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  • Risque de guerre énergétique mondiale

    Risque de guerre énergétique mondiale

    Russie, Ukraine, Etats-Unis, Gaz, Nordstream, Espagne, France, Italie, Algérie, Union Européenne,

    Heureusement, les fanfaronnades inquiétantes sur la possibilité d’utiliser des armes nucléaires tactiques dans la guerre en Ukraine se sont apaisées, du moins pour le moment.

    Heureusement, les fanfaronnades inquiétantes sur la possibilité d’utiliser des armes nucléaires tactiques dans la guerre en Ukraine se sont apaisées, du moins pour le moment. Nous sommes confrontés à un conflit prolongé parce qu’il a déjà plus de six mois et qu’il faut au moins un autre moyen pour que les négociations de paix souhaitables arrivent à maturité. Ce ne sera pas – espérons-le – un conflit armé mondial comme en 1914 et 1940 mais une sorte de guerre mondiale de l’énergie dans laquelle nous entrons déjà. En tant que victimes privilégiées, dans le rude hiver qui s’annonce, les classes les plus défavorisées et les entreprises risquant de fermer en raison des prix insupportables de l’énergie sont esquissées.

    Dans une guerre conventionnelle, les jalons pertinents sont les bombardements massifs ou l’utilisation d’armes dévastatrices. Dans ce type de conflit, l’équivalent du bombardement des grandes villes est la fermeture par la Russie du gazoduc Nord Stream alléguant des fuites auxquelles personne ne croit ; ou une spirale accélérée des prix du pétrole, de l’électricité et du gaz qui déclenche l’inflation dans tous les pays… Les premières détonations se font déjà entendre. Ce n’est que le début.

    D’autres armes sensibles arriveront, selon la stratégie de Vladimir Poutine ; à savoir, des manifestations populaires appelant les gouvernements occidentaux à forcer Zelensky à admettre la perte d’une partie du territoire ukrainien à la table des négociations. Tout pour arrêter la torture au gaz russe.
    Dans cette guerre mondiale de l’énergie, la valeur de pays comme l’Algérie, pratiquement marginalisés jusqu’à il y a quelques mois, explose sur le marché boursier géostratégique. Aujourd’hui, Alger est un lieu de pèlerinage pour des dirigeants comme l’Italien Mario Draghi ou le Français Macron, désireux de s’assurer la manne gazière que l’Espagne monopolisait jusqu’alors. En raison de l’extension à l’Amérique des conséquences de cette guerre menée en Europe, les actions des sociétés d’armement montent, le prix du gaz liquéfié transporté vers l’Europe s’envole et la diplomatie de Washington relâche sa pression sur le régime américain Maduro parce que son pétrole est maintenant plus stratégique qu’avant.

    Au sein de l’Union européenne, les tensions se font sentir. La Commission veut des pouvoirs spéciaux en cas d’aggravation de la situation pour intervenir sur le marché de l’électricité et des produits essentiels. Tous les pays ne sont pas d’accord. La France continue de refuser un nouveau gazoduc pour traverser son pays de l’Espagne à l’Allemagne comme l’ont demandé il y a quelques jours le chancelier allemand Olaf Scholz et le président espagnol Pedro Sánchez. L’invitation inhabituelle de Scholz à Sánchez pour participer à une réunion stratégique de son gouvernement n’a de précédent que dans une invitation d’Ángela Merkel à Enmanuel Macron. Dans ce dossier énergétique, il y a un axe Berlin-Madrid-Lisbonne avec le soutien non dissimulé de Bruxelles, par la présidente Úrsula von der Leyen et avec Josep Borrell à la tête de la politique étrangère.

    La paix intérieure règne toujours dans l’Union européenne et les difficultés post-Brexit dissipent toute tentation de fuite. Mais les élections italiennes de ce mois-ci, qui pourraient porter au pouvoir l’extrême droite Giorgia Meloni, vont faire bouger les choses. En Italie, la sympathie pro-russe est perceptible, et Poutine pourrait trouver des alliés inattendus dans son défi énergétique.

    En Espagne, il faut revoir l’histoire récente et se demander quels ministres, et à qui ils ont servi, ont coupé court au développement phénoménal des énergies renouvelables dont même Obama a fait l’éloge. Nous serions désormais dans des conditions extraordinaires pour faire face à cette guerre énergétique mondiale qui nous menace.

    Manuel Campo Vidal, Journaliste

    La Comarca, 07/09/2022

    #Russie #Ukraine #Etats_Unis #Gaz #Nord_stream #Algérie

  • La Féderation de Russie et le retour d’une grande puissance

    La Féderation de Russie et le retour d’une grande puissance

    Russie, Occident, OTAN, Etats-Unis, Union Européenne, URSS, Union Soviétique, KOSOVO, Géorgie, Ossétie du Sud, Abkhazie, Libye, Syrie,

    Introduction

    Si aujourd’hui, il est convenu que la crise ukrainienne marque une nouvelle étape dans les relations entre la Russie d’un côté et les Etats unis et l’Union européenne de l’autre, il n’en demeure pas moins que Moscou a constamment cherché à retrouver son prestige de grande puissance internationale. Aujourd’hui, les observateurs internationaux sont unanimes sur fait que Moscou n’est plus disposée à se contenter d’un rôle secondaire sur la scène politique internationale.

    D’aucuns aiment à penser qu’il ne s’agit que d’un sursaut d’orgueil national éphémère, car la Russie ne possèderait plus les moyens de ses ambitions. D’autres estiment que, loin d’être un trouble fête, Moscou est en passe de redevenir un véritable poids lourd de la géopolitique avec lequel l’occident devra composer.

    De 1991 à 2000:

    La Russie se recherche

    1. Situation intérieure

    L’effondrement de l’URSS s’est accompagné de l’indépendance des 15 républiques qui constituaient l’union. La Russie a hérité de la majeure partie du territoire, de tout l’arsenal nucléaire, d’une grande partie des secteurs industriel et agricole et du siège de la défunte union au sein des instances internationales, y compris celui de membre permanent au Conseil de Sécurité. Mais Moscou a également hérité des passifs financiers et des dettes de l’ex URSS.

    Sous Boris Eltsine, le pays a connu une première décennie difficile, marquée par la montée des inégalités et du chômage. La corruption et les mafias se sont généralisées et les problèmes sociaux ont explosé.
    Le passage brutal à l’économie de marché, les privatisations massives peu transparentes, les crises politiques à répétition, les guerres médiatiques et une gestion hasardeuse des dépenses ayant conduit au krach boursier de 1998 ont caractérisé cette décennie.

    La quasi-débâcle de l’armée russe durant la première guerre de Tchétchénie (1994-1996) n’était pas pour rassurer sur l’image du pays.

    2. Relations extérieures

    La Russie a tenté, tant bien que mal, de maintenir une présence sur la scène internationale et de donner l’image d’un unificateur. La Communauté des Etats Indépendants (CEI) a été fondée entre la Russie, l’Ukraine et la Biélorussie avant de s’élargir à huit autres anciennes républiques de l’ex-URSS.

    Toutefois, cherchant à arrimer la Russie au système économique mondiale, Boris Eltsine lance alors une stratégie de complaisance vis-à-vis des Etats unis et de l’occident (adhésion à la Banque mondiale et au FMI, coopération avec l’Otan, participation à la FORPRONU en ex-Yougoslavie, signature des accords de réduction des armes chimiques, renonciation à la parité stratégique avec les Etats-Unis, retrait militaire de Cuba etc.)

    Le 2ème mandat d’Eltsine commencé en 1996 est marqué par un sentiment de désillusion. Le Ministre des Affaires étrangères de l’époque, Evgueni Primakov était convaincu que la stratégie de complaisance n’apportait pas les résultats escomptés. Commence alors chez les dirigeants russes un repli sur les intérêts nationaux du pays et un rejet de l’unilatéralisme américain.

    La décision de l’OTAN d’intervenir militairement au Kosovo plonge les relations avec Washington dans une période de froid.

    De 2000 à 2008: La reprise économique et le regain de confiance

    L’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine en 2000 change complètement la donne. La nomination de plusieurs hauts responsables du KGB et de l’Armée à des postes au Kremlin assure au pays la stabilité politique. Le contrôle étatique dans l’économie se renforce, signe du retour d’un État fort. La croissance économique dépasse est située entre 6 et 8%, les ressources premières du pays, très abondantes, sont mieux utilisées et l’envolée des cours d’énergie permet un désendettement général1 de l’Etat russe et lui permet de diversifier son économie.

    En même temps, les motifs de tension entre la Russie et les Etats unis se multiplient. La prolongation de la présence militaire américaine en Asie centrale et le soutien actif aux révolutions en Ukraine et en Géorgie, avec l’arrivée au pouvoir de Tymochenko et Saakachvili, tous deux partisans d’un rapprochement avec l’occident, et de l’adhésion à l’Union européenne et à l’OTAN renforcent le sentiment à Moscou que Washington cherche à isoler la Russie.

