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  • Affaire Ben Barka: Documents révélés par le hacker Coleman

    Affaire Ben Barka: Documents révélés par le hacker Coleman – Maroc, Israël, Mossad, Hassan II, Miloud Tounzi, services secrets,

    Courrier de Maître Ralph Boussier du 08 décembre 2010:

    —– Message transféré —-
    De : Ralph BOUSSIER <RBOUSSIER@galilex.com>
    À : aaamine145@yahoo.fr
    Envoyé le : Mer 8 décembre 2010, 16h 59min 24s
    Objet : 20071097 – TOUNZI – CONSULTATION

    Cher monsieur,

    Conformément à la stratégie arrêtée lors de notre dernier rendez vous général voici la déclaration d’appel qui fut régularisé par maitre Clément.

    J’ajoute que le greffe de la Cour d’appel lui a indiqué que depuis 34 ans que dure cette instruction et en dépit des 11 juges d’instructions qui se sont succédés dans ce dossier , jamais la Cour n’avait connu de ce dossier.

    Décidément c’est curieux.

    Cordialement.

    Ralph BOUSSIER

    S.C.P. NORMAND &  Associés

    www.normand-associes.fr

    Tel : 00.33.1.47.20.30.01

    Membre de :

    www.ialawfirms.com

    Pièce jointe en PDF :

    ————————————————————–

    RALPH BOUSSIER
    Avocat à la Cour
    SCP Normand & Associés
    7, place de Valois-75001 PARIS

    De : Ralph BOUSSIER <RBOUSSIER@galilex.com>
    À : aaamine145@yahoo.fr
    Envoyé le : Ven 24 décembre 2010, 15h 00min 07s
    Objet : note de lecture livre de me Buttin

    cher monsieur,
    merci de transmettre cette note à monsieur le Directeur général.
    bien entendu e suis à son entière disposition pour lui commenter de vive voix à sa convenance.
    cordialement

    RALPH BOUSSIER
    AVOCAT A LA COUR
    SCP NORMAND
    FRANCE
    +33 1 47 20 30 01
    +33 1 47 20 06 01
    +33 6 76 86 91 50

    NOTE DE LECTURE DU LIVRE DE MONSIEUR MAURICE BUTTIN

    1. sur cette publication :

    il convient de souligner d’ores et déjà et en introduction que cet ouvrage est édité chez KARTHALA qui est une société d’édition très confidentielle qui ne produit que des ouvrages très particuliers à audience restreinte.

    Pour preuve s’agissant de celui-ci, il n’est pas encore à ce jour diffusé chez les libraires ou les grandes enseignes de diffusion d’ouvrage et il convient d’aller l’acquérir chez l’éditeur lui-même.

    1. présentation générale de l’ouvrage :

    Ce livre est en réalité un prétexte pour son auteur de réaliser une biographie en se dissimulant derrière un titre particulièrement accrocheur puisqu’il utilise le nom de trois personnalités à très forte notoriété que sont feu sa majesté HASSAN II, le Général DE GAULLE et BEN BARKA.

    Le titre et la première de couverture indiquent clairement que l’essentiel du livre concerne le dossier qui aura occupé presque toute la vie professionnelle de cet avocat à savoir l’affaire BEN BARKA ;

    Au travers de 479 pages, dont 430 sont consacrés à Mehdi BEN BARKA, il est retracé les premières années de l’Indépendance jusqu’à la disparition de Mehdi BEN BARKA en ce mois d’octobre 1965.

    L’aspect témoignage politique n’est pas l’objet de la présente et j’en fais l’économie. C’est pourquoi je vais directement à ce qui est intitulé « l’affaire BEN BARKA » et qui est la troisième partie du livre qui comprend trois sous-parties que sont :

    • la première plainte (1965-1975)
    • la deuxième plainte (1975-2010)
    • « les responsables ».
    1. l’analyse de la troisième partie :
    1. la première plainte et sa gestion de 1965 à 1975 :

    Au travers de cette première sous-partie, il est essentiellement décrit tout d’abord l’influence supposée de Mehdi BEN BARKA, puis les éléments politiques qui auraient conduit à sa disparition et enfin l’impact de sa disparition au sein du Royaume du Maroc.

    Cette partie se termine bien entendu par les éléments fondamentaux que sont les procès de 1966 et 1967 et il faut d’ores et déjà souligner que de façon très contrastée l’auteur relève que si l’instruction de cette affaire n’a pas été bâclée par le Juge ZOLLINGER, en revanche elle aurait été réalisée dans un délai beaucoup trop court pour, comme cela est indiqué : « (…) dégagées toutes les mailles du filet (…) » (Cf. page 297).

    Afin de fonder son propos, Maître BUTTIN reprend l’interview qu’avait donnée le Juge d’instruction le 21 mars 1990 dans une émission d’enquête de Charles VILLENEUVE où ce magistrat à la retraite avait répondu :

    « je ne pouvais plus rien ajouter. Toutes les portes étaient fermées, tous les verrous poussés (…) ».

    Pour achever l’illustration de cette première thèse, il est cité un extrait du journal suisse La Liberté Fribourg du 4 avril 1966 qui aurait affirmé que le dossier du juge fut d’autant plus rapidement clos qu’il était visible que le pouvoir avait hâte d’en finir avec un dossier plus volumineux que lumineux.

    C’est sur ces appréciations donc que s’ouvre la relation du procès de 1966 qui, et il n’est pas neutre de la souligner, s’appelle pour le commun des mortels « l’affaire BEN BARKA », nom de la victime, et non du nom des accusés, ce qui est plus habituel en matière criminelle.

    Dans cette première affaire l’audience durera 17 semaines, six accusés sont présents dans le box. Ils sont accusés d’arrestation illégale et de séquestration et pour le Roy Finville de non dénonciation de crime.

    Bien entendu, cette première partie de procès sera interrompue par l’arrivée de Monsieur DLIMI, ce qui renverra le procès et conduira à une deuxième session d’assises.

    Pour synthétiser l’essentiel du procès, en tout cas de cette première partie du procès, il faut reprendre la citation qui est faite par Maître BUTTIN s’agissant de la plaidoirie de l’un de ses confrères qui relève qu’ « il est regrettable que beaucoup de gens n’ait connu l’existence de BEN BARKA, ce leader du Maroc et du Tiers-Monde, qu’à propos de son enlèvement (…) » (Cf. page 299) nous sommes manifestement dans une tribune politique et non dans une enceinte de justice.

    Il faut relever qu’avec une certaine franchise, Maître BUTTIN note que cette première série de journées d’audience est très décousue, que les témoignages sont contradictoires et qu’il est tellement impliqué dans le dossier que le Président va même jusqu’à s’interroger, s’adressant à lui, en lui disant :

    « (…) êtes-vous témoin ou avocat ? (…) »ceci est intéressant pour la situation actuelle de ce dossier et des agissements du juge Ramael.

    La réflexion du Président de la Cour d’Assises de Paris résulte de l’interrogatoire de EL MAHAI qui est pris à partie par Maître BUTTIN lorsqu’il déclare qu’il est étudiant, alors qu’il l’aurait reçu précédemment au Ministère de l’Intérieur à Rabat en lieu et place du Général OUFKIR.

    D’ores et déjà, on s’aperçoit que Maître BUTTIN est arc-bouté sur le fait de savoir qui est Monsieur CHTOUKI.

    En effet, il explique au Président que pour sa cliente Madame BEN BARKA, il a besoin de savoir qui est ce personnage, qui est selon lui la charnière du dossier et que personne n’a pu retrouver.

    Le Président en bon magistrat lui coupe la parole et lui dit :

    « (…) se sont des appréciations je voudrai que vous posiez votre question (…) » (Cf. page 301)

    Il n’est pas neutre non plus de relever avec quelle insistance LOPEZ est interrogé afin d’identifier CHTOUKI et la seule information qui ait pu avoir la Cour d’Assises est que cette personne existait puisque Monsieur EL MAHAI le connaissait.

    Monsieur EL MAHAI va jusqu’à dire qu’il l’a connu comme Commissaire de police et que son prénom était Miloud.

    Monsieur EL MAHAI va être très disert puisqu’il va définir le rôle de DLIMI auprès d’OUFKIR et il identifie le cabinet 1 puis fait référence à la Villa MOKRI. (page 303)

    Manifestement, les débats se tendent et le Président menant de façon ferme et respectueuse du Code de procédure criminelle ceux-ci, va jusqu’à suspendre l’audience compte-tenu de la volonté qu’ont certains avocats des parties civiles de transformer en tribune politique l’audience.

    Ces incidents d’audience vont aller jusqu’à ce que le Président interdise à Maître BUTTIN d’intervenir à tout bout de champ et il ne se retirera pas de ce procès à la demande de Abderrhaman YOUSSOUFI qui lui demande de se maintenir pour pouvoir plaider.

    Pour illustrer la tension qui existait, il est fait référence à un article paru le 30 septembre 1966 dans le journal Combat qui relevait que :

    « Lorsque le 30 septembre, le Président PEREZ a osé censurer le témoignage du Bâtonnier YOUSSOUFI, la partie civile a menacé de se retirer, (…), il ne s’agissait pas d’un chantage. Et c’est pourquoi soudain apeuré le Président, après une courte suspension d’audience a platement battu en retraite, (…), mais je crois comprendre que la partie civile a désormais perdu toute illusion, le pouvoir de Matignon a prévalu sur celui de l’Elysées, (…), la partie civile est revenue pour la forme à la barre. Moralement elle s’est retirée. Le procès des assassins de BEN BARKA peut se poursuivre maintenant sur un autre plan que le judiciaire. L’affaire ne fait que commencer. Le mort aura la vie dure. Le mort aura le dernier mot (…). »

    Cette position et cette relation des faits, en un mot ce témoignage, sont particulièrement importantes dans la situation actuelle puisqu’on s’aperçoit qu’en réalité les parties civiles n’auront de cesse à partir de ce moment là que « ..d’affirmer que cette tragique et ténébreuse affaire à la double responsabilité marocaine et française, ne peut avoir de conclusion puisque les verrous mis par les complices français à une instruction complète et le silence obstiné des accusés et des autres personnes vraisemblablement au courant, empêche que le sort réservé à la victime ne soit connu… » (Cf. page 308)

    La position deviendra éminemment politique, à tel point que les journaux retiennent que Maître BUTTIN fait œuvre de militant en faisant plaidoirie essentiellement centrée sur la politique marocaine pour aboutir à la théorie du complot.

    De façon curieuse, Maître BUTTIN règle le réquisitoire de l’Avocat général TOUBAS en deux lignes en indiquant qu’il est implacable mais qu’il se garde bien de mettre en cause le souverain marocain.

    C’est donc au terme de 37 jours d’audience que le verdict doit être rendu mais un coup de théâtre intervient le 19 octobre, puisque le Directeur général de la Sûreté Nationale Ahmed DLIMI se présent au Palais de justice et se constitue prisonnier.

    Cette arrivée, certes spectaculaire, permet à Maître BUTTIN de retenir que « … le pouvoir marocain en joueur avisé s’sacrifia une pièce importante de son jeu, ce qu’il qualifie être le troisième pilier du régime selon ce qu’aurait écrit le Bâtonnier YOUSSOUFI dans son ouvrage intitulé L’Evènement paru en novembre 1966 page 22. … »(page 311).

    Bien entendu le procès est ajourné et après avoir rappelé la tragique série de décès des confrères de la partie civile, Pierre STIBBE, le Bâtonnier THORP et Michel BRUGUIER Maître BUTTIN une nouvelle fois va extrapoler et à indiquer que tous trois seraient décédés épuisés par les semaines de travail, de présence aux audiences, de tension et de passion lors du procès BEN BARKA.

    Certains seraient même allés jusqu’à parler de la malédiction qui s’abattait sur les avocats de la partie civile.

    Ceci renvoie au 17 avril 1967 où le même Président, à savoir le Président PEREZ ouvre la nouvelle session d’Assises qui est l’objet d’entrée de jeu d’un incident des parties civiles qui souhaiteraient qu’elle soit tenue plus tard.

    Les parties civiles savent que cette demande de renvoi du procès à un mois n’est bien entendu pas acceptable pour le Président.

    Ceci conduit Maître BUTTIN à affirmer qu’à compter de ce jour, Madame BEN BARKA a décidé de consacrer désormais sa vie et ses moyens à la recherche de la vérité, et c’est face au refus de cette demande de renvoi que la partie civile quitte l’audience et deviendra un spectateur silencieux. (Cf. page 315).!

    Faisant manifestement l’objet d’une orchestration et d’une organisation particulière qui avaient pour seul but, dès cette époque là, de montrer que dans cette affaire l’instruction dans un premier temps puis le procès dans un second ne sont pas normalement menés, la partie civile va avoir le beau rôle de quitter les débats et sera soutenue par une partie de la presse française comme par exemple le Canard Enchaîné qui écrit le 19 avril 1967 :

    « Dieu merci, la mort, puis le Président PEREZ ont finalement réussi à écarter cette inconvenante partie civile du prétoire, où elle jetait le trouble. Désormais, le linge sale de l’affaire BEN BARKA se lavera, comme il se doit, en famille. Tous les espoirs sont permis (…) Quant à Monsieur le Président PEREZ, le voici réduit au silence. Son rôle principal consistait, en effet, à dire « la question ne sera pas posée » et l’on saura enfin la vérité, comme toute la vérité, comme l’a promis DE GAULLE à la mère de BEN BARKA ».

    Fort de cette position de témoin silencieux, Maître BUTTIN va ensuite dans son ouvrage faire sa plaidoirie, en disant « si j’avais pu plaider les débats auraient été différents ».

    Comme vous le savez le verdict est rendu le 5 juin 1967. Monsieur SOUCHON est condamné à six ans, LOPEZ à huit ans de réclusion criminelle. Maître BUTTIN rappelle que l’Avocat Général avait requis 20 ans contre le premier et 15 ans contre le second. Tous les autres accusés sont acquittés et c’est ainsi que seront clôturés 70 journées d’audience.

