Étiquette : Union Européenne

  • L’Europe, victime et complice du Maroc

    L’externalisation du contrôle des migrations ouvre la porte au chantage

    L’Espagne, et avec elle l’Europe, sont à la merci des décisions prises par la Maison royale marocaine et son gouvernement, gendarmes de la frontière sud espagnole et européenne. La politique migratoire défendue par Bruxelles et par l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne depuis au moins 30 ans laisse l’essentiel du contrôle migratoire aux mains des pays voisins comme la Turquie et le Maroc.

    Le Conseil européen de Tampere, à la fin des années 1990, avait déjà commencé à concevoir une politique migratoire qui faisait peser la charge de la gestion sur les pays voisins. Les plans approuvés après l’arrivée massive de réfugiés en 2015 et l’accord signé le 18 mars 2016 avec la Turquie vont tous dans la même direction.

    L’Espagne a des accords bilatéraux similaires avec le Maroc depuis 1992, avec la Mauritanie depuis 2003 et avec le Sénégal depuis 2006. Il est même allé jusqu’à lier l’aide au développement au contrôle des migrations.

    Le Maroc, comme la Turquie, utilise simplement les mécanismes à sa disposition pour protester contre les décisions espagnoles ou européennes sur divers sujets, allant de la pêche à la question du Sahara occidental en passant par la corruption, ou pour obtenir des compensations politiques ou économiques, qui vont souvent de pair. Cette fois, c’est à cause de l’hospitalisation à Logroño de Brahim Ghali, président de la République arabe sahraouie démocratique et secrétaire général du Front Polisario.

    Rabat le fait parce que, comme Ankara, l’Europe lui a accordé ce pouvoir de chantage.
    Les autorités marocaines ont l’exemple de la Turquie. La guerre en Syrie a jeté des millions de réfugiés sur les routes et les Turcs ont appris en quelques mois qu’en plus d’être un pays de transit, ils pouvaient aussi être un pays de blocus en échange de l’argent européen. Beaucoup d’argent européen. Bruxelles a déboursé depuis 2015 plus de 3 milliards d’euros qui pourraient atteindre 6 milliards.

    En principe, ils doivent être dépensés pour contribuer à améliorer la vie des quatre millions de réfugiés syriens accueillis en Turquie. En 2020, la Turquie a de nouveau jeté des milliers de personnes vers le poste frontière terrestre traversant le fleuve Evros, à sa frontière avec la Grèce. En retour, il a reçu une visite d’Angela Merkel, davantage de fonds européens et le silence de l’Europe face à ses actions militaires dans le nord de la Syrie.

    Le quotidien « El País » rapporte vendredi que Bruxelles estime que le Maroc a reçu 13 milliards d’euros depuis 2007 dans divers « programmes de coopération, y compris ceux visant à améliorer le contrôle des flux migratoires ». Mais Rabat sait que s’il veut plus, il obtiendra plus, même si Bruxelles l’avertit maintenant qu’elle pourrait arrêter de transférer des fonds.

    L’Italien Mario Draghi a demandé hier, selon le quotidien français « Le Figaro », une augmentation des fonds européens. En outre, M. Draghi a également appelé à une réforme urgente de la directive européenne sur l’asile et plus particulièrement des accords dits de Dublin. Dans ces accords, il est établi que les demandeurs d’asile doivent demander l’asile dans le premier État membre où ils posent le pied. La grande majorité dans les pays du sud de l’Europe. Cette réforme, malgré les tentatives de Bruxelles, est bloquée depuis des années.

    La Turquie, et dans le cas espagnol le Maroc, ont le levier du chantage à portée de main pour cette externalisation du contrôle migratoire. En l’absence de voies légales de migration, ce sont leurs gouvernements qui retiennent les migrants et les demandeurs d’asile candidats au voyage vers l’Europe. Ce système présente des avantages évidents pour tous.

    Les gouvernements européens sont dispensés d’avoir à utiliser continuellement la main de fer et le « problème de la migration », qui remplirait le débat politique au profit de toute l’extrême droite européenne. L’Espagne, en raison de la situation géographique de Ceuta et Melilla, vit une situation différente car elle a une frontière terrestre avec l’Afrique, mais des pays comme l’Italie et la France ne voient arriver les migrants du sud que si les gouvernements du Maghreb le décident. Bruxelles sait que chaque fois qu’ils l’ont voulu, ils ont toujours contrôlé le départ des péniches. Les pays du Sud reçoivent des fonds qui sont officiellement destinés en partie à des programmes de contrôle des migrations, mais dont la destination finale est toujours difficile à déterminer.

    Le système génère également des problèmes évidents. La première et la plus grave est l’immense perte de vies humaines. Selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), entre 2014 et 2020, 20 550 personnes se sont noyées en tentant de traverser la Méditerranée. Les migrants sont utilisés comme objets d’extorsion.

    Les violations des droits de l’homme sont extrêmement graves. En Libye, l’Organisation des Nations unies pour les réfugiés a tout dénoncé, du viol systématique des femmes aux marchés aux esclaves. Le système encourage également, bien que l’on répète le contraire, le commerce des mafias de la traite des êtres humains, qui en seraient privées s’il existait des moyens légaux d’émigrer. En l’absence d’une telle solution, ce sont ces mafias qui organisent normalement les voyages. Et ceux qui les font payer.

    Enfin, le système donne aux pays du sud, pour l’instant le Maroc dans le cas de l’Espagne – dans le passé, via la route des Canaries, cela s’est également produit avec la Mauritanie et même le Sénégal – le pouvoir de décider quand ouvrir et quand fermer « le robinet ».

    Les fonctionnaires européens répètent en privé depuis des années que la solution est évidente mais politiquement toxique. Elle consiste, disent-ils, à retirer à des pays comme le Maroc et la Turquie le pouvoir de décider quand autoriser ou non les départs. Cela ne signifierait pas nécessairement une augmentation ou une diminution de la migration (le nombre d’arrivées pourrait augmenter, mais aussi le nombre de déportations), mais cela signifierait que les gouvernements européens devraient prendre en charge la gestion de leurs frontières.