    Ajouté à cela, les critiques américaines sur les questions de démocratie et droits de l’Homme en Russie, la reconnaissance par les Etats-Unis de l’indépendance du Kosovo, l’abrogation du traité ABM de 1972, l’envahissement unilatéral de l’Irak, l’installation de bases américaines en Roumanie et en Bulgarie, ou encore du projet d’installation d’éléments du système de défense anti-missile américain en Pologne2 et en République tchèque.

    Dans un discours prononcé à Munich, le 10 février 2007, Vladimir Poutine critique fortement l’«unilatéralisme américain », dénonce la volonté des Etats-Unis de construire de nouvelles démarcations en Europe et plaide pour un monde multipolaire.

    De 2008 à aujourd’hui : Le retour d’une puissance mondiale

    En janvier 2008, et au terme de deux mandats, Vladimir Poutine «confie» provisoirement la présidence à son homme de confiance, Dimitri Medvedev.

    Moins de deux mois plus tard, la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo constitue un tournant dans la politique étrangère de la Russie, dont le nouveau président énonce les 5 principes :

    a. La «primauté» du droit international ;

    b. La «multipolarité» du monde ;

    c. Le désir «d’éviter les conflits et l’isolement» ;

    d. La «défense de la vie et de la dignité des citoyens russes où qu’ils se trouvent ; protection des entrepreneurs à l’étranger» ;

    e. La reconnaissance par la Russie de «zones d’intérêts privilégiés».

    Ces principes consacrent et scellent la divergence avec la conception américaine de la géopolitique mondiale et jettent les fondements d’un retour avéré de la Russie comme grande puissance mondiale.

    1. Indépendance du Kosovo

    L’opposition à l’indépendance du Kosovo a permis à la Russie de renforcer son influence sur la scène des Balkans occidentaux, et notamment auprès de la Serbie.

    Pour Moscou, cette indépendance viole l’intégrité territoriale de la Serbie et constitue une révision dangereuse des frontières issues de la Seconde Guerre mondiale.

    La présence de fortes minorités albanaises en Macédoine et au Monténégro pourraient suivre l’exemple du Kosovo, ce qui risque de déstabiliser toute la région. Plus encore, Moscou évoque l’impact de ce précédent sur les « conflits gelés » notamment, la Transnistrie en Moldavie, ou l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud en Géorgie.

    2. La Géorgie, l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie

    Soutenue par les Etats unis et l’Union européenne, le Président géorgien, Saakashvili entendait suivre l’exemple des républiques baltes et rejoindre l’UE et l’OTAN. Pour la Moscou, il était hors de question que ces institutions, fondées durant la guerre froide, ne s’installent au Caucase. Par ailleurs, la Géorgie et ses infrastructures étaient trop importantes dans l’équation géopolitique énergétique russe, notamment pour l’acheminement vers l’Europe du pétrole et gaz de la mer caspienne.

    Moscou ne pouvait donc pas trouver meilleure opportunité que la Géorgie pour réaffirmer sa puissance recréée. En effet, la Russie a défié l’OTAN en toute impunité et la Géorgie, qui comptait sur un soutien ferme de l’Occident, s’est retrouvée seule face aux troupes russes. Le message était désormais clair : dans la sphère d’influence de la Russie, s’allier à Washington ne peut garantir la sécurité.

    3. La question du nucléaire iranien

    L’Iran est un partenaire traditionnel et un voisin de la Russie. Les relations commerciales sont étroites et le volume des échanges ne cesse d’augmenter. Concernant le dossier nucléaire iranien, la position de la Russie peut être résumée ainsi :

    L’Iran a le droit à l’utilisation pacifique de l’énergie atomique

    La Russie continue à coopérer avec l’Iran dans le développement de son secteur de l’énergie nucléaire.

    La Russie est résolument opposée à toute possibilité d’une dimension militaire du programme nucléaire iranien.

    La Russie est convaincue qu’il n’y a pas d’alternative à une solution diplomatique négociée (donnant/donnant) ; soit un compromis.
    Moscou est en faveur de la présence des experts et observateurs de l’AIEA, même si, jusque là, ils n’ont trouvé aucune preuve d’activités nucléaires illégales.

    La Russie souligne l’importance de la reprise des négociations 5+1.
    La Russie soutient l’approche progressive où à chaque étape où Téhéran répond aux attentes de l’AIEA et de l’ONU, les sanctions doivent être atténuées.

    La Russie est contre toute tentative unilatérale hors du Conseil de sécurité des Nations Unies

    Il n’y a pas de solution militaire au problème.

    En 2010, la Russie a difficilement accepté de voter en faveur de la Résolution 1929 imposant plus de sanctions à l’encontre de l’Iran. En effet, Moscou s’est vue obligée d’annuler une importante commande de missiles S-300, ce qui a jeté un coup de froid sur ses relations avec Téhéran.

    Avec la crise ukrainienne en toile de fonds, les avis divergent sur l’avenir de la position russe concernant ce dossier. Pour certains, il y a au moins trois raisons pour que la Russie continue à coopérer avec l’occident sur le dossier nucléaire iranien:

    La Russie, tout comme les Etats unis, s’oppose à ce que l’Iran se dote de l’arme nucléaire.

    Le retrait de Moscou ouvrirait la voie à d’autres alternatives au processus diplomatique.

    Les relations économiques entre la Russie et l’Iran sont trop modestes et ne constituent pas un enjeu majeur pour la Russie.

    4. L’intervention internationale en Libye

    La Russie s’était abstenue lors du vote au Conseil de Sécurité pour imposer une zone d’exclusion aérienne en Libye, ce qui a permis à la résolution de passer. L’intervention militaire aérienne, deux jours plus tard, a créé un profond sentiment d’amertume chez les responsables russes pour qui, la Résolution n’autorise pas les frappes contre la Libye. Une polémique a même éclaté publiquement entre le président Dmitri Medvedev et le Premier ministre Vladimir Poutine.

    Désormais pour Moscou, la confiance n’est plus de mise.

    5. Le dossier syrien

    Depuis son indépendance, la Syrie a entretenu des relations étroites avec Moscou (l’URSS et plus tard, la Russie) qui est son premier fournisseur d’armes. Les exportations russes vers la Syrie dépassent le milliard de dollars et les investissements russes y sont estimés à 19 milliards de dollars.

    L’importance stratégique de la Syrie réside dans le fait qu’elle accueille la seule base navale russe en Méditerranée dans la ville de Tartous. Sur fond de détérioration des ses relations avec l’occident, depuis la guerre d’Ossétie du Sud en 2008, la Russie a décidé de renforcer sa présence en Méditerranée et obtient, contre l’annulation d’une partie de la dette syrienne, l’accord de Damas pour le développement et l’agrandissement de la base navale de Tartous, ce qu’elle entame depuis 2009.

    Par ailleurs, l’expérience libyenne a contribué à un raidissement de la position de la Russie devenue intransigeante sur le dossier syrien.
    En octobre 2011 et en février 2012, la Russie et la Chine opposent leur veto à deux reprises pour s’opposer à deux projets de Résolution du Conseil sécurité sur la Syrie.

    Ce « manque de flexibilité » de la part de Moscou conduit la communauté internationale à un sentiment d’impuissance. En effet, les Etats unis et l’UE sont incapables de déloger le régime Assad.

    6. La crise ukrainienne

    Tout comme dans le cas de la Géorgie, l’Ukraine s’est trop rapprochée de l’UE et de l’Otan. Or de tous les pays de la sphère d’influence de la Russie, l’Ukraine est de loin la plus importante. Elle abrite la base navale de Sébastopol (Crimée). Elle est une voie de transit hautement importante pour le gaz russe vers l’Europe occidentale, un grenier de blé en Europe. Une grande partie de sa population est russophone. L’Est et le Sud de l’Ukraine (partie la plus riche avec l’industrie et l’agriculture) sont largement acquis à la Russie.

    En conséquence, Moscou s’est vue obligée d’agir « par procuration » pour défendre ses intérêts et éviter une occidentalisation de l’Ukraine.
    Comble de cela, Moscou n’a pas eu recours à son armée pour redresser la situation, à l’exception de la Crimée où elle était de toutes les manières stationnée.

    L’Occident est en passe de comprendre qu’il ne peut gagner cette confrontation car la Russie ne peut pas la perdre.

    À ce stade, les options de Washington et de Bruxelles sont plutôt limitées. Ils ne peuvent pas affronter militairement la Russie, tandis que les sanctions économiques ne fonctionnent pas et que l’Europe, dont l’économie est convalescente, a besoin de pétrole et de gaz russes.
    En signant avec la Pékin «le contrat du siècle» d’une valeur de 400 milliards de dollars pour la livraison à la Chine de gaz naturel sur 30 ans, le président Poutine a réalisé ce que les dirigeants de l’Ouest craignaient: un pivot vers l’Extrême-Orient qui rend la Russie beaucoup moins vulnérable à toute éventuelle sanction de la part de Bruxelles.

    7. Autres éléments de puissance

    L’armée russe est une des plus puissantes au monde. Moscou a hérité de la totalité de l’arsenal de l’URSS.