    L’auteur nous livre également une citation parue dans la revue L’Evènement sous la plume de K. Archibald qui écrivit que :

    « en rendant leur verdict, les jurés n’ont fait que rendre au Tribunal la monnaie de sa pièce. Les faiblesses du dossier, les références sempiternelles au secret professionnel et à l’acte de gouvernement, leur ont fait comprendre qu’ils n’avaient pas droit à la vérité mais aux quelques parcelles que la raison d’état jugeait bon de leur livrer. Dans ces conditions, ils ont estimé qu’ils n’avaient pas à juger (…) ».

    Mais la Cour rendit également le même jour un deuxième arrêt pour condamner par contumace OUFKIR, CHOUKI et les quatre truands français dans cet arrêt Ahmed DLIMI est acquitté, OUFKIR condamné par contumace. Ainsi se clôture la première partie de cette affaire.

    Maître BUTTIN renvoie à des appréciations politiques en faisant référence notamment au livre « Les officiers de sa Majesté » mais ce n’est pas particulièrement dirimant.

    1. deuxième plainte de 1975 à 2010 :

    Comme nous le savons, Maître BUTTIN a régularisé une plainte contre X le 21 octobre 1975 pour assassinat, complicité d’assassinat et toute autre infraction que l’instruction révèlerait.

    Cette plainte est motivée par le fait que les arrêts du 5 juin 1967 n’ont pas fait justice. (Cf. page 339)

    Il ne me semble pas très pertinent de faire des développements sur l’introduction afférente à cette deuxième plainte puisqu’il s’agit essentiellement d’appréciation de Monsieur BUTTIN et le premier élément intéressant développé visé les mandats d’arrêt en page 352.

    Ce qui ne sera pas pour nous surprendre, il retient que le Juge RAMAEL a incontestablement adopté une attitude plus offensive que ces prédécesseurs et cette offensive bien entendu prend la forme des cinq mandats d’arrêt d’octobre 2007 qui sont motivés uniquement pour entendre les survivants de l’époque « et non à priori pour les mettre en examen comme certains médias l’ont soutenu » (page 352).

    Il rend également hommage au courage du journaliste Joseph TUAL et relève que cette décision du Juge RAMAEL est une première depuis le dépôt de la nouvelle plainte.

    Ensuite, il est rappelé que manifestement les mandats d’arrêt internationaux n’ont pas gêné dans ses déplacements le Général BENSLIMANE et qu’en juin 2009 lorsque Michèle ALLIOT-MARIE devient Ministre de la justice et des libertés, après qu’elle ait été saisie par lettre, s’étonnant de la non exécution par le Maroc des commissions rogatoires internationales, il aura reçu une réponse le 28 août, lui indiquant qu’elle saisissait immédiatement le Directeur des affaires criminelles et des grâces et à mi-septembre, la décision est prise de diffuser les mandats d’arrêt.

    Il est relevé que moins de 24 heures après, une décision contraire intervient.

    Fort de cela, et de ces errements quant à l’exécution des mandats d’arrêts ou des commissions rogatoires internationales, Maître BUTTIN rappelle que le 2 octobre 2008 il avait été reçu au quai d’Orsay par trois représentants du Président de la République française et qu’on lui aurait proposé un marché, à savoir d’échanger l’exécution des commissions rogatoires internationales contre la mise à néant des mandats d’arrêts internationaux. Marchandage auquel il se serait refusé.

    Il termine ce chapitre en apothéose en citant in extenso la lettre écrite le 7 octobre 2009 par le Juge RAMAEL au Procureur de la République en lui indiquant :

    « (…) Interpol revendique le blocage des diffusions sollicitées selon des procédures internes confidentielles qui tiennent compte des intérêts politiques et diplomatiques. En conséquence, j’estime inutile et hypocrite de fournir de plus amples éléments afin de permettre d’apprécier s’il s’agit d’une affaire mettant en cause des responsabilités étatiques. Manifestement l’affaire BEN BARKA continue de déranger 44 ans après, (…) ».

    L’auteur ajoute que le Juge renouvelle alors les quatre mandats d’arrêt et ajoute un cinquième visant Monsieur EL ASSOUNI puisque semble-t-il il vient d’obtenir l’identité complète de celui-ci.

    L’auteur s’exclame en conclusion que le Maroc refuse d’exécuter les commissions rogatoires internationales et que la France s’oppose à l’exécution des mandats d’arrêt. Une fois de plus la raison d’état et des Etats l’a emporté sur l’exigence de justice. (page 354)

    A partir des pages suivants, il s’agit plus d’un travail d’enquête qui est mené par l’auteur, qui a reconstitué certains éléments à partir soit des pièces pénales soit d’auditions récentes de personnes qui subitement se présentent chez le Juge RAMAEL, tel un agent d’Orly Monsieur Daniel TROUBLE qui, le 18 juin 2009, va déclarer au Juge d’instruction :

    « Lorsque je suis arrivé comme jeune agent des services commerciaux aux frets d’Orly, en 1969, j’ai entendu parler les anciens et je suis venu vous livrer mon témoignage (…). Il se disait qu’un dimanche, me semble-t-il, vers 5 heures du matin, l’employé de permanence pour la taxation des colis avait vu arriver en personne Maurice PLAGIAS, chef du centre de fret, et deux autres personnes. La présence de ces deux responsables ce jour là et à cette heure là, était totalement inhabituelle.

    Ils étaient venus faire taxer un colis parallélépipédique, identique à ceux servant à transporter les cercueils, d’un poids de 125 à 140 kg, supposé contenir des pièces détachées à destination de Casablanca.

    Ce colis a été embarqué dans un DC3 qui n’aurait embarqué rien d’autre (…). Le lendemain, deux gendarmes sont venus récupérer la souche de la LTA, qui est le titre de transport d’une marchandise et l’ont emportée. Là aussi c’est étrange (…), quelques semaines plus tard PLAGIAS et FOSSATI ont été muté tous les deux. Il faut dire que les rumeurs de leur appartenance au SDECE allaient bon train (…) ».

    Tout à l’avenant jusqu’à la fin de l’ouvrage et sur le dernier chapitre afférent aux responsabilités de façon paradoxale et peut-être consensualiste, on peut relever que quatre pays semblent avoir une responsabilité aux yeux de Maître BUTTIN, à savoir le Maroc, la France, Israël et les Etats-Unis.

    Dans le cadre de cet ouvrage et au regard de ce qui nous intéresse plus particulièrement, je souhaite relever l’attention du lecteur sur la page 251.

    Je reviens sur celle-ci car elle me semble essentielle sur la relation des faits et l’analyse qui en est faite par Maître BUTTIN au regard du mandat d’arrêt international visant Monsieur Miloud TOUNZI.

    Bien entendu, de façon lapidaire et sans que ceci soit nullement fondé, bien au contraire tout permet de contester cette affirmation, l’auteur fait un amalgame entre Miloud TOUNZI et Miloud CHTOUKI.

    Je rappelle que le mandat d’arrêt international vise un homicide volontaire à l’encontre de Monsieur Miloud TOUNZI et donc suppose que celui-ci ait à tout le moins rencontré l’hypothétique victime dans le cadre de sa présence à Paris le 30 octobre 1965.

    Or, ce samedi 30 octobre 1965, Maître BUTTIN a semble-t-il collationner dans le premier dossier généré par la première plainte des informations chronologiques très précises qui conduisent à pouvoir affirmer que Monsieur CHTOUKI n’a jamais rencontré Mehdi BEN BARKA à Paris à cette date là.

    Par voie de conséquence, juridiquement le mandat d’arrêt, bien entendu passée la difficulté première de faire un amalgame et une parfaite superposition de personne, succomberait à l’analyse juridique puisque Maître BUTTIN affirme :

    « (…) OUFKIR arrive à son tour à Orly à 17 heures. Accueilli par CHTOUKI, EL MAHI et LOPEZ. Il se fait conduire par celui-ci à Fontenay le Vicomte où DLIMI l’accueille vers 18 heures. Le Général a confié sa valise à EL MAHAI et lui a demandé de lui prendre une chambre à l’hôtel ROYAL ALMA et de l’y attendre avec CHTOUKI. Tous deux patienteront une partie de la nuit en vain. OUFKIR n’occupera à aucun moment la chambre, mais fera chercher sa valise. EL MAHI passe plusieurs coups de fils chez BOUCHESEICHE et chez LOPEZ sans réponse (…) ».

    Donc cette reconstitution, si on la retient comme étant juste, et il n’y a aucune raison de ne pas le faire, atteste incontestablement d’une impossibilité physique de rencontre entre Mehdi BEN BARKA et le sieur CHTOUKI.

    Bien entendu, cet ouvrage peut donner lieu à d’autres réflexions mais j’ai volontairement cantonné mon analyse à cette partie du dossier afférente à Monsieur Tounzi.

    ***

    En conclusion, il faut retenir que cet ouvrage n’aura sans doute pas beaucoup de lecteurs. Toutefois il est une note de synthèse très intéressante même si elle est à charge puisqu’elle dissimule certainement des éléments à décharges contenus dans le premier dossier pénal qui nous sont inconnus, tout comme des éléments contenus dans le deuxième dossier pénal et qui viendraient les uns comme les autres asseoir incontestablement la position selon laquelle les mandats d’arrêt internationaux qui ont été relancés en octobre 2007 à l’encontre des quatre personnes susnommés, n’ont aucun fondement et ne sont, comme Maître BUTTIN le dit lui-même dans son ouvrage, que des ballons sondes qui ont uniquement comme ambitions d’obtenir des informations qu’ils ignorent encore aujourd’hui après plus de 35 ans d’instruction et 11 juges d’instruction.!

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    LA DISPARITION DE BEN BARKA DANS LA PRESSE FRANÇAISE

    Le Monde : Révélations en Israël sur l’implication du Mossad dans l’affaire Ben Barka
    Deux journalistes viennent de publier une enquête sur le rôle des services de renseignements israéliens dans la disparition de l’opposant marocain, cinquante ans après son enlèvement à Paris.

    Entretien. Quel rôle a joué le Mossad dans l’affaire Ben Barka ?

    L’enlèvement de l’opposant marocain en plein Paris, le 29 octobre 1965, puis son assassinat, ont fait l’objet d’innombrables thèses, rumeurs et conclusions plus ou moins fiables. Le corps de Mehdi Ben Barka n’a jamais été retrouvé, mais l’implication de plusieurs parties a été établie. En 1966, deux journalistes israéliens avaient été arrêtés pour avoir publié dans l’hebdomadaire Bul un article laissant entendre que les Israéliens auraient été mêlés à l’enlèvement, devant la brasserie Lipp. L’hebdomadaire, aussitôt retiré de la circulation par les autorités, mettait en cause le général Meïr Amit, chef du Mossad à l’époque. En 1987, le Haaretz écrivait que le gouvernement israélien (dirigé alors par Lévi Eshkol) avait été tenu dans l’ignorance de cette opération.

    Le 20 mars, deux journalistes du quotidien Yediot Aharonot, Ronen Bergman et Shlomo Nakdimon, ont publié une enquête fleuve dévoilant les coulisses de l’implication logistique du Mossad, en

    soutien des assassins marocains de l’opposant. Une enquête qui a été soumise, comme l’exige la loi en Israël, à la relecture de la censure militaire. Les journalistes ont mis au jour les détails de l’incroyable conflit politique survenu en Israël, entre le chef du Mossad, le premier ministre et celui qui fut chargé d’enquêter sur cette affaire d’État, Isser Harel. Mort en 2003, Harel fut une figure mythique des services israéliens, d’abord fondateur du Shin Bet (renseignement intérieur) après l’établissement de l’Etat en 1948, puis directeur du Mossad entre 1952 et 1963. L’enquête s’appuie sur les minutes des rencontres entre ces trois hommes, ainsi que sur des témoignages de certains des acteurs.

    Ronen Bergman, célèbre journaliste d’investigation en Israël, spécialisé dans les questions militaires et les services de renseignement, revient sur les coulisses d’une opération du Mossad à

    l’issue non préméditée, qui s’est fini en désastre. Ronen Bergman met actuellement la dernière main à un livre sur l’histoire du Mossad.

    Pouvez-vous revenir sur les circonstances dans lesquelles le Mossad s’est retrouvé impliqué dans l’affaire Ben Barka ?

    Le Mossad ne souhaitait pas être impliqué. Cela apparaît clairement dans les documents et les rencontres entre les dirigeants de l’époque.

    Le service voulait parvenir à l’impossible : ne pas être partie prenante, tout en parvenant à satisfaire leurs homologues marocains, en leur fournissant ce qu’ils souhaitaient. Les relations secrètes avec les Marocains étaient considérées comme stratégiques, de la plus haute importance. Elles relevaient de ce que le Mossad appelait la théorie de la périphérie, consistant à développer des relations avec des pays entourant Israël et les ennemis d’Israël, comme l’Iran, l’Ethiopie, la Turquie, et donc le Maroc. Le Maroc représentait un grand défi car c’est un pays arabe, aux très fortes relations avec la Ligue arabe, et n’entretenant pas de conflit avec une partie du monde arabe, comme l’Iran. Le Mossad a réussi à créer des intérêts communs avec le roi Hassan II et ses services. Cela a commencé en convainquant le roi de laisser les juifs de son pays émigrer vers Israël. Puis Israël a fourni une aide militaire et en matière de renseignement. En échange, on a obtenu un accès à des informations par le Maroc.

    Un mois et demi avant l’enlèvement de Ben Barka, il y a un sommet crucial de la Ligue arabe à Casablanca…

    Effectivement, il y a eu un sommet arabe en septembre 1965, lors duquel le Mossad a obtenu la possibilité d’observer. Les Marocains ont fourni au Mossad des documents décrivant les délibérations. Je en peux m’appesantir sur le détail de ces activités car elles sont en partie

    couvertes par le secret militaire. Mais le contenu des discussions a été qualifié comme étant le plus grand succès en matière de renseignement de notre histoire. L’un des sujets du sommet était de

    savoir si les pays présents étaient prêts à une nouvelle guerre contre Israël. Les informations obtenues ont été une des bases de la confiance en eux des chefs militaires israéliens, au moment de la guerre des Six jours, en 1967. Pourtant, à l’époque, beaucoup pensaient que le pays serait rayé de la carte.