    NIUS, 22 mai 2021

    Etiquettes : Maroc, Union Européenne, UE, Espagne, migration, frontières,

  • Israël / Palestine après le cessez-le-feu: que doit faire l’Europe?

    22/05/2021 – Blog HR / VP – Hier, un cessez-le-feu a commencé entre Israël et le Hamas après 11 jours de combats et un nombre inacceptable de victimes civiles. Nous devons maintenant nous assurer qu’il est mis en œuvre, puis en tirer parti pour résoudre le conflit sous-jacent. La sécurité à elle seule ne procurera pas la paix. Seule une solution politique négociée donnera aux Israéliens et aux Palestiniens la sécurité et la paix.

    Le début du cessez-le-feu est une étape très bienvenue. Il fait suite aux appels du secrétaire général de l’ONU, du président américain et de 26 des 27 États membres de l’UE. Il devrait mettre fin à l’horrible cycle de violence que nous avons vu et qui a commencé par des affrontements entre les Palestiniens et la police israélienne à Jérusalem-Est. La violence a fait plus de 200 morts à Gaza et en Cisjordanie, dont de nombreuses femmes et enfants, et au moins 10 morts en Israël, ainsi que des milliers de blessés. La tâche consiste maintenant à saisir cette occasion pour instaurer une paix authentique entre Israéliens et Palestiniens.

    Le rôle de l’UE
    En tant qu’Union européenne, nous sommes profondément touchés par le conflit, notamment en raison de nos liens historiques et étendus avec Israël et la Palestine. J’ai été très actif tout au long de cette crise pour tendre la main à tous les protagonistes, pour essayer de désamorcer les tensions et de promouvoir le cessez-le-feu.

    Compte tenu de l’urgence de la situation, j’ai convoqué une vidéo-conférence extraordinaire des ministres des Affaires étrangères de l’UE le 18 mai. Bien que nous devions reconnaître qu’il existe des nuances dans les positions des États membres – et que les différences ont tendance à attirer l’attention des médias – il y avait une large compréhension commune partagée par 26 des 27 États membres.

    Étant une réunion informelle, il n’y a pas eu de conclusions écrites. Mais mon principal point de départ de cet accord général, comme je l’ai expliqué à la presse, portait sur la nécessité urgente de mettre fin à la crise par un cessez-le-feu – que nous avons maintenant – mais aussi sur le fait qu’il devrait être pleinement mis en œuvre. Nous avons également souligné la nécessité d’un accès humanitaire; nous avons fermement condamné les attaques à la roquette du Hamas et d’autres groupes terroristes en Israël; nous avons reconnu le droit d’Israël à la légitime défense, tout en devant respecter la proportionnalité et le respect du droit international humanitaire; nous avons regretté la perte inacceptable de vies humaines, en particulier de femmes et d’enfants; conformément aux positions de longue date de l’Union européenne sur les colonies, nous avons rappelé l’importance de ne pas procéder à des expulsions à Sheikh Jarrah à Jérusalem-Est; et enfin nous avons appelé au respect du statut des lieux saints et à la garantie du droit au culte. Tout cela reste d’actualité.

    Au-delà de la crise: d’un statu quo intenable à une paix négociée
    Cependant, le point le plus important dont les ministres ont discuté est que nous devons non seulement mettre fin à cette vague de violence dans un «mode de gestion de crise», mais en fait résoudre le conflit sous-jacent. Car en fin de compte, une véritable sécurité pour Israël et la Palestine ne peut passer que par une paix réelle et une véritable solution politique et négociée. C’est précisément l’absence de tout progrès vers la solution à deux États, que la communauté internationale soutient depuis longtemps, qui a finalement créé la dernière recrudescence de la violence.

    Avec le calme relatif depuis 2014 et les accords conclus par Israël avec divers pays arabes ces dernières années, les soi-disant «accords d’Abraham» négociés par l’administration Trump, certains en Israël ont peut-être eu le sentiment que la question palestinienne était réglée et que le statu quo pourrait se poursuivre indéfiniment. Et certains ont certainement soutenu que le conflit israélo-arabe touchait à sa fin. Mais cela n’a rien fait pour le conflit israélo-palestinien, qui reste au cœur du problème. Comme mon ami Shlomo Ben Ami l’a écrit(le lien est externe) les accords d’Abraham ont donné l’impression que la cause palestinienne était morte, éloignée de la scène internationale. Des années auparavant, Simon Peres, un autre de mes amis, a déclaré qu’il n’aurait pas pu imaginer des ambassades de Russie et de Chine en Israël. Il serait encore plus surpris du niveau actuel de reconnaissance internationale.

    Nous avons assisté à des années de «négociations sur le processus de paix» qui, cependant, n’ont pas résolu le conflit, ni arrêté l’expansion des colonies de peuplement sur le territoire palestinien qui, en termes pratiques, sapent la solution que soutient la communauté internationale. Dans ce contexte, une stratégie de «sécurité maximale» semble fonctionner et permet à certains de prétendre que le problème palestinien est terminé. Mais les affrontements de ces dernières semaines, y compris les tensions qui ont émergé à l’intérieur même d’Israël, montrent que ce n’est pas le cas. En effet, la crise démontre que le statu quo n’est pas durable et qu’il n’y a pas d’alternative à une paix négociée, acceptée par toutes les parties.

    Maintenant qu’une trêve est en place, certains pourraient être tentés de «passer à autre chose» et de laisser de côté les causes sous-jacentes du conflit. Cela conduirait très probablement à de nouveaux cycles de violence qui ne feront que renforcer davantage les extrémistes. Il y a une différence importante entre une forme de sécurité à court terme assurée principalement par des moyens militaires et technologiques et une paix durable, émanant d’un accord. Faire respecter la sécurité sans la paix sous-jacente a un prix trop élevé et n’est de toute façon pas viable.