    La Russie est le plus grand producteur de gaz naturel au monde. Elle en est également le plus grand fournisseur de l’Europe. Elle a su développer cet atout et le transformer en véritable levier géopolitique.

    Le Russie est très active dans le cadre de deux alliances militaires régionales destinées, entre autres à garder les États-Unis et l’OTAN loin de la région: l’Organisation de Coopération de Shanghai3 (OCS) et l’Organisation du Traité de Sécurité Collective4 (OTSC).  

    Source : Document confidentiel de la diplomatie marocaine

    #Russie #OTAN #Occident #URSS #Libye #Syrie #Kosovo #Serbie #Ukraine

  • Maroc : Dilapidation des aides financières européennes

    Maroc : Dilapidation des aides financières européennes

    Maroc, Union Européenne, aides financières, dilapidation, détournements, Unité d’Appui au Programme d’Appui au Plan d’Action Maroc-UE,

    L’Union européenne injecte des sommes faramineuse dans l’économie Marocaine, mais une grande partie est détourné pour finir dans les pardis fiscaux. Alors que la grande majorité de la population marocaine vit dans la précarité, des fonctionnaires marocains ont détourné sans vergogne des fonds de donateurs étrangers destinés aux couches marocaines les plus défavorisées. Cette fois, l’odieux et scandaleux détournement qui remontre à 2012 s’est fait au détriment d’un programme de soutien s’inscrivant dans le cadre d’un partenariat Maroc-UE. Le préjudice financier se chiffre à plusieurs millions d’euros.

    Le préjudice financier est important, il est chiffré à plusieurs millions de dollars dont le principal responsable de cette malversation est le Directeur de l’Unité d’Appui au Programme d’Appui au Plan d’Action Maroc-UE, un Marocain, ayant des liens familliaux avec Aziz Akhannouch, ministre de l’Agriculture et de la Pêche maritime à l’époque et Premier Ministre aujourd’hui.

    Une Délégation de l’Union Européenne, composé de Mario MARIANI, Premier Conseiller, Chef des Opérations et Paolo ZINGALI, Premier Secrétaire, Chef de la Section Finances et Contrats, s’est rendu, le 4 juillet 2012, à Rabat, pour faire part aux responsables du Makhzen, des irrégularités relevées dans les fonds de l’Unité d’Appui au Programme.

    Ils ont également informé les responsables du Makhzen que l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) ainsi que l’Inspection Général des Finances (IGF) seront saisis, étant donné que le responsable véreux pouvait continuer à gérer les fonds Communautaires.

    Gênés, les responsables du Makhzen ont recommandé aux responsables européens la discrétion dans le traitement de cette affaire scabreuse afin d’éviter son ébruitement médiatique. Il est clair que le Makhzen a tout fait pour tenir au secret cette affaire compte tenu de l’implication d’un parent du Ministre Aziz Akhannouch.

    A cet effet, la partie marocaine a suggéré de ne pas limoger le responsable marocain, au motif que son contrat était sur le point de s’expirer et ce, malgré les graves accusations pesant sur ce responsable véreux.

    Quelques semaine ayant suivi cette rencontre, le Makhzen a lancé un appel à candidature pour le recrutement du Directeur de l’Unité d’Appui au Programme d’Appui au Plan d’Action Maroc-UE, pour permettre une sortie honorable au responsable véreux.

    Quelques semaine ayant suivi cette rencontre, le Makhzen a lancé un appel à candidature pour le recrutement du Directeur de l’Unité d’Appui au Programme d’Appui au Plan d’Action Maroc-UE, pour permettre une sortie honorable au responsable véreux.


    Kamal El Mahdaoui, Chef de mission adjoint à l’Ambassade du Royaume du Maroc auprès de la République de Turquie s’est présenté en candidar pour ce poste.

    Dans un premier mail adressé au MAE, El Mahdaoui dénonce le retard enregistré dans l’annonce des résultats de la sélection des candidats. « Je me permets de m’adresser à vous au sujet des résultats du concours concernant le poste de Directeur de l’Unité d’Appui au Statut Avance Maroc-UE. L’appel a candidature pour occuper ce poste à été lance en novembre 2012, et après un processus de présélection , les entretiens devant la Commission mise sur pied à cet effet se sont déroulés le 4 janvier 2013 à Rabat. À ce jour, et après près de trois mois des entretiens, aucune information n’a été fournie par l’administration sur les résultats ni une explication sur le retard d’annoncer les résultats de ce concours », a-t-il écrit.

    Les agents du Makhzen se chamaillent pour ce poste

    Dans un autre mail envoyé 7 mois après l’appel à candidature, El Mahdaoui dénonce les pratiques fraudulentes et le clientélisme qui règne dans le corps diplomatique marocain. Voici son texte intégral:

    Monsieur le Ministre, bonjour,

    Permettez-moi de vous écrire dans un contexte ou je sais pertinemment que vous avez un agenda chargé et où notre diplomatie est invitée à agir sur plusieurs dossiers centraux pour le pays.

    Comme vous le savez, le concours portant sur le poste vacant de l’Unité figurant en objet a eu lieu le 4 janvier 2013 suite à l’appel à candidature lancé en octobre 2012. Près de 90 dossiers ont été déposés, et 11 candidats, dont je faisais partie, ont été retenus pour passer les entretiens le 4 janvier devant un comité présidé par Mme. Karima KABBAJ, directrice de l’Union européenne, avec plusieurs membres représentant différents départements ( le président du groupe d’amitié Maroc-UE, le SGG, la fonction publique , Économie et finances , ainsi que le Professeur Larbi Jaidi).

    À ce jour, et après sept mois du lancement de l’appel à candidature et quatre mois des entretiens , le résultat de ce concours ne sont pas annoncés . Un retard auquel on ne trouve pas de réponse ni d’explication malgré les différentes démarches entreprises de manière informelle ou même par voie administrative à ce jour.

    Ce retard à laissé libre cours à des rumeurs et des spéculations au sein du MAEC. ces rumeurs portent sur la tentative de placer M. Redouane Adghoghi, frère du Directeur Général, Nabil Adghoghi, à la tête de cette Unité bien que les informations disponibles sur les résultats du concours dont tout le MAEC en parle confirment que M. R. Adghoghi occupe la huitième place parmi les 11 candidats ayant passé l entretien, sachant que M. Laaouine, actuel coordonnateur à l’Unité occupe la première place, tandis que j’occupe la seconde place sur la liste des résultats. A noter que M. adghoghi est devenu sixième sur la liste pour la simple raison liée au désistement de deux candidats parmi les six premiers.

    Cette semaine, on est surpris d’apprendre , sous réserve de confirmation, l’intention du Département de RElancer encore une fois le concours pour cette Unité. La seule explication donnée par plusieurs collègues au département est qu’une une telle decision, si prise, représente une tentative flagrante de certains clans au MAEC de placer R. Adghoghi coûte que coûte à ce poste, quid de la crédibilité du processus de transparence que vous avez bien voulu mettre en place et du principe d’équité pour permettre aux cadres compétents d’accéder aux postes de responsabilité sur la base du mérite et la compétence.

    Monsieur le Ministre, je fais confiance à votre intégrité et votre volonté de réforme que vous avez montré et prouvé et dont on est confiant depuis plusieurs mois pour que ce dossier soit traité dans la célérité, l’équité et la transparence requises.

    Très haute considération.

    Kamal El Mahdaoui

    Chef de Mission – adjoint Ambassade du Maroc a Ankara


    #Maroc #UE #Aides_financières #Détournements

  • L’Algérie devient La Mecque des pays européens

    L’Algérie devient La Mecque des pays européens

    Algérie, Union Européenne, UE, gaz, Italie, France, Espagne, Pedro Sanchez,

    Risque de guerre énergétique mondiale
    Dans une guerre conventionnelle, les jalons pertinents sont les bombardements massifs ou l’utilisation d’armes dévastatrices

    Heureusement, les fanfaronnades inquiétantes sur la possibilité d’utiliser des armes nucléaires tactiques dans la guerre en Ukraine se sont apaisées, du moins pour le moment. Nous sommes confrontés à un conflit prolongé parce qu’il a déjà plus de six mois et qu’il faut au moins un autre moyen pour que les négociations de paix souhaitables arrivent à maturité. Ce ne sera pas – espérons-le – un conflit armé mondial comme en 1914 et 1940 mais une sorte de guerre mondiale de l’énergie dans laquelle nous entrons déjà. En tant que victimes privilégiées, dans le rude hiver qui s’annonce, les classes les plus défavorisées et les entreprises risquant de fermer en raison des prix insupportables de l’énergie sont esquissées.

    Dans une guerre conventionnelle, les jalons pertinents sont les bombardements massifs ou l’utilisation d’armes dévastatrices. Dans ce type de conflit, l’équivalent du bombardement des grandes villes est la fermeture par la Russie du gazoduc Nord Stream alléguant des fuites auxquelles personne ne croit ; ou une spirale accélérée des prix du pétrole, de l’électricité et du gaz qui déclenche l’inflation dans tous les pays… Les premières détonations se font déjà entendre. Ce n’est que le début.