    Mais cet accès privilégié a eu un prix…

    Oui. Trois jours après le sommet, les Marocains ont réclamé le paiement pour ces informations : il s’agissait d’aider à localiser et à tuer Ben Barka. Il y a eu des versions divergentes sur ce sujet. Selon le professeur Yigal Bin-Nun, que nous citons dans l’article, qui a beaucoup travaillé sur l’affaire et recueilli de nombreux témoignages auprès des services marocains et israéliens, le plan initial était d’enlever Ben Barka, de l’amener au Maroc et de lui faire une proposition qu’il ne pouvait refuser : accepter un poste de ministre sous peine d’être poursuivi pour haute trahison.

    Je ne suis pas sûr que ce soit vrai. Les documents rapportant les entretiens entre le directeur du Mossad, Meïr Amit, et le premier ministre, Lévi Eshkol, suggèrent clairement qu’Amit avait appris des Marocains qu’ils voulaient le tuer. Par ailleurs, dans le cadre de leur aide logistique, le Mossad s’est vu demander à deux reprises de fournir aux Marocains des poisons différents. Pourquoi demander du poison si on ne veut pas le tuer ?

    Quelle est la nature des documents que vous citez, concernant les rencontres officielles ?

    Ce sont les minutes, rédigées par l’un des plus proches conseillers du premier ministre, au moment de ces rencontres. Ils sont très secrets. On nous les a montrés. Ils ne sont pas publics. Ce genre de document était scellé, selon la loi, pour cinquante ans. Il y a cinq ans, je me suis adressé à la Cour suprême pour obtenir la publication de toutes les archives confidentielles antérieures à cinquante ans. Le gouvernement a fait savoir à la Cour que le délai était dorénavant porté de cinquante à soixante-dix ans.

    Vous citez une rencontre, le 4 octobre 1965, entre le premier ministre et Meïr Amit, le directeur du Mossad, qui dit : « Le roi Hassan a donné l’ordre de tuer Ben Barka ».

    Amit comprend qu’ils veulent le tuer. Mais ça laisse une question en suspens : pourquoi ne pas assassiner Ben Barka en pleine rue à Paris ?

    Ça serait bien plus simple que de le conduire dans un appartement, de le torturer, si ce n’est pour leur plaisir personnel. Les Marocains avaient donc peut-être d’autres objectifs, même s’ils envisageaient de le tuer à la fin.

    Amit et peut-être le premier ministre avaient l’impression que l’opération n’aurait pas lieu, que les Marocains laisseraient les choses en l’état. Amit pensait pouvoir recueillir le bénéfice de la coopération, en apparaissant comme un bon partenaire, sans être impliqué dans un assassinat. Il ne ment pas quand il rapporte au premier ministre que le Mossad n’est pas impliqué directement dans l’assassinat de Ben Barka. Ce ne sont pas des mains israéliennes qui ont serré le cou, le Mossad n’était pas présent au moment des faits et n’a pas autorisé sa mise à mort. Mais il minimise le rôle joué par le service.

    Quelle a été l’implication logistique du Mossad ? On sait que, dans la phase initiale, ils avaient aidé à repérer Ben Barka en Suisse, à Genève…

    Ils ont ensuite aidé en fournissant de faux documents pour louer des voitures et ils ont donné des passeports aux Marocains et aux mercenaires français pour pouvoir prendre rapidement la fuite après les faits. Il est clair aussi que le Mossad a fourni un appartement, une cache aux Marocains, mais on’est pas certain que ce fut celui où Ben Barka a été conduit.

    Et le corps de Ben Barka ?

    Quelques minutes après le drame, Ahmed Dlimi [adjoint du ministre de l’intérieur, Mohammed Oufkir] a appelé le Mossad de l’appartement en disant : « Je ne voulais pas, il est mort. » Selon

    certains témoignages de premier ordre dont nous disposons, le Mossad s’est chargé d’évacuer le corps de l’appartement, puis de s’en débarrasser. Les agents connaissaient une forêt près de Paris, très prisée pour les pique-niques familiaux. Le service a eu l’idée de dissoudre le corps avant de l’enterrer avec de l’acide, à base de produits chimiques achetés dans plusieurs pharmacies. Cette nuit-là, il a plu. La pluie a accéléré le processus. C’est l’aspect le plus visuel, le plus dramatique de l’implication du Mossad. Le service était très réticent à l’idée d’être impliqué dans l’opération. Au début des années 1960, Ben Barka avait été en contact avec les Israéliens, notamment les services, qui n’avaient aucune hostilité contre lui. Mais ils avaient une énorme dette envers les Marocains.

    Quel a été le rôle d’Issa Harel, figure mythique de la communauté du renseignement israélienne, dans la crise politique qui s’est nouée après l’assassinat, en Israël même ?

    Il faut rappeler le contexte. Harel avait dû démissionner comme directeur du Mossad deux ans plus tôt. Il y avait eu une dispute très sévère entre lui et David Ben Gourion [alors premier ministre]. Il

    pensait que Ben Gourion ne pourrait gérer le Mossad sans lui. Mais Ben Gourion a accepté sa démission et a nommé le chef du renseignement militaire, Meïr Amit, à la tête du service. Harel était convaincu que le Mossad, c’était lui, et qu’Israël, c’était le Mossad.

    Par la suite, il y a eu un clash interne au sein du camp travailliste, pour capter l’héritage de Ben Gourion, entre Eshkol, Golda Meir et d’autres. Harel, lui, voulait se venger et prouver que son successeur était incompétent. Il a alors entendu parler de l’affaire Ben Berka.

    Nommé conseiller du premier ministre Eshkol, il lui a dit qu’il devait virer Amit. Eshkol a refusé. Harel lui a dit alors : vous devez démissionner vous-même ! Il menaçait, dans le cas contraire, de tout dire en public et de causer un énorme tourbillon.

    Est-il possible d’imaginer que le premier ministre n’ait pas été au courant de l’opération Ben Barka ?

    Je ne suis pas sûr qu’il était courant de tout. Quand on compare ce que savaient les acteurs sur le terrain et ce que Amit rapportait à Eshkol, il y a une grande différence. Cela concerne le degré d’implication du Mossad, ses contacts directs avec les Marocains avant et après l’assassinat de Ben Barka, les informations fournies aux Marocains pour pouvoir localiser Ben Barka, le fait que le Mossad était derrière le piège destiné à attirer Ben Barka à Paris (un projet de documentaire sur lui). Je n’ai trouvé aucun rapport d’Amit au premier ministre détaillant le niveau d’implication du Mossad. Eshkol a fini par demander l’ouverture d’une enquête sur cette affaire, une enquête extrêmement superficielle. Deux feuilles manuscrites, après un travail de trois jours.

    Piotr Smolar (Jérusalem, correspondant)

    Le Monde, 23 mars 2015 via Academia

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    El Watan : Français et Israéliens derrière la disparition de Ben Barka

    Un nouveau témoignage, cette fois d’un homme du «système» marocain, accable de nouveau les services de renseignement français (DGSE) et israéliens (Mossad) de l’enlèvement et l’assassinat du célèbre opposant marocain, Mehdi Ben Berka, à Paris en 1965, sur demande des services secrets marocains. Le voile sera-t-il un jour levé sur l’affaire Mehdi Ben Barka, grand opposant au régime marocain et un des leaders du mouvement tiers-mondiste et panafricaniste ? Avec le temps, les langues se délient.

    Des révélations sont attendues sur l’affaire liée à l’assassinat, en France, de l’opposant marocain, Mehdi Ben Barka, à l’occasion de la présentation, hier à Rabat, par l’ancien Premier ministre marocain, Abderrahmane Youssoufi, de ses Mémoires, dans lesquels il atteste de l’implication des services secrets marocains, français et israéliens dans ce crime politique.

    Dans son ouvrage intitulé Récits du passé, l’ancien Premier ministre du gouvernement de l’Alternance marocain (1998-2002), a décidé, au crépuscule de sa vie (94 ans), de donner sa version des événements vécus par le Maroc le long de la deuxième moitié du siècle passé. Chacune des trois parties, le Maroc, la France et Israël, avait «un intérêt particulier à faire taire Ben Barka», selon l’homme politique marocain. Abderrahmane Youssoufi, ancien militant du parti Istiqlal, avait été chargé de suivre le dossier de l’assassinat de Mehdi Ben Barka auprès de la justice française.

    Depuis sa disparition à Paris, le 29 novembre 1965, le corps de l’opposant de Hassan II n’a jamais été retrouvé et l’affaire n’a jamais été élucidée. Il fut l’un des principaux opposants socialistes au roi Hassan II et le chef de file du mouvement tiers-mondiste et panafricaniste. De son vivant, il avait initié de nombreuses mobilisations populaires au Maroc.

    L’ex-président français, François Hollande, avait décidé, en mai 2017, quelques jours avant de quitter ses fonctions, de lever le secret défense sur 89 documents relatifs à l’affaire de l’assassinat, en France, de la figure de la gauche marocaine, dont le corps n’a jamais été retrouvé. Ces documents englobent les rapports, notes de synthèse, bulletins de renseignement, procès-verbaux, auditions, questionnaires, fiches, biographies, des photos et lettres détenus. Mais un document est resté bloqué dans cette déclassification et la CSDN a refusé de lever le secret-défense.

    Selon les médias français, il s’agit d’un document qui se trouvait, en 2010, dans les locaux de la Direction générale de la sécurité extérieure et dont on ignore le contenu. L’auteur de Récits du passé, qui a tenu à faire coïncider la parution de ses Mémoires avec son 94e anniversaire, Abderrahmane Youssoufi en l’occurrence, regrette à ce titre que son pays «n’ait pas pu amorcer un virage démocratique pour plusieurs raisons». Parmi ces causes, «l’incapacité» de l’élite politique marocaine elle-même à opérer cette transformation. A cela s’ajoutent une «mauvaise gouvernance» et «une administration archaïque».

    Ont été évoqués notamment, outre son enfance, les dessous de son retrait de la vie politique en 2003, des épisodes du mouvement national marocain, des premières heures de l’aube de l’indépendance, ses liens avec feu Mehdi Ben Barka, son opposition au régime, sa prise de commande de l’Union socialiste des forces populaires (USFP) et sa pratique politique au sein du gouvernement de l’Alternance marocain.

    Divisés en trois parties, les Mémoires, rédigés par son compagnon de route M’barek Boudarqa, seront présentés au théâtre Mohammed V de Rabat, qui coïncide avec son 94e anniversaire.

    Alhadith fi ma jara (Récits du passé) est une compilation en trois tomes d’éléments biographiques, d’entretiens et de discours de l’ancien opposant et chef du gouvernement. L’ouvrage sortira en librairie le lendemain de sa présentation au public au théâtre Mohammed V à Rabat, une présentation à laquelle prendra part Abderrahmane Youssoufi, en compagnie de nombreuses personnalités marocaines et internationales de la politique.

    El Watan, 09 mars 2018

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    Europe1 : Comment le Mossad a aidé les services secrets marocains à éliminer l’opposant Mehdi Ben Barka ?

    Au micro de Patrick Cohen sur Europe 1, Ronen Bergman, qui publie « Lève-toi et tue le premier : l’histoire secrète des assassinats ciblés commandités par Israël », revient sur l’assassinat de l’opposant marocain Mehdi Ben Barka, auquel les services secrets israéliens auraient participé.
    INTERVIEW
    Près de 1.000 pages et de multiples révélations. Ronen Bergman, journaliste au New York Times et investigateur israélien, publie aux éditions Grasset Lève-toi et tue le premier : l’histoire secrète des assassinats ciblés commandités par Israël, un livre événement qui revient sur les nombreuses exécutions réalisées par le Mossad, l’agence de renseignements de l’État hébreu. Dans « C’est arrivé demain », le journaliste raconte sur Europe 1 comment les services secrets israéliens ont aidé le gouvernement marocain à éliminer Mehdi Ben Barka, l’un des principaux opposants au Roi Hassan II dans les années 1950.

    « Dans le monde du renseignement, il n’y a rien de gratuit »
    « Ce n’est pas simplement que le Mossad a œuvré, c’est beaucoup plus que cela », explique Ronen Bergman. « Le service de renseignements du Maroc a rendu service énorme aux Israéliens en donnant au Mossad la capacité d’écouter les conversations les plus secrètes des dirigeants arabes », affirme le journaliste du New-York Times. « Mais ils voulaient quelque chose en échange, car dans le monde du renseignement, il n’y a rien de gratuit. »

    Si des Français étaient déjà impliqués dans l’élimination de l’anticolonialiste Mehdi Ben Barka, le Maroc demande aussi au Mossad de l’aider, raconte Ronen Bergman. Le 29 octobre 1965, le leader panafricain se rend à un rendez-vous à la brasserie Lipp à Paris, mais les services secrets israéliens l’ont traqué afin que les Marocains l’enlèvent. L’opposant socialiste au roi Hassan II est alors torturé et tué par les services secrets marocains. « Le Mossad aide les assassins à se débarrasser du corps et à l’enterrer sous ce qui est aujourd’hui le musée Louis Vuitton, dans le bois de Boulogne », poursuit Ronen Bergman.

    « L’utilisation quasi systématique des éliminations a changé de nombreuses fois l’histoire en bien »
    Interrogé par Patrick Cohen sur les conséquences des éliminations commanditées par le Mossad, Ronen Bergman se veut nuancé. « Ça change l’histoire, parfois du bon, parfois du mauvais côté », affirme-il. « Mais après huit ans de recherches, je peux affirmer que l’utilisation quasi systématique des éliminations a changé de nombreuses fois l’histoire en bien », explique Ronen Bergman, prenant en exemple les éliminations qui ont suivi les attentats de Munich.