    Les murs et autres formes de séparation ne seront jamais assez hauts. En fin de compte, vous ne pouvez être prospère et en sécurité que si votre voisin est également prospère et en sécurité. Comme le disait Yitzhak Rabin: « Vous ne faites pas la paix avec vos amis, mais avec vos ennemis. »

    C’est pourquoi nous devons faire tout ce que nous pouvons pour trouver cette voie politique étroite: revenir à des négociations significatives pour une solution à deux États, sur la base des paramètres convenus au niveau international. C’est le seul moyen de garantir les droits et la sécurité des Israéliens et des Palestiniens. Nous aurons besoin de nombreuses étapes et de persévérance pour y parvenir, y compris des élections palestiniennes et des moyens convenus de mettre fin à l’isolement de Gaza.

    Cette année, nous marquerons le 30 e anniversaire de la conférence de paix de Madrid qui a lancé le processus menant aux accords d’Oslo. Ce sera une bonne occasion de «ré-internationaliser» le conflit israélo-palestinien. Il n’a peut-être pas le même rôle central stratégique qu’il avait dans le passé. Cependant, ce n’est pas une raison pour nous, Européens, de l’oublier et d’attendre une nouvelle tragédie.

    Il est vrai que nous avons déjà dit tout cela à maintes reprises. En effet, ce conflit a défié pendant des décennies les efforts internationaux de consolidation de la paix. Nous devons donc prouver que les sceptiques ont tort et s’engager de manière très concrète pour contribuer à la réalisation de cette solution négociée.

    Nous ne pouvons pas nous permettre l’impasse que nous traversons depuis des années. On ne peut pas s’attendre à ce que l’UE finance à nouveau la reconstruction de Gaza sans une perspective significative de résoudre réellement le conflit sous-jacent. Bien sûr, il y a de nombreuses raisons de douter que «cette fois sera différente». Mais nous avons le devoir d’essayer. Parce que s’en tenir à la voie actuelle signifiera certainement plus de cycles de violence.

    C’est pourquoi je ferai tout mon possible pour essayer de rouvrir l’espace des négociations et élaborer des mesures de confiance. Je suis en contact avec les principaux acteurs d’Israël, de Palestine, d’Égypte, de Jordanie, des États-Unis, etc. Il en va de même pour le représentant spécial de l’UE, Sven Koopmans, qui se rendra bientôt dans la région. De même, nous travaillons à relancer le Quatuor du Moyen-Orient (États-Unis, ONU, Russie et UE). Enfin, nous devons essayer de construire autant d’unité que possible entre les États membres de l’UE.

    Blog de Josep Borrell, 22 mai 2021

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  • Maroc-UE : Bruxelles hausse le ton

    Bruxelles revoit ses relations avec le Maroc après l’incident de Ceuta

    La Commission européenne considère que le gouvernement marocain semble avoir remis en question sa volonté de maintenir une relation privilégiée avec l’UE.

    L’Union européenne va revoir ses relations avec Rabat à la suite de la soudaine crise migratoire à Ceuta, qui aurait été délibérément provoquée par les autorités marocaines. Bruxelles estime que le gouvernement marocain semble avoir remis en question sa volonté de maintenir une relation privilégiée avec l’UE, telle qu’elle se développe depuis des années.

    Le haut représentant de l’UE pour la politique étrangère, Josep Borrell, a rencontré jeudi le ministre marocain des affaires étrangères, Naser Burita, et a eu « une discussion honnête », a déclaré vendredi une porte-parole de la Commission. La même source a déclaré que « l’idée est maintenant de discuter du partenariat avec le Maroc », tout en précisant que M. Borrell n’a pas discuté avec le ministre d’un éventuel gel des fonds européens.

    « Il est nécessaire pour Rabat de valoriser une relation aussi riche et nécessaire pour la modernisation et le développement du Maroc », a souligné une source diplomatique dans la capitale de l’UE. « Nous verrons si l’incident de Ceuta a un impact négatif sur un parcours qui se déroulait très bien », ajoute cette source.

    La Commission européenne, pour l’instant, a rappelé le Maroc à l’ordre et a prévenu que « les frontières espagnoles sont les frontières européennes ». Des sources communautaires ont également indiqué que Rabat a déjà été averti que la répétition d’incidents comme celui de Ceuta pourrait mettre en danger l’aide financière de plusieurs millions de dollars que l’UE offre au pays.

    « L’Espagne n’est pas seule, l’Espagne fait partie d’une Union et cette Union est mobilisée pour aider l’Espagne comme elle l’a fait avec la Grèce il y a quelques mois », a déclaré M. Borrell vendredi dans une interview sur RTVE. M. Borrell a rappelé que le Maroc reçoit d’importants fonds européens pour financer, entre autres, le contrôle des frontières et que cette aide provient, en partie, de la médiation espagnole.

    Les sources de l’UE précisent qu’ »il ne s’agit pas de prendre des mesures punitives contre le Maroc ». Mais ils soulignent que la relation bilatérale de l’UE avec le Maroc, comme avec tout autre partenaire ou voisin, est soumise à une coopération loyale de part et d’autre. « Le coût politique de ce qui s’est passé pour le Maroc est évident », souligne une source diplomatique.

    Malgré cela, l’Espagne préfère éviter les tensions entre Bruxelles et Rabat. Les sources espagnoles préconisent de « ne pas entrer dans une spirale d’action et de réaction ». L’Espagne considère que la réaction des institutions européennes, avec un soutien fermé contre le Maroc, a été très positive, « mais le message a déjà été clair et nous ne pensons pas que quelque chose de plus soit nécessaire ».

    Bruxelles, en revanche, semble déterminée à exploiter la crise pour faire avancer ses projets de politique migratoire commune et de contrôle partagé des frontières entre les autorités nationales et Frontex, l’agence européenne des frontières. Le vice-président de la Commission, Margaritis Schinas, insiste sur le fait que l’incident de Ceuta montre l’urgence d’approuver le pacte migratoire proposé par la Commission et rejeté par l’Espagne et les pays méditerranéens comme insuffisant. Frontex, pour sa part, a proposé dès le premier instant de venir en aide aux forces espagnoles pour renforcer le contrôle de la frontière avec le Maroc, une offre que l’Espagne a jusqu’à présent ignorée.