    D’autres armes sensibles arriveront, selon la stratégie de Vladimir Poutine ; à savoir, des manifestations populaires appelant les gouvernements occidentaux à forcer Zelensky à admettre la perte d’une partie du territoire ukrainien à la table des négociations. Tout pour arrêter la torture au gaz russe.

    Dans cette guerre mondiale de l’énergie, la valeur de pays comme l’Algérie, pratiquement marginalisés jusqu’à il y a quelques mois, explose sur le marché boursier géostratégique. Aujourd’hui, Alger est un lieu de pèlerinage pour des dirigeants comme l’Italien Mario Draghi ou le Français Macron, désireux de s’assurer la manne gazière que l’Espagne monopolisait jusqu’alors. En raison de l’extension à l’Amérique des conséquences de cette guerre menée en Europe, les actions des sociétés d’armement montent, le prix du gaz liquéfié transporté vers l’Europe s’envole et la diplomatie de Washington relâche sa pression sur le régime américain Maduro parce que son pétrole est maintenant plus stratégique qu’avant.

    Au sein de l’Union européenne, les tensions se font sentir. La Commission veut des pouvoirs spéciaux en cas d’aggravation de la situation pour intervenir sur le marché de l’électricité et des produits essentiels. Tous les pays ne sont pas d’accord. La France continue de refuser un nouveau gazoduc pour traverser son pays de l’Espagne à l’Allemagne comme l’ont demandé il y a quelques jours le chancelier allemand Olaf Scholz et le président espagnol Pedro Sánchez. L’invitation inhabituelle de Scholz à Sánchez pour participer à une réunion stratégique de son gouvernement n’a de précédent que dans une invitation d’Ángela Merkel à Enmanuel Macron. Il y a dans cette matière énergétique un axe.

    Berlin-Madrid-Lisbonne avec le soutien non dissimulé de Bruxelles, par la présidente Úrsula von der Leyen et avec Josep Borrell à la tête de la politique étrangère.

    La paix intérieure règne toujours dans l’Union européenne et les difficultés post-Brexit dissipent toute tentation de fuite. Mais les élections italiennes de ce mois-ci, qui pourraient porter au pouvoir l’extrême droite Giorgia Meloni, vont faire bouger les choses. En Italie, la sympathie pro-russe est perceptible, et Poutine pourrait trouver des alliés inattendus dans son défi énergétique.

    En Espagne, il faut revoir l’histoire récente et se demander quels ministres, et à qui ils ont servi, ont coupé court au développement phénoménal des énergies renouvelables dont même Obama a fait l’éloge.

    Nous serions désormais dans des conditions extraordinaires pour faire face à cette guerre énergétique mondiale qui nous menace.

    La Estrella de Panamá, 05/09/2022

    #Algérie #Union_Européenne #UE #Gaz #Russie #Nord-stream #Espagne #Pedro_Sanchez #Veneuela #Italie #France

  • Acheter la collaboration du Maroc pour contenir la migration ?

    Acheter la collaboration du Maroc pour contenir la migration ?

    Maroc, Union Européenne, UE, Immigration, contrôle des frontières,

    Acheter la collaboration du Maroc pour contenir la migration ? Compliquer l’utilisation de l’aide dans la coopération en matière de contrôle des frontières

    A chaque fois qu’une  » crise  » migratoire se déclare sur les côtes européennes, des propositions visant à utiliser l’aide pour freiner l’immigration irrégulière réapparaissent dans le paysage politique européen. L’hypothèse sous-jacente à cette proposition est que la promesse d’une aide supplémentaire (ou la menace de la réduire) peut effectivement inciter les pays d’ »origine » et de « transit » réticents à coopérer plus étroitement avec l’Union européenne (UE) et ses États membres pour contenir les tentatives de franchissement irrégulier des frontières. Un examen plus approfondi de la mise en œuvre des projets financés par l’aide qui tournent autour de la migration révèle toutefois une histoire beaucoup plus complexe. Dans ce mémoire, je prendrai le cas du Maroc pour montrer que les pays  » d’origine  » et de  » transit  » n’accueillent pas toujours l’aide dans le domaine de la migration à bras ouverts (El Qadim, 2018). Les autorités locales et nationales réagissent différemment aux budgets d’aide en fonction de leur adéquation avec leurs priorités politiques nationales et domestiques, mettant en scène des réponses allant de la collaboration à la franche hostilité.

    Le Sud en tant que sujet dans la coopération en matière de contrôle des frontière

    Les chercheurs ont traditionnellement dépeint les pays non occidentaux comme des « objets » passifs dans les relations internationales, qui n’existent que par rapport ou en réaction à la politique étrangère et à la stratégie d’économie politique avancées par les pays occidentaux. Inspirés par la littérature post-coloniale et dé-coloniale, des travaux plus récents sur les relations internationales ont commencé à analyser la politique étrangère adoptée par les pays non-occidentaux en tant que telle, en considérant ces derniers comme des acteurs géopolitiques autonomes (Sabaratnam, 2011). Le fait de considérer le Sud comme un sujet élargit notre compréhension des acteurs et des stratégies de politique étrangère – le Nord n’étant qu’un des nombreux interlocuteurs avec lesquels les pays du Sud peuvent s’engager (Fiddian-Qasmiyeh et Daley, 2019). Plus important encore, une telle perspective élargit notre compréhension de la politique étrangère au-delà du binaire résistance/domination (Kutz, 2021). Être dans une position de dépendance structurelle conditionne mais n’empêche pas les pays subalternes de développer une stratégie diplomatique autonome (Fernández-Molina, Feliu et de Larramendi, 2019).

    La recherche sur les frontières a suivi un schéma similaire. Les premières analyses considéraient les pays d’ » origine  » et de  » transit  » comme des destinataires passifs des politiques d’externalisation des frontières. La littérature plus récente reconnaît que des pays comme le Maroc, la Turquie ou le Sénégal pourraient résister aux pressions de l’UE si l’adoption de mesures restrictives de contrôle des frontières entraîne des coûts financiers et politiques insoutenables. Un pays peut alterner coopération et non-coopération pour tenter de maintenir des alliances diplomatiques tout en tenant compte des pressions intérieures. Coopérer avec l’UE pour contenir la migration n’est donc pas nécessairement un marqueur de cooptation à l’externalisation des frontières. Il peut s’agir d’une stratégie visant à accroître la légitimité internationale, ou à accumuler d’autres ressources financières ou diplomatiques (Tsourapas, 2019).

    L’aide en tant que contrôle des frontières en Méditerranée occidentale

    La frontière entre l’UE et le Maroc est devenue de plus en plus sécurisée depuis les années 1970, lorsque les pays européens ont progressivement décidé d’imposer des visas aux ressortissants non-européens. La levée des contrôles aux frontières intérieures de l’UE a coïncidé avec une anxiété accrue pour sécuriser les frontières extérieures de l’Europe. De manière informelle, l’Espagne a commencé à rechercher la coopération du Maroc en matière de contrôle des frontières au début des années 1990. Après le Conseil européen de Tampere en 1999, la recherche de la coopération des pays tiers en matière de contrôle des frontières est devenue une politique établie de l’UE. Pour sa part, le Maroc a adopté en 2003 la loi 02-03, qui a criminalisé l’entrée et la sortie irrégulières du pays ainsi que sa facilitation. En septembre 2013, le Maroc a réformé son approche de la gouvernance migratoire en annonçant l’adoption d’une nouvelle politique migratoire « fondée sur les droits de l’homme ». La nouvelle politique migratoire comprenait deux campagnes de régularisation en 2014 et 2017, l’adoption d’une stratégie nationale pour l’immigration et l’asile (NSIA) en 2014 et le lancement de trois projets de loi sur la migration, l’asile et la traite des êtres humains. La nouvelle politique migratoire a recueilli le soutien de l’UE et de ses États membres. Toutefois, la mise en œuvre de cette politique n’a pas été à la hauteur de ses aspirations : la loi 02-03 n’a pas été réformée et la loi sur l’asile n’a pas été approuvée. Même si la violence à l’encontre des migrants s’est d’abord arrêtée dans les principaux centres urbains, elle est toujours restée répandue dans les zones frontalières, avant de reprendre même dans les grandes villes depuis l’été 2018.

    Le financement du développement a toujours été essentiel à la stratégie d’externalisation des frontières de l’UE. Dans les années 1990, l’UE comptait déjà sur une longue histoire de coopération économique et technique avec le Maroc et les pays d’Afrique du Nord en général. Après le Conseil de Tampere en 1999, l’UE a commencé à créer des lignes de financement spécifiques pour financer des projets dans le domaine de la migration et du contrôle des frontières. Il s’agissait notamment de la ligne pilote B7-667 en 2001, remplacée par le programme AENEAS en 2004, puis le programme thématique sur la migration et l’asile en 2007. Entre 2001 et 2018, le Maroc a reçu 215 millions d’euros de l’UE pour mettre en œuvre des projets dans le domaine de la sécurité des frontières, et 61,6 millions d’euros supplémentaires pour la mise en œuvre de sa politique migratoire (Statewatch, 2019).