    Europe1, 09 fév 2020

    #Maroc #Mossad #Israël #BenBarka #Services_secrets #HassanII

  • Maroc: La main de la DST dans l’Attentat de Marrakech de 1994

    Maroc: La main de la DST dans l’Attentat de Marrakech de 1994

    Maroc: La main de la DST dans l’Attentat de Marrakech de 1994 – Algérie, services secrets, Hôtel Asni,

    Le 24 août 1994, un attentat terroriste ébranle la capitale du tourisme marocain. Deux espagnols sont tués et une française a été blessée dans une fusillade à l’intérieur du palace Atlas Asni de Marrakech, dans le somptueux quartier Gueliz, dont les cossus appartements et hôtels 5 étoiles abritent une faune de riches touristes français, espagnols, allemands et britanniques. Les auteurs de l’attentat sont, 24 heures après le forfait, vite identifiés. Il s’agit des services de renseignements algériens. L’événement, d’importance, va alors exacerber, de nouveau, les relations politiques entre les deux pays.

    Pour compliquer encore plus cette situation, à Oujda, la capitale de l’Oriental marocain, les milliers d’algériens qui y transitaient quotidiennement étaient accueillis au début des années 1990 par des sarcasmes dans les souks de la médina : « Les singes sont arrivés ».
    Durant les années 1990, les touristes algériens, dans leur majorité, de retour au pays, n’oubliaient pas de faire des emplettes au marché des fruits de la médina, avec une prédilection pour la banane, alors indisponible en Algérie durant les années 1980, à l’époque du « PAP » (plan anti pénuries) instauré par le gouvernement algérien, au plus fort de la crise économique induite par la crise pétrolière.

    Suffisant pour les autorités algériennes, déjà en butte à une sauvage vague terroriste qui menaçait la sécurité et la stabilité du pays, de rétablir en appliquant le principe de la réciprocité le visa pour les ressortissants marocains et, en plus, ferment les frontières terrestres avec le Maroc.
    Une réponse immédiate en fait de l’Algérie à la suite de l’annonce par les autorités marocaines du rétablissement du visa pour les ressortissants algériens dans les premiers jours ayant subi l’attentat de Marrakech.

    Des terroristes aiguillés par les services marocains
    Hassan II, sans doute monté et mal renseigné par son ministre de l’Intérieur et ses services de renseignements, avait franchi « le rubicond » en réintroduisant le visa aux ressortissants Algériens.
    En réalité, et selon les services de sécurité algériens, cet attentat a été organisé par les marocains, qui ont manipulé des éléments de la « chabiba islamya » (jeunesse islamique), une organisation islamiste marocaine prônant la violence pour faire tomber la monarchie. Son fondateur, Abdelkrim El Moutii, vit à Londres depuis les années 1970.

    A la fin des années 2010, trop vieux et fatigué, il a opéré une révision totale de ses positions et cherche à se rapprocher du roi et ses conseillers, dont Fouad Ali El Himma pour une improbable réhabilitation.

    Le leader de la « chabiba islamya » avait prôné au départ la «lutte armée » pour instaurer un « Etat islamique » au Maroc et un rapprochement avec la Libye de Kadhafi et l’Iran de Khomeini. En 1971, une année avant la tentative d’assassinat de Hassan II dans son avion personnel par des officiers de son armée, dont le général Oufkir, il avait écrit que le Maroc vit sous un état despotique, un concept qu’il a préféré à celui de « tahakom » (le désir du pouvoir), dont il a affublé, en 2016 les dirigeants du PJD (parti justice et développement), et le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane.

    Le procès des “auteurs” de l’attentat
    C’est en janvier 1995 qu’a eu lieu dans l’ancienne capitale du royaume le procès des exécuteurs de l’opération terroriste de Marrakech en août 1994, qui a été imputée aux services de renseignements algériens, et donc à l’Algérie par les autorités marocaines. Dans le box des accusés, sept français d’origine algérienne et marocaine, habitant la cité des 4000 de la Courneuve, dans la banlieue parisienne, où Juifs et Maghrébins cohabitent.

    Au palais de justice de Fès, il y avait Stéphane Aït Idir (22 ans), Rédouane Hamadi (23 ans), Kamel Benachka (26 ans), Abdesslam Guerrouaz (25 ans), Moustafa Meziane (36 ans), Abderrahmane Boujedli (24 ans), et Hamel Merzoug (28 ans). Tous des beurs, et ils risquaient la peine de mort.
    Mais, les plus visés, ce sont Stéphane Aït Idir, d’origine algérienne, et Redouane Hamadi, d’origine marocaine, et c’est sur eux que les regards sont braqués : ils auraient, le 24 août 1994, tué les deux touristes espagnols, et blessé une française, après avoir dérobé la caisse de l’hôtel Atlas Asni, au quartier Gueliz, de la ville ocre.

    Radicalisés dans leur cité de banlieue, ils avaient fait leur apprentissage en Afghanistan, puis en Bosnie. Cependant, avant d’accuser les services de sécurité algériens d’en être les commanditaires, les marocains avaient au début privilégié la piste d’une affaire de « droit commun ».
    Le 24 août 1994, Aït Idir, Rédouane Hamadi et Taref Falha, un inculpé arrêté alors en Allemagne, après avoir mystérieusement échappé aux polices marocaine et française, pénètrent ce jour-là cagoulés vers 10h20 dans l’hôtel Atlas Asni, tirent des coups de feu en l’air, s’emparent de la caisse et mitraillent un groupe de touristes présents dans le hall avant de prendre la fuite. Bilan: deux morts, une blessée.
    L’enquête des services de sécurité marocains, un moment orientée vers un fait de « droit commun », va vite pointer vers la piste terroriste, et, surtout, impliquer les services de sécurité algériens.

    Et ce n’est que le 16 septembre, presque un mois après les faits, que le ministre de l’Intérieur marocain, Driss Basri, annonce que les inculpés ne sont plus des droits communs mais « des agents téléguidés de l’étranger », et un communiqué de ses services met formellement en cause les services secrets algériens, auxquels appartiendraient deux des commanditaires, « Rachid » et « Saïd », qui se seraient évanouis dans la nature.

    Et, bien entendu, la presse marocaine saute sur l’occasion et justifie l’expulsion, souvent dans des conditions humiliantes, de milliers de touristes Algériens, certains sortis de leur hôtel avec leurs familles, et le rétablissement du visa aux ressortissants d’Algérie.
    A Paris, par contre, on ne croit pas tellement à cette thèse. Charles Pasqua, alors ministre de l’Intérieur, et le juge antiterroriste Jean Louis Bruguière, rient alors sous cape.

    En fait, les services de sécurité marocains, dont la DST devenue DGST, connue pour ses interrogatoires « musclés » notamment à Temara, dans la banlieue de Rabat, obligent certains inculpés à mettre en cause les services de sécurité Algériens. Le juge marocain chargé de l’affaire, Bougataya, a lui aussi privilégié cette piste pendant toute une partie de l’instruction, sous les suggestions du ministère de l’Intérieur, alors dirigé par Driss Basri.

    Ce n’est que plusieurs années après l’incident que les autorités marocaines ont abandonné leurs charges contre l’Algérie, même si l’accusation parle d’ « action commanditée de l’étranger », la justice marocaine affirmant quant à elle que les inculpés appartenaient à un véritable réseau islamiste.

    Un attentat à plusieurs ramifications
    Pourtant, les dommages collatéraux de cette cabale contre l’Algérie sont toujours là, bien après les tristes événements, comme des barrières infranchissables à une chimérique réconciliation, dans les conditions politiques actuelles. Peut-être cela sera-t-il oublié, cautérisé dans un proche avenir où les intérêts de la région primeront enfin sur toute autre considération territoriale du côté de Rabat?

    Cependant, l’affaire de l’attentat , dans le fond, à d’autres ramifications. Beaucoup plus discourtoises contre l’Algérie. L’opération, bien sûr, avait pour but de discréditer et isoler d’avantage une Algérie des années 1990, en butte à une vague terroriste dévastatrice, et, surtout, pratiquement marginalisée, « sans le sou » et en cessation de paiement. Ce qui a obligé l’Algérie, un pays pétrolier, à négocier un humiliant accord d’ajustement structurel (PAS) avec le FMI, en 1994.

    Pour Hassan II, qui connaît le fonctionnement des institutions algériennes mieux que beaucoup de politiques algériens, il s’agit surtout d’isoler davantage son voisin de l’est, de le mettre au banc de la communauté internationale en l’accusant de vouloir exporter le terrorisme, notamment au Maroc, et, par conséquent, à l’international ; en Europe.

    La prise d’otage à Alger le 24 décembre 1994 du vol d’Air France « AF 8969 », et l’attentat du RER à Paris en juillet 1995 ont ainsi donné une certaine consistance aux thèses marocaines. Celles d’un pays paisible et en paix avec le reste du monde, vivant à côté d’un voisin surarmé, belliqueux et où s’entretuent terroristes et militaires dans une guerre civile qui menace la stabilité de son voisinage immédiat ; le Maroc bien sûr, devenu une franchise touristique de tous les grands tours opérateurs de la planète.

    Et puis, quel coup médiatique en direction des pays hésitants à soutenir la « marocanité » du Sahara Occidental, ou ceux, comme la France, effrayés par la perspective que le Maroc ne bascule vers le terrorisme. Cela arrivera en fait en mai 2003, avec des attentats-kamikazes effroyables contre des étrangers à Casablanca.

    Dans l’attentat, le Maroc avait officiellement affirmé que c’est «un groupe de franco-algériens, qui en a été l’auteur, ajoutant que d’autres groupes terroristes téléguidés par les services algériens préparaient des attentats à Fès, Tanger, Casablanca…’’
    Nous sommes en août 1994, l’Algérie est pratiquement tombée entre les fourches caudines du FMI, et contrainte de négocier les termes socialement et politiquement douloureux, auprès du Club de Paris, du rééchelonnement de sa dette extérieure publique, qui approchait les 26 milliards de dollars. Il y avait également la dette privée, détenue par un panel de pays au sein du Club de Londres, et qu’il fallait également négocier, au moment où les cours de pétrole rasaient les 10 dollars/baril.

    C’est dans ces circonstances irréelles, dramatiques pour les Algériens, avec un terrorisme sauvage et destructeur, le sabotage des infrastructures industrielles et des équipements publics, que l’Algérie, devenue soudain un pays pestiféré et non fréquentable, que Hassan II avait programmé et planifié le scénario de l’attentat terroriste.
    Pareille fourberie n’a pas beaucoup d’égales dans l’Histoire moderne de l’Humanité.

    Les actions de Khaled Nezzar
    En réalité, les deux touristes espagnols assassinés à l’hôtel Atlas Asni avaient été abattus avec les armes récupérées au Maroc sur un groupe terroriste algérien, arrêté sur la base de renseignements fournis par les services de sécurité algériens à leurs homologues marocains .

    Cela se passe au printemps 1993, raconte Khaled Nezzar, l’ex-ministre algérien de la défense dans le deuxième tome de ses mémoires. Abdelhak Layada, fondateur et chef du Groupe islamique armé (GIA), se rend au Maroc sous une fausse identité pour acheter des armes.

    Il est cependant pisté par les services de renseignements algériens, qui le localisent à Oujda, près de la frontière algéro-marocaine.
    Alors ministre de la défense, Khaled Nezzar décide de contacter directement, comme il l’affirme dans ses mémoires, le ministre de l’Intérieur marocain, Driss Basri, et discute avec lui de la situation sécuritaire, sans mentionner le cas du terroriste Abdelhak Layada.

    Le général Smaïn Lamari, alors N.2 des services de renseignements algériens, se rend de son côté au Maroc pour informer les services de sécurité locaux de la présence sur leur sol de Layada, qui a à son actif plusieurs attentats terroristes, et leur demander qu’ils le livrent à l’Algérie.

    A Rabat, on tempère, et puis Hassan II, informé par son ‘’vizir’’, veut rencontrer d’abord Khaled Nezzar, avant la remise de Layada aux services de sécurité algériens.
    La rencontre, organisée au palais royal (celui où vivait le jeune monarque M6) de Salé, près du petit aéroport international de Rabat et du centre d’études nucléaires de la ‘’Maamora’’, dure deux heures. Et, durant les discussions, qui portent sur les modalités de remise à l’Algérie du chef du GIA, le roi du Maroc croit informer Khaled Nezzar en lui disant : « Vous vous rendez compte, nous avons récupéré des stocks d’armes » !

    Pour Khaled Nezzar, cela est évident qu’Hassan II n’a pas été informé par ses services de sécurité de la provenance de ces armes, et surtout comment elles avaient été saisies.

    En fait, explique l’ex-ministre Algérien de la défense, l’emplacement des stocks d’armes a été révélé aux Marocains par Smaïn Lamari, lors de son séjour au Maroc. Ayant infiltré un réseau de soutien au GIA, les services de sécurité algériens avaient noté les numéros de ces armes pour faciliter leur traçabilité.
    Le 29 septembre 1993, Abdelhak Layada est officiellement extradé vers l’Algérie, où il sera jugé et condamné à mort. Mais, à la stupéfaction générale, il sera ensuite libéré.

    Khaled Nezzar affirme que c’est l’une des armes récupérées par les services de sécurité marocains sur le groupe terroriste de Layada qui a été utilisée dans l’attentat qui secouera, en août 1994, le somptueux palace Atlas Asni de Marrakech. « La preuve que cet attentat a été monté par les services marocains », écrit-il dans son ouvrage.

    Hassan II va se servir de cet événement sanglant pour monter une véritable cabale internationale contre l’Algérie. Or, le sous sol de ce palace de Marrakech, de l’autre côté du quartier de Guéliz, passage obligé pour les touristes européens avec ses boutiques, ses restaurants et ses enseignes de grandes franchises de l’habillement haut de gamme pour femmes, avait été utilisé par les organisateurs de la conférence de l’Uruguay round en avril de la même année comme salle de presse pour les journalistes.

