    M. Amess, marié et père de cinq enfants, a été élu pour la première fois au Parlement pour représenter la ville de Basildon en 1983, puis la ville voisine de Southend West en 1997. Il a été fait chevalier par la reine Elizabeth pour son service public en 2015.

    Sur son site Internet, il s’intéressait principalement au « bien-être des animaux et aux questions relatives à la vie privée ». Il était populaire auprès des législateurs et connu pour ses contributions actives aux débats – souvent sur des questions relatives à sa circonscription de l’Essex ou aux droits des animaux.

    Bob Hazel, secrétaire d’un groupe de résidents locaux, a déclaré qu’Amess discutait régulièrement avec les navetteurs dans le train en provenance de Londres.

    « Il ne restait pas coincé derrière un livre ou un journal, il parlait aux gens et c’était ce genre de personne. Il était vraiment accessible et il va beaucoup nous manquer », a déclaré Hazel à Reuters.

    Dans sa dernière intervention à la Chambre des communes le mois dernier, Amess avait demandé un débat sur le bien-être des animaux.

    Des habitants ont laissé des fleurs près de l’église avec un hommage : « David Amess RIP Un tel gentleman xxx ».

     » ATTAQUE CONTRE LA DÉMOCRATIE « 

    L’attaque au couteau lors d’une réunion avec des électeurs fait écho à un incident survenu en 2010, lorsque le législateur travailliste Stephen Timms a survécu à une agression au couteau dans son bureau de circonscription, et à la fusillade mortelle de la travailliste Jo Cox en 2016, quelques jours avant le référendum sur le Brexit.

    Le mari de Cox, Brendan, a qualifié l’attaque contre Amess de « plus lâche que jamais », tandis que sa sœur, Kim Leadbeater, qui a été élue plus tôt cette année députée de la même région que Cox, a déclaré que cela montrait les « risques massifs » que les législateurs devaient prendre.

    « Qu’une autre famille doive revivre cela, c’est horrible », a déclaré Mme Leadbeater. « Tant de députés aujourd’hui seront effrayés par cela. Mon partenaire est rentré à la maison et m’a dit : ‘Je ne veux plus que tu fasses ça, parce que la prochaine fois que ce téléphone sonnera, la conversation pourrait être différente’. »

    Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a également transmis ses condoléances. « Une attaque contre les élus est une attaque contre la démocratie », a-t-il déclaré.

    Le président de la Chambre des communes, Lindsay Hoyle, a déclaré que l’incident provoquerait une onde de choc dans la communauté parlementaire et dans tout le pays, ajoutant que la sécurité des législateurs devrait être discutée.

    « Des questions sont posées, à juste titre, sur la sécurité des représentants élus de notre pays », a déclaré la ministre de l’Intérieur Priti Patel, ajoutant qu’elle avait demandé à la police de revoir la sécurité des législateurs.

    Le Parti conservateur a suspendu toutes ses activités de campagne jusqu’à nouvel ordre.

    « Cela me brise le cœur d’apprendre le décès de Sir David Amess », a déclaré l’ancienne Première ministre Theresa May. « Un homme décent et un parlementaire respecté, tué dans sa propre communauté dans l’exercice de ses fonctions publiques. Un jour tragique pour notre démocratie ».

    Reuters, 16/10/2021

  • La GB traverse une crise semblable à celle des années 1970 ? Johnson : « Non »

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    LONDRES, 5 octobre (Reuters) – Le Premier ministre Boris Johnson a nié mardi que la Grande-Bretagne soit en crise en raison d’une pénurie de main-d’œuvre ou qu’elle soit confrontée à une spirale inflationniste de type années 1970.

    Boris Johnson a déclaré que les entreprises s’étaient contentées d’une main-d’œuvre importée à bas salaire pendant près de 25 ans et qu’elles devaient désormais payer davantage leurs travailleurs et investir davantage.

    Interrogé par la radio BBC pour savoir si le Royaume-Uni était en crise, Johnson a répondu : « Non. Je pense qu’au contraire, ce que vous voyez avec l’économie britannique et en fait l’économie mondiale est très largement dans les chaînes d’approvisionnement les tensions et les contraintes que vous attendriez d’un géant qui se réveille et c’est ce qui se passe. »

    Il ajoute toutefois que les entreprises doivent dépenser davantage.

    « Ce que vous avez vu au cours des 20 dernières années ou plus, presque 25 ans, c’est une approche par laquelle les entreprises de toutes sortes ont pu maintenir une immigration à bas salaire et à bas coût pendant très longtemps », a déclaré M. Johnson.

    Interrogé sur la question de savoir si le Royaume-Uni se dirigeait vers une spirale inflationniste du style des années 1970, il a répondu : « Je ne pense pas que le problème se présentera de cette manière et je pense en fait que la capacité naturelle de ce pays à organiser sa logistique et ses chaînes d’approvisionnement est très forte. »