    Entre coopération et obstruction

    Au cours des vingt-cinq dernières années, le Maroc a adopté un certain nombre de stratégies différentes en ce qui concerne le décaissement de l’aide au développement pour les projets liés à la migration. Dans certains cas, le pays s’est montré coopératif dans la mise en œuvre des projets. C’est le cas, par exemple, du programme de retour volontaire, une initiative gérée par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Elle soutient économiquement les personnes migrantes qui souhaitent retourner dans leur pays d’origine, essentiellement en achetant des billets d’avion et, si les fonds le permettent, en fournissant une aide à la réintégration. La toute première mission de retour volontaire de l’OIM dans le pays a été organisée à la demande des autorités marocaines et maliennes en 2005. En 2013, les autorités marocaines ont accepté de subventionner le retour de 5 500 personnes entre 2014 et 2016 pour une contribution totale de 3,5 millions d’euros, fournissant à l’OIM une source de financement stable pour un budget de programme par ailleurs très fluctuant (Maâ, 2019). D’un point de vue plus terre à terre, les autorités marocaines facilitent la délivrance des documents administratifs nécessaires pour permettre aux personnes migrantes sans papiers de rentrer chez elles par avion dans le cadre du programme. L’attitude coopérative des autorités marocaines s’explique par la fonction stratégique que joue le retour volontaire dans la politique intérieure et extérieure du Maroc. Premièrement, il permet au pays de réduire le coût du contrôle des frontières en impliquant les donateurs internationaux dans le financement d’un type de retour. Deuxièmement, les retours volontaires permettent aux autorités marocaines de protéger leur image internationale en montrant leur engagement dans des formes de renvois  » humains  » d’étrangers en situation irrégulière. Troisièmement, le programme permet au Maroc de se positionner plus près des donateurs européens en tant que rare cas de  » pays de transit  » qui s’engage financièrement dans la mise en œuvre du programme de retour volontaire (Gazzotti, 2021).

    Dans d’autres cas, cependant, les autorités marocaines se montrent beaucoup moins coopératives, au point d’entraver la mise en œuvre des projets financés par l’aide. C’est le cas, par exemple, d’un projet humanitaire financé par la Suisse en 2013, visant à fournir une aide d’urgence aux migrants bloqués dans le nord-est du pays. Ce projet a remplacé une initiative précédemment gérée par Médecins sans frontières/Medecins Without Borders (MSF), qui avait décidé de fermer sa mission dans le pays en 2012. Dans un rapport publié en 2013, MSF pointait du doigt la violence perpétrée par les autorités marocaines et espagnoles comme une cause essentielle de la vulnérabilité des migrants à la frontière, ce qui rendait la mission de l’ONG inadaptée aux conditions de terrain (Tyszler, 2019). Lorsque MSF est partie, ses activités humanitaires ont été canalisées dans un projet mené par l’OIM, ainsi que par une organisation religieuse à Nador et par Médecins du monde à Oujda. Après 2015, le projet a continué sans la participation de l’OIM. Dès le début, le projet humanitaire financé par la Suisse a connu une série de revers en raison d’une relation complexe entre les partenaires de mise en œuvre et les autorités marocaines. Une première perturbation majeure est survenue lorsque les autorités marocaines ont fermé de force le bureau de Médecins du monde à l’automne 2014 (OIM Maroc, 2014). Une deuxième perturbation majeure a eu lieu un an plus tard, en janvier 2016, lorsque le prêtre jésuite qui coordonnait le projet à Nador s’est vu interdire de rentrer au Maroc après une brève visite dans l’enclave espagnole de Melilla (Público, 2016). Sur le terrain, diverses sources ont expliqué cette série d’obstructions comme une stratégie entreprise par les autorités marocaines pour limiter la publicité autour des violences frontalières. Le rapport publié par MSF en 2013 avait en effet causé des dommages substantiels à sa réputation. Les rapports sur la violence contre les migrants à la frontière entraient en conflit avec l’image d’un pays réformiste et respectueux des droits de l’homme que le Maroc tente de construire depuis le début des années 1990 (Gazzotti, 2019). L’obstruction des projets humanitaires financés par l’aide est donc symptomatique des priorités de la politique intérieure et étrangère du Maroc, où la protection de l’image nationale dans le pays et à l’étranger est plus importante que la mise en œuvre d’initiatives fournissant une aide d’urgence aux migrants bloqués à la frontière.

    Pluraliser notre compréhension de l’aide dans les relations frontalières

    L’attitude des pays  » d’origine  » et de  » transit  » vis-à-vis de l’aide liée à la migration varie en fonction du moment politique général et des contingences locales. Comme nous l’avons vu dans le cas du Maroc, l’aide est un instrument utilisé depuis longtemps par l’UE et ses États membres pour encourager la coopération multilatérale et bilatérale en matière de contrôle des frontières. Cependant, les autorités marocaines adaptent leur attitude en fonction de la manière dont le projet s’inscrit dans leur stratégie plus large de politique intérieure et étrangère. Un même État peut faciliter le versement d’une aide, tout en faisant obstacle à un autre projet, car chaque initiative soulève des préoccupations politiques différentes et ouvre des possibilités variées. Nous devons donc pluraliser notre compréhension de l’aide à la coopération en matière de contrôle des frontières au-delà du binaire incitation/rent. En nous concentrant sur la mise en œuvre des projets, nous pourrons mieux comprendre ce que nous entendons par  » aide « , et ainsi construire un compte rendu plus réaliste et plus nuancé de la coopération en matière de contrôle des frontières entre le Nord et le Sud.

    Références

    EL QADIM, NORA. 2018.  » L’instrument de financement de la négociation de l’UE sur la politique migratoire extérieure. Des incitations à la coopération ? » In EU External Migration Policies in the Era of Global Mobilities : Intersecting Policy Universes, édité par Sergio Carrera, Leonard Den Hertog, Marion Panizzon, et Dora Kostakopoulou, 341-63. Leiden/Boston : Brill.

    FERNÁNDEZ-MOLINA, IRENE, LAURA FELIU ET MIGUEL HERNANDO DE LARRAMENDI. 2019.  » Les politiques étrangères ‘subalternes’ des pays d’Afrique du Nord : Old and New Responses to Economic Dependence, Regional Insecurity and Domestic Political Change ». La revue d’études nord-africaines 24 (3) : 356-75. https://doi.org/10.1080/13629387.2018.1454648

    FIDDIAN-QASMIYEH, ELENA, ET PATRICIA (Patricia O.) Daley, eds. 2019. Routledge Handbook of South-South Relations. Abingdon, Oxon : Routledge.

    GAZZOTTI, LORENA. 2019.  » Les morts, les frontières et l’exception : L’humanitarisme à la frontière hispano-marocaine ». American Behavioral Scientist, novembre, 0002764219882990. https://doi.org/10.1177/0002764219882990.
    —. 2021. Immigration Nation. Aid, Control, and Border Politics in Morocco. Cambridge : Cambridge University Press.

    KUTZ, WILLIAM. 2021.  » Entre dépendance et engagement : Centring Subaltern Geopolitics in Multiperspectival Border Studies. Lessons from the Western Sahara ». Géographie politique 89 (août) : 102431. https://doi.org/10.1016/j.polgeo.2021.102431

    MAÂ, ANISSA. 2019.  » Signer la déportation. Agencéité migrante et retours volontaires depuis le Maroc ». Terrain. Anthropologie et Sciences Humaines. http://journals.openedition.org/terrain/ 18653 ; DOI : 10.4000/terrain.18653

    OIM MAROC. 2014.  » Lettre d’information n. 25. Novembre – Décembre 2014″.

    PÚBLICO. 2016.  » Padre Esteban, el cura de los nadies al que Marruecos ha expulsado « . 26 janvier 2016. http://www.publico.es/internacional/padre-esteban-cura-nadies-al.html

    SABARATNAM, MEERA. 2011.  » La RI en dialogue… mais peut-on changer de sujet ? Une typologie des stratégies de décolonisation pour l’étude de la politique mondiale « . Millénium 39 (3) : 781-803. https://doi.org/10.1177/0305829811404270

    STATEWATCH. 2019.  » Analyse : L’aide, la sécurité des frontières et la coopération entre l’UE et le Maroc en matière de contrôle des migrations « , http://www.statewatch.org/analyses/no-347-eu-morocco-aid-border-security.pdf.

    TSOURAPAS, GERASIMOS. 2019. « La crise des réfugiés syriens et la prise de décision en matière de politique étrangère en Jordanie, au Liban et en Turquie ». Journal of Global Security Studies, mai. https://doi.org/ 10.1093/jogss/ogz016.

    TYSZLER, ELSA. 2019. « Derrière les barrières de Ceuta & Melilla. Rapports sociaux de sexe, de race et colonialité du Contrôle migratoire à la frontière maroco-espagnole ». Thèse de doctorat, Université Paris 8, non publiée.