    Un soir, durant les trois jours de la dernière conférence du GATT à Marrakech (Uruguay round), et couvrant l’événement pour le compte des agences de presse algérienne APS et française SYFIA , je me suis rendu à cet hôtel avec des journalistes algériens, le défunt Khaled Nezzari, chef de bureau de Rabat de l’agence APS, Reda Bekkat du journal El Watan, et Fayçal Haffaf, un ancien commentateur du service Sports de la radio algérienne, qui dirigeait alors un magazine marocain spécialisé dans le Tourisme, propriété de la défunte journaliste, Nadia Bradley.

    A peine avions nous pénétré dans le hall de l’hôtel Atlas Asni, que nous avions été surpris de voir entrer juste après nous le roi du Maroc, Hassan II en personne, son conseiller André Azoulay sur ses talons. Nous nous sommes levés, par respect au monarque marocain. Le roi, entré en coup de vent et qui se dirigeait vers la salle de presse dans le sous-sol de l’hôtel, se tournant vers nous, nous a, discrètement de la main droite, fait signe de nous rasseoir. Une grosse chevalière ornait son annulaire gauche.

    L’objet de sa visite ? Inspecter la salle de presse et les commodités mises en place pour les journalistes, dont les plus célèbres éditorialistes des journaux et revues spécialisées britanniques et américains. Mickey Kantor, alors secrétaire américain au Commerce, qui a ferraillé dur pour que les négociateurs français abandonnent leur revendication de l’ «exception culturelle », notamment dans le commerce des produits culturels et intellectuels, dont le cinéma n’était pas le moindre des dossiers que défendaient les français, n’hésitait pas à venir à l’Atlas Asni pour « briefer » la presse anglophone.

    Etonné par le fait que nous n’ayons pas été inquiétés par les gardes du corps du roi à l’entrée de l’hôtel, Khaled Nezzari me répond nerveusement : « C’est comme çà, il se la joue populaire devant la presse étrangère ».
    Le 2 novembre 2018 bien après les faits dramatiques qui se sont déroulés dans cet hôtel, la fermeture des frontières, et la « chasse aux Algériens » qui s’en est suivie durant tout cet été 1994, toute la presse marocaine a relayé le retour au pays de l’un des auteurs de cet attentat.

    Il a même été accueilli comme un « VIP » par des responsables du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) à l’aéroport Mohammed V de Casablanca.

    Il s’agit d’Abdellatif El Idrissi et Abdelmoula El Khentach, qui revenaient au pays depuis la capitale française. Abdellatif El Idrissi, un ancien de la « Chabiba islamiya », avait été condamné par contumace à la peine capitale, dans le cadre de l’affaire de l’attentat de l’Atlas Asni en 1994. Le CNDH explique également que l’avis de recherche dont il a fait l’objet a été annulé.

    Un communiqué du CNDH daté du 1er novembre 2018, explique que le retour des membres du groupe terroriste marocain ayant assassiné les deux touristes espagnols à l’Atlas Asni de Marrakech fait partie du « règlement des dossiers du passé ».
    Trois mois auparavant, en août 2018, un autre membre du groupe de l’Atlas Asni, Salah Bouhsiss, avait regagné le Maroc après 26 ans de mise au vert en France.

    Curieusement, les noms des terroristes ayant été identifiés lors de l’attentat de Marrakech par la justice marocaine auront, entre 1994 et 2018, changé, et on passe de « beurs » radicalisés et de franco-algériens comme auteurs présumés de cet attentat à des Marocains « en fuite » en France.

    Des suspects volatilisés
    En outre, toute la presse locale, qui a tartiné sur le retour au pays de « ces terroristes », a mystérieusement oublié qu’au moment des faits, les autorités sécuritaires et judiciaires marocaines avaient d’abord imputé cet attentat aux services de sécurité algériens, puis changé de fusil d’épaule pour désigner des franco-algériens, Stéphane Aït Idir, Redouane Hammadi et Tarek Felah, qui se seraient, depuis, volatilisés.

    Enfin ! L’opération, bien sûr, avait pour but de discréditer et isoler d’avantage une Algérie bien en peine des années 1994, en butte à une vague terroriste jamais vue par aucun pays dans le monde jusque là; dévastatrice, qui avait potentiellement menacé sa sécurité. Et Hassan II le savait, tout autant que les pays influents et militairement puissants du pourtour méditerranéen. Là où certaines voix se posaient la question de ‘’qui tue qui’’.

    Pour le monarque marocain, un des objectifs de cette opération était autant de détourner l’attention de la communauté internationale du dossier sahraoui, dont le règlement s’éternisait, et butait sur le mode d’identification des habitants du Sahara Occidental, éligibles au référendum d’autodétermination, que de focaliser l’actualité internationale sur ce qu’il se passait en Algérie. Un plan machiavélique, que seul Hassan II pouvait monter autour du péril islamiste.

    Et, signe du destin, le Maroc plongera, lui aussi, moins d’une dizaine d’années après, avec les explosions du 16 mai 2003 à Casablanca qui ont fait une quarantaine de morts, dans les rets du terrorisme islamiste et des attentats suicides.
    En fait, l’équipe de « terroristes », qui avait exécuté l’attentat d’août 1994 de Marrakech, injustement imputé à l’Algérie par Hassan II et son ministre de l’Intérieur Driss Basri, a été graciée avec l’abandon de toutes poursuites judiciaires.

    Pourtant, Marrakech, avec ses palaces, ses palais des Mille et Une Nuits, son célèbre jardin botanique « Majorelle » d’Yves Saint-Laurent, le palais de la Mamounia, ou ses célèbres mosquées almohades et almoravides des 11eme et 12eme siècles, est la ville la plus surveillée du royaume.

    C’est là où il y a le plus d’agents des services de sécurité et du contre espionnage marocains au mètre carré, ceux de la très crainte DGST, dont le siège à Temara (6 km au sud de Rabat) est tristement réputé pour avoir été le centre de terribles tortures de milliers de présumés terroristes, opposants politiques et autres membres d’ONG de défense des droits humains, arrêtés en vertu de la loi antiterroriste promulguée le 28 mai 2003, 12 jours après les attentats kamikazes de Casablanca.

    Cela n’évitera pas des radicalisés de perpétrer à la célèbre place de Djamaa El F’na (la place des exécutions du temps des almoravides et almohades), un sanglant attentat à la bombe actionnée à distance au restaurant Argana, faisant 17 morts et 20 blessés de différentes nationalités le 28 avril 2011.

    Par Mahdi Boukhalfa, auteur et Journaliste

    Le Jeune Indépendant, 29/12/2021

    #Maroc #Algérie #Hôtel_Asni_Marrakech #attentat

  • Printemps Arabe: Panique dans les couloirs de la DGED

    Printemps Arabe: Panique dans les couloirs de la DGED – Maroc, Egypte, Tunisie, Moncef Marzouki, Hosni Moubarak,

    Un texte envoyé le 18/01/2021 par Ahmed Charaï à Mourad El Ghroul témognant la panique suscitée par les événements du Printemps Arabe en Egypte.

    L’Egypte le point faible

    Le printemps arabe a suscité beaucoup d’espoirs, les résultats sont loin de répondre aux attentes. Les observateurs occidentaux en particulier, sont tombés dans le piège d’un monde arabe unifié et qui donc obéit aux mêmes règles.

    Il s’agit là d’une erreur épistémologique énorme. L’Egypte s’est présentée officiellement et pendant 60 ans, comme l’icône de l’arabité. C’est évidemment faux, les égyptiens, en majorité, ne sont pas des arabes.

    L’Egypte « Oum Dounia », berceau de l’humanité est une idée ancrée par la propagande officielle qu’en a faite une arme pour cacher les réalités sociales. La majorité du peuple vit dans la misère, le Caire est l’une des villes les plus sales du monde.

    Le traitement journalistique des révoltes arabes, a été, est toujours très superficiel. Le pouvoir en Egypte s’appuyait sur l’armée. Depuis 1952, c’est celle-ci qui détient le pouvoir en Egypte. MOUBARAK et sa famille n’étaient rien d’autre que les représentants de l’armée. Les manifestants de la place ATTAHRIR ont eu tort de vouloir séparer le dictateur, Hosni MOUBARAK, de l’armée. Cela a évité un bain de sang à l’Egypte, certes, Mais l’on voit dès maintenant que l’armée dirigée par TANTAOUI n’est pas prête à rentrer dans les casernes et à subir un régime civil.

    Il y a une série de contre-vérités qu’il faut dénoncer. La première c’est que l’armée a été neutre. Ce sont les généraux qui ont présenté l’alternative du Patron des services secrets, comme possibilité de la sortie de crise.

    C’est l’armée égyptienne qui a poussé MOUBARAK vers la sortie. Elle lui a promis l’impunité, avant de céder à la pression de la rue et de l’amener au tribunal avec ses fils.

    Le régime Egyptien est toujours le même. Les manifestants l’ont compris eux qui exigent le départ du Conseil Supérieur des armées. Mais il sera difficile de reconstruire l’Egypte parce qu’il n’y a pas de consensus autour de l’idée démocratique, ni de classes moyennes capables d’assurer la stabilité. La classe politique égyptienne est embryonnaire et n’a aucune prise sur la rue.

    C’est une faute stratégique, que d’essayer d’évaluer les situations dans les pays arabes aux mêmes normes.

    L’Histoire et les divergences

    La situation dans des pays comme la Tunisie sont totalement différentes. La victoire des Islamistes en Tunisie était inscrite dans les gènes de la révolution tunisienne. C’est la seule force, crédible, imposante qui s’est opposée à la dictature de BEN ALI. L’existence d’une vraie classe moyenne, d’un attachement aux valeurs d’égalité, a permis un consensus où les islamistes respectent les acquis des femmes, des libertés publiques.

    Le respect de la volonté populaire, l’accord trouvé entre les différentes tendances ont ouvert la vie à une vie démocratique réelle. L’Etat Tunisien est déjà debout, légitimé par le peuple un an après la révolution. MARZOUKI, le chef de cet Etat a choisi d’effectuer son premier voyage à l’étranger au Maroc, signe de la force des liens et des similitudes de la construction démocratique.

    Il n’y a absolument aucun rapport entre les situations égyptienne et tunisienne.

    Il faut en tenir compte, sinon les médias et les Etats occidentaux, multiplieront les erreurs qui peuvent se révéler tragiques par la suite.

    SOURCE: Marocleaks, 30/12/2021

    #Maroc #PrintempsArabe #Egypte #Marocleaks #Documents_confidentiels #DGED

  • Ben Barka était un espion, selon des  documents déclassifiés

    Ben Barka était un espion, selon des documents déclassifiés

    Ben Barka était un espion, selon des documents déclassifiés – Maroc, Tchécoslovaquie, espionnage, services secrets, Guerre Froide,

    Le chef de l’opposition marocaine Mehdi ben Barka était un espion, suggèrent les dossiers de la guerre froide
    L’activiste assassiné à Paris en 1965 était un héros de la lutte mondiale contre l’impérialisme, mais les dossiers des services secrets tchécoslovaques jettent le doute sur son indépendance.

    C’est l’une des grandes causes célèbres de la guerre froide. Vers midi, le 29 octobre 1965, Mehdi ben Barka , leader de l’opposition marocaine et héros de la gauche internationale, est enlevé alors qu’il arrive dans une brasserie de la rive gauche de Paris.

    Au fil des ans, une grande partie de la vérité sur le meurtre du dissident de 46 ans a émergé : comment il a été emmené dans une maison au sud de Paris, torturé et tué par des agents des renseignements marocains. Mais de nombreuses activités de Ben Barka avant sa mort sont restées entourées de mystère. Aujourd’hui, de nouvelles recherches dans les archives des anciens États satellites soviétiques ont révélé que l’intellectuel charismatique, propagandiste et organisateur politique pourrait également avoir été un espion.

    Des dossiers précédemment classifiés de Prague montrent que Ben Barka avait non seulement une relation étroite avec le Státní Bezpečnost (StB), le service de sécurité tchécoslovaque redouté, mais qu’il en a reçu des paiements substantiels, à la fois en espèces et en nature.

    « Ben Barka est souvent décrit comme un combattant contre les intérêts coloniaux et pour le tiers-monde, mais les documents révèlent une image très différente : un homme qui jouait de plusieurs côtés, qui en savait beaucoup et savait aussi que l’information était très précieuse dans le froid. guerre; un opportuniste qui jouait à un jeu très dangereux », a déclaré le Dr Jan Koura, professeur adjoint à l’Université Charles de Prague, qui a eu accès au dossier.

    Les conclusions seront controversées. Ben Barka est toujours un héros pour beaucoup à gauche, et sa famille nie catégoriquement toute accusation selon laquelle il aurait été impliqué dans l’espionnage ou aurait eu des liens étroits avec un État.

    La possibilité d’un lien entre Ben Barka et le StB a été évoquée pour la première fois il y a près de 15 ans, bien que peu de personnes aient prêté une grande attention aux enquêtes menées par un journaliste tchèque. Mais Koura a non seulement pu accéder à l’intégralité du dossier Ben Barka dans les archives du StB, mais a également recoupé ses 1 500 pages avec des milliers d’autres documents secrets nouvellement publiés.

    « Il n’y a aucun doute sur [la connexion tchèque]. Tous les documents le confirment », a déclaré Koura à l’ Observer .

    Selon le dossier consulté par Koura, les relations de Ben Barka avec le StB ont commencé en 1960, lorsqu’il a rencontré son espion le plus haut placé à Paris après avoir quitté le Maroc pour échapper au régime de plus en plus autoritaire du roi Mohammed V. Sa patrie, une ancienne colonie française, avait pro-occidental depuis le début de la guerre froide, mais s’était récemment rapproché de Moscou. Les espions de Prague espéraient que cet éminent leader de la lutte pour l’indépendance du Maroc et fondateur de son premier parti d’opposition socialiste fournirait des renseignements précieux, non seulement sur les développements politiques dans le royaume, mais aussi sur la pensée des dirigeants arabes tels que le président égyptien , Gamal Abdel Nasser .