    El Pais, 22 mai 2021

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  • Maroc-Espagne : Si un pays rompt un accord, il est normal qu’il y ait des « conséquences » (Josep Borrell)

    Borrell : si un pays rompt un accord, il est normal qu’il y ait des « conséquences ».

    Bruxelles, 21 mai (EFE). – Le Haut représentant pour la politique étrangère de l’Union européenne, Josep Borrell, a estimé aujourd’hui qu’il était « normal » que si un pays rompt un accord de coopération avec l’UE, il y ait des « conséquences », en référence à la récente crise diplomatique et migratoire avec le Maroc.

    « Il est normal que l’Union européenne se mobilise politiquement » lorsqu’il y a des problèmes à ses frontières extérieures et « soulève qu’il y a des accords d’association qui, s’ils sont rompus d’un côté, devraient avoir des conséquences pour l’autre », a déclaré dans une interview à EFE le chef de la diplomatie de l’UE, qui s’est montré favorable à la « reconstruction » de la coopération avec le Maroc.

    Source : EFE, 22 mai 2021

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  • Algérie-Maroc: Hirak, Rabat-Madrid et le chantage migratoire

    par Hassan Zerrouky

    Avant d’aborder le Hirak, un mot sur la tension entre Rabat et Madrid. Mohammed VI prend-il exemple sur Erdogan : ce dernier avait menacé l’Union européenne (UE) de laisser passer des dizaines de milliers de migrants, syriens et autres, vers l’Europe si les Européens ne sortaient pas le carnet de chèques.

    Les faits. Dans la nuit de lundi à mardi, Ceuta, l’enclave espagnole située en territoire marocain mais dont Rabat n’a jamais exigé le rattachement au Maroc, a été submergée par quelque 8 000 harragas marocains — dont plus de 1 500 mineurs — à pied et à la nage, que les forces marocaines ont laissé passer.

    La raison de cette passivité marocaine ? L’hospitalisation du dirigeant du Polisario, Brahim Ghali, à Madrid pour cause de Covid-19. Déjà brouillée avec l’Allemagne qui s’est prononcée pour le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination, Rabat veut faire pression sur l’UE, via Madrid, afin que cette dernière suive l’exemple des États-Unis qui, sous Donald Trump, ont reconnu la marocanité du Sahara Occidental.

    Mais voilà. Quoique Rabat dispose en la France de Macron d’un solide allié, l’UE ne semble pas disposée, du moins pour le moment, à subir le chantage marocain. Bien qu’il ait normalisé ses relations avec Israël, le Maroc n’est pas la Turquie. Ankara et Rabat ne jouent pas dans la même division. La Turquie, 17e puissance économique au monde, membre du G-20, est aussi la 2e puissance militaire de l’Otan. Ce n’est pas le cas du Maroc. C’est là toute la différence.
    Venons-en rapidement au Hirak. Le mardi des étudiants n’a pas eu lieu. C’est qu’il s’est passé plein de choses depuis que le ministère de l’Intérieur a décidé de soumettre les marches du vendredi à une « autorisation préalable » formulée par ses organisateurs ! Ce qui revient à neutraliser de fait toute manifestation. Premier effet de ce tour de vis, la marche de vendredi passé a été étouffée dans l’œuf, les arrestations et les condamnations ont été plus nombreuses que d’habitude. Reste que manifester un vendredi, 2e jour de l’Aïd, n’était sans doute pas la chose la mieux indiquée. Et pour cause, la mobilisation n’était pas au rendez-vous.

    Certes, des voix se sont élevées pour affirmer que les Algériens n’avaient pas sollicité d’autorisation préalable pour « dégager » Bouteflika ! Mais, rétorque-t-on, c’était une autre époque. Ce temps-là est fini. Place aux élections législatives du 12 juin. Une date à laquelle, à en croire Soufiane Djillali, « aura lieu le début du changement et non le changement » !

    Autre constat : demander une autorisation pour manifester en indiquant ce que les gens vont scander dans la rue est impossible. Les autorités savent que ce qui caractérise le Hirak, c’est son horizontalité. Ce n’est pas un mouvement vertical, structuré et hiérarchisé. Personne ne peut parler en son nom et prétendre le représenter au risque de se faire rabrouer. Il n’a ni chef ni leader en lesquels les manifestants s’identifient. Si tel avait été le cas, un dialogue pour une issue positive à la crise aurait été possible entre le pouvoir et ses représentants supposés.

    Le Hirak, avec ses excès comme il y en a dans toute manifestation populaire dans le monde, reste un courant d’opinion. Au-delà de la question de savoir s’il est représentatif ou non d’un courant d’opinion majoritaire, il n’en reste pas moins qu’il est la manifestation visible d’une vraie fracture entre une partie importante de la société algérienne et les institutions censées la représenter. Le Hirak pose un problème politique. Le nier n’aide pas à faire avancer les choses.

    Un mot pour finir, sur l’image que renvoient de l’Algérie ces interpellations, gardes à vue prolongées, condamnations et placements sous contrôle judiciaire de journalistes connus et de personnalités parmi lesquelles l’astrophysicien de renommée internationale Jamel Mimouni. C’est un mauvais signal donné à l’international et à ces jeunes chercheurs algériens qui ont fait le choix de travailler en Algérie. L’Algérie n’est certes pas la Birmanie, mais quand c’est l’ONU qui interpelle pour la deuxième fois les autorités algériennes sur les droits de l’Homme et la liberté d’expression, la sagesse doit prévaloir. Dans ce registre, Alger doit donner l’exemple comme elle l’avait fait dans les années 70 en matière de soutien aux mouvements de libération.
    H. Z.