    Institut Européen de la Méditerranée, 06/09/2022

    #Maroc #Union_Européenne #UE #Immigration #Frontières

  • Le pétrole face au «coup» du G7

    Le pétrole face au «coup» du G7

    Pétrole, G7, gazoduc Nord Stream, Russie, Union Européenne,

    Les pays du G7 ont visé, ce vendredi 3 septembre, la manne énergétique de la Russie en convenant de plafonner le prix de son pétrole, provoquant une réaction de Moscou qui a fait trembler les Européens, en annonçant que le gazoduc Nord Stream serait totalement arrêté jusqu’à la réparation d’une turbine. Le plafonnement du prix du pétrole exporté par la Russie est un mécanisme inédit aux effets incertains dont des analystes préviennent qu’il pourrait se retourner contre ses concepteurs. Le dispositif est inédit. Des systèmes ont déjà été élaborés pour empêcher une nation d’exporter, comme c’est le cas pour l’Iran ou le Venezuela actuellement, ou limiter ses échanges, comme l’Irak dans le cadre du programme «pétrole contre nourriture» (1995-2003), mais jamais la communauté internationale n’a encore imposé un prix différencié à un pays, d’après «Capital».

    «Aujourd’hui, le G7 a franchi une étape essentielle dans la réalisation de notre double objectif, à savoir exercer une pression à la baisse sur les prix mondiaux de l’énergie, tout en privant Vladimir Poutine de revenus pour financer sa guerre brutale en Ukraine», s’est empressé de déclarer la Secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen. Depuis le début du conflit, Moscou aurait engrangé 74 milliards de dollars grâce à ses ventes de pétrole, selon l’Institut international de la finance, comme le rapporte le Monde.

    Pour l’heure, les modalités d’application d’un tel dispositif n’ont pas été dévoilées. «Le plafond des prix sera fixé à un niveau basé sur une série de données techniques et sera décidé par l’ensemble de la coalition avant sa mise en œuvre», ont annoncé les sept pays. Ils ont néanmoins confirmé leur volonté d’interdire aux compagnies d’assurance et de réassurance de couvrir le transport maritime de pétrole russe si ce dernier est acheté à un prix inférieur ou égal à celui «déterminé par la large coalition de pays adhérant au plafonnement de prix ou le mettant en œuvre», reprend «Le Monde».

    Pour que le plafonnement devienne réalité, il faut que la Russie s’y plie et continue d’exporter vers des pays qui en ont adopté le principe. Or le vice-Premier ministre russe chargé des questions énergétiques, Alexandre Novak, a prévenu jeudi que la Russie ne vendrait plus de pétrole aux pays plafonnant les prix. «

    En ce qui concerne les restrictions sur les prix, (…) nous ne livrerons simplement plus de pétrole ou de produits pétroliers aux compagnies ou aux pays qui imposent de telles restrictions », a-t-il averti, cité par les agences de presse russes, relaye l’AFP. L’effort est “ambitieux”, reconnaît le New York Times : le plan “vise à former un cartel international d’acheteurs pour plafonner le prix du pétrole russe” afin d’“éviter un choc des prix, tout en vidant le trésor de guerre du président Vladimir Poutine”.

    Le plafonnement devrait être mis en place “d’ici début décembre”, avant que n’entre en vigueur l’embargo décidé par l’Union européenne et critiqué par le gouvernement Biden qui craint que cela « ne fasse monter en flèche les prix de l’énergie et ne fasse basculer l’économie mondiale dans la récession».

    B. Nadir

    Le Carrefour d’Algérie, 05/09/2022

    #Pétrole #G7 #Russie #Gaz #Nord_stream

  • Sécurité au Sahel et fin de l’opération Barkhane

    Sécurité au Sahel et fin de l’opération Barkhane

    Le conflit armé qui dure depuis une décennie au Sahel est à un tournant. Le retrait de la France du Mali et la redéfinition de sa stratégie dans la région se sont accompagnés d’une aggravation de la violence et de l’insécurité, d’un retour des autocraties militaires et de tentatives de la Russie de jouer un rôle plus important dans la sécurité régionale.


    Benjamin Pétrini*

    Début 2022, la France a commencé à retirer ses forces du Mali et à reconfigurer l’opération Barkhane , sa mission de contre-insurrection qui est en cours dans plusieurs pays sahéliens depuis 2014. La dernière unité militaire française a quitté le Mali le 15 août . Les soldats restés au Sahel ne joueront plus un rôle de combat direct dans les conflits armés régionaux et soutiendront et formeront à la place les forces locales. La Russie, quant à elle, est devenue un nouvel acteur de la sécurité dans la région. Ce sont les changements géopolitiques les plus importants qui se sont produits au Sahel depuis 2012, lorsqu’un soulèvement sécessionniste de groupes armés touaregs et islamistes non étatiques dans le nord du Mali a failli renverser le gouvernement et s’étendre au Burkina Faso voisin et à l’ouest du Niger.

    L’échec de la France au Mali est encore un autre cas, comme l’intervention de près de deux décennies des États-Unis en Afghanistan, au cours de laquelle une puissance occidentale est intervenue dans un conflit armé à l’étranger et s’est avérée incapable d’atteindre ses objectifs en matière de stabilité et de sécurité. En janvier 2020, la France a porté le nombre de soldats engagés à Barkhane – principalement des forces d’opérations spéciales – d’environ 4 000 à 5 100. Mais il a commencé à se retirer après qu’une junte militaire malienne a consolidé le contrôle du gouvernement en mai 2021. L’incapacité de la France à définir des objectifs réalisables pour l’opération Barkhaneau-delà de mener des frappes contre des chefs djihadistes et de fournir aux forces maliennes un soutien général à la lutte contre le terrorisme et un renforcement des capacités, la mission aurait pu se poursuivre sans but dans un avenir prévisible. Mais les dirigeants de la junte malienne s’étaient aigris de la mission française parce que, selon eux, elle ne fournissait pas un soutien adéquat aux forces armées maliennes, qui subissaient la plupart des pertes dans la lutte contre les groupes extrémistes salafistes, et à cause des pertes civiles connexes.

    Le fossé entre Paris et Bamako s’est creusé peu de temps après que la junte a pris le pouvoir et établi des liens de sécurité avec la Russie. La fracture est devenue permanente lorsque le groupe Wagner – une société militaire privée liée au Kremlin – a déployé des forces mercenaires dans le pays à la fin de 2021. Cette évolution a incité plusieurs pays de l’Union européenne à se retirer de la force opérationnelle Takuba dirigée par la France , une multinationale des forces spéciales. unité créée en 2020 pour contribuer à la mission de Barkhane . Le groupe de travail s’est dissous peu de temps après.

    La France, en tant qu’ancienne puissance coloniale dans la majeure partie de l’Afrique de l’Ouest, y est restée l’acteur extérieur dominant. Lorsqu’il a envoyé des forces au Mali en janvier 2013 dans le cadre de ce qui s’appelait alors l’ opération Serval, ils ont d’abord réussi à repousser l’insurrection djihadiste. La mission a été renforcée en 2014 dans le but d’aider les forces armées locales à prévenir la résurgence de groupes armés non étatiques et à mener des opérations antiterroristes dans d’autres pays, dont le Burkina Faso, le Tchad, la Mauritanie et le Niger. L’objectif s’est toutefois révélé trop ambitieux, notamment au regard de la petite taille de la force engagée par la France : près de 6 000 à son apogée en 2021.

    La mission de maintien de la paix des Nations unies MINUSMA au Mali depuis 2013 et, plus récemment, la Task Force Takuba, avec une taille de force maximale d’environ 600, a peu contribué à l’objectif de la France de formation militaire et de renforcement des capacités au Mali. Par ailleurs, le retrait unilatéral du Malien mai 2022 de la coalition de sécurité régionale du G5 Sahel, qui avait permis aux forces du Burkina Faso, du Tchad, du Mali, de la Mauritanie et du Niger de mener des opérations frontalières conjointes et de partager des renseignements, a plongé l’effort dans le désarroi.

    La détérioration des conditions de sécurité dans les pays du Sahel – et leur vulnérabilité générale aux groupes armés non étatiques – est le résultat d’une faiblesse étatique de longue date. Et, à l’inverse, les activités de ces groupes armés ont rendu plus difficile pour les États le renforcement de leurs capacités administratives et militaires. Un recul démocratique s’est produit en conséquence. Depuis 2020, des coups d’État ont eu lieu au Burkina Faso et au Mali et les deux pays ont été sanctionnés par l’organe régional de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest ; Le Tchad et la Guinée ont été gouvernés par des gouvernements militaires ; et la Guinée Bissau et le Niger ont subi des tentatives de coup d’État. Depuis 2010, les pays occidentaux ont dépensé des milliards de dollars américains pour l’assistance des forces de sécurité dans la région, mais cela a souvent été inefficace ou parfois contre-productif en raison d’une aide non coordonnée et d’objectifs irréalistes. Le manque de capacité militaire locale et la tendance de l’aide à être consommée par la corruption et la mauvaise gestion ont aggravé la situation.