    Ben Barka était également une figure majeure du « mouvement anti-impérialiste des nations africaines et asiatiques », a noté le StB, dont les contacts comprenaient Malcolm X, Che Guevara et le jeune Nelson Mandela. Peu de temps après leurs premières réunions, le StB a rapporté que Ben Barka était une source d’informations « extrêmement précieuses » et lui a donné le nom de code « Cheikh », révèlent les archives.

    En septembre 1961, selon le dossier, Ben Barka avait reçu 1 000 francs français du StB pour des rapports sur le Maroc qui, selon lui, étaient copiés du bulletin interne du service de renseignement français à l’étranger. En fait, le matériel était accessible au public, ce qui a provoqué la colère et l’embarras à Prague lorsque la tromperie a été découverte. Ben Barka s’est néanmoins vu proposer un voyage tous frais payés en Afrique de l’Ouest pour recueillir des renseignements sur les activités américaines en Guinée équatoriale. Cette mission a été considérée comme un succès.

    Les Tchécoslovaques commencèrent bientôt à soupçonner que Ben Barka avait également des relations avec d’autres acteurs de la guerre froide, apprenant en février 1962 d’un agent en France que « Cheikh » avait rencontré un syndicaliste américain au bar L’Éléphant Blanc à Paris et avait reçu un chèque fait en dollars américains. Cela a conduit à craindre que Ben Barka ait des liens avec la CIA, qui tenait à soutenir la réforme démocratique au Maroc et à sécuriser le royaume pour le camp occidental. Le StB devait recevoir d’autres rapports alléguant que Ben Barka était en contact avec les États-Unis, bien que le politicien marocain ait toujours nié cela lorsqu’il était confronté, a déclaré Koura.

    La relation s’est néanmoins poursuivie. Les Tchécoslovaques ont invité Ben Barka à Prague, où il a accepté d’aider à influencer la politique et les dirigeants africains en échange de 1 500 £ par an.

    Ben Barka a été envoyé en Irak pour obtenir des informations sur le coup d’État de février 1963, pour lequel il a reçu 250 £, selon les documents. En Algérie, il a rencontré à plusieurs reprises Ahmed ben Bella, le président et un ami, et a rendu compte de la situation dans le nouvel État indépendant.

    Au Caire, on lui a demandé de recueillir des informations auprès de hauts responsables égyptiens qui pourraient aider les Soviétiques dans les négociations lors d’une visite de Nikita Khrouchtchev , le premier ministre soviétique. Les rapports de Ben Barka sont parvenus aux services de renseignement soviétiques, qui ont jugé le matériel fourni comme « très précieux ». En récompense de ses services, lui et ses quatre enfants ont été invités en vacances dans un spa en Tchécoslovaquie, révèle les recherches de Koura.

    « Ben Barka n’a jamais admis qu’il collaborait [avec les services de renseignement], et le StB ne l’a jamais répertorié comme un agent, juste comme un « contact confidentiel ». Mais il fournissait des informations et était payé », a déclaré Koura.

    « Il était très intelligent, un gars très intelligent. Il n’y a pas de document avec sa signature, il n’y a pas d’échantillons de son écriture. Il a été interrogé oralement pendant des heures… Parfois, il utilisait une machine à écrire mais refusait d’écrire quoi que ce soit à la main.

    Les motivations de Ben Barka, militant engagé arrêté et emprisonné à plusieurs reprises au Maroc, restent floues.

    Ses défenseurs disent qu’il était prêt à discuter à plusieurs reprises de la situation internationale avec les responsables tchécoslovaques, car c’était le meilleur moyen de les influencer. Ils disent aussi que bien que les analyses de Ben Barka aient pu être utiles au StB, cela ne fait pas de lui « un agent », quoi qu’aient écrit des bureaucrates ambitieux et des espions sur des notes internes.

    Ils soutiennent également qu’un tel rôle aurait été incompatible avec l’engagement de Ben Barka à préserver « le mouvement du tiers-monde de l’influence soviétique et chinoise ».

    Bachir ben Barka, qui vit dans l’est de la France, a déclaré à l’ Observer que les relations de son père avec les États socialistes et autres étaient simplement celles que l’on pouvait attendre de toute personne profondément engagée dans la lutte mondiale contre l’impérialisme et l’exploitation coloniale à l’époque, soulignant que les documents étudiés par Koura avaient été « produits par un service de renseignement, [et étaient donc] peut-être édités ou incomplets ».

    Koura est moins convaincu de l’altruisme de Ben Barka. « Il y avait à la fois du pragmatisme et de l’idéalisme. Je ne le condamne pas. La guerre froide n’était pas seulement en noir et blanc », a-t-il déclaré.

    Dans ses derniers mois, Ben Barka était occupé à organiser la Conférence tricontinentale, un événement qui réunirait à Cuba des dizaines de mouvements de libération, des groupes révolutionnaires et leurs sponsors. La conférence allait devenir un moment crucial dans l’histoire de l’anticolonialisme international dans les années 1960 et 1970, et le militant vétéran voulait présider l’événement.

    Mais les Soviétiques soupçonnaient qu’il était devenu trop proche des Chinois, leurs rivaux pour le leadership de la gauche mondiale. Des responsables soviétiques ont déclaré au StB que Ben Barka avait reçu 10 000 $ de Pékin et ont fait pression sur le service pour lui retirer tout soutien ou protection.

    Néanmoins, le StB a amené Ben Barka à Prague pour une semaine de formation en communications, codes, surveillance et contre-surveillance. C’était trop peu, trop tard, cependant. Une semaine après avoir demandé une arme de poing au StB, Ben Barka a été enlevé et tué.

    Bien qu’il ait ordonné une enquête, le président Charles de Gaulle a nié toute implication des services secrets français et de la police. La France et les États-Unis n’ont pas encore publié de documents secrets clés sur l’affaire.

    Prague a tenté d’imputer l’assassinat apparent de Ben Barka à la CIA, révèlent les nouveaux documents tchécoslovaques. Cela a dupé quelques-uns. Dans un document obtenu par l’ Observer en vertu des lois britanniques sur la liberté d’information, les diplomates londoniens louent la « modération » dont fait preuve Paris face aux preuves « accablantes » de la responsabilité des services de renseignement marocains.

    The Guardian, 26/12/2021

    #Maroc #Mehdi_ben-Barka #Tchécoslovaquie #Guerre_froire #Services_secrets #Espionnage

  • Article confirmant l’article de Cembrero sur le hacker Coleman

    Article confirmant l’article de Cembrero sur le hacker Coleman

    Article confirmant les propos de Cembrero sur le hacker Coleman – Maroc, France, hacker Chris Coleman, services secrets, El Hammouchi, coopération antiterroriste,

    En visite avec le ministre de l’Intérieur marocain jeudi dernier, le patron de Direction générale de la surveillance du territoire (DGST), Abdellatif El Hammouchi, a eu la désagréable surprise de recevoir une convocation délivrée à l’ambassade par un juge d’instruction parisien. Trois plaintes ont été déposées pour des faits de torture dans le centre de détention de Temara, au nord du Maroc, notamment par l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture.

    Ils n’ont pas emmené El Hammouchi, qui a pris la fuite via l’Espagne mais ont au contraire provoqué un incident diplomatique entre le Maroc et la France, qui est toujours en cours. Rabat a pris des mesures de rétorsion telles que la suspension de la coopération judiciaire avec Paris.

    Dans un geste visant à provoquer ses alliés de la DGSE, un média proche du palais, Le360.ma, a publié le nom de de la déléguée au Maroc des services secrets français. Réponse du berger à la bergère, les français organisent une large opération de piratage d’institutions sensibles au Maroc: Le ministère des affaire étrangères et la DGED, le service d’espionnage et contre-espionnage dirigé par un Yassine Mansouri, un ami intime du roi.

    Un article du journal Le Monde corrobore ces faits. Voici son texte intégral.

    France-Maroc : comment les services secrets ont accentué la brouille, avant de la résoudre

    La seconde visite privée, lundi 9 février, du roi Mohammed VI à François Hollande à l’Elysée marque la fin d’une crise trop longue et qui s’est répercutée bien au-delà de la France et du Maroc. La coopération sécuritaire entre les deux alliés traditionnels reprend presque aussi vite qu’elle s’est interrompue un an plus tôt.

    Entre Neuilly où vit sa mère et Courchevel où il a séjourné ces derniers jours, le roi du Maroc Mohamed VI, en visite privée en France, savoure enfin le terme d’une longue crise. Son échange téléphonique avec François Hollande, la dernière semaine de janvier, a permis de rétablir le dialogue et la coopération.

    À la suite des trois réunions entre la ministre de la justice française, Christiane Taubira, et son homologue marocain, Mustapha Ramid, le magistrat de liaison a repris son poste à l’ambassade du Maroc à Paris la semaine dernière. Et les services de renseignement ont enfin commencé à rétablir leur collaboration en matière de lutte contre le terrorisme.

    À Paris, comme à Rabat, on a compté les jours. Il s’en est écoulé 354 depuis que sept policiers français ont fait irruption, le 20 février 2014, à la résidence de l’ambassadeur du Maroc, à Neuilly, pour y remettre une convocation du patron de la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST), Abdellatif Hammouchi, visé par une plainte pour complicité de torture. Ce jour-là, le patron des services marocains n’était pas présent. Après s’être entretenu avec ses homologues français, il était déjà en route pour Rabat.

    « La coopération sécuritaire étant le noyau dur de notre relation, on ne peut pas accuser le chef des services de renseignement de torture et s’attendre à ce qu’il continue à vous livrer des informations », souligne un haut responsable marocain. Rabat a privilégié le partage de renseignements avec les Américains et les Espagnols. Privant ainsi le partenaire français des informations traitées sur leurs ressortissants installés ou de passage au Maroc, sur les près de 1,3 million de Marocains vivant en France.

    « Nous avons des réseaux étendus en Irak et en Syrie ainsi qu’au Sahel et en Afrique de l’Ouest, et ces renseignements sont particulièrement utiles aux Français », souligne un proche des services marocains. Le transfert de prisonniers s’est aussi arrêté. « La coopération sécuritaire a souffert de manière anormale », déplore-t-on avec le recul des deux côtés.

    Défiance entre services, d’Alger à Ouagadougou, en passant par Bamako
    Une guerre des services a éclaté durant cette « brouille », lorsque, subitement, le nom de la « deuxième secrétaire à l’ambassade de France et chef d’antenne de la DGSE au Maroc » est révélé publiquement, en mai, sur le site d’information Le360.ma, réputé très proche du secrétaire particulier du roi, Mounir Majidi. Celle que ses collègues surnommaient « la lionne » pour son ardeur à la tâche, est démasquée et quitte aussitôt le territoire marocain. Pour la seconde fois, après un fonctionnaire français sous couverture à Tanger quelques années plus tôt, un agent français est « détronché » par les Marocains. « C’est un fait rare et grave, ni plus ni moins qu’un acte de guerre », souligne un diplomate français. À l’ambassade de France à Rabat, les officiels français sont sous pression et font profil bas. D’autant que l’ambassade de Rabat est l’un des points stratégiques de la région en matière de renseignement et d’action tourné vers l’Afrique.

    Cette hostilité des services marocains à l’égard de leurs anciens alliés, sur fond de tensions diplomatiques entre Paris et Rabat va se déplacer un peu plus au sud. À commencer par le nord du Mali où Paris va soutenir la médiation algérienne entre le gouvernement malien et les groupes armés, un processus dont Rabat est exclu. Les Marocains y voient là un traitement de faveur de Paris à l’égard de leur historique adversaire algérien. D’autant que les services marocains multiplient les notes sur les accointances présumées des socialistes français au pouvoir avec Alger. Un sentiment de trahison saisit Rabat, qui avait facilité dés janvier le survol de son territoire aux premiers Rafale français en route vers le Mali. Et des éléments des forces spéciales marocaines déployés sur place avaient aussi transmis des renseignements aux Français.

    Le dialogue intermalien se poursuit à Alger jusqu’à ce jour, sans néanmoins parvenir à un accord. « Ces négociations ne parviendront à rien. Certains groupes touaregs sont en partie sous notre contrôle, et nous suivons tout ce qui se déroule à Alger », claironne un fonctionnaire marocain qui ne cache pas la volonté de faire achopper cette médiation. Le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) ne participe pas à ces négociations. L’un de ses chefs, Bilal Ag Cherif, est d’ailleurs très proche de Rabat. Autour de la crise du nord du Mali, les vieux « frères ennemis » que sont l’Algérie et le Maroc ont trouvé un autre terrain de rivalités et un nouveau levier vis-à-vis de Paris. Une triangulaire paralysante Alger-Paris-Rabat émerge autour du conflit malien.

    « Un geste en faveur de la France »
    Si le Mali les a divisés, le Burkina-Faso semble avoir rapproché les services de renseignements marocains et français. Tous deux entretiennent des liens étroits avec le président burkinabé Blaise Compaoré. Lorsque le 31 octobre, les Français exfiltrent, en Côte d’Ivoire, Blaise Compaoré, chassé du pouvoir après deux jours de manifestation, les Marocains ne sont pas loin et observent cette révolution qu’ils pensent « accélérée par un soutien de Paris ».

    Après Yamoussoukro, c’est à Rabat que Compaoré débarque, à l’improviste, à bord d’un jet de la République ivoirienne le 20 novembre. Il sera conduit à l’hôtel Hyatt. À la demande de la France, Rabat limite les visites au président déchu pour ne pas alimenter des soupçons d’un plan de retour au pouvoir. « Nous avons levé le pied sur un ami du Maroc depuis Hassan II. C’était un geste en faveur de la France », indique un proche des services marocains. La profondeur stratégique de cette brouille entre les services s’est étendue à leurs zones d’influence sur le continent.