    Le Soir d’Algérie, 22 mai 2021

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  • Le Maroc n’apprécie pas les rapports déséquilibrés Nord-Sud

    La question migratoire vue du Maroc, de Tunisie et de Turquie

    Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd’hui, direction le Maroc, la Turquie et la Tunisie, qui utilisent chacun à leur manière la question des migrants dans leurs relations avec leurs voisins européens.

    Huit mille migrants clandestins au moins ont franchi en début de semaine la frontière entre le Maroc et l’enclave espagnole de Ceuta. Cet afflux a été qualifié d’ »agression » par l’Espagne qui accuse Rabat de « chantage ».

    Le Maroc n’apprécie pas les rapports déséquilibrés Nord-Sud

    La colère, au Maroc, grondait déjà depuis quelques mois dans la région frontalière de Ceuta. La question sociale est d’ailleurs la première raison qui a provoqué cette marée humaine vers l’enclave. Les habitants des villes frontalières des enclaves espagnoles ont un statut à part. Ils étaient autorisés à entrer et à sortir librement. La plupart vivaient de commerce et surtout de contrebande. C’était avant la crise du Covid-19, qui a imposé la fermeture des frontières et plongé des populations entières dans la misère.

    Le relatif laissé faire des autorités marocaines laisse penser à un chantage à l’immigration. Officiellement, il n’y a pas de lien entre cette crise des migrants et la crise diplomatique entre le Maroc et l’Espagne. Mais il est certain que Rabat est furieuse contre Madrid. L’Espagne a accueilli Brahim Ghali, chef du Front Polisario, sous une fausse identité, et en essayant de cacher l’information à son voisin du Sud. Le ministre marocain des affaires étrangères et l’ambassadrice à Madrid ont appelé l’Espagne à assumer ses responsabilités.

    Il ne s’agit donc pas d’un chantage pour obtenir des fonds européens, comme cela a pu être le cas pour la Lybie de Kadhafi ou la Turquie d’Erdogan. Rabat tape du poings sur la table car elle n’apprécie pas ces rapports déséquilibrés Nord-Sud. Des rapports dans lesquels les pays européens sont gourmands de coopération judiciaire, policière pour lutter contre le terrorisme par exemple, ou de coopération commerciale qui ouvre les eaux marocaines aux bateaux espagnols. Mais des rapports dans lesquels, l’Espagne, premier partenaire du Maroc, tire avantage tout en apportant son soutien implicite aux ennemis de l’intégrité territoriale du royaume.

    L’Italie veut que Tunis fasse barrage aux migrants

    La ministre italienne de l’Intérieur Luciana Lamorgese et la commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson, se sont rendues jeudi 20 mai en Tunisie, pour proposer de l’aide économique en échange d’un effort accru de Tunis pour empêcher les migrants d’arriver en Europe. L’Italie est l’un des principaux points d’entrée en Europe pour les migrants en provenance d’Afrique du Nord. Et au moins 685 migrants ont péri depuis le 1er janvier en Méditerranée, dont la grande majorité sur cette route centrale considérée comme la plus meurtrière du monde, selon l’ONU.

    Mais difficile d’imaginer des intérêts plus divergents. D’un côté : la ministre italienne qui a vu depuis le début de l’année plus de 13 000 migrants arriver sur son sol, soit trois fois plus que l’an dernier à la même période, dont une majorité de Tunisiens. De l’autre côté, la Tunisie, qui n’a peut-être jamais autant souffert d’un point de vue économique. L’Europe – Italie en tête – veut que Tunis bloque les migrants sur son sol, y compris les migrants subsahariens qui transitent par la Tunisie. Réponse du Premier ministre tunisien : « L’immigration ne devait pas être considérée comme une menace ». En langage moins diplomatique, cela signifie que la liberté de circulation est un droit fondamental. Que si les Européens viennent librement en Tunisie, les Tunisiens doivent pouvoir se rendre en Europe sans risquer de mourir. Et puis, les autorités tunisiennes refusent de devoir gérer les migrants subsahariens sauvés en mer ou qui transitent par la Tunisie vers l’Europe. Elles ont d’ailleurs réitéré leur refus de créer plus de centres d’hébergements pour migrants.

    Mais la ministre de l’intérieur italienne a les moyens de faire pression parce que l’économie tunisienne est à terre. Tunis va tenter d’obtenir de l’Italie de l’argent en échange de garde-côtes plus performants. C’est l’éternel remède sauf qu’il ne résout en rien le problème. La ministre de l’Intérieur italienne est déjà venue à Tunis l’an dernier. Dans l’intervalle, les tentatives de traversées de la Méditerranées ont tout simplement explosé.

    En Turquie, premier pays d’accueil de réfugiés au monde avec au moins 3,7 millions de Syriens enregistrés, le contrôle des frontières est aussi une affaire politique. En mars 2016, l’Union européenne et la Turquie ont signé un accord qui engage cette dernière à garder les réfugiés chez elle en échange d’un soutien financier de plusieurs milliards d’euros. Ce « pacte migratoire » est toujours en vigueur mais la Turquie, depuis le début, l’utilise pour faire pression sur les dirigeants européens. Et elle est d’autant plus consciente qu’il s’agit d’un moyen de pression que cet accord a été signé pour répondre à la crise migratoire de 2015, quand des centaines de milliers de personnes étaient entrées en Europe depuis le territoire turc.

    En Turquie, les réfugiés syriens contribuent aussi à l’économie du pays

    Alors en effet, la Turquie a rempli sa part du contrat, puisque les départs ont considérablement diminué après la signature. Mais le président Erdogan a aussi fait savoir très tôt qu’il pourrait rouvrir les frontières s’il estimait que l’Europe ne l’aidait pas assez. C’est ce qu’il a fait – ou tenté de faire – en février 2020. Des milliers de migrants ont accouru à la frontière terrestre entre la Turquie et la Grèce quand Tayyip Erdogan a prétendu que les portes de l’Europe étaient ouvertes. En réalité, très peu ont réussi à passer par la route. Reste la voie maritime – celle qui a déjà tellement tué. Mais si Recep Tayyip Erdogan ordonnait à ses garde-côtes de fermer les yeux sur les passages en mer Egée, il aurait du mal à se justifier du drame humain qui en découlerait.