    La France est désormais dans une position délicate et le Sahel est à la croisée des chemins. L’invasion russe de l’Ukraine en février 2022 s’est produite alors que Moscou commençait à jouer un rôle plus actif au Sahel en envoyant des mercenaires combattre au Mali. Il l’avait déjà fait en République centrafricaine, en Libye, au Soudan et ailleurs à la recherche d’une influence diplomatique et d’opportunités économiques, y compris des concessions minières. La France a revu à la baisse ses ambitions dans la région et a rompu ses liens avec le Mali tout en participant à l’effort occidental pour contenir l’agression russe via des sanctions et des transferts d’armes vers l’Ukraine. Par conséquent, si la Russie augmente son implication au Mali et dans d’autres pays sahéliens, elle pourrait obliger Paris à redéfinir à nouveau ses objectifs politiques et sécuritaires dans la région. Les pays du Sahel, pour leur part, peu capables d’établir la sécurité à l’intérieur de leurs frontières. De plus, le niveau de soutien extérieur qu’ils recevront sera imprévisible, compte tenu de la relation conflictuelle entre la France et l’Union européenne d’une part et la Russie d’autre part. Ainsi, l’objectif de parvenir à plus de paix et de sécurité dans les pays du Sahel semble plus irréalisable qu’à aucun moment de la dernière décennie.

    *Chargé de recherche sur les conflits, la sécurité et le développement


    https://www.iiss.org/blogs/analysis/2022/09/security-in-the-sahel-and-the-end-of-operation-barkhane
  • Sahara Occidental : L’ONU et l’UE agacées par le Maroc

    Sahara Occidental : L’ONU et l’UE agacées par le Maroc

    Sahara Occidental, Maroc, Front Polisario, ONU, Union Européenne, Christopher Ross, hacker Chris Coleman,

    L’étau se resserre sur la diplomatie marocaine, notamment pour ce qui est du dossier du Sahara occidental. Cette vérité cachée au peuple marocain par le palais royal est révélée par le «hacker» Chris Coleman qui, en publiant un document officiel prouve que la communauté internationale est agacée par l’entêtement du Maroc à vouloir bafouer le droit international et la Charte des Nations unies.

    L’ONU, les Etats-Unis, la France et l’Union européenne ont exprimé leur soutien total au diplomate américain Christopher Ross, envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU, ainsi qu’au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. Le Maroc tente vainement d’obtenir le remplacement de ce diplomate américain par un autre qui cautionnerait son occupation du Sahara occidental. La position de l’Union européenne (UE) a été exprimée par Mme Catherine Ashton dans une note envoyée à l’ambassadeur marocain à Bruxelles et révélée par le hacker Chris Coleman.

    «Soyez rassurés que la Haute représentante soutient les efforts du secrétaire général des Nations unies en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le cadre d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations unies, et notant le rôle et les responsabilités des parties à cet égard.»

    L’UE est préoccupée par la longue durée de ce conflit et espère que le retrait par le Maroc de sa confiance en Christopher Ross, envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies, ne retardera pas d’avantage les négociations. La Haute représentante marque son soutien à la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies 2044 (2012) du 24 avril 2012 prorogeant le mandat de la Minurso au Sahara occidental jusqu’au 30 avril 2013.

    La Haute représentante note, en particulier, que la résolution souligne l’importance de l’amélioration de la situation des droits de l’homme au Sahara occidental et dans les camps de Tindouf. Elle encourage aussi les parties à collaborer avec la communauté internationale pour mettre au point et appliquer des mesures indépendantes et crédibles qui garantissent le plein respect des droits de l’homme, en gardant à l’esprit les obligations découlant du droit international.

    La dite résolution se félicite également de l’ouverture des commissions du Conseil national des droits de l’homme à Dakhla et El Ayoun, et les mesures prises par le Maroc pour assurer un accès sans réserves ni restrictions à tous les titulaires des mandats relevant des procédures spéciales du Conseil des Nations unies des droits de l’homme.

    Tous les acteurs concernés directement ou indirectement par la question du Sahara occidental partagent la position de Mme Ashton, à savoir le soutien total au représentant personnel du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross, la nécessité de résoudre ce conflit de longue date par la voie des résolutions des Nations unies, le respect des droits de l’homme dans le territoire sahraoui et la participation de la population sahraouie dans l’exploitation de ses ressources naturelles», est-il écrit dans ce document révélé par Chris Coleman.

    #Maroc #Sahara_Occidental #ONU #diplomatie_marocaine #Lobbying #UE #Christopher_Ross

  • La crise entre le Maroc et la Tunisie n’augure rien de bon

    La crise entre le Maroc et la Tunisie n’augure rien de bon

    Maroc, Tunisie, Algérie, Sahara Occidental, Maghreb, Union Européenne, Espagne, Union Africaine, TICAD 8,

    Ali Lmrabet

    Le Maroc a déjà un ennemi irréconciliable dans la région, l’Algérie honnie. S’il faut ajouter la Tunisie, Rabat va se retrouver totalement isolé au Maghreb

    Un malheur, dit-on, n’arrive jamais seul. Et le régime marocain en a eu son lot la semaine dernière. Plusieurs, d’un seul coup, et d’une espèce qui ébranle certains fondements vite établis.

    Lors de son discours radio-télévisé du 20 août, le roi Mohammed VI s’était voulu explicite et même menaçant. « Je voudrais adresser un message clair à tout le monde : le dossier du Sahara [occidental] est le prisme à travers lequel le Maroc considère son environnement international. C’est aussi clairement et simplement l’aune qui mesure la sincérité des amitiés et l’efficacité des partenariats qu’il établit. »

    En résumé, le souverain alaouite expliquait qu’il ne pouvait y avoir de demi-mesure dans le conflit du Sahara occidental et que les États étrangers devaient prendre leur parti : pour ou contre le Maroc.

    Or, quelques jours plus tard, alors qu’il était interviewé par la télévision publique espagnole, TVE, le Haut représentant pour la politique étrangère de l’Union européenne (UE), l’Espagnol Josep Borrell, déclarait que « la position du gouvernement espagnol était et reste celle de l’UE, c’est-à-dire défendre la tenue d’une consultation pour que le peuple sahraoui puisse décider de la manière dont il souhaite son avenir ».

    Incompréhension et grosse colère à Rabat, dont le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, a annulé dans la foulée une rencontre prévue avec le diplomate européen au mois de septembre.

    Le Haut représentant pour la politique étrangère de l’Union européenne étant espagnol, du même parti que celui de Pedro Sánchez (PSOE), et de plus l’un de ses proches, parlait-il au nom du gouvernement espagnol ?, se demandèrent les Marocains.

    Selon la presse espagnole, Bourita a appelé directement Josep Borrel pour exiger de lui qu’il rectifie sa déclaration. Le diplomate européen s’est exécuté non sans quelques contorsions linguistiques indéchiffrables. Puis il a fait de même avec le ministre des Affaires étrangères, José Manuel Albares, obligé d’aller à la radio pour réaffirmer le soutien officiel espagnol à la proposition d’autonomie marocaine considérée comme la « plus sérieuse, réaliste et crédible » pour résoudre le conflit le conflit.

    Punition
    Mais ce à quoi le Maroc ne s’attendait pas, c’est d’avoir à croiser le fer avec un pays du Maghreb autre que l’Algérie. Et c’est pourtant ce qui a eu lieu la même semaine.

    En déroulant littéralement le tapis rouge au président de la République arabe démocratique sahraouie (RASD) et du Front Polisario, Brahim Ghali, venu participer à Tunis à la huitième édition de la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD), qui s’est tenue à Tunis les 27 et 28 août, la Tunisie a provoqué la colère du Maroc sur le même sujet que celui de l’Espagne.

    Le président Kais Saied ne s’est pas contenté de recevoir personnellement M. Ghali à l’aéroport, comme il le fait d’ailleurs avec le reste des délégations invitées, il l’a reçu comme un chef d’État.

    Au grand dam de Rabat, qui n’a pas tardé à réagir en faisant publier par son ministre des affaires étrangères un dur communiqué contre cette Tunisie qui aurait « multiplié récemment les positions et actes négatifs à l’égard du Royaume du Maroc et de ses intérêts supérieurs ».

    La presse alaouite s’est chargée de rappeler que la Tunisie s’était abstenue, le 29 octobre 2021, lors du vote du Conseil de sécurité des Nations unies sur la résolution onusienne sur le Sahara occidental.

    En guise de punition, le Maroc a décidé d’annuler sa participation à la TICAD et de rappeler pour consultation son ambassadeur à Tunis.

    Selon certains observateurs, c’est le traitement de chef d’État réservé à Brahim Ghali plus que son invitation qui a fâché les Marocains.

    Que le Mozambique traite M. Ghali comme un chef d’État, comme ce fut le cas en 2017 lors de la même conférence TICAD, qui a provoqué tout de même une foire d’empoigne entre diplomates marocains et policiers mozambicains, peut être surmonté, mais la Tunisie est un État maghrébin dit « frère » avec lequel le Maroc a des relations étroites et historiques.