    À travers l’Espagne, Marocains et Français ont peu à peu repris un échange très limité de renseignements, comme l’a révélé El Mundo en janvier. En coulisses, les services marocains ont préparé cette reprise de la coopération sécuritaire avec leurs homologues français, symbolisée par cette visite du roi à l’Elysée. Mohammed VI et François Hollande ont souligné leur détermination à « lutter ensemble contre le terrorisme et à coopérer pleinement dans le domaine de la sécurité ».

    Joan Tilouine

    Le Monde, 09/02/2015

    #Maroc #France #DGED #DGSE #ElHammouchi #Hacker_Chris_Coleman

  • Amar Belani: les « risibles » mensonges de Sahel Intelligence

    Amar Belani: les « risibles » mensonges de Sahel Intelligence

    Amar Belani: les « risibles » mensonges de Sahel Intelligence- Algérie, Maroc, Sahara Occidental, DGED, services secrets,

    Encore une fois, le site « Sahel Intelligence » connu pour être affilié aux renseignements marocains, verse dans le mensonge et la manipulation.

    En effet, dans un article mis en ligne mardi, cet instrument du Makhzen, avance que l’Algérie a installé des militaires iraniens et des combattants du Hezbollah « dans des bases de l’armée algérienne situées à quelques kilomètres des camps de Tindouf pour combattre l’armée marocaine. »

    L’envoyé spécial auprès du ministre des Affaires étrangères pour le Sahara Occidental et les pays du Maghreb, Amar Belani, a qualifié « les assertions de « Sahel Intelligence », incubateur de fake news concoctées par la DGED d’hollywoodiennes et de risibles. »

    Comme de coutume, tous les moyens sont utilisés par le makhzen pour jeter le doute et de tenter de manipuler l’opinion internationale au profit du perfide monarque, prêt à s’allier au diable pour arriver à ses fins.

    Hakim G.

    L’Espoir libéré, 15/12/2021

    #Algérie #Maroc #Sahel_Intelligence #DGED #Sahara_Occidental

  • France-Maroc: Mohamed B., le grain de sable dans le désert…

    France-Maroc: Mohamed B., le grain de sable dans le désert…

    France-Maroc: Mohamed B., le grain de sable dans le désert… – CFCM, Conseil français du culte musulman, DGED, espionnage, Islam en France,

    Dans l’enquête en cours en France sur les relations de l’agent traitant de la DGED marocaine, l’intriguant Mohamled B., il y a eu, à la source, une mise sous surveillance de la part de la sécurité intérieure française de ce monsieur, ensuite une série de faits liés à la « corruption d’agents publics ». Ce qui est intéressant dans cette récente affaire, c’est la propension marocaine à débourser des caisses d’or pour faire aboutir un projet insaisissable.

    L’information a été donnée par « Le Point », qui n’a donné qu’une tranche de la partition marocaine qui se joue sur le sol français, l’enquête étant toujours en cours. Mais ne nous réjouissons pas, car il est dit qu’elle n’aboutira pas, tout comme l’enquête d’État sur les écoutes Pegasus.

    Les seules bribes disponibles, ou qui ont fuité, concernent les activités d’infiltration au sein d’institutions françaises menées par les services de renseignement marocains en France, avec un appui israélien confirmé, sont loin de dévoiler toute la réalité du « drame marocain » totalement obnubilé par le Sahara occidental, non pas en tant que fondamental de la politique d’Etat marocain, mais en tant que carte maitresse pour maintenir le peuple sous des objectifs communs. Ne perdez pas de vue que le roi Hassan II a programmé la « Marche verte » sur le Sahara occidental, en 1975, au moment où la situation interne tournait à l’anarchie, avec des complots pour l’assassiner et un soulèvement populaire qui prenait de la consistance. La Marche verte du roi a été qualifiée en son temps par les experts de « coup de poker » de Hassan II pour établir la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, dans un contexte de plus en plus défavorable. Aujourd’hui, le contexte, à des nuances près, est le même.

    L’agent secret du Makhzen à travers son rôle présumé d’ «agent traitant » du président du CFCM est un certain Mohamed B, fiché « S03 » (c’est à dire mis sous surveillance discrète par les renseignements français), a agi par le biais de l’argent. Et tous les réseaux marocains dans l’Hexagone agissent de même. Il n’est que vérifier la quantité de politiciens, comédiens, journalistes et eurodéputés qui passent leurs vacances à Fez, Marrakech ou Rabat pour se rendre à l’évidence : il existe un budget spécial pour corrompre les médias et soudoyer les responsables. « Le Point », à la source de l’information, a été lui-même, il y a quelques années, épinglé pour des faits de conflit d’intérêts : sa corédactrice en chef, Mireille Duteil, a été mise en accusation par WikiLeaks pour avoir rédigé des papiers « sur mesure » au bénéfice du Maroc et au préjudice du Polisario et de l’Algérie moyennant 6 000 euros.

    Le sujet est abondamment sourcé et appelle, de ce fait, à revenir dessus avec des indications précises et des anecdotes à faire tomber de haut.

    L’Express, 06/12/2021

    #France #Maroc #Pegasus #Conseil_français_du-culte_musulman #CFCM #Mohamed_B #Mohamed_Moussaoui #Espionnage #DGED #Islam_en_France

  • Le Point: La DGED agit pour le contrôle de l’islam de France

    Le Point: La DGED agit pour le contrôle de l’islam de France

    Le Point : Le Maroc veut contrôler l’Islam de France – services secrets, DGED, Mohamed Moussaoui,

    Dans un dossier consacré aux agissements de services secrets étrangers en France, le magazine français Le point a révélé dans son dernier numéro que les « barbouzes » marocains étaient impliqués depuis des années pour que le Maroc parvienne à contrôler les mosquées et autres lieux de culte musulman dans l’Hexagone et ainsi, ravir la palme aux autres pays musulmans, dont l’Algérie qui possède une forte communauté dans ce pays.

    Voici, l’intégralité du papier du magazine sur cette affaire scabreuse, qui fait suite à l’autre scandale Pegasus révélée récemment.

    Mohamed B. est un fantôme. L’orthographe de son véritable nom est incertaine et l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) a eu toutes les peines du monde à trouver une photographie de lui. Tout juste a-telle appris qu’il était né en juin 1964 au Maroc et qu’il était considéré par la préfecture du Bas-Rhin comme célibataire, détenteur d’une carte de résident français depuis octobre 2010. Sa véritable adresse n’a jamais été trouvée. Les investigations menées à son seul domicile connu, à Bischheim, en Alsace, n’ont rien donné, contraignant les enquêteurs à dresser un procès-verbal de «recherches infructueuses». Depuis le 13 février 2018, date à laquelle un mandat d’arrêt a été émis à son encontre, l’homme s’est tout bonnement évaporé. Poursuivi pour corruption d’agents publics en France, il n’est connu dans le petit cercle du renseignement que par sa fiche «S03» (recherche de renseignements sans attirer l’attention), laquelle le désigne comme un agent des services secrets marocains. Il est aussi soupçonné, selon nos informations, d’avoir cherché à exercer une emprise sur l’islam de France en «tamponnant».

    Après l’affaire Pegasus, c’est le nouveau scandale qui guette: comment un espion du royaume chérifien a été chargé d’infiltrer le Conseil français du culte musulman. Tout commence, comme le révèle à l’époque Libération, par un renseignement anonyme parvenu à l’IGPN le 11juillet 2016, selon lequel deux membres de la police aux frontières (PAF) fournissent des fichiers de police à une force étrangère, en contrepartie d’espèces et de voyages tous frais payés. Une enquête est ouverte à Creil (Oise), qui s’attache à éclaircir les fonctions exactes de Charles D., fonctionnaire de police à l’aéroport d’Orly. Le sexagénaire y vérifie l’identité de toutes les personnes qui passent les aubettes des douanes et enregistre les allées et venues des fichés «S» ou ceux inscrits, pour une raison ou une autre, au Fichier des personnes recherchées (FPR).

    Les informations qu’il manipule sont donc éminemment sensibles. Certaines sont classées confidentiel défense. Très rapidement, les investigations vont confirmer que Charles D. est en relation téléphonique nourrie avec un certain Driss A., à qui il fournit des renseignements et des badges dits «verts», sortes de passe-droits qui permettent aux contacts de Driss de faciliter leur passage à la frontière… Et d’éviter certaines mesures de contrôle.

    Charles D. reçoit en échange un peu d’argent, réalise des voyages au Maroc et en Angola et y rencontre un mystérieux commanditaire désigné, à la manière d’un 007, sous son seul nom de code : M118. Il s’agit de Mohamed B. C’est à lui que le fonctionnaire a pris l’habitude de remettre les fiches S par l’intermédiaire de Driss A.

    Fantôme. Recherché depuis le 18 février 2018, cet agent des services secrets marocains (nom de code : M118) reste introuvable depuis le 13 février 2018.

    Des dizaines de fiches d’informations confidentielles de personnes liées à la mouvance islamiste ont, en toute illégalité, changé de main.

    Nous sommes alors en 2016. Entendu par la police, Charles D. assume tout: «Je sais que cette façon de procéder est illégale. Toutefois, je le fais dans l’intérêt supérieur de la nation afin de prévenir tout acte terroriste sur notre territoire. » Et tant pis si les renseignements fournis concernent parfois des dignitaires étrangers ou un ex-ministre algérien… « Vive sa Majesté ! »

    Au fil des mois, M118 se fait de plus en plus présent et parvient à rencontrer le directeur de la PAF d’Orly, par ailleurs conjoint de la patronne de l’IGPN. Il invite aussi personnellement Charles D. au Maroc, lui proposant au téléphone de venir avec sa famille. Ce dernier se dit enchanté. «Vive sa Majesté!» s’écrie-t-il.

    Après trois ans de procédure, Charles D., Driss A. et Mohamed B ont tous été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour un procès qui n’a pas encore été audiencé. Selon Blandine Russo, l’avocate de Charles D.: «Ce sont les fragilités de mon client, sa volonté d’agir contre le terrorisme et son état psychologique au moment des faits qui ont pu en faire une cible de choix» pour un agent du Renseignement. «Il a toujours affirmé ne pas avoir été payé pour ses services.»

    Dans son ordonnance de renvoi, révélée par Le Parisien, le juge d’instruction a quant à lui souligné qu’il était «rarissime qu’un dossier relevant du secret étatique soit ainsi judiciarisé, surtout par le biais d’un renseignement anonyme. […] Aucune hypothèse ne peut être, à ce jour, émise quant aux motivations de cette dénonciation, alors qu’il a été démontré qu’un membre du renseignement marocain était en contact avec des fonctionnaires de la PAF d’Orly».

    Selon plusieurs sources, cette affaire a attiré l’attention sur les actions de Mohamed B. dans l’Hexagone. Plus qu’un simple agent, l’homme est en réalité un rouage essentiel de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), l’équivalent marocain de la DGSE française. Sa mission? Accroître le contrôle du royaume chérifien sur la pratique de l’islam en Europe.

    Si l’espion compte de nombreux faits d’armes, notamment en Espagne, il est aujourd’hui soupçonné d’avoir été, des années durant et avant sa fuite, l’agent traitant du président du Conseil français du culte musulman (CFCM), le Franco-Marocain Mohammed Moussaoui. Mohamed B. serait ainsi derrière tous les grands projets de ces dernières années pour asseoir l’influence du Maroc sur de nombreuses mosquées françaises et contrer ainsi les intérêts du rival algérien, n’hésitant pas à faire pression sur tel ou tel représentant du culte local pour permettre l’ascension de son poulain, Mohammed Moussaoui.

    D’après les informations du Point, les liens entre le président du CFCM et le Maroc sont aujourd’hui si forts que les quittances de loyer de l’appartement parisien occupé par Mohammed Moussaoui sont directement adressées à un certain Samir X., numéro 3 de la DGED à Paris. Ce dernier, qui agit sous couvert diplomatique – il est officiellement considéré comme attaché à l’ambassade du royaume du Maroc en France –, règle ainsi une note de plusieurs milliers d’euros par an. Une pratique en cours depuis des années sous l’impulsion de Mohamed B.

    Ces relations et cette tentative d’ingérence du Maroc sont susceptibles d’inquiéter fortement au sommet de l’État, alors que le ministre de l’Intérieur ambitionne de réformer en profondeur la gouvernance du culte musulman en France. Une réforme doit émerger en début d’année prochaine après une phase de consultation commencée cette année.

    Coopération culturelle.

    Contacté, Mohammed Moussaoui se défend de toute ingérence. «La personne que vous présentez comme membre de la DGED [Mohamed B.], je l’ai toujours connue comme chargé de mission au ministère marocain des Affaires étrangères et de Coopération, affirme-t-il. Il a été membre du comité bilatéral franco-marocain, formalisé par la déclaration commune franco-marocaine de septembre 2015, sur la coopération en matière cultuelle.» Et de préciser: «Cette déclaration a été signée, en présence des deux chefs d’État, par le ministre français des Affaires étrangères et le ministre marocain des Habous et des Affaires islamiques. J’ai assisté à cette signature en ma qualité de [représentant de] l’Union des mosquées de France (UMF) et membre de la délégation française qui accompagnait le président de la République, M. François Hollande. Ce comité est chargé de suivre trois dossiers: les imams et psalmodieurs marocains détachés en France, la formation des imams français au Maroc et les aides aux mosquées françaises.»

    Selon Mohammed Moussaoui, ses fonctions à l’UMF l’ont conduit à rester «régulièrement en contact avec les membres marocains et français de ce comité. C’est dans ce cadre-là et en toute transparence que j’ai pu avoir des contacts avec M. B.».«S’agissant du logement que j’occupe à Paris, il appartient à l’ambassade du Maroc. Cette dernière le met à ma disposition pour pouvoir assurer ma mission bénévole de gestion des trois dossiers cités plus haut […] Une fois que ma mission sera terminée, notamment avec la fin des imams détachés en 2024 et la mise en place de formations d’imams en France, je ne disposerai plus de ce logement, dont d’ailleurs je n’aurai plus besoin.» La mission de Mohamed B. ? Accroître le contrôle du royaume chérifien sur la pratique de l’islam en Europe ».