    Le président turc accuse l’Europe de ne pas encore avoir versé la totalité des six milliards d’euros promis, tandis qu’Ankara aurait dépensé des dizaines de milliards d’euros pour accueillir les Syriens. Pour mieux mettre en avant leur générosité, les autorités turques ont en effet tendance à présenter les Syriens comme un fardeau qu’elles porteraient seules ou presque.

    Il est très rare que des officiels soulignent la contribution des réfugiés à l’économie. Or cette contribution est réelle. L’Union des chambres et des bourses de Turquie estime par exemple que les Syriens ont investi environ 7 millions de dollars dans des entreprises turques sur les trois premiers mois de l’année. Selon les derniers chiffres officiels, près de 14 000 sociétés établies en Turquie ne comptent que des associés syriens. Quand on discute avec eux, les entrepreneurs, les commerçants et même les salariés syriens qui travaillent ici légalement regrettent que la Turquie les présente uniquement comme une charge, alors qu’ils payent des impôts, créent de la richesse et consomment comme les Turcs. Les Syriens sont nombreux à estimer qu’un changement de discours aiderait à améliorer leur image dans l’opinion publique, globalement très hostile à leur présence.

    Franceinfo, 20 mai 2021

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  • Afflux de migrants marocains vers l’Espagne: Sévère rappel à l’ordre du Maroc

    L’arrivée, lundi, de 6000 migrants marocains sur les côtes de Ceuta en Espagne, a suscité, mardi, une large vague d’indignation auprès du gouvernement espagnol, de l’Union européenne et des formations politiques, appelant le Maroc à « respecter ses engagements et à fournir d’avantage d’efforts en matière de lutte contre le phénomène de la migration clandestine ». Le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a, après avoir qualifié l’afflux de migrants marocains de « crise grave pour l’Espagne et l’Europe », a promis de « rétablir l’ordre (…) dans (la) ville et aux frontières le plus rapidement possible », notant qu’il se rendra sur place. L’Union européenne a condamné, pour sa part, vivement l’afflux de migrants marocains, jugeant la situation « d’inquiétante ». « Il est inquiétant qu’au moins 6.000 personnes, dont un grand nombre d’enfants, aient rejoint Ceuta à la nage, en mettant leur vie en danger. Beaucoup ont dû être secourus, une personne est morte », a déclaré la Commissaire aux Affaires intérieures, Ylva Johansson, rappelant que « les frontières espagnoles sont les frontières de l’Europe ».

    De leur coté, plusieurs formations politiques espagnoles ont condamné le flux migratoire partant du Maroc, appelant les autorités marocaines à assumer leurs responsabilités et agir vite et efficacement. Le porte-parole de la Coalition Caballas, Mohamed Ali, a mis en garde contre la « gravité » de ce qui s’est passé et a annoncé qu’il serait à la disposition du gouvernement de Ceuta pour exiger que le gouvernement accorde la « plus grande attention » à Ceuta.
    « Notre terre ne devrait pas souffrir du différend de politique étrangère entre l’Espagne et le Maroc », a-t-il déclaré.
    La dirigeante du Mouvement pour la dignité et la citoyenneté « MDyCà, Fatima Hamed, a qualifié ce qui vient de se produire de « drame », soulignant que la ville de Ceuta n’est pas prête à accueillir autant de monde et à faire face à un tel phénomène. »Ceuta n’est pas préparée à des situations pareilles », a-t-elle déclaré sur son compte Twitter, critiquant l’Union européenne, « pour ne avoir pris les mesures nécessaires pour y faire face ». De son côté, la section du parti Vox à Ceuta a sévèrement critiqué la passivité des autorités marocaines face à un tel drame, appelant le gouvernement à dépêcher « d’urgence l’armée et de la marine à la frontière avec le Maroc pour freiner la pression migratoire ».

    Politique de chantage

    Le président de Vox Ceuta, Juan Sergio Redondo, a rappelé que sa formation n’a jamais cessé de mettre en garde contre le « chantage du Maroc », rappelant que l’Espagne devrait dénoncer le Maroc devant les instances internationales pour que le pays soit sanctionné économiquement et politiquement ».

    Le chef du Parti populaire au niveau national, Pablo Casado a, après avoir, condamné l’afflux des migrants marocains, a appelé le gouvernement espagnol « à garantir immédiatement l’intégrité des frontières et à coordonner avec le Maroc le retour des immigrés dans leur pays ». Les relations diplomatiques entre l’Espagne et le Maroc se sont tendues depuis l’accueil en Espagne, fin avril, du président sahraoui et chef du Front Polisario, Brahim Ghali, venu pour des soins. La baisse de vigilance des gardes- côtes marocains au niveau des frontières avec l’Espagne est, pour beaucoup d’observateurs, « une façon pour le Maroc de dénoncer l’attitude du gouvernement Espagnol ». La ministre espagnole des Affaires étrangères a précisé encore une fois que l’accueil en Espagne du président sahraoui Brahim Ghali, était pour des soins, dénonçant implicitement les autorités marocaines. « Je ne conçois pas que l’on puisse mettre en danger la vie de mineurs dans la mer comme nous l’avons vu ces dernières heures à Ceuta », que cela puisse être « une réponse à une action humanitaire », a déclaré Arancha Gonzalez Laya dans une interview tard lundi soir à la radio Cadena Ser.

    Le Maghreb, 20 mai 2021

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  • La poudrière du Maroc, la faiblesse de l’Espagne et le champ de mines du Sahara

    Les relations avec le Maroc ont marqué une grande partie de l’histoire récente et moins récente de l’Espagne. Au cours du XXe siècle, la gestion des affaires avec le Maroc a directement influencé la politique espagnole. Un voisin complexe qui ne peut être évité car la géographie règne en maître en politique internationale. Pour ne pas revenir sur le désastre d’Anoual, Alphonse XIII, les soldats africanistes et les conséquences qu’il a provoquées, il est toujours bon de garder à l’esprit dans ce puzzle complexe « La Marche Verte » et les revendications historiques de la prétendue marocanité de Ceuta et Melilla.