    Pour résoudre ses conflits diplomatiques, le Maroc parie souvent sur la traditionnelle position de la vierge effarouchée : on se fâche, on menace, voire on coupe quelques ponts, et on attend que l’autre partie fasse le premier pas pour résoudre la crise. Cette tactique lui réussit bien en Europe, habituée à ses mouvements brusques en raison de sa position de gendarme musclé, et sans pitié comme on l’a vu à la frontière de Melilla.

    Avec la Tunisie, autrefois gouvernée par « l’ami » et obligé Moncef Marzouki, dont le père est enterré au Maroc, Rabat est tombé sur un os. En fait, sur un régime qui lui ressemble, dans les domaines de l’autoritarisme et des susceptibilités.

    Dans sa réponse, le ministère des Affaires étrangères tunisien a rejeté catégoriquement le contenu du communiqué marocain, qu’il a accusé de « porter préjudice à la République tunisienne », rappelé l’historique des rencontres de la TICAD où la présence de Brahim Ghali n’a pas posé des problèmes insurmontables, et réaffirmé avec insistance la position de « neutralité » adoptée par la Tunisie quant à la question du Sahara occidental. Le communiqué se termine par le rappel pour consultation de l’ambassadeur tunisien à Rabat. Œil pour œil.

    Une certaine forme de désarroi

    La coutumière campagne de presse marocaine qui s’est déclenchée depuis contre la Tunisie exprime certainement un dépit, mais également une certaine forme de désarroi. Comme si le Maroc prenait conscience qu’il risquait de se retrouver isolé internationalement.

    Avec l’Espagne, en dépit de quelques gestes de bonne volonté de part et d’autre, Rabat n’a toujours pas finalisé sa réconciliation. Madrid soupçonne le Maroc de laisser traîner certaines décisions pour obtenir plus de concessions.

    Les relations avec l’Algérie sont totalement coupées et au moindre faux pas, la région risque de se retrouver embourbée dans un conflit armé que personne ne souhaite.

    Avec la France, dont le président a paradé pendant trois jours en Algérie sous les applaudissements de ses hôtes, les accointances passées ne sont plus ce qu’elles étaient.

    Le refus de visa à des élites marocaines, dont des anciens ministres, prouve que l’Élysée n’a pas encore pardonné au royaume chérifien d’avoir espionné son président et la moitié de son gouvernement via le logiciel espion israélien Pegasus.

    Enfin, en remettant en cause l’existence de la Mauritanie, l’érudit musulman marocain Ahmed Raïssouni, qui, contrairement à ce que débite la presse algérienne, n’est pas un proche du Makhzen (Palais royal), a provoqué une inopportune secousse diplomatique avec Nouakchott. Une fâcheuse sortie qui a fini par coûter à ce alem (savant) respecté la présidence de l’Union internationale des savants musulmans.


    Tout le monde le sait à Rabat. La crise maroco-tunisienne n’augure rien de bon. Le Maroc a déjà un ennemi irréconciliable dans la région, l’Algérie honnie. S’il faut ajouter la Tunisie, taxée par la presse marocaine de nouvelle alliée d’Alger, Rabat va se retrouver totalement isolé au Maghreb.

    Et le Maghreb, ce n’est pas l’Europe ni l’Occident. C’est l’essence même de l’être marocain.

    Middle East Eye, 29/08/2022

    #Maroc #Tunisie #Algérie #Espagne #UE #Maghreb #Sahara_Occidental

  • Isolé, le Maroc gagné par l’hystérie

    Isolé, le Maroc gagné par l’hystérie

    Maroc, Tunisie, Sahara Occidental, TICAD 8, Union Européenne, Josep Borrell, Union Africaine, Japon,

    Le qualificatif qui sied le plus au comportement du Makhzen est incontestablement «hystérique». Oui, le Maroc de Mohammed VI est gagné par l’hystérie. Ce sentiment qui révèle un état d’extrême panique s’explique notamment par le fait que ses innombrables tentatives pour faire main basse sur le Sahara Occidental se sont toutes soldées par des échecs patents. Cela vaut autant pour le plan juridique que pour le domaine diplomatique.

    Au niveau juridique, le Makhzen a perdu toutes batailles. Et cela depuis longtemps. Aucune institution internationale et aucun ensemble géopolitique ne reconnaît la prétendue « marocanité » du Sahara Occidental. Malgré les sommes colossales investies dans le lobbying et l’achat de personnalités politiques notamment en Europe, Rabat ne compte, à ce jour, aucun allié de poids sur la scène internationale capable de faire pencher la balance en sa faveur au Conseil de sécurité de l’ONU. Même les Etats-Unis qui ont souvent affiché une certaine complaisance à l’égard du Makhzen reviennent doucement mais sûrement sur la décision de Trump.

    L’Union européenne qui semblait acquise à Mohammed VI s’en tient aussi aux résolutions de l’ONU sur le conflit du Sahara Occidental. Le Haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Joseph Borrell, a d’ailleurs fait la semaine dernière une déclaration à la chaîne publique espagnole TVE 1, dans laquelle il a souligné la nécessité de consulter le peuple sahraoui qui est le seul à même de décider de son avenir. La sortie du chef de la diplomatie européenne a fait beaucoup de mal aux autorités marocaines qui se gargarisaient il y a peu d’avoir mis les Européens dans leur poche. Cela à tel point que le MAE marocain a annulé une rencontre avec Joseph Borrell.

    L’autre balle assassine est venue des Allemands qui, malgré qu’ils ont accepté de jeter un coup d’œil à l’arnaque politique appelée « plan d’autonomie marocain » restent respectueux des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU se rapportant au conflit du Sahara Occidental. La ministre fédérale allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a réitéré à ce propos jeudi le soutien de son pays au processus mené par les Nations unies pour une solution politique « réaliste » et « durable » au dossier du Sahara occidental. Dans le document, tous les observateurs auront noté qu’il est question du « Sahara occidental », appellation que Rabat a acceptée pour désigner les territoires occupés. Les deux parties ont convenu, en outre, de « l’exclusivité de l’ONU dans le processus politique » et « réaffirment également leur soutien à la MINURSO » (Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental), un aveu implicite du Maroc que la solution à ce dossier passe par la tenue d’un référendum d’autodétermination pour le peuple sahraoui.

    Et enfin, le coup de grâce a été porté jeudi au Maroc par le président tunisien Kaïs Saied qui a refusé d’obéir aux injonctions du Makhzen et d’interdire au président de la République arabe Sahraouie démocratique (RASD), Brahim Ghali, de participer aux travaux de la TICAD 8 (Sommet Afrique-Japon) qui se tiennent actuellement à Tunis. L’exigence du Makhzen est surréaliste du moment que la RASD est membre fondateur de l’Union africaine (UA). Rien qu’à ce titre, les Sahraouis ont le droit le plus absolu de participer à tous les rendez-vous de UA. Même Kaïs Saied n’aurait pas eu le droit de tenir à l’écart le président de la RASD. La réaction hystérique du MAE marocain Nacer Bourita à l’égard de la Tunisie a étonné les observateurs surtout que Mohammed VI a fini par prendre l’habitude de croiser Brahim Ghali dans le sommet de l’Union africaine et surtout de se faire à l’idée que la RASD est une réalité incontournable. La décision de Bourita de rappeler l’ambassadeur du Maroc à Tunis traduit en réalité le profond désarroi du Makhzen sur la question du Sahara Occidental.

    Nullement impressionné par les gesticulations du Maroc, la Tunisie a elle aussi rappelé son ambassadeur à Rabat pour consultations suite à la réaction marocaine « inacceptable ». Dans un communiqué publié, hier, le ministère tunisien des Affaires étrangères a exprimé ainsi son « profond étonnement face à ce qui a été déclaré dans un communiqué du Royaume du Maroc ». Insistant sur « sa neutralité et son respect pour la légalité internationale », la Tunisie s’est dite engagée « à respecter les résolutions onusiennes au même titre que celles de l’Union africaine (UA) dont le pays est l’un des membres fondateurs ». « Il convient de préciser dans ce cadre que l’Union africaine, en tant que principal participant à cette conférence, avait appelé tous ses membres, y compris la RASD, à y prendre part », ajoute la même source.

    Balayant d’un revers de la main les allégations mensongères de la diplomatie marocaine, le ministère tunisien des Affaires étrangères n’a pas manqué également de préciser que l’UA avait ensuite adressé une invitation individuelle, à la RASD, en application des décisions de son Conseil exécutif lors de la réunion les 14 et 15 juillet à Lusaka, en présence d’une délégation marocaine. Il n’y a pas à dire, le Maroc est isolé et dos au mur. De plus, il a été pris en flagrant délit de mensonge. Au-delà, le Makhzen confirme qu’il est un danger pour toute la région.

    La Sentinelle, 28/08/2022

    #Maroc #Tunisie #Sahara_Occidental #TICAD