    L’Evénement, 04/12/2021

    #Maroc #Services_secrets #DGED #CFCM #Mohamed_Moussaoui

  • France: Des traces de la DGED marocaine dans les mosquées

    France: Des traces de la DGED marocaine dans les mosquées- services secrets, Conseil Français du Culte Musulman, Mohammed Moussaoui

    Les services secrets marocains soupçonnés d’influencer le Conseil Français du Culte Musulman
    Le Point révèle mercredi 1er décembre qu’un proche collaborateur du président du CFCM est un agent secret marocain, chargé d’asseoir l’influence de son pays sur l’Islam de France.

    L’Islam de France subirait l’influence de régimes étrangers, et même les espions marocains s’en mêleraient, selon une enquête du Point publiée mercredi 1er décembre. L’hebdomadaire pointe le rôle d’un certain Mohamed B. « rouage essentiel » de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), les renseignements extérieurs marocains. L’homme est mis en cause par la justice française pour avoir obtenu d’un membre de la Police aux frontières des « Fiche S » confidentielles ou des passe-droits pour pénétrer en France. Cela contre de l’argent ou des séjours au Maroc. Mais il a disparu des radars au point qu’un procès-verbal de « recherches infructueuses » a été délivré. L’affaire a poussé les enquêteurs à s’intéresser aux liens de Mohamed B. avec le Conseil Français du Culte Musulman (CFCM).

    Le président du CFCM hébergé par l’ambassade du Maroc
    Alors que l’influence des régimes étrangers est un enjeu important dans l’organisation de l’islam de France, l’homme aurait été en contact direct avec le président du CFCM le Franco-Marocain Mohammed Moussaoui, révèle Le Point. Avant sa fuite, il en aurait été « l’agent traitant » pendant des années. Son rôle aurait été de faire pression sur les mosquées et représentants du culte afin de renforcer l’autorité de Mohammed Moussaoui, et par la même celle du régime marocain sur l’islam de France. L’hebdomadaire affirme également que c’est à un membre éminent de cette même DGED que sont adressées…les quittances de loyer du président du CFCM.

    Mohammed Moussaoui confirme au Point être hébergé à titre gracieux par l’ambassade du Maroc en échange de la gestion bénévole des imams français et marocains exerçant dans l’autre pays et des « aides aux mosquées françaises » venues du Maroc. Il assure ne connaître Mohamed B. que comme chargé de mission au ministère marocain des Affaires étrangères et de Coopération.

    Valeurs actuelles, 01/12/2021

    #Maroc #France #Islam #Mosquées #Mohamed_Moussaoui #Conseil_Culte_musulman #CFCM #DGED #Service_secrets

  • Opération Sirli: La source s’exprime pour la première fois

    Opération Sirli: La source s’exprime pour la première fois

    France, Egypte, Al Sissi, DRM, DGSE, Disclose – Opération Sirli: La source s’exprime pour la première fois

    « Le silence n’est plus une option »

    La source à l’origine des révélations de Disclose sur l’opération militaire Sirli, en Egypte, s’exprime longuement sur les raisons qui l’ont amenée à briser le secret de la défense nationale.

    « Les mémos de la terreur » démontrent la responsabilité de la France dans des exécutions arbitraires perpétrées par la dictature du maréchal Abdel Fattah al Sissi, en Egypte. De possibles crimes contre l’humanité dissimulés depuis 2016 derrière le « secret-défense » et « la lutte contre le terrorisme ».

    Témoin de ce scandale d’Etat, la source de Disclose ne pouvait rester silencieuse.  « Tout cela décrédibilise l’action française et la République, soutient la logique mortifère et le mal qu’on prétend combattre. Les patriotes aveugles voudront bien nous excuser, mais nous ne pouvons pas TOUJOURS nous taire », a-t-elle écrit en préambule d’une série de questions que nous lui avons adressées au début de notre enquête.

    Avec son accord, nous publions l’intégralité du texte qu’elle nous a fait parvenir pour motiver son acte, suivi de ses réponses à nos questions.


    « Ni moi, ni ceux et celles que je connais qui ont pu contribuer à cette diffusion d’information, ne sont opposants politiques, militants anti républicains ou anti France, ou au service d’une puissance étrangère. C’est même tout le contraire. Ce qui fait rompre le silence, ce sont les dérives de l’action politico-militaire française qui entaillent profondément ce pour quoi des hommes et des femmes sont au service de la France.

    Il n’y a pas de naïveté non plus. Évidemment, où qu’ils soient, les pouvoirs publics justifient certains agissements par « les intérêts supérieurs de l’Etat », qualifiés de tels sans en référer à leur peuple, sans explication, sans débat. C’est pourquoi le contrôle de l’action de l’exécutif est si précieux et qu’il est inexistant dans les régimes autocratiques. Chez nous, dans le domaine de la défense et de l’armement, il est quasi absent et surtout les maigres tentatives n’ont aucun effet réel. Si le Parlement pouvait véritablement jouer son rôle, nous n’en serions pas là. En somme, ce sont les dysfonctionnements de notre système qui conduisent des groupes d’individus comme nous à transgresser les règles établies pour le maintenir, parce que précisément, il ne devrait pas l’être.

    Il n’y a pas non plus de pacifisme béat, « hors sol » comme on dit. A titre personnel, et je crois que c’est partagé par tous ceux que je connais, j’estime que la France a besoin d’une armée forte. S’armer ou exporter de l’armement n’est pas une « honte française » en soi. Cela le devient en revanche lorsque nos dirigeants utilisent nos armées sans tirer les leçons de l’histoire ; cela le devient lorsqu’ils violent les traités internationaux, les engagements de la France et son Histoire ; cela le devient lorsqu’ils se moquent des conséquences de leurs actes ; cela le devient lorsqu’ils détournent les prérogatives que leur octroie la constitution pour décider seuls, sans consultation ni contrôle ; cela le devient lorsque l’intérêt des Français, l’intérêt général, vient après celui de prétendus objectifs stratégiques ou sécuritaires. Certaines décisions politiques dévoient « le combat pour la France » ; elles mènent nos soldats, engagés pour la France, à mourir pour parfaire le dévoiement, et elles détruisent des populations, des enfants, tués par les armes que nous avons vendues.

    Dire à celles et ceux qui sont au service de la France que ces questions les dépassent ou qu’ils doivent faire confiance aux dirigeants n’opère plus, et de plus en plus de fonctionnaires et militaires ressentent ce malaise. Ceux qui parlent, qui agissent, ne le font pas dans un élan de supériorité, d’idéologie ou de détention de la vérité, mais au nom d’une conscience personnelle qui refuse la complicité et au nom d’une responsabilité collective puisque si nous ne le faisons pas, personne ne peut le faire. Quand les notes internes d’analyses diplomatiques et militaires sont ignorées, quand les dirigeants politiques sont sourds aux appels bienveillants, le silence n’est plus une option.

    Alors évidemment la France a besoin de partenaires stratégiques. Mais voilà, l’Egypte n’en est pas un, il ne l’a jamais été et, en l’état actuel, ne le sera jamais. Les militaires le disent, l’écrivent, mais cela n’empêche pas nos dirigeants de dire le contraire à tue-tête. Ce n’est pas parce que nos navires de guerre ont besoin de traverser le canal de Suez, que nos avions de chasse survolent le Sinaï, que des entreprises françaises font du business en Egypte, que cela fait du Caire un allié stratégique. Pendant des années, l’Egypte était un partenaire mineur : peu d’échange, peu de visite de haut rang, pas de partenariat économique ni de défense sérieux – toujours pas d’ailleurs.

    Mais voilà, Sissi a pris le pouvoir et a acheté des Rafale à Le Drian. A partir de là, on a promu l’Egypte au rang de pays stratégique. Cela n’avait pas été le cas au début des années 1980 lorsque l’Egypte avait acheté massivement d’autres matériels de guerre. Sauf qu’aujourd’hui, il faut un « narratif » comme on dit, il faut faire passer ce genre de décision. Les prétextes de la guerre contre le terrorisme ou de la stabilité régionale fournissent le parfait scénario pour justifier notre action mercantile et « souveraine ». Qui peut croire que le régime autoritaire actuel de Sissi stabilise la région ? Qui peut croire que nos Rafale et frégates participent à la lutte contre le terrorisme ? Mais peu importe, il faut vendre pour maintenir notre industrie, tenir notre « format d’armée », sans que les Français ou leurs représentants aient leur mot à dire sur ce format et ses ambitions, et cela, « quoi qu’il en coûte ». La formule s’applique à l’armement bien avant la crise sanitaire.

    Tout cela décrédibilise l’action française et la République, soutient la logique mortifère et le mal qu’on prétend combattre. Les patriotes aveugles voudront bien nous excuser, mais nous ne pouvons pas TOUJOURS nous taire.

    De Gaulle a dit « La défense, c’est la première raison d’être de l’État. Il n’y peut manquer sans se détruire lui-même ». Il faudrait ajouter qu’à justifier toutes ses actions par la défense et la sécurité, il peut aussi détruire son identité démocratique. »


    Pourquoi voulez rendre publique l’existence de l’opération Sirli ?

    Si cette coopération avait un sens, si elle répondait à des objectifs précis, si elle apportait quelque chose à la France, personne ne la remettrait en question. Or ce n’est pas le cas. Plusieurs échelons de l’armée l’ont remise en cause d’abord parce que nos forces sont extrêmement sollicitées et n’ont pas le temps d’en perdre. Elles n’en retirent rien, aucune information sur la lutte antiterrorisme, c’est écrit noir sur blanc dans plusieurs rapports. Ensuite, alors qu’elles sont censées aider à lutter contre le terrorisme et à surveiller le chaos de la frontière libyenne, elles se retrouvent complices dans une chasse aux trafiquants civils du désert et à des bombardements non discriminés, au service d’un régime brutal.

    Avez-vous pris la mesure des risques encourus par la diffusion de documents classifiés ?

    J’aurais préféré qu’ils ne le soient pas évidemment. Tout comme je préférerais que les représentants du peuple aient accès à des informations qui engagent la France et donc les Français et les Françaises. Mais le système actuel est construit de telle manière qu’il se protège d’abord lui-même. Il n’y a pas d’autre option que d’enfreindre les règles qu’il établit si l’on souhaite espérer qu’il évolue.

    En France, la loi ne protège pas les lanceurs d’alerte contre la « compromission de la défense nationale », en êtes-vous conscient.e ?

    J’ai évidemment conscience des risques juridiques si mon identité était découverte. Mais j’ai aussi ma conscience personnelle et ma responsabilité qui m’obligent. J’espère simplement que le fond sera pris en compte, plus que la forme.

    Parce qu’il faut tout de même remettre les choses dans le bon ordre : il est plus grave de participer au meurtre d’hommes, même des trafiquants, que de dévoiler une note estampillée « confidentiel-défense ».

    Un élément en particulier a-t-il motivé votre décision ?

    Ma décision a été prise après avoir acquis la certitude qu’il n’y avait pas d’autres alternatives pour que soit remise en question notre action avec l’Egypte. Cette opération est symptomatique d’un système sans contre-pouvoir, capable de devenir complice d’assassinats dans le plus grand secret, pendant des années. Il est temps que cela cesse.

    La diffusion de ces informations fait-elle courir un risque, selon vous, aux militaires français déployés en Egypte ? 

    Les militaires français assistent l’armée égyptienne depuis 2016 et n’ont jamais subi la moindre menace par ailleurs. C’est la seule raison qui aurait pu m’empêcher de parler et empêcher ceux qui m’ont transmis certains documents à ne pas le faire. J’ai exigé qu’aucun nom de militaires déployés ne soit rendu public.

    L’opération Sirli, n’a pas d’existence officielle, comment l’expliquez-vous ?

    Les opérations de la direction du renseignement militaire (DRM) ne sont pas publiques. Mais avec celle-ci, il y a une double gêne : elle est critiquée en interne parce qu’elle ne sert pas les intérêts de la France et parce qu’elle participe à du ciblage qui ne contribue pas à la lutte antiterroriste. Il est difficile de s’en vanter. Et puis, il faut souligner qu’aucun ministre n’aime annoncer une mauvaise nouvelle comme l’arrêt d’une mission de coopération, lesdits ministres peuvent ainsi continuer à mettre ce geste français dans la balance lors de leurs discussions bilatérales.

    A votre connaissance, l’opération Sirli a-t-elle contribué au meurtre de civils par l’armée égyptienne ?

    Il n’y a que des civils qui sont tués. Vous voulez dire des civils qui ne sont pas de terroristes ? La réponse est oui, puisque comme l’attestent les comptes rendus de la DRM, les terroristes ne couraient pas cette partie de désert.

    Existe-t-il un accord écrit encadrant la mission ?

    La DRM a tenté au début de l’opération de faire signer un accord encadrant cette coopération, et donc cette opération, à la partie égyptienne. Mais elle n’a jamais accepté de signer et in fine la France a abandonné l’idée. Cet accord aurait obligé les deux parties à décrire noir sur blanc le cadre de la coopération, le type de mission et surtout ses limites.

    Ce qui est le plus dérangeant, c’est l’utilisation par les autorités françaises d’une coopération qu’ils savent meurtrière pour tenter d’obtenir des informations qu’ils n’obtiennent pas. Par ailleurs, ce type de complicité empêche tout discours français véritablement critique et crédible sur la répression ou les droits humains.

    Comment expliquez-vous qu’une fois élu Emmanuel Macron a poursuivi cette opération débutée un an plus tôt par son prédécesseur ?

    En 2017, au moment de son élection, la France a encore beaucoup d’espoir de vendre davantage d’armement à l’Egypte : des Rafale supplémentaires, un satellite supplémentaire, des ravitailleurs. Donc évidemment, dans ces conditions, la relation bilatérale ne pouvait pas changer. Tant que le coût politique de vendre des armes reste maîtrisables, il n’y a aucune raison de croire au changement de cap.

    Source : Disclose, 26/11/2021

    #DGSE #DRM #Opération_Sirli #Egypte_Leaks #Macron