    Les revendications du Maroc sur ces territoires ont été utilisées par la monarchie alaouite comme une ressource dialectique à laquelle recourir lorsque sa situation interne devenait compliquée. Bien sûr, elle a toujours su profiter des situations extérieures favorables et de la faiblesse de l’ennemi pour attirer l’attention, en pivotant entre l’Espagne, l’Algérie et, dans une moindre mesure, la Mauritanie.

    En 1975, la situation politique de l’Espagne est extraordinairement faible avec l’agonie du régime franquiste et les tensions provoquées par l’incertitude que la situation génère en Espagne. Le Maroc a profité de ce contexte pour lancer une stratégie militaire, que l’on appelle aujourd’hui une stratégie hybride, consistant à créer ce que l’on appelle une zone grise.

    Cette stratégie consiste à créer les conditions pour obtenir des avantages politiques, militaires ou économiques qui génèrent une situation de conflit qui ne franchit pas les limites du droit international et ne devient pas une guerre ouverte, mais qui conditionne les décisions internationales en faveur de celui qui déploie cette stratégie.

    Un territoire qui n’a jamais fait partie du Royaume du Maroc
    A cet égard, la marche entreprise par des milliers de Marocains sur un territoire qui, ni à l’époque, ni avant, ni jamais auparavant, n’avait fait partie du royaume du Maroc, a créé les conditions pour articuler cette revendication « historique ».

    L’Espagne, les Sahraouis et la communauté internationale ne se sont pas remis des erreurs de cette époque, et les résolutions des Nations Unies n’ont jamais été respectées, de sorte que l’abandon du droit et de la politique internationale a conduit à la consolidation d’un « droit » de considérer le Sahara Occidental comme faisant partie du Maroc qui a déjà été approuvé par plusieurs pays.

    Mais ce qui a définitivement réactivé cette position alaouite est la reconnaissance par l’ancien président américain Donald Trump, le 10 décembre dernier, de la souveraineté marocaine sur le territoire revendiqué, avec l’intention claire que le Maroc, en retour, normalise ses relations avec Israël.

    Une fois de plus, en dehors du droit international, la force des événements a réactivé sur l’agenda mondial une question qui s’était figée.

    La politique de Biden ne change pas par rapport à celle de Trump.
    La politique du nouveau président, Joe Biden, en ce qui concerne le Maroc, n’a pas changé. De plus, il a renforcé son soutien par des manœuvres militaires conjointes au plus haut niveau en mars dernier et par l’attitude de son secrétaire d’État certifiant son soutien à la revendication marocaine du Sahara occidental face aux événements à la frontière européenne de Ceuta.

    Dans le scénario actuel, il est plus important pour les Etats-Unis de maintenir un allié musulman dans son soutien à Israël que de défendre l’application des résolutions des Nations Unies sur le Sahara.

    Le Maroc en est conscient et agit apparemment avec le soutien implicite et explicite de Washington. Aujourd’hui, il a une fois de plus créé une zone grise, a baissé sa garde à sa frontière avec l’Espagne et l’Europe pour encourager un exode massif de migrants désespérés à la recherche d’un avenir meilleur en Europe.

    Elle est à la limite du respect des accords avec l’Espagne pour la surveillance des frontières, en représailles pour avoir accueilli le leader du Front Polisario Brahim Ghali dans un hôpital de Logroño. Il suffit de lire les déclarations de certains ministres marocains et de leur ambassadeur en Espagne.

    Nous n’avons aucune donnée pour savoir si le gouvernement espagnol a mesuré suffisamment bien le poids que la position marocaine a aujourd’hui par rapport au Sahara Occidental, ni s’il connaissait en détail, je suppose que oui, la situation explosive du nord du Maroc, qui a été aggravée par la crise économique générée par la pandémie et avec des résultats catastrophiques sur la jeunesse marocaine déjà faible.

    Avec Mohammed VI, oui, mais pas avec Pedro Sánchez.
    Il y a un fait indiscutable, le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, n’a pas eu de conversation avec le président américain depuis le 20 janvier. Lors de sa tournée de salutations après son arrivée à la Maison Blanche, l’Espagne n’a pas été à l’ordre du jour, bien qu’elle soit la quatrième économie de l’UE et l’une des principales économies de taille moyenne au monde.

    Autre fait de l’histoire récente : Biden a rencontré Mohammed VI par le passé au sujet du Sahara, présentant le Maroc comme un exemple de progrès démocratique. Des secteurs influents du Parti démocrate soutiennent la position du roi alaouite, bien que d’autres membres du Congrès se soient également prononcés en faveur du statu quo des Nations unies. En tout cas, le Maroc reste silencieux sur le bombardement de Gaza.

    La revendication de Ceuta et Melilla
    Une fois de plus, le Maroc a utilisé la stratégie de la zone grise, comme l’avait suggéré Josep Baqués en novembre dernier. Cette stratégie peut être plus poussée et ne pas se limiter au Sahara, mais peut viser à long terme une aventure d’annexion des deux villes sous souveraineté espagnole.

    Ni le droit international, ni l’histoire, ni les relations de bon voisinage ne jouent en sa faveur, mais l’objectif du Maroc de devenir la principale puissance d’Afrique du Nord et de consolider l’autorité de sa monarchie face à tout signe de faiblesse interne (et il pourrait y en avoir beaucoup) le pousse dans cette direction.

    Si c’est la voie qu’il emprunte, le scénario peut lui être favorable. L’incapacité de l’Europe à réagir rapidement et énergiquement en adoptant des mesures équilibrées de sanction et de réponse pour défendre ses frontières en réponse à l’attitude compromettante du Maroc, la faiblesse et la polarisation de la politique espagnole affligée par un manque de consensus sur les questions d’État, même les plus élémentaires, La politique internationale incluse, la fragilité de la structure territoriale interne de l’Espagne, le soutien de l’Amérique à un allié musulman favorable à la cause israélienne et la gestion des flux migratoires et le contrôle du fondamentalisme et des routes du trafic de drogue sont autant de facteurs qui jouent en faveur de cette entreprise.

    Le Maroc n’est pas pressé, mais il a les conditions et la volonté de renforcer sa zone grise.

    The Conversation, 19 mai 2021

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  • Bruxelles appelle le Maroc à empêcher les départs de migrants

    La commissaire européenne, Ylva Johansson, a jugé hier “inquiétant” l’afflux de quelque 6 000 migrants la veille dans l’enclave espagnole de Ceuta et appelé le Maroc à empêcher les “départs irréguliers” depuis son territoire.

    “Il est inquiétant qu’au moins 6 000 personnes, dont un grand nombre d’enfants, aient rejoint Ceuta à la nage, en mettant leur vie en danger. Beaucoup ont dû être secourus, une personne est morte”, a déclaré la commissaire aux Affaires intérieures devant le Parlement européen.

    “Le plus important maintenant, c’est que le Maroc continue à s’engager à empêcher les départs irréguliers, et que ceux qui n’ont pas le droit de rester soient renvoyés de façon ordonnée et efficace. Les frontières espagnoles sont les frontières de l’Europe”, a-t-elle poursuivi.

    De son côté, le ministre espagnol de l’Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, a annoncé que son pays avait renvoyé au Maroc 1 500 des quelque 6 000 migrants entrés à Ceuta et continuait ces renvois.

    APS

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  • Ceuta : Les 8.000 migrants ne représentent qu’un «tir de sommation» du Maroc

    8000 migrants débarquent dans la ville espagnole de Ceuta en 24 heures

    Le vil chantage marocain
    Le but de Rabat est d’exploiter l’ «affaire Ghali» pour forcer la main à l’Espagne et l’amener à céder sur le dossier du Sahara occidental.

    En plus d’être un narco-royaume et premier producteur mondial de kif qui inonde la planète, le Maroc semble avoir découvert son autre «profil», celui que lui donnent, bien malgré eux, les migrants clandestins. Rabat a, en effet, fait étalage de sa «puissance» à l’occasion d’un différend qui l’oppose à Madrid sur la question du Sahara occidental. Le mode opératoire est détestable pour tout Etat digne de ce nom, mais néanmoins efficace. Il a suffi au Maroc de desserrer l’étau sur les dizaines de milliers de migrants clandestins qu’il «garde en stock» pour que ces derniers se ruent sur la petite enclave espagnole de Ceuta. Plus de 8 000 migrants ont débarqué à Ceuta en 24 heures, encouragés par le Makhzen qui a vu dans ce «déferlement» un moyen de pression sur l’Espagne. Son entreprise a porté ses fruits puisque le gouvernement espagnol s’est réuni, hier, en urgence pour étudier la grave situation à sa frontière avec le Maroc. Les 8.000 migrants ne représentent qu’un «tir de sommation» de Rabat.

    À l’origine de cette crise où le Maroc montre son véritable visage d’Etat voyou qui marche sur les principes humains les plus élémentaires, l’arrivée le mois dernier en Espagne du président sahraoui, Brahim Ghali, pour des soins.

    Les autorités espagnoles évoquaient depuis quelques jours «plusieurs menaces quasiment ouvertes de la part de représentants marocains, selon lesquelles ils pourraient utiliser la carte du contrôle de l’immigration si l’Espagne ne revenait pas sur sa décision d’héberger Ghali», avait indiqué la ministre des Affaires étrangères, Fernandez Molina. Ce n’était donc pas des menaces en l’air, puisque le Maroc a mis son plan à exécution en «noyant» Ceuta sous un flux impressionnant de migrants subsahariens. «Quand les relations sont bonnes, les frontières se contrôlent; quand elles se tendent, on utilise la carte migratoire pour faire pression sur l’Espagne. C’est une constante. Nous le vivons depuis des décennies», rappelle Eduard Soler, expert de l’Afrique du Nord au Centre des affaires internationales de Barcelone», cité par l’AFP.

    Madrid voit clair dans le chantage du Makhzen et affirme par le biais de sa ministre des Affaires étrangères que la présence de Brahim Ghali en Espagne n’a été qu’un «prétexte». Tir de semonce ou ballon-sonde, le Maroc a sérieusement ébranlé ses rapports avec un pays de l’Union européenne. Par cette opération de «brigandage» d’Etat, Rabat donne un signal aux Européens sur son changement de statut. Le soutien ouvert de l’entité sioniste donne au Maroc l’opportunité de viser très haut. Le «prétexte» évoqué par Mme Molina poursuit l’objectif de Rabat d’amener l’Espagne et la France à reconnaître la marocanité du Sahara occidental sur les pas de Donald Trump. «Il y a eu une pression vraiment très forte (du Maroc) sur des pays comme l’Espagne et la France pour qu’ils changent leur position et suivent l’exemple américain», affirme-t-elle.

    Sachant la dépendance de l’Europe du Sud sur la question des migrations, le but de Rabat est d’exploiter l’«affaire Ghali» pour forcer la main à l’Espagne et l’amener à céder sur le dossier du Sahara occidental. En d’autres termes, le Maroc appuie là où ça fait mal. Il est clair que dans cette séquence hispano-marocaine, il y a une véritable agression contre un Etat souverain pour le forcer à changer de politique à l’égard d’une question d’autodétermination reconnue en tant que telle par la communauté internationale. Si l’on considère que «sans la collaboration du Maroc dans le contrôle migratoire, l’Espagne a un problème», et donc que ce pays doit céder aux caprices d’un Etat voyou, la légalité internationale est foulée aux pieds. L’Europe laissera-t-elle le Maroc dicter sa loi? L’entité sioniste n’est pas loin…

    L’Expression, 19 mai 2